2.2.3 L'ethos de « compétence »
L'ethos de « compétence » exige de quelqu'un
qu'il possède à la fois savoir et savoir-faire : il doit
connaître parfaitement le domaine particulier dans lequel il exerce son
activité, mais il doit également prouver qu'il a les moyens, le
pouvoir et l'expérience nécessaires pour réaliser
concrètement ses objectifs en obtenant des résultats positifs.
Donc les hommes politiques doivent révéler leurs
compétences quant à la vie politique et démontrer que
leurs méthodes sont efficaces. Il arrive parfois que ce soit l'homme
politique lui-même qui par ses déclarations mette en
évidence les caractéristiques de son parcours pour évoquer
cet ethos de compétence. Cela peut être un héritage, des
études, des fonctions exercées, son expérience de
l'âge ou celle acquise tout au long de sa carrière
professionnelle.
Exemple 14 « Je le dis modestement,
avec mon expérience, non pas de Premier ministre ou de ministre de
l'Intérieur, mais d'élu de la banlieue parisienne, de maire
d'Évry pendant onze ans : les mots que j'ai utilisés hier, en
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parlant de processus de ségrégation, de
ghettoïsation, d'apartheid territorial, social, ethnique, pour un certain
nombre de quartiers, je les ai toujours employés car, comme d'autres,
ici, sur tous les bancs, j'ai vécu directement les situations qu'ils
désignent »14.
Au cours des années, le locuteur a prouvé ses
qualités et ainsi il a évolué progressivement dans sa
carrière professionnelle et politique. Le fait d'être maire
d'Évry pendant onze ans signifie que le sujet parlant possède des
compétences nécessaires pour réaliser des projets et
effectuer des changements dont le but est d'apporter des améliorations
et des résultats favorables. Ces deux mandats signifient
également que les électeurs sont plutôt satisfaits de ses
actes et décisions politiques à la tête de leur ville.
Ministre de l'Intérieur et Premier ministre sont deux postes demandant
plus de responsabilités et d'engagements envers, cette fois-ci, tout le
peuple français. Le locuteur lui-même met en lumière ses
connaissances acquises par la pratique, ainsi son niveau d'estime de soi est
élevé.
Les ethos de crédibilité sont un moyen pour
l'homme politique de montrer son vrai visage et de prouver qu'il se sent
capable d'obtenir un poste élevé demandant un grand nombre de
responsabilités et d'engagements vis-à-vis du peuple.
Dans le chapitre suivant, par le biais de ses propos nous
essayons de révéler le côté affectif du locuteur.
Pour ce faire, nous vous proposons une analyse de différents types de
déictiques et de subjectivèmes afin de mettre en évidence
des éléments particulièrement subjectifs.
14 op. cit. 21 janvier 2015
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CHAPITRE 3. De la subjectivité dans le langage 3.1
Les déictiques
Catherine Kerbrat-Orecchioni nous propose une
définition pour mieux assimiler la fonction des déictiques : ce
sont les unités linguistiques dont le fonctionnement
sémantico-référentiel implique une prise en
considération de certains des éléments constitutifs de la
situation de communication :
- le rôle que tiennent dans le procès
d'énonciation les actants de l'énoncé
- la situation spatio-temporelle du locuteur, et
éventuellement de l'allocutaire (Orecchioni 2006 : 41).
Il s'avère nécessaire de préciser que le
référent d'une unité déictique est variable et ce
dernier varie selon la situation, contrairement au sens qui reste constant d'un
emploi à l'autre. Toute unité linguistique voit son
référent varier d'une énonciation à l'autre. Il
existe une différence fondamentale entre unités déictiques
et unités non déictiques. Ces dernières ont un denotatum
(classe d'objets que l'item est virtuellement susceptible de dénoter)
relativement stable. En revanche si les unités déictiques
reçoivent bien en discours un référent spécifique,
ne possèdent pas, en langue, de denotatum spécifiable.
C'est-à-dire que pour la plupart des unités lexicales, la
synonymie peut être définie soit en termes d'identité de
contenu sémantique, soit en termes d'identité d'extension. Cela
veut dire que deux mots ayant même sens possèdent en principe la
même classe de dénotés virtuels (le même denotatum)
et inversement. Sauf que pour les déictiques il ne s'agit pas de la
même règle, et il faut bien avoir en tête que
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2 mots déictiques peuvent avoir la même extension
sans être pour autant synonymes. (Orecchioni 2006 : 42).
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