4.3. Milieu humain
La chefferie de Ngweshe est peuplée essentiellement des
Bashi. Seuls les groupements de Mulamba et Tubimbi contiennent quelques
hameaux peuplés des Barega et le groupement de Kamanyola est
habité en certains endroits par les Bafulero et les bavira. La
chefferie compte seize groupements (Burhale, Ikoma, Irongo Izege, Kamanyola,
Kamisimbi, Kanyola, Karhongo (Nyangezi), Lubona, Luciga, Lurhala, Mulamba,
Mushinga, Nduda, Tubimbi et Walungu).
La langue parlée est le mashi à laquelle se
greffent le swahili et le français. La religion est dominée par
les croyances chrétiennes et musulmanes. La colonisation et le
christianisme ont dessouché toutes les croyances et pratiques animistes,
les rites et les mythes de Lyangombe (une divinité longtemps
vénérée dans les royaumes du Bushi, du Rwanda et du
Burundi). Dans les villages habités par les Barega, dans les
groupements de Mulamba et Tubimbi, il existe encore des rites à
Kimbirigiti : le bastion inconnu et indéfini de la culture rega.
La colonisation a contribué très largement
à l'acculturation de peuple Bashi, c'est tout un processus de
changement culturel ayant résulté des contacts entre les cultures
européennes imposées aux Bashi par le colonisateur belge et qui
se poursuit jusqu'à ce jour à travers les acquis de la
colonisation : Eglises, écoles, ONG... Cet état de chose a
contribué à la dénaturalisation du Mushi qui a perdu petit
à petit son identité culturelle, ses croyances et ses coutumes,
sa solidarité clanique et familiale, ses historiettes, ses devinettes,
ses héros, sa force médicamenteuse, sa vie communautariste pour
s'insérer dans un capitalisme lui imposé par l'homme blanc, un
système dans lequel il a eu du mal à s'intégrer. Cette
acculturation a touché beaucoup d'aspects de la vie du mushi, même
la langue.
A ce jour, on peut constater que les Bashi ont
été désappropriés petit à petit de leur
langue qu'ils ne maîtrisent plus ou qu'ils maîtrisent mal. Ils ont
perdu même leur histoire, car pour le colonisateur, les ancêtres
des Bashi n'étaient que des païens, des sorciers, des
démoniaques ; se référer à eux reviendrait
à s'écarter de la volonté de Dieu (leur Dieu imposé
aux Bashi) et devenir ainsi enfant du diable pour, enfin, vivre
éternellement dans un feu ardent de la géhenne. Ainsi, peu
à peu, on a eu de nouveaux noms
« chrétiens », de nouveaux comportements, des
modèles de chez eux appelés des saints.
Il faudra encore beaucoup de temps pour que le mushi se
retrouve, recouvre son histoire, sa culture, reconnaisse ses héros, les
valeurs et les coutumes du Bushi et qu'il se réinsère, ainsi,
dans sa richesse traditionnelle, celle de la solidarité et de la
cohésion sociale shi bien que ces dernières soient
considérées par beaucoup de théoriciens comme des facteurs
de sous-développement.
Le peuple Bashi de Ngweshe est essentiellement éleveur
et cultivateur. On y élève le gros et le petit bétail, les
caprins et la volaille. Les cultures sont vivrières (manioc, banane,
plantain, patate douce, igname, haricot, sorgho, légumes...) et
industrielle (théier, quinquina, café...). On y trouve aussi
beaucoup d'arbres fruitiers et d'autres arbres sont cultivés pour des
fins environnementales, pour la construction et la chauffe.
Si l'on peut reprocher au colonisateur d'avoir
acculturé le mushi, on lui reconnaîtra, cependant, et avec
beaucoup de reconnaissance, bien de mérites. Sans vouloir être
exhaustif dans l'énumération de ces mérites, nous citerons
la scolarisation et l'amélioration des conditions sanitaires et
hygiéniques. En effet, ce sont ces deux aspects qui ont réduit
très sensiblement l'ignorance, la mortalité à tous les
âges et contribué, ainsi, à l'accroissement de la
population telle qu'elle se présente dans le tableau
ci-dessous :
Tableau n° 6 :
Répartition de la population de Ngweshe par groupement et par
catégories sociales au 31 décembre
2011.
N°
|
Groupement
|
Hommes
|
Femmes
|
Garçons
|
Filles
|
Total
|
01
|
Lurhala
|
14 088
|
16 261
|
21 297
|
22 173
|
73 819
|
02
|
Kaniola
|
9 079
|
11 744
|
16 840
|
19 054
|
56 717
|
03
|
Karhongo
|
8 573
|
10 367
|
14 208
|
16 219
|
49 367
|
04
|
Walungu
|
8 175
|
10 398
|
13 658
|
16 878
|
49 109
|
05
|
Kamanyola
|
8 390
|
10 564
|
13 690
|
14 133
|
46 777
|
06
|
Burhale
|
7 659
|
10 746
|
12 057
|
12 094
|
42 556
|
07
|
Kamisimbi
|
6 334
|
7 829
|
11342
|
11756
|
37 261
|
08
|
Mulamba
|
7 464
|
8 768
|
10 299
|
10 438
|
36 969
|
09
|
Ikoma
|
6 749
|
8 415
|
10 291
|
11 117
|
36 572
|
10
|
Izege
|
4 199
|
5 011
|
9 890
|
9 985
|
29 085
|
11
|
Luchiga
|
5 634
|
6 155
|
10 362
|
6 635
|
28 786
|
12
|
Irongo
|
5 010
|
5 525
|
7 591
|
7 830
|
25 956
|
13
|
Mushinga
|
4 469
|
6 188
|
7251
|
7 504
|
25 412
|
14
|
Nduba
|
4 110
|
4 963
|
7 263
|
7 150
|
23 486
|
15
|
Tubimbi
|
4 779
|
5 579
|
5 609
|
5 981
|
21 948
|
16
|
Lubona
|
3 079
|
3 558
|
5 343
|
5 506
|
17486
|
|
Totaux
|
107 791
|
132 071
|
176 991
|
184 453
|
601306
|
Source : Rapport du quatrième trimestre 2011
de l'Etat civil de la chefferie de Ngweshe
Figure n°3 : Répartition de la population de
la chefferie par groupement.
Commentaire :
Ces effectifs démographiques sont ceux de tous les
seize groupements composant la chefferie. Ils ont pour but de nous fixer une
idée sur ce qu'est la population au sein de l'entité. Ils
demeurent cependant relativisables du fait que nous ne nous fions ni en ces
personnes qui les ont récoltés ni aux techniques de
récolte. Quelle population a-t-elle été prise en
compte ? Celle de fait (personnes
présentes plus les étrangers présents sur le lieu au
moment du « recensement » ou du dénombrement
démographique) ou celle de droit (personnes
présentes plus les absents du milieu, moins les personnes
étrangères présentes sur le lieu au moment du
dénombrement) ? Tout le monde a-t-il été pris en
compte dans un pays où la notion de récemment n'existe pas ?
L'on se rappellera que le dernier récemment scientifique avait eu lieu
au Zaïre (l'appellation de la RDC d'alors) en 1985.
Tout compte fait, à travers ce tableau, nous
remarquons que le groupement de Lurhala était le plus peuplé de
la chefferie (avec ses 73 819 personnes) en 2011, alors que celui de
Lubona, (comptant 17 486 personnes) en était le dernier sur la
liste. Il aurait été important que la superficie de chaque
groupement soit connue, ce qui permettrait de connaître la densité
de chacun d'eux.
Tableau n° 7 : Répartition de la
population de Ngweshe par tranches d'âges
Tranches d'âges
|
Effectifs
|
0-4 ans
|
113 117
|
5-9
|
104 638
|
10-14
|
95 264
|
15-19
|
80 833
|
20-24
|
29 582
|
25-29
|
26 456
|
30-34
|
23 864
|
35-39
|
20 968
|
40-44
|
19 477
|
45-49
|
17 068
|
50-54
|
16 522
|
55-59
|
15 141
|
60-64
|
11 098
|
65-69
|
9 422
|
70-74
|
6 581
|
75-79
|
5 345
|
80-84
|
3 714
|
85-89
|
1 542
|
90 et plus
|
674
|
Total
|
601 306
|
Source : Bureau d'Etat civil de la chefferie de
Ngweshe
Figure n° 4 : Répartition de la
population de Ngweshe par tranches d'âges au 31 décembre
2011.
Commentaire
Le fait de regrouper la population de Ngweshe en
tranches d'âges nous permet de déterminer les effectifs aux
différents âges, les catégories selon les âges
(jeunes, adultes et vieux), les effectifs dépendants et la population
active au sein de la chefferie, et, par ricochet une analyse sur l'aspect
praxéologique et développemental au sein de cette
entité.
De ce point de vue, la population
dépendante (comprise entre 0 et 19 ans, soit 393 852 personnes et
de 65 ans et au-delà, 27 278 personnes) est chiffrée
à 421 130 personnes, soit 70% de la population globale. La
population active (de 20 - 64 ans) est chiffrée à 180 176
personnes et représente 30 % de la population globale. Le tableau
ci-dessous illustre cette réalité :
Tableau n°7 : Population dépendante
et active de la chefferie de Ngweshe en 2011
Tranches d'âges
|
Type de population
|
Effectifs
|
Pourcentage
|
De 0 - 19 ans
65 ans et plus
|
Population dépendante
idem
|
393 852
27 278
|
65, 5
4, 5
|
20 - 64 ans
|
Population active
|
180 176
|
30
|
Totaux
|
|
601 306
|
100
|
Source : enquêtes sociologiques
Figure n° 5: Population active et dépendante
au 31 décembre 2011.
Commentaire :
De ces données chiffrées, il ressort
clairement que la population de Ngweshe est essentiellement très
jeune : les personnes âgées de moins de vingt ans
représentent 65, 5 % de la population, ceux qui ont franchi l'âge
de 64 ans ne représentent que 4,5 %. Les personnes dont l'âge
varie entre 24 et 64 ans représentent la population active, soit 30 %
de la population globale. Voici des faits et phénomènes qui
découlent de la morphologie d'une telle population :
- effectifs élevés à la naissance
- mortalité infantile et l'âge adulte
très élevée : les personnes ayant
dépassé l'âge de 64 ans ne
représentent que 4, 5% de la population globale
- faible vieillissement de la population : les personnes
de 80 ans et plus sont estimées à 5930, soit 0,9 % de la
population globale
- faible productivité : la population active est
de 30 %. Il s'avère impossible que 30 %, dans un système de
production agricole traditionnelle sur des sols infertiles et
déblayés par des érosions, et parviennent à
nourrir, à sa faim, toute la population de Ngweshe. Il faut même
relativiser le nombre des effectifs que nos appelons, ici,
« actifs », car parmi eux, il y a des inactifs (malades,
handicapés, inconscients, voyageurs), et donc, il se pourrait qu'il y
ait moins de 30% qui s'attèlent au travail quotidien de subsistance
familiale au sein de la chefferie
- prédisposition à la malnutrition suite
à la taille de la famille très élevée,
l'insuffisance du travail, l'infertilité du sol, la mosaïque du
bananier et du manioc.
|