La. question de la souveraineté et du nationalisme africain face aux processus d'intégration sous régionale en Afrique subsaharienne: le cas de l'Afrique centrale( Télécharger le fichier original )par Willy MUKADI SABUE Université Officielle de Mbujimayi - Licence en Relations Internationales 2016 |
II.2.2. Les mécanismes d'intégration régionale en AfriqueLe souci de faire de l'Afrique un grand pool émergent et un continent comme tant d'autre a conduit les chefs d'Etats africains, à travers l'OUA aujourd'hui UA, à mettre en place des mécanismes pouvant permettre l'intégration continentale. Ainsi, une foison de projets intégrateurs ont eu jour pour booster le processus d'intégration économique et politique du continent afin de procurer prospérité, paix et bonheur aux populations africaines.49(*) Le Plan d'Action de Lagos (PAL) définissant les programmes et stratégies visant à promouvoir un développement auto-entretenu et la coopération entre les pays africains ; le Plan Prioritaire de Redressement Economique en Afrique élaboré en 1985 ; le Programme d'Action de Caire de 1995 qui visait à relancer le développement économique, politique et social en Afrique ; le Traité d'Abuja (TA) de 1991 qui ouvre un autre horizon au processus d'intégration en Afrique par la création de la commission (communauté) économique Africaine (CEA), sont autant des mécanismes d'intégration régionale en Afrique. LeTraité d'Abuja institue la Communauté Economique Africaine comme base du processus d'intégration régionale en Afrique. Le PAL a pour mission de promouvoir le développement économique et social, par un développent autocentré, par l'intégration des marchés régionaux et une politique industrielle d'import-substitution. Ce traité qui entre en vigueur en 1994 pose la CEA sur les piliers qui sont les CER. Actuellement, 8 (huit) CER forment le paysage africain et sont reconnues parmi tant d'autres comme fondement du développement économique de l'Afrique. Ces CER sont notamment le Marché Commun pour l'Afrique de l'Est et Australe (COMESA) ; la Communauté Economique pour le Développement de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) ; la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC) ; la Communauté pour le Développement de l'Afrique Australe (SADC) ; l'Autorité Intergouvernementale pour le Développement (IGAD) ; la Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (SEN-SAD) ; la Communauté de l'Afrique de l'Est (CAE) ; et enfin l'Union de Maghreb Arabe (UMA).50(*) Ces CER avaient pour mission, accélérer le processus d'intégration en Afrique, et cela, en six étapes couvrant trois décennies : Ø Première étape (1994-1999) : le renforcement des CER existantes et création d'autres ; Ø Deuxième étape (1999-2007) : stabilisation des barrières tarifaires et non tarifaires ; harmonisation progressive des politiques de mise en oeuvre des programmes multiples dans les domaines en occurrence, l'agriculture, l'industrie, les transports, la communication et l'énergie, création des zones de libre-échange et des unions douanières ; Ø Troisième étape (2007-2017) : Consolidation des zones de libre-échange, des Unions douanières et adoption d'un tarif extérieur commun (TEC) ; Ø Quatrième étape (2017-2019): Réalisation du marché commun africain pour aboutir à la libre circulation des personnes et de biens dans la région ; Ø Cinquième étape (2019-2023 : consolidation du marché commun Africain au niveau continental, aboutissement de la quatrième étape ; Ø Sixième étape (2023-2028) : consolidation de la vision de la CEA et réalisation d'une intégration économique, politique, sociale et culturelle totale, la création d'une Banque centrale africaine unique, d'un parlement panafricain et d'une union économique monétaire africaine. En vue d'atteindre ces objectifs, les CER ont inséré dans leurs traités les quatre piliers reconnus par la CEA pour accélérer le processus d'intégration régionale en Afrique dont nous pouvons souligner : - L'intégration du commerce et des marchés ; - La convergence des politiques macro-économiques, l'intégration financière et monétaire ; - La paix, la sécurité et stabilité ; - L'harmonisation des politiques sectorielles dans les infrastructures, les ressources naturelles, le climat, l'alimentation, le genre et l'agriculture. En dépit de ces mécanismes institutionnels pouvant d'office être les pierres angulaires de la CEA, l'organisation continentale considère six autres organisations comme des « communautés économiques sous régionales (CESR) qui sont notamment : la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC) ; la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) ; l'Union Economique et Monétaire Ouest-Africain (UEMOA) ; l'Union du Fleuve Mano (MRU) ; l'Union d'Afrique Australe (SACU) et la Commission de l'Océan Indien (COI).51(*) A la suite des échecs enregistrés par l'OUA dans le domaine de l'intégration régionale, étant donné qu'elle était créée comme une organisation de coopération politique afin de promouvoir et accélérer la décolonisation du continent, le 9 juillet 2001 à Lusaka, l'Union Africaine est créée pour succéder à l'OUA, qui sera inaugurée au sommet de Durban (RSA) de 2002. L'UA, actrice d'un « nouveau régionalisme ou du renouveau » en Afrique s'est fixée pour objectif de devenir une union économique et monétaire, avec la libre circulation des biens et des services et les facteur de production, grâce à la collaboration des CER pour achever la CEA en 2027 et les Etats-Unis d'Afrique en 2034. Dans un contexte où les OIR (Organisations d'Intégration Régionale) doivent jouer un rôle de vecteurs d'intégration régionale, l'UA est censée jouer un rôle de « coordination et de suivi de l'intégration au niveau des huit CER qu'elle a reconnues. Dans cette logique, la Commission de l'UA (CUA), à travers son département des affaires économiques dans la division de l'intégration, prépare chaque année depuis 2008, un rapport sur l'Etat de l'intégration en Afrique, approuvé par la conférence des Ministres Africains de l'intégration (COMAI) organisée annuellement en présence des organisations régionales. Un programme Minimum d'intégration (PMI) a également été élaboré au niveau continental depuis Mai 2009, en vue de traiter de la question de la « rationalisation » des CER grâce à une approche basée sur la concertation et l'harmonisation. Le NEPAD adopté depuis 2001 avait pour objectifs fondamentaux la fourniture au niveau régional, des biens publics essentiels (transports, énergie, eau, technologies de l'information et de la communication, lutte contre les maladies, prévention de l'environnement et le développement des capacités de recherche au niveau régional), ainsi que de promouvoir le commerce et les investissements intra-africains. L'idée est de rationaliser le cadre institutionnel en vue d'une intégration économique à travers des projets communs compatibles avec les programmes de développement intégré aux niveaux national et régional. Tous ces efforts concertés, qui ont conduit en 2006, l'UA et le NEPAD de concevoir et élaborer le plan d'action pour l'Afrique ne visaient que l'accélération du développement africain à travers le processus d'intégration régionale afin de l'insérer dans l'économie mondiale sous le monopole de la mondialisation. II.2.3. L'intégration régionale africaine face à la mondialisation Dans le contexte de la mondialisation, le continent africain, hier accusé d'être mal parti dans les années 1960, se trouve aujourd'hui courtisé par les colosses au XXIème siècle en particulier les Etats Unis d'Amérique, la Chine, l'Inde en plus des amis d'hier, de la Françafrique et du Commonwealth.52(*) Même si le continent fait figure d'un grand absent, il subit et contribue à la nouvelle mondialisation. Aujourd'hui, la mondialisation est la tendance la plus importante qui est à la base des conditions actuelles du développement économique. Les principaux modes ou indicateurs de cette intégration économique mondiale sont le commerce extérieur, l'investissement direct à l'étranger, et les mouvements internationaux des capitaux. La preuve de la mondialisation en cours est le fait que le taux de croissance de chacun de ces indicateurs a été plus rapide que celui de la production mondiale. Pour tirer parti de la plus part des opportunités offertes par la mondialisation, et pour gérer également les risques, la première chose à faire est de chercher à comprendre la nature des forces qui dirigent l'économie mondiale ainsi que leurs incidences pour la gestion de l'économie en Afrique. Un certain nombre de facteurs semblent alimenter le processus de la mondialisation53(*) 1) Les progrès rapides de la technologie des communications et des transports ont fait baisser les coûts du transfert des marchandises, des capitaux, des personnes et de l'information ; 2) La mondialisation désigne l'élargissement de la portée géographique des activités commerciales des sociétés transnationales et des institutions financières privées. 3) La mondialisation désigne également l'ampleur accrue de l'intégration multinationale réelle des marchés des biens, des services et des facteurs de production ; 4) Mondialisation désigne le degré plus élevé d'uniformité des cadres de politique et des cadres institutionnels déterminant les règles du jeu des actions et interactions économiques de la part des agents privés domiciliés dans divers pays. L'interaction de ces facteurs conduit sans doute à l'économie mondiale vers une plus grande interaction comme vers une plus grande intégration des économies nationales. Cependant, la géographie économique et politique de l'Afrique pose des défis pour son développement économique. De nombreux pays africains sont trop petits et trop balkanisés pour offrir des économies d'échelle substantielles à l'appui d'un investissement rentable et 15 (quinze) pays de la région sont enclavés. Cet état de choses et la nature régionale plutôt que mondiale de la majeure partie des relations internationales semble indiquer que les pays africains accordent une priorité élevée aux efforts visant à créer un dynamisme sous-régional et régional que leur insertion dans la compétitivité économique mondiale. C'est dans ce cadre que le NEPAD a été adopté comme un levier d'émancipation et de réponse à la balkanisation de l'Afrique face aux défis posés par le processus de mondialisation. Ce mécanisme vise à favoriser l'émergence d'un leadership politique et économique continental susceptible de servir de base à des relations rénovées de partenariat avec les pays du Nord et le secteur privé, pour ainsi insérer le continent dans le commerce et l'économie mondiales. Les efforts cumulés par l'UA et les CER pour insérer le continent dans le commerce mondial n'ont enregistré qu'une marge très insignifiante de l'impact de l'économie africaine dans le système économique mondial qui est aiguisé par les multinationales. La marge des échanges intra-africains est toujours moindre par rapport aux importations qui viennent d'autres régions du monde. Les productions de l'Afrique ne sont constituées que d'une monoproduction, c'est-à-dire production des seules matières premières à l'état brut. Pour accroitre la participation de l'Afrique dans la mondialisation, malgré les efforts consentis dans le cadre de l'intégration régionale, il faut que les africains puissent s'engager dans la création d'un environnement macro-économique stable ( maintenir bas leurs taux d'inflation, contrôler leurs déficits budgétaires, maintenir la stabilité de leurs taux de change, maitriser leur dette extérieure, maintenir stable et positif leurs taux d'intérêt réels) ; libéraliser le commerce mais avec prudence ; mettre à profit les opportunités d'un dynamisme régional ; l'intégration des marchés nationaux dans les marchés sous régionaux en construisant des réseaux régionaux d'infrastructures dans les domaines divers. II.3. Evaluation du processus d'intégration régionale en Afrique Depuis les années 1990 où le continent s'est lancé dans le processus proprement dit d'intégration régionale après plus de deux décennies consacrées à la décolonisation et à la confirmation de la souveraineté internationale des pays africains, plusieurs efforts se sont déployés à travers l'UA, les CER et bien d'autres mécanismes initiés pour accélérer et appuyer l'intégration continentale. C'est dans cette perspective que nous sommes en clin, dans cette partie de ce travail, de présenter les regroupements d'intégration régionale ou sous régionale en Afrique ; l'Etat de lieu de ce processus et les défis et perspectives à relever pour un bon avenir du continent. * 49NGUETTIA K, « L'intégration en Afrique : pourquoi peine-t-on à l'accélérer » ?, In Revue africaine d'intégration, vol5, N°1, Addis-Abeba, Octobre 2011, p. 59. * 50CEA, Etat d'intégration régionale en Afrique : vers une zone de libre-échange continentale africaine, Addis-Abeba, 2012, p. Xi. * 51 SALOMON J.M., MAMATY I, Et alii, Op.cit, p. 14. * 52BOUSNINA M., L'Afrique face aux défis de la mondialisation : nécessaire d'un développement humain conséquent, UNESCO, Tokyo, Septembre 2009, p.1 * 53ARYEETEY E, COURT J., Et alii, Le renforcement de la participation de l'Afrique à l'économie mondiale, UNU-CREA, Nairobi, 1998, p.14 |
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