Les relations entre la république démocratique du Congo et ses voisins après l'avènement de l'AFDL ( Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo). Contraintes des enjeux géostratégiques et recherche d'une paix durable( Télécharger le fichier original )par Fulgence ALITRI TANDEMA Université de Kinshasa RDC - Diplôme d'études approfondies en droits de l'homme, Option: prévention, médiation et gestion des conflits 2005 |
II. Le régime Mobutu et la PerestroïkaLa géopolitique de la guerre froide avait façonné le Président Mobutu pour sa cause. C'est ainsi que la fin politique de Mobutu était liée à la Perestroïka. La fin de la guerre froide a modifié la configuration géopolitique du monde en général et de l'Afrique centrale en particulier. Les Etats Unis se retrouvent seuls comme maître du monde. Mais la RDC est toujours un enjeu géostratégique pour l'Occident. La chute du mur de Berlin a soufflé la démocratie. Ce vent n'a épargné aucun pays africain. Les présidents entretenus pendant la guerre froide, qui ont régné en dictateur, sont contraints de se convertir en démocrates, d'ajuster leurs tirs, d'abolir leurs Partis-Etats. Ceux-ci s'étaient instaurés dans le cadre de la géopolitique bipolaire, opposant le camp occidental patronnant les hommes forts comme le maréchal Mobutu et le MPR au Zaïre, au camp oriental, protecteur du président Neto et du MPLA, Parti du Travail en Angola.94(*) Coïncidence malheureuse pour Mobutu malade. Le souci de maîtriser la RDC conduit les Américains à vérifier la santé de Mobutu. Ainsi « en septembre 1996, les services de renseignement des Etats Unis ouvrent le dossier médical de Mobutu Sese Seko. Les médecins y parviennent que le président du Zaïre n'a plus que deux années à vivre parce qu'atteint d'un cancer de la prostate. Les responsables du département Afrique au Pentagone se sont alors mis à la recherche d'un nouvel homme fort pour l'après-Mobutu ».95(*) En effet, en RDC, il y a eu succession des événements remarquables. La chute du Parti-Etat, le M.P.R. de Mobutu et le processus de la démocratisation du pays. La guerre de la libération du Rwanda, la mort du Président Juvénal Habyarimana et l'arrivée du FPR au pouvoir ont eu pour conséquences la fuite des Forces Armées Rwandaises, armées vaincues et des milicesInterahamwe et les refugiés pour s'installer à l'Est de la RDC. Il convient de noter qu'à part ces événements susmentionnés, les événements d'ordre purement factice, il ne faut pas non plus oublier le rôle des maîtres du monde. Ceux-ci qui ont fabriqué le Président Mobutu pour régner trois décennies durant, ont profité de ces événements de l'Est de la RDC pour changer les donnes géopolitiques : trouver un remplaçant à la tête de la RDC. Pour Colette Braeckman, il y a aussi des erreurs que Mobutu n'aurait pas pu commettre devant ses maîtres qui lui ont coûté trop cher : « En outre, par désintéressement ou inadvertance, le président Mobutu va commettre deux erreurs qui achèveront de le condamner aux yeux des américains. Il tolère que ses généraux, de mèche avec les trafiquants libanais, protègent des opérations de blanchissement d'argent de la drogue (les dollars à recycler sont envoyés dans les régions minières où ils servent à acheter les diamants extraits par les creuses) et se livrent à d'importants trafics d'armes. Surtout, il donne satisfaction aux Français sur un point sensible : les relations avec le Soudan. Alors que par le passé Mobutu a entretenu des relations cordiales avec John Garang, le leader du Mouvement Indépendantiste du Sud du Soudan (SPLA : Armée Populaire du Sud du Soudan), il cède aux requêtes françaises et autorise Paris à utiliser le nord de son pays pour venir en aide au régime islamiste de Khartoum.96(*) Au fil des années, le Président Mobutu, devenu une sorte de paria de luxe depuis qu'il a torpillé la démocratie, a été le seul à tirer bénéfice de la tragédie rwandaise : en juin 1994, le maréchal a en effet été personnellement prié par la France d'accueillir les réfugiés rwandais en terre zaïroise et d'autoriser l'opération Turquoise à utiliser Goma comme base arrière. Cet accord lui a valu des avantages immédiats : la France a brisé l'embargo diplomatique qui le frappait, le maréchal a retrouvé cette scène internationale qu'il aimait tant : il s'est même offert le luxe de plaider en faveur des réfugiés hutu lors du sommet social organisé par l'ONU à Copenhague.97(*) Ce lien privilégié qu'entretenaient Mobutu avec la France était naturellement contre les intérêts anglo-saxons dans la région. Totalement isolé sur la scène internationale depuis 1990-il n'est plus reçu nulle part, si ce n'est dans les arrière-cuisines,-gravement miné par la maladie, le Président Mobutu n'a pourtant plus les moyens de sa politique. De plus en plus coupé des réalités zaïroises-il vit replié dans son village de Gbadolite-et internationales-notamment la fin de la guerre froide-, le Président Mobutu n'a plus une bonne vision d'ensemble de la situation et n'est plus à même d'assurer pleinement sa fonction de premier représentant de l'Etat. 98(*) Quelle coïncidence malheureuse ! Or, le Zaïre Mobutu n'est pas seulement fragilisé par la maladie de son chef, l'incurie des généraux et le désaveu des Américains, il va être l'un des premiers pays à faire les frais de la nouvelle donne apparue avec la fin de la guerre froide et confirmée après le génocide au Rwanda. Mobutu fini, l'important reste maintenant sa succession. * 94Remy BAZENGUISSA(14/06/2006). La région des Grands Lacs. http://www.ceaf.ehss.fr/document * 95Vincent MBAVU MUHINDO, Le Congo-Zaïre d'une guerre à l'autre, de libération en occupation (chronique1996-Lusaka 1999), Paris, Editions de l'Harmattan, 2003, p. 12 * 96 Colette BRAECKMAN, op. cit. * 97 Ibidem * 98Olivier LANOTTE, République Démocratique du Congo, Guerre sans frontière, De Joseph-Désiré Mobutu à Joseph Kabila, Bruxelles, Editions GRIP-Editions Complexe 2006 p. 6 |
|