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La traite des enfants immigrés dans les plantations de café- cacao de Côte d'Ivoire( Télécharger le fichier original )par Koffi Justin Dr KOUASSI Université Félix Houphoàžet- Boigny de Cocody - Thèse de doctorat unique 2010 |
Conclusion de la deuxième partieCette deuxième partie relative aux résultats repose sur deux points : la description du phénomène d'une part et les facteurs susceptibles de l'expliquer ainsi que les éventuelles conséquences d'autre part. Le premier est relatif à la description des caractéristiques socio économiques et démographiques (âge, sexe, niveau d'instruction, situation socio professionnel) des principaux acteurs et des acteurs secondaires, suivie de celle des manifestations du phénomène. La description et interprétation des manifestations, relatent en effet, les conditions dans lesquelles, les enfants immigrés (Togolais, Burkinabés, maliens...) accomplissent les travaux dans les plantations. Elle met à nu les activités, le rythme et le volume de travail auxquels ils sont soumis, lesquels sont moins fonction de l'âge et de la catégorie du travailleur que des liens de parenté affirmés ou non avec le planteur. Quant aux conditions de vie des enfants dans les campements et villages, qui, elles dépendent des conditions de travail, elles ne sont pas tout à fait différentes pour ce qui est des enfants actifs. Elles paraissent d'autant plus similaires que l'ensemble des enquêtés (les planteurs et les enfants ainsi que les acteurs secondaires, les responsables institutionnels et d'autres responsables de service) expliquent en majorité le travail des enfants dans les plantations de café - cacao selon les mêmes facteurs: la pesanteur de la tradition socioculturelle africaine, l'indigence socio économique des parents, le faible niveau de mécanisation des systèmes agricoles et l'insuffisance ou la faible application des textes juridiques. Le même constat est fait pour ce qui est de chaque département. Les conséquences liées au travail en plantation sont exprimées en terme de blessures causées à la machette, notamment et concerne aussi des difficultés psychologiques. En ce qui concerne les avantages, elles sont multiples et relatives surtout à l'intégration sociale de l'enfant. Il s'agit également des avantages pécuniaires que les parents et les enfants tirent de leur travail. I- INSTRUMENTS JURIDIQUES La législation protectrice des enfants en général et des enfants travailleurs en particulier est abondante. Malheureusement, ces instruments juridiques sont très peu connus et quand bien même ils sont connus par certains, ceux-ci ne sont pas appliqués et les personnes qui exploitent des enfants ne sont pas toujours sanctionnées.
L'enfant comme mentionné précédemment est toute personne de l'un ou l'autre sexe âgé de moins de 18 ans selon la Convention des Nations Unies relative aux droits des enfants, la Charte africaine des droits des enfants et la Convention 138 de l'OIT sur l'âge minimum. Tous ces instruments juridiques ont été ratifiés par la Cote d'Ivoire. Cependant, en droit ivoirien il y a une pluralité de définitions de l'enfant. En effet, le droit pénal considère comme mineur l'individu de l'un ou l'autre sexe âgé de moins de 18 ans, et la loi sur la minorité considère comme mineur celui qui est âgé de moins de 21 ans (code pénal article 1er, et la loi de 1970 sur la minorité en son article 1er). Cette pluralité de la notion de mineur est source de contradiction et est préjudiciable aux enfants, car comment comprendre qu'à 18 ans on soit majeur au niveau pénal et de ce fait apte au service militaire (code de la fonction militaire de 1995) et qu'on soit encore mineur au niveau civil et donc soumis à l'autorité parentale. L'enfant mineur bénéficie, selon la législation, ivoirienne de protection et cette protection est assurée par l'Etat (constitution de 2000 articles 5 et 6) et par les titulaires de la puissance paternelle : père, mère ou tuteur (loi sur la minorité). Ceux-ci doivent le protéger contre les violences et l'exploitation économique ou sexuelle et ils doivent par ailleurs assurer son éducation, sa garde, son entretien (loi sur la minorité de 1970, loi sur le mariage de 1964 modifiée en 1983)80(*). L'enfant ne doit pas choisir lui-même sa résidence, ce qui revient à dire qu'il ne doit pas normalement avoir d'enfant de la rue (la rue n'étant pas une résidence). Il ne doit pas aussi subvenir à ses besoins ni à ceux de ses parents tant qu'il n'a pas atteint l'âge légal pour travailler. La Constitution ou loi fondamentale du 1er Août 2000, interdit le travail forcé et l'esclavage ainsi que tous les traitements cruels, inhumains et humiliants, la torture physique ou morale et toutes les formes d'avilissement des Etres humains en son article 3. La présence de nombreux enfants dans les rues et le nombre d'enfants victimes d'exploitation en Côte d'Ivoire témoignent du désengagement de la famille et de l'Etat de cette mission confiée par la Constitution et par les lois sur le mariage et la minorité. En effet, selon la loi sur la minorité du 3 Août 1970, le mineur doit être assisté par son représentant légal : père, mère ou tuteur dans tous les actes de la vie civile81(*). Le mineur de 16 ans ne peut conclure et rompre seul un contrat de travail. Il doit être assisté de son représentant légal ce qui n'est pratiquement pas le cas en Côte d'Ivoire. En effet, de nombreux enfants travaillent avant l'âge de 16 ans sans l'autorisation du représentant légal et cela dans l'indifférence totale des familles et de l'Etat. Le mineur de moins de 18 ans ne peut conclure et rompre seul son contrat de travail et exercer le commerce. Il a besoin de l'autorisation de ses parents pour se marier.
La Constitution ivoirienne au même titre que la convention 29 de l'OIT de 1930, interdit le travail forcé et l'esclavage de tout être humain. Il en est de même de la loi sur la minorité qui exige la présence des parents du mineur de 16 ans pour la conclusion et la rupture de son contrat de travail. Ceux-ci peuvent, en effet, apprécier la portée du travail confié à leur enfant et discuter de la rémunération ainsi que des conditions dans lesquelles ce travail sera exercé, l'enfant de 16 ans n'étant pas capable d'une telle appréciation. Le Code du travail ivoirien (loi de 1995) assure la réglementation du travail des enfants. Nous citons ici les plus significatifs : ï L'article 23-2 du code de travail fixe l'âge minimum d'accès au travail à 14 ans. Celui-ci interdit de recevoir même comme apprenti un mineur de 14 ans. Avant 14 ans le mineur doit consacrer son temps aux études ou à la formation professionnelle. ï Les travaux de nuit et les travaux dangereux sont interdits (article 22-3 du code de travail). ï L'arrêté n° 2250 du Ministère de l'emploi en date du 14 Mars 2005 a renforcé l'interdiction de la réalisation de travaux dangereux par les enfants de moins de 18 ans. Ces travaux concernent tous les secteurs d'activités (agriculture, commerce, artisanat, transport , voir annexe) ï L'enfant qui travaille doit offrir librement sa force de travail et travailler dans des conditions acceptables. Il ne doit pas être privé de sa liberté de mouvement et il doit percevoir sa rémunération sinon ce travail est assimilable au travail forcé et à l'esclavage interdit par la Constitution, le code du travail dans son article 3 et sanctionné par le code pénal en ses articles 376 et 378. La mise en gage d'un mineur de 15 ans est sanctionnée par un emprisonnement de cinq ans (article 377 du Code de travail). C'est le non respect de cette interdiction du travail forcé par la législation ivoirienne, ainsi que le non respect des conventions internationales ratifiées par la Côte d'Ivoire qui lui a valu le battage médiatique et la menace d'interdiction du cacao ivoirien sur le marché américain en 2001. En effet, il a été constaté que malgré l'existence de textes interdisant le travail forcé, ceux-ci n'étaient pas appliqués. Les enfants sont utilisés par certains employeurs avant l'âge de 14 ans et sont soumis à des travaux pénibles de jours comme de nuits parfois, et cela dans l'indifférence totale, voire coupable, des familles, de la société, de l'Etat. Cette indifférence de l'Etat ivoirien est à déplorer d'autant plus que celui-ci a ratifié la Convention 182 de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) relative aux pires formes de travail des enfants. Celle-ci interdit aux enfants de moins de 18 ans tous travaux qui par leur nature et les conditions dans lesquelles ils s'exercent, nuisent, abusent, exploitent ou privent l'enfant de ses droits à la santé, à l'éducation, au loisir, etc. Les travaux abusifs et les pires formes de travail interdits aux enfants par la Convention 182 de l'OIT en son article 3 et ratifiée par la Côte d'Ivoire sont : ï Toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues telles que la vente, la traite des enfants, la servitude pour dette, le servage, le travail forcé ou obligatoire, (pratiques punies par le code pénal ivoirien en articles 376 à 378) ; ï le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans les conflits armés (interdit par le Code de la Fonction Militaire). ï L'utilisation, le recrutement ou l'offre des enfants à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques, (pratiques punies aussi par le code pénal en ses articles 335 à 337). ï L'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités illicites notamment pour la production ou le trafic des stupéfiants, (pratiques punies par la loi ivoirienne du 23 juillet 1986 sur les stupéfiants). ï Des travaux qui par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s'exercent sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l'enfant. Il convient de souligner que les personnes qui commettent des infractions sur les enfants sont sanctionnées par le Code pénal ivoirien. Celui-ci stipule : ï les violences et voies de fait sur mineures, les privations d'aliments et de soins, les atteintes à leur liberté et à leur vie, les enlèvements d'enfants (articles 362, 370 et 371), ce dernier point d'enlèvements d'enfants étant des éléments constitutifs du délit de la traite d'enfants ; ï la vente d'enfants ou les conventions portant sur la liberté d'une personne par l'article 376; ï le travail forcé, la mise en gage (articles 377 à 378) ; ï l'incitation de mineur à la débauche et le proxénétisme (exploitation sexuelle des enfants, articles 335 à 337) ; ï les coups et blessures volontaires (l'article 345) ; ï les violences sexuelles (articles 354 à 360 du code pénal). Il convient de souligner que faute de loi spécifique sur la traite des enfants, les magistrats législateurs se réfèrent aux articles ci-dessus du code pénal pour réprimer tous ceux qui s'adonnent à l'exploitation d'enfants mineurs. C'est à ce titre qu'entre 2001 et 2006, une cinquantaine de trafiquants a été sanctionnée. D'autres lois et conventions existent en matière de protection des enfants. Ce sont : ï la loi du 23 Juillet 1986 sur les stupéfiants réprimant ceux qui utilisent les enfants pour le trafic des stupéfiants, de même que la Convention relative aux droits des enfants en ses articles 6 (droit à la vie), 28 (droit à l'éducation), droit aux loisirs (article 31), protection contre les violences (article 19), l'exploitation économique (article 32) et sexuelle (articles 34 et 36), protection contre l'enlèvement, la traite (article 35) ; ï la charte africaine des droits des enfants en ses articles 3 (intérêt supérieur de l'enfant), survie et développement (article 5), droit à l'éducation (article 11), protection contre l'exploitation économique (article 15), protection contre les abus (article 16), les pratiques traditionnelles néfastes (article 25), l'exploitation sexuelle (article 27), l'abus des stupéfiants (article 28), l'enlèvement, la traite et la mendicité (article 29) ; ï la loi du 23 Décembre 1998 qui interdit le mariage précoce et forcé des enfants : de nombreux enfants victimes de la traite sont vendus sur le marché pour des mariages arrangés ou la prostitution. En résumé, les Conventions ratifiées par la Cote d'Ivoire : Convention des Nations Unies de 1989 relative aux droits des enfants. Charte Africaine des droits et du bien-être des enfants de 1990, Conventions 138 et 182 de l'OIT sur l'âge minimum et les pires formes de travail des enfants par les juridictions ivoiriennes auraient permis d'assurer une protection maximum aux enfants victimes d'exploitation par le travail si elles étaient appliquées. II- CADRE INSTITUTIONNEL
Ce sont : ï La Primature (projet pilote systèmes de suivi du travail des enfants dans le cacao culture); ï Le Ministère de la Famille, coordonnateur des actions de lutte contre la traite des enfants et son comité national de lutte contre la traite ; ï Le Ministère de l'Emploi et son comité directeur national de lutte contre le travail et les pires formes de travail des enfants, ï Les institutions de répression : Ministères de la Sécurité, de la Défense et de la Justice assurent la protection juridique, judiciaire et l'arrestation des trafiquants et des exploiteurs d'enfants.
Les partenaires au développement que sont l'UNICEF, le BIT/IPE, l'OIM, INTERPOL, la Coopération Allemande, et les ONG nationales et internationales apportent un appui à l'Etat pour la protection des enfants travailleurs et victimes des pires formes de travail.
Les comités de lutte contre la traite et l'exploitation des enfants, et les organisations professionnelles agricoles, spécialement celles de Bouaflé et de Sinfra, assurent la protection juridique, judiciaire, l'arrestation, les sanctions des trafiquants et des exploiteurs d'enfants et la prise en charge des enfants victimes pour une meilleur protection des enfants. I- ACTIONS MENEES
Elle est chargée de superviser le processus de certification du cacao ivoirien suite au protocole signé en 2001 entre les chocolatiers et l'Etat américain. L'Etat ivoirien étant témoin de cet accord, les chocolatiers américains doivent arriver à certifier que le cacao produit en Côte d'Ivoire n'est pas le fruit du travail des enfants esclaves. Il a été donc créé avec les coopérateurs et le gouvernement ivoirien un projet pilote de suivi du travail des enfants dans le cacao culture dans le département d'Oumé au centre ouest de la Côte d'Ivoire. Ce projet pilote du système de suivi du travail des enfants (PPSSTE) est une approche opérationnelle à la question du travail abusif des enfants dans la cacao culture ivoirienne. Cette région a été choisie à partir de certains critères : sa productivité (plus 40 000 tonnes par an, la présence des organisations agricoles et sa représentativité administrative). Ce projet qui s'exerce dans les deux (2) sous-préfectures d'Oumé et de Diégonéfla qui composent le département couvre 06 villages de ses sous-préfectures. Le projet est opérationnel depuis décembre 2004 et le comité départemental de lutte contre le travail des enfants d'Oumé a été installé en janvier 2005. Des équipes d'appui de terrain dans ses six villages sont chargées d'établir un diagnostic participatif de la question du travail des enfants dans les plantations. Elles doivent par ailleurs recueillir les informations relatives au phénomène, recenser le cas d'enfants victimes, identifier les employeurs d'enfants, élaborer un plan d'action en vue de prévenir, remédier et recueillir les informations sur le travail des enfants. Les données recueillies seront publiées sur le site Internet du projet et des rapports juridiques seront disponibles. Des ateliers de formation des acteurs chargés de mener les actions de terrain ont été réalisés en mars et en avril 2005. Ce projet pilote a aussi pour mission principale d'identifier et d'extraire les enfants victimes d'exploitation et de les réinsérer dans le circuit scolaire ou professionnel. Il permettra par ailleurs de suivre le travail des enfants, d'empêcher de nouveaux cas, de pérenniser la prise de conscience des partenaires sociaux et institutionnels quand aux contrôles du travail des enfants et de recueillir toutes informations utiles pour combattre le fléau. En plus de ce projet pilote qui bénéficie de l'appui gouvernemental et du Bureau International du Travail à travers son projet WACAP, le comité départemental a bénéficié de l'appui de la Coopération Technique Allemande à travers son projet de lutte contre la traite et les pires formes de travail des enfants pour une sensibilisation des communautés villageoises en matière de lutte contre le phénomène du travail des enfants dans la cacao culture.
Deux Ministères spécifiques sont chargés du phénomène de la traite et du travail des enfants dans ses pires formes. Ce sont : le Ministère de la famille, de la femme et de l'enfant, et le Ministère de la fonction publique et de l'emploi. Trois (3) autres se chargent de la répression des auteurs de traite et d'exploitation des enfants.
Une cellule de lutte contre le phénomène a été installée. Cette cellule est chargée de coordonner les actions de lutte contre la traite des enfants. Il dispose d'un comité national de lutte contre la traite des enfants créé en 2001. Il a été l'initiateur de l'accord de coopération entre la Côte d'Ivoire et le Mali de 2000 en matière de lutte contre la traite transfrontalière et de l'accord multilatéral de lutte contre la traite des enfants de juillet 2005 intervenu entre la Côte d'Ivoire et d'autres pays de la sous région : Bénin, Burkina-Faso, Guinée, Libéria, Niger, Nigeria, Mali et Togo. La cellule de communication du ministère a entrepris également de lutter contre la traite des enfants par des campagnes de sensibilisation à Abidjan et à l'intérieur du pays, dans la sous région ouest africaine et en Europe. Il a participé à des réunions sous-régionales concernant la traite des enfants : Cotonou en 1998, Lomé en 2000, Libreville - Gabon 2000 et 2003, Cameroun en 2005. Il a organisé en 2002 une réunion sous-régionale sur la traite des enfants à Yamoussoukro. Ces rencontres ont abouti à des recommandations et à une plate-forme commune d'actions. La première plate-forme élaborée est dénommée plate-forme commune d'action de Libreville (Gabon) en 2000. Le Ministère collabore avec des ONG nationales et internationales et bénéficie de l'appui des partenaires au développement dans cette lutte contre la traite des enfants dont l'UNICEF, le BIT, la Coopération Allemande, la Fondation Save The Children Suède, etc. Le Ministère de la Famille a proposé un projet de loi sur la traite des enfants, et par ces actions de plaidoyers a permis la ratification des conventions 138, 182 de l'OIT et de la charte africaine des droits et du bien être des enfants en 2002.
Ce Ministère est chargé de la réglementation générale de l'emploi et de la protection des enfants travailleurs. Il a depuis 2004 un comité directeur national de lutte contre le travail et les pires formes de travail des enfants, 6 comités départementaux à Daloa, Soubré, Adzopé, Oumé, San-Pédro, Abengourou ; 12 comités sous-préfectoraux et 24 comités villageois. Ce Ministère coordonne toutes les actions de lutte contre le travail des enfants. Il a établi la liste des travaux dangereux et interdits aux enfants par arrêté ministériel 2250 du 14 mars 2005. Il a organisé de nombreux séminaires de formation et d'information sur le travail des enfants et dispose d'un plan d'action national de lutte contre le travail et les pires formes de travail des enfants. Les comités de lutte contre le travail des enfants sont chargés de sensibiliser les populations et les producteurs sur le travail des enfants, d'identifier les enfants travailleurs et les employeurs d'enfants, de retirer les enfants du travail dangereux dont ils sont exposés et de les réinsérer dans le circuit scolaire et professionnel. Le ministère de la fonction publique travaille en partenariat avec les autres ministères, les ONG nationales et internationales, les partenaires au développement dont la Coopération Allemande, le Bureau International du Travail, certaines structures de la filière cacao.
II s'agit du Ministère de la Justice, du Ministère de la Sécurité et du Ministère de la Défense. Le Ministère de la Justice est chargé de la protection juridique et judiciaire des enfants victimes de la traite et de pires formes de travail et des enfants travailleurs. Les Ministères de la Sécurité et de la Défense sont chargés d'appréhender tous les malfaiteurs et les trafiquants d'enfants. C'est à ce titre que la brigade mondaine du ministère de la sécurité a enregistré : ï En 2002 : 41 cas d'enfants victimes de la traite originaires de la Côte d'Ivoire (12), du Burkina (02), du Togo (08), du Mali (03), du Bénin (13), du Nigeria (01), de la Guinée (02). Ces enfants sont âgés de 08 à 15 ans. Ils ont été remis au Bureau international catholique de l'enfance (BICE) qui s'est chargé de les remettre à leurs parents82(*). ï En 2003, vingt (20) cas d'enfants victimes de maltraitance, dix (10) cas d'enlèvements d'enfants, quatre (04) cas d'exploitation. Le Ministère de la justice a pu juger et condamner une cinquante de trafiquants d'enfants de 1999 à 2005, identifier et rapatrier de nombreux enfants victimes de la traite. Quelques statistiques 2000-2005 : ï Tribunal de Daloa : 02 cas / 10 enfants ï Tribunal de Bouaflé : 02 cas / 8 enfants ï Tribunal d'Aboisso : 2 cas d'enfants domestiques, 2 enfants travailleurs victimes de sévices ï Tribunal d'Abidjan Plateau et Yopougon : 30 personnes jugées pour enlèvement d'enfant de 2003 à 2005 et 60 autres pour violences diverses sur les enfants dans la même période. 50 cas d'enfants travailleurs victimes de violences sexuelles et de sévices La majeure partie des trafiquants a été jugée à Bouaké, Odienné et Boundiali. Le nombre très limité des personnes jugées pour traite ou exploitation d'enfants s'explique par le fait que peu de cas sont portés à la connaissance de la justice. Les enfants victimes d'exploitation sont confiés aux ONG pour leur réinsertion familiale ou professionnelle ou refoulés par la police des frontières. L'absence ou l'insuffisance des structures d'accueil et l'insuffisance des ressources des structures chargées de la protection des enfants ne permet pas toujours de mener des actions de réhabilitation des enfants victimes.
Ils sont chargés chacun en ce qui les concerne d'apporter une protection aux enfants en fonction de leur domaine spécifique : éducation, santé, affaires sociales, affaires étrangères, agriculture, sport etc... Le Ministère de l'agriculture ne dispose pas d'un texte pour la protection des enfants travaillant dans le domaine agricole. Il participe aux travaux des Ministères de la famille et de l'emploi et des projets du Bureau International du Travail (BIT) et son programme d'élimination du travail des enfants (EPIC) et ses projets LUTRENA et WACAP consacrés spécifiquement au travail des enfants. Le Ministère de l'éducation nationale a créé par arrêté n*0093du 02 Décembre 2005 des centres d'éducation communautaire pour apporter une éducation de base aux enfants en âge scolaire qui sont astreints au travail.
Ce sont les agences des Nations Unies (UNICEF, BIT/EPIC, OIM), les partenaires au développement comme la Coopération Allemande / GTZ, de INTERPOL et des ONG nationales et internationales.
L'UNICEF et le BIT à travers son projet IPEC accordent une protection générale aux enfants et une protection spécifique aux enfants travailleurs, victimes d'exploitation et de la traite. Ils accordent un appui technique, financier à l'Etat, aux ONG nationales et internationales intervenant dans la protection des enfants et particulièrement des enfants victimes d'exploitation. Les domaines de l'éducation, de la santé, de la protection sociale et légale sont leurs domaines prioritaires d'intervention. L'UNICEF accorde chaque année des kits éducatifs aux enfants, aide l'Etat à organiser des événements spéciaux comme la journée de l'enfant africain, à participer à des réunions internationales consacrées aux droits des enfants. Le BIT/IPEC à travers ses projets WACAP et LUTRENA apportent un appui aux enfants travailleurs et victimes d'exploitation et de la traite en zone urbaine et rurale. Il contribue à la lutte contre la traite et l'élimination progressive du travail des enfants dans l'agriculture commerciale et dans les villes. Il a amélioré la connaissance du phénomène du travail et des pires formes du travail des enfants par des études sur le travail domestique, le travail des enfants dans les mines artisanales (2003), la traite des enfants aux fins d'exploitation dans le secteur informel à Abidjan (2004). 11 contribue à la sensibilisation, au renforcement des capacités, au retrait, au rapatriement des enfants victimes de la traite et de pires formes de travail des enfants, à la réinsertion scolaire et professionnelle des enfants travailleurs, à la création des comités de surveillance et à la collecte des données sur le phénomène. Le projet BIT/IPEC est présent sur l'axe Bassam-Noé, San-Pedro, Tabou et dans certaines zones de Daloa, Yamoussoukro, Abengourou, Gagnoa, Oumé, Soubré, Agboville, Alépé. L'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) Côte d'Ivoire contribue à la protection des migrants et des enfants victimes de trafic international. La Coopération Technique Allemande au Développement (GTZ) à travers le projet Lutte contre la Traite et les pires formes de Travail des enfants (projet LTTE), placé sous la tutelle eu Ministère de la Fonction Publique et de l'Emploi) donne un appui aux structures privées et étatiques chargées de la lutte contre la traite et l'exploitation des enfants. L'appui concerne: ï des actions de formation et d'apprentissages professionnels, ï des actions d'insertion socio-économique, ï des actions de sensibilisation et d'information sur le phénomène, ï la réalisation d'études sur le phénomène. 14 ONG et 3 structures décentralisées (Préfecture de Oumé, Mairie d'Agnibilékro, Mairie de Koro dans le département de Touba) bénéficient des actions susmentionnées83(*). A Oumé le comité départemental a bénéficié de l'appui pour une sensibilisation des communautés villageoises en matière de lutte contre le phénomène du travail des enfants dans la cacao culture. Soixante (60) villages sont concernés par cette sensibilisation. A cet effet des comités villageois de cinq (5) à dix-sept (17) membres ont été installés dans les différents villages qui ont pour mission de sensibiliser les populations dans ce domaine mais aussi de mener des actions de lutte contre ce phénomène. Les membres de ces comités ont bénéficié d'une formation technique d'animation communautaire en matière de travail des enfants du 26 Août 2005 au 10 Septembre 2005. Les départements de Soubré, Daoukro et Abengourou ont également bénéficié d'un appui consistant pour la mise en place des comités départementaux, sous-préfectoraux et villageois. Save The Children Suède contribue à la promotion et à la protection des droits des enfants et spécifiquement des enfants victimes d'exploitation par : ï la lutte contre la traite et l'exploitation des enfants ; ï le renforcement des capacités des ONG et du personnel de l'Etat dans le domaine de la protection des enfants ; ï les plaidoyers, sensibilisation sur les droits des enfants victimes d'exploitation ; ï la création de comités de protection ; ï l'appui aux comités de protection existant et aux ONG intervenant dans la protection des enfants victimes de la traite à travers la réinsertion, le rapatriement et la scolarisation des enfants victimes de la traite. La Fondation International Cocoa Initiative (ICI) contribue à la lutte contre le travail des enfants par : ï la promotion d'action pour les normes du travail responsable de la production du cacao ; ï la prise en charge des enfants victimes de la traite ; ï l'élaboration de brochures pour les acteurs de terrain et les personnes chargées de la protection des enfants ; ï la mise sur pied d'un groupe de travail sur la protection des enfants victimes de la traite et de pires formes de travail. En résumé, ces partenaires contribuent à la promotion et à la protection des droits des enfants par un appui matériel et financier aux structures étatiques, décentralisées, et aux ONG nationales et internationales intervenant dans le domaine de la protection des enfants. Leurs actions consistent en : ï un appui financier et technique à toutes les structures intervenant dans le domaine de la protection des enfants contre l'exploitation ; ï un appui aux campagnes de sensibilisation et de mobilisation communautaire ; ï dons de kits éducatifs, professionnels ; ï un appui aux actions de renforcement de capacité ; ï une intervention directe pour les actions de sensibilisation à Oumé (GTZ/LTTE) ; ï un appui à l'organisation de séminaires d'élaboration de plan d'action et de textes de lois. ï Un appui à l'apprentissage professionnel et insertion économique des enfants et jeunes victimes de traite et d'exploitation.
L'Organisation de police criminelle INTERPOL à travers ses bureaux centraux collectent les informations sur les activités criminelles et sur la traite des enfants et les partagent avec les pays concernés (Afrique de l'Ouest et du Centre). Interpol a pour mission de recueillir des informations et procéder au rapatriement d'enfants victimes de ce phénomène. Ainsi en : ï 2002 : 425 enfants victimes identifiés et 15 trafiquants arrêtés. ï 2003 : 613 enfants victimes et 53 trafiquants arrêtés ï 2004 : 260 victimes et 25 trafiquants appréhendés84(*).
Elles sont très nombreuses qui interviennent dans le domaine de la protection des enfants. Néanmoins, nous retenons ici celles qui sont les plus actives et connues au plan national et international comme oeuvrant dans le domaine de la lutte contre la traite et l'exploitation des enfants.
- la protection générale des enfants ; - la protection des enfants privés de liberté, des enfants handicapés, des filles domestiques, des enfants réfugiés ; - l'accueil, hébergement, assistance éducative, écoute ; - l'identification, au retrait, au rapatriement des enfants victimes d'exploitation, à leur formation professionnelle et leur installation. En 2002, 1600 enfants ont été accueillis dans ces centres et 119 enfants victimes d'exploitation ont été réinsérés (appui par le projet LTTE). En 2004 : 552 enfants victimes d'exploitation et d'abus sexuels pris en charge. ï Les communautés religieuses à travers leurs centres d'accueil : Foyers Akwaba (Bouaké et Abobo), centre de Niangon Lokoa, Foyer Don Bosco, Villages Marie Dominique, contribuent à la protection des enfants et spécialement des victimes d'exploitation ou des enfants en circonstances difficiles. Elles s'orientent vers : - l'information, l'orientation, l'appui psychoaffectif, l'accueil ; - l'hébergement d'enfants victimes d'exploitation et d'enfants en circonstances difficiles ; - la réinsertion sociale, professionnelle et familiale. ï Communauté Abel / ELVIA de Bassam assure : - l'accueil, l'hébergement, l'assistance aux enfants en difficulté ; - la prise en charge des enfants victimes d'exploitation (100 enfants en 2002 et 101 en 2004, financement LTTE) ; - la réinsertion familiale, professionnelle ; - l'identification, le retrait, le rapatriement des enfants victimes de la traite. ï Le Mouvement du Nid Côte d'Ivoire assure : - l'écoute active, l'assistance sociale ; - la sensibilisation et la prévention de la prostitution et des infections sexuellement transmissible ; - la prise en charge socioprofessionnelle et éducative. ï La Fondation Amigo contribue à la protection des enfants par : - l'encadrement des enfants en situation difficile et des enfants victimes d'exploitation ; - l'alphabétisation, l'apprentissage de métiers, la réinsertion sociale et professionnelle (40 en 2000, en 2002 et en 2004 avec financement LTTE); - l'écoute active.
ï Le Mouvement pour l'Education, la Santé et le Développement (MESAD). Il contribue à : - l'assistance dans la rue, 1'écoute, l'assistance médicale, l'hébergement des enfants privés de liberté et des enfants victimes d'exploitation ; - l'insertion pré professionnelle, la réinsertion familiale, la sensibilisation et l'alphabétisation. ï Afrique Secours et Assistance (ASA) Cette ONG contribue à : - l'écoute, au conseil, à la réhabilitation, la réinsertion et la réalisation de projets générateurs de revenu pour les enfants victimes et les familles démunies. - la sensibilisation et la lutte contre la traite. - la protection des enfants victimes d'exploitation (enfants travaillant dans les décharges d'Akouédo ; projet financé par LTTE). ï L'Association des femmes juristes de Côte d'Ivoire contribue à la promotion des droits des femmes et des enfants par : - la sensibilisation et la diffusion des textes juridiques ; - la formation juridique (coopérateurs sur le travail des enfants) ; - l'écoute et l'assistance juridique. ï Le Parlement des enfants de Côte d'Ivoire contribue à la promotion et à la protection des droits des enfants par des actions de sensibilisation. ï L'Association des enfants et jeunes travailleurs (AEJT) affilié au mouvement africain des enfants et jeunes travailleurs assure la défense et la promotion des droits de l'enfant travailleur
ï Le Réseau Ivoirien de Lutte contre la Traite des Enfants (RILTE) affilié au réseau africain de lutte contre la traite contribue à la Défense et à la promotion des droits des enfants victimes de traite et d'exploitation. ï Le Forum des ONG d'aide à l'enfance (47 membres associés) contribue à la Promotion et à la défense des droits des enfants par : - La protection des enfants victimes d'exploitation ; - Le renforcement des capacités des ONG membres du forum ; - La recherche de financement.
ï L'Union Générale des Travailleurs de Côte d'Ivoire (UGTCI), la Fédération des Syndicats des Travailleurs (FESACI) et Dignité assurent : - La protection des travailleurs ; - La protection des enfants travailleurs et victimes d'exploitation. ï Le Groupe de travail STCP/BIT sur le travail des enfants et le trafic contribue à la réflexion sur le phénomène et à la recherche de solutions pour combattre le phénomène de l'exploitation des enfants dans la cacao culture. ï Les Organisations professionnelles Agricoles et spécialement la KAVOKIVA (Daloa), les coopérateurs de Sinfra : - Promotion des droits des planteurs ; - Protection des enfants travailleurs ; - Lutte contre le travail des enfants dans les exploitations agricoles. ï Les Comités de protection, des droits des enfants et les comités de vigilance : - les comités de protection du BICE (Daloa, Gagnoa, Divo, Aboisso, Tabou, Korhogo). les Comités de protection de Save thé Children Abidjan et Bouaké. - les Comités de Vigilance de la Communauté Abel et de ASA : Aboisso, Bassam, Bonoua contribuent à la : - protection et à la promotion des droits des enfants ; - protection des enfants victimes de la traite et d'exploitation ; - sensibilisation, la mobilisation communautaire et à la prise en charge des enfants victimes de la traite et d'exploitation. Toutes ces structures oeuvrent dans le domaine de cette lutte contre ce phénomène. Néanmoins, celles-ci présentent des atouts mais aussi sont confrontées à des difficultés. II- PROPOSITIONS DE SOLUTIONS Nous allons élaborer nos propositions dans des tableaux afin de donner une bonne interprétation et un bon usage aux décideurs.
2-1-2 Les instruments juridiques internationaux
2-2-2 Les partenaires au développement
2-2-3 ONG et Associations
2-3 Récapitulatif du cadre juridique et institutionnel
Dans l'intention de permettre une bonne application de nos propositions, nous avons jugé utile d'indiquer « les structures de mise en oeuvre » et d'identifier « les sources de vérification ». Nous entendons par « structure de mise en oeuvre » les ministères, ONG, institutions nationales où internationales qui de par leur rôle vont proposer ou soumettre la proposition soit au conseil des ministres ou à l'Assemblée Nationale pour aboutir à des lois. Une loi ou un arrêté pris dans le sens de lutter contre la traite doit avoir une suivie particulière du fait de l'invisibilité de acteurs. Ce qui nous amène à identifier des « sources de vérification ».
* 80 Constitution de 2000, article 5 et 6, journal officiel de l'Etat de Côte d'Ivoire * 81 N. C. ABOU, L'exploitation des bonnes par les placeurs de bonnes : le cas de la commune d'Abobo, Abidjan, Mémoire de Maîtrise, Université Cocody, UFR Criminologie, 2000. * 82 M. C. KOFFI, Etude juridique sur la traite et les pires formes de travail des enfants en Côte d'Ivoire, Abidjan, 2006. * 83 BICE, Rapport annuel, Abidjan, 2007 * 84 S. J. ABO, Le trafic des enfants en Afrique de l'Ouest et du Centre, Ministère de la Famille, de la Femme et de l'Enfant/Comité National de Lutte contre le Trafic et l'Exploitation des Enfants/ OIPC/INTERPOL, Yamoussoukro, Première réunion spécialisée, Fondation Houphouët Boigny, du 08 au 10 Janvier 2002. |
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