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Documentation sur le statut des métis de pères Allemands au Togo entre 1905 et 1914. Présentation de documents allemands avec traductions ou résumés en français

( Télécharger le fichier original )
par Essosimna Tomfei Marie-Josée ADILI
Université de Lomé (Togo ) - Maà®trise en lettres allemandes 2012
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE LOME

FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

DEPARTEMENT D'ALLEMAND

Laboratoire - ARTELI
atelier de recherche sur les thématiques :
Ecriture, Littérature et Identité

Présentation de documents allemands
avec traductions ou résumés en français

Documentation sur le statut des
métis de pères allemands«

au Togo entre 1905 et 1914 :

Mémoire de Maîtrise ès Lettres,
Option : Civilisation allemande

présenté par sous la direction de

Essosimna Tomfei ADILI Professeur Adjaï Paulin

OLOUKPONA-YINNON

Version finale : Lomé, septembre 2012

DEDICACE

Au Dieu Un et Trine mon Créateur,

À la Sainte Vierge Marie, Mère de la Miséricorde Divine, À mon père Ambroise Yao ADILI et à ma mère Mémouna Abla KATOUNKE pour leur attention à mon égard.

REMERCIEMENTS

Au terme du présent Mémoire de Maîtrise, il nous est nécessaire, avec le plus grand honneur, de remercier toutes celles et tous ceux qui, de près ou de loin et sous diverses formes, ont contribué à sa réalisation. Que le Tout-Puissant les comble au-delà de ses attentes.

PREFACE

De 1884 à 1914, le destin des Togolais et celui des Allemands ont été étroitement liés par la colonisation, avec toutes ses conséquences dans tous les domaines, en particulier dans la vie quotidienne des Allemands avec des femmes togolaises à qui le colonialisme ne reconnaissait pas le statut de partenaires légales. Fruits naturels de ces relations, les enfants métis, eux aussi, ne pouvaient pas être officiellement reconnus« comme enfants de pères allemands. Quelles ont été les conséquences d'une telle situation? C'est la principale question que l'auteur de ce travail, mademoiselle Essosimna Tomfei Adili, a voulu soulever à travers cette documentation qui est le résultat d'un long et patient parcours de recherche et d'analyse, dans le cadre de son mémoire de maîtrise en Civilisation allemande.

L'essentiel du travail de recherche nous situe entre histoire et mémoire, et peut se résumer par ce que le médecin allemand Ernst Rodenwaldt, qui avait travaillé au Togo de 1910 à 1914, a affirmé ultérieurement dans un article intitulé Hygiène raciale et politique coloniale« : Il est [...] évident que des enfants métis ne pouvaient jamais obtenir le statut juridique d'un citoyen du Reich.« Ce postulat colonial est abondamment confirmé par les documents rassemblés et analysés par mademoiselle Essosimna Tomfei Adili, comme preuves du vécu identitaire quotidien de ceux que l'on appelle aujourd'hui métis allemands«, mais qui n'avaient pas droit à cette appelation sous le régime colonial allemand. La documentation illustre la détermination de l'administation coloniale à dénier aux métis le droit élémentaire d'être reconnus par leurs géniteurs. C'est seulement après le départ des Allemands du Togo en 1914 qu'ils sont autorisés à porter le nom de leurs pères. A la suite de la soutenance publique de ce mémoire de maîtrise, le jury a reconnu à l'unanimité la pertinence du sujet et son importance historique certaine, et surtout la nécessité de rendre accessible à un grand public ce document, pour permettre - particulièrement aux Togolais d'aujourd'hui - de connaître les réalités d'hier sur la question sensible des métis allemands« au Togo, et de laisser ensuite à chacun le soin de se faire son propre jugement.

Professeur Adjaï Paulin Oloukpona-Yinnon Directeur de recherches du Laboratoire ARTELI Université de Lomé, FLESH

4

SOMMAIRE

INTRODUCTION 7

1- MISE EN PERSPECTIVE DU SUJET 19

i Illustration n° 1: Des membres du Club der deutschen Mischlinge" (Club des metis allemands), Lome
(Source : Petschu111984 :17)

2 - LES DOCUMENTS : ORIGINAUX, RESUMÉ OU TRADUCTION 62

2.1 - Document n° 1 62

2.2 - Document n° 2 64

2.3 : Les principaux textes réglementaires pris en 1909 67

2.3.1 : Document n° 3 67

2.3.2- Document n° 4 70

2.3.3 - Document n° 5 71

2.4 - Document n° 6 : 74

2.5 - Document n° 7 77

2.6 - Document n° 8 79

2.7 - Principaux textes de 1913 83

2.7.1 Document n° 9 83

2.7.2 - Document n° 10 85

2.7.3 - Document n° 11 92

2.7.4 - Document n° 12 95

2.7. 5 - Document n° 13 96

3 - Cas individuels 102

3.1 - Document n° 14 102

3.2 - Document n° 15 113

3.3 : Document n° 16 115

3.4 - Document n° 17 118

4 - Commentaire récapitulatif 125

CONCLUSION 127

SOURCES DOCUMENTAIRES 130

IIlustration n° 2 : le couple mixte Katharina et Christian Rottmann, avec enfants (Source : Theil 2008:209)

6

INTRODUCTION

Il est tout aussi évident que des enfants métis ne pouvaient jamais obtenir le statut juridique d'un citoyen du Reich.« 1

Sur tous les sentiers [au Togo], on rencontre maintenant des prostituées et des concubines. Les métis vont bientôt pousser comme des herbes sauvages«2. Ainsi s'exprimait en octobre 1899 le préfet apostolique de la Mission Catholique de la Société du Verbe Divin« (SVD) au Togo, Monseigneur Hermann Bücking, dans un rapport, adressé à sa hiérarchie (Adja 2009 :73 & Sebald 1988 :477). Il tentait ainsi de tirer la sonnette d'alarme au sujet d'une question devenue alors urgente et inquiétante pour l'évolution de la colonie allemande du Togo: le problème posé par l'augmentation vertigineuse des enfants métis nés de pères allemands et de mères togolaises. Ce faisant, Monseigneur Bückling utilisait aussi le vocabulaire de l'époque qui considérait tous les métis comme de « mauvaises plantes », des « herbes sauvages », et désignait leurs mères noires par les termes de « prostituées » et de « concubines ».

Le 16 juillet 1913, la Société de Mission de l'Allemagne du Nord adressa à son tour une lettre à l'administration coloniale impériale de Berlin. Dans cette lettre, la Mission de Brême souligne qu'au Togo le nombre des métis était plus important que celui de la population masculine européenne, et pourtant les relations entre ces enfants métis et leurs pères allemands ne sont pas cordiales, puisque les métis ne sont pris en charge de manière adéquate que par les familles de leurs mères indigènes, qui d'ailleurs manquent de moyens.

Effectivement, l'alerte sonnée par les missionnaires porta au parlement allemand (Reichstag) la question de la prolifération des métis dans les colonies allemandes. Au cours d'un débat sur cette question, le député du parti centriste pro-catholique, Matthias Erzberger, avait déclaré en 1912 : Si nous avons dans bien des colonies plus de métis que d'Européens, c'est à des fonctionnaires de l'administration coloniale qu'incombe une importante

1 Ebenso selbstverständlich ist es, dass [...] niemals Michlingskinder den Rechtstand eines Bürgers des Reiches erhalten konnten.« In Rassenhygiene und Kolonialpolitik, in: Deutscher Kolonialdienst, 1939, n° 7, p. 182, cité in Sebald 1988:713, note 87

2 Auf allen Wegen begegnen einem jetzt die Huren und Konkubinen, und das Geschlecht der Mischlinge sprießt bald auf wie das Unkraut.« (cité in Sebald 1988:477)

part de la faute dans cette situation"3. Erzberger pointait ainsi du doigt les principaux responsables de cette situation : les fonctionnaires coloniaux allemands. Le Ministre des Colonies, au cours du même débat parlementaire sur la question, a lancé aux députés un appel pathétique - aux accents « patriotiques » - pour qu'ils votent la loi qui interdit les mariages mixtes dans les colonies. Son argumentation est simple4:

Messieurs, je prie instamment de vous laisser guider dans cette affaire, par vos instincts. Souhaitez-vous que vos fils vous ramènt à la maison des belles-filles noires? Souhaitez-vous qu'ils vous déposent dans le berceau des petits-fils aux cheveux crépus? Non messieurs, la nation toute entière ne souhaite pas cela.

C'est donc à ce sujet, c'est-à-dire à la question des métis de pères allemands, que nous voulons accorder notre attention dans le présent Mémoire de Maîtrise, en nous appuyant sur la législation que l'administration coloniale allemande au Togo avait adoptée pour endiguer ce déferlement de la vague de métis que Jürgen Petschull (p. 113) appelle « die braunen Kinder der weißen Herren » (les enfants bruns des maîtres blancs).

Dès 1962, Cornevin - témoin privilégié de l'évolution sociale au Togo dans les années d'avant l'indépendance, a noté dans son ouvrage Histoire du Togo (p. 306) :

Les métis constituent, au Togo, un élément particulier. Au départ, on peut distinguer les métis `brésiliens, allemands et français'. Les Brésiliens sont l'élément le plus ancien ; il est difficile de les distinguer des descendants d'esclaves de leurs maisons qui portent le même nom qu'eux [....] Beaucoup de ces familles se considèrent comme les plus authentiquement `indigènes'des Togolais. Les métis allemands ont, généralement très jeunes, été séparés de leur père. Elevés par la mère africaine, ils ont appris le français, quelquefois l'anglais et ignorent pratiquement tous l'allemand. [...] Ces métis auxquels se joignent maintenant ceux de la période française, sont avec leurs familles près de 5000. Ils font partie de la communauté togolaise dont ils constituent en quelque sorte l'aristocratie.

La présentation des métis togolais par Robert Cornevin traduit ici déjà l'essentiel des problèmes historiques, sociologiques et psychologies liés à la question des métis au Togo : il esquisse une classification et une périodisation d'un point de vue européen, en mettant des distinctions entre les métis, alors que, dans la société togolaise qui connaissait le métissage entre les ethnies aussi bien que le métissage entre les races, l'appartenance d'un métis à une race ou une ethnie n'avait jamais vraiment posé de problème en soi ; les métis ne constituent pas vraiment une catégorie de personnes à part, s'ils ont accepté de vivre comme les autres et avec les autres ; mais si la fortune ou la renommée leur confère une

3 Wenn wir in manchen Kolonien mehr Mischlinge als Europäer haben, dann tragen Beamte der Kolonialverwaltung einen erheblichen Teil Schuld daran.« (cité in Petschull 1984 :8)

4 Meine Herren, ich bitte Sie dringend, sich in dieser Frage von Ihren Instinkten leiten zu lassen. Wünschen Sie, dass Ihnen Ihre Söhne schwarze Schwiegertöchter ins Haus bringen? Wünschen Sie, dass sie Ihnen wollhaarige Enkel in die Wiege legen? Nein meine Herren, die ganze Nation wünscht das nicht.« (cité in Petschull 1984 : 121)

certaine prépondérance, cela n'est pas lié à leur identité de métis. A titre d'exemple, le métis « brésilien » Geraldo de Lima, célèbre sur la Côte des Esclaves dans les années 1860 à 1890, n'est pas devenu célèbre parce qu'il est métis : en réalité, il n'était pas du tout métis, puisqu'il s'appelait Adzoviehlo Atiogbe, né à Agoué ; c'est après avoir travaillé avec le négrier brésilien Cosar Cequira Geraldo de Lima, et après avoir hérité des richesses de ce dernier mort en 1862, que Adzoviehlo Atiogbe est devenu Gerado de Lima, riche et prospère (Gayibor 1990 : 217ff). Ce phénomène de « trans-identité » (échange d'une identité contre une autre) était relativement fréquent en Afrique de l'Ouest ; on en trouve un autre cas - encore plus intéressant à travers l'exemple de l'auxiliaire noir de la Mission de Brême nommé Albert Binder, originaire de Peki-blengo, qui a volontairement troqué son prénom africain Komla-Kuma contre les nom et prénom d'un missionnaire allemand, Albert Binder ; allant même plus loin, il a adopté l'habillement intégral du missionnaire allemand, si bien que rien ne le distinguait plus de ce dernier, sinon la couleur de la peau ou les traits du visage (Azamede 2006 & Azamede 2010).

Lorsque Cornevin classe les métis togolais et les caractérise comme « en quelque sorte l'aristocratie » de la société togolaise, il porte là un jugement d'Européen que certains Africains, notamment les métis togolais eux-mêmes, reprennent souvent à leur compte, parce que cela les arrange d'être considérés comme tels. Or, comme le souligne Cornevin lui-même à juste titre et à demi-mot, les métis allemands« par exemple n'étaient pas élevés avec leur père allemand, et n'avaient donc généralement rien d'allemand, sinon la ressemblance patente que Jürgen Petschull illustre parfaitement dans son ouvrage, et dont nous reprenons ici quelques photos. En d'autres termes, il y a une contre-vérité historique à vouloir présenter un métis comme « un élément particulier », et surtout à en faire un « aristocrate ». L'histoire des métis allemands« prouve exactement le contraire, lorsque l'on se réfère aux documents d'archives relatifs à leur naissance, leur éducation et leur identité. En somme, ce sont les Européens - comme Cornevin - qui ont diffusé l'idée raciste selon laquelle les métis seraient une « race particulière » que l'on disqualifie quand elle menace l'avenir des Européens dans les colonies, ou que l'on annoblit pour diviser les sociétés africaines postcoloniales et mieux les gouverner à distance. Il est donc temps de porter un regard objectif, historique et véridique, sur la question du métissage, surtout dans le contexte colonial. C'est ce que nous tentons de faire dans la présente documentation.

Notre objectif à travers ce travail de recherche et de documentation est donc d'abord de ramener la question à sa véritable dimension historique, en présentant des textes qui en fondent la vérité. Ensuite, nous voulons montrer que la question du métissage des races n'avait jamais constitué un problème« pendant l'ère précoloniale: c'est le colonisateur allemand qui, dans le souci obsessionnel mais hypocrite de préservation de la race blanche, a problématisé« les rapports sexuels entre Allemands et Togolaises, créant ainsi des difficultés que les Togolais ne connaissaient pas et ne comprenaient pas. Accessoirement, il s'agit aussi de démontrer que toute la législation inventée pour « gérer » l'avènement de métis allemands« au Togo, ne s'attaquait pas à la vraie cause du problème qui était la sexualité débridée des administrateurs allemands au Togo, et que ce sont les femmes togolaises, véritables victimes, qui sont culpabilisées comme prostitués. Enfin, notre travail de documentation vise aussi à briser les tabous et les mythes qui entourent les métis allemands« au Togo, dans le but de rétablir la vérité historique.

A propos des unions mixtes, il convient de préciser que les Africains en général, et les Togolais en particulier, n'avaient ni la même conception, ni les mêmes pratiques que les Européens au sujet de l'union entre un homme et une femme. L'Européen appelle mariage« toute union légale entre un homme et une femme, consignée dans un registre matrimonial, ainsi que celle qui est sanctionnée par une bénédiction nuptiale dans une église, par un prêtre ou un pasteur. Mais l'Africain a lui aussi sa forme traditionnelle de mariage qui n'est pas forcément consigné dans un registre, mais simplement constaté et consacré par les parents des mariés, après une démarche du prétendant dictée par les coutumes de chaque pays ou de chaque clan, démarche généralement accompagnée de cadeaux somptueux ou symboliques aux parents et (ou) à la future mariée.

Il ressort de cette distinction qu'un Européen peut ne pas considérer comme engagement contractuel un mariage traditionnel africain, mais dans la réalité, les Européens qui vivaient en Afrique avec des femmes noires, avaient plutôt tendance à préférer la forme simple du mariage africain, pour éviter toutes les difficultés juridiques éventuelles pouvant surgir dans une procédure européenne régulière. Ainsi, il leur suffisait de donner par exemple une noix de kola symbolique et quelques cadeaux aux parents de la fiancée, pour considérer le mariage comme acquis. Bien sûr, chez les Africains comme chez les Européens, il y a aussi la forme plus ou moins officielle d'union qu'est le concubinage, et

que beaucoup d'Européens pratiquaient en Afrique, sans engagement véritable. C'est ce que notre mémoire de maîtrise voudrait illustrer, avec textes et images.

Brève revue de la littérature sur la question

Les travaux de recherche consacrés à la question des métis allemands« du Togo sont plutôt rares. Ceux qui en parlent sont d'un caractère général. Robert Cornevin, dans son Histoire du Togo (1962, édition revue et augmentée en 1969) que nous avons déjà cité, consacre une demi-page aux métis en général, y compris les métis allemands«. Le professeur Yawovi Amétépé Ahadji a consacré lui aussi une partie de sa Thèse de Doctorat de 3ème Cycle (1976) au « mariage mixte » pendant la période coloniale allemande. Dans le chapitre intitulé « l'idéologie raciale et la condamnation du mariage mixte », il met l'accent sur le point de vue des sociétés de mission qui ont condamné le mariage mixte. Elles ne condamnaient pas seulement le mariage mixte en soi, mais dénonçaient aussi l'attitude de quelques fonctionnaires coloniaux au Togo, qui allaient jusqu'à violer des filles mineures africaines. Pour ces sociétés de mission, un gouverneur qui a pour femme une indigène, enterre l'autorité morale de la race blanche. Les missions annonçaient que la volonté de Dieu était de voir les différentes races rester séparées, car chacune de ces races avait une mission particulière sur la terre.

Dans le livre de Jürgen Petschull Der Wahn vom Weltreich. Die Geschichte der deutschen Kolonien (Le rêve fou d'un empire colonial. L'histoire des colonies allemandes), le 4ème chapitre intitulé « Die Braunen Kinder der weißen Herren », aborde largement la question, avec de nombreuses images dont nous reproduisons d'ailleurs certaines, pour ce qui concerne le Togo allemand. Petschull insiste beaucoup sur la question de l'hypocrisie et l'immoralité de la vie sexuelle des Allemands dans les colonies, avec ses conséquences politiques et sociales. Il commence le chapitre par l'histoire des métis allemands« au Togo, en accordant beaucoup d'attention à quelques uns parmi eux. Il eut lui-même un entretien avec des membres du « Club des Métis Allemands », et avec Josef Comla5 Köhler, le fils de l'ancien gouverneur allemand August Köhler. Il termine le chapitre par un long article sous-titré « Zur Kolonie Togo » (A propos de la colonie du Togo) article dans lequel il

5 Josef«: orthographie originale allemande que l'on trouve dans la plupart des documents relatifs au fils du gouverneur Köhler, et qui a été francisée en Joseph«, sans doute dans la période française au Togo. Nous conservons donc ici l'orthographie originale, sauf dans les citations qui comportent Joseph«.

écrit: L'amour entre le Blanc et la Noire; on n'en parlait pas chez nous au pays [en Allemagne], mais dans les colonies, c'était une pratique quotidienne«6. Il considérait les Allemands vivant dans les colonies comme des hypocrites, et cite à ce sujet le sexologue Felix Bryk: Cet hypocrite, ce champion du mensonge, voilà qu'il s'offusque maintenant lorsqu'on l'intorroge à propos d'une femme noire, et pourtant, dans son lit l'attend déjà une Noire«. 7

En ce qui concerne l'historien Peter Sebald, principal initiateur du travail de mise en valeur des dossiers du Fonds allemand« des Archives Nationales du Togo (ANT/FA), il a transcrit les documents d'archives relatifs à notre sujet; il a aussi écrit des articles sur la question. Ses publications ont été précieuses pour notre travail, particulièrement son livre Togo 1884 - 1914. Eine Geschichte der deutschen « Musterkolonie auf der Grundlage amtlicher Quellen (1988), son article Christianus Jacob Protten Africanus (1715-1769). Erster Missionar einer deutschen Missionsgesellschaft in Schwarzafrika«8 et son repertoire sur les métis allemands« du Togo (cf. bibliographie).

Dans Togo 1884 - 1914. Eine Geschichte der deutschen Musterkolonie auf der Grundlage amtlicher Quellen (1988) il relate l'histoire des métis en soulevant les problèmes decoulant de leur éducation et de leur identité : problèmes nés du racisme des colonialistes : « Pour les Allemands du Togo parvenus au stade impérialiste, les métis sont devenus un problème, non seulement en raison de leur nombre toujours croissant. Il faut rechercher la raison principale du problème dans le racisme qui, de plus en plus, gagnait les rangs de ces Allemands du Togo«9. Il trouve que l'interdiction de donner des noms allemands aux enfants métis n'est rien d'autre que de l'hypocrisie, `'car ces noms [allemands] reflétaient visiblement la duplicité morale de la plupart des colonialistes allemands`'10.

La deuxième publication de Sebald mentionnée est une contribution à l'ouvrage collectif
issu du deuxième symposium international de l'histoire coloniale organisé en 1991 à
Berlin. Dans cette publication sur Jacob Protten, le premier missionnaire allemand en

6 In der Heimat wurde nicht darüber gesprochen, aber in den deutschen Kolonien wurde sie täglich praktiziert - die Liebe zwischen Weiß und Schwarz.« (cité in Petschull 1984:132f)

7 Dieser Heuchler, dieser Champion von Verlogenheit, der jetzt so entrüstet tut, wenn man ihn über ein schwarzes Weib befragt... in seinem Bette liegt bereits eine Schwarze`'. (cité in Petschull, 1984 :133)

8 In: Wilfried Wagner (Ed.): Kolonien und Missionen. Referate des 3. internationalen kolonialgeschichtlichen Symposiums 1993 in Bremen. Münster/Hamburg, List-Verlag, 1994, pp. 109-121.

9 Für die Kolonialdeutschen wurden im imperialistischen Stadium die Mischlinge nicht nur wegen ihrer stetig wachsenden Zahl ein Problem. Der Hauptgrund ist in dem sich bei den Kolonialdeutschen ausweitenden Rassismus zu suchen«. Sebald, 1988: 267)

10 Denn in diesen Namen ihrer Kinder offenbarte sich die doppelte Moral der meisten deutschen Kolonialisten. Car ces noms [allemands] réflétaient visiblement la duplicité morale de la plupart des colonialistes allemands`'. (Sebald, 1988: 268).

Afrique de l'Ouest et qui était un métis né d'un Danois et d'une princesse d'Aneho, Sebald souligne de nouveau que le racisme et le colonialisme sont deux choses intimement liées et qui se complètent parfaitement, notamment sur la question des métis.

Dans une autre publication intitulée Kolonialregime und Mischlinge. Das Beispiel der deutschen Kolonie Togo 1884-1914« (1992), Peter Sebald revient sur la question en considérant l'union mixte à l'époque coloniale allemande comme une forme d'exploitation de la femme noire par l'homme blanc. Il écrit : Pendant leur séjour en Afrique, les Européens vivaient souvent avec des femmes africaines qu'ils avaient parfois achetées comme esclaves, ou qu'ils avaient prises comme compagnes selon les usages de la législation africaine.«11 Mais il reconnaît aussi que parfois, c'est pour sauvegarder leurs intérêts politiques ou sociaux que les colons se mariaient avec les filles autochtones : Pour certains agents commerciaux ou fonctionnaires coloniaux britanniques, prendre pour compagne une femme africaine selon la coutume du pays était considéré comme une manière de consolider leur entreprise commerciale ou leur fonction«12.

Enfin, le repertoire de Sebald sur les métis allemands« du Togo (document inédit) constitue pour notre travail une base de données très utiles sur les enfants métis de pères allemands du temps colonial au Togo (cf. bibliographie). Grâce à cette liste, on peut non seulement connaître assez précisément le nombre de ces enfants (environ 200), mais aussi identifier, autant que possible, les noms et les parents des « métis allemands » du Togo. Toutefois, comme le souligne Sebald lui-même, ce repertoire ne permet pas de déterminer le nombre des enfants métis de la colonie, mais seulement celui des enfants déclarés auprès de l'administration coloniale au cours des recensements13 : `'Die Liste erfasst also nur die zu einem Zeitpunkt in einem Ort (oder Bezirk) wohnhaften Mischlingkinder bis zum Alter von 14/15 Jahren, danach rechnete sie die Verwaltung zu den Farbigen ». Ältere (erwachsene) dort wohnhafte Mischlinge wurden folglich nicht mehr erfasst. Gleiches galt für die mit ihren Müttern verzogenen Mischlingskinder, verstorbene Mischlinge in Dörfern, unter afrikanischen Namen lebend`' Le repertoire contient donc seulement les enfants métis résidant à un moment donné dans

11 Während ihres Aufenthalts in Afrika lebten die europäischen Männer vielfach mit afrikanischen Frauen zusammen, die sie teils als Sklavenmädchen gekauft, teils unter Beachtung afrikanischer Rechtsgepflogenheiten zu sich genommen hatten.» (Sebald, 1992 :110).

12 Eine afrikanische Frau nach Landessitte zu sich zu nehmen, betrachtete mancher Handelsagent oder britischer kolonialbeamter als einen für sein Handelsunternehmen b.z.w. seine Funktion fördernden Umstand«. (Sebald 1992 : 110).

13 A titre d'exemple, monsieur Simtaro (1982) fait état de métis allemands qui ne figurent pas sur la liste de Sebald.

une localité (ou un district), et qui était âgé de 14 à 15 ans au maximun. Au-delà de cet âge, l'administration les considérait et les recensait comme des Noirs. Les métis plus âgés (adultes) nétaient donc plus recencés. De même, on ne recensait plus les métis qui avaient démenagé avec leurs mères, les métis morts dans des villages ou ceux qui y vivaient sous des noms africains«14. La liste reste donc très fragmentaire et très incomplète, car elle ne tient pas compte des enfants métis non déclarés, non recensés, ou ceux dont les mères se trouvent dans des localités difficilement accessibles.

L'historien Ali Napo quant à lui, a décrit les conditions des métis dans sa Thèse intitulée: « Le Togo à l'époque allemande (1884 - 1914) ». Il désigne l'union entre femme noire et homme blanc par le mot « commerce » : «Le fait que tous ceux qui arrivaient dans le protectorat : commerçants, militaires et fonctionnaires coloniaux, étaient tous des hommes très jeunes et sans femmes ne pouvait que favoriser le commerce avec les négresses...« (Ali Napo 1995: 842). Pour lui, ce fut l'augmentation du nombre des métis qui conduisit à soulever les problèmes du métissage, car la loi du Reich n'avait jamais prévu l'existence des enfants métis et n'avait donc pas prévu la base juridique pour reconnaître ces enfants dits naturels«.

Dans l'ouvrage Le Togo 1884-2004 : 120 ans après Gustav Nachtigal. Connaître le passé pour mieux comprendre le présent. (2007), Oloukpona-Yinnon et Coulibaley- Béré ont présenté une contribution au colloque organisé à cet effet. Parlant de la descendance africaine de H. F. Achille Eccarius, ils montrent comment un Allemand, par l'union mixte avec une femme noire, fonda une famille devenue aujourd'hui une vraie collectivité africaine avec des ramifications internationales. Mais bien avant cela, ils ont d'abord montré la situation des métis et ensuite présenté l'essai de réglementation, par la loi, de la question au Togo.

Dans sa Thèse de Doctorat de 3ème Cycle, monsieur Dadja H. Simtaro a non seulement traité de la question des métis allemands au Togo, mais il a donné la parole à certains d'entre eux, à travers de longues interviews, dont nous reprenons quelques unes. Nous avons ainsi une documentation précieuse sur la manière dont les intéressés se voient euxmêmes, et la façon dont ils perçoivent leurs parents allemands.

14 'Die Liste erfasst also nur die zu einem Zeitpunkt in einem Ort (oder Bezirk) wohnhaften Mischlingkinder bis zum Alter von 14/15 Jahren, danach rechnete sie die Verwaltung zu den Farbigen ». Ältere (erwachsene) dort wohnhafte Mischlinge wurden folglich nicht mehr erfasst. Gleiches galt für die mit ihren Müttern verzogenen Mischlingskinder, verstorbene Mischlinge in Dörfern, unter afrikanischen Namen lebend`' (Sebald, 2006: 1)

Face à la revue de littérature qui vient d'être présentée, quel est notre apport et quelle sera notre approche?

Puisque tous les travaux ci-dessus cités ne traitent que de façon marginale la question des « métis allemands » au Togo, il nous paraît nécessaire et utile d'élaborer une documentation de référence qui soit consacrée exclusivement à ce sujet, et qui aborde la question sous l'angle de la société togolaise dans laquelle sont nés ces métis. Il nous paraît utile aussi de poser quelques problèmes soulevés par cette documentation

Problématique du sujet et intérêt de cette étude

En quoi l'existence des métis de pères allemands au Togo était-il un problème ? Quelle est la problématique essentielle de cette question dans notre travail ? Quel intérêt il y a-t-il à étudier aujourd'hui la question du métissage et la législation coloniale allemande au Togo sous domination allemande de 1884 à 1914, alors que le chapitre de la colonisation allemande est clos depuis près de 100 ans maintenant ? La principale raison du choix de ce sujet, c'est que la question est très peu traitée sur la base des documents historiques, elle fait plutôt l'objet de considérations romantiques et nostalgiques mal fondées, comme si les métis allemands« avaient été une catégorie de Togolais privilégiés. Il existe à Lomé un Club des Métis Allemands«15 (Petschull 1984 :16f) dont nous montrons une image ici (illustration n° 1).

De manière plus générale, l'évolution rapide de la société togolaise postcoloniale, particulièrement au cours des décennies après l'indépendance, tend à faire oublier d'où le Togo est parti, et à occulter les problèmes de société posés par le colonialisme allemand entre 1884 et 1914, ce qui ne permet pas toujours de bien mesurer et apprécier à sa juste dimension le chemin parcouru depuis la colonisation allemande jusqu'à l'indépendance du Togo, en passant par la partition du pays et la division des peuples par des frontières coloniales arbitraires. Aujourd'hui, il est permis aux métis de toutes origines, et particulièrement aux métis allemands« de vivre ensemble et de côtoyer tous les Togolais sans problème et sans restriction. Mais ceci n'a été rendu possible que pendant la période

15 Officiellement dénommé Association-Mutuelle des Métis au Togo« (Simtaro 1982:891ff), ce Club était - en principe! - ouvert à tous les métis sans distinction d'origine du père, mais, dans les faits, c'était un Club pour les métis de père allemand.

du mandat français sur le Togo. C'était une chose impensable à l'époque allemande, et pour cause: la législation allemande ne connaissait pas - et ne reconnaissait donc pas - les enfants nés de pères allemands et de mères togolaises. Et même si certains Allemands du Togo ont bien voulu assumer leur paternité et leur responsabilité vis-à-vis de tels enfants et vis-à-vis de leurs mères respectives, la loi ne les autorisait pas à donner leur nom de famille à leur progéniture. Et les plus embarrassés au sujet de cette question étaient avant tout les gouverneurs coloniaux eux-mêmes qui, pour la plupart, étaient directement et personnellement concernés, comme le montre un cas exemplaire que nous abordons dans ce Mémoire. On peut donc déjà considérer que l'un des aspects problématiques de la législation allemande sur les métis au Togo réside dans la question suivante: comment l'administration coloniale allemande pouvait-elle légiférer sereinement sur une question morale délicate dans laquelle le gouverneur lui-même autant que ses collaborateurs allemands - les administrateurs coloniaux - étaient presque tous partie prenante?

Un autre aspect de la problématique pourrait découler de la contradiction évidente entre la réalité historique et la situation actuelle des « métis allemands » au Togo . En effet, les métis allemands« du Togo, jadis reniés par la législation allemande, sont aujourd'hui publiquement reconnus au Togo comme tels. Nous avons aujourd'hui des familles de métis allemands« du Togo qui ont retrouvé des parents du côté allemand, se sont reconnus mutuellement comme descendants d'un même ancêtre, et qui fraternisent désormais de génération en génération16. Alors, pourquoi les métis allemands« du Togo - ainsi que leurs descendants - ne pourraient-ils pas prétendre à la nationalité allemande sur la base du sang allemand qui coule dans leurs veines? Le sujet de notre Mémoire de Maîtrise ne manque donc pas d'actualité, mais notre objectif n'est pas de fournir des documents historiques pour légitimer une quelconque revendication politique, mais pour permettre de mieux connaître et juger la réalité historique des métis allemands« au Togo. Nous pensons sincèrement que notre travail est un « devoir de mémoire » qui peut être un jalon dans la prise de conscience des mythes historiques qui entourent les métis, et qu'il peut devenir un modeste instrument de pédagogie de l'histoire des métis allemands« au Togo. C'est aussi un aspect de la réécriture de l'histoire du Togo allemand qui comporte encore des zones d'ombres en ce qui concerne la véracité des faits. C'est pourquoi nous

16 C'est le cas des descendants allemands et togolais de Hans Gruner, administrateur au Togo de 1892 à 1914.

avons choisi de nous appuyer essentiellement sur des documents d'archives authentiques, pour éviter toute spéculation et toute contestation de l'objet de notre recherche.

Méthode employée et plan du travail

Notre thème de recherche a une portée historique. Cela nous impose donc de fonder le travail essentiellement sur une documentation historique, celle des Archives Nationales du Togo qui est la plus proche et la plus disponible, en y ajoutant, bien sûr, les publications également disponibles sur place, de même que des mémoires et thèses non publiés, consacrés à certains aspects de la question.

La sélection de documents d'archives qui est au coeur de notre travail a pour objectif de fournir une base de données fiables et vérifiables sur la réalité historique des métis allemands« du Togo. Elle est composée de divers textes réglementaires sur la question des métis allemands« au Togo : il y a d'un côté des textes généraux concernant l'ensemble de la question, et il y a des textes spécifiquement consacrés à des cas singuliers de métis ou de parents de métis. Nous les présentons donc selon cette classification.

Les documents présentés s'étendent sur la période de 1905 à 1914. Ce choix peut paraître arbirtraire, mais il correspond à l'évolution de la question des métis dans les colonies en général, et au Togo en particulier : c'est en 1905 que fut interdit officiellement le mariage mixte dans les colonies et c'est à partir de 1905 que le grand réformateur de l'administration coloniale allemande au Togo, le Comte Julius Zech, d'abord gouverneur intérimaire en 1904, puis gouverneur de plein pouvoir à partir de 1905, a mis la question des métis allemands sur le tapis, a engagé les pourparlers en vue de réglementer ce phénomène social. C'est en 1905 que, pour la première fois au Togo, des listes d'enfants métis furent dressées dans les localités côtières telles que Lomé et Aneho. C'est le début des mesures officielles en vue de régler les « problèmes » posés par la recrudesence des enfants métis. La dernière ordonnance prise en 1913 commençait à connaître un début d'application lorsque les Allemands dûrent quitter le Togo en 1914. Toutefois, la présente documentation n'est pas exhaustive en ce qui concerne les textes choisis. Nous avons seulement fait un choix qui nous paraît représentatif de la politique coloniale sur la question du métissage et des métis au Togo sous la colonisation allemande.

Dans la présentation des textes, nous proposons, généralement, d'abord un résumé en français du document original, puis le document lui-même dans sa version allemande. Lorsque le document original se révèle très important pour la compréhension du problème, nous avons proposé à la place (ou en plus) du résumé une traduction intégrale. Nous envisageons pour une phase ultérieure du travail une traduction intégrale française de tous les documents. Comme il s'agit d'une documentation qui doit illustrer l'état historique et actuel de la question, nous avons ajouté aux textes des illustrations qui nous paraissent adéquates pour soutenir notre argumentation, puisque les images parlent parfois mieux que les mots.

Le plan du mémoire lui-même comprend, outre l'introduction générale, une partie consacrée à la mise en perspective du sujet, trois parties consacrées respectivement à la présentation des deux catégories de documents et du commentaire sur l'ensemble des textes présentés, et enfin une conclusion générale. Le tout est suivi de la présentation des sources archivales et bibliographiques.

1- MISE EN PERSPECTIVE DU SUJET

1.1- Considérations générales et regard précolonial sur le métissage

Métis et métissage

Selon le site wikipedia, « la notion de métis (du mot latin mixtîcius ou mixtus qui signifie « mélangé »/« mêlé ») désigne le mélange de deux éléments distincts, qu'il s'agisse de choses concrètes comme les êtres vivants, les animaux ou les plantes, ou qu'il s'agisse de choses moins concrètes comme la culture, la littérature etc. Dans le cas qui nous intéresse ici, celui des êtres humains, le métissage désigne le mélange des sangs du point de vue racial, et sa principale illustration est la créolisation, type racial des « créôles » des Caraïbes qui sont issus du mélange des négriers blancs et des esclaves noires. Et la notion de métissage devenue un concept plus général, s'applique au domaine artistique (culture, littérature, arts plastique, musique, danse etc...) ou commercial (dans le marketing de la mode par exemple).

Mais ce qu'il est important de souligner, c'est que la perception du « métis » et la compréhension du mot « métissage » dépendent de l'idéologie dominante ou des fantasmes personnels ou collectifs. Le métis peut être perçu comme un idéal de type humain, comme il peut être traité comme un « bâtard ». Dans l'Allemagne nazie, les mots « Mestize » et « Mischling » qui désignaient le « métis », ciblaient explicitement les Juifs, et il fallait éviter toute union avec les personnes d'origine juive, pour préserver la pureté de la race aryenne17. Cette politique de séparation des races était aussi valable pour les Noirs, au point que le Chancelier Adolf Hitler avait publiquement refusé de serrer la main de

17 Selon le site web Wikipedia, Mischling«, qui signifie « métis » en allemand, est un terme employé sous le Troisième Reich pour désigner les personnes d'ascendance partiellement juive. Ce mot, dont l'origine est à rapprocher du « mestizo » espagnol ou du « métis » français, signifie littéralement « personne mélangée ». D'après la définition des lois de Nuremberg (1935), un Juif était : soit une personne ayant au moins trois grands-parents juifs (indépendamment de son affiliation religieuse ou de son identification propre), soit une personne ayant deux grands-parents juifs et étant elle-même de confession judaïque, ou mariée à un(e) Juif(ve). Les personnes n'étant pas de confession judaïque étaient néanmoins considérés comme : Mischlings au premier degré, si deux de leurs grands-parents étaient juifs, Mischlings au second degré, si un seul de leur grand-parent juif. Étant donné qu'au XIXe siècle, de nombreux Juifs d'Allemagne se convertirent à la religion reformée et épousèrent des chrétiens, beaucoup de Mischlings aux premier et second degrés étaient des protestants. En 1939, le recensement du Reich dénombre environ 72 000 Mischlings au premier degré, quelque 39 000 au second, et des dizaines de milliers à des degrés plus importants. Site wikipedia consulté le 22.09.2011

l'athlète noir américain Jesse Owens qui avait gagné la médaille d'or aux Jeux Olympiques de 1936 à Berlin. En Afrique du Sud, jusqu'à un passé récent, la politique de l'apartheid proclamait et défendait la séparation physique des races blanche et noire, et interdisait strictement les unions mixtes, également au nom de la pureté et de la supériorité de la race blanche. Cela a conduit à la construction des ghettos appelés « Bantoustans », comme celui de Soweto. En Australie, une doctrine eugéniste cultivait l'idée que le métissage menaçait l'avenir du pays, et il fut aménagé des « zones protégés » où étaient concentrés les Aborigènes, pour éviter qu'ils n'entrent en contact avec des Européens ou des Asiatiques. On peut citer sans doute plusieurs autres exemples historiques - ou même contemporains - comme les réserves d'Indiens aux Etats Unis d'Amérique.

De nos jours, le métissage est plutôt considéré comme « l'avenir de l'Humanité », car aucune race humaine ne peut plus être considérée comme pure, et le métissage des cultures est la politique à laquelle aspirent presque tous les Etats et tous les gouvernements de la planète, avec plus ou moins de conviction. D'ailleurs, de nos jours, le mot « métis » ne se définit plus explicitement par la notion de « race » qui est négativement connotée. La définition allemande actuelle dans le dictionnaire Wörterbuch der deutschen Sprache (Wissen Media, 2005) fait plutôt référence à l'ethnie: «Mischling: dessen Eltern verschiedenen ethnischen Gruppen angehören.« Et pourtant, l'Allemagne n'est pas considérée comme un pays peuplé d'ethnies, comme en Afrique. Tout ceci montre la difficulté qu'il y a aujourd'hui à utiliser les mots « races », « ethnies », « métis » et « métissage ».

Cette mise au point est nécessaire pour comprendre que le contexte qui a vu la naissance des métis allemands« du Togo constitue un facteur capital pour comprendre comment fut traitée cette catégorie de personnes à cette époque où régnait l'idéologie du colonialisme, avec tous ses corollaires. Cette mise au point sert aussi à comprendre que les termes « métis » et « métissage » peuvent être définis négativement s'ils sont « emprisonnés » dans une idéologie donnée. Ils peuvent être synonymes de dégénérescence, d'immoralité et d'insanité.

C'est ainsi que le dictionnaire colonial Deutsches Kolonial-Lexikon (1920) consacre
plusieurs pages aux deux concepts « Mischehen » (unions mixtes) et « Mischlinge »
(métis), en soulignant surtout (tome 2, p. 564): La question des mariages mixtes n'a eu

d'importance pratique que dans les colonies du Sud-Ouest Africain Allemand et Samoa, puisque dans les autres protectorats, il n'y a pas eu de mariages entre des Blancs et des Noires, à l'exception de quelques cas isolés.«18

En d'autres termes : En dehors de la colonie allemande du Sud-Ouest Africain et de Samoa où le mariage mixte était déjà légalisé avant l'avènement de la colonisation allemande, aucune union mixte n'a été acceptée, reconnue ou légalisée dans les autres colonies allemandes, à quelques rares exceptions près. Voilà le cadre historique dans lequel il faut analyser et comprendre la question des « métis allemands » au Togo : aucune union mixte n'a été célébrée ou légalisée au Togo sous domination allemande. Voilà la stricte vérité historique qui détermine le statut et le destin des métis de pères allemands au Togo.

Sur cette base, le Deutsches Kolonial-Lexikon (tome 2, pp. 564ff) définit le mot « Mischling » et rend compte de sa réalité historique en six rubriques : 1. La question de la terminologie, 2. L'appréciation anthropologique de la question, 3. Les expériences rassemblées sur cette question, 4. Son appréciation sociologique, 5. Le nombre des métis dans les colonies allemandes, et 6. La situation juridique des métis. Cette approche méthodique et systématique du concept de « métis » montre l'importance de la question dans le colonialisme allemand. Sans vouloir entrer dans tous les détails, on peut résumer la question des métis dans le colonialisme allemand comme suit : Pour un colon allemand (et sans doute pour la grande majorité des Allemands de l'époque coloniale), il n'y a pas de place intermédiaire entre la race du colonisateur blanc et la race des colonisés, quelle que soit la couleur de leur peau. Dans les colonies allemandes d'Afrique, on ne reconnaissait donc que deux races : il y a le Blanc (colonisateur) et le Noir (colonisé). S'il y a naissance d'un métis, ce dernier, quel que soit le degré de son métissage, est donc classé dans la catégorie des « gens de couleur » (Farbige) et est généralement appelé « Mulâtre ». Le métis n'a donc pas d'existence juridique légale, puisqu'aucune loi n'a été prévue pour lui. Voilà le point de départ historique de l'appréciation de ceux qu'on appelle des « métis allemands », mais qui, selon les Allemands, n'ont rien d'allemand. C'est pourquoi les colons allemands utilisaient le mot « mulâtre », pour stigmatiser les métis et exprimer du mépris envers eux, car ce mot « mulâtre » se réfère implicitement et péjorativement au mulet, produit du croisement entre l'âne et la jument. Dans la présente étude, nous allons

18 Die Frage der Mischehen hat praktische Bedeutung nur in den Schutzgebieten Deutsch-Südwestafrika und in Samoa erlangt, da in den übrigen Schutzgebieten, von vereinzelten Ausnahmen ausgesehen, Eheschließungen zwischen Weißen und Farbigen nicht vorgekommen sind.«( Deutsches Kolonial-Lexikon, Band 2, S. 564ff)

utiliser le terme « métis » » plutôt que celui de « mulâtre », qui sera tout de même conservé dans les citations, pour ne pas trahir les propos ou en déformer le sens historique. Evidemment, selon les Togolais de l'époque - et selon les « métis allemands » eux-mêmes, nul ne peut nier - et aucune loi ne peut effacer le fait - qu'il y avait des enfants dont les pères étaient des Allemands. Comment pouvait-on nier une réalité sociologique, uniquement pour des raisons idéologiques ? Voilà comment se posait à l'administration coloniale allemande la question des métis de pères allemands.

En réalité, aujourd'ui, à l'époque postcoloniale, le métissage se définit, de manière neutre, comme le résultat d'un croisement génétique, et lorsqu'il s'applique aux humains, les enfants issus de ce « croisement » sont généralement appelés métis, étant donc issus de l'union de deux personnes de couleurs de peau différentes. Dans les cas des métis allemands« au Togo qui nous concernent ici, nous parlerons, non pas de « croisement », mais de « mariage mixte » (ou « union mixte ») et de « couple mixte » pour désigner spécifiquement les relations entretenues par un Allemand et une Togolaise (ou une Africaine en général), et dont la progéniture est appelée « métis » ou « métisse ». Le métissage tel qu'il est abordé ici est donc l'union mixte féconde - légitime ou illégitime - entre un homme d'origine allemande et une femme d'origine togolaise, à l'époque coloniale allemande.

Dans ce mémoire, nous abordons surtout la question des enfants nés de toutes ces unions mixtes, ainsi que les principales mesures de législation coloniale relatives aux enfants métis issus de ces unions, à l'époque du Togo allemand (1884-1914). Ceux qui ne voyaient pas d'un bon oeil ces métis les appelaient mulâtres«, et cela se remarque dans les documents que nous traitons ici. D'aucuns considéraient donc les mulâtres (ou les mulâtresses) comme des créatures entre l'homme et l'animal. D'autres les traitaient explicitement de bâtards«19. Appelés donc « Mulatten » (mulâtres), les métis allemands« du Togo étaient ainsi implicitement animalisés« et catégorisés, comme appartenant à une race particulière.

Mais malgré cette image de métis négativement connotée, les Européens d'Afrique ne
résistaient que rarement à la tentation d'en faire, et pour cela ils n'hésitaient pas à vivre en
ménage avec des femmes noires qu'ils considéraient comme leurs épouses légitimes, ou

19 Dans le Sud-Ouest Africain allemand (aujourd'hui appelé Namibie), il existait - et il existe encore sans doute - une race« appelée Nation der Bastarden«, c'est à-dire la race« des bâtards.

tout au moins comme leurs compagnes officielles. Au Sénégal par exemple, les Signares étaient des femmes très convoitées.

Les signares sont ces jeunes femmes métisses très célèbres au Sénégal depuis le 16ème siècle. Issues du mariage des Européens avec des femmes wolof et fula, elles étaient très puissantes à cause de leurs relations avec les plus hautes autorités politiques du pays à cette époque, et surtout réputées pour leur beauté envoûtante et leurs richesses, qu'elles faisaient fructifier habilement. Pour attirer les Européens, elles organisaient des fêtes dominicales agrémentées par de petites captives richement parées qui étaient généralement des esclaves sauvées de la traite négrière et intégrées aux maisons des Signares. Elles menaient généralement une vie de femme fatale, cultivant à l'extrême la sensualité. Senghor les a célébrées dans plusieurs poèmes dont « Joal » dans lequel il écrit :

Joal!

Je me rappelle.

Je me rappelle les signares à l'ombre verte des vérandas

Les signares aux yeux surréels comme un clair de lune sur la grève.

(Léopold Sédar Senghor, Chants d'ombre, 1945)

C'est d'ailleurs en se référant implicitement aux Signares qu'un proverbe sénégalais dit : Toute femme d'une grande beauté n'est indigne d'aucun lit, fut-ce-t-il le lit conjugal d'un noble«. Effectivement, les Signares ont construit leur célébrité en faisant de grandes conquêtes de nobles européens comme ce fut le cas, entre autres, du Chevalier Stanislas de Boufflers, gouverneur du Sénégal en 1785. Jusqu'aujourd'hui, les Signares représentent une institution respectable au Sénégal, particulièrement à Saint Louis.

Il y a donc également, à côté de la perception négative du métis, une perception positive. C'est valable pour les femmes appelées Signares au Sénégal, mais c'est aussi le cas pour quelques métis célèbres dont voici les portraits.

1.2 - Quelques « métis » célèbres de la côte ouestafricaine à l'époque précoloniale Depuis le 15ème siècle, les Européens qui venaient en Afrique (commerçants, soldats, explorateurs ou missionnaires) arrivaient généralement célibataires et n'avaient aucune chance de trouver sur place une femme blanche à épouser. C'est alors qu'ils prenaient des Africaines pour compagnes, généralement selon les pratiques africaines locales. Nombreux furent sans doute les enfants métis issus de telles unions dans toute l'Afrique.

Ensuite, il y eut au milieu du 19ème siècle, l'arrivée des métis afro-américains, conséquence de l'abolition de la traite négrière, de l'affranchissement des esclaves dans les Amériques, et de la naissance d'Etats africains comme le Liberia et la Sierra Leone20. Il serait fastidieux de nommer tous ces métis ouestafricains qui ont constitué les premières élites de leurs divers pays, ainsi que de toute la région ouestafricaine.

Quant aux premiers Européens installés en Afrique de l'Ouest dès le 15ième siècle (Portugais, Espagnols, Hollandais, Danois), ils ne trouvaient apparemment aucun inconvénient moral à vivre avec des femmes noires et à avoir des enfants avec elles. Au temps de la Traite négrière, les gouverneurs des forts européens ne se privaient pas de choisir parmi les esclaves à embarquer les plus belles (ou les plus jeunes) femmes qu'ils faisaient monter dans leurs appartements. Et lorsque celles-ci tombaient enceinte, elles étaient libérées et renvoyées dans leurs familles pour y éduquer l'enfant métis21. Si l'éducation de l'enfant est bien assurée, il pouvait alors avoir un destin remarquable, comme ce fut le cas pour Jacob Protten, un métis bien connu sur la côte ouestafricaine.

1.2.1 - Christianus Jacob Protten Africanus (1715-1769)

Dans son article intitulé «Christianus Jacob Protten Africanus (1715-1769). Erster Missionar einer deutschen Missionsgesellschaft in Schwarzafrika«, Peter Sebald trace la vie et la carrière du métis Jacob Protten22, fils d'une princesse d'Aneho et d'un soldat danois du fort de Christianborg (aujourd'hui Accra).

Né le 15 septembre 1715 à Accra, il est envoyé à l'âge de 12 ans à Copenhague (Danemark) où il séjourne de 1727 à 1735 pour des études, notamment les études de théologie qu'il commence en 1732. Il se rend ensuite à Herrenhut en Allemagne, auprès du Comte allemand Zinzendorf, fondateur de la congrégation des frères Moraves appelée « Unitas Fratrum » ou « Herrenhuter Brüdergemeinde ».

20 Les premiers dirigeants de ces Etats étaient des métis américains, à l'instar de Joseph Jenkins Roberts (15 mars 1809 à Norfolk- 24 février 1876 à Monrovia) premier et septième président du Liberia ; l'aéroport international Roberts de Monrovia est nommé d'après lui. Source: http://fr.wikipedia.org, consulté le 08-11- 2011.

21 Cette anecdote est souvent racontée aux touristes qui visitent par exemple les forts d'Elmina ou de Cape Coast au Ghana. Toutefois, il n'est pas précisé si les géniteurs reconnaissaient juridiquement leurs progénitures et leur assuraient toujours la subsistance nécessaire.

22 Cf. également Cornevin 1969 :126f

Illustration n° 3 : Christianus Jacob Protten Africanus (source: www.bibliografica-africana) consulté le 13
octobre 2011

En 1736, Jacob Protten se rend en Hollande en compagnie d'un frère morave nommé Heinrich Huckoff, avec qui il retourne chez lui en Gold Coast en 1737 au fort d'Elmina devenu possession hollandaise, se rendit la même année à Aneho pour y prêcher. Après le décès de Huckoff en 1740, Protten retourne en Allemagne et y épouse Rebecca Freundlich (1718-1780), une métisse ancienne esclave venue des Caraïbes et veuve d'un missionnaire. Il retourne à Accra comme enseignant à l'école danoise des métis de 1756 à 1761, mais doit rejoindre de nouveau l'Allemagne, avant de revenir pour la troisième fois en Afrique en 1765, avec sa femme Rebecca. Il enseigne à nouveau à l'école danoise des métis à Accra jusqu'à sa mort le 23 août 1769. Sa vie a souvent été présentée comme un « modèle de parcours » d'un « homme de couleur » à l'époque. Dès l'âge de 20 ans, et conscient qu'il était un Noir et que sa place était en Afrique, il a décidé d'aller évangéliser chez lui en Afrique. Et dans la demande d'adhésion à la Congrégation des Frères Moraves en 1735, il avait ajouté lui-même à son nom et son prénom de naissance le mot « Africanus », pour affirmer son identité africaine23.

1.2.2 - Thomas Birch Freeman (1809-1890)

Bien que Thomas Birch Freeman fût lui aussi un missionnaire en Afrique, la configuration
du couple dans lequel il a vu le jour est différente, car son père était africain et sa mère

23 Pour rendre un hommage posthume à ce premier missionnaire africain envoyén en Afrique par une congrégation allemande, le Musée ethnographique de Herrenhut a organisé en 2006 une exposition qui rassemble des objets rapportés de l'Afrique par l'africaniste allemand Andreas Herrmann parti sur les traces de Jacob Protten en Afrique.

anglaise, une union mixte plutôt rare à cette époque. En outre, il était né en Grande Bretagne, et non en Afrique.

Illustration n° 4: Thomas Birch Freeman (source: internet www.bibliografica-africana) consulté le 13 octobre 2011

Né le 6 décembre 1809 à Twyford, près de Winchester (Hampshire), d'un père noir, jardinier, nommé Thomas Freeman, et d'une mère blanche, une Anglaise appelée Amy Birch, veuve de son premier mari John Birch (dont elle avait déjà eu trois enfants), Thomas Birch Freeman perdit son père à l'âge de 6 ans. Il fut donc élevé par sa mère qui parvint à lui donner une assez solide éducation. Lorsque la « Methodist Mission Society » lança un appel pour recruter des missionnaires pour l'Afrique, Thomas Birch Freeman abandonna le modeste job de jardinier qu'il exerçait, et répondit à l'appel, après avoir réussi l'épreuve qui consistait à prêcher dans une église de Leeds en 1837. Il est donc admis, formé et ordonné à Londres, puis envoyé en Afrique de l'Ouest, à Cape Coast (en Gold Coast), après avoir épousée Elisabeth Boot. Arrivée en Afrique en janvier 1838. Il érigea à Cape Coast une première église méthodiste inaugurée le 10 juin 1838. Considéré plutôt comme « un Anglais à peau noire » et comme un « prêtre féticheur blanc », il reçut pourtant de la part des autochtones le nom africain (fante) de « Kwaku Anan ». Après avoir implanté avec plus ou moins de succès des églises méthodistes à travers la Gold Coast, il sillonna presque toute l'Afrique de l'Ouest, de Badagry jusqu'à Abeokuta au Nigeria, en passant plusieurs fois par la cour du roi Guezo à Abomey, le palais de Chacha de Souza à Ouidah, s'engagea dans la lutte pour l'abolition de la Traite négrière, de l'esclavage et des sacrifices humains. Mais ses multiples périples à travers l'Afrique lui valurent la désapprobation de sa congrégation à Londres. Il se tourne alors vers le gouverneur civil de

la Gold Coast. Engagé comme administrateur civil, il fut médiateur dans les négociations et le règlement de plusieurs querelles interafricaines et guerres euro-africaines.

Après avoir travaillé pour l'administration colonial britannique, il s'installe à son propre compte comme agriculteur près d'Accra, et s'adonne à sa première occupation que fut le jardinage. Il crée une Société pour l'Agriculture à Accra, écrit un livre intitulé Missionary Enterprise No Fiction.

En septembre 1873, il se remet au service de la Mission Méthodiste et travaille pour elle encore une decennie environ, avec son fils Thomas Birch Junior. Après avoir été le prédicateur principal au cours du jubilée de la Mission Méthodiste de Wesley en Gold Coast en septembre 1885, il prend sa retraite officielle. Thomas Birch Freeman senior est mort le 12 août 1890 à Accra, à l'âge de 81 ans.

Au nombre des actes qui relient son nom à la future colonie allemande du Togo, il convient de mentioner qu'il visita Aneho plusieurs fois au cours de ses visites pastorales. C'est lui qui créa en 1843 la première école missionnaire dans cette ville et la première communauté méthodiste de cette région. C'est aussi lui, Thomas Birch Freeman, qui accueillit le 5 mai 1847 à Cape Coast, les premiers envoyés allemands de la Société des Missions de l'Allemagne du Nord en Afrique de l'Ouest, la Mission de Brême«.

Comme on peut le constater, les métis Jacob Protten et Thomas Birch Freeman avaient eut avec les populations de l'Afrique de l'Ouest des relations de proximité si étroites que nul ne voyait plus en eux des métis d'une catégorie particulière. Bien au contraire, leur vie riche et engagée au service des Africains les avait intimement liés à ces derniers, faisant d'eux des Africains authentiques.

1.2.3 - Katharina Anstrup ( ?- 1882)

Sans doute moins célèbre et moins connue que Protten et Freeman, Katharina Anstrup n'en n'est pas moins une métisse africaine comme eux. D'elle-même, on ne sait pas grand'chose, sauf qu'elle est née sur la Côte de l'Or (Gold Coast, aujourd'hui Ghana). Mais à cause de son mariage avec Christian Rottmann, elle est devenue une figure emblématique pour avoir vécu d'une manière exemplaire sa vie de « femme de couleur » mariée à un Blanc.

Afin de conforter leurs intérêts commerciaux avec leurs partenaires africains, les commerçants européens contractaient parfois des alliances avec des filles de ces familles. C'est probablement le cas de Katharina dont le père devait être un autre Européen (Hollandais) installé sur la Côte ouest africaine depuis longtemps, avec une femme noire. C'est sans doute dans le cas d'une relation d'affaires que Christian Rottmann, agent commercial de la firme allemande J. K. Vietor en Afrique de l'Ouest, a épousé cette « métisse hollandaise » nommée Katharina Anstrup (illustration n° 5). Négociant originaire d'Altona (près de Hambourg), Christian Rottmann était agent de la firme J. K. Vietor à Kéta où il épousa Katharina Anstrup le 4 mars 1863. Ils eurent 4 enfants : Gotthelf Samuel, Johannes, Bertha, et Theodora24. Katharina mourut en 1882, et son mari en 1897 (Theil 2008 :209).

Comme le fait remarquer Ilse Theil (p.209) dans sa thèse consacrée aux femmes de missionnaires allemands, Christian Rottmann est le seul agent commercial de la firme allemande J. K. Vietor qui fut autorisé à épouser une « mulâtresse ». Le couple Rottmann fut en effet un cas d'exception, car la firme Vietor, partenaire de la « Mission de Brême », avait formellement interdit de telles unions à ses agents en Afrique : « Tout employé ou collaborateur de la firme devait s'engager par écrit à s'abstenir de toute relation avec les indigènes noires lorsqu'il s'embarquait pour les territoires d'outres mer. La firme pieuse de J.K. Vietor recherchait avant tout des collaborateurs capables de respecter les principes religieux auxquels elle était attachée elle-même » (Ahadji 1976: 303). Quant à la « Mission de Brême » elle-même qui voulait anticiper ce problème pour les missionnaires qu'elle envoyait en Afrique, elle avait organisé un système bien rôdé de mariage par correspondance dont traite Ilse Theil dans sa thèse de Doctorat sous le titre Reise in das Land des Todesschattens. Lebensläufe von Frauen der Missionare der Norddeutschen Mission in Togo/Westafrika (von 1849 bis 1899) - eine Analyse als Beitrag zur pädagogischen Erinnerungsarbeit25.

24 Il serait sans doute intéressant de faire sur ces enfants, une étude similaire à la nôtre, afin de voir ce qu'ils sont devenus et comment ils ont conduit leur vie.

25 Page 4 de la couverture: Im 19. Jahrhundert entsandte die Norddeutsche Mission ihre Missionare nach Togo/Westafrika. Die Problematik der physischen und psychischen Lage der Missionare veranlasste das Komitee, Frauen als Ehefrauen nachzusenden. Ihre Mitarbeit fand innerhalb der Missionsgesellschaft kaum Beachtung. Bewegende Briefe, die Ilse Theil aus dem Missionsarchiv gesichtet und analysiert hat, dokumentieren dramatische Situationen der Überfahrt, des Krankseins und des Sterbens ihrer Kinder oder des Ehepartners, ebenso wie die Hilflosigkeit und das Alleingelassensein. Der Autorin gelingt eine andere Sicht auf die Missions- und Kolonialgeschichte, indem sie vergessenen Frauen eine Stimme gibt.«

Illustration n° 5a : Katharina Anstrup, épouse Rottmann (source : Schöck-Quinteros 1986 : 29)

Illustration n° 5b : Couple mixte Rottmann avec enfants (source: Theil 2008: 209)

29

Pour avoir une idée de la difficulté que devait représenter - pour un Européen à cette époque - l'union mixte avec une métisse, il faut prendre en considération le commentaire qui accompagne une photo du couple Rottmann dans l'ouvrage 150 Jahre Norddeutsche Missions 1836-1986:

Lucie Dahse, femme de négociant [à Kéta], écrivait le 3 février 1869 à son amie à Brême: C'est très difficile de mettre de l'ordre parmi les gens d'ici, particulièrement ici à Kéta. Et d'où vient cela? Comme la femme de monsieur R.[othmann] est une femme de couleur, les Noirs, particulièrement ceux de sa famille, se sentent jusqu'à présent comme les maîtres dans la ferme. D'ailleurs, il faut bien se garder de les appeler `negro' par exemple; ils sont plutôt des gens de couleur, et si le mot `negro' sort par hasard de notre bouche, on a alors une réponse comme celle-ci: `Moi, je ne suis pas un `negro', c'est vous qui êtes un `negro', un `negro blanc'«26

Cette légende de la photo montre déjà l'état d'esprit sur la question à cette époque (1869) : les époux Rottmann autant que leurs voisins sont confrontés au fait que deux couples doivent cohabiter : le couple mixte des Rottmann (entouré de la famille africaine) et le couple « normal » allemand des Dahse (époux allemand, épouse allemande). La question raciale n'était donc pas la moindre dans cette situation, mais il faut bien penser que les époux Rottmann ont su bien gérer les problèmes, puisqu'ils avaient pu vivre la plus grande partie de leur vie conjugale en Afrique, et qu'ils ont rejoint le pays du mari - l'Allemagne - pour la fin de leurs jours. C'est à Hambourg que tous deux sont morts.

Quelles conclusions peut-on tirer de ces trois cas cités ?

A l'exemple de Christianus Jacob Protten ou de Thomas Birch Freeman, il est aisé de constater que les métis issus d'Européens et d'Africaines (voire d'une Européenne et d'un Africain pour le cas de Freeman) n'était nullement une rareté en Afrique. La place que ces deux métis avaient prise dans la société africaine et le rôle qu'ils y avaient joué, démontrent que les Africains comme les Européens les avaient bien adoptés et acceptés. Avec l'exemple de Katharina Anstrup et Christian Rottmann, on peut aussi constater de manière empirique que c'est avec l'arrivée de missionnaires et de commerçants allemands en Afrique de l'Ouest au milieu du 19ème siècle que commencent les mesures d'interdiction et de réglementation des « mariages mixtes ». Nous verrons plus loin que, par la suite, le regard jeté sur les unions mixtes et les métis issus de ces unions commencera aussi à

26 Die Kaufmannsfrau Lucie Dahse schrieb am 3.2.1869 an ihre Bremer Freundin : `Es ist sehr schwer, Ordnung in die Leute hineinzubringen, besonders hier in Keta, und wo rührt es her ? Die Frau von Herrn R. ist ja eine Farbige und daher fühlen sich die Schwarzen, besonders die aus ihrer Verwandtschaft, bisher als Herren auf dem Hofe. Übrigens muss man sich schon sehr davor hüten, sie etwa mal `nigger' zu nennen ; sie sind coloured men, und wenn uns mal das Wort `nigger' entfliegt, dann bekommt man die zornige Antwort : `I am no nigger, you are a nigger, you are a white nigger'«. (Cité in Schöck-Quinteros & Lenz 1986:29)

changer. Avec l'avènement de la colonisation allemande en 1884, la question des « unions mixtes » va devenir une affaire problématique. Le « problème » est d'abord posé sur le plan de la morale, puis il sera un « problème de politique raciale ». Les Allemands n'étaient pas disposés à faire ce que les Portugais, les Danois, les Hollandais et les Français faisaient depuis des siècles : considérer les métis comme des hommes et des femmes à part entière.

1.3 - La colonisation allemande et la question du métissage

1.3.1 - Hugo Zöller et la situation de la question en 1884

Dès l'annonce de la prise de possession des premières colonies en Afrique en 1884, la gazette allemande Kölnische Zeitung envoie en Afrique de l'Ouest un journaliste nommé Hugo Zöller, avec pour mission d'informer les Allemands sur la réalité des colonies allemandes. L'une des premières choses qui ont surpris Hugo Zöller et dont il parle abondamment dans son ouvrage Die deutschen Besitzungen an der westafrikanischen Küste. Das Togoland und die Sklavenküste, c'est la question du mariage des Européens avec les femmes indigènes. Il écrit : `'Un nombre non négligeable de commerçants qui résident depuis longtemps ici se sont mariés aux femmes indigènes selon la coutume du pays [...]» (Zöller 1990: 203). Et pour illustrer ce qu'il critiquae ainsi, il montre un portrait d'un couple mixte :

Une observation attentive de cette icônographie précoloniale« du « couple mixte« montre qu'elle est -volontairement ou involontairement connotée, car elle présente, de la femme comme de l'homme - une image contrastive de désordre (l'homme, civilisé, assis, à l'aise, alors que la femme, indigène, semi-civilisée est debout); image aussi de disharmonie et de dégénérescence (cheveux et barbe hisurtes, tenues contrastées, européenne pour l'homme, africaine pour la femme); tenue débrayée (pas de casque colonial, pas de veste boutonnée); poses inversées (l'homme assis en maître prétendu, la femme debout en domina«, imposant sa stature de semi-civilisée.

Illustration n° 6 : Légende : Ein Europäer mit seiner eingebornen Frau«
(Un Européen avec sa femme indigène«) (source : Zöller 1885 : 219)

32

Pour une analyse complète de cette image, il faut la comparer avec l'ilustration n° 5b (couple Rottmann, style classique, puis avec l'illustration n° 9b, (l'administrateur Gruner et sa concubine«, style colonial)27.

Pour montrer clairement ce qu'il critique dans l'union mixte, Hugo Zöller donne une longue description détaillée sur la question (pp. 245ff) (voir encadré n° 1)28.

La critique du journaliste Hugo Zöller est sans doute pertinente pour la société allemande puritaine de l'époque, mais elle n'était pas partagée par tout le monde, comme le prouve l'opinion de Max Buchner, celui-là même qui fut l'adjoint de Gustav Nachtigal au moment de la proclamation du protectorat allemand au Togo puis au Cameroun en 1884, et qui sera d'ailleurs désigné par Nachtigal comme le premier Commissaire de cette colonie allemande du Cameroun.

27 Dans l'illustration n° 5b, la compagne noire du Blanc est typique de la femme noire déjà « civilisée » (puisqu'elle apparaît élégante, habillée à l'européenne) ; elle est assise, entourée de leurs deux enfants, dans la pose classique de la femme soumise à l'homme qui est debout et qui protège toute la famille. Il en est de même de l'image n° 2, du même couple. Les deux images respirent l'harmonie conjugale, même si ceci peut n'être qu'une simulation. On pourrait presque oublier qu'il s'agit d'un couple mixte, mais la couleur de la peau de la femme ne peut pas cacher cette réalité. Ce que les deux photographies tentent de gommer, la couleur de la peau de la femme le rappelle assez. Mais, dans l'ensemble, l'apparence d'un couple heureux et équilibré, est sauvegardée. Quant à l'illustration n° 9b, la disparité, l'inégalité et l'incompatibilité sont les traits caractéristiques de l'image du Blanc qui tient la femme noire comme un jouet, une « poupée » que l'on peut manipuler à sa guise. Les deux partenaires sont assis, mais dans une posture qui démontre que la femme est la propriété de l'homme, et ce dernier peut faire d'elle ce qu'il veut, notamment un « objet sexuel ». On dirait bien qu'il ne s'offusque nullement que sa compagne soit torse nu, les seins exposés sans pudeur aux regards de tout le monde, même des petits serviteurs du « maître ». Quelle considération cet homme accorde-t-il à cette femme ? Apparemment aucune, sinon celle de posséder un « objet de distraction », une « poupée docile ».

28 Traduction française de ce passage in K. Amegan et A. Ahadji sous le titre Le Togo en 1884 selon Hugo Zöller. Lomé : Haho/Karthala, 1990, pp. 203-205.

Spitzen besetzte Seidenkleid. Der Frisur ihres kurzgeschorenen Haares und der Pflege des Mundes widmen die schwarzen Frauen besondere Sorgfalt; sie haben fast stets einen stabartigen Zahntocher aus einer gewissen Holzart, die gleichzeitig als Zahnbürste und als Zahnpasta dient, zur Hand und verwenden zehnmal mehr Zeit auf die Pflege ihrer Zähne, als ein Europäer dies thun würde. Leute aus dem niedern Volke reiben sich wohl ab und zu den Körper mit Palmöl ein, die Vornehmen aber und namentlich die Frauen der Europäer mit wohlriechender Salbe und Sandelholz. Ihr nackter Oberkörper sieht dann häufig so aus, als ob er mit Kreide beschmiert wäre.

In Bezug auf gutes und schlechtes, hübsches und hässliches Aussehen herrscht unter Negern fast noch eine größere Verschiedenheit als unter Europäern. Dem Neuankommenden mißfällt die ganze Rasse, aber nach und nach findet er Figuren und Gesichtszüge heraus, die gar nicht so übel sind. Ich habe manche Photographien mit den Bildnissen europäischer Kaufleute und ihrer eingebornen Gefährtinnen gesehen. Letztere erscheinen aber auf allen dieen Bildnissen weit vorteilhafter als in Wirklichkeit. Für besonders hübsch gelten die einer gut beanlagten und nicht schlecht entwickelten Rase angehörigen Togo- und Povo-Mädchen.

Die Geistes- und Charakterbildung der schwarzen Lebengefährtinnen ist nicht so vernachlässigt, als man denken sollte; während sie sich anfänglich wie wilde Tigerkatzen gebärden, besänftigt sich allmählich ihr Nervenystem, und es tritt eine natürliche Anlage zu harmlosem Scherze hervor, die den von der Gechäftrabeit ausruhenden Weißen manche heitere Stunde bereitet. Da die schwarzen Frauen nicht Englisch sprecehen [sic!], so sind ihre Gatten gezwungen, sich mit der Togo- und PovoSprache zu beschäftigen, die sie im Verkehre mit ihren Frauen am leichtesten und angenehmsten erlernen, um sie dann später im Geschäfte auch auf nutzenbringende Art anzuwenden.

Als ich einmal einen Kaufmann, der sogar eifersüchtig, sehr sehr eifersüchtig auf seine schwarze Gefährtin war, fragte, wie er denn mit einem Wesen leben könne, das an Geistes- und Herzensbildung so tief unter ihm stehe, erwiderte er: Bringt es nicht die Gewohnheit mit sich, dass man einen treuen, anhänglichen Hund zu lieben beginnt? Und anhänglich, wenn auch nicht immer treu sind diese Frauen. Als ich das letzte Mal fieberkrank war, hat dieses arme Geschöpf fünf Nächte hindurch schlaflos an meinem Lager gesessen, zeitweise unterstützt von dem Hauptmann meiner Kru-Jungen, und als es endlich wieder frei in meinem Kopfe wurde, das war das erste Gefühl, dessen ich mir bewußt wurde, daß eine zitternde Hand liebevoll über meine mit Schweiß bedeckte Stirne strich.« (Zöller 1885: 245f) .

Encadré n° 1

Ein durchaus nicht unbedeutender Teil der für längere Zeit hier lebenden Kaufleute ist nach Landesbrauch mit eingebornen Frauen verheiratet; bloß den Angestellten einer einzigen mit der Mission in Verbindung stehenden Firma ist dies ausdrücklich untersagt. Das Heiraten ist hier, wie allenthalben unter Negern, eine Geld- und Geschäftssache. An die ihre Töchter anbietenden Eltern wird für Jungfrauen ein Geschenk von 16 Dollars in Geld und 6 bis 8 Dollars in Waren gemacht, so daß also der Besitz einer Jungfrau auf etwa 100 Mk. zu stehen kommt. Zu den Hochzeitsfeierlichkeiten, wenn man dieselben so nennen darf, versammelt sich die ganze Familie der jungen Frau, um die sogenannten customs« zu begehen, die in Tanzen und übermäßigem Genusse von Bier und Rum bestehen. Das Verhältnis der weißen Kaufleute zu ihren schwarzen Frauen ist in den Augen des Volkes ein vollkommen legitimes ohne jeden entehrenden Beigeschmack. Diese Frauen sind keine bezahlten Dirnen, sondern gehören durchweg den ersten Familien des Landes an. Außer dem geringen an die Eltern bezahlten Kaufpreise braucht der weiße Mann bloß in mässiger Weise für den Unterhalt seiner schwarzen Frau zu sorgen. Wenn auch nicht geleugnet werden kann, dass die bessere Behandlung, die im Gegensatze zu allem übrigen Weibern den Frauen der Weißen zu teil wird, dabei ihre Rolle spielt, so gilt es unter den Eingeborenen doch auch in jeder Hinsicht als Ehre, die Frau eines Europäers zu sein. Diesem Ideengange entsprechend zeigt man an der Sklavenküste eine große Vorliebe für die in der Gestalt von Mulatten sich darstellende Verbesserung der Rasse, während man im Kamerungebiete gerade umgekehrt auf reine Rasse sieht und alle neugebornen Mischlinge tötet.

Die schwarzen Frauen wohnen nicht bei ihren weißen Ehegatten, sondern gehen jeden Morgen in einer Kleidung, die sich durch verhältnismäßigen Luxus von der ihrer Mitschwestern unterscheidet, in ihr Dorf zurück, um erst abends wieder zur Faktorei zu kommen. Die Weißen pflegen mit ihren schwarzen Frauen bloß dann gemeinsam zu speisen, wenn sie fieberkrank sind und sich von denselben pflegen lassen.

Die Kleidung der von den Weißen Auserwählten ist diejenige der übrigen jungen Frauen, ausgenommen, dass zu dem kurzen Hüftentuche noch ein andres toga-ähnliches, beim Ausgehen über die eine Schulter geschlagenes Gewand hinzukommt.// Perlen und sonstiger Schmuck umgehen Nacken und Handgelenke. Auch möge man nicht glauben, dass dürftige Kleidung in allen Fällen die Toilettenkosten auf das geringste Maß herabsetze; ich habe Mädchen gesehen, die nichts weiter als eine um die Hüften gewundene Schnur Korallen und Perlen trugen und deren Tracht dennoch kostspieliger war als das eleganteste, mit echten

1.3.2 - Max Buchner et le concubinage comme « solution hygiénique » La vie en concubinage d'un Européen avec une Africaine dans les colonies était parfois considérée, non pas comme un problème, mais comme une solution à un problème. Max Buchner premier Commissaire Impérial allemand au Cameroun, fit l'observation suivante: Mais en ce qui concerne la fréquentation des filles du pays, il faut y voir plus une manière de promouvoir la santé plutôt que de la mettre en danger. [...] Avoir une amie intime, cela vous préserve de bien de dangers.«29 Buchner voyait sans doute dans l'union mixte entre un Allemand et une Africaine une mesure salutaire d'hygiène sexuelle qui fait éviter le vagabondage et la multiplication des partenaires.

Voici l'extrait qui exprime la position de Buchner en 1887, avec son argumentation30 :

On entend souvent dire chez nous que les jeunes négociants en Afrique de l'Ouest ruinent leur santé par une vie de débauche. Il est vrai que la soif d'alccol fait là-bas pas mal de victimes, notamment dans les rangs des Anglais. Il faut mettre ces cas sur le compte du climat. Car, en Europe, ces personnes n'auraient certainement pas eu besoin de se saoûler. La chaleur et la fièvre causent trop souvent une envie maladive de boire que l'eau tiède n'arrive pas à satisfaire, si bien que l'on réclame des boissons plus fortes pour contrebalancer. Mais en ce qui concerne la fréquentation des filles du pays, il faut y voir plutôt une manière de promouvoir la santé que de la mettre en danger.Sous la peau noire aussi, l'éternel féminin reste un excellent fétiche contre l'abrutissement du caractère qui vous envahit trop facilement quand on vit dans la solitude en Afrique. En outre, dans cette affaire, il faut tenir compte aussi des avantages pratiques pour la sécurité personnelle. Avoir une amie intime, cela vous préserve de bien de dangers. Chacun peut avoir son opinion à propos du caractère immoral de telles relations. Mais à propos de ce que les missionnaires pieux affirment souvent, à savoir que leurs fidèles feminines sont soumises à toutes sortes d'immorales astuces de séduction de la part des factoristes blancs,il semble bien que ce soit souvent tout à fait le contraire.

29 `'Was aber den freien Umgang mit den Töchtern des Landes betrifft, so ist drin mehr eine Förderung als eine Schädigung der Gesundheit zu erblicken. [...] Eine intime schwarze Freundin zu haben, schutzt vor manchen Gefahren» (Buchner 1887: 245f)

30 Man begegnet bei uns oft der Meinung, dass die jungen Kaufleute in Westafrika ihre Gesundheit durch ein ausschweifendes Leben ruiniren. Es st [sic!] wahr, dass die Trunksucht dort manches Opfer fordert, namentlich unter den Engländern. Derlei Fälle sind unbedingt auf die Rechnung des Klimas zu setzen. Denn zu Hause in Europa wären die Betreffenden wahrscheinlich nüchtern geblieben. Hitze und Fieber erzeugen nur zu häufig einen krankhaften Durst, den das lauwarme Wasser nicht zu stillen vermag, so dass man nach stärkeren Gegenreizen verlangt. Was aber den freien Umgang mit den Töchtern des Landes betrifft, so ist darin mehr eine Förderung als eine Schädigung der Gesundheit zu erblicken. Das ewig Weibliche ist auch unter der dunklen Haut ein vortrefflicher Fetisch gegen die Verkümmerung des Gemütes, der man in afrikanischer Einsamkeit so leicht verfällt. Außer diesem seelischen Werte kommen aber auch in derselben Angelegenheit noch praktische Vorteile der persönlichen Sicherheit in Betracht. Eine intime schwarze Freundin zu haben, schützt vor manchen Gefahren. Über das Unmoralische derartiger Verbindungen lässt sich streiten. Aber was die frommen Missionare so oft behaupten, nämlich dass ihre weiblichen Lämmer von Seiten der sittenlosen Faktoristen den Nachstellungen teuflischer Verführungskünste ausgesetzt seien, verhält sich meist umgekehrt.« (Buchner 1887 : 154f)

L'opinion de Buchner est du reste confirmée ultérieurement par le « sexologue » allemand Felix Bryk, auteur de l'ouvrage à sensation paru en 1924 sous le titre Neger-Eros - Ethnologische Studien über das Sexualleben bei Negern (Eros nègre - Etudes ethnologiques sur la vie sexuelle chez les Nègres), traduit en anglais dès 1933 et réédité sous le titre Voodoo-Eros (en 2001). Bryk affirme31: La question des relations sexuelles des Blancs avec les Noires fait partie des questions les plus vitales de toute la politique coloniale, parce qu'elle se rapporte, avant tout, aussi bien au bien-être corporel qu'au bien-être mental des colons blancs, évidemment, le bienêtre du Noir ne compte pas. Mais pour des raisons d'hypocrisie, cette question n'a pas été abordée publiquement jusqu'à présent.« Et Bryk ajoute32 Je ne connais aucun homme blanc en bonne santé qui ait vécu longtemps dans les colonies, sans avoir eu régulièrement des rapports avec des femmes noires, et cela concerne tous les hommes de toutes les couches sociales.«

On peut donc constater que l'union mixte n'était ni problématique, ni stigmatisée avant l'arrivée des Allemands en 1884, mais Zöller suggérait déjà que cela devrait changer. Et cela allait rapidement changer, notamment, dès l'arrivée du Commissaire Jesko von Puttkamer au Togo33. Puttkamer confirmait les observations de Zöller, notamment dans un rapport adressé à la Chancellerie Impériale à Berlin dès le 31 mai 1888 (cité in Sebald 1992 :112) : Dans ce protectorat [du Togo], il arrive souvent que les Européens établis ici fassent des enfants avec des filles du pays. [...] La plupart du temps, les Européens concernés cherchent généralement à garantir tant bien que mal l'avenir de leurs enfants.« C'est précisément le cas de Heinrich Friedrich Achille Eccarius dont les enfants métis sont nés à l'orée de la colonisation allemande : l'administration colloniale n'a pas encore les moyens de lutter contre les relations entre Allemands et Africaines ; elle se contente donc de prendre acte, tout en prenant le temps de réfléchir sur la meilleure manière de lutter contre cette situation. Voyons donc l'évolution du cas des enfants de H. F. Achille Eccarius.

31 Die Frage der geschlechtlichen Beziehungen der Weißen zu den Schwarzen gehört zu den vitalsten der gesamten Kolonialpolitik, weil sie sich vor allem auf das körperliche wie seelische Wohl des weißen Kolonisten - das des Schwarzen zählt ja nicht - bezieht ; sie wurde aber aus heuchlerischen Motiven bisher öffentlich nicht erörtert.« (cité in Petschull 1984 :132)

32 Ich kenne keinen gesunden weißen Mann, der längere Zeit in den Kolonien gelebt hat, ohne regelmäßige Beziehungen zu schwarzen Frauen gehabt zu haben, und das betrifft Männer in allen gesellschaftlichen Schichten.« (cité in Petschull 1984 : 124)

33 En juillet 1887, il devient commissaire intérimaire du Togoland, puis consul à Lagos en août 1888 et de nouveau commissaire impérial pour le Togo de 1889 à 1893 avec le titre de Landeshauptmann« source: http://fr.wikipedia.org consulté le 08-11-2011.

1.3.3 - La descendance de Heinrich Friedrich Achille Eccarius

Au début des années 1880, le commerçant allemand Heinrich Friedrich Achille Eccarius, agent de la firme « Hansa Faktorei (Max Grumbach) » à Aneho, a eu de son union avec la fille du roi d'Agbanakin, deux enfants. La publication consacrée à cette union mixte (Oloukpona-Yinnon & Béré-Coulibaley 2007)34 montre comment ce couple a engendré en Afrique une véritable collectivité dont le Juif allemand Heinrich Friedrich Achille Eccarius est l'ancêtre.

Heinrich Friedrich Achille Eccarius est un personnage-clé des événements qui ont conduit à la proclamation du protectorat allemand sur le Togo en 1884. Il constitue avec Randad et Daake le trio de commerçants allemands qui forca la main au Capitaine Stubenrauch en février 1884 pour obtenir l'intervention militaire de ce dernier à Aného, le 3 février. C'est dans la « Hansa-Faktorei (factorerie Hansa) dont il était le gérant, que se tinrent des pourparlers préliminaires avec l'officier allemand, les notables locaux et les commerçants allemands de la place. Son nom apparaît à plusieurs reprises dans les rapports du Capitaine Stubenrauch35, de même que dans ceux de Gustav Nachtigal qui passa d'ailleurs une nuit dans sa maison à Aného.36

Selon l'enquête orale menée par les auteurs de l'article sur cette famille, le premier métis de la première lignée de la descendance métisse du Juif allemand Heinrich Friedrich Achille Eccarius s'appelait Wingoln Achille Eccarius, né vers 1880, du négociant Heinrich Friedrich Achille Eccarius, un Juif allemand, et de Founikè Kéchtéché, fille aînée du roi de Grand Popo. Il se maria à une Béninoise et ils eurent une fille née vers 1912. Mais celle-ci n'ayant pas eu d'enfants, cette première lignée s'éteignit avec sa mort. Le fils cadet du Juif allemand Heinrich Friedrich Achille Eccarius s'appelait Henri Achille Eccarius (donc une simple francisation des prénoms du géniteur), il est né vers 1883, du même père et de la même mère. Après ses études primaires, Henri Eccarius fut recruté en 1899 comme enseignant à l'Ecole Gouvernementale allemande à Zébévi (Aného) où il exerca jusqu'en

34 La descendance africaine de H. F. Achille Eccarius, un Juif allemand au Togo. Par Franceline CoulibaleyBéré & Adjaï Paulin Oloukpona-Yinnon, in : Adjaï Paulin Oloukpona-Yinnon (éd.): Le Togo 1884-2004 : 120 ans après Gustav Nachtigal. Connaître le passé pour mieux comprendre le présent. Actes du Colloque International de Lomé des 27, 28 et 29 septembre 2004: Lomé, PUL, 2007 pp. 293-310

35 Cf. Woulamatou Gbadamassi & A.Paulin Olokpona-Yinnon (éds) : Le Capitaine Wilhelm Stubenrauch

à Aneho (Togo) en 1884 : Documents de la S.M.S. Sophie« (janvier-février 1884) - Stubenrauchs Berichte aus Westafrika (Januar bis Februar 1884). Dokumente zur Geschichte Togos Edition bilingue français-allemand Deutsch-französische Ausgabe. Document inédit, à paraître instamment.

36 Cf, Peter Sebald : Les cinq jours du Dr. Nachtigal au Togo /2-7 juillet 1884), in : Adjaï Paulin OloukponaYinnon (éd.): Le Togo 1884-2004 : 120 ans après Gustav Nachtigal. Connaître le passé pour mieux comprendre le présent. Actes du Colloque International de Lomé des 27, 28 et 29 septembre 2004: Lomé, PUL, 2007 pp. 1751

1901, puis émigra vers le Cameroun où il fonda une grande famille qui devint prospère. Retourné au Togo, Henri Achille Eccarius est décédé à Lomé le 1er octobre 1957.

Illustration n° 7 : Henri Eccarius-Achille, fils de Heinrich Friedrich Achille Eccarius
(source : Coulibaley-Béré & Oloukpona-Yinnon 2007 : 310)

Comme Jacob Protten Africanus en son temps, Henri Eccarius-Achille fait partie des « métis allemands » du Togo qui ont eu le droit incontestable et incontesté de porter le nom de leur géniteur allemand, et même de transmettre ce nom à leur propre progéniture, sans qu'aucune administration ne puisse les en empêcher. Mais cela va rapidement et radicalement changer avec les métis allemands de l'époque coloniale proprement dite.

1.4 - Quelques exemples de métis de l'époque coloniale allemande

Dans la période précoloniale et dans les premières années de la colonisation allemande, le phénomène des mariages mixtes ne subissait aucun contrôle officiel, et les enfants nés de telles unions voyaient, certes, leur destin lié à la bonne ou à la mauvaise volonté du géniteur blanc, mais en vérité, c'était généralement la famille africaine de chaque mère qui, riche ou pauvre, assurait avec cette dernière l'éducation et la formation de l'enfant. Jusque dans les années avant la fin de la colonisation, le comportement immoral et irresponsable des administrateurs allemands était souvent dénoncé. Dans un article du

Gold Coast Leader (1912), le journaliste écrit à propos de la débauche des fonctionnaires coloniaux37 allemands:

The Togo-Germans are destitute of moral training. They are of German conscription and German militarism locked up in the fort for years under a severe and rigid training; they have lost all their high attainments of moralism. These barbarians here are brought in Africa to contaminate the poor virgins of the Gold Coast and Togoland. If you want a proof I will give you. [...]

Au fur et à mesure que s'amplifiait le phénomène et qu'il s'accompagnait souvent de problèmes sociaux (abandons, errance etc.) que tout le monde pouvait observer, la nécessité de contrôler la situation s'imposait de plus en plus. Au Togo, on peut considérer que le premier déclic décisif pour l'administration fut la naissance de Josef Comla, fils du gouverneur August Köhler en personne. C'était là une affaire très délicate pour l'ensemble de l'administration coloniale, et probablement très embarrassante pour l'administration coloniale à Berlin, si jamais celle-ci venait à en être officiellement informée. La documentation que nous avons rassemblée dans le présent mémoire, prouve que la gestion de cette affaire fut discrète.

1.4.1 - Josef Comla, fils du gouverneur August Köhler : embarras et discrétion Le « mulâtre Josef Comla », comme on l'appelait à l'époque, est né le 17 mars 1897 de l'Allemand August Köhler et de la Togolaise Douha (ou Doaha, Johaha ou Dualia, selon les documents). A cette date, le père portait encore le titre de « Landeshauptmann » (Chef de l'Administration du Territoire) du Togo, avant de devenir officiellement quelques mois plus tard, en 1898, « Gouverneur de la colonie du Togo ».

37 Gold Coast Leader du 6 juillet 1912, auteur: Quashie«

Illustration n° 8a : le Gouverneur Köhler en 1901 (Source : Meinecke 1901: 2)

August Köhler, né le 30 septembre 1858 à Eltville (sur le Rhin, près de Wiesbaden), avait été d'abord juge assesseur avant d'entrer à la Direction des Affaires coloniales au Ministère des Affaires Etrangères à Berlin, en février 1891. La même année il fait partie de l'expédition de Curt von François dans le Sud-Ouest Africain Allemand (aujourd'hui Namibie), en tant que Conseiller pour les questions juridiques, à la suite de quoi il est demeuré administrateur dans cette colonie juqu'en 1894. C'est en février 1895 qu'il est affecté au Togo38. Il venait donc de faire à peine deux ans au Togo lorsque survint la naissance de Josef Comla. Ceci suppose qu'il a eu cette liaison très peu de temps après son arrivée. Or, en tant qu'autorité suprême de la colonie, il avait la réputation d'être un

38 Köhler prenait ainsi la succession de Puttkamer nommé gouverneur au Cameroun. Il sera d'ailleurs souvent appelé à assurer l'interim de Puttkamer comme gouverneur du Cameroun (Sebald 1958:158)

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homme sévère : « Er galt als energischer Verfechter deutscher Sitte und Moral »39 (Il était considéré comme un défenseur énergique de la morale et des moeurs allemandes). Son portrait ornait des cartes postales, comme on le voit dans l'illustration n° 8a. Il est mort le 20 janvier 1902, à Lomé40 et est enterré au cimetière municipal de Lomé où sa tombe demeure la plus prestigieuse parmi celles de tous les Allemands qui y reposent..

Deux actes historiques fondamentaux ont marqué l'action d'August Köhler à la tête de l'administration coloniale au Togo : c'est lui qui a signé et appliqué l'acte de transfert de la capitale de la colonie d'Aného-Zébé à Lomé le 06 mars 1897 ; c'est aussi sous lui que fut décidée la construction du Palais du Gouverneur qui est devenue - et qui reste encore aujourd'hui - l'une des plus belles réalisations et attractions de la capitale Lomé.

Dans les documents officiels, le fils du gouverneur est appelé tout court « Josef Comla ». Les auteurs des documents évitent ainsi - autant que possible - de mentionner le nom du père, August Köhler. Peu de temps après sa naissance, Josef Comla est discrètement confié à un autre administrateur allemand nommé Jacobi, assistant des douanes, nouvellement arrivé dans la colonie, et qui a - pour ainsi dire - adopté l'enfant et « épousé » sa mère avec laquelle il aura un autre enfant nommé Paul Quakuvi Jacobi.

Pendant dix ans, les textes ne révèlent rien de l'enfant du gouverneur, ni d'ailleurs de sa mère, sans doute parce qu'il y a eu dès 1898 entre August Köhler et le douanier Jacobi une sorte de « gentleman agrement » dont les termes ne sont pas rendus publics. Une chose est certaine : monsieur Jacobi s'est bien occupé de Josef Comla, comme il l'a fait de son propre fils Paul Quakuvi. Lorsque dix ans plus tard, la prolifération des métis allemands était devenue un problème public, le gouverneur Zech prit des mesures pour gérer la situation. C'est dans ce contexte que l'affaire du fils du gouverneur devient publique, puisqu'elle va faire l'objet de procédures judiciaires dont les documents ici présentés en retracent le contenu.

39 Petschull 1984 :124

40 H. Seidel écrit, sans doute par erreur « à l'âge de 42 ans », cf. Heinrich Seidel in Globus Band 81 (1902/1), pp. 208-209: Togo im Jahre 1901. Unser Bericht über die letztjährige Entwicklung des Schutzgebietes muss diesmal mit einer Todesanzeige beginnen. Im Januar verstarb in Lome der bisherige Gouverneur A. Köhler, nur 42 Jahre alt, nachdem er beinahe 11 Jahre im Kolonialdienst thätig gewesen war. Er hatte zuerst in Südwestafrika und dann - seit 1895 - in Togo gewirkt, zu dessen höchstem Amt er 1898 aufgerückt war. Auf seinem Posten erwies er sich stets als ein gerader, ehrlicher Charakter, dem das Gedeihen des Landes ernstlich am Herzen lag. Sein Hingang bedeutet daher einen schweren Verlust für die Kolonie, der er den Ruf verschafft hatte, dass sie von allen unseren auswärtigen Besitzungen die am besten verwaltete sei. Bekannt und geschätzt waren u.a. die klaren, eindringenden Berichte, die während seiner Amtsführung von den Bezirks- wie Stationsleitern nach Deutschland gesandt wurden. Sie gaben fast immer ein zutreffendes Bild der jeweiligen Lage und wurden deshalb nicht selten als Muster für gewisse andere Kolonialverwaltungen hingestellt. [...]»

Le 21 mars 1907 (Josef Comla avait alors 10 ans et son père était décédé depuis 5 ans), le gouvernemeur Zech demanda aux héritiers allemands du feu gouverneur Köhler de s'occuper des frais de scolarité et d'hébergement de son enfant métis. Certes, la garde de l'enfant avait été confiée à l'assistant des douanes Jacobi qui, jusque là, s'en occupait assez bien, mais les dépenses effectuées ne lui étaient pas remboursées, ni par la famille Köhler, ni par l'administration coloniale. Dans un document en date du 16 août 1909, l'assistant des douanes Jacobi déclare41:

Je ne reconnais aucune obligation de prendre soin de l'enfant métis Josef Komla. L'enfant était avant mon arrivée dans la colonie. Dans l'intérêt de la mère de Komla, je suis prêt à acheter pour

l'enfant métis Paul dont je suis le géniteur, la moitié-arrière du lot acquis pour Komla, si l'accès à cette moitié-arrière est garanti par un passage légal dûment notifié, et si je suis autorisé, en contrepartie, à construire sur le reste du lot de Komla une maison d'une valeur minimale de 250 marks. Komla sera propriétaire de cette maison, cependant, mon enfant et sa mère doivent avoir le droit d'y vivre au moins 5 ans.

Cette déclaration suppose qu'il y a eu une plainte, mais il n'est pas facile de savoir de qui elle provenait: de la mère de Josef Comla et Paul Quakuvi ou des parents maternels du fils du gouverneur qui auraient appris que les héritiers de ce dernier avaient droit à une part d'héritage ou de dédommagement, ou encore de la part de la Mission Catholique à Lomé qui avait pris l'enfant en charge dans son école. Cela n'est pas facile à établir avec certitude à partir des documents relatifs à cette affaire. Quoi qu'il en soit, une note officielle en date du 6 aôut 1907 précise42

L'argent n'est pas encore parvenu. Jusqu'à présent, Jacobi n'a pas encore introduit de requête de liquidation et déclare à ce sujet, qu'il ne peut pas le faire. Il propose d'acheter au jeune-homme, avec l'argent de l'héritage de Köhler, un terrain sur lequel il pourrait vivre avec sa mère : La Mission Catholique accorde depuis un an le gîte et le couvert à Jos. Köhler, elle va formuler aussi ses prétentions [à l'héritage], dès qu'elle sera informée de l'arrivée de l'argent. La meilleure solution devrait être de prendre le jeune homme comme pensionnaire de l'nécole gouvernementale.

Jacobi mourut en 1912 à Leipzig, laissant derrière lui un fils métis, Paul Quakuvi, à qui il a
fait don d'un terrain et d'une maison pour respecter la coutume des Européens de
dédommager les enfants issus de rapports extra-conjugaux avec une indigène. Selon les

41 Irgendeine Verpflichtung, für das Mulattenkind Josef Komla zu sorgen, erkenne ich nicht an. Das Kind war vorher geboren, bevor ich ins Schutzgebiet kam. Im Interesse der Mutter des Komla bin ich bereit, die hintere Hälfte des für Komla erworbenen Grundstückes für das von mir erzeugte Mulattenkind Paul zu kaufen, falls der Zugang zu dieser Hälfte durch eine entsprechende Weggerechtigkeit gesichert und mir gestattet wird, als Entgelt auf dem dem Komla verbleibenden Restgrundstück ein Haus im Werte von mindestens 250 M zu errichten. Komla soll das Eigentum an diesem Haus haben, jedoch soll mein Junge und die Mutter auf mindestens 5 Jahre ein Wohnrecht in dem Haus behalten.«

42 Das Geld ist noch nicht eingetroffen. Jacobi hat bislang noch keine Liquidation eingereicht und erklärt sich hierzu ausser Stande. Er schlägt vor, dem Jungen von dem Geld der Köhlerschen Erben ein Grundstück zu kaufen, auf dem er mit seiner Mutter wohnen könnte. Die Kath.Mission gibt seit einem Jahr dem Jos. Köhler Wohnung und Essen, sie wird mit ihren Ansprüchen kommen, sobald sie von dem Eintreffen des Geldes Kunde hat. Es dürfte am zweckmässigsten sein, den Jungen als Kostschüler in die Regierungsschule aufzunehmen.«

notes d'archives du commissaire de police Bähr en date du 14 avril 1913, le fils de Jacobi aurait été embauché à la direction d'une l'entreprise, et Josef Comla continuerait à fréquenter l'école de la mission catholique, et il n'y aurait plus d'argent auprès du gouvernement colonial pour ces deux enfants.

Illustration n° 8b : Köhler, père et fils, jamais réunis !

Face à la confusion qui règne dans les documents allemands au sujet de cette affaire, il est important de prendre en considération le seul témoignage direct dont nous disposons sur elle : l'interview que le fils du gouverneur, Josef Comla, a donnée à monsieur Simtaro en 1981 et à travers laquelle nous apprenons qu'en fait, sa mère s'appelait Duaha (ce qui signifie « à côté de la ville ») et qu'elle fut baptisée Hanna (Simtaro 1982 :673).

Lorsque le journaliste allemand Jürgen Petschull, pour les besoins du Centenaire de la colonisation allemande en Afrique en 1984, effectua un voyage au Togo et rendit visite à Josef Comla, ce dernier, vieux et malade, l'accueillit avec ces mots appris par coeur : « Ich bin Joseph Köhler, der Sohn des Gouverneurs » (Je suis Joseph Köhler, le fils du gouverneur »)43. En réalité, il n'a jamais eu le droit de porter ce nom du temps des Allemands, et rien de sa vie ne porte la marque du rang du gouverneur qui fut son géniteur. Qu'a-t-il gardé comme

43 Cité in Petschull 1984 :124

souvenir de son père ? Ce dernier l'a-t-il jamais pris une fois dans ses bras ? L'a-t-il reconnu comme son enfant, même extra-conjugal ? S'est-il occupé de lui ? Dans le jugement final qui a clôturé l'affaire de Josef Comla - du moins selon les documents ici présentés - ce dernier devait payer à sa mère une partie des sommes que Jacobi avaient investies pour son éducation et la construction de son logement, car Jacobi avait déclaré devant le juge Dr. Asmis44 :

Mais je m'engage à faire au profit de Josef Komla des dépenses supplémentaires au delà des 250 marks, uniquement à condition que Josf Komla prenne l'engagement de rembourser à sa mère Tohaha, dès qu'il le pourra, le montant des dépenses supplémentaires engagées pour lui. Jusqu'au remboursement total de cette dette, Tohaha doit avoir le droit d'utiliser aussi l'habitation de Komla.

Josef Comla aura ainsi à payer, dès qu'il aura commencé à travailler, une somme estimée à plus de 530 marks à l'époque. Il y a de quoi penser que, depuis son enfance, il doit avoir vécu sa naissance comme un mauvais sort qui lui fut jeté.

Nous aurions voulu connaître bien de choses sur la vie de Josef Comla Köhler, mais il n'est pas certain que ses desendants soient disposés, à l'instar des autres familles de métis, à étaler sur la place publique, leur version de l'histoire du « fils du gouverneur », encore moins celle de sa mère qui fut sans aucun doute la double victime dans cette affaire : deux enfants à charge fils de deux pères différents, aucun vrai statut de conjointe reconnue, identité totalement occultée et niée. Qu'a-t-elle été toute sa vie : une «maîtresse », une « concubine », une « épouse », ou tout simplement une « fille-mère » ? En effet, non seulement il règne la plus grande confusion dans les textes au sujet de son nom (Tohaha, Dohaha, Dualia), mais à travers ces documents allemands, on n'apprend pratiquement rien sur son origine et sur sa famille, sur sa vie et sur son parcours. Et surtout rien sur sa liaison avec le gouverneur Köhler. Comme si elle n'avait pas existé !

August Köhler ne fut pas le seul gouverneur du Togo à avoir engendré un métis au Togo. Le dernier gouverneur du Togo, Adolf Friedrich Herzog zu Mecklenburg, eut lui aussi un fils nommé Koffi (Simtaro 1982 : 896). Il est connu au Togo sous le nom de Herzog Koffi, bien que « Herzog » ne soit pas le nom de famille de son père allemand. C'est pourquoi, dans ce cas aussi, le secret fut bien gardé. Le Vice-Gouverneur Hans-Georg von Doering eut aussi plusieurs enfants dont un fils connu sous le nom de « Vondoli », une déformation du nom de son père allemand, et une fille nommée Luise von Doering.

44 Zu den Mehrleistungen über den Betrag von 250M hinaus zu Gunsten des Josef Komla verpflichte ich mich aber nur unter der Bedingung, dass Josef Komla verpflichtet wird, den für ihn aufgewandten Mehrbetrag an seine Mutter Tohaha zurückzuzahlen, sobald er erwachsen ist. Bis zur Tilgung dieser Schuld soll die Tohaha für sich berechtigt sein, auch den Komla'schen Raum zu Benutzen.«

1.4.2 - Les enfants de Hans Gruner

Hans Gruner est arrivé au Togo en 1892 et devint le chef de la Station de Misahöhe. Docteur en philosophie, le lieutenant de réserve Gruner, resté célèbre au Togo par son poids et sa remarquable connaissance des coutumes évhé de Palimé.« (Cornevin 1969:148), il est nommé chef de l'expédition allemande vers l'hinterland du Togo (Togo-Hinterland-Expedition«) de 1894 à 1895, et devint ainsi l'initiateur de la plupart des traités signés avec les souverains de l'intérieur du pays qui donneront lieu aux négociations pour la formation territoriale du Togo allemand. Comme cette expédition partie de Misahöhe le 5 novembre 1894 le mena jusqu'au fleuve Niger, Hans Gruner peut aussi se vanter d'avoir été l'un des premiers administrateurs coloniaux allemands à sillonner la quasi-totalité du Togo allemand. Il participa aussi aux diverses guerres de conquête de 1896-1897, notamment en pays bassar, konkomba, tchiokossi. Par contre, malgré son titre de docteur en philosophie qui faisait de lui - a priori - plutôt un intellectuel, il a très peu publié de contributions scientifiques45 sur le Togo où il a pourtant vécu, de manière presque continue, de 1892 à 1914. Il n'a d'ailleurs jamais pu terminer et publier ses notes de voyages qui n'ont été éditées et publiées qu'en 1997 sous le titre Vormarsch zum Niger. Die Memoiren des Leiters der Togo-Hinterland-expedition 1894/1895. Dans le commentaire de l'historien Ulrich van der Heyden, éditeur de la collection Cognoscere dans laquelle paraît cette publication (p. 412), les documents publiés sont considérés comme une forme de rencontres culturelles« (Kulturkontakt« entre les Allemands et les pays étrangers concernés. Dans le cas de Hans Gruner, ses Mémoires ne peuvent guère être lus comme une rencontre entre la culture allemande et la culture togolaise, mais plutôt comme une documentation détaillée des méthodes et des moyens mis en oeuvre dans la tentative allemande de conquête de l'hinterland du Togo en 1894-1895.

45 Cornevin (1969) signale de lui seulement un commentaire d'une carte (H. Gruner: Begleitworte zur Karte des Sechsherrenstocks [Amandeto], in : Mitteilungen von Forschungsreisenden und Gelehrten aus den deutschen Schuztgebieten, 26, 1913, p. 26) et deux co-publications (H. Gruner/A. Mischlich, v. Seefried/V. Danckelmann : Über das Harmattanphänomen inTogo, in : Mitteilungen von Forschungsreisenden und Gelehrten aus den deutschen Schuztgebieten, 12, 1899, p. 1, et H. Gruner/E. Baumann : Die Resultate der meteorologischen Beobachtungen in Misahöhe, in : Mitteilungen von Forschungsreisenden und Gelehrten aus den deutschen Schuztgebieten, 9, 1896, p. 53.).

Illustration n° 9a : Les trois « héros de l'expédition de 1894-1895 :
Dr. Hans Gruner assis au milieu, Ernst von Carnap-Quernheimb debout à droite
et Dr. med. Richard Doerung debout à gauche (source : Gruner 1997:9)

A propos de Gruner lui-même, Ulrich van der Heyden écrit (p. 413)46:

Gruner avait une capacité d'observation intacte et n'avait pas, comme plusieurs de ses semblables de caste et de profession, des préjugés envers les Africains. Il n'était à proprement parler, ni un ami, ni un admirateur des Africains, ni un défenseur de leurs droit face aux exactions de conquête des Allemands, mais il restait un observateur lucide et intelligent.

En réalité, les mémoires de Hans Gruner ne concernent que la toute première partie de sa traversée de l'Afrique, et comme il s'agissait en grande partie d'un document destiné à l'opinion publique, il s'était bien gardé d'y mentionner les événements personnels de sa vie privée. Ses Mémoires donnent donc de lui, l'image d'un homme sérieux et rigoureux,

46 Gruner verfügte indes über eine unbelastete Beobachtungsgabe und war weit weniger voreingenommen gegenüber den Afrikanern als viele seiner Standes- und Berufsgenossen. Er war kein ausgesprochener Freund oder Bewunderer der Afrikaner oder ein Verteidiger ihrer Rechte gegenüber den kolonialen Eroberungsgelüsten Deutschlands, aber er war ein nüchterner und intelligenter Beobachter.«

46

intègre et irréprochable. Cela est moins vrai pour l'autre page de sa vie d'administrateur colonial. Donc deux vies, deux faces. Selon Robert Cornevin (1969: 172), Hans Gruner fait partie des premiers administrateurs [qui] ont laissé dans le souvenir des indigènes une marque profonde. A Palimé, dans les palabres, on invoque longtemps le souvenir du Dr Gruner. « Mais Cornevin, un des administrateurs français qui ont pris la relève des Allemands au Togo, ne précise pas la nature exacte des souvenirs que la population garde de Hans Gruner. Et pour cause ! Cet administrateur allemand avait visiblement un goût immodéré pour les filles du pays. Ses « frasques sexuelles » ont fait l'objet de critiques publiques dans le journal Gold Coast Leader de cette époque qui affirme qu'il avait un vrai harem« au Togo. Dans le Gold Coast Leader du 30 décembre 1911, un journaliste écrit sur l'immoralité des fonctionnaires coloniaux allemands, et particulièrement leur vie sexuelle, en citant Hans Gruner comme prototype : «Go to Kpalime and you will see Dr. Grunar there, surrounded by his proud secretaries. Go to the Government House at Misahoe, and you will see him surrounded by a host of black girls, and yet he hates the black man.» 47 Dans un autre article du Gold Coast Leader (1912), le journaliste reprend à propos de la débauche des fonctionnaires coloniaux48: Grunar, the King of Valanie, with his Harems of young girls, he has since married [1912 a German wife]49. Comme on peut le voir sur une photo coloniale (illustration n° 9b), sa favorite du moment est visiblement le principal objet d'exhibition de l'administrateur. Elle a posé torse nu, les seins nus exposés aux regards de tout le monde, même des jeunes garçons qui servaient le maître comme elle-même. Mais a-t-elle posé volontairement ou selon la volonté de son « maître »? Nous avons ici une illustration partielle de l'esprit d'immoralité et de débauche que dénoncent les journalistes du Gold Coast Leader, qui sont d'ailleurs des Togolais exilés en Gold Coast à cette époque. Désormais maîtres du pays dans toute la colonie, les administrateurs coloniaux se comportaient en véritables potentats locaux, assurés de l'impunité en ce qui concerne les questions de moeurs, car ils ne faisaient qu'imiter la plus haute autorité de la colonie : le gouverneur.

47 Gold Coast Leader du 30 décembre 1911, Quashie

48 Gold Coast Leader du 6 juillet 1912, Quashie

49 Il faut noter que Hans Gruner ne dit aucun mot sur ses frasques amoureuses au Togo dans ses Mémoires parus sous le titre Gruner, Hans, 1997 : Vormarsch zum Niger. Die Memoiren des Leiters der Togo-HinterlandExpedition 1894-189 Berlin : Edition Ost, édité par Peter Sebald.

Illustration n° 9b : Dr. Hans Gruner, chef du District de Misahöhe (source : Trotha 1994 : 85). Légende de la photo (en noir & blanc) 50: Stationsleiter Dr. Hans Gruner vor dem im Bau befindlichen Hauptgebäude der Station Misahöhe mit (stehend v.l.n.r.) Max Bruce, Diener, William Bruce, Koch und Diener, Karl Garber, Dolmetscher, Foli, Diener, Fritz Togbe, Diener«

Apparemment, dans une troisème phase de sa vie, ce qui est historiquement décrit comme « frasques » dans la vie de l'administrateur Hans Gruner, a manifestement un peu changé, puisque sa vie dans la colonie s'est couronnée par des liaisons qui ont donné une famille togolaise parfaitement honorable, avec deux enfants devenus des Togolais respectés : Johannes Kodjo Gruner et Hans Komla Gruner (Simtaro 1982: 695, interview n° 9). Hans Gruner - selon les témoignages ultérieurs - a assumé avec une honorabilité exemplaire, ses responsabilités paternelles.

50Source: Staatsbibliothek Preußischer Kulturbesitz, Berlin, Nachlass 250 (Dr. Hans Gruner), Kasten 23

48

Illustration n° 9c : « Hans Komla Gruner » à Lomé (dans les années 1980) avec les photos de ses parents

Selon les propos de Hans Komla Gruner lui-même, il est né le 26 octobre 1910, cela correspond approximativement à la période où son père Hans Gruner semble s'être assagi après, presque 20 ans après son arrivée dans la colonie du Togo.

Dans l'interview qu'il a accordée au journaliste Petschull à Lomé, Hans Komla Gruner51 raconte comment son père Hans a connu sa mère Nutsua à Kuma-Tokpli, dans le Kloto52:

Mon père fit, avec sa troupe allemande, son entrée à cheval dans un village situé dans l'arrière-pays du Togo, près de Misahöhe. Pour l'accueillir, il fut organisé par les indigènes un grand tam-tam. Les hommes battaient le tam-tam et les femmes dansaient. Mon père jeta dans la foule, en guise de cadeau, des pièces de monnaie. C'est là que mon père a vu ma mère pour la première fois. En effet, contrairement aux autres, elle ne s'est pas baissée pour ramasser les pièces; elle est restée debout à regarder les étrangers d'un air de rejet, presque d'hostilité.«

51 Comme dans la descendance d'Eccarius, le fils porte le prénom (ou un des prénoms) du père!

52 Mein Vater ritt mit seiner deutschen Truppe in ein Dorf ein, das im Hinterland von Togo bei Misahöhe liegt. Zu seiner Begrüßung veranstalteten die Eingeborenen ein großes Tamtam. Die Männer schlugen die Trommeln, und die Frauen tanzten. Mein Vater warf als Dank Pfennigstücke in die Menge. Dabei hat mein Vater meine Mutter zum erstenmal gesehen. Die hatte sich nämlich im Gegensatz zu den anderen nicht nach den kleinen Geldstücken gebückt; sie ist stehengeblieben und hat die Fremden abweisend, beinahe feindselig angeblickt.« (Petschull 1984 :119)

Et le journaliste ajoute ce commentaire avec une ironie à peine voilée53:

Hans Gruner [junior] raconte tout cela dans un allemand parfait et d'une manière détaillée, comme si lui-même avait assisté à la scène. Il dit que sa mère lui a raconté cette scène plusieurs fois. `Ma mère appartenait à l'ethnie ewe. Elle était la fille d'un chef de village. C'était une belle femme. Le soir -même de cette visite de la troupe allemande, son père a envoyé un adjudant au chef de village pour lui annoncer, qu'il souhaite faire la connaissance de sa fille et l'épouser. Quelques jours plus tard, le mariage a été célébré selon les usages du pays. Avec tam-tam et danse, beaucoup de danse et beaucoup de tam-tam.' Un mariage qui, selon le droit allemand, n'en était pas un.

Effectivement, la « description africaine », romantique et idyllique, que Hans Komla Gruner donne de la rencontre historique de ses parents, correspond probablement très peu à la réalité. En tout cas, comme le souligne à juste titre Jürgen Pettschull, le mariage africain qui fut célébré entre ces deux personnes, n'avait aucune validité aux yeux de la législation allemande, et cela constituait déjà un fardeau fatal pour les enfants à naître de ce couple mixte. Hans Komla Gruner raconte d'ailleurs qu'il n'a qu'un seul souvenir de son père (p. 120)54:

Il n'a de son père qu'un seul souvenir, mais un souvenir intensif: `je devais avoir environ trois ans et demi ou quatre ans. Mon père m'a pris dans ses bras et m'a jeté plusieurs fois en l'air, si haut que j'ai eu le vertige et que j'ai tremblé de peur. Puis mon père a dit à ma mère, d'une voix forte et lugubre: `Tout ce que tu fais, fais-le pour notre fils. Il doit être pour toi, plus important que toi-même.' Ensuite son père serait allé à la guerre. Il aurait été fait prisonnier par les Français en 1914, après la bataille perdue pour la défense de la station télégraphique allemande de Kamina, dans la haute plaine du Togo. Relâché quelques mois plus tard, il aurait rejoint l'Allemagne. Mais il avait versé auparavant, à la Caisse d'Epargne à Lomé, 300 marks. Nutsua devait en utiliser les intérêts pournourrir et élever leur fils.

Hans Komla Gruner fréquenta l'école de la Mission de Brême à Lomé, sortit major de sa promotion au concours de 1927, devint plus tard instituteur et eut une longue carrière et une nombreuse famille (11 enfants). Après sa retraite en 1966, il eut l'opportunité d'aller à Jena en Allemagne pour faire la connaissance de son demi-frère Wilhelm Gruner, né du mariage du père après la première guerre mondiale. Il commente cette rencontre historique en ces termes (p. 121): « Ich wurde aufgenommen, als hätte ich schon immer zur

53 Hans Gruner [junior] erzählt in perfektem Deutsch, so detailliert, als sei er selber dabei gewesen. Seine Mutter, erklärt er, habe ihm diese Szene viele Male geschildert. `Meine Mutter gehörte zum Ewe-Stamm. Sie war die Tochter des Dorfhäuptlings. Sie war eine schöne Frau. Noch am Abend nach dem Einzug der deutschen Schutztruppler hat sein Vater einen Adjudanten zum Dorfhäuptling geschickt und ihm ausrichten lassen, dass er seine Tochter kennenlernen und heiraten wolle. Ein paar Tage später ist bereits nach Landessitte Hochzeit gefeiert worden. Mit Trommeln, Tanz und viel Tamtam. Eine Hochzeit, die nach deutschem Recht keine war.«

54 An seinen Vater hat er nur eine einzige, aber intensive Erinnerung: `Ich muß dreieinhalb oder vier Jahre alt gewesen sein. Mein Vater hat mich auf den Arm genommen und ein paarmal so hoch in die Luft geworfen, dass mir schwindlig geworden ist und ich vor Angst gezittert habe. Dann hat mein Vater mit lauter, dunkler Stimme zu meiner Mutter gesagt: `Alles, was du tust, tue für unseren Sohn! Er muß für dich wichtiger sein als du selbst'. Danach sei sein Vater in den Krieg gezogen. 1914, nach der verlorenen Schlacht um die deutsche Funkstation Kamina auf der Hochebene Togos, sei er in französische Gefangenschaft geraten und ein paar Monate später nach Deutschland entlassen worden. Zuvor habe er noch auf der deutschen Sparkasse in Lomé 300 Reichsmark eingezahlt. Von den Zinsen sollte Nutsua den gemeinsamen Sohn ernähren und großziehen.«

Familie gehört. Am liebsten wäre ich in Deutschland geblieben. (J'ai été accueilli comme si j'avais toujours fait partie de la famille. De préférence, j'aurais voulu rester en Allemand«).

Hans Komla Gruner semble être le seul métis allemand du Togo qui a eu la possibilité d'aller en Allemagne au pays de son père, et de faire connaissance avec la famille allemande de ce dernier. C'est à juste titre que dans son interview recueillie par Dr. Simtaro (encadré n° 2), il parle de son père et de ses frères avec fierté :

Vous savez, nous étions quatre frères Gruner: deux Allemands et deux Métis:

1. Mon frère aîné Johannes Kodjo Gruner (métis), né à Akposso-Tomegbé de Aku, originaire d'Akposso-Tomegbé, mort en 1952 à Kpalimé et enterré au cimetière protestant.

2. Moi-même Hans Komla Gruner (métis), né le 26 octobre 1910 de Woegblo Nutsua à AgoméTomégbé.

3. Mon frère Hans Gruner Junior (Allemand), né le 12 mai 1912, tombé au front le 8 novembre

1943.

4. Mon frère Wilhelm Gruner (Allemand), âgé de 65 ans« (Simtaro1982: 695).

Peu de métis allemands« du Togo peuvent s'estimer aussi heureux que lui. C'est donc l'exemple modèle qui permet de présenter l'histoire des métis allemands« de l'époque coloniale comme des enfants « comme tous les autres ».

Encadré n° 2

Entretien avec M. Hans Komlan Gruner, à son domicile à Lomé, 28, rue Bugeaud (quartier des Etoiles), le 17 mars 1981 à partir de 17 heures et le 19 mars à partir de 16 heures 15'.

Agé de 71 ans, l'ancien instituteur et Directeur d'Ecole Hans Komlan Gruner, retraité depuis le 1er janvier 1966, est fils métis-allemand du Dr Hans Gruner, ancien Bezirksamtmann (Commandant de Cercle) de Misahöhe (actuelle circonscription administrative de Kloto). Mon informateur est aussi Vice-président de l'Association des métis du Togo.

Après mon passage au début du mois de février 1981 dans son village natal de Tomégbé (dans le Kloto) où j'interviewe son vieil oncle maternel, le très hospitalier Emil Kossi Kuma Nutsua, et l'octogénaire Mme Yoho Biaku, mère d'un métis allemand (Schwinger), j'arrive le 17 mars, dans la matinée, au domicile de M. Gruner à Lomé, 28, rue Bugeaud, près du boulevard circulaire, non loin du commissariat central. La charmante Mme Gruner (métis) m'accueille. Son mari est sorti. Je vais repasser entre 16h30' et 17 heures. L'après-midi donc je suis au rendez-vous à l'heure. M. Gruner m'attend dans son fauteuil sur sa terrasse. Aussitôt l'objet de ma visite exposé explicitement, mon informateur tout souriant et visiblement intéressé par mon enquête, se lance dans un passionnant récit qu'il illustre par des photos et des papiers de ses albums et archives personnels qu'il me fait voir ainsi que les grands portraits de ses parents, accroché au mur du salon. C'est dans la même atmosphère cordiale et détendue que notre agréable interview, interrompue à la tombé de la nuit, reprendra quarante huit heures plus tard.

Gruner :- Eh bien, ma femme m'a dit que vous alliez revenir ce soir, et je vous attendais. Je n'avais pas très bien compris le but de votre visite. Vous savez, je suis toujours très heureux de voir nos jeunes gens qui travaillent sérieusement, qui font des recherches qui seront un jour utiles à notre pays, à notre histoire. Votre enquête sur le souvenir des Allemands au Togo m'intéresse particulièrement. Vous êtes courageux mon ami, car c'est très difficile de parcourir tout le pays pour recueillir des souvenirs et témoignages. Je vous souhaite d'avantage de courage et de persévérance. On dit bien " Qui cherche, trouve ! "...

Je suis particulièrement heureux que vous ayez interrogé mon oncle Nutsua au village et que vous soyez venu me voir. Je crois que le vieux vous a raconté des tas de choses. Seulement avec l'âge, il mélange un peu tout parfois... Eh oui, c'est mon oncle maternel, le frère cadet de ma mère Woegblo.

Je suis né à Agomé-Tomégbé (Kloto) près de Misahöhe, le 26 octobre 1910 de ma mère Woegblo née Nutsua. Mon père, le Dr. Hans Gruner était effectivement le Commandant du Cercle de Misahohe, au temps des Allemands. Il commandait tout Misahöhe (actuellement circonscription administrative de Kloto) ainsi que les districts de Ho, Kpandu et Kété-Kratchi dépendants de Misahöhe. Ces trois régions font aujourd'hui partie du Ghana. Au temps des Allemands tous ces districts à l'ouest étaient partie intégrante du Togo. Ce sont les Français et les Anglais qui ont partagé le pays en deux à l'issue de la guerre de 1914. La partie occidentale revenant aux Britanniques et la partie orientale aux Français... Pour en revenir à mon père, le Dr. Hans Gruner, il résidait donc à Misahohe, chef-lieu de toute la région. Son adjoint, le sous-lieutenant Smend, chargé de la police, s'occupait du district de Kété- kratchi. Il est le père de mon cousin métis feu Julius Smend, comme vous l'a raconté mon oncle Nutsua. Lui emboîtant le pas, le Dr. Gruner (mon père) épousa à son tour ma mère Woegblo Nutsua, qui me mit au monde donc le 26 octobre 1910 à Agomé-Tomégbé. Vous avez pu constater qu'il y a beaucoup de familles métis [sic!] chez nous là-haut. On peut dire que les Allemands avaient une prédilection pour ce petit village d'Agomé-Tomégbé dont les habitants, paisibles et sympathiques, les avaient accueillis avec empressement. On dit aussi qu'à coté de son charmant climat et ses hommes très hospitaliers, le village de Tomégbé avait aussi des filles fort belles !... ha, ha !... Vous avez vue cette route de Misahohe qui serpente la montagne. Vous avez un carrefour au niveau du poste de douane de Kloto : le tracé de la route devait passer par le village de Kuma (vers la droite). Mai le Dr. Gruner (mon père) avait dit de passer plutôt par Agomé-Tomégbé (vers la gauche). Les gens ont dit que cette modification n'étonnait personne d'autant plus que Tomégbé est le village de la femme du Commandant de Cercle... Vous voyez !... Ce n'est qu'après que le tronçon de route fut poursuivi vers Kuma (à droite)...

A l'instar du Dr. Hans Gruner et du sous-lieutenant Smend, les Allemands ont épousé beaucoup de filles de notre village. Sur ce point, mon oncle vous a déjà tout raconté. Je préciserai simplement que le Dr. Von Raven qui épousa Konu Biassa, était adjoint au chef du district de Kété- Kratchi. Von Raven n'a quitté le Togo qu'en 1914, après la reddition des Allemands à Kamina. Son épouse Konu Biassa a eu de lui une fille du nom de Grace Abra et un fils, Kodjo. La métis [sic !] Grace Abra aura pour fils un médecin-chirurgien du nom de Quist qui travaille à l'Organisation Mondiale de la Santé aux Antilles. Son frère métis Kodjo Raven, a eu lui aussi un fils du nom

d'Edouard Kokou Raven, journaliste, chargé de l'information aux Nation Unies à Lomé... Quant à la vieille Yoho Biaku, ancienne épouse Schwinger, je ne savais pas qu'elle était encore en vie. Il y a bien longtemps que je ne suis plus allé au village...

Je voudrais aussi rectifier quelque chose dans ce que mon oncle vous a dit à propos de mon feu cousin Julius Smend, notamment sur les circonstances dans lesquelles ce dernier avait retrouvé les traces de sa famille paternelle en Allemagne. C'était par un heureux hasard. C'était en 1963, lors d'une consultation ophtalmologique chez un ophtalmologue allemand alors en service au Centre National Hospitalier de Lomé, actuellement CHU (Centre Hospitalier Universitaire). Le docteur s'appelait Schlitter. Julius entre donc dans le cabinet du Dr. Schlitter et se présente. Le docteur réagit spontanément à la surprise de voir un métis Smend. « Vous êtes métis allemand ? lui dit -il. Ma femme est née d'une famille Smend ! ». Julius Smend qui n'avait jamais connu son père, raconte son histoire. L'ophtalmologue allemand va raconter à son tour l'histoire à son épouse. Le contact est alors né entre mon cousin Julius et la famille du Dr Schlitter. Et c'est au cours d'un séjour de congés d'été que Mme Schlitter (née Smend) fait des recherches dans sa famille où elle obtient des photos du Sous-lieutenant Smend pour Julius. C'est donc grâce à M. et Mme Schlitter que mon cousin aura connu son père par l'image... Le Dr. Schlitter était un homme très compétent et très gentil. Il travaillait sans arrêt. Il y avait constamment une foule de patients dans son couloir. Il travaillait sans repos. C'était un vrai Allemand ! On a beaucoup regretté son départ... Je vois que vous souriez, vous avez certainement entendu parler de ce grand ophtalmologue ?

Simtaro - Oh, oui ! Non seulement j'ai entendu parler de lui, mais je l'ai connu aussi, le Dr. Schlitter : c'est lui

qui m'a prescrit les verres médicaux en août 1966 au C.N.H. de Lomé. Vous l'avez bien dit, c'est un très grand ophtalmologue... Mais je ne voulais pas vous interrompre, M. Gruner, car en tant que fils d'une ancienne grande autorité allemande, vous devez avoir encore sûrement beaucoup de choses à dire, sur votre père, le Dr Gruner, en particulier et sur ce que vous avez retenu des Allemands en général ?! ...

Gruner - Vous savez, le Dr. Hans Gruner était l'ami des gens laborieux, des bons travailleurs. Ses pires ennemies

étaient les paresseux, les fainéants. Pour lui, il était inconcevable de rester les bras croisés. Il n'était pas question de se dérober aux travaux d'intérêts publics. Bien entendu les travaux étaient très durs. Mais le Dr. Gruner ne faisait pas punir n' importe qui. Seuls les paresseux et les gens malhonnêtes méritaient des fessées ou la prison, selon le degré de leurs fautes...

Il faut reconnaitre que les Allemands ont gagné le coeur des Togolais, ils ont conquis le coeur des Togolais à cause de leur caractère, dur certes, mais surtout juste et honnête. Les Allemands ont été justes et honnêtes.

Certes nul ne peut nier la farouche résistance des populations du Nord-Togo à la pénétration du colonisateur et les dures répressions allemandes qui s'en sont suivies. Vous avez surement entendu beaucoup de récits à ce sujet auprès des vieux de ces régions de l'arrière-pays. Compte-tenu de ces fâcheux évènements de jadis, ce sont les peuples du Nord qui devraient logiquement parlant, détester le plus les Allemands. Or, on remarque que se sont plutôt ces gens du Nord qui aiment ou admirent les Allemands. Je pourrais vous raconter des tas d'anecdotes à ce sujet. A titre d'exemple, je vous citerai seulement quelques expériences personnelles de mes séjours dans les régions de Bafilo et de Bassar. En 1945, j'ai séjourné à Bafilo en pays Kotokoli, dans la famille Gado. Le vieux Gado était un ancien instituteur formé à l'école allemande avant 1914. Le vieux Gado m'avait alors accueilli avec beaucoup d'empressement. Il était visiblement très heureux de faire la connaissance d'un fils du Dr. Gruner. Je n'en revenais pas d'émotion. Le vieux ne voulait jamais croire que les Allemands avaient perdu la guerre et étaient rentrés définitivement. Il attendait toujours leur retour au Togo. Cette mentalité était générale à cette époque-là chez tous ceux qui avaient connu jadis les Allemands... En tant qu'instituteur, j'ai travaillé un an à Kabou où j'ai dirigé l'école officielle. C'était en 1958, du temps où M. Bonfoh était chef de circonscription à Bassar. J'avais alors eu l'occasion de visiter tout le pays Bassar. J'avais aussi circulé dans toute la vaste région Konkomba, à travers les villages et cantons de Nwaré, Nandouta, Bapuré, Katchamba, etc... Voyez-vous, j'ai circulé partout en compagnie du Docteur Médecin de Bassar, un bon ami. Nous avons visité tous ces coins reculés de la belle et vaste brousse Konkomba. Mais ce que je voulais vous dire, c'est que je ne m'attendais pas du tout à un accueil aussi aimable et hospitalier de la part des chefs traditionnels et de leurs villageois que nous visitons. Etant fils métis du Dr. Gruner qui avait eu jadis à briser durement des résistances des guerriers Bassar et Konkomba, je m'attendais à rencontrer un sentiment hostile de la part de ces populations. Mais paradoxalement, j'étais vraiment surpris que certains chefs, auxquels mon ami le Docteur me présentait, n'arrêtaient pas d'échanger avec moi des salutations chaleureuses et me donnaient même quelques cadeaux... Le grand chef Konkomba de Bapuré m'avait même offert un canard dodu et un gros coq, en précisant bien au Docteur : « Ceci pour notre ami, le fils du blanc Djama !... »

Eh bien ces expériences-là, je les ai vécues en personne. Vous voyez vous-même que cette attitude dénuée de tout esprit de vengeance a heureusement dissipé les mauvais préjugés que je me faisais auparavant sur ces peuples. Car j'avais parfois peur d'être une cible de leur vengeance. Je m'étais plutôt rendu compte combien ces gens-là, à côté du choc terrible des guerres coloniales, admiraient la fermeté des Allemands dans le travail et l'honnêteté...

Voyez-vous, j'ai gardé un agréable souvenir de mon séjour dans les régions du Nord, et plus spécialement de mes tournées en 1959 à travers le vaste pays Konkomba. En plein coeur de pays jadis très guerrier, les Allemands avaient construit un fort militaire, à l'entré du village de Iboubou dans le canton de Nandouta. Je ne sais pas s'il reste encore de nos jours quelques traces de ce fort, car il a été détruit après les élections de 1958 par un administrateur français de l'époque, dont j'ignore le nom, soi-disant qu'il voulait remblayer la route de Nandouta-Bapuré... c'était là un des rares vestiges allemands qu'on rencontrait dans le Nord-Togo. Je crois que ce sont des souvenirs concrets de la présence allemande. Et je trouve votre recherche très intéressante pour l'histoire de notre pays.

Simtaro - Vous avez parfaitement raison, M. Gruner. C'est pour contribuer à l'enrichissement et à la propagation de notre histoire qu'il nous faut récolter divers éléments du passé, tant à travers les vestiges que les souvenirs oraux. Voilà pourquoi vos témoignages, en tant que « Togolais descendant des Allemands » (si vous permettez cette expression), sont fort intéressants. Vous comprendrez alors ma curiosité de chercher si je vous demande de me parler du statut d'un métis allemand, les souvenirs des siens, les relations avec sa famille paternelle ou ses parents en Allemagne, avec l'administration allemande, etc...

Gruner - Les métis issus d'un père allemand et d'une mère togolaise gardent en général de leurs familles

allemandes de très bons sentiments filiaux.

Vous savez, le Gouvernement impérial Allemand de jadis avait exigé que tout sujet allemand qui aurait marié une femme noire devait acheter un terrain et y construire une maison d'habitation à son épouse et à son enfant. Un Allemand qui voulait épouser une togolaise, devait, selon les exigences du Gouvernement, remplir toutes les formalités conformes aux us et coutumes de la région concernée (dot, cadeaux, demande en mariage, etc..).

Le Gouverneur Adolf Duc de Mecklenbourg a épousé lui-aussi une femme du pays et a eu d'elle un fils métis, tout comme ses compatriotes le commandant de Cercle Metzger, Kenzler, Paass.

Certaines femmes du pays, ne pouvant plus vivre à Lomé après le départ de leurs époux allemands, avaient tout simplement vendu les propriétés que leur avaient procurées leurs maris-blancs. C'est l'exemple d'une femme Kotokoli de la région de Sokodé dont j'oublie le nom. Son fils métis est mort depuis. Elle avait vendu sa maison située non loin de l'actuel Commissariat de Police du 1er Arrondissement, au bout de la rue du 24 janvier, puis elle avait regagné son village natal.

A part mon village natal d'Agomé-Tomégbé, nous avons un certain nombre de famille de métis allemands ici à Lomé. Au village mon oncle Nutsua vous a déjà cité les Gruner, Smend, Raven, Schwinger, etc... ici à Lomé, vous avez les Herzog (le feu Herzog Koffi a été le fils métis du Gouverneur Adolf-Friedrich Herzog Zu Mecklenburg ; Koehler ( le vieux Josef Koehler, fils du Gouverneur Koehler ; vous pouvez lui rendre visite) ; Gärtner ; Brenner ; Krüger ; Hundt (à Aného) ; Metzger ; Kentzer ; Paass ; Rinkleff (à Sokodé) etc... il faut remarquer que la plupart des épouses des Allemands étaient originaires de la région d'Aného, première région où les Allemands avaient séjourné...

Vous savez, nous avons une association de métis au Togo et j'en suis le Vice-président. Nous entretenons avec l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne de très bonnes relations amicales. Lors des fêtes de la République Fédérale d'Allemagne, notre association rend des visites de courtoisie à l'Ambassadeur.

Certains d'entre nous entretiennent des relations étroites avec leur famille paternelle en Allemagne. C'est le cas de M. Rinkleff et de moi-même, etc... Vous voyez donc que nous n'oublions point nos parents, tout comme les Togolais n'oublient jamais les Allemands.

En ce qui me concerne personnellement, voyez-vous, mon père le Dr. Gruner a épousé ma mère Woegblo (née Nutsua) qui me donna le jour le 26 octobre 1910 dans mon village natal d'AgoméTomégbé. Elle mourra en 1929 dans son coin natal où elle sera enterrée. Mon père, qui était conseiller du gouvernement et commandant de cercle de Misahöhe, avait donc rempli toutes les exigences conformes aux normes coutumières pour épouser légalement ma mère. Il nous avait aussi acheté des terrains et construit des maisons ici à Lomé et au village où vous avez pu voir la maison Gruner. Pour subvenir à nos besoins, il avait déposé en 1912 auprès de la caisse d'épargne (Banque Allemande de l'Ouest Africain) à Lomé un testament au terme duquel un fonds de subsistance était alloué à ma mère et à moi. On y avait établit à ma mère un livret d'épargne n° 267. Voyez, j'ai noté tout cela dans ce vieil agenda. Le livret même doit se trouver quelque part dans mes valises. Il, faudra que je le cherche après à tète reposée... Tenez, j'ai encore dans ce vieux dossier, une copie complètement jaunie de cette

procuration de mon père. Regardez : c'est écrit en allemand avec traduction en français. Vous pouvez garder cette copie si ça peut vous servir à illustrer peut-être votre travail...

Voyez-vous, je n'ai pas connu vraiment les Allemands. Je ne connais mon père que par la photo. Je n'avais guère que cinq ans quand les Allemands quittaient le Togo. Cependant, je me suis beaucoup renseigné sur leur séjour et leurs activités chez nous au Togo. J'ai recueilli beaucoup de souvenirs sur eux, tant auprès de ma mère qu'auprès des vieux. J'ai fréquenté l'école anglaise à Lomé et en Gold-Coast (Ghana) de 1915 à1920, puis l'école française à Lomé de 1921 à1925 (école primaire). Après mes études supérieures (1926-1930), j'entre après concours en 1930 dans le cadre supérieur des Instituteurs Africains, puis plus tard en 1950, j'entre après concours dans le cadre des Instituteurs Métropolitains. En 1957, j'obtins la Palme académique avec mention honorable. J'ai pris ma première retraite le 1er janvier 1966. Membre de comité de ville de Lomé, j'ai été fait Officier de l'ordre du Mono le 24 avril 1971, n° Mle 22/A/71, décret 71-69. Je suis père de onze enfants (sept filles et quatre garçons dont un décédé).

Mais tout ceci ne doit pas vous intéresser. Je vais plutôt vous faire voir les photos-souvenirs de mon père et de mes demi-frères. Vous savez je visite mes parents Allemands et ils me visitent également. Mon dernier voyage en Allemagne remonte en 1976 à Iéna en D.D.R. (Allemagne de l'Est), chez mon demi-frère allemand Wilhelm Gruner, Melanchthonstrasse 4-/69000 Iéna (D.D.R.). Agé de soixante-cinq ans, il est en retraite depuis 1980. Voyez sa photo en compagnie de notre père et celle que nous avions prise lors de ma visite. Sur cette photo vous voyez un clairon utilisé par mon père lors de son expédition en pays Konkomba ainsi que des masques et ornements de cette région du Togo.

A Iéna, j'ai visité la tombe de mon père né le 10 mars 1865, décédé le 06 août 1943 (à l'âge de 78 ans).

Vous savez, nous étions quatre frères Gruner : deux Allemands et deux Métis :

1) Mon frère aîné Johannes Kodjo Gruner (métis), né à Akposso-Tomégbé de Aku, originaire d'AkpossoTomégbé, Mort en 1952 à Kpalimé et enterré au cimetière protestant.

2) Moi - même Hans Komlan Gruner (métis) né le 26 octobre 1910 de Woegblo Nutsua à Agomé - Tomégbé.

3) Mon frère Hans Gruner junior (allemand), né le 12 mai 1912, tombé au front le 08 novembre 1943.

4) Mon frère Wilhelm Gruner (allemand), âgé de 65 ans.

Vous pouvez regarder toutes ces photos dans mes albums. Vous avez aussi aux murs au salon, les photos et portraits géants de mes parents (père et mère) etc...

Si les photos de mon père le Dr. Gruner peuvent vous être utiles pour vos travaux, je pourrai vous en donner quelques-unes. Parce que je trouve votre travail très intéressant et très utile et je vous encourage vivement.

Simtaro - Merci bien, M. Gruner ! Merci infiniment pour vos intéressants témoignages et vos archives

personnelles que vous m'avez montrées, et surtout pour les photos et documents que vous me donnez pour m'aider à concrétiser mes travaux. Votre gentillesse et la spontanéité de notre entretien sont déjà pour moi des éléments indispensables de satisfaction et d'encouragement dans ma difficile, mais passionnante recherche. Je souhaite que notre entretien se poursuive et s'enrichisse à travers des échanges épistoliers, car beaucoup d'éléments demanderont certainement à être approfondis pour des recherches ultérieures.

Gruner - Il n'y a pas de quoi me remercier, mon ami. C'est pour moi un plaisir de discuter avec le jeunes gens

des thèmes intéressants comme le vôtre. Je suis donc toujours à votre disposition pour une quelconque indication dont vous aurez besoin. Mon adresse est simple : BP.1169 Lomé, Tél. 21.19.02 (28, rue Bugeaud / quartier des étoiles). Revenez me voir quand vous voudrez, téléphonez ou écrivez-moi. Ca me fera plaisir.

Simtaro -Merci bien. Je vais repasser demain en fin d'après - midi, vers 16 heures. Si ça vous va ? J'aimerais

aussi que vous m'indiquiez la maison du fils du gouverneur Koehler pour que je m'entretienne avec lui.

Gruner -Oh, c'est simple. Venez seulement demain soir à quatre heures. Je vous conduirez moi-même auprès du vieux Josef Koehler. Il est toujours à la maison : il à plus de quatre-vingt ans, il est un peu malade et ne sort plus. Mais je crois que vous pourrez lui parler. Je vais vous introduire à lui. Je vous attends donc demain soir à quatre heures.

Simtaro - Je vous suis très reconnaissant, M. Gruner. Au revoir et à demain.

Illustration n° 9d : « Hans Gruner im hohen Alter, um 1940 » (Hans Gruner dans la force de l'âge) (source : Gruner 1997 :13)

1910 - année de naissance de Hans Komla Gruner - semble avoir été l'année de

l'explosion démographique des « métis allemands » au Togo.

Une des explications de cette explosion des métis au Togo réside dans le constat suivant : l'administration coloniale du Togo ne s'attaqua pas à la cause principale, à savoir, la vie sexuelle débridée des administrateurs coloniaux. Et pour cause : les plus hautes autorités coloniales étaient impliquées et concernées. Alors, les autres allemands du Togo se sentaient dans une impunité garantie, allant jusqu'à refuser de payer pour l'entretien et l'éducation de leur enfant métis, ou même vivant dans une forme évidente de polygamie

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qui, certes, ne choquait pas les Africains, mais était totalement interdite dans la culture et la religion des Allemands. C'est le cas du commerçant Harry Grunitzky dont l'un des enfants est devenu, malgré tout, une personnalité emblématique de la politique togolaise : Nicolas Grunitzky.

1.4.4 - L'arbre qui cache la forêt: le cas de Nicolas Grunitzky (1913-1969)

De tous les métis allemands« du Togo, Nicolas Grunitzky est incontestablement le mieux connu sur le plan national et international, parce qu'il est le seul qui soit parvenu au plus haut sommet de l'Etat. Mais aussi, c'est « l'arbre qui cache la forêt » : la grande majorité des métis allemands« sont totalement inconnus, parce qu'ils n'ont pas bénéficié du soin et de la formation nécessaires pour percer dans la société togolaise. Nicolas Grunitzky n'a jamais revendiqué un statut de « métis allemand », et n'en a jamais fait un fonds de commerce, il fait sans doute la fierté de tous les métis togolais en général, et des métis allemands« en particulier.

Illustration n° 10 : Nicolas Grunitzky (source : Cornevin 1969 : 160b)

Né le 5 avril 1913 à Atakpamé, le peit Nicolas n'a guère connu son père, un officier allemand originaire de Dantzig (Petschull 1984 :131) nommé Harry Grunitzky, reconverti dans le commerce colonial au Togo, et d'une mère togolaise originaire d'Atakpamé nommée Sossimè (de « famille royale » selon Cornevin 1969 : 410). D'ailleurs, selon le site wikipedia, le père est mort « quelques mois après la naissance du petit Nicolas », et « le jeune métis sera l'un des tous premiers boursiers togolais à être envoyés en France »55 où il fait ses études en France, d'abord au Lycée de Mignet à Aix-en-Provence, puis à Paris des

55 Site www.biographie.tv/nicolas-grunitzky.htm consulté le 13 octobre 2011

études d'ingénieur en travaux publics. Ensuite, il intègre d'abord l'administration coloniale française, avant de créer sa propre entreprise. Il est l'un des membres-fondateurs du PTP (Parti Togolais du Progrès) créé en 1946 et qui l'emporte aux élections législatives de 1951 sur Martin Aku, député sortant (Cornevin 1969 :387). Lorsque le 30 août 1956, la République autonome du Togo est proclamée, Nicolas Grunitzky est investi le 10 septembre 1956 comme premier ministre et forme le premier gouvernement autonome du Togo le 18 septembre 1956. Le 21 septembre 1956, le Ministre de la France d'Outre-Mer installe solennellement la République Autonome du Togo avec Nicolas Grunitzky à sa tête. Mais aux élections du 27 avril 1958, le parti de Nicolas Grunitzky (PTP) est battu par celui de Sylvanus Olympio (CUT) à la majorité absolue. Et Sylvanus Olympio remplace Nicolas Grunitzky. Le 13 janvier 1963, un coup d'Etat met fin à la vie et au gouvernement de Sylvanus Olympio, et « un Comité militaire insurrectionnel » fait appel simultanément à Nicolas Grunitzky. Mais un nouveau coup d'Etat militaire survenu le 13 janvier 1967, amène les militaires à reprendre le pouvoir à Nicolas Grunitzky (Cornevin 1969 :412). Nicolas Grunitzky part en exil pour la Côte d'Ivoire, ce qui met fin à la carrière politique du premier métis allemand, qui a joué un rôle majeur dans la vie de son pays le Togo. Il est mort à Paris le 27 septembre 1967 dans un accident de voiture.

Nicolas Grunitzky est le benjamin des métis nés du commerçant Harry Grunitzky qui a eu au total 11 enfants au Togo. De sa femme Ayoko, originaire d'Aného Legbanou, il a eu cinq enfants : Walter Grunitzky (né en 1906), Maria Grunitzky (née en 1900), Eleck Grunitzky (année de naissance non connue), Berta Grunitzky (année de naissance non connue), et Pazian Grunitzky (né le 9 août 1912). De son autre femme nommée Hodjinga, originaire de Keta, il a eu deux enfants qui sont Dina Grunitzky (née en 1903) et Felix Grunitzky (né en 1905). D'une troisième femme nommée Otodopé et originaire de Eoué en zone anglaise, il a eu une fille nommée Victoria Agnès, née en 1905. De la quatrième femme nommée Nadou, originaire d'Aného, il a eu aussi une fille nommée Paulina, née en 1912. La cinquième femme, Dédé, originaire de Lomé, lui a fait un garçon nommé Friedrich-Franz, né en 1907. Il en ressort que Sossimè, la mère de Nicolas Grunizky, originaire d'Atakpamé, est la sixième femme africaine de l'Allemand Harry Grunitzky. On peut considérer, à juste titre, que cet Allemand a vécu en Afrique quasiment comme dans un ménage polygame africain. C'est un phénomène de son temps.

Il faut noter que le petit Nicolas est né en 1913, précisément dans l'anné même de la
promulgation de l'ordonnance sur le nom des métis. A l'issue de longues consultations

menées avec les diverses composantes de la communauté des Allemands du Togo (évidemment, les autochtones, principaux concernés, n'y ont pas été conviés), l'ordonnance le 18 octobre 1913 par le gouverneur, déclarait ce qui suit56 :

En vertu de l'article 2 de l'ordonnance impériale du 3 juin 1908 relative à la création de l'administration et aux usages coutumiers dans les colonies africaines et du Pacifique (Journal officiel du Reich, p. 397), il est décrété avec l'accord du Chancelier impérial, ce qui suit:

§ 1: Les indigènes ne sont pas autorisés à porter ou à ajouter à leur nom, un nom allemand comme nom de famille, pour leur propre compte ou pour le compte de leurs parents, sans l'autorisation du Gouverneur.

§ 2: Tout acte contraire à cette disposition sera puni d'une amende allant jusqu'à 150 marks, et si cette somme ne peut pas être payée, il sera infligé en compensation une peine de prison maximale de 6 semaines avec travaux forcés.

Fait à Lomé le 18 octobre 1913 Le Gouverneur

Duc de Mecklenburg.

Le problème était ainsi tranché sur le plan du droit, mais sur le terrain concret de la vie quotidienne, il n'était pas réglé, comme le montre l'article sur le cas exemplaire de Fritz Kuawovi Durchbach, métis de la toute première génération, connu comme fils de Durchbach et qui portait ce nom depuis longtemps, mais qui, au regard de la nouvelle loi, n'avait plus le droit de porter ce nom (Béré-Coulibaley & Oloukpona-Yinnon 2007).

Comme Harry Grunitzky, plusieurs commerçants allemands ont eu des enfants métis au Togo. C'est le cas du métis Otto Hundt, fils d'un commerçant de Hambourg.

56 Auf Grund des § 2 der Kaiserlichen Verordnung betreffend die Einrichtung der Verwaltung und die Eingeborenenrechtspflege in den afrikanischen und Südsee- Schutzgebieten von 3, Juni 1908 (Reichsgesetzblatt s. 397) wird mit Zustimmung des Reichskanzlers verordnet, was folgt.

§ 1: Eingeborene dürfen ohne Genehmigung des Gouverneurs einen deutschen Namen als Familiennamen sich oder ihren Angehörigen nicht beilegen oder führen.

§ 2: Zuwiderhandlungen werden mit Geldstrafe bis zu 150 Mark bestraft, an deren Stelle, falls sie nicht beigetrieben werden kann, Gefängnisstrafe mit Zwangsarbeit bis zum Höchstbetrage von 6 Wochen tritt. Lomé, den 18. Oktober 1913

Der Gouverneur, Herzog zu Mecklenburg«.

Extrait de : Amtsblatt für das Schutzgebiet Togo (1913), Nr. 59, pp. 313-314

Illustration n° 11a : Otto Hundt

Illustration n° 11b : Otto Hundt avec les photos de ses parents57

Otto Hundt, fils d'un commerçant allemand de Hambourg, fut Président du « Club des Métis allemands » du Togo, et à ce titre, il avait coutume de dire : (Petschull 1984 :119): « Die Deutschen sind alle unsere Brüder und Schwestern ». Mais la réalité coloniale fut

totalement différente: la loi du Reich n'avait pas prévu l'existence des métis allemands« dans les colonies : "[...] le métis n'avait pas d'existence légale aux yeux de la loi allemande qui n'a pas prévu son existence. La plupart des métis n'ayant pas été reconnus par leurs pères, ne sont

57 NB : Comme pour Josef Comla Köhler et Hans Komla Gruner, ici aussi les parents de ces métis n'ont visiblement jamais apparu sur une même photo (ou dessin), et pour cause : leur union ne fut jamais officiellement sanctionnée par un acte qui aurait mérité d'être immortalisé. C'est donc l'histoire qui se charge aujourd'hui de réunir leur photo entre les mains de leurs progénitures respectives

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pas aussi reconnus par la loi qui les ignore» (Ali, 1995, p. 850). Même les « métis allemands » reconnus par leurs pères allemands selon les coutumes africaines, n'étaient pas allemands au regard de la loi allemande. C'est ainsi que les enfants métis de père allemand étaient devenus un problème. C'est à la résolution de ce problème que l'administration coloniale allemande s'est attachée à partir de 1905, à travers divers mesures dont nous présentons quelques documents ici.

2 - LES DOCUMENTS : ORIGINAUX, RESUMÉ OU TRADUCTION INTEGRALE

2.1 - Document n° 1 : Rapport du commandant de cercle d'Aného Oscar Schmidt sur les métis d'Aného en 1905. Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) FA1/551, pp. 37-43

2.1.1 - Résumé du document en français Ce rapport de l'administrateur local Oscar Schmidt sur la situation des métis dans le District d'Aného fournit plusieurs informations importantes et intéressantes sur le sujet. Il montre, entre autres, que le nombre des métis augmente régulièrement, et que Blancs et Noirs ne partagent pas les mêmes points de vue sur la question des unions mixtes et des métis. Le rapporteur se prononce personnellement pour que les Européens paient une certaine rente pour leurs enfants métis éventuels. Il justifie cette prise de position et propose une fourchette pour cette rente. Cette prise de position personnelle est d'autant plus intéressante que l'auteur du rapport est le seul Allemand qui soit venu au Togo avec sa femme blanche, et l'un des rares administrateurs à ne pas avoir eu d'enfant métis en Afrique.

2.1.2 - Texte original allemand

Bezirksamt Anecho, Sebe, den 15. August 1905

»Auf Grund der von mir eingezogenen Erkundigungen bei den nachstehend bezeichneten Häuptlingen und Eingeborenen Ayite Ajavon, Lawson, Quamivi, Häuptlinge von Anecho; Mensah, Häuptling von Porto Seguro; Frank Garber, Victorine da Silveira, Chico d'Almeida, Eingeborene aus alten, angesehenen Familien Anechos berichte ich gehorsamst folgendes:

Das Mulattenkind erbt unter allen Umständen das ganze Vermögen seiner Mutter. Es ist hier in Anecho Sitte, dass auch die Frauen genau dasselbe Erbrecht haben wie die Männer. Die Erziehung der Mulattenkinder übernahm bisher die ganze Familie der Mutter gemeinsam. Das Kind bleibt solange bei seiner Mutter, bis es selbst arbeiten kann, und kommt dann, wenn es von der Familie für gesund und arbeitsfähig anerkannt, oft irgendwo in die Bahn. Die Mädchen werden vielfach in der Mission ausgebildet, und zwar teilweise bisher umsonst.

Bis das Kind zur Schule geht bedarf es keiner grossen Aufwendungen seitens der Mutter oder Familie mit etwa 3- 4 Mark den Monat. Die Schulzeit beginnt hier bei den Mulattenkindern gewöhnlich vom 7. oder 8. Jahr ab. Nunmehr treten etwas Anforderungen an die Mutter beziehungsweise deren Familie heran, da es hier Sitte ist, die Mulattenkinder, ihrer Abstammung gemäss, besser zu kleiden als die Eingeborenenkinder. Die Kosten erhöhen sich daher auf etwa 8 Mark monatlich und werden bis zum 15. Lebensjahr in Mittel die Höhe von 15 Mark im Monat erreichen. In Anecho kennt man es nicht anders, als dass die sämtlichen Mulattenkinder auch ähnlich der weissen Rasse erzogen und aufgebildet werden je nach den Familienverhältnissen. Von dem Augenblick an, in dem ein Mulattenkind sich seinen Unterhalt selbst verdient, ist dasselbe verpflichtet, seiner Mutter ab und zu Lebensmittel zu geben.

Will sich ein Mulattenkind verheiraten, dann wird es von seiner Mutter und deren Familie ausgestattet. Die Häuptlinge und Erschienenen erklären einstimming [sic!], sie sähen ein Mulattenkind stets für voll an, nur müsse es den Namen seines Vaters tragen. Wie ich mich selbst überzeugt habe, ist dieses letztere auch stets der Fall und es wird streng darauf gehalten, dass das betreffende Mulattenkind, wenn es gefragt wird, stets den Namen seines Erzeugers mit angibt.

Stirbt die Mutter eines Mulatten, so ist es bisher selbstverständlich gewesen, dass sie deren Familie um die Erziehung und Pflege des Kindes weiter annimmt; gewöhnlich nimmt die Grossmutter das Kind zu sich.

Irgendeine Verpflichtung nach dem hier unter den Eingeborenen Anechos geltenden Recht, wonach der europäische Vater für das Mulattenkind zu sorgen hätte, bestand bislang nicht. Es wurde seitens der Familie oder der Mutter einem jeden Europäer überlassen, Geschenke zu geben oder anderweitig zu sorgen beziehungsweise unterstützend einzugreifen.Viele Europäer haben sich jedoch überhaupt um ihre Kinder gar nicht mehr gekümmert, so dass die ganze Last auf den Schultern der Familie lag. Irgendwelche Versprechungen seitens der Mutter oder deren Familien sind nicht gefordert und auch von den Europäern bislang nicht gemacht werden.

Was nun die richterliche Gewalt über das Mulattenkind anbetrifft, so bleibt hier im Anecho-Bezirk diese stets dem europäischen Vater und ist er jederzeit berechtigt, sein Kind zu sich zu nehmen, ohne die bislang entstandenen Kosten ersetzen zu müssen. Bis zum vollendeten 15. Lebensjahr hätten daher die eingeborenen Familien etwa 1400 Mark für das Kind aufzubringen, was den einzelnen Familien bei der grossen Anzahl der Mulattenkind oft nicht leicht fallen dürfte. So ergab zum Beispiel die letzte Zählung im Juni der Mulattenkinder im Bezirk die Zahl 55, welche Zahl jedoch in den letzten Monaten noch zugenommen haben dürfte. Soweit Mulattenkinder männlichen Geschlechts in Frage kommen, wäre es wohl sehr wünschenswert, diese im Einverständnis mit den Vätern für den Regierungsdienst, durch Aufnahme in die Regierungsschulen etwa vom 10. Lebensjahr ab, vorzubereiten. Auf Grund der von mir in den Tropen gemachten Erfahrungen glaube ich bestimmt, dass unseren Kolonien ein gewisser Stamm unter den Untertanen von grossem Nutzen sein wird, die sich durch geeigneten Heranbildung, aus dem hiesigen Klima besser Stand haltenden Mulatten sicher und gut nachziehen lassen dürfte. Auch werden derart erzogene Mulattenkinder sehr gern von den Factoreien in den Dienst genommen werden,wo sie sehen heute an verschiedenen Orten und Landschaften, z. B. Dahomey, als billiger Ersatz für europäische Hilfskräfte angestellt werden.

Ich bin im Interesse der Aufrechterhaltung der Stellung, welche der Europäer hier draussen in Afrika dem Neger gegenüber einnehmen soll und muss entschieden dafür, dass jeder Vater eines Mulatten in entsprechender Höhe, je nach seiner sozialen Stellung, zur Entrichtung einer Geldrente herangezogen wird. Jedoch halte ich, den hiesigen Lebensgewohnheiten entsprechend, eine Gesamt-Entschädigung je nach Stellung und Einkommen des Vaters bis zu 1500 Mark, jedoch nicht unter 500 Mark für vollkommen ausreichend.

Der commissarische Bezirksamtmann Schmidt, Oberleutnant*.

An das Kaiserliche Gouvernement in Lome.

* (Oberleutnant Oscar Schmidt war vom 27.3.1904 bis 11.12.1905 in Togo, davor war er 8 Jahre lang in Kamerun. Er war der erste und einzige Bezirksamtmann, der seine deutsche Frau Elsa mit nach Togo brachte, wo ihnen am 22.10.1904 ein Sohn geboren wurde; wahrscheinlich ist er wegen der bevorstehenden Geburt an den Sitz des deutschen Regierungsarztes nach Anecho versetzt worden. Schmidt hatte mithin kein Mulattenkind und dürfte mithin unparteiisch berichtet haben.P.S.)

2.2 - Document n° 2 : Un article de presse sur la question du métissage dans les colonies allemandes.

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA1/22

2.2.1 - Résumé du document en français

Ce document se fonde sur deux articles parus dans la presse coloniale en 1906, l'auteur du document résume la situation de la question des métis dans les colonies en posant une seule question : « Voulons-nous le mélange des races ou la pureté de la race dans nos colonies ? » Le premier article parle d'une mesure de boycott envisagée par une association dans la colonie allemande du Sud-Ouest-Africain (aujourd'hui Namibie) pour sanctionner tous les Blancs qui ont des relations sexuelles avec des Noires. L'Association exige l'intervention du gouvernement colonial contre ces Blancs, sinon, elle mettrait sa menace à exécution. Cette menace avait alors suscité dans la presse allemande libérale un tollé de protestations de la part de ceux qui voyaient dans une telle action une atteinte à la liberté individuelle, une manifestation de fanatiques de la pureté de la race. Dans un autre article en réponse à ce dernier, un lecteur s'étonne que des libéraux en Allemagne s'insurgent contre cette menace de boycott, mais se demande aussi comment il serait possible de lutter contre des Blancs ayant des relations sexuelles avec des femmes noires. En somme, il ne croit pas à l'efficacité de mesures répressives contre ce phénomène, mais prêche plutôt pour une politique d'éducation des Blancs pour le respect de leur race.

2.2.2 - Texte original allemand

Deutsche Kolonial- und Überseekorrespondenz«, Berlin Nr. 10, vom 21. Juli 1906 4) K.Ü.K. Rassenmischung oder Rassenreinheit in den Kolonien?

Grosses Aufsehen erregte bekanntlich vor einiger Zeit das Vorgehen eines Bezirksvereins in Gibeon, Deutsch-Südwest, welcher den gesellschaftlichen Boykott über alle Weissen zu verhängen beabsichtigt, die offensichtlich mit schwarzen Frauen in sexuellem Verkehr ständen. In der deutschen Presse, namentlich der freisinnigen, erhoben sich vielfach Stimmen, welche ein derartiges Vorgehen für einen Eingriff in die persönliche Freiheit des Einzelnen bezeichneten und voraussagten, dass es viel böses Blut machen werde. Vielfach forderte man scharfes Vorgehen der Behörden gegen solche Unfug« von germanischen Rassenreinheitsfanatikern.

Ein tüchtiger Kenner unseres südwestafrikanisches Schutzgebietes, wie Südafrika überhaupt, schreibt nun der Deutschen Kolonial- und Übersee- Korrespondenz« zu diesem Gegenstande: Die Aufregung über den Gibeoner Verein ist mir unverständlich. Ja, wenn es sich noch um irgendwelche obrigkeitliche Anordnungen und Strafbestimmungen handelte. Das ist ja nicht zu verkennen, dass ein Eingriff der Behörden auf diesem difficilsten Gebiete allerdings die grössten Bedenken hat. Aber auf der anderen Seite zu fordern, dass eine freie Vereinigung von Menschen, die planmässig und durch ein gesellschaftliches Mittel, dessen Wirksamkeit erst noch erprobt werden soll, die Reinhaltung der weissen Rasse bezwecken, nun von der Regierung totgemacht werden soll, ist gänzlich absurd, und dies um so mehr, wenn solche Forderung von Preisen erhoben wird, die sonst über jede Einmischung des Staates in die geheiligten Privatangelegenheiten seiner Bürger Zetermordio schreien.

Dass im Allgemeinen der Standpunkt jenes Vereins von allen Weissen drüben wenigstens unbewusst geteilt wird, ist jedem Afrikaner zweifellos. Bisher liegen in unserer Kolonie die Sachen so, dass wirkliche Ehen weisser Männer mit reinrassigen eingeborenen Weibern, soviel ich weiss, überhaupt nicht existieren. Und auch die Zahl der Mischehen weisser Männer und Bastardfrauen sind nicht so häufig, wie man wohl glaubt, sondern grosse Seltenheit. Dass sie geschlossen worden sind, ist lediglich auf wirtschaftliche Gründe zurückzuführen. Die ökonomische Depression hat manchen Farmer und Händler bewogen, durch eheliche Verbindung mit einem reichen Basdardmädchen seine Verhältnisse zu verbessern. Soviel ich weiss, wäre es ein Ding der Unmöglichkeit, diesen Ehen volle gesellschaftliche Anerkennung zu erringen und die Basdardkinder den weissen Kindern gleichsetzen zu wollen.

Hier handelt es sich eben um so tiefgewurzelte instinktive Rassengefühle, dass weder staatliche Massnahmen noch reichliche Fütterung mit Humanitäts- und Menschengleichheitsidealen seitens gutherziger Philanthropen etwas ausrichten können. Betrachten wir doch nur das umgekehrte Verhältnis, dass eine weisse Frau einen Schwarzen heiratet oder sich ihm sonst hingibt. Ich nehme keinen Anstand zu erklären, dass ich jeden, der darin nichts finden« kann, für ein Ferkel halte, mit dem ich mich nicht an einen Tisch setzen möchte. Mit verschwindenden Ausnahmen von Menschen mit rassenmoralischer Gehirnerweichung haben alle weissen Männer und Frauen das tiefe und unzerstörbare Gefühl einer grässlichen Unreinlichkeit einem solchen Verhältnis gegenüber. Eine derartige Frau ist natürlich für immer aus der Gesellschaft ausgestossen- von rechtswegen. Hier sehen wir alle klar, dass man Rassenfragen nicht aus einer philosophischen Weltanschauung der Gleichheit aller Menschen mit Hilfe schöner logischer Deduktionen und sogenannter edlen Gefühle lösen kann. Hier spricht die Stimme des Blutes gewaltig und eindringlich mit. Damit ist für jeden vernünftigen Menschen mit normalen Empfindungsleben die grundsätzliche Gleichheit von Weiss und Schwarz bei der ehelichen oder sonstigen Mischung ad absurdum geführt.

Nun scheint mir allerdings auch die Forderung des Gibeoner Bezirksvereins, jeden Mann, der mit einer Eingeborenen offensichtlich verkehrt gesellschaftlich zu ächten, wenn auch nicht als unsittlich, aber doch als zu weitgehend und völlig undurchführbar. Aber wahrscheinlich liegt hier nur ein Mangel der Berichterstattung vor, wie das Wörtchen offensichtlich klar zu machen scheint. Zu meiner Zeit verstand man in Südafrika unter offensichtlichen« Verkehr mit einer Eingeborenen einen solchen, der die äusseren Formen des ehelichen Zusammenlebens annahm: gemeinsame Benutzung von Wohn- und Schlafräumen etc. Aber dies ist gleichfalls immer stillschweigend von allen als vom Rassen- standpunkt aus unsittlich angesehen worden. Und mehr wird vermutlich jener Verein auch nicht beabsichtigen.

Etwas anderes ist die Frage des freien gelegentlichen Verkehrs mit schwarzen Frauen. Hier haben jedenfalls wir Männer notgedrungen immer den Mantel christlicher Liebe und Duldsamkeit über den Sünder gedeckt, der sich einmal in die Arme einer schwarzen Sirene verirrte. Immer helfen freundliche Ermahnungen und moralische Aneiferungen nicht, gegen das unter der heissen afrikanischen Sonne üppig wuchernde Triebleben. Ein Notbehelf ! Auch die Buren, die man sonst und nicht mit Unrecht als Muster in der Eingeborenenbehandlung ansieht, haben diesen Verhältnissen schliesslich Rechnung tragen müssen, wie die nicht unbedeutende Mischbevölkerung bei ihnen beweist. Sie hatten dabei den Rassenkampf bedeutend leichter zu führen, weil sie in ihrer geschlossenen Masse, familienweise stark organisiert, stets eine grosse Anzahl weisser Frauen aufzuweisen hatten. Wir sind in diesser Hinsicht viel schlimmer daran. Und ich kann nicht einsehen, dass es eine Inkonsequenz ist, wenn man bei allem starken Rassegefühl derartigen rein triebmässigen Verbindungen eine gewisse Duldung widerfahren lässt. Jeder Versuch durch gesellschaftlichen Boykott auch die heissblütige Jugend zu notgedrungener Askese zu erziehen ist - seien wir einmal vernünftig - eine Narrerei und gänzlich aussichtslos. Dass vernünftige Leitung durch alte Afrikaner hier sehr viel abzuschwächen und zu bessern vermag, will ich natürlich nicht in Abrede stellen.

Unsinnig ist natürlich auch die Forderung, dass man den vielen unehelichen Basdardkindern, insbesondere den sogenannten Soldatenkindern, deren sich die Missionsgesellschaften in so anerkennenswerter Weise annehmen, volle Gleichberechtigung im Bildungsgange mit den weissen Kindern zugestehen soll. Einmal handelt es sich durchaus nicht um die Blüte der afrikanischen Weiblichkeit, die hier in Betracht kommt, und dann geht es eben nicht, weil die meisten dieser Kinder aus Rassengründen geistig nicht fähig sind, eine derartige Bildung in sich aufzunehmen und zu verdauen. Und schliesslich ist es auch politisch töricht und gefährlich und erzieht uns nur Stänkerfriede und Unruhestifter, denen das bischen eingetrichterte Bildung das arme kleine Gehirn verwirrt. Sie dagegen zu einem tüchtigen Arbeiterstamm heranzuziehen ist eine äusserst dankbare Aufgabe.

Immer hat die Erfahrung gelehrt, dass die ungezügelte und gesellschaftlich sanktionierte Rassenmischung zwischen Dunkel und Hell zum Ruin der früheren weissen Herrenklasse geführt hat, zum Untergang oder doch zur Gefährdung ihrer Herrschaft. Es ist nicht zu viel behauptet, dass der Neger selbst den Weissen anfängt zu verachten, wenn er seine schwarzen Töchter zur Frau begehrt. Jeder Versuch, den gesellschaftlichen Abstand zwischen den beiden Rassen in irgendetwas zu überbrücken, führt mit Sicherheit zu Unruhen und Aufständen, mit grösserer

Sicherheit zu Aufständen als harte ungerechte Behandlung. Dies ist eine afrikanische Binsenwahrheit.

Eine Lösung der Schwierigkeiten ist nur zu erhoffen durch Stärkung der öffentlichen Sicherheit, Kräftigung der wirtschaftlichen Verhältnisse und der Existenzfähigkeit des Farmbetriebes, damit unsere deutschen Frauen ihren männlichen Landsleuten beruhigt übers Meer nach Neu- Deutschland folgen können. Haben wir deutsche Frauen und deutsche Mädchen drüben, dann kann der Gibeoner Bezirksverein diese Frage aus seinen Statuten streichen.

2.3 : Les principaux textes réglementaires pris en 1909

2.3.1 : Document n° 3 : Procès-verbal de la rencontre annuelle des Chefs de Districts à Bassari sur la prise en charge des métis (séance du 1er au 5 mars 1909 présidée par le gouverneur Julius Graf Von Zech).

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA1/1020, pp. 155-156

2.3.1.1- Texte original allemand

Bezirketag [sic!] in Bassari vom 1. bis 5. März 1909, Gouverneur Graf Zech als Vorsitzender « Zu 34 «Mulattenfrage«

Der Vorsitzende: Es liegen 4 Entwürfe vor betr. Fürsorge für Mulattenkinder. Aus mehreren der Entwürfe könnte die Auffassung herausgelesen werden, als sei es Sache der farbirgen Mütter, für die Erziehung des Mulattenkindes zu sorgen. Einer solchen Auffassung könnte ich mich nicht anschließen. Der Vorsitzende verliest die wichtigsten Teile dreier Entwürfe, aus welchen diese Auffassung entnommen werden kann.

Reg.-Rat Dr. Kersting (Bezirksleiter Sokode-Bassari): Die Weissen sind verpflichtet, die Mulattenkinder zu erziehen. Wo Weisse aus irgendeinem Grunde nicht zur Bestreitung der Erziehungs- und Verpflegungskosten herangezogen werden können oder wo der Weisse nicht in der nötigen Weise für Mulattenkinder sorgen [sic!], sollte dies die Regierung tun.

Der Vorsitzende: Auch ich kann mich nicht auf den Standpunkt stellen, dass Mulattenkinder von der Mutter zu erziehen seien. Auch vom praktischen und wirtschaftlichen Gesichtspunkt aus ist es notwendig, dass wir uns der Mulattenkinder annehmen. Die Mulatten können der Regierung vermöge ihrer zweifellos höheren Begabung bei sachgemässer Erziehung nützliche Dienste leisten.

Der Vorsitzende verliest den vierten Entwurf, in welchen zur Vermeidung der irrtümlichen Auffassung, als sollte durch die Fürsorge für die Mulatten eine Änderung an dem bisher festgehaltenen Rasseprinzip eintreten, ein entsprechender Zusatz aufgenommen wird.

Der Entwurf wurde in der beifolgenden Fassung einstimmig angenommen.

Ferner wurde es allseitig als wünschenswert erkannt, sobald ein Mulattenkind geboren wird, den Vater zu einer schriftlichen Erklärung zu veranlassen, wo er das Kind erzogen zu haben wünscht und, falls es ein Mädchen ist, für welche Mission er sich entscheidet.

Dr. Kersting fragt an, ob seitens der Reg. etwas getan werden kann für ein Mulattenkind, für das nicht oder nicht genügend gesorgt wird und dessen Vater sich nicht mehr im Schutzgebiet befindet.

Der Vorsitzende: In solchem Falle würde an das Gouv. zu berichten sein. Der Vater des Kindes würde dann auf dienstlichem Wege veranlasst werden, das nötige Verpflegungsgeld zu zahlen. Andersfalls würden die Bestimmungen des Erlassentwurfes anzuwenden sein.

Hauptmann Mellin: (Bezirksleiter Mangu) wünscht Festsetzung eines Mindest- satzes des Verpflegungsgeldes.

Der Vorsitzende: Das ist Sache der Bezirksleiter, da in den einzelnen Bezirken der Satz ein anderer sein kann; jedoch kann in jedem Fall, in dem nach Ansicht des Bez.-leiters zu wenig bezahlt wird, an das Gouvernement berichtet werden, das dann das Nötige zur Beschaffung ausreichende Mittel veranlassen wird.«

2.3.1.2 - Traduction intégrale du texte en français La rencontre annuelle des Chefs de Districts à Bassari du 1er au 5 mars 1909, présidée par le gouverneur Graf Zech.

Le Président : « Quatre projets [d'ordonnance] sont proposés concernant la prise en charge des enfants métis. Vu la plupart de ces projets, on pourrait en déduire qu'il reviendrait aux mères noires de s'occuper de l'éducation des enfants métis. Je ne pourrais pas me rallier à une telle conception. »

Le président lit les principales parties des trois projets d'où découle cette conception.

Le conseiller du gouvernement Dr. Kersting : (Commandant de Cercle Sokodé-Bassari). « Les Blancs ont l'obligation d'éduquer les enfants métis. Au cas où un Blanc, pour une raison quelconque, ne pourrait assurer les frais d'éducation ou d'alimentation ou au cas où il n'est pas possible pour le Blanc de s'occuper de manière adéquate des enfants métis, le gouvernement devrait le faire. »

Le Président : « Moi aussi je ne partage pas le point de vue selon lequel les enfants métis doivent être pris en charge par leurs mères. Pour des raisons pratiques et économiques, il est nécessaire que nous prenions en charge les enfants métis. Ces enfants pourraient, à travers une éducation adéquate, servir le gouvernement par leurs incontestables talents. » Le Président lit le quatrième projet dans lequel est ajoutée une mention additive précisant que la prise en charge des métis [par les Blancs] ne change rien au principe de la séparation des races, ceci afin d'éviter toute interprétation erronée.

Le projet fut alors adopté à l'unanimité dans la forme ci-jointe.

Par ailleurs, il a été reconnu par tous comme souhaitable, d'amener chaque père d'un enfant métis à prendre, dès la naissance, l'engagement écrit stipulant là où il souhaite faire éduquer son enfant, et si c'est une fille, dans quelle société de mission il voudrait la voir placée.

Dr. Kersting : demande si du côté du gouvernement quelque chose pourrait être fait pour un enfant métis qui n'a pas ou n'a pas assez de soutien et dont le père ne se trouve plus dans la colonie.

Le Président : « De tels cas devraient être rapportés au gouvernement. Le père de l'enfant devrait être amené par voie administrative, à payer les frais d'alimentation.

Dans le cas contraire, les dispositions du projet d'ordonnance adopté à cet effet seront appliquées ».

Le Capitaine Mellin : (Commandant de cercle Mango) souhaite la fixation d'un taux minimal des frais d'alimentation.

Le Président : « C'est l'affaire des commandants de District, car le taux peut varier selon les réalités de chaque circonscription. Cependant, un rapport peut être adressé au gouvernement, au cas où le montant payé est jugé trop bas par le commandant, et dans ce cas, le gouvernement prendra les dispositions nécessaires pour obtenir des moyens suffisants ».

Commentaire succinct

Il ressort de cette conférence des administrateurs locaux et centraux du Togo en 1909 (année du 25ème anniversaire de la colonisation allemande au Togo) que le gouvernement a enfin pris la mesure du problème social posé par les « métis allemands » dans la société coloniale togolaise. Les Allemands eux-mêmes ont constaté la misère dans laquelle sont confinés les enfants métis non entrtetenus par leurs géniteurs. Il ont adopté le principe selon lequel tout père d'un enfant métis est dans l'obligation d'en assurer l'entretien et l'éducation. C'est la concrétisation officielle de la proposition que l'administrateur Oscar Schmidt avait déjà faite dans les remarques consécutives au recensement des métis dans le District d'Aneho (document n° 1). Mieux vaut tard que jamais ! Toutefois, les administrateurs ont adopté à l'unanimité une mention additive selon laquelle « la prise en charge des métis [par leurs géniteurs allemands] ne change rien au principe de la séparation des races ». C'est donc une politique de ségrégation raciale qui prédomine dans cette question des métis.

2.3.2- Document n° 4 : Circulaire du gouverneur Zech relative à la prise en charge des métis par l'Administration coloniale

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA3/185, pp. 274-276

2.3.2.1- Texte original allemand

Runderlass betreffend die Fürsorge für Mulattenkinder.

Für den Unterhalt und die Erziehung derjenigen Mulattenkinder, für welche nicht in angemessener Weise gesorgt wird, haben die Leiter der Bezirksämter und Stationen die Fürsorge zu übernehmen, und dabei folgende Grundsätze zu befolgen:

Bis zur Vollendung des 6. Lebensjahrs sind die Mulattenkinder bei der Mutter zu belassen.

Alsdann sind die Knaben der Regierungsschule als Kostschüler, die Mädchen den Missionsanstalten zuzufüren.

Sind diese Massnahmen ohne Aufwand von Kosten nicht durch führ-bar [sic!] oder stellen sich ihrer Durchführung sonst Schwierigkeiten entgegen, so ist unter Darlegung des Sachverhalts an das Gouvernement zu berichten.

Die Leiter der Bezirksämter und Stationen haben sich persönlich von dem Wohlergehen der unter ihrer Obhut stehenden Mulattenkinder zu überzeugen, bis diese das 15. Lebensjahr vollendet haben.

An dem Prinzip, dass Mulatten als Farbige zu gelten haben soll durch obige Anordung nichts geändert werden.

Lome,den 9. Juli 1909

Der Gouverneur

gez. Graf Zech.

2.3.2.2 - Traduction intégrale du texte en français Circulaire relative à l'assistance aux enfants mulâtres

L'entretien et l'éducation des enfants mulâtres qui ne reçoivent pas d'aide convenable, doivent être pris en charge par les chefs de Circonscription et de Stations selon les principes suivants :

- Jusqu'à l'âge de 6 ans révolus, les enfants mulâtres doivent être laissés à leurs mères.

- Ensuite, les garçons doivent être envoyés comme pensionnaires à l'école gouvernementale, et les filles dans les établissements missionnaires.

- Au cas où ces mesures ne peuvent pas être appliquées sans engendrer des frais, ou bien si l'application de ces mesures rencontre quelques autres difficultés, un rapport doit être adressé au gouvernement, en y exposant les faits.

- Les Chefs de Districts et de Stations doivent s'assurer personnellement du bien-être des enfants mulâtres placés sous leur garde jusqu'à ce que ceux- ci atteignent l'âge de 15 ans révolus.

- Les dispositions ci- dessus énoncées ne doivent rien changer au principe selon lequel les mulâtres sont à considérer comme des gens de couleur.

Lomé, 09 Juillet 1909

Le Gouverneur,

Von Zech.

Commentaire succinct

Cette circulaire est la traduction en texte réglementaire de la décision issue de la conférence annuelle des administrateurs locaux tenue à Bassari en mars 1909 (document n° 3).

2.3.3 - Document n° 5 : Rapport de Dr. Asmis58 sur le port de noms allemands par les enfants métis

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA3/185 pp. 143-147

2.3.3.1- Résumé du document en français

L'administrateur Asmis, chef de la Circonscription administrative de Lomé-Ville, a remarqué que les enfants métis ajoutent à leurs prénoms les noms de leurs pères allemands. Pour lui, cette attitude est dangereuse du point de vue de la politique raciale. Il justifie son point de vue et propose donc pour adoption au cours de la prochaine réunion des Chefs de Circonscription, un projet d'ordonnance pour réglementer le port de noms allemands par des métis de pères allemands.

58 Dr. Rudolf Asmis est né le 12 juin 1879 à Meshenhagen. Il arriva dans la colonie du Togo le 13 décembre 1906 où il fut nommé le 27 juillet 1908 assesseur auxilliaire de la justice puis après président de la commission des terrains. Il défendait l'interêt du territoire de la population indigène, dont les terres vacantes et sans maître étaient illégalement occupées par la DTG (Die Deutsche Togo Gesellschaft). Soucieux de cette population, il entreprit des recherches en vu d'une codification des droits des indigènes. Mais il lui fut interdit de publier les résultats de ses recherches. Et lui-même conscient des limites fixées pour ses recherches sur la codification des droits des indigènes se tut et trouva sa satisfaction personnelle dans la carrière coloniale. Ayant pris conscience de son appartenance à la race supérieure et à un peuple de seigneurs Asmis s'opposa évidemment à la politique raciale des Anglais, des Hollandais, des Portugais et des Français qui toléraient le métissage; ce qui justifie sa prise de position dans ce texte. Il quitta la colonie le 5 janvier 1912 pour ses congés en Allemagne et ne revint plus. (Ahadji 1995 : 43ff).

2.3.3.2 - Texte original allemand

Kaiserliches Bezirksamt Lome-Stadt, Lome 30. Okt. 1909,

[...] Anlässlich der vom Bezirksamt auszuübenden vormundschaftlichen Tätigkeit habe ich beobachten können, dass den Mulattenkindern häufig die Namen ihrer ausserehelichen Väter beigelegt werden. Ich halte diesen Brauch vom rassenpolitischen Standpunkt für bedenklich. Meines Erachtens ist es erwünscht, dass die Scheidung, die in der gesamten Rechtsstellung der beiden Bevölkerungsteile zwischen den Weissen und den Farbigen gemacht wird und die den Grundzug der Rassenpolitik des Gouvernements bildet, auch in der Namengebung zum Ausdruck kommt. Diese Vermischung der Namen wird, wenn es einmal notwendig werden wird, gesetzlich festzulegen, bis zu welchem Grade der Blutvermischung der Mischling noch als Farbiger anzusehen ist, die Durchführung einer derartigen Massnahme äusserst erschweren, wenn nicht unmöglich machen. Sie wird weiter zur Folge haben, dass sich der Mischling mit überwiegend europäischem Blut dank seines Namens als Europäer fühlen wird und sich als solcher behandelt wünscht. Komplikationen sind alsdann unausbleiblich. Sie lassen sich vermeiden, wenn auch für das Schutzgebiet betreffend der Eingeborenen der Grundsatz des deutschen Rechts (vgl BGB § 1706)59 anerkannt und durchgeführt wird, dass das uneheliche Kind den Familiennamen der Mutter erhält. Auch in späteren Generationen wird sich alsdann aus dem Namen die Abstammung ergeben. Führen die Mütter keine Familiennamen, so wären den Mulattenkindern seitens des Gouverneurs Namen beizulegen, die ja in Anlehnung an die bei der Namenverleihung an die in Preussen und Österreich in Bezeichnungen der Stammessprache aus dem Tier-, Pflanzen und Steinreich bestehen könnten. Treten einmal aus der Verpflichtung zu dieser Namensführung besondere Härten hervor, so liessen sich diese dadurch beseitigen, dass ein Namenwechsel mit Genehmigung des Gouverneurs als zulässig erachtet wird.

Wenn auch die Zahl der Mulatten nach den letzten Statistiken von 93 im Jahre 1908 auf 156 im Jahre 1909 angewachsen ist, so wird sich trotzdem zur Zeit eine entsprechende Massnahme noch unschwer durchführen lassen. Andererseits weist diese Zunahme der Mulatten um 59, 6 % in einem Jahr - mag auch ein Bruchteil dieser Zunahme auf die genauere Zählung zurückzuführen sein - mit zwingender Überzeugungskraft auf die Notwendigkeit einer alsbaldigen gesetzlichen Regelung hin. Die gesetzliche Unterlage ist in der Kaiserlichen Verordnung vom 3. Juni 190860 gegeben. Ich stelle daher gehorsamst zur Erwägung, die Frage auf dem nächsten Bezirkstag zur Erörterung zu stellen und alsdann möglichst bald den Erlass einer entsprechenden Verordnung herbeizuführen. Den Entwurf einer solchen beehre ich mich beizufügen.

Verordnung des Gouverneurs betr. die Namensführung von Abkömmlingen von
Europäern und Farbigen. Auf Grund des § 2 der Allerhöchsten Verordnung betr. die
Einrichtung der Verwaltung und die Eingeborenen-Rechtspflege in den afrikanischen und

59 §1706 des Bürgerlichen Grundbuches: Das uneheliche Kind erhält den Familiennamen der Mutter.

Führt die Mutter in Folge ihrer Verheiratung einen anderen Namen, so erhält das Kind den Familiennamen, den die Mutter vor der Verheiratung geführt hat. Der Ehemann der Mutter kann durch Erklärung gegenüber der zuständigen Behörde dem Kinde mit Einwilligung des Kindes und der Mutter seinen Namen erteilen; die Erklärung des Ehemanns sowie die Einwilligungserklärung des Kindes und der Mutter sind in öffentlich beglaubigter Form abzugeben (S.1009) .

60 In der Hauptversammlung vom 12. Juni 1908 sprach sich die Gesellschaft dahin aus, dass keinem Farbirgen die Reichsangehörigkeit verliehen werden soll, dass kein Farbirger eine amtliche Stellung erhalten darf, in welcher er direct oder indirect Vorgesezter von Weissen ist und dass Ehen zwichen Farbigen und Weissen in den Schutzgebieten standesamtlich nicht eingetragen werden dürfen und Kinder aus solchen Ehen als Farbige gelten (Zeitschrift für Kolonialpolitik, Kolonialrecht und Kolonialwirtschaft 1912, S.744).

den Südseeschutzgebieten vom 3. Juni 1908 (Deutsches Kolonialblatt S. 617) wird mit Zustimmung des Reichskanzlers Folgendes verordnet:

§ 1 Abkömmlinge von Europäern und Farbigen erhalten den Familiennamen des farbigen Teils der Eltern. Führt dieser selbst keinen Familiennamen, so ist dem Abkömmling ein Familienname aus dessen Stammessprache durch den Gouverneur zu verleihen.

§ 2 Diese Verordnung tritt am in Kraft,

Lome, den der Gouverneur

A(smis) Bezirksamtmann«

2.3.3.3 - Traduction du document en français District impérial de Lomé - Ville,

Lomé le 30 octobre 1909

Dans l'exercice de mes fonctions de tuteur [des métis] dans ma Circonscription, j'ai pu constater que les prénoms des enfants mulâtres s'accompagnent dans la plupart des cas des noms de leurs pères illégitimes. Je trouve cette pratique inquiétante pour notre politique raciale. A mon avis, il est souhaitable que se reflète aussi dans l'attribution des noms la séparation entre Blancs et Noirs fixée par la position juridique des deux composantes de la population, et qui fait le fondement de la politique raciale du gouvernement. Si jamais il s'avérait nécessaire de déterminer légalement, jusqu'à quel degré de mélange de sang le métis devrait être encore considéré comme un Noir, la confusion de noms rendra difficile, sinon impossible l'application d'une telle mesure. Par ailleurs, la conséquence d'une telle pratique sera que le métis, grâce à ce nom, se sentira comme étant un Européen, et voudra être traité comme tel, parce qu'ayant un sang majoritairement européen. Des complications seront alors inévitables. Cela pourrait être évité si l'on reconnaît et que l'on applique pour la colonie, en ce qui concerne les indigènes, le principe du droit allemand (Cf. Code Civil allemand BGB) § 1706, selon lequel l'enfant hors-mariage se voit attribué le nom de famille de sa mère. Ainsi, même pour les générations futures, l'origine d'une personne se reconnaîtra dans son nom. Si les mères ne portent aucun nom de famille, le gouverneur pourrait alors attribuer aux enfants métis des noms selon la pratique en vigueur en Prusse et en Autriche, et qui consiste à choisir des noms désignant des animaux, des plantes ou des roches dans la langue locale. Dans le cas où une telle manière d'attribuer les noms viendrait à rencontrer des difficultés particulières, on pourrait y remédier en envisageant de concéder un changement de nom, sur autorisation du gouverneur. Même si, selon les statistiques récentes, le nombre des

mulâtres est passé de 93 en 1908 à 156 en 1909, l'application d'une mesure conséquente se fera actuellement sans difficulté. Sinon, selon l'impérieuse conviction qui s'impose de plus en plus, l'augmentation des mulâtres de 59% en un an rend nécessaire une réglementation urgente, même si une partie de cette augmentation est due à un manque de précision dans le recensement. Le cadre juridique d'une telle mesure est déjà fourni par l'ordonnance impériale du 3 juin 1908. C'est pourquoi je me permets de proposer qu'il soit envisagé d'aborder cette question au cours de la prochaine conférence des Chefs de District, afin que la décision d'une ordonnance allant dans ce sens puisse être prise dans les plus brefs délais. Je me permets de proposer ci-joint un projet d'une telle ordonnance.

Avec l'accord du Chancelier du Reich et conformément à l'article 2 du décret impérial portant institution de l'administration coloniale et application du droit des indigènes dans les protectorats africains et ceux d'outre-mer du 3 juin 1908 (Deutsches Kolonialblatt p. 617), il est décrété avec l'accord du Chancelier du Reich au sujet du port de noms des descendants d'Européens et de femmes de couleur, ce qui suit :

Article 1 : Les descendants d'Européens et de femmes de couleur reçoivent les noms de famille du parent noir. Au cas où ce dernier ne porte pas lui- même de nom de famille, il reviendrait alors au gouverneur de donner au descendant un nom de famille en se référant à sa langue d'origine.

Article 2 : Ce décret entre en vigueur le .....

Lomé le

signé

Le gouverneur

le chef de district, Asmis

2.4 - Document n° 6 : Procès verbal de la conférence régionale des administrateurs du sud de la colonie Lomé en 1911, sur l'attribution des noms aux enfants métis

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA3/1012, pp. 9-11

2.4.1- Résumé du document en français

La réunion qui fait l'objet de ce procès verbal fait suite à la demande formulée dans le document précédent (n° 5) d'envisager une réglementation du port des noms allemands par des métis.

2.4.2 : Texte original allemand

Niederschrift über den am 9. März 1911 im Gouverneurshause in Lome abgehaltenen südlichen Bezirkstag« stellv. Gouverneur von Doering als Vorsitzender

Namengebung der Mulattenkinder

Der Vorsitzende vorliest einen Bericht des Bezirksamts Lome-Stadt vom 30. Okt. 1909 und bemerkt dazu, dass in dem Verordnungsentwurf die Behandlung eines von einer weissen Mutter abstammenden Mulattenkindes nicht vorgesehen sei.

Dr. Asmis: Ein von einer weissen Mutter abstammenden Mulattenkind würde nach dem B.G.B. den Namen der Mutter zu führen haben. Er schätze die Zahl der Mulattenkinder auf etwa 200, sie werde bald die Zahl der Europäer übersteigen. Sobald erst Kinder, die zu drei Vierteln europ. Blut hätten, vorhanden wären - und das sei nur eine Frage der Zeit - würden die gleichen Schwierigkeiten bezüglich der Rassentrennung entstehen, wie sie jetzt schon in anderen Staaten, die den Grundsatz des Rassengegensatzes anwendeten, beständen.

Diese Schwierigkeiten liessen sich zum grossen Teil vermeiden, wenn der Mischling durch seinen Namen sofort als solcher kenntlich sei. Jetzt seien diesbezügliche Massnahmen noch durchführbar. Er halte es daher aus rassenpolitischen Gründen für wünschenswert, dass die Namengebung durch Verordnung geregelt werde.

Regierungsrat Hermans: Bei der noch geringen Zahl der Mulattenkinder und ferner unter Berücksichtigung des Umstands, dass die Mulatten keine bessere Erziehung als die Neger geniessen, halte ich die Sache nicht für so dringend, dass die Angelegenheit schon jetzt durch Verordnung zu regeln wäre; eine Regelung der Namengebung durch Verfügung oder Runderlass wäre zu erwägen.

Der Vorsitzende bespricht hierauf den Fall Blank. Blank halte sich zur Zeit in (Deutsch-) Südwest auf und habe abgelehnt, für den Unterhalt des Kindes zu sorgen. Da es bedenklich, ja aussichtslos erscheine, Blank in Südwest auf Unterhaltsansprüche zu verklagen, so befinde sich das Gouvernement in diesem Fall in einer misslichen Lage. Um keinen Präzedenzfall zu schaffen, könne das Gouvernement nicht für den Unterhalt des Kindes eintreten. Das Kind befinde sich zur Zeit in einem recht verwahrlosten Zustande in Bassari, und da es ein Mädchen sei, würde sich die kath. Mission vielleicht seiner annehmen. Das Gouvernement würde dieserhalb mit der Mission in Verbindung treten.

Der Vorsitzende stellt hierauf den Verordnungsentwurf einstweilen zurück. Nach der Geburt des ersten Quadronenkindes könne dieser Frage wieder nähergetreten werden.«

2.4.3 : Traduction intégrale du texte en français Procès-verbal de la réunion des Chefs de District de la région méridionale, tenue le 9 mars 1911 dans la résidence du Gouverneur à Lomé. Cette réunion fut présidée par von

Doering, Gouverneur intérimaire, et avait pour ordre du jour «le nom à donner aux enfants mulâtres».

Le Président de séance donna lecture d'un rapport du Chef de District de Lomé-Ville du 30 octobre 1909 et fit remarquer que le traitement d'un enfant mulâtre né d'une mère Blanche, n'est pas prévu dans le projet de décret.

Dr. Asmis: Selon le code civil allemand, un enfant mulâtre né d'une mère blanche devrait porter le nom de la mère. Il estima le nombre des enfants mulâtres à environ 200 et en a déduit qu'il dépasserait bientôt celui des Européens. Dès qu'il existerait des enfants qui auraient jusqu'à 3/4 de sang européen - et ceci n'est plus qu'une question de temps - il existerait à propos de la politique de séparation des races, les mêmes difficultés que celles déjà survenues dans les autres pays qui appliquent le principe fondamental de la séparation entre les races.

On anticipera la plupart de ces difficultés, si le métis est reconnaissable comme tel à son nom. Les mesures relatives à ce problème sont actuellement encore applicables. Pour ce faire, il serait souhaitable, pour des raisons de politique raciale, que le port de nom par les enfants métis soit réglementé par un décret.

Hermans, Conseiller du Gouvernement: Pour un nombre encore faible des enfants mulâtres et aussi compte tenu du fait que les mulâtres ne jouissent pas d'une meilleure éducation que celle des Nègres, je ne trouve pas qu'il soit si urgent de sortir un décret pour statuer sur cette affaire; il faudrait encore étudier la possibilité de réglementer le problème de l'attribution par simple décret.

Le Président de séance a évoqué à ce propos le cas Blank. Blank réside actuellement dans la colonie allemande du Sud-Ouest Africain et a refusé de payer la pension alimentaire de l'enfant. Et puisqu'il se révèle inquiétant et sans issue de porter plainte contre Blank là-bas pour obtenir le versement de la pension alimentaire, alors le Gouvernement se retrouve dans un grand embarras. Pour ne pas créer de précédents, le Gouvernement ne peut pas intervenir dans la prise en charge de l'enfant qui se trouve actuellement à Bassari dans un parfait état de déchéance, et puisque c'est une fille, la mission catholique pourrait peutêtre la prendre dans son établissement. À ce sujet, le Gouvernement va donc entrer en contact avec la mission.

Sur ce, le Président de séance remet à plus tard le projet de décret. Cette question pourra de nouveau retenir l'attention des autorités après la naissance du premier enfant de la quatrième génération de métis.

Commentaire succinct

C'est la première tentative officielle d'obtenir une réglémentation sur le port de noms allemands par des métis de pères allemands, constaté par Dr. Asmis dans sa Circonscription, comme cela est d'ailleurs de coutume partout ailleurs. La décision est remise à plus tard, mais le problème demeure, selon les administrateurs coloniaux.

2.5 - Document n° 7 : [Konkubinat zwischen Weissen und farbigen Frauen«] Concubinage entre Blancs et femmes noires

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA1/487, p.19.

2.5.1 : Résumé du texte en français

Ce document est une mise au point du gouvernement colonial, par délégation de pouvoir, au sujet du statut matrimonial des relations entre un Blanc et une Noire : cela ne peut, en aucun cas, être considéré comme un mariage. C'est clair et net.

2.5.2 : Texte original allemand

Abschrift J. no 5220 / 11

Konkubinat zwischen Weissen und farbigen Frauen

Das Zusammenleben eines Europäers mit einer Farbigen kann auch dann nicht als Ehe im deutschrechtlichen Sinne angesehen werden, wenn die für den Abschluss der Ehen von Farbigen nach Stammesrecht üblichen Gebräuche und Formalitäten beobachtet worden sind. Es kann daher, wenn die mit einem Europäer zusammenlebende farbige Frau von einem Farbigen geschlechtlich gebraucht wird, auch keine Bestrafung wegen Ehebruchs, sondern, sofern die übrigen Begleitumstände dies rechtfertigen, nur eine Bestrafung wegen Beleidigung oder Achtungsverletzung von bezw. gegenüber einem Europäer erfolgen.

Lome, den 19. Juli 1911

Der Gouverneur i. A. gez. Hermans.

2.5.3 : Traduction intégrale du texte en français

Copie J. n 5220/11

Concubinage entre Blancs et femmes de couleur

La vie commune d'un Européen avec une femme de couleur ne peut pas être considérée comme un mariage au sens du droit allemand, même si les coutumes et formalités habituelles pour la conclusion des unions des gens de couleur selon le droit coutumier ont été respectées. Pour cette raison, lorsqu'une femme de couleur vivant avec un Européen a été utilisée pour des relations sexuelles par un homme de couleur, il ne peut y avoir de sanction pour adultère, mais plutôt une punition pour outrage, ou pour atteinte à l'honneur d'un Européen, pour autant que le permettent tous les autres faits liés à ces relations.

Lomé, le 19 juillet 1911

Pour le le Gouverneur et p.o. Hermans.

Commentaire succinct

Il serait intéressant de connaître le contexte réel de cette mise au point, car il s'agit sans doute d'un cas où un Blanc a porté plainte contre un Noir qui aurait eu des relations avec sa femme noire. Sollicité pour trancher cette question, l'Administration coloniale ne veut pas tomber dans un piège en punissant le Noir ou la Noire accusé(es) d'adultère. Car une telle sanction reviendrait à reconnaître comme un mariage la vie commune d'un Blanc avec une Noire. Alors, pour couper la poire en deux, il est convenu de ne pas parler d'adultère, mais d'atteinte à l'honneur d'un Européen.

Cette vision du droit selon l'administration coloniale montre toute la complexité de la question : on ne reconnaît pas à la femme noire un statut d'épouse, même si les formalités de mariage à l'africaine ont été toutes respectées. Mais si la femme noire vient à faire un écart conjugal, elle sera sanctionnée, comme son partenaire noir, pour offense à honneur d'un Européen. Curieuse vision du droit !

2.6 - Document n° 8 : Procès-verbal d'une session du gouvernement colonial du Togo tenue à Lomé en 1912 sur la question du métissage et du mariage mixte

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT) - FA1/412, pp. 23-25

2.6.1- Résumé du document en français

Le 18 septembre 1912, s'est tenue une réunion du Conseil de gouvernement de la colonie au domicile du gouverneur Adolf Friedrich zu Mecklenburg, avec comme 5ème point de l'ordre du jour, la question des métis et des mariages mixtes. À l'issue de cette séance, il ressort que tous les participants sont unanimement contre les mariages mixtes. Au terme de la séance, le conseil du gouvernement a donc demandé au gouvernement

1 De faire cesser le plus tôt possible les mariages mixtes dans la colonie.

2 De redéfinir les lois concernant les droits des enfants hors mariage auxquels le code civil ne peut être appliqué.

2.6.2 : Texte original allemand

"Niederschrift über die am 18. Sept. 1912 im Gouverneurshaus zu Lome abgehaltene Gouvernementsratssitzung" unter Vorsitz des Gouverneurs Adolf Friedrich zu Mecklenburg: 5. [Punkt] Stellungnahme zur Mischlings- und Mischehenfrage." "Regierungsrat Hermans führt folgendes aus: Nach einer im Reichstag eingebrachten Resolution sollen Mischehen in den Kolonien gestattet sein. Die Regierung wäre dagegen. Das Reichskolonialamt wünsche Stellungnahmen zu dieser Frage durch die Gouvernementsräte. In Togo sei der Rassenunterschied bisher scharf gewahrt worden und man sei gut dabei gefahren. Die Gestattung der Mischehe würde, wenn auch zur Zeit hier im Schutzgebiet Ehen zwischen Schwarzen und Weisse in absehbarer Zeit nicht in Frage kommen, das scharfe Rassengefühl, welches wir unbedigt brauchen, schwächen. Die Mischehenfrage kann nicht aus ethischen und religiösen Gesichtspunkten, sondern vor allem aus rassenpolitischen Gesichtspunkten beantwortet werden. Die Missionen in Südwestafrika wären sämtlich dagegen.

Planzungsdirektor Wöckel ist auch der Ansicht, dass Mischehen in den Kolonien verboten werden sollen, dass insbesodere dadurch das Ansehen der weissen Frau geschädigt werde.

Missionar Däuble erklärt, vom christlichen Standpunkt sei gegen Mischehen nichts einzuwenden. Aber vom natürlichen und gesellschaftlichen Standpunkt aus müsse man dagegn ankämpfen.

Präfekt Schönig schliesst sich den Worten der Vorredner an und führt aus, dass eine Ehe zwischen Schwarzen und Weissen schon deshalb untunlich sei, weil nach kath. Auffassung die Ehe unlöslich sei. Ein Europ.[äer] aber, der hier eine Eingeb.[orene] heirate, sei aus klimatischen Gründen über kurz oder lang genötigt, die gemässigte Zone aufzusuchen, was angesichts der praktischen Unmöglichkeit, ein eingeb.[orenes] Weib

dorthin mitzunehmen, die Lösung der Ehe zur Folge habe. Ebenso wendet er sich auch scharf gegen die illegitimen Ehen.

Der Vorsitzende ist auch der Meinung, dass man nur einen ablehnenden Standpunkt einnehmen könne.

Der Referent bemerkt, dass die Gestattung der Mischehe auf das Zusammenleben von Europäern mit eingeb. Weibern in keiner Weise Einfluss ausüben werde.

Alle Anwesenden halten eine Regelung des Rechtes der unehelichen Kinder im Schutzgebiet für wünschenswert.

Es wird hierauf folgende Resolution einstimming angenommen:

Der Gouvernementsrat ersucht das Gouvernement, daraufhinzu wirken, dass die Eingehung [sic!] von Mischehen im Schutzgebiet unter allen Umständen unmöglich gemacht wird und hält eine Regelung des Rechtes derjenigen unehelichen Kinder, auf welche das Bügerliche Gesetzbuch zur Zeit nicht Anwendung findet, für erwünscht."

Unterschriften: zu Mecklenburg, Geh. Reg.-Rat von Doering, Assessor Clausnitzer, Assessor Dr. Fleischhauer, landwirtsch. Beirat Sauerwein, Stabsarzt Dr. Rodenwaldt, Kaufmann Armerding, Pflanzungsdirektor Woeckel, Präses Däuble, Präfekt Schönig, Bauunternehmer Starcke, Sekretär Schnecko als Protokollführer.

2.6.3 : Traduction intégrale du texte en français Procès-verbal de la séance du Conseil de Gouvernement tenue le 18 septembre 1912 dans la maison du gouverneur à Lomé, et présidée par le Gouverneur Adolf Friedrich zu Mecklenburg.

Cinquième point [de l'ordre du jour] : Prise de position sur la question des mulâtres et des mariages mixtes.

Le conseiller du gouvernement Hermans explique ce qui suit : d'après une résolution introduite au Reichstag, il est demandé que les mariages mixtes soient autorisés dans les colonies. Le gouvernement serait contre cela. L'administration coloniale impériale souhaite donc des prises de position sur cette question à travers les conseils de gouvernement [des colonies]. Selon Hermanns, au Togo, la différence entre les races est très clairement observée jusqu'à présent et la situation a été bien maîtrisée. Même si une autorisation des mariages mixtes n'est pas envisagée ici dans la colonie dans l'immédiat, une telle mesure affaiblira le sentiment racial qui demeure une nécessité. La question des mariages mixtes ne peut pas être abordée et résolue d'un point de vue éthique ou religieux, mais surtout du point de vue de la politique raciale. Les sociétés de mission dans le Sud-OuestAfricain Allemand sont toute contre cela.

Woeckel, Directeur de plantation est aussi de l'avis que les mariages mixtes doivent être interdites dans les colonies, particulièrement parce qu'ils portaient atteinte à la considération envers la femme blanche.

Le missionnaire Däuble [de la Mission Protestante de Brême au Togo] explique que du point de vue religieux, il n'y a rien à dire contre les mariages mixtes, mais que du point de vue naturel et social, il faut combattre cela.

Le préfet apostolique Mgr Schönig [de la mission catholique de Steyl] se rallie à l'opinion de l'orateur précédent et explique qu'un mariage entre des Noires et des Blancs est déjà impensable en soi, parce que l'Eglise catholique considère le mariage comme indissoluble, alors qu'un Européen qui serait marié ici à une indigène sera tôt ou tard amené à retourner dans une zone tempérée, et l'impossibilité d'emmener une femme indigène conduirait inévitablement à la dissolution du mariage. De même, le missionnaire catholique est strictement contre les mariages illégitimes.

Le président de séance est aussi d'avis que seule une prise de position négative doit être envisagée.

Le rapporteur fait remarquer que l'autorisation de mariages mixtes n'aura aucune influence sur la vie commune des Européens avec les femmes indigènes.

Toutes les personnes présentes considèrent qu'il est souhaitable d'élaborer une réglementation des droits des enfants nés hors-mariage dans la colonie.

Sur ce, la résolution suivante a été adoptée à l'unanimité :

Le Conseil de Gouvernement demande au gouvernement de faire cesser par tous les moyens les mariages mixtes dans la colonie et souhaite une réglementation des droits des enfants hors mariages pour lesquels le code civil [allemand] ne peut pas, pour le moment, être appliqué.

Ont signé: zu Mecklenburg, le Conseiller de Gouvenement von Döring, l'Assesseur Clausnitzer, l'Assesseur Dr. Fleichhauer, l'Assistant agricole Sauerwein, le Médecin Dr. Rodenwaldt, le Commerçant Armerding, le Directeur de plantation Wöckel, le Missionnaire Däuble, le Missionnaire Schönig, l'Entrepreneur Starcke, le Secrétaire Schnecko en tant que Rapporteur de séance.

Commentaire succinct

Ce qui ressort essentiellement de cette séance du Conseil de Gouvernement, c'est
l'hypocrisie flagrante des membres de ce Conseil qui campent sur des positions tranchées
et font la politique de l'autruche en face de la réalité du terrain : alors qu'il est

unanimement reconnu que le mariage mixte existe bel et bien au Togo - avec beaucoup de mauvais exemples certes, mais avec quelques cas encourageants - tous les membres de cette instance s'efforcent de nier cela. Plus ridicule encore est la position de ceux d'entre eux qui fondent leur argumentation de refus sur le fait que le Blanc ne pourra pas emmener une femme noire en Europe. En somme, tous préfèrent tolérer dans la colonie ce qui n'est pas tolérable en Allemagne ! Une telle attitude face à une réalité évidente et troublante ne pouvait que compliquer toute solution au problème. Enfin, il faut souligner que, vu rétrospectivement, les missionnaires des deux confessions se sont discrédités en se rangeant sur les positions colonialistes. Le pasteur Däuble, de la Mission de Brême, a bien commencé sa réflexion en affirmant que « du point de vue religieux, il n'y a rien à dire contre les mariages mixtes«, mais en ajoutant que d'un point de vue naturel et social, il faut combattre cela«, on se demande de quelle nature il parle, sinon de la nature raciste qui guide ses opinions. En se ralliant à lui, le préfet apostolique Mgr Schönig, de la mission catholique de Steyl, commet la même erreur historique en affirmant qu'un mariage entre des Noires et des Blancs est déjà impensable en soi«. Au nom de quel dogme religieux une telle union estelle impensable? L'explication qu'il donne - («parce que l'Eglise catholique considère le mariage comme indissoluble«) - n'a rien à voir avec la race des mariés. Les églises chrétiennes, à travers la prise de position de ces deux missionnaires, ce sont discrétées au Togo sur la question du mariage mixte. Elles se sont ralliées à des positions doctrinales qui n'ont rien à voir avec les dogmes religieux (cf. également document n° 11 du présent mémoire). Mais on comprend très bien la raison de cette attitude : tant que la cohabitation entre Blancs et Noirs dans la colonie est fondée sur la politique de la séparation des races, le gouvernement ne peut pas scier la branche sur laquelle il est lui-même assis. Le racisme comme doctrine coloniale ne peut pas officiellement cohabiter avec les mariages mixtes. Donc le Conseil de Gouvernement offre une fin de non-recevoir à la demande venue du Reichstag qui s'apprêtait à envisager l'autorisation des mariages mixtes dans les colonies. De ce côté-là aussi, il s'agissait sans doute également d'une demande hypocrite : le Reichstag demande l'avis des gouverneurs coloniaux, en sachant que cet avis sera négatif. En effet, cette question avait été déjà débattue en 1911 au Reichstag, et c'est le Ministre des Colonies en personne, Wilhelm Solf, qui était venu défendre la pureté de la race devant les parlementaires en s'écriant61: « Messieurs, je prie instamment de vous laisser guider dans cette affaire,

61 Meine Herren, ich bitte Sie dringend, sich in dieser Frage von Ihren Instinkten leiten zu lassen: Wünschen Sie, dass Ihnen Ihre Söhne schwarze Schwiegertöchter ins Haus bringen? Wünschen Sie, dass sie Ihnen wollhaarige Enkel in die Wiege legen? Nein meine Herren, die ganze Nation wünscht das nicht.» (cité in Petschull 1984:121)

par vos instincts. Souhaitez-vous que vos fils vous ramènt à la maison des belles-filles noires? Souhaitez-

vous qu'ils vous déposent dans le berceau des petits-fils aux cheveux crépus? Non messieurs, la nation toute entière ne souhaite pas cela.

C'est d'ailleurs pourquoi Solf, dans une correspondance ultérieure, datée du 12 juillet 1913, salue la décision du Conseil du Gouvernement du Togo en ces termes : «Von der Entschliessung des Gouvernementsrats über die Mischehen- und Mischlingsfrage habe ich seinerzeit mit Befriedigung Kenntnis genommen.« [A cette époque, j'avais pris connaissance, avec satisfaction,de la décision prise alors par le Conseil de gouvernement au sujet de la question des mariages mixtes et des métis] (cf. document n° 10 du présent mémoire).

2.7 - Principaux textes de 1913

2.7.1 Document n° 9 : Clarification au sujet de l'ordonnance du 30 octobre 1909 et décret portant attribution des noms allemands.

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA3 /185 pp.148 - 151

2.7.1.1- Résumé du texte en français

Après la tentative de Dr. Asmis en 1909 de faire réglementer le port de noms allemands par les métis de pères allemands (document n° 5), proposition repoussée à plus tard à la réunion du 9 mars 1911 (document n° 6), voici une nouvelle tentative dans le même sens faite par l'administrateur Körmigk, chef du District de Lomé-Ville. Ce dernier propose non seulement de remettre ce projet de décret sur le tapis, mais aussi d'étendre la réglementation au port de tout nom européen, donc pas seulement aux métis allemands«, mais à tous les indigènes.

2.7.1.2 : Texte original allemand

An das K. Gouvernement in Lome. Lome, den 12. Mai 1913

Im Bericht vom 30. Okt. 1909 H. No 2464/09 hat Bezirksamtmann Dr. Asmis Bedenken gegen den im Schutzgebiet verbreiteten Brauch geltend gemacht, dass Mulattenkindern häufig die Namen ihrer ausserehelichen Erzeuger beigelegt werden. Er hielt dies vom rassenpolitischen Standpunkt aus für unerwünscht, da sich Mischlinge mit europäischem Blut und Namen leicht auch als Europäer fühlen könnten und als solche behandelt zu werden wünschten. Es wurde darauf eine Verordnung entworfen, wonach Abkömmlinge von Europäern und farbigen Frauen den Familiennamen der Mutter erhalten sollten; falls diese keinen Familiennamen führte, sollte dem Abkömmling ein Familienname aus seiner Stammessprache verliehen werden. Diese Frage wurde auf dem am 9. März 1911 abgehaltenen Bezirkstage erörtert und dann bis zu der Geburt des ersten Quateronenkindes zurückgestellt.

Nachdem dieser Fall vor einiger Zeit eingetreten ist, dürfte diese Frage von neuem zu prüfen sein.

Im Zusammenhang hiermit ist es vielleicht zweckmässig auch zu prüfen, ob nicht nur den Mulatten, sondern auch den Eingeborenen überhaupt das Führen europäischer oder zum mindesten deutscher Namen zu untersagen ist. Ausser rassenpolitischen Gründen liesse sich für die Einführung eines solchen Verbots geltend machen, dass im Schriftverkehr mit einem Eingeborenen, der einen europäischen Namen führt, leicht der Irrtum Platz greifen kann, man habe es mit einem Europäer zu tun. Auf diese Weise können sich z. B. auswärtige Firmen leicht verleiten lassen, einem eingeb. Besteller einen weitergehenden Kredit zu gewähren, als sie es sonst einem Eingeb. gegenüber tun würden. Unter den europ. Namen, die in Togo bei Eingeb. vorkommen, handelt es sich meist um solche nicht deutsche, namentlich portugiesischer Herkunft, während deutsche Namen bisher nur ganz selten sind. Gegenüber den Trägern nichtdeutscher europ. Namen wäre es wohl zweckmäßig, von der Durchführung eines solchen Verbots abzusehen, da sie die Namen meistens schon viele Generationen hindurch führen und die Durchführung des Verbots mit unverhältnismäßigen Härten verbunden wäre. Wohl aber wäre es m. E. am Platze, der Einbürgerung deutscher Namen unter den Eingeb. entgegenzuarbeiten. Hierzu wäre m. E. der Erlass einer Verordnung nicht nötig, vielmehr liesse sich dies auch ohne Schwierigkeit im Verwaltungswege von Fall zu Fall regeln.

L(ome) 12/5. 13 d(er) K( aiserliche) B(ezirks) A(mtmann) K(örmigk)«

Commentaire succinct

A la lecture de cette proposition de l'administrateur Körmigk, on constate qu'au fur et à mesure que s'établit la domination coloniale allemande sur le Togo, l'administration cherche à durcir de plus en plus les relations entre Noirs et Blancs, particulièrement sur la question des unions mixtes. Ici, ce n'est plus le métissage en soi qui est visé par la proposition de décret, mais tout simplement le nom des Européens. Dans un pays où des noms comme Lawson, d'Almeida, da Silva, Johnson etc. existaient avant l'arrivée des Allemands en 1884, on envisage de légiférer sur le port de tels noms. Ce n'est même plus le respect du sang allemand ou de la « race » allemande (aryenne ?) qu'il s'agit, mais du racisme pur et dur, dans le but de mettre des entraves aux activités de toute personne noire portant un nom à consonnance européenne. En ce sens, cette proposition de

Körmigk sonne comme une véritable provocation délibérée. Et il affirme que cela pourra être imposée sans difficulté, par simple voie d'ordonnance administrative !

2.7.2 - Document n° 10 : Correspondance du Secrétaire d'Etat aux Colonies, Dr. Solf, en date du 12 juillet 1913, élaboration de dispositions conséquentes.

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA1/439, pp. 22-23

2.7.2.1- Résumé du texte en français

Dans cette correspondance qui se réfère au document n° 8, le Ministre des Colonies, Dr. Wilhelm Solf, autorise le gouvernement colonial du Togo à légiférer sur le statut juridique des métis.

2.7.2.2 - Texte original allemand

»Der Staatssekretär des Reichs-Kolonialamts Berlin, den 12. Juli 1913

An den Herrn Gouverneur, Lome.

Mit Bezug auf den Bericht vom 27. Sept. vorigen Jahres

Von der Entschliessung des Gouvernementsrats über die Mischehen- und Mischlingsfrage habe ich seinerzeit mit Befriedigung Kenntnis genommen. Die Frage der Zulässigkeit der Mischehe und der rechtlichen Gleichstellung von Mischlingen mit Weissen sind hier auch weiterhin Gegenstand eingehender Prüfung gewesen. Um Härten, die sich in einigen Schutzgebieten bei der Betonung eines grundsätzlichen Mischehenverbots gezeigt haben , zu beseitigen, habe ich in Aussicht genommen, eine kaiserliche Verordnung zu erbitten, die auf Grund der §§4,7 Sch.G.G. den Gouverneur ermächtigt, im Einzelfall würdige Eingeborene der im §2 Sch.G.G. geregelten Gerichtsbarkeit und den in den §§ 3,7 Sch.G.G. bezeichneten Vorschriften zu unterstellen. Einen Verordnungsentwurf werde ich seinerzeit Euerer Hoheit zur Äusserung mitteilen.

Während sich so für die Mischehenfrage nur eine allen Schutzgebieten gemeinsame Lösung finden lassen wird, liegt die gleichfalls in der Reichstagsentschliessung berührte, nach Eingeborenenrecht zu behandelnde Frage der Rechtsverhältnisse der unehelichen Mischlinge in den einzelnen Schutzgebieten derartig verschieden, dass ihre Regelung zweckmässig durch Gouvernementsverordnung erfolgt.

Die Entschliessung des Gouvernementsrats, die diese Regelung für erwünscht bezeichnet, kann ich nur billigen. Euere Hoheit will ich nunmehr ermächtigen, die Materie auf Grund der Kaiserlichen Verordnung vom 3. Juni 1908 in einer die Interessen des unehelichen Mischlings und des weissen Vaters gleich und billig berücksichtigenden Weise zu regeln. Jedoch bitte ich, mir die Verordnung vor ihrem Erlass im Entwurf vorzulegen. Solf

Darauf erarbeitete das Gouvernement...Entwürfe, die aber im Juli 1914 in Lome noch diskutiert wurden.

S. 7-8 »II.Entwurf Verodnung des Gouverneurs betreffend die Rechtsverhältnisse der Mulatten vom

Auf Grund der §§ 1 und 2 der Kais. Verordnung betr. die Einrichtung der Verwaltung und die Eingeborenenrechtspflege in den afrik. und den Südsee-Schutzgebieten vom 3. Juni 1908 (Reichsgesetzblatt S. 397) wird mit Zustimmung des Reichskanzlers folgendes verordnet:

§ 1. Die durch unehelichen Geschlechtsverkehr zwischen einem Weissen und einer Farbigen erzeugten Kinder haben die rechtliche Stellung Eingeborener.

§ 2. Auf das Verhältnis des Vaters zu dem Kinde und seiner Mutter finden die Vorschriften der §§ 1708-1718 des bürgerl. Gesetzbuches entsprechende Anwendung, soweit sich nicht aus den Bestimmungen dieser Verordnung etwas anderes ergibt.

§ 3. Die Verpflichtung des Vaters zur Unterhaltsgewährung dauert unbeschadet der Vorschrift des § 170862 Abs.2 des bürgerl. Gesetzbuches nur bis zum vollendeten 15. Lebensjahr des Kindes.

§ 4.Durch eine gemäss §1710 B.G.B.63 erfolgte Vorausleistung für eine spätere Zeit als drei Monate wird der Vater nur befreit, wenn der gesetzliche Vertreter des Kindes die Vorausleistung genehmigt hat.

§ 5. Eine gemäss § 1714 B.G.B.64 getroffene Vereinbarung bedarf der Genehmigung des Gouverneurs.

§ 6. Die nach dem § 1715 B.G.B.65 dem Vater obliegende Verpflichtung umfasst nur die Zeit für die ersten drei Wochen nach der Entbindung. Der Anspruch verjährt in einem

62 §1708 des Bürgerlichen Grundbuches: Der Vater des unehelichen Kindes ist verpflichtet, dem Kinde bis zur Vollendung des sechzehnten Lebensjahrs den der Lebensstellung der Mutter entsprechenden Unterhalt zu gewähren. Der Unterhalt umfasst den gesammten Lebensbedarf sowie die Kosten der Erziehung und der Vorbildung zu einem Berufe.

Ist das Kind zur Zeit der Vollendung des sechzehten Lebensjahrs in Folge körperlicher oder geistiger Gebrechen ausser Stande, sich selbst zu unterhalten, so hat ihm der Vater auch über diese Zeit hinaus Unterhalt zu gewähren (S. 1020).

63 §1710 des Bürgerlichen Grundbuches: Der Unterhalt ist durch Entrichtung einer Geldrente zu gewähren. Die Rente ist für drei Monate vorauszuzahlen. Durch eine Vorausleistung für eine spätere Zeit wird der Vater nicht befreit.

Hat das Kind den Beginn des Vierteljahrs erlebt, so gebührt ihm der volle auf das Vierteljahr entfallende Betrag (S. 1030).

64 §1714 des Bürgerlichen Grundbuches: Eine Vereinbarung zwischen dem Vater und dem Kinde über den Unterhalt für die Zukunft oder über eine an Stelle des Unterhalts zu gewährende Abfindung bedarf der Genehmigung des Vormundschaftsgerichts.

Ein unentgeltlicher Verzicht auf den Unterhalt für die Zukunft ist nichtig (S. 1036).

65 §1715 des Bürgerlichen Grundbuches: Der Vater ist verpflichtet, der Mutter die Kosten der Entbindung sowie Kosten des Unterhalts für die ersten sechs Wochen nach der Entbindung und falls in Folge der Schwangerschaft oder der Entbindung weitere Aufwendungen notwendig werden, auch die dadurch entstehenden Kosten zu ersetzen. Den wöhnlichen Vertrag der zu ersetzenden Kosten kann die Mutter ohne Rücksicht auf den wirklichen Aufwand verlangen.

Der Anspruch steht der Mutter auch dann zu, wenn der Vater vor Geburt des Kindes gestorben oder wenn das Kind tot geboren ist.

Der Anspruch verjährt in vier Jahren. Die Verjährung beginnt mit Ablaufe von sechs Wochen nach der Geburt des Kindes (S. 1039).

Jahr. Die Verjährung beginnt mit dem Ablauf von drei Wochen nach der Geburt des Kindes.

§ 7. Zur Wahrung der für das Kind aus dieser Verordnung und der hierzu ergangenen Ausführungsverordnung sich ergebenden Rechte erhält es einen gesetzlichen Vertreter. Als solcher ist der Leiter des Bezirks des Geburtsortes des Kindes berufen. Erscheint die Übernahme der Vertretung durch ihn nicht angebracht, so ist an den Gouverneur zu berichten welcher einen gesetzlichen Vertreter bestimmt. Die Vertretung kann aus Zweckmässigkeitsgründen an ein anderes Bezirksamt (Station) abgegeben werden.

§ 8. Der Gouverneur kann zu dieser Verordnung Ausführungsbestimmungen erlassen.

§ 9. Die Verordnung tritt am .... in Kraft. Die rechtliche Stellung des vor dem
Inkrafttreten dieser Verordnung geborenen Kindes bestimmt sich vom Inkrafttreten ab nach denVorschriften dieser Verordnung. Lome, den Der Gouverneur

S. 9-11 »II. Entwurf Ausführungsverordnung zu der Verordnung des Gouverneurs betreffend die Rechtsverhältnisse der unehelichen Mulatten vom

Auf Grund des §8 der Verordnung des Gouverneurs betreffend die Rechtsverhältnisse der unehelichen Mulatten vom wird folgendes verordnet:

§ 1. Die Geburt eines unehelichen Mulatten muss binnen 3 Monaten nach der Geburt beim Bezierksamt (Station) des Geburtsortes angezeigt werden. Die Anzeige hat zu enthalten: 1) Ort, Tag und Stunde der Geburt, 2) Geschlecht des Kindes, 3) Namen, Stammeszugehörigkeit, Standoder Gewerbe und Wohnort der Mutter, 4) Namen des Kindes. Zur Anzeige, die schriftlich oder mündlich erstattet werden kann, sind in nachstehender Reihenfolge verpflichtet:

1) die Mutter des Kindes, 2) die Verwandten der Mutter, 3) der Häuptling des Geburtsortes.

§ 2. Die Geburt des Kindes ist durch das Bezirksamt (Station) in eine Liste einzutragen, deren Inhalt mit der im § 1 erwähnten Anzeige übereinstimmen soll.

§ 3. Der gesetzliche Vertreter hat den als Vater bezeichneten Weissen zur Erklärung über die Anerkennung seiner Vaterschaft aufzufordern. Nötigenfalls sind von Amts wegen Ermittlungen nach dem Vater anzustellen. Bestreitet der als Schwängerer Bezeichnete seine Vaterschaft, so hat der gesetzliche Vertreter ihn auf Leistung des Unterhalts zu verklagen.

§4. Das Kind soll mindestens bis zur Vollendung des 6. Lebensjahres bei der Mutter oder ihren Verwandten belassen oder bei einer geeigneten farbirgen Familie untergebracht werden. Danach sollen die Knaben einer Regierungsschule, die Mädchen einer Missionsanstalt zugeführt werden. Den billigen Wünschen des Vaters oder der Verwandten des Kindes ist tunlichst Rechnung zu tragen.

§5. Falls weder von dem Vater die Gewährung eines unzureichenden Unterhaltes für das Kindzu erlangen ist, noch auch die Mutter oder ihre Verwandten für den Unterhalt und die Erziehung des Kindes sorgen, so dass das Kind der Gefahr des körperlichen oder sittlichen Verkommens ausgesetzt ist, so hat der gesetzliche Vertreter unter Darlegungdes Sachverhalts an das Gouvernement zu berichten (gestrichen und die Bereitstellung amtlicher Mittel zu beantragen).

§6. Die Bezirksämter (Stationen) haben am Schlusse eines jeden Kalenderjahres über das Wohlergehen und die Verwaltung des Vermögens der Kinder dem Gouverneur Bericht zu erstatten.

§7.

Die Bezirksämter (Stationen) haben nach Inkrafttreten dieser Verordnung festzustellen, welche Beträge zum Unterhalt und zur Erziehung eines Kindes in den einzelnen Lebensabschnitten unter gewöhnlichen Verhältnissen erforderlich sind. Die festgestellten Verpflegungssätze sind dem Gouverneur einzureichen.

§8. Zuwiederhandlungen gegen §1 dieser Verordnung werden mit den gegen Eingeborene zulässigen Strafmittel bestraft.

§9. Diese Verordnung tritt am in Kraft. Der Runderlass vom 9. Juli 1909 betreffend die
Fürsorge für Mulattenkinder tritt mit diesem Zeitpunkt ausser Kraft.

Lome, den Der Gouverneur.

Im I. Entwurf war ein Paragraph enthalten, der gestrichen wurde»§6 Haben der Mütter mehrere innerhalb der Empfängniszeit beigewohnt, so gelten sie als Gesamtschuldner.

Die Vorschrift des §1717 Absatz 1 Satz 2 findet Anwendung .

2.7.2.3- Traduction intégrale du texte en français

« Le Secrétaire d'Etat aux colonies, Berlin, le 12 juillet 1913

A Monsieur le gouverneur, Lomé.

Me référant au rapport du 27 septembre dernier, j'ai pris connaissance de la résolution du conseil du gouvernement sur la question du mariage mixte et des métis avec satisfaction. La question de l'autorisation du mariage mixte et de l'égalité de droit des métis avec les Blancs font encore ici aussi l'objet d'un examen minutieux. Pour écarter toutes les duretés qui se sont révélées dans certaines colonies à propos de l'interdiction sans condition du mariage mixte, je me suis proposé de demander un décret impérial, qui conformément aux articles 4, 7 de la loi fondamentale des colonies, confère au gouverneur le pouvoir de placer des autochtones respectables dans une juridiction, telle que le stipule l'article 2 de la loi fondamentale des colonies, sous un règlement stipulé par les articles 3 et 7 de la loi fondamentale des colonies. Je vais envoyer à Votre Excellence en temps opportun, un projet de ce décret pour avoir votre avis.

Alors qu'il sera ainsi possible de trouver une seule solution commune aux problèmes du mariage mixte dans toutes les colonies, l'autre question également abordée dans la décision du Reichstag, et qui concerne le statut juridique des mulâtres hors mariage qui doivent être traités selon le droit coutumier, se présente de manière différente dans chaque colonie, si bien qu'il serait plus judicieux de la régler par une ordonnance de chaque gouvernement. Je ne peux qu'approuver la résolution du conseil du gouvernement qui considère une telle ordonnance comme souhaitable, et je voudrais donc mandater Votre Excellence de réglementer cette affaire aussi équitablement et aussi parcimonieusement que possible, sur la base du décret impérial du 3 juin 1908, en sauvegardant à la fois les

intérêts des enfants métis hors-mariage et de leurs pères blancs. Cependant je vous prie de me soumettre le projet de décret avant sa promulgation. Signé : Solf »

[NB]: A la suite de cette correspondance, le gouvernement colonial du Togo a élaboré divers projets de décret qui étaient encore en discussion en juillet 1914 à Lomé.

pp. 7 - 8

2ème Projet de décret du gouvernement concernant le statut juridique des mulâtres du Togo.

Conformément aux §§ 1 & 2 du décret impérial du 3 Juin 1908 (cf. Reichsgesetzblatt p. 397) relatif à la création de l'administration coloniale et au droit coutumier des autochtones dans les colonies africaines et du Pacifique, il est décrété avec le consentement du chancelier du Reich ce qui suit :

§1 : Les enfants issus de l'union entre un Blanc et une Indigène ont le statut juridique des autochtones.

§2 : Concernant la relation du père avec l'enfant et sa mère, les dispositions des §§ 1708- 1718 du code civil s'appliquent, pour autant qu'il n'y ait pas dans le décret des dispositions différentes qui en découlent.

§3 : Le père est tenu de prendre soin de l'enfant seulement jusqu'à l'âge de 15 ans révolus, sans porter préjudice à la prescription du § 1708 alinéa 2 du code civil.

§4 : Si le père, conformément au § 1710 du code civil, a versé une provision par avance pour une période de plus de trois mois, il ne peut être dispensé de ses obligations que si le tuteur légal du métis a attesté que le père de l'enfant a effectivement versé cette provision.

§5 : Tout accord conclu en vertu du § 1714 du code civil nécessite le consentement du gouverneur.

§6 : L'obligation imposée au père selon le § 1715 du code civil, s'étend seulement sur une période de trois semaines après l'accouchement. Toute prétention reposant sur cette obligation perd sa validité juridique après 1 an. Cependant l'expiration du droit de revendication après l'écoulement des trois semaines après la naissance de l'enfant.

§7 : Pour la défense des droits de l'enfant découlant de cette ordonnance ainsi que de ses décrets d'application, l'enfant dispose d'un représentant légal. Le chef de district du lieu de naissance de chaque enfant est désigné comme son représentant légal. S'il n'est pas indiqué qu'il assume cette fonction, alors il doit faire un rapport au gouverneur qui devra

décider quel remplaçant légal il conviendrait de nommer. La fonction de représentant légal peut être confié à un autre chef de District (ou de station) pour des raisons de convenance.

§8 : Le gouverneur peut prendre des décrets d'application de cette ordonnance.

§9 : L'ordonnance prend effet à partir de .... Son application au statut juridique d'un enfant né avant l'entrée en vigueur de cette ordonnance se décidera dans les décrets d'application de l'ordonnance.

Lomé, le

.............................. Le Gouverneur

pp. 9-11 : deuxième projet de décret d'application au décret du gouverneur concernant le statut juridique des enfants mulâtres illégitimes.

Conformément au § 8 du décret du gouverneur concernant le statut juridique des mulâtres hors-mariages il est décrété ce qui suit :

§1 : La naissance d'un enfant mulâtre illégitime doit être déclarée auprès du Chef de District (ou de station) dans un délai de 3 mois après la naissance.

La déclaration doit contenir :

1) Le lieu, le jour et l'heure de la naissance

2) Le sexe de l'enfant

3) Le nom, l'ethnie, la situation ou la profession de la mère et le lieu où elle réside

4) Le nom de l'enfant

Les déclarations doivent êtres faites par écrit ou oralement, par l'une ou l'autre des personnes suivantes désignées par ordre de préséance :

1) La mère de l'enfant

2) Les parents de la mère

3) Le chef noir du lieu de naissance

§2 : La naissance de l'enfant doit être enregistrée sur une liste par l'administration du district (ou de la station) conformément aux indications du §1.

§3 : Le remplaçant légal doit exiger la reconnaissance de paternité par le père blanc
indiqué. En cas de besoin, les administrations font des recherches sur le père. Si celui qui a

été désigné comme auteur de la grossesse nie sa paternité, alors le représentant légal peut porter plainte contre lui pour exiger l'application de la prise en charge.

§4 : Au moins jusqu'à 6 ans révolus, l'enfant doit rester chez sa mère ou les parents de celle-ci, ou encore être logé chez une famille indigène capable de le supporter. Après quoi les garçons doivent aller à l'école gouvernementale et les filles être conduites chez les missionnaires.

§5 : Au cas où il n'est pas possible que le père verse une allocation suffisante pour l'entretien de l'enfant, et que la mère ou ses parents ne peuvent pas s'occuper de l'entretien et de l'éducation de cet enfant, au point que l'enfant court le risque d'être abandonné aux dangers de dépravations corporelles ou morales, alors le tuteur légal peut en rendre compte au gouverneur.

[NB]: (ce dernier point a été barré et remplacé par: peut faire une demande de soutien par voie officielle«).

§6 : A la fin de chaque année, les chefs de district (ou de station) doivent faire au gouverneur un rapport sur la bonne santé des enfants ainsi que sur la gestion de leurs biens.

§7 : Dès l'entrée en vigueur de ce décret, les Chefs de District (ou de Station) doivent fixer le montant de l'allocation qui doit être versée pour l'entretien et l'éducation d'un enfant à chaque phase de sa vie et dans les conditions habituelles. Les montants fixés doivent être communiqués au gouverneur.

§8 : Toute infraction à l'article 1 de ce décret sera puni conformément à la sanction prévue contre les indigènes.

§9 : Le présent décret entre en vigueur ....A partir de son entrée en vigueur, la circulaire du 9 Juillet 1909 concernant la prise en charge des enfants mulâtres perd toute validité.

Lomé, le

..............................

Le Gouverneur

[NB] Le premier projet contenait un article qui a été supprimé et qui prévoyait ceci : §6: si plusieurs hommes [blancs] ont eu des relations avec les mères [noires] durant la période de fertilité de celles-ci, ils sont considérés comme collectivement redevevables [des allocations]. La disposition de l'article 1717, alinéa 1, phrase 2, sera alors appliquée. »

2.7.3 - Document n° 11 : Echange de Correspondances entre la société de mission de Brème et le Secrétariat d'Etat aux Colonies à Berlin

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-F.A. 1/ 439, pp. 25-26 & 27 (16

juillet 1913)

2.7.3.1 : Résumé de deux textes en français

Le 16 juillet 1913, la société des missions de l'Allemagne du Nord adressa une lettre à l'administration coloniale impériale de Berlin. Dans cette lettre, la mission de Brême souligne qu'au Togo le nombre des métis était plus important que celui de la population masculine européenne, et pourtant les relations entre ces enfants métis et leurs pères allemands ne sont pas cordiales, puisque les métis ne sont pris en charge que par les familles de leurs mères indigènes, qui d'ailleurs manquent de moyens. C'est pourquoi la Mission de Brême salue la Ligue Coloniale allemande d'avoir décidé, lors de son assemblée de 1912 à Hambourg, d'obliger les pères européens à assister leurs enfants afin de réduire le nombre des métis au Togo. La Mission de Brême demanda à l'administration coloniale impériale de nommer un tuteur pour métis; celui-ci se chargerait de leur alimentation lorsque leurs pères auraient payé la somme qui leur est destinée. La mission demanda également que ces pères renforcent la relation entre eux et leurs enfants.

Répliquant à leur demande le 26 juillet 1913, le secrétaire d'Etat aux Colonies s'est félicité de l'importance qu'accorde la société des Missions aux problèmes de justice et d'entretien des métis, tout en les rassurant que toutes ces dispositions seront prises en compte.

2.7.3.2 - Les deux textes originaux allemands

1. »An das Reichs- Kolonialamt Berlin, Bremen, 16. Juli 1913

Norddeutsche Missions-Gesellschaft. Betr. Fürsorge für Mulattenkinder in Togo.

Nach dem letzten 1913 erschienenen amtlichen Jahresbericht über die deutschen Schutzgebiete waren in Togo 240 Mischlingskinder vorhanden. Die Summe der erwachsenen, männlichen, europ. Bevölkerung betrug 254, darunter 42 kath. und evangel. Missionare. Im Verhältnis zu dieser Zahl europ. Männer ist die Zahl der Mischlingskinder eine grosse. Die Norddeutsche Missionsges. steht auf dem Standpunkt, dass sie jede Verbindung von europ. Männern mit eingeb. Frauen und Mädchen verwirft. Ihre Vertreter haben daher wiederholt betont, dass man z.B. den Beamten jede nur mögliche Erleichterung zu ihrer Verehelichung gewähren solle. In Ansehung der tatsächlichen Lage sind wir der Meinung, dass in Togo Mischlingskinder auf die Seite der Eingeb. gehören. Dementsprechend sind Mischlingskinder auf Antrag

und mit Unterstützung der Beteiligten durch unsere Missionare fast immer bei Eingeb. untergebracht worden. Leider fehlt es nicht an Fällen, wo seitens der Väter unzureichend oder gar nicht gesorgt wird. Dadurch entstehen Verhältnisse, die sowohl wegen der Mischlingskinder und ihrer Mütter, wie auch wegen des Ansehens der Europ. lebhaft zu beklagen sind. Die Fälle der hier vorliegenden schwierigen Fragen ethischer, hygenischer, sozialer, rechtlicher und politischer Art sin uns wohlbekannt. Umso dankbarer haben wir es begrüsst, dass die Deutsche Kolonialgeselschaft 1912 bei ihrer Hauptversammlung in Hamburg mit Nachdruck die Alimentationspflicht der europ. Väter gegenüber den Mischlingskindern betont hat. Die Durchführung dieser Forderung dürfte zu einer Verminderung der Zahl der Mischlinge beitragen. Wir erlauben uns daher die Bitte auszusprechen: Das Reichs-Kolonialamt wolle geeignete Vorkehrungen treffen, vielleicht durch die Ernennung eines General-Vormundes, dass in Togo europ. Väter von Mischlingskindern zur Zahlung einer angemessenen Alimentationssumme angehalten und die Verhältnisse der Mischlingskinder in einer Weise wahrgenommen werden, die dem Interesse dieser Kinder der Mission und der Regierung entspricht.

Der Vorstand der Norddeutschen Missions-Gesellschaft,

gez. A. W. Schreiber, Misssionsdirektor.

2. S. 27 Antwort

»Der Staatsekretär des Reichs-Kolonialamts, Berlin, den 26 Juli 1913

Mit Genugtuung habe ich davon Kenntnis genommen, dass die Missionsgesellschaft den Fragen der Rechtsstellung und Unterhaltung der Mischlingskinder ihr Interesse entgegenbringt. Die Gouverneure der mir unterstellten Schutzgebiete sind bereits ersucht worden, Verordnungsentwürfe vorzulegen, die die Rechtsverhältnisse der unehelichen Mischlingskinder regeln. Ich habe ihnen von Ihrem Schreiben Mitteilung gemacht.

In Vertretung.

Gez. Gleim».

2.7.3.3: Traduction intégrale en français Au Secrétariat d'Etat aux Colonies à Berlin,

Brême, le 16/07/1913

La société missionnaire de l'Allemagne du Nord, au sujet de la prise en charge des enfants mulâtres au Togo.

Selon le dernier rapport administratif de l'année paru sur les colonies allemandes, il existerait au Togo 240 enfants mulâtres. La population masculine européenne s'élèverait à 254, dont 42 missionnaires catholiques et évangéliques. Comparé à ce nombre des Européens, le nombre des enfants métis est élevé. La société de mission de l'Allemagne du Nord soutient la thèse selon laquelle toute union entre Européens et femmes et filles autochtones doit être rejetée. Ses représentants ont donc plusieurs fois insisté, qu'il faudrait par exemple accorder toutes les facilités possibles au mariage des fonctionnaires.

Eu égard à la situation réelle sur le terrain, nous sommes d'avis qu'au Togo les enfants mulâtres ont leur place parmi les indigènes. Conformément à cela, à la demande et avec le soutien des parties concernées, et avec l'aide de nos missionnaires, les enfants mulâtres sont presque toujours placés chez des indigènes ou dans les familles de leurs mères africaines. Mais malheureusement, il arrive souvent du côté des pères, que la prise en charge des enfants soit insuffisante ou n'existe pas du tout. C'est pour cela que la mission a salué avec gratitude le fait que la Ligue Coloniale allemande a souligné avec insistance, lors de son assemblée générale de 1912 à Hambourg, l'obligation faite aux pères européens de payer des frais d'alimentation pour leurs enfants métis. Ceci devrait contribuer à réduire le nombre de mulâtres.

Nous nous permettons donc de formuler des doléances, à savoir : l'administration coloniale impériale devrait prendre des mesures adéquates, peut-être en nommant un tuteur général des mulâtres, afin qu'au Togo, les pères soient amenés à payer des frais d'alimentation suffisants, pour que les conditions des enfants métis soient réglées d'une manière qui corresponde aux intétêts des enfants respectifs eux-mêmes, de la mission et du gouvernement.

Pour la Présidence de la société des missions de l'Allemagne du Nord

a signé

A. W. Schreiber, Directeur de Mission.

P. 27 Réponse

Le secrétaire d'Etat, Berlin, le 26 juillet 1913

C'est avec satisfaction que j'ai pris connaissance de l'importance qu'accorde la société de mission aux problèmes juridiques et à l'entretien des mulâtres. Les gouverneurs des colonies qui sont sous mes ordres sont prêts à présenter les projets de décrets réglementant le statut juridique des enfants métis hors-mariage. Je leur ai transmis votre doléance.

a signé par intérim

Gleim

Commentaire succinct

La Direction de la mission de Brême s'invite officiellement en Allemagne dans le débats sur la question des métis au Togo. En campant sur une position raciste dogmatique qui est celle du gouvernement colonial, elle manque de marge de manoeuvre pour jouer sa propre

partition. En effet, c'est de la pure naiveté de penser que l'obligation faite aux pères européens de payer des frais d'alimentation pour leurs enfants métis, peut contribuer à réduire le nombre de mulâtres. La mission de Brême manque donc d'arguments et de solutions crédibles pour affronter la situation des métis. Aussi se borne-t-elle à proposer ce qu'elle-même fait avec ses missionnaires : faciliter le mariage des administrateurs coloniaux avec des femmes blanches, pour éviter que ceux-ci se tournent vers des femmes noires66. On voit que la Mission de Brême n'a pas encore compris une des dimensions principales de la question : l'attrait de la femme noire, symbole d'érotisme exotique

2.7.4 - Document n° 12 : Ordonnance du gouverneur A. F. Herzog zu Mecklenburg en date du 18 octobre 1913 relative au port du nom du géniteur des métis allemands« au Togo

Source originale : Amtsblatt für das Schutzgebiet Togo 1913 n° 59, pp. 313 - 314 .

2.7.4.1 : Résumé du texte en français

Voici l'une des mesures juridiques - sans doute la principale - de lutte contre la situation des métis dans la colonie allemande du Togo : l'ordonnance d'interdiction faite aux métis de porter le nom de leurs pères allemands.

2.7.4.2 -Texte original allemand

Lome, den 25 Okt. 1913

Verordnung des Gouverneurs betreffend die Namen-Gebung und Führung seitens Eingeborener. Auf Grund des § 2 der Kaiserlichen Verordnung betreffend die Einrichtung der Verwaltung und die Eingeborenen-Rechtspflege in den afrikanischen und SüdseeSchutzgebieten vom 3. Juni 1908 (Reichsgesetzblatt S. 397) wird mit Zustimmung des Reichskanzlers verordnet, was folgt:

§ 1 Eingeborene dürfen ohne Genehmigung des Gouverneurs einen deutschen Namen als Familiennamen sich oder ihren Angehörigen nicht beilegen oder führen.

§ 2 Zuwiderhandlungen werden mit Geldstrafe bis zu 150 Mark bestraft, an deren Stelle, falls sie nicht beigetrieben werden kann, Gefängnisstrafe mit Zwangsarbeit bis zum Höchstbetrage von 6 Wochen tritt.

Lome, den 18. Oktober 1913. Der Gouverneur. Herzog zu Mecklenburg«

66 A propos de l'organisation des mariages pour les missionnaires de Brême, cf. Ilse Theil (2008: Page 4 de la couverture), déjà citée ci-dessus dans la présente étude:

2.7.4.3- Traduction intégrale du texte en français

«Journal Officiel pour le protectorat Togo, Lomé, le 25 oct. 1913, n ° 59, pp.313 - 314.

Décret du Gouverneur relatif à l'attribution et au port de noms par les indigènes.

Vu l'article 2 du décret impérial du 3 juin 1908 (Code Civil du Reich, p. 397), portant installation d'une administration et d'un droit pour les indigènes dans les protectorats africains et ceux des mers du sud, il est décrété, en accord avec le Chancelier du Reich, ce qui suit:

Article 1: Les indigènes n'ont pas le droit de porter ou de donner à leurs proches un nom allemand comme nom de famille sans l'autorisation du Gouverneur.

Article 2: Toute infraction à cette loi entraîne une amende financière allant jusqu'à 150 mark, ou en cas d'impossibilité de recouvrement de cette amende, une peine d'emprisonnement avec travaux forcés jusqu'à une durée maximale de 6 semaines.

Lomé, le 18 octobre 1913. Le Gouverneur, duc de Mecklenburg»

2.7. 5 - Document n° 13 : Clarification au sujet de l'ordonnance du 18 octobre 1913 Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA 3/185, p. 260 - 273

2.7.5.1 - Résumé du texte en français

Il s'agit ici d'une proposition du Chef du District de Lomé-Ville, Clausnitzer, destinée à clarifier les conditions de l'attribution de nom allemands aux enfants métis, plus exactement pour restreindre autant que possible l'utilisation de la seule concession faite aux métis de solliciter auprès du gouverneur le droit de porter le nom de leur géniteur allemand. C'est donc un durcissement par rapport à l'ordonnance précédente promulguée deux mois plus tôt (cf. document n° 12).

2.7.5.2 - Texte original allemand

An das Kaiserliche Gouvernement, hier. Lome, den 16. Dezember 1913

Vorgang: Verordnung des Gouverneurs betr. die Namen - Gebung und Führung seitens Eingeborener vom 18. Okt. 1913

Durch die vorbezeichnete Verordnung wird die Befugnis Eingeb., einen deutschen Familiennamen zu führen, von der Genehmigung des Gouverneurs abhängig gemacht. Da von dieser Bestimmung vornehmlich die ihrer Mehrzahl nach in Lome lebenden Mulatten betroffen werden und dann eine Anzahl von ihnen um die in Rede stehende Genehmigung einzukommen gedenkt, gestatte ich mir über die Voraussetzungen, von denen nach diesseitiger Auffassung in allen Fällen die Genehmigung abhängig zu machen sein wird, folgendes gehorsamst auszuführen:

Die Verordnung beseitigt den bisherigen durchaus unerwünschten Zustand, dass ein von einem Europ. mit einer Farbigen erzeugtes Kind sich ohne weiteres den Namen des angeblichen Erzeugers beilegen durften. Hierdurch waren die in Togo stets unehelichen Mulatten in Ansehung der Namensführung tatsächlich besser gestellt als die unehelichen Kinder von beiderseits europ. Eltern, die nach § 1706 des Bürgerlichen Gesetzbuches den Namen der Mutter zu führen haben und sich den Namen des Erzeugers selbst dann nicht beilegen können, wenn dieser seine Vaterschaft ausdrücklich anerkennt (§ 1708 B.G.B.) und willens ist, dem Kind seinen Namen zu geben. Nur dann, wenn der Erzeuger die Mutter des Kindes heiratet, kann er mit ihrer Zustimmung dem Kinde seinen Namen verleihen (§ 1706 B.G.B.) eine Möglichkeit, die hier ausscheidet, da Ehen zwischen Europäern und Eingeb. nicht geschlossen werden.

Abgesehen von dem letzteren hier nicht zutreffenden Falle gibt es in Deutschland für ein uneheliches Kind nur zwei Wege, den Namen des Erzeugers zu erlangen: die Adoption und die Genehmigung der Behörde (in Preussen des Regierungspräsidenten), den Namen zu führen. Die Adoption sieht begrifflich die Bestimmung des Adoptierenden voraus; bei der behördlichen Genehmigung hat die Behörde auf die Namensfrage anderer Rücksicht zu nehmen und wird jedenfalls einem unehelichen Kinde nicht gegen den Willen des Erzeugers ausgerechnet dessen Namen verleihen. Das läge nicht im Sinne der Vorschrift des § 12 B.G.B., die den Namensschutz gesetzlich statuiert und auch nicht der schon genannte § 1706,dessen Zustimmung auf diese Weise illusorisch gemacht werden könnte. Den gleichen oder vielmehr einen erhöhten Schutz muss meines Erachtens der deutsche Familienname in einem deutschen Schutzgebiet gegenüber dem sogenannten Mulattenkinde geniessen. Die Gründe hierfür brauche ich hier nicht auszuführen. Nur auf einen möchte ich, da er leicht übersehen werden kann, hinweisen, auf die in der Regel bestehende Unmöglichkeit für die in Deutschland lebenden Namensberechtigten gegen die Verleihung des Namens an einen Mulatten Einspruch zu erheben, da sie wegen der weiten räumlichen Entfernung nicht davon erführen. Man kann dagegen auch nicht einwenden, dass eben wegen der weiten Entfernung die in Deutschland lebenden Träger des betreffenden Namens kein oder kein besonderes Interesse daran hätten, ob ein Eingeb. in Togo den gleichen Namen führt. Es muss mit der Möglichkeit gerechnet werden, dass in Zukunft mehr Eingeb. als heute nach Deutschland kommen und durch Führung eines deutschen Familiennamens, besonders wenn es sich um einen bekannteren Namen handelt, Anstoss und unliebsame Erörterungen erregen können.

Hinzu kommt, dass die Auffassung des Eingeb. uneheliche Kinder nicht kennt, vielmehr
in der Regel alle Kinder zur Familie des Vaters gehörig rechnet. Der Mulatte Fritz

Durchbach, der kürzlich um die Genehmigung, den genannten Namen auch in Zukunft führen zu dürfen, eingekommen ist, hat mir auf den Vorschlag, er möge den Namen seiner Mutter (Garber) annehmen, erwidert, das könne er nicht, denn er habe Durchbach- und nicht Garberblut«. Ein Mulatte mit dieser Auffassung würde, wenn er nach Deutschland käme, womöglich keinen Anstand nehmen, sich den Verwandten seines Erzeugers als schwerlich erwünschtes Familienmitglied zu präsentieren, ihnen jedenfalls, etwa in einer kleinen Stadt, wo er den gleichen Namen führt und hierdurch den Anschein der Zugehörigkeit zur Familie erweckt, schwere Unannehmlichkeiten bereiten können.

Weiter ist zu berücksichtigen, dass die Genehmigung des Gouverneurs, den Namen zu führen, den betreffenden Eingeb. auch zur Führung des Namens in Deutschland berechtigen würde und die Namensträger in Deutschland auch auf Grund des § 12 B.G.B. nicht auf Unterlassung der Namenführung gegen ihn klagen könnten, da er zufolge der Genehmigung den Namen nicht unbefugt« führt.

Aus den angegebenen Gründen schlage ich gehorsamst vor, die Genehmigung zur Führung des Namens des Erzeugers - nur dieser dürfte überhaupt in Frage kommen - an die Voraussetzung zu knüpfen, dass der Erzeuger die Verleihung des Namens selbst beantragt, seine Vaterschaft ausdrücklich anerkennt und sich zur Unterhaltung des Kindes nach Massgabe der Vorschriften des B.G.B. über die Unterhaltspflicht gegenüber unehelichen Kindern verpflichtet. Die betreffenden Erklärungen müssten vor der örtlichen Verwaltungsbehörde in öffentlich beglaubigter Form abgegeben werden. Ist der Erzeuger bereits verstorben, so müsste ein etwaiger Antrag der Kinder auf Verleihung des Namens unter allen Umständen zurückgewiesen werden schon aus dem Grunde, weil die Vaterschaft nicht genügend glaubhaft zu machen ist.

Ich möchte aber weitergehend vorschlagen, auch die Zustimmung oder vielmehr den Antrag des Erzeugers nicht in allen Fällen als ausreichend gelten zu lassen. Manche Europäer verlieren bei längerem Aufenthalt unter den Eingeb. den richtigen Massstab für die Beurteilung der Dinge. Sie betrachten ihre Handlungsweise lediglich im Rahmen der hiesigen Verhältnisse, glauben auf heimische Anschauungen keine Rücksicht nehmen zu brauchen und rechnen vielleicht auch gar nicht mit der Möglichkeit, dass dieses oder jenes, was sie tun, eine Rückwirkung in der Heimat haben könnte. Ein solcher Europ. wird sich unter Umständen leicht dazu entschliessen, einem Mulattenkinde seinen Namen zu geben, während er einem unehelichen Kinde zu Hause gegenüber die gleiche Zumutung mit Entrüstung zurückweisen würde. Hier würde ihn schon die Rücksicht auf seine Familienangehörigen anhalten, den Namen, der Gemeingut der Familie ist, preiszugeben. Ich würde es hiernach für richtig halten, Anträge Eingeborener oder ihrer Erzeuger auf Verleihung europ. Namen diesbezüglich abzuweisen und nur in ganz besonders gearteten Fällen Ausnahmen zuzulassen. Ein derartiger Fall wäre vielleicht dann gegeben, wenn der betref. Erzeuger Angehörige seines Namens, auf die er Rücksicht zu nehmen brauchte, nicht mehr besitzt oder wenn es sich um Namen wie Müller oder Meier handelt, die wegen ihrer weiten Verbreitung eines besonderen Schutzes nicht bedürfen. Indessen würde selbst in letzterem Falle die Notwendigkeit einer Rücksichtnahme auf heimische Familienmitglieder in Frage kommen.

Der hier vertretene Standpunkt stellt auch keine Unbilligkeit oder Härte gegen die Mulatten dar, die damit in Ansehung der Namensführung nicht schlechter gestellt werden als uneheliche Kinder in der Heimat. Dass für diejenigen Mulatten, die sich bisher die Führung eines deutschen Familiennamens angemaßt hatten, die Ablehnung unbequem ist, mag zugegeben werden, kann aber meines Erachtens keine Rolle spielen.

Endich entspricht die hier vertretene Auffassung auch den Grundsätzen der hier bisher
verfolgten Rassenpolitik, nach denen der Mulatte wie jeder andere Eingeborene zu
behandeln ist. Das Bestreben der Mulatten, den übrigen Eingeborenen gegenüber eine

bevorzugte Stellung zu erlangen., würde eine erhebliche Förderung erhalten, wenn man ihnen in grösserem Umfange gestattete, die Namen ihrer Erzeuger anzunehmen. Auch würden die geschlechtlichen Beziehungen zwischen Europ. und eingeb. Frauen hierdurch indirekt eine nicht gerade beabsichtigte Anerkennung erfahren. C(lausnitzer) 16/12/13« Bezirksamtmann.

2.7.5.3 - Traduction intégrale du texte en français Au Gouvernement Impérial local. Lomé, le 16 décembre 1913 Objet: Décret du Gouverneur du 18 octobre 1913 relatif au port de noms par les indigènes. Par le décret susmentionné, les indigènes peuvent, sur autorisation du Gouverneur, porter un nom de famille allemand. Considérant le fait que ce sont surtout les mulâtres de Lomé qui sont concernés par une telle disposition, et vu leur nombre relativement élevé, et concidérant aussi le fait que certains d'entre eux envisagent de solliciter l'autorisation prévue dans ce décret, je me permets de faire les observations suivantes relatives aux conditions préalables dont doit dépendre la sollicitation d'une telle autorisation, selon notre compréhension des choses:

Le décret exclut la situation actuelle des choses qui est totalement indésirable, et qui veut que tout enfant né d'un Européen et d'une indigène ait le droit de porter sans aucun problème le nom du prétendu géniteur. Ce faisant, les mulâtres du Togo toujours nés hors-mariage, étaient jusqu'ici effectivement plus favorisés dans le port de noms par rapport aux enfants naturels issus de deux parents européens, lesquels, conformément à l'article 1706 du code civil, doivent porter le nom de la mère, et ne peuvent pas porter le nom du géniteur, même si celui-ci reconnaît explicitement sa paternité (Article 1708 du code civil du Reich) et est disposé à donner son nom à l'enfant. C'est seulement quand le géniteur a épousé la mère de l'enfant qu'il peut donner son nom à l'enfant, et seulement avec l'autorisation de la mère (§ 1706 du Code Civil), une possibilité qui est exclue dans le cas occurent, puisqu'il n'y a pas de mariage entre Européens et indigènes.

En dehors de ce dernier cas qui est exclu ici, il n'y a en Allemagne que deux moyens pour un enfant naturel de porter le nom de son géniteur: L'adoption et l'autorisation des autorités (ou du Chef du Gouvernement pour le cas de la Prusse). L'adoption prévoit en termes clairs l'accord de l'adopteur; quant à la permission des autorités, celles-ci doivent prendre en compte l'intérêt d'autres personnes éventuelles ; dans tous les cas, elles ne

peuvent pas faire porter à un enfant naturel le nom de son géniteur sans l'accord de ce dernier. Cela serait contraire aux dispositions de l'article 12 du Code Civil qui statue sur la protection juridique des noms, de même que cela irait à l'encontre de l'article 1706 déjà évoqué plus haut, et dont l'esprit pourrait être ainsi rendu illusoire.

À mon avis le nom de famille allemand devrait jouir de la même protection, voire d'une protection plus élevée dans un protectorat allemand vis à vis d'un enfant dit mulâtre. Je n'ai pas besoin d'en exposer les raisons ici. Je voudrais attirer l'attention sur une seule raison qui pourrait être oubliée, notamment sur l'impossibilité qui pourrait résulter pour ceux qui sont autorisés à porter légalement des noms allemands et qui vivent en Allemagne, impossibilté d'émettre quelque objection que ce soit contre l'attribution de noms à des mulâtres, car ils n'auraient pas été informés à temps, vu la distance considérable qui les sépare [des colonies]. On ne peut pas non plus refuter cela en argumentant que, justement à cause de la distance considérable qui les sépare des colonies, les personnes portant ce nom en Allemagne, n'ont aucun intérêt particulier à savoir si un indigène au Togo porte le même nom.

Il faut prévoir l'éventualité selon laquelle plus d'indigènes se rendront en Allemagne dans le futur qu'il n'en est le cas aujourd'hui, et que le fait qu'ils portent un mom de famille allemand pourrait provoquer là-bas une protestation ainsi que des propos fâcheux, surtout s'il s'agit d'un nom célèbre.

À cela s'ajoute le fait que selon la conception de l'indigène, il n'existe pas d'enfants illégitimes. En règle générale, tous les enfants sont considérés comme membres de la famille du père. Le mulâtre Fritz Durchbach est récemment venu solliciter l'autorisation de porter, même à l'avenir, le nom submentionné ; cela m'a amené à lui faire la proposition selon laquelle il pourrait bien porter le nom de sa mère (Garber), mais malheureusement, il m'a répondu qu'il ne peut pas le faire, car il a dans ses veines du sang Durchbach et non du sang Garber. Un mulâtre avec une telle conception n'hésiterait pas un seul instant, s'il arrivait en Allemagne, à se présenter aux parents de son géniteur comme un membre normal de la famille, et en tout cas, il pourrait de ce fait leur causer mal de désagréments, par exemple dans une petite ville, où il porterait le même nom de famille qu'eux et donnerait ainsi l'apparence d'appartenir à la famille.

En outre, il est à remarquer que l'autorisation du Gouverneur de porter le nom donnerait
aussi le droit à l'indigène concerné de porter ce nom en Allemagne, et les détenteurs
allemands de ces noms ne pourraient pas porter plainte contre lui pour qu'on lui ôte ce

nom, conformément à l'article 12 du Code Civil allemand, parce qu'il ne porte pas ce nom « sans autorisation ».

Au vu de ces raisons énoncées plus haut, je propose respectueusement que l'autorisation du port du nom du géniteur - d'ailleurs il ne doit être exclusivement question que de celui-là - soit subordonnée à une demande du géniteur lui-même signifiant sa volonté de léguer son nom, à la reconnaissance explicite de la paternité par le géniteur et enfin à un engagement de ce dernier de prendre en charge la pension alimentaire de l'enfant, conformément aux dispositions du Code Civil allemand portant obligation de soins vis-à-vis d'un enfant naturel. Les déclarations requises devraient être déposées auprès des autorités administratives locales sous forme officiellement certifiée. Au cas où le géniteur serait déjà mort, alors la demande de legs de nom devrait être systématiquement rejetée, étant donné que la paternité ne peut plus être prouvée d'une façon crédible.

Je voudrais en outre proposer de ne pas considérer dans tous les cas l'accord du géniteur, ou plus exactement la demande du géniteur comme une condition suffisante. Bien d'Européens perdent le vrai sens du discernement à la suite d'un long séjour parmi les indigènes. Ils mesurent leurs actes exclusivement par rapport aux réalités d'ici, ils pensent n'avoir pas besoin de se référer aux idéaux de leur patrie et ne voient même pas l'éventualité que tel ou tel autre de leurs actes pourraient avoir des répercussions sur leur patrie. Un tel Européen risque de se décider facilement à léguer son nom à un enfant mulâtre, alors qu'au pays il récuserait avec indignation la même exigence vis à vis d'un enfant naturel. Là-bas, la prise en compte des membres de sa famille l'empêcherait déjà de léguer le nom qui est un bien commun de la famille. En conséquence, je trouverais tout à fait justifié de refuser toute demande des indigènes ou de leurs géniteurs sollicitant le port de noms européens, et de n'accepter des exceptions que dans des cas vraiment particuliers. Un tel cas interviendrait par exemple quand le géniteur concerné a perdu toutes les personnes (membres de sa famille), dont il devait prendre en compte les intérêts, ou quand il s'agit par exemple des noms comme Müller ou Meier, qui n'ont pas besoin d'une protection particulière, vu leur usage répandu. Même dans ce dernier cas, il faudra aussi toujours envisager la nécessité de prendre en considération l'avis des autres membres éventuels de la famille en Allemagne.

Le point de vue défendu ici ne représente pas une désaprobation ou une rigueur contre les
mulâtres qui, du point de vue du port de noms, ne sont pas moins bien lotis que les
enfants naturels en Allemagne. Même si on doit avouer qu'un refus serait gênant pour les

mulâtres qui se sont permis jusqu'alors de porter un nom de famille allemand, cela ne peut jouer aucun rôle, selon moi.

Enfin la conception ici défendue est également conforme aux principes de la politique raciale pratiquée jusqu'ici dans le protectorat, et qui définissent comment le mulâtre ou n'importe quel autre indigène devrait être traité. Le souci des mulâtres d'accéder à une meilleure position que les autres indigènes bénéficierait d'un soutien considérable, si l'on les autorisait, dans une plus large mesure, à hériter des noms de leurs géniteurs. Par ailleurs, les relations sexuelles entre Européens et femmes indigènes connaîtraient indirectement par là même une reconnaissance que nous n'avons pas envisagée.

C.[lausnitzer], 16/12/13», le Chef de District.

Commentaire succinct

Les propositions faites par Clausnitzer pour l'application du décret du gouverneur sur le port de noms par les métis, nous révèlent le fond de la pensée qui soutient la politique coloniale allemande au sujet des indigènes : c'est la politique de stricte séparation raciale entre Noirs et Blancs. C'est ce dogme politique qui détermine l'administration coloniale vis-à-vis de la question des métis. Toutes mesures qui sont préconisées ici sous forme de propositions ne sont que des contorsions juridiques pour se conformer à ce dogme. Et des administrateurs tels que Clausnitzer, Asmis et autres semblent avoir été les plus durs partisans de la rigueur inflexible sur cette question.

3 - Cas individuels

3.1 - Document n° 14 : Josef Comla [Köhler *]

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA 3/185

3.1. 1 - Résumé en français de l'ensemble des extraits

L'histoire de Josef Comla [Köhler *], né le 17 mars 1897, intimement associé à celle de
son demi-frère Paul Quakuvi Jacobi, né en juin 1898, est un cas très intéressant qui permet

de découvrir la complexité des problèmes liés aux « métis allemands » du Togo. Les extraits de documents d'archives présentés ici donnent une idée de cette complexité.

Le mulâtre Josef Comla, fils du feu gouverneur Köhler et de sa femme togolaise Douha, est né le 17 mars 1897. Dix ans plus tard, le 21 mars 1907, le gouvernemeur Zech demanda aux héritiers allemands du feu gouverneur Köhler de s'occuper des frais de scolarité et d'hébergement de ce mulâtre. La garde de l'enfant avait été confiée à l'assistant des douanes Jacobi qui, jusque là, s'occupait du mulâtre parce qu'il avait eu lui aussi un enfant de sa mère, un mulâtre nommé Paul Quakuvi. Mais jusqu'alors, les dépenses effectuées pour l'éducation de Josef Comla ne lui sont pas remboursées. C'est pour cela que le gouverneur Zech demande de dresser un bilan mensuel de dépenses, afin de se prononcer sur l'exactitude des dépenses effectuées.

L'assistant des douanes Jacobi avait manifestement pris avec lui - de gré ou de force - Josef Comla et sa mère. De son union avec la mère de Josef Comla est né en Juin 1898 Paul Quakuvi. Jacobi propose d'acheter un terrain au petit Josef Comla et d'y construire une petite maison, afin qu'il puisse y vivre avec sa mère. De l'autre côté, il y a la mission catholique qui réclame le remboursement des frais de pension et de soins du petit Josef Comla. La mère de l'enfant est d'accord pour l'achat d'un terrain. Alors, Jacobi propose l'achat d'un terrain d'une plus grande parcelle avec sa contribution afin que la mère et ses deux enfants puissent y vivre. Le 15 décembre, il est porté à la connaissance du commissaire de police Röhn qu'un terrain approprié serait à vendre. Le 20 juillet 1909 l'agriculteur Boko Agedji a vendu un terrain sis à Lomé, et qui mesure 0,0681 ha pour un montant de 500 Marks qui ont été versés en liquide. Et la signature du contrat de vente a été faite en présence de l'agriculteur Boko Agedji de Lomé, le chef de cercle de Lomé-ville, l'Assesseur de justice Dr. Asmis, tuteur du petit mulâtre Josef Komla. Le 11 septembre 1909, une autre vente de terrain s'est effectuée entre le chef de cercle de Lomé, Monsieur l'Assesseur Dr. Asmis comme tuteur du petit mulâtre Josef Komla et Monsieur l'Assistant des douanes Jakobi comme tuteur du petit mulâtre Paul Quakuvi. Le terrain n'est autre que la moitié du terrain du mulâtre Josef Komla, vendu à 250 marks. Toutefois, l'assistant de douane Jacobi garantit à Josef Komla le libre accès au terrain.

L'assistant de douane Jacobi s'engage à construire sur le terrain de Josef Komla et de Paul Quakuvi une sorte de maison pour jumeaux qui sera séparée par un mûr mitoyen et un puits, qui profiterait équitablement aux deux propriétaires. Il s'engage à débourser 500 M y compris les 250 M de l'achat du terrain de Josef Komla et à faire des dépenses

supplémentaires en dehors des 250 M; seulement si Josef Komla s'engage à son tour à rembourser ces dépenses à sa mère dès qu'il aura atteint l'âge adulte. Ainsi cette dernière aurait le droit de partager cette maison jusqu'au remboursement de cette dette. La somme totale dépensée pour la construction de la maison s'élève à 1567,45Mark et Josef Komla devrait rembourser la moitié de cette somme : 783,70 Mark, moins la somme du terrain 250 M, soit 533,70 Mark.

L'Assistant Jacobi quitta le Togo en 1911 et mourut en 1912 à Leipzig, laissant derrière lui un fils mulâtre Paul Quakuvi à qui il a fait don d'un terrain et d'une maison pour répondre à la coutume en vigueur des Européens de dédommager les enfants issus de leurs rapports extra-conjugaux avec une indigène.

Selon les notes d'archives du commissaire de police Bähr le 14 avril 1913, le fils de Jacobi a été embauché à la direction d'une entreprise à Lomé, et Josef Komla continuerait à fréquenter l'école de la mission catholique, et il n'y aurait plus d'argent auprès du Chef de District pour ces deux enfants.

3.1.2- Extraits de textes: n° 1 : original allemand

Mulatten (Köhler)

S.162 «An das Bezirksamt Lome-Stadt , Lome, den 21.März 1907

Ich habe nun mehr die Erben des verstorbenen Gouverneurs Köhler aufgefordet, die Kosten der Erziehung und des Unterhalts des Mulattenkindes Josef Comla zu übernehmen. Die Aufsicht über das Kind würde dem Bezirksamt Lome-Stadt obliegen. Es dürfte jedoch zweckmässig sein, die Fürsorge dem Zollassistenten Jacobi wie bisher zu überlassen, wenn er dazu bereit ist. Die Auslagen, welche er für das kind fortab zu machen hat, werden ihm vorläufig von dem Fiskus erstattet werden. Zu diesem Zwecke ersuche ich ergebenst, monatlich eine Aufstellung über die Angemessenheit der verauslagten Beträge zu äussern. Der Gouverneur Zech» (Josef Komla Köhler wurde am 17. März 1897 geboren, Mutter Doaha(Johaha) aus Togo.

3.1.2 - Texte n° 2 : original allemand

S.165 Aktennotiz vom 6. Aug.1907: « Das Geld ist noch nicht eingetroffen. Jacobi hat bislang noch keine Liquidation eingereicht und erklärt sich hierzu ausser Stande. Er schlägt vor, dem Jungen von dem Geld der Köhlerschen Erben ein Grundstück zu kaufen, auf dem er mit seiner Mutter wohnen könnte. Die Kath.Mission gibt seit einem Jahr dem Jos. Köhler Wohnung und Essen, sie wird mit ihren Ansprüchen kommen, sobald sie von dem Eintreffen des Geldes Kunde hat. Es dürfte am zweckmässigsten sein, den Jungen als Kostschüler[67] in die Regierungsschule aufzunehmen.»

(Le nom de l'auteur du document n'est pas mentioné).

67 Traduction française: pensionnaire»

NB: S.171: 25. Mai 1908: 500 Mark sind eingetroffen

3.1.3 - Texte n° 3 : original allemand

S.174 «1.Vermerk: Mit Assistant. Jacobi wurde Rücksprache genommen. Der Wunsch der Mutter ist, dass für das Kind ein Grundstück gekauft werde. Jacobi erklärte sich bereit, auch seinerseits zum Kaufgelde etwas zusteuern, damit ein grösseres Grundstück gekauft werden könne, auf welchem die Mutter mit den 2 Kindern wonhnen könne» (Anmerkung von Se: Die Mutter Johaha (Dahaha) hatte dem Jacobi, der offenbar die Frau über nommen hatte, als Köhler zeitweilig nach Kamerun ging, im Juni 1898 gleichfalls einen Sohn geboren.)

2. An Polizeimeister zur gelegentlichen Feststellung eines Grunstücks, welches verkauft und für den gedachten Zweck geeignet ist» Lome 15/12.(08)

Notiz des Polizeimeisters: «Für ein Grundstück stehen von den Erben Köhlers 500 M zur Verfügung. Boko-Agedji will eine diesem Preise entsprechende Teilparzelle von seinem Grundstück Kartenblatt 2, Parzelle 117 verkaufen. Das Grundstück ist für den gedachten Zweck geeignet. Assistent Jacobi müsste dann seinerseits auf diesem Grundstück ein Haus erbauen lassen. 11.5.09. Bärhr»

3.1.4 : Texte n° 4 : original allemand

S.181-183. «Kaiserliches Bezirksgericht Lome, Lome, den 20 Juli 1909.

Es erschienen heute ohne Ladung 1) der Farmer Boko Agedji aus Lome 2) der Bezirksamtmann von Lome-Stadt Gerichtsassessor Hermans als Vormund des Mulattenkindes Josef Komla...» Boko verkauft «das ihm gehörige in Lome gelegene Grundstück Kartenblatt 2/Parzelle 242/117 welches 0,0681 ha gross ist und wie folgt begrenzt wird: im Norden von dem Restgrundstück des Verkäufers, im Süden von den Grundstücken der Amalie Ablewavi und des John K.Anyanyo, im Osten von einem Grundstück des Martin Adzaklo, im Westen von der Sulugastrasse. Der Kaufpreis beträgt 500-Funfhundert- Mark und wird nach Genehmigung des Kaufvertrages baar an denVerkäufer bezahlt werden»

3.1.5 : Texte n° 5 : original allemand

S.185-187 am gleichen Tag Kaufvertrag mit Boko Agedji und Hermans für Amalie Ablewawi(Wirth) Kartenblatt 2/Parzelle239/ 117 0,0284ha im Norden angrenzend an Josef Komla, (Köhler) im Süden von der Dadjestr., im Osten von Grundstück des John K. Anjianyo, im Westen von der Sulugastr. für 300 Mark.

3.1.6 : Texte n° 6 : original allemand

S.189-191 Kaiserliches Bezirksgericht Lome, Lome, den 11. Sept. 1909

Es erschienen ohne Ladung der Bezirksamtmann von Lome, Herr Assessor Dr. Asmis als Vormund des Mulatten indes Josef Komla, 2) Herr Zollamtsassistent Jacobi als Vormund des Mulattenkindes Paul Asmis verkauft Jacobi von Parzelle 242/117 die östliche Hälfte, etwa 340 qm gross im Norden begrenzt von einem Grundstück des Jakob Garber, im Süden von einem Grundstück des Boko Agedji, im Westen von einem Grundstück des

Josef Komla für 250 M. Freier Zugang über das Grundstück von Josef Komla gewährleistet.

3.1.7 : Texte n° 7 : original allemand

S.193 "Lome, den 16. Aug. 1909. Herr Zollassistent Jacobi von hier erklärt: Irgendeine Verpflichtung, für das Mulattenkind Josef Komla zu sorgen, erkenne ich nicht an. Das Kind war vorher geboren, bevor ich ins Schutzgebiet kam. Im Interesse der Mutter des Komla bin ich bereit, die hintere Hälfte des für Komla erworbenen Grundstückes für das von von mir erzeugte Mulattenkind Paul zu kaufen, falls der Zugang zu dieser Hälfte durch eine entsprechende Weggerechtigkeit gesichert und mir gestattet wird, als Entgelt auf dem dem Komla verbleibenden Restgrundstück ein Haus im Werte von mindestens 250 M zu errichten. Komla soll das Eigentum an diesem Haus haben, jedoch soll mein Junge und die Mutter auf mindestens 5 Jahre ein Wohnrecht in dem Haus behalten. "

3.1.8 : Texte n° 8 : original allemand

S.195 Jacobi 9. Okt. 1909 Ich verpflichte mich auf dem Grundstück des Josef Komla und des Paul Quakuvi ein sogenanntes Zwillingshaus in der Weise zu bauen, dass auf jedem Grundstück sich ein Raum mit zugehöriger Veranda befindet und die Wand auf der Grenze steht. Der auf den Gründstücken befindliche Teil des Hauses soll dem jeweiligen Eingentümer des Grundstücks gehören. Für den Hausbau verpflichte ich mich insgesamt mindestens 500M aufzuwenden, wenn die dem Josef Komla für den abgetretenen Grundstückteil auszuzahlenden 250M hierauf in Anrechnung kommen. Ausserdem verpflichte ich mich, auf die Grenze der beiden Grundstücke einen Brunnen zu bauen, der von beiden Grundstücken gleichmässig zu benutzen ist. Zu den Mehrleistungen über den Betrag von 250M hinaus zu Gunsten des Josef Komla verpflichte ich mich aber nur unter der Bedingung, dass Josef Komla verpflichtet wird, den für ihn aufgewandten Mehrbetrag an seine Mutter Tohaha zurückzuzahlen, sobald er erwachsen ist. Bis zur Tilgung dieser Schuld soll die Tohaha für sich berechtigt sein, auch den Komla'schen Raum zu benutzen.« Asmis ist einverstanden damit.

NB: S.218 Bausumme insgesamt 1567,45 für Haus, Hälfte davon 783,70 minus 250M zu Lasten Josef Komla (Köhler) 533,70 Mark.

3.1.9 : Texte n° 9 : original allemand

S.230 Jacobi stirbt 1912 in Leipzig. Er hat hier ein Mulattenkind mit Namen Paul hinterlassen. Er hat diesem Kind ein Grundstück mit Wohnhaus geschenkt und es auf den Namen des Kindes in das Grundbuch eintragen lassen. Das Haus wird von dem Paul und seiner Mutter bewohnt. Die Schenkung entspricht dem hier herrschenden Brauch der Europ., ihre aus dem ausserehelichen Verkehr mit einer Eingeb. hervorgegangenen Kinder abzufinden.«

NB: S.232 Aktennotiz von Polizeimeister Bähr 14.4.13:«Der Junge von Jacobi ist bei der Betriebsleitung eingestellt. Der Junge von Gouv. Köhler besucht noch die Schule der kath. Mission, obgleich er der ältere ist. Geld ist beim Bez.Amt nicht mehr vorhanden für die Kinder.«

3.1.2 - Interview accordée à monsieur Simtaro en 1981 par Josef Comla sur son père et sa mère

Source : Simtaro 1982 :673ff

(traduction)

Entretien avec M. Joseph KOEHLER, 85 ans, fils métis du Premier Gouverneur allemand au Togo, August KOEHLER (1898-1902). Le Gouverneur Koehler mort à Lomé en 1902, repose au cimetière de la capitale togolaise, grand cimetière de la Plage, parmi une quarantaine de ses compatriotes. Interview de son fils Joseph Koehler, exclusivement en allemand, à son domicile de Lomé, le vendredi 27 mars 1981 à partir de 17h30. (Traduction)

Une semaine environ après notre entretien, M. Hans Komla Gruner, fils métis de l'ancien commandant de Cercle de Misahöhe (Kpalimé), le Dr. Hans Gruner, me conduit dans la maison du vieux Joseph Koehler dans l'après-midi du 25 mars 1981, pour me mettre en contact avec le fils de l'ancien gouverneur allemand du Togo que j'ai l'intention d'inter-viewer. Malgré les apprehensions de sa famille à cause de sa santé fragile, on réussit à obtenir un rendez-vous pour le lendemain vers 17 heures. Le 26 mars, des imprévus m'empêchent d'être à l'heure chez les Koehler. Je n'ai pu me présenter qu'à 17 heures 45. Et comme le vieux octogénaire respecte scrupuleusement ses heures de repos et de sommeil (il va au lit tous les soirs à 7 heures!), je m'excuse auprès de son fils Théodore Komla Koehler, inspecteur des P.T.T., et nous nous entendons pour le jour suivant à 17h30 sans faute. Vendredi 27 mars 1981, 17h25, nous voilà dans le salon, les deux Koehler père et fils et moi..., dans un coin, dans son fauteuil, la mère Koehler ne s'occupe pas de nous. Dans son fauteuil en face de moi, le vieux Joseph Koehler tout gris et un peu fatigué, me regarde un peu interrogateur... Son fils m'avait bien dit la veille: "Vous savez papa oublie trop vite les choses. Il se pourrait même qu'il ne se souvienne plus de vous demain...". Alors, je commence sans attendre. En allemand, bien sûr! Je réussis aussitôt à engager le plus vieux des métis germono-togolais (sans doute) dans son récit où il se répète continuellement: C'est l'âge ! Mais n'est-ce pas aussi un moyen de m'enfoncer dans la tête ses vieux souvenirs ?!...

Simtaro : Bonsoir Papa Koehler, comment allez-vous ?

Koehler Ça va un peu bien, merci. Et vous, comment allez-vous ?

S. Bien, merci. Je suis très heureux de faire votre connaissance. Vous êtes M.

Koehler, fils du Gouverneur Koehler ?

Koehler Oui, oui, je suis M. Koehler. Je suis le fils du Gouverneur Koehler. Il est mon

père. Mon prénom est Joseph. Prenez-donc place. Asseyez-vous là... Mais

vous parlez très bien allemand!... Qui êtes-vous, s'il vous plaît?

Simtaro Mon nom est Simtaro. Dadja Simtaro. J'étais venu avant-hier avec M. Hans

Gruner. Hier aussi, j'étais là.

K. Hans Gruner! Ah, oui, oui! Vous étiez venu avant-hier avec M. Hans Gruner.

Oui, oui, je me souviens. Comment va M. Hans Gruner?

S. Il va très bien... Eh bien, Papa Koehler, je suis étudiant. J'étudie en

Allemagne et en France. J'écris un travail sur l'époque coloniale allemande au Togo... On m'a dit que vous êtes un fils du Gouverneur allemand Koehler. Je voudrais avoir avec vous un petit entretien sur vos souvenirs des Allemands...

K. Hi, hi, hi!... Mes souvenirs ?!

S. Oui, oui ! Comment vous vous souvenez des Allemands de ce temps là? De

votre père par exemple?...

K. Eh oui, les souvenirs de mon père!... Mon père lui-même est mort très tôt.

Très, très, très tôt. Je n'étais pas du tout grand avant qu'il meure. J'avais à peine dix ans. Pour ainsi dire, je ne l'ai pas connu. Je dois dire que je ne l'ai jamais approché. A l'époque mon père voyageait en Allemagne, revenait, puis allait de nouveau en Allemagne et revenait de nouveau... Non, non, je ne connais pas très bien mon père. Je ne le connais pas pour ainsi dire. Peut-être aussi ma mère et la soeur de ma mère ne voulaient point que je m'approche de lui. Pourquoi? Je ne sais pas... Mais c'est très dommage qu'il soit mort trop tôt. Si mon père n'était pas mort trop tôt, je l'aurais sûrement très bien connu. Je l'aurais bien connu. Oui, lui parler... Ainsi, je pourrai aujourd'hui vous raconter beaucoup de chose sur mon père. Malheureusement il est mort très tôt!... Les Allemands aiment beaucoup les femmes, ça peut paraître comme une plaisanterie, mais c'est vrai. Ils aiment beaucoup les femmes togolaises, car beaucoup d'Allemands ont épousé des femmes togolaises. C'est ainsi que ma mère a épousé mon père et m'a mis au monde. Depuis qu'elle m'a mis au monde, je n'ai jamais approché mon père. Je ne me suis jamais approché de lui. Non. Ainsi, je ne connais pas bien mon père. Mon père est mort très tôt. C'est en 1902 que mon père est mort. Ma mère est originaire de Togoville. Son nom indigène,

c'est-à-dire son nom togolais est Duaha, ce qui signifie à côté de la ville (du village, du pays). Elle a été baptisée et s'appelle Hanna. Mais elle ne vit plus. Elle est morte en 1919 et enterrée ici à Lomé. Moi-même, je suis né en 1896. Je suis donc né en 96. Mon père est mort ici en 1902 et enterré ici à Lomé. Sa tombe se dresse au cimetière allemand. Quand il était gouverneur, il a sorti une loi, selon laquelle les Allemands qui mourraient ici au Togo devaient être enterrés ici. Sinon, il aurait été transporté en Allemagne et inhumé là-bas. C'est lui-même qui a sorti cette loi. C'est pourquoi il a été aussi enterré ici à Lomé. Si vous allez au cimetière, vous verrez tant et tant de tombes allemandes. Beaucoup d'Allemands y sont enterrés.

Vous savez, ma mère a épousé aussi un autre Allemand, un douanier. Son nom est JACOBI. Otto JACOBI, mais il est mort en Allemagne et enterré là-bas. Jacobi a eu avec ma mère un fils: Paul Jacobi. Il est mon frère. Nous sommes nés de la même mère, mais nous avons des pères différents. Mon frère Paul Jacobi est malheureusement mort aussi. S'il n'était pas mort, vous auriez fait sa connaissance, et parlé allemand avec lui... Malheureusement, il est mort en 1958...Vous savez, le douanier Otto Jacobi, père de mon frère Paul, a pris soin de nous et nous a éduqués comme ses fils. C'est lui qui nous a envoyés à l'école, à l'école de la Mission catholique. Nous avons commencé l'école en 1906. Nous habitions la Mission, chez les Pères. Nous avons tout obtenu des Pères: la nourriture, les cahiers et livres d'écoles, les habits, etc... Le repas était préparé par les Soeurs. Nous servions les Pères à table. Nous mettions la table: assiettes, fourchettes, cuillères, couteaux, verres, etc... Après le repas, nous débarrassions la table. Nous faisons la vaisselle et nettoyions tout...

Nous étions à l'époque dans la chorale de la mission. Nous avons très bien chanté à l'église. A l'école, nous étions beaucoup de garçons. Nous apprenions, à côté de la langue Ewé, l'allemand, la réligion, l'écriture, la lecture, le calcul, l'histoire, la géographie, ect... Nous sommes sortis de l'école en 1914. J'ai obtenu mon certificat d'études. Il doit se trouver quelque part dans ma valise ou dans mes affaires. Je ne sais plus où. S'il faut que je le cherche maintenant, je vais me casser la tête... L'école était dure, mais nous avions bien appris et bien travaillé. A l'époque, nous aimions beaucoup

chanter les chansons allemandes, par exemple: l'hymne national allemand :
"Deutschland, Deutschland, über alles" (l'Allemagne par-dessus tout), "Ich
hatte einen Kameraden" (j'avais un camarade), etc... Maintenant, je ne peux
plus chanter. Je suis vieux et un peu malade. J'ai oublié aussi beaucoup de
chansons. Autrefois j'aimais beaucoup chanter. Surtout au moment des fêtes.
Quand les Allemands fêtaient le "Kaisertag", l'anniversaire de l'empereur,
nous les élèves, nous allions sur la place des festivités et nous chantions. Puis
les soldats faisaient leur parade. Tout cela était très beau! Je m'en souviens
encore. C'était une belle époque. Je n'oublierai jamais ce temps-là... Un jour,
un ministre allemand est venu en visite à Lomé. Le Secrétaire d'Etat aux
Colonies, M. le Dr. Solf. C'était en 1913. Il y eu aussi une très grande fête,
avec des danses et des parades de troupes !... Le Dr. Solf avait aussi visité
notre école. J'étais aussi présent. Je l'ai vu. Nous avions très bien chanté. Il
était content et nous étions heureux. C'était une très belle époque, vous
savez! Oui, oui, une très belle époque. Je me souviens de tout cela... Après la
période scolaire nous avons travaillé au chemin de fer. Avec les Allemands,
puis les Anglais et puis les Français. Nous ne gagnions pas beaucoup. Nous
n'étions que des ouvriers auprès des Européens... J'ai travaillé pendant deux
ans et demi à NUATJA, cinq ans à Agbeluhoe et puis tout le reste du temps
ici à Lomé. Après la guerre de 1914, les Allemands étaient obligés de s'en
aller. Ils avaient perdu la guerre contre les Français et les Anglais. C'étaient
mauvais pour nous Togolais. Les Togolais aimaient beaucoup les Allemands.
Nous avons obtenu des autorités allemandes, mon frère Paul Jacobi et
moi, ce terrain où nous avons construit notre maison. Nous avons reçu des
dons en espèces comme aide pour l'achat de ce terrain et la construiction de
notre maison. Mais mon frère est mort. Ma mère aussi ne vit plus. Elle est
morte en 1919. Je vous l'ai déjà dit. Voyez vous les Allemands sont partis,
mais ils ont laissé un très bon souvenir chez nous ici. Ils ont construit des
chemins de fer et beaucoup d'édifices. Nous utilisons encore aujourd'hui ces
chemins de fer et ces bâtiments. Ici à Lomé, nous avons le gigantesque Palais
du Gouvernement au bord de la mer. La mission a beaucoup fait pour l'école
et l'église au Togo. Près du marché se dresse la grande cathédrale. Ce sont les
Allemands qui ont fait tout ça... Sur mon père même, je ne sais pratiquement

rien. Il est mort trop tôt. Je n'ai obtenu que sa photo en souvenir. Le gouvernement allemand de l'époque nous a aidé, mon frère Paul Jacobi et moi, à obtenir ce terrain et à nous bâtir une maison... Voilà Bernard qui passe, un fils à mon frère Paul Jacobi. Et à côté de vous c'est mon fils Théodore ; il travaille à la poste. Là, c'est ma femme...

Eh bien, mon ami, je vous ai tout dit. Je vous ai raconté tout ce que je sais... Vous savez, j'ai toujours gardé un très bon souvenir des Allemands. Je ne peux jamais les oublier. Seulement mon père est mort trop tôt. J'étais encore un tout petit enfant. Il faut que je vous dise la vérité, je ne l'ai pas connu. J'ai bien appris la langue allemande à l'école. J'avais beaucoup de livres allemands. J'avais aussi de bons amis allemands. Nous nous écrivions régulièrement. Aujourd'hui, mes correspondants ne m'écrivent plus. Oh, j'aime lire et écrire l'allemand. J'écris beaucoup mieux l'allemand que je ne le parle. Je n'ai jamais été en Allemagne. A présent, je suis vieux et ne peux plus travailler. Je vous remercie beaucoup de votre visite. Je suis très heureux de parler allemand avec quelqu'un.

Simtaro C'est moi qui vous remercie, Papa Koehler. Vous m'avez raconté de très bons

et interessants souvenirs de votre jeunesse. Votre excellent allemand m'a beaucoup émerveillé. Je vous remercie beaucoup.

Koehler Oh, s'il vous plait il n'y a pas de quoi... Je me réjouis beaucoup de votre

visite! ... Qu'est-ce que vous aller faire plus tard ? Vous allez travailler en Allemagne ?

S. Je dois maintenant terminer mes études. Puis je regagnerai le pays natal pour

enseigner, comme professeur d'allemand.

K. Professeur d'allemand! Ah, vous enseignerez donc l'allemand ?... C'est très

bien? Je vous souhaite beaucoup de succès!... Vous savez, à l'époque allemande nous n'apprenions que l'allemand à l'école, et nous avons toujours bien parlé cette langue. De nos jours, on enseigne à l'école beaucoup de langues à la fois: allemand, anglais, français, etc... Les enfants ne peuvent pas bien assimiler toutes ces langues. C'est difficile! Les enfants n'arrivent même pas à bien parler une seule de ces langues. Cette méthode, je la trouve mauvaise. Qu'en pensez-vous?

Simtaro Vous avez raison, Papa Koehler. Trop de choses à la fois, c'est mauvais.

Koehler Vous voyez, on confond tout... On dit chez nous: "Trop de sel gâte la

sauce!"... Pas vrai ?... Hi, hi, hi!...

S. Oui, oui, vous avez bien raison.

K. Je me réjouis de votre visite. Mais vous parlez parfaitement l'allemand!...

Passez donc quand vous avez le temps. Nous parlerons l'allemand. Cela me réjouit beaucoup. Je vous dis maintenant adieu, bon voyage et beaucoup de succès!

S. Merci bien, Papa Koehler. Je reviendrai vous voir dès mon retour d'Europe,

soyez-en sûr.

K. Oui, oui, si je suis encore en vie... Tout dépend de Dieu, mon fils. Au revoir,

mon bon ami.

S. Au revoir, Papa Koehler. Bonne nuit!

Illustration n° 13 : carte postale coloniale commémorative à l'effigie de August Köhler, père de Josef Comla.
(Source :
http://www.deutsche-schutzgebiete.de/togoland.htm 18.10.2011

3.2 - Document n° 15 Les enfants métis du Dr. Krüger au Togo Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA3/185 3.2.1 : Texte original allemand

Dr. med. Ernst Krüger, geb. 13. April 1870, Medezinalrat, 1901-1914 Regierungsarzt in Togo hatte folgende Kinder in Togo:

1. Klara Akoavi (Gobi) geb. (3.4.) 1907, Mutter Kokovi I aus Anecho (auch Kokoviga)

2. Magaretha Ablavi (Marguerite), geb. 25. Juni 1909 (25.5.1908), Mutter Kokovi II aus Anecho.

3. Ernst Oskar (Kodjo), geb. 25.Okt. 1909, Mutter Kokovi I (Kokoviga) aus Anecho.

4. Julia Afiavi, geb. 8.1.1912, Mutter Kokovi I (Kokoviga).

5. Quassi geb. 20.10.1912 Mutter Kokovi (Kind gest.?).

S. 303 "Sir, on the 16/6/1911 Dr. Krüger was appointed as guide to the children of Kokovi I and Kokovi II (Mulatto- children) - children born by himself - which appointment he accepted and promised faithfully care for the children. He intended to establish a coconut plantation on the lands to be acquired at Bagida for the children.

2) Vide Akten K 5, Band II, Lome-Stadt, page 1- 4. (heute FA 3/185, S. 2-7 se)

3) Mr.(Emmanuel) Ajavon bought the land for 1300 M. from the chief of Bagidah & sold it to Dr. Krüger as guidance to the children above mentioned - vide A 20 Lome-Land

4) Dr. was only acting for his children. Act 14/XI/19"

S.5-6 "Kaiserliche Bezirksamt Lome (Stadt), Lome, den 16.Juni 1911

Es erscheint, persönlich bekannt, der Regierungsarzt Dr.Krüger von hier. Es wurde ihm eröffnet, dass er zum Vormund für die von den Eingeborenen Kokovi I und Kokovi II geborenen Mulattenkinder, die von ihm selbst erzeugt sind, wie er hiermit anerkennt, nämlich

1. Cara Akoavi, 2. Ernst Oskar Kuadjo (Mutter: Kokovi I), 3.Magarete Ablavi (Mutter: Kokovi II) bestellt werde. Er versprach, treu und gewissenhaft für die Kinder zu sorgen. Er beabsichtigt, auf den für die Kinder zu erwerbenden Grundstücken in Bagida eine Kokosplantage68 anzulesen. v(orgelesen), g(enehmigt), u(nterschrieben) Dr.Krueger, Regierungsarzt. geschlossen Ledon".

3.2.2 : Traduction intégrale du texte en français Dr. Ernst Krüger, né le 13 avril 1870, conseiller médical, médecin du gouvernement colonial au Togo de 1901 à1914, a eu les enfants métis suivants avec des Togolaises :

1. Klara Akoavi (Gobi) née le 03 avril 1907, mère : Kokovi I d'Aného (encore appelée

Kokoviga)

68 Au sujet de la plantation de Dr. Krüger cf. Sebald 1988: 656

2.

Margaretha Ablavi (Marguérite), née le 25 juin 1909, mère : Kokovi II d'Aného.

3. Ernst Oskar (Kodjo), né le 25 octobre 1909, mère : Kokovi I d'Aného.

4. Julia Afiavi née le 8 janvier 1912, mère : Kokovi I

5. Quassi né le 20 octobre 1912, mère : Kokovi d'Aného (enfant décédé ?).

[Reconnaissance de paternité et procès verbal officiel]

p. 303 : Monsieur, le 16 juin 1911, le Dr. Krüger a été désigné comme tuteur des enfants de Kokovi I et de Kokovi II (enfants mulâtres), nés de lui-même, ce qu'il a accepté en promettant de prendre fidèlement soin des enfants. Il a exprimé son intention de créer une plantation de cocotiers sur un terrain à acquérir à Baguida pour ses enfants. M. (Emmanuel) Adjavon a acheté un terrain à 1300 M. auprès du chef de Baguida et l'a vendu au Dr. Krüger, tuteur des enfants ci-dessus mentionnés.

P. 5- 6 « Administration de la circonscription de Lomé-Ville, le 16 juin 1911.

Le Dr. Krüger, médecin du gouverement colonial, s'est présenté personnellement ici ce jour. Il lui a été [officiellement] signifié qu'il est le tuteur des enfants mulâtres nés des indigènes Kokovi I et Kokovi II, engendrés par lui-même, ce qu'il a accepté et reconnu, notamment pour les enfants suivants:

1) Clara Akoavi, 2) Ernst Oskar Kuadjo (Mère : Kokovi I)

3) Magarete Ablavi (Mère: Kokovi II)

Il a promis de s'occuper fidèlement et consciencieusement de ces enfants.

Il envisage de créer sur un terrain à acquérir à Baguida une plantation de cocotiers pour les enfants.

Lu et approuvé, signé Dr. Krüger Médecin d'Etat

Commentaire succinct

Nous avons ici un cas où le père allemand reconnaît officiellement ses enfants métis et promet par écrit de s'occuper d'eux. Au moment où fut signé cet acte officiel de reconnaissance de paternité en juin 1911, le Dr. Ernst Krüger avait eu 3 enfants de deux femmes indigènes de la ville d'Aného. Plus tard, il a eu encore deux enfants, précisément en 1912 [1.Julia Afiavi née le 8 janvier 1912, mère : Kokovi I, 2.Quassi né le 20 octobre 1912, mère : Kokovi d'Aného (enfant décédé ?)].

La reconnaissance de paternité et de responsabilité signée par le Dr. Krüger au profit de ses enfants métis est conforme aux dispositions jusque-là adoptées par l'administration coloniale allemande pour responsabiliser les administrateurs et les commerçants allemands du Togo. En ce sens, le Dr. Krüger est un père allemand digne d'être cité en exemple. Par son geste, il aurait pu sans doute aussi accorder officiellement son nom allemand à tous ses descendants métis, si l'ordonnance du 18 octobre 1913 signée par le gouverneur n'était pas venue ôter aux métis le droit de porter des noms allemands.

3.3 : Document n° 16 : Correspondance relative à la réclamation de pension alimentaire de la nommée Afassi pour sa fille métisse née de l'administrateur allemand [Wernher ?] Rotberg

Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA3/185, pp. 274-276

3.3.1- Résumé du document en français

Werner Freiherr von Rotberg, né vers 1870, fut assesseur stagiaire et chef du district de Lomé au Togo de 1902 à 1903. Pour des raisons politiques liées à « l'affaire d'Atakpamé » (cf. Adja 2006), il fut expulsé du Togo et devint chef de Mannheim en 1907. Le 15 septembre 1913, l'indigène Afassi, originaire de Kéta, s'est présentée au poste administratif de Lomé-ville déclarant, von Rotberg comme père illégitime de sa fille Adjovi Christine. Elle affirme avoir dépensé la somme de 370 marks reçue de von Rotberg en 1905. Alors, elle prie le chef de district de bien vouloir rechercher von Rotberg, afin qu'il paye les frais de soins de sa fille qui va à l'école de la mission de l'Allemagne du Nord.

Répondant à la note qui lui fut adressée, von Rotberg verse une somme de 100 marks pour le compte de la nommée Afassi, et prie le chef de district d'utiliser cette somme par tranches, à raison de 5 marks par mois à partir du 1er janvier 1914, puisqu'il a versé la somme le 7 décembre 1913. Toutefois, von Rotberg précise que cet acte ne signifie nullement une reconnaissance de paternité au profit de la fille Adjovi Christine.

3.3.2 : Texte original allemand

»Kaiserliches Bezirksamt Lome-Stadt, Lome, den 15. Sept. 1913

Es erscheint die Eingeb. Afassi aus Kita gebürtig, in Lome, Sangerastr. wohnhaft und erklärt : Ich habe seinerzeit (1905) für mein aus dem geschlechtlichen Verkehr mit dem Bez.-Amtmann von Rotberg hervorgegangenes Kind Adjoavi Christine von dem unehelichen Vater den Betrag von 370 M. bekommen. Diese Summe ist seit langem aufgebraucht. Das Mädchen ist ordentlich, es besucht jetzt die Schule der Norddeutschen Mission. Da es mir sehr schwerfällt, mein Kind zu unterhalten, so bitte ich das Bez.-Amt, den Bez.-Amtmann von Rotberg zu ersuchen, weitere Unterhaltsgelder für das Mädchen zu zahlen.

Handweichen xxx der Afassi W.S.Mensah als Dolmetscher; geschlossen Paulick»

»Herrn Bezirksamtmann Freiherrn von Rotberg, Hochwohlgeboren, Wittstock in Baden Euer Hochwohlgeboren übersende ich in der Anlage Abschrift eines mit der Eingeborenen Afassi aufgenommenen Protokolls zur gefälligen Kenntnisnahme. Ich bemerke ergebenst, dass Mutter und Kind sich wohl befinden gez. Körmigk Lome, den 25. Sept. 1913»

»An das Kaiserliche Bezirksamt Lome-Stadt Adelsheim, Baden, 7. XII. 1913

Heute habe ich die Süddeutsche Discontogesellschaft in Freiburg i./B. beauftragt, wohl demselben den Betrag von einhundert Mark auszuzahlen. Ich bitte das Kaiserliche Bezirksamt, diesen Betrag sparsam, am besten wohl in kleinen Beiträgen, für Afassi zu verwenden und sie freundlich von mir zu grüssen. Die Abstammung der kleinen Adjoavi Christine, von mir soll indessen damit nicht anerkannt sein.

Für die gefällige Vermittlung sage ich dem Kaiserlichen Bezirksamt meinen besten Dank. Ergebenst Freiherr W. von Rotberg. Kammerherr und Oberamtmann»

Vermerk auf dem Schreiben Rotbergs »Vom 1.I.ab monatlich 5 M. auszahlen» »100 M auf Sparbuch angelegt. Paulick 3.1.14»

Zur Person aus Kartei Sebald

Werner Freiherr von Rotberg geb. ca 1870, Referendar, Assessor, Bezirksamtmann von Lome in Togo 1902-Okt. 1903. Aus pol. Gründen aus Togo abgeschoben (siehe L. Külz, S.86), 1907 grossherzoglicher Amtmann in Mannheim

3.3.3 : Traduction intégrale du texte en français :

«Poste administratif de Lomé-Ville, Lomé, le 15 septembre 1913.

S'est présentée ici ce jour l'indigène Afassi, originaire de Kita [Kéta] et domiciliée à Lomé, rue Sangera, qui explique: J'ai reçu à l'époque (1905) du chef de district von Rotberg, père illégitime de ma fille Adjoavi Christine, une somme de 370 marks. Cette somme est épuisée il y a longtemps. La fille est bien entretenue et va actuellement à l'école de la

mission de l'Allemagne du Nord. Puisque j'ai du mal à subvenir aux besoins de ma fille, alors je prie le Chef de district de bien vouloir rechercher le chef de district von Rotberg, afin qu'il paie les frais de pension pour la fille.

Emargement de Afassi (xxx), interprète : W. S. Mensah, dossier traité par Paulick«.

À son Excellence Monsieur le Chef de District Freiherr von Rotberg, Wittstock à Baden Excellence,

je vous envoie en annexe le duplicata d'un procès verbal adopté avec l'indigène Afassi pour une reconnaissance à l'amiable. Je peux vous assurer que la mère et la fille se portent bien.

Signé K (örmigk), Lomé, le 25 septembre 1913»

«Au District de Lomé-Ville Adelsheim, Baden, le 7 décembre 1913

J'ai donné l'ordre ce jour, à la société-discount du Sud de l'Allemagne à Freiburg de verser de ma part une somme de cent marks. Je prie le Chef de District de dépenser cette somme avec parcimonie, en l'utilisant par tranches, pour les besoins de Afassi, et de me la saluer cordialement. Cependant, ceci ne signifie pas que je reconnaîs la petite Adjoavi Christine comme ma fille.

J'exprime au Chef de District mes sincères remerciements pour l'amicale médiation. Votre dévoué, Freiherr W. von Rotberg, Chambellan et Chef de service.«

Note additive sur la lettre de Rotberg: À partir du 1er janvier, payer 5 marks par mois« [NB :] Les 100 Mark sont placés sur un compte. P (aulick), le 3. 1. 14.

Sur la personne de Rotberg, selon le fichier de Sebald

Né vers 1870, Wernher Freiherr von Rotberg fut stagiaire, assesseur et chef du District de Lomé au Togo de 1902 à octobre 1903. Expulsé du Togo pour des raisons politiques (voir L. Külz, p. 86), il devint Chef ducal supérieur de Mannheim en 1907.

Commentaire succinct

Contrairement au document précédent (n° 15), nous avons ici un cas où le père allemand, parti sans laisser d'adresse, finit par être retrouvé. Il ne reconnaît pas son enfant métis. Et pourtant, il accepte de verser la pension alimentaire et les frais d'éducation de l'enfant !

3.4 - Document n° 17 : Le cas de Kuaovi Fritz Durchbach Source originale : Archives Nationales du Togo (ANT)-FA3/185, pp. 282-297 3.4.1- Résumé du document en français Selon l'extrait d'un rapport du commandant de cercle Clausnitzer du 16 décembre 1913, les intentions des enfants indigènes hors-mariage sont pour la plus part du temps inconnues. Le mulâtre Fritz Durchbach a demandé le 23 décembre 1913 l'autorisation de continuer de porter le nom de son père dans l'avenir. Ceci étant devenu impossible depuis la promulgation de l'ordonnance du 18 octobre 1913, il lui est demandé de porter le nom de famille de sa mère née Garber. Il refuse cette proposition en affirmant qu'il est du sang Durchbach et non Garber. Son combat pour imposer cette vision des choses devient pour l'administration un cas d'école qui a déjà fait l'objet d'un article prédemment cité (Coulibaley-Béré & Oloukpona-Yinnon 2007). Les documents présentés ici sont ceux qui ont été à la base de cet article.

3.4.2 : Texte original allemand

S. 266: Auszug aus einer Niederschrift von Bezirksamtmann Clausnitzer von 16.12.1913: »Hinzukommt, dass die Auffassung des Eingeborenen uneheliche Kinder nicht kennt, vielmehr in der Regel alle Kinder zur Familie des Vaters gehörig rechnet. Der Mulatte Fritz Durchbach, der kürzlich um die Genehmigung, den genannten Namen auch in Zukunft führen zu dürfen, eingekommen ist, hat mir auf den Vorschlag, er möge den Namen seiner Mutter (Garber) annehmen, erwidert, das könne er nicht, denn er habe `Durchbach- und nicht Garber- Blut'.»

S. 282: »Verfügung» Aktenvermerk: »die Sache Seiner Hoheit [Herzog zu Mecklenburg] zur Entscheidung vorgelegt» Rücksprache mit ihm am 23.12.

»Verfügung, Lome, den 24. Dez. 1913.

Das Gesuch des Mulatten Fritz Durchbach in Lome um Erteilung der Genehmigung zur Beibehaltung des deutschen Familiennamens "Durchbach" wird aus grundsätzlichen Erwägungen abgelehnt. Abgesehen davon, dass es zweifelhaft erscheint, ob der Kaufmann Durchbach der Erzeuger des Antragstellers und dieser auf den Namen Durchbach getauft worden ist, so sind auch bei Zutreffen dieser beiden Angaben weder diese noch die sonst vorgebrachten Gründe stichhaltig genug, um die Erteilung der Genehmigung zu rechtfertigen. Dem Antragsteller wird anheimgegeben, bei Umschreibung seines auf den Namen "Durchbach" eingetragenen Grundstückes zu beantragen, dass die durch die Umschreibung entstehenden Kosten niedergeschlagen werden.

Der Antragsteller hat binnen Monatsfrist anzuzeigen, welchen Familiennamen er in
Zukunft führen will. Es würde genügen, wenn in dem Namen "Durchbach" die beiden

[Buchstaben] ch gestrichen würden. Mit dem Ersuchen, den Antragsteller in vorstehender Entscheidung zu bescheiden.

Der Kaiserliche Gouverneur im Auftrag von Doering».

Vermerk» Antragsteller ist beschieden 1/1. 14 Paulick»

S. 284: »Durchbach heisst Fritz Kuavowi. Er weigert sich einen anderen Namen anzunehmen und will das Schutzgebiet verlassen. Fette, (Lome) 5/II»

S. 285-287: »An das Kaiserliche Gouvernement hier. Lome, den 6. Febr. 14

Auf den Erlass vom 24 Dezember vorigen Jahres.

Durchbach weigert sich, einen anderen Namen anzunehmen. Er will seine Stellung bei Bödecker & Meyer aufgeben und auswandern, wenn ihm die Erlaubnis zur Weiterführung des Namens Durchbach, auf den er ein Recht zu haben vermeint, nicht erteilt wird. Jeden Änderungen gegenüber ist er unzugänglich.

Der Hauptagent der Firma Bödecker & Meyer,Kaufmann Fette ist vor seiner Heimreise nach Deutschland wegen der Angelegenheit hier vorstellig geworden und hat erklärt, dass die Firma grossen Wert darauf lege, Durchbach zu halten. Ich habe Fette mitgeteilt, dass das Kaiserliche Gouvernement unter den vorliegenden besonderen Umständen Durchbach vielleicht ausnahmsweise die Fortführung des Namens gestatten werde, wenn festgestellt würde, dass lebende Angehörige des verstorbenen Kaufmanns Durchbach nicht mehr vorhanden sind oder deren Zustimmung beigebracht würde. Fette will dieserhalb Erkundigungen in Deutschland einziehen und das Ergebnis mitteilen. Ich stele gehorsamst anheim, bis zum Eingang dieser Mitteilung die Entscheidung in der Sache auszusetzen und Durchbach vorläufig die Fortführung des Namens zu gestatten.

Clausnitzer 5/II (1914)»

Vermerk: » Ich bin mit diesem Vorschlag einverstanden. Wiedervorlage nach Eingang einer Mitteilung des Herrn Fette. Der Gouverneur Herzog zu Mecklenburg 7/2.»

S. 291: »Bödecker & Meyer Hamburg den 9. März 1914

An das Kaiserliche Bezirksamt Lome-Stadt, Lome

Ich konnte feststellen, dass der Kaufmann Durchbach vor vielen Jahren in Altona gestorben ist. Ferner habe ich festgestellt, dass laut Adressbuch weder im Hamburger noch im Altonaer Bezirk der Name Durchbach existiert. Ich werde versuchen, eine diesbezügliche Bescheinigung von der Altonaer Polizeibehörde zu erhalten, um die dem Kaiserlichen Bezirksamt Lome-Stadt mit der nächsten Post einzusenden. Hochachtungsvoll P. Fette. »

S. 293 Hamburg, den 24. April muss ich » zu meinem Bedauern mitteilen, dass es mir nicht gelungen ist, eine Bescheinigung von der hiesigen Polizeibehörde zu erlangen, woraus hervorgeht, dass sich im Hamburger/Altonaer Polizeigebiet keine Personen mit dem Namen Durchbach aufhalten. Hochachtungsvoll P. Fette. »

»Laden Durchbach auf 15/5. Durchbach wurde beschieden, dass er den Namen »Durchbach» nicht weiter führen dürfe und ihm nochmals anheimgegeben, den Namen Durbach anzunehmen» Clausnitzer.

S. 294, Lome, den 19. Mai 1914 Kaiserliches Bezirksamt Lome-Stadt

»Es erscheint der Mulatte Fritz Durchbach und erklärt: Ich werde in Zukunft den Familiennamen »Durbach» führen. Fritz Durbach, Adolph d'Almeida als Dolmetscher, geschlossen Clausnitzer.»

S.297 »An die Firma Bödecker & Meyer hier. Lome den 9. 6. 14

Dem dortigen Angestellten Fritz Durchbach ist durch Verfügung des Gouvernements vom 26. vorigen Monats die Weiterführung des deutschen Familiennamens Durchbach verboten und vom Bez.amt entsprechende Eröffnung gemacht worden unter dem Hinweis, dass er im Zuwiderhandlungsfalle Bestrafung zu gegenwärtigen habe. Er ist besonders darauf aufmerksam ge macht worden, dass er sich des Namens »Durchbach» auch in der Firma nicht mehr bedienen dürfe. Durchbach hat die Erklärung abgegeben, dass er künftig den Namen Kuaovi führen werde. Clausnitzer»

(eine solche Erklärung ist nicht in den Akten)

S. 302: »I find that this Mulatto still using the forbidden name of »Durchbach» contrary to the order of the late German Governor dated 24th December 1913 (see page 170) and the order of 15th May 1914 (see page176) and the consent signed by himself on the 19th May 1914 (page177). He is informed that the order of the late German Governer is still in force and must be obeyed & is warned not to use the name Durchbach again. See page 410 of criminal record book of this date. A.R. Holliday. District Political Officer 27th April 1918.»

Nach meiner Personenkartei war Durchbach (wahrscheinlich Friedrich) Hauptagent der Firma Max Grumbach in Klein Popo (Anecho) 1885-1888; hat mithin dort eine Frau aus der Garber Familie gehabt, und sein Mulattensohn Fritz ist in dieser Zeit geboren.

3.4.3- Traduction intégrale du texte en français

P. 266 : Extrait d'un rapport du chef de district Clausnitzer en date du 16. 12. 1913

« [...] Par ailleurs, dans la conception des indigènes, on ne connaît pas la notion « d'enfants hors-mariage », bien au contraire, la plupart du temps tous les enfants d'un même père sont considérés comme étant de la même famille, celle du père. Le mulâtre Fritz Durchbach a demandé récemment l'autorisation de continuer à porter le nom de son père dans l'avenir ; à la proposition selon laquelle il devrait prendre le nom de sa mère (Garber), il a répliqué en disant qu'il a le sang Durchubach et non Garber.

P. 282 : Disposition prise et mentionnée sur le dossier : l'affaire est soumise à Son Excellence [le duc de Mecklenburg] pour décision à prendre. Entretien avec lui sur la question le le 23. 12.

`'Décision prise, Lomé 24 Dec. 1913

La requête du mulâtre Fritz Durchbach, résidant à Lomé, au sujet de l'autorisation de garder le nom de famille allemand « Durchbach » a été rejetée pour des raisons de principe. Mis à part le fait qu'il paraît douteux que le commerçant Durchbach soit le géniteur du requérant et que ce dernier ait été effectivement baptisé sur le nom de Durchbach, et même si ces deux indications sont exactes, elles et toutes les autres

argumentations présentées ne sont pas suffisamment probantes pour justifier l'attribution d'une telle autorisation. Le requérant est invité, lors du changement de nom sur les papiers de son terrain immatriculé sous Durchbach, à solliciter que les frais entraînés par le changement de nom soient réduits. Le requérant a un délai d'un mois pour indiquer quel nom de famille il voudrait porter désormais. Il suffirait que l'on supprime les deux [lettres] ch dans le nom « Durchbach ».

Je vous prie de veiller à ce que le requérant soit informé de cette décision.

pour le gouverneur et p.o. signé von Doering

P. 284 : `' Durchbach s'appelle Fritz Kuavowi. Il refuse de porter tout autre nom et désire quitter la colonie» Fette, Lomé 5/II (5 février 1914)

P. 285-287. Au gouvernement impérial d'ici. Lomé, le 06 février 1914 suite à l'arrêté du 24 décembre passé.

Durchbach refuse de porter tout autre nom. Il veut abandonner son poste chez Bödecker & Meyer et émigrer, si l'on ne lui permet pas de continuer de porter le nom `' Durchbach» auquel il pense - à tort - avoir droit. Pour tout changement à ce propos, il reste inflexible. Avant son voyage sur l'Allemagne, le responsable de la firme Bödecker & Meyer, le commerçant Fette, s'est adressé à moi à ce sujet et à déclaré qu'il était d'une grande importance pour la firme de garder Durchbach. J'ai informé Fette, que le gouvernement impérial pourrait peut-être permettre à Durchbach, à titre exceptionnel, de continuer de porter le nom, à la condition particulière, qu'il soit prouvé qu'aucun membre du feu commerçant Durchbach ne soit plus vivant, ou le cas échéant, que tout descendant de Durchbach encore vivant donne son accord. Fette veut pour cela recueillir des informations en Allemagne et faire part de ses résultats.

Je propose très respectueusement qu'en attendant d'avoir ces résultats, la décision dans l'affaire soit suspendue et que le requérant continue provisoirement de porter le nom.

Clausnitzer 5/II (1914)

Note : J'accepte cette proposition. Une nouvelle présentation sera faite à l'arrivée de M. Fette. Le gouverneur Duc de Mecklenburg.

P.291 : `'Bödecker & Meyer. Hamburg, le 9 mars 1914

Au Chef de district de Lomé,

J'ai pu constater que le commerçant Durchbach est décédé il y a plusieurs années à Altona. En outre j'ai remarqué que le nom Durchbach n'existe dans aucun registre que ce soit, ni à Hambourg, ni à Altona.

J'essayerai d'obtenir une attestation à cet effet de la police d'Altona, afin de l'envoyer par le prochain courrier au Chef de District de Lomé.

Avec mes salutations distinguées, P. Fette

P. 293 Hambourg, le 24 avril. Je suis aux regrets de vous annoncer que je n'ai pas réussi à obtenir une attestation de la part de la police d'ici, d'où il en ressort que la police de Hambourg et celle d'Altona ne connaissent personne du nom de Durchbach.

Avec mes salutations distinguées, P. Fette.

Durchbach est informé qu'il ne doit plus continuer à porter le nom Durchbach et qu'il est libre d'accepter le nom Durbach.

Clausnitzer.

P. 294 : Lomé, le 19 mai 1914. Le chef de District, Lomé.

Le mulâtre Fritz Durchbach comparut et déclara, je porterai à l'avenir le nom de famille `'Durbach».

Fritz Durbach.

Interprète. Adolph d'Almeida.

Dossier clos

Signé Clausnitzer.

P. 297 À la firme Bödecker & Meyer d'ici. Lomé, le 9 juin 1914.

Il est interdit à l'employé Fritz Durchbach, sur ordre du gouvernement, depuis le 26 du
mois dernier, de continuer de porter le nom de famille Durchbach, et conformément à la
déclaration du Chef de district, il est averti qu'en cas de désobéissance il sera puni. Il

devrait particulièrement faire attention pour que le nom `'Durchbach» ne lui serve plus aussi dans la firme. Durchbach a fait la déclaration de porter le nom Kuaovi à l'avenir.*

Clausnitzer.

*[NB] : Une telle déclaration ne se trouve pas dans le dossier.

P. 302 : Je constate que ce mulâtre continue de porter le nom de famille `'Durchbach» contrairement à l'ordre du dernier gouverneur allemand en date du 24 décembre 1913 (voir page 170) et l'ordre du 15 mai 1914 et le consentement signé par lui-même le 19 mai 1914 (page 177). Il est informé que l'ordre du dernier gouverneur allemand est toujours en vigueur et devrait être obéi et il lui est interdit de porter encore le nom Durchbach. Voir la page 410 du code pénal de cette date.

A.R. Holliday - Officier politique du district. 27 avril 1918.

[NB] : D'après mon fichier personnel, Durchbach (probablement Friedrich) fut agent principal de la firme Max Grumbach à Petit Popo (Aného) 1885 - 1888 ; il a eu là-bas une femme de la famille Garber et son fils mulâtre Fritz est né en ces temps-là. (Sebald)

Commentaire succinct

Le cas de Fritz Durchbach illustre de manière exemplaire l'idée selon laquelle, avant l'administration allemande au Togo, le métissage ne constituait pas un problème. Après avoir décrété qu'un métis n'a pas le droit de porter le nom de son géniteur, l'adminsitartion coloniale allemande avait laissé une petite porte de compromis en concédant des cas exceptionnels, par autorisation du gouverneur. Fritz Durchbach qui avait jusque-là porté son nom allemand sans problème, s'est rué dans cette petite prèche, pour pouvoir rester dans la légalité. Mais le traitement de son dossier montre que l'administration n'envisageait nullement de laisser des métis porter des noms allemands. Le combat de Durchbach s'est achevé faute de combattant, car c'est pratiquement l'issue de la guerre qui a implicitement clos le dossier, mais s'il avait eu gain de cause face à l'administration allemande, nul doute qu'il aurait créé ainsi un précédent porteur de conséquence pour les autres métis. D'ailleurs, lui-même n'était pas le seul à porter le nom de Durchbach, car son père avait eu deux autres enfants métis (Brenda et Randal Durchbach), et il aurait été intéressant de savoir comment ces cas auraient été traités : auraient-ils eu ce droit automatiquement, par déduction du droit de leur frère ainé Fritz,

ou bien seraient-ils traités séparément ? Ce ne sont là que des interrogations spéculatives. Mais la réalité est là : Fritz, Brenda et Randal Durchbach n'ont eu le droit de porter le nom de leur père que par décret de l'administration française.

Chaque « métis allemand » du Togo a certainement son histoire digne d'être connue, mais il existe trop peu d'études consacrées à cette question, alors que tous les jours et dans tous les coins du Togo, on rencontre des noms de résonnance allemande. Le cas de Fritz Durchbach qui s'est courageusement battu pour reconquérir le droit de porter le nom allemand de son père nous amène aussi à parler des nombreux métis (ou de leurs familles) qui n'ont pas jugé utile de mener un tel combat. Parmi eux, certains ne se sont jamais vraiment intéressés à la question du nom du père ; ils ont tout juste gardé le nom de naissance de la maman, comme cela a été proposé à Fritz Durchbach. Le repertoire de Peter Sebald en fournit des exemples. Ce repertoire offre d'ailleurs aussi l'opportunité de déceler bien d'autres problèmes liés aux relations des Allemands du Togo avec les Togolaises, à l'époque coloniale : viols de mineures, contestation de grossesse et de paternité, polygamie des Européens en Afrique etc. Mais aborder tous ces problèmes ici déborderait largement le cadre de notre modeste étude.

4 - Commentaire récapitulatif

Il ressort de la documentation globale présentée ici que la question des « métis allemands » au Togo est apparue au grand jour avec la naissance en 1897 de Josef Comla, fils du gouverneur Köhler qui a eu du mal à camoufler cette affaire considéré comme un scandale, et qui, de surcroît, est mort peu de temps après, alors que cet enfant n'avait pas encore l'âge d'être autonome. C'est alors que l'administration coloniale a pris conscience que la question des métis n'était pas une affaire privée, mais qu'elle pouvait créer des situations sociales difficilement gérables. Elle a donc commencé à envisager des solutions, toutefois sans avoir le courage de prendre le mal à la racine, notamment en agissant en direction des administrateurs allemands. La première mesure de réglementation fut l'intervention policière sous forme de rafle, comme le prouve le cas suivant rapporté par Jürgen Petschull (1984 :124)69 : Le 10 mars 1901, l'employé de commerce Hermann Schubert écrit à la police: `Hier nuit l'indigène Eugenea Malami a été, par erreur de votre part, arrêtée comme prostituée. En fait, il s'agit de ma concubine. Je vous prie respectueusement de la remettre immédiatement à ma disposition.«

On constate donc que, faute de pouvoir agir en direction des hommes blancs qui recherchent les femmes noires, la police décide plutôt de sévir contre les femmes noires, en les arrêtant comme de vulgaires prostituées. Et cela donne comme conséquence, ce cas pénible où c'est le partenaire allemand de la femme noire qui vient réclamer, par voie officielle écrite, la restitution de sa partenaire qu'il appelle « concubine ». Il n'a donc aucune honte et aucun mal à déclarer publiquement qu'il a une concubine noire. En somme, l'administration n'a aucun moyen de lutter contre son union mixte, pourtant décriée par presque tous les Allemands de la métropole. Il est donc assuré de l'impunité, sachant que l'union mixte avec une femme noire ne constitue pas un délit.

Ainsi, lorsqu'on voit le nombre d'enfants que le Dr Ernst Krüger lui seul reconnaît avoir
engendré au Togo, ou encore le nombre des enfants du commerçant allemand Harry

69 Da schrieb am 10. März 1901 der Faktorei-Angestellte Hermann Schubert an die Polizeidienststelle Lomé: `Gestern Nacht wurde von Ihnen die Eingeborene Eugenea Malami ihrerseits irrtümlich als Prostituierte aufgegriffen. Richtigerweise handelt es sich um meine Konkubine. Ich bitte ergebenst, sie mir wieder umgehend zur Verfügung zu stellen."(cité in Jürgen Petschull 1984 :124)

Grunitzky, il y a de quoi mesurer l'ampleur du phénomène des « métis allemands » engendrés en toute impunité, et parfois négligés, voire rejetés, comme le montre le cas de la dame Afassi obligée de venir réclamer devant l'administration la pension alimentaire de l'enfant qu'elle a eu avec un noble, l'administrateur allemand Baron von Rotberg. Ce cas, comme celui de Josef Comla, fils du gouverneur August Köhler, illustre non seulement la précarité de l'existence des « métis allemands » et de leurs mères togolaises, mais surtout l'immoralité de certains pères allemands : Le Baron Wernher von Rotberg qui n'a passé que peu de temps au Togo, a eu cette liaison et cet enfant, s'est contenté de donner à la mère une somme forfaitaire dérisoire, puis a disparu du Togo sans plus jamais s'enquérir de l'avenir de sa progéniture. Où est donc la morale de la noblesse allemande? Quelle est la légitimité de tels administrateurs à «civiliser» les Noirs, si eux-mêmes se comportent d'une manière aussi immorale? Voilà des questions que soulève le cas du Baron von Rotberg, comme d'ailleurs celui de beaucoup d'autes pères de «métis allemands» du Togo.

L'autre cas, celui de Fritz Durchbach, pose la question du droit des métis à porter le nom de leur père allemand. Dans le rapport que l'administrateur Schmidt a adressé au Gouverneur en date du 15 août 1905, suite à une enquête approfondie qu'il avait menée auprès des familles les plus en vue à Aneho, il avait bien précisé le point de vue exprimé par les autochtones: «Die Häuptlinge und Erschienenen erklären einstimming, sie sähen ein Mulattenkind stets für voll an, nur müsse es den Namen seines Vaters tragen. Wie ich mich selbst überzeugt habe, ist dieses letztere auch stets der Fall und es wird streng darauf gehalten, dass das betreffende Mulattenkind, wenn es gefragt wird, stets den Namen seines Erzeugers mit angibt.»Après des pourparlers avec les représentants de tous les Allemands du Togo, l'ordonnance 18 octobre 1913 prise à ce sujet par l'administration coloniale, va totalement à l'encontre de l'avis des autochtones: un métis n'a pas le droit de porter le nom de son père allemand. Cette decision est explicitement justifiée par les discussions autour du cas de Fritz Durchbach, et révèle que l'administration coloniale ne veut pas qu'un Allemand revenu des colonies puisse avoir des enfants métis qui pourraient revendiquer les mêmes droits que des enfants allemands. On peut postuler que c'est donc l'instinct de conservation de la race qui a poussé les Allemands à refuser de reconnaître les métis.

CONCLUSION

L'opinion publique togolaise parle généralement des trente années de colonisation allemande au Togo (1884-1914) comme ayant été une période dont on garde des souvenirs merveilleux, ce qui expliquerait la grande sympathie que beaucoup de populations togolaises éprouvent encore aujourd'hui. Mais si l'on devrait faire des recherches très poussées sur chaque aspect de la vie à l'époque allemande, il n'est pas certain que l'on parvienne à confirmer que tous les souvenirs ont été vraiment si merveilleux. C'est l'impression générale qui se dégage de la modeste étude que nous avons entreprise sur les « métis allemands » du Togo. En trente années, l'administration coloniale allemande au Togo a réussi à faire de ce qui n'était nullement un problème en 1884, un vrai problème de société. Il faut comprendre cette expression « problème de société », non pas au sens où l'entendaient les Allemands qui se disaient soucieux de la préservation de la race blanche tout en commettant impunément des actes d'immoralité et d'irresponsabilité, mais plutôt au sens de la souffrance des femmes togolaises qui se croyaient mariées à des hommes blancs, mais qui étaient réduites au rang de maîtresses et de concubines, parfois considérées comme de simples prostituées par une administration coloniale qui leur déniait tout droit et tout sentiment. Pire encore, ce problème de société concernait en premier lieu les enfants nés métis, nés « hors-mariages » et qui ont souvent été doublement victimes : d'abord de la part de leurs géniteurs qui, le plus souvent, refusaient de les reconnaître, puis de la part de l'administration coloniale qui, au nom du principe de la séparartion des races, ne les reconnaîtra jamais, même si les géniteurs le désiraient. Beaucoup de « métis allemands » du Togo ont donc été doublement victimes de cette réalité historique, et en ont gardé sans aucun doute un traumatisme qu'ils tentent d'oublier et de guérir en proclamant aujourd'hui que « tous les Allemands sont nos frères et soeurs » (Petschull 1984 :119). Jamais l'administration coloniale allemande n'a accepté les métis allemands du Togo comme des frères et soeurs des Allemands, car c'est seulement après le départ des Allemands du Togo que les lois iniques sur les métis ont été abrogées, et que les métis allemands« ont obtenu le droit de porter le nom de leur géniteur allemand respectif.

Si certains métis allemands« du Togo ont pu avoir une éducation acceptable et mener
plus tard une vie honorable, ils le doivent certes aux mesures prise par l'administration

coloniale d'obliger les géniteurs allemands à s'occuper de leur progéniture, ce qui fut respecté par certains, même avant la promulgation de cette ordonnance. Mais la plupart des métis allemands« doivent leur succès à leurs mères africaines et aux familles de ces dernières qui les ont toujours pris pour des enfants comme tous les autres. On ne doit pas passer sous silence le rôle capital des missions catholiques et protestantes auxquelles la plupart de ces métis furent confiés pour leur scolarisation et leur formation; mais en même temps, il faut aussi souligner et déplorer la complicité délibérée des missionnaires allemands - catholiques comme protestants - dans la politique raciale du gouvernement colonial envers les métis: si, en tant que messagers de la Bonne Nouvelle qui a aboli les frontières entre maîtres et esclaves, si, en tant que serviteurs du Christ qui a proclamé la Nouvelle Loi de l'Amour entre tous les hommes, les missionnaires allemands avaient refusé de cautionner le principe raciste sur lequel étaient fondées toutes les mesures prises dans la gestion de l'affaire des métis au Togo, alors ils auraient constitué le garde-fou qui aurait empêché les problèmes sociaux engendrés par la recrudescence des métis allemands au Togo, et ils auraient ainsi mérité plus de reconnaissance et plus d'éloge de la part de ceux qui sont chargés d'écrire l'histoire des Togolais, particulièrement sur cette question.

Vu avec le recul du temps, la législation sur les métis allemands« a fait des victimes individuelles, mais n'a pas réussi à modifier profondément la structure traditionnelle de la société togolais précoloniale. Les 30 années de colonisation allemande, et particulièrement les dix années de réglementation de la vie des métis, n'ont été qu'une parenthèse vite oubliée - plus exactement : vite occultée - dès que les Allemands ont dû quitter le Togo en 1914. On le voit bien à l'exemple de Fritz Durchbach qui a repris immédiatement son nom à l'avènement des Français.

Le règlement de la question des métis allemands« par l'administration coloniale allemande avait pour justification initiale l'aspect social: protection des métis. Mais en réalité, les discussions qui ont précédé les différents textes réglementaires prouvent que la justification principale de l'intervention de l'administration coloniale dans cette question est d'ordre politique: c`est la politique raciale du Reich qui a dicté les mesures prises dans cette question.

Finalement, la réglementation sur la question des métis ne s'est pas du tout attaquée à la
cause du problème qui est la dépravation des moeurs des administrateurs coloniaux et
l'immoralité de leur comportement envers les femmes noires. C'est pour préserver la

prétendue pureté et la supposée supériorité de la race blanche que l'administration coloniale a réglementé le port des noms allemands par les enfants métis allemands«. Et finalement, c'est pour pour garantir la pérennité du pouvoir colonial blanc sur la population noire. C'est la peur de voir les métis constituer politiquement une classe intermédiaire entres les Blancs et les Noirs, et de les voir s'appuyer sur ces derniers pour réclamer ensuite le partage du pouvoir avec les Blancs : c'est la peur de voir les métis constituer une élite« politique qui deviendrait éventuellement l'avant-garde de la lutte pour l'indépendance, comme ce fut le cas ultérieurement dans plusieurs colonies européennes, notamment portugaises.

SOURCES DOCUMENTAIRES

1 - Documents d'archives

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- Archives Nationales du Togo (ANT), Fond Allemand (FA1/22), FA1/412), FA1/439, FA1/487, FA1/551, FA3/185, FA3/1020, FA3/1021.

-Amtsblatt für das Schutzgebiet Togo 1913 Nr. 59

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L'auteur de cette publication :

Essosimna Tomfei Marie-Josée ADILI, née en 1986 à Bassar (Togo), titulaire d'une Licence de langue, littérature et civilisation allemandes, et d'une Maîtrise de Lettres Allemandes, option : Civilisation, membre du Laboratoire ARTELI, (Atelier de Recherche sur les Thématiques Ecriture, Littérature et Identité) à l'Université de Lomé/Faculté des Lettres & Sciences Humaines, Lomé (Togo), actuellement en formation à la vie religieuse dans la Congrégation des Soeurs de Sainte Catherine d' Alexandrie Vierge et Martyr.

e.mail : adilimarie@ yahoo.fr www.humboldt-Africa.org/arteli

 





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