L'HABIT NE FAIT PAS LE MOINE OU PETITE REFLEXION SUR LE
SENS DU PAGNE PORTE LE 8 MARS A KINSHASA
8 mars 2012 : Journée internationale de la femme.
Et comme on pouvait bien l'espérer la tradition avait été
pour la nième fois respectée. Ou presque. Car toutes les femmes
sinon la majorité étaient en pagne. Encore que le reste, en jupe
et quelque fois en pantalon devait avoir les nerfs coriaces pour supporter
toutes les invectives de passants.
Ce choix du pagne ne tombe pas du ciel puisque il occupe une
place de choix dans l'accoutrement des dames. Entant qu'il est comme le
précise Microsoft Encarta 2009 « le costume traditionnel des
femmes au Zaïre (entendons par là Congo - c'est nous qui
l'ajoutons) ». Ainsi rien de plus normal pour celle qui est
célébrée ce jour de se choisir pour emblème ce qui
la convient le mieux, nous avons cité le pagne.
Cependant une chose dans la pratique semble tiquer. Cette
journée internationale qui avait été, à mon avis
consacrée, en ce jour précis pour donner à toutes les
femmes du globe l'occasion de réfléchir sur leur sort,
d'évaluer le progrès réalisé à travers le
monde en matière d'émancipation ou de parité, ou de se
questionner sur toute autre revendication du genre, semble se muer (à
Kinshasa principalement ) à une sorte de journée festive au cours
de laquelle des grandes manifestations sont prévues (randonnées,
excursions, pique- nique, concerts, rancarts, etc.) avec pour toile de fonds
le port du pagne. Au point qu'il est difficile de préciser s'il s'agit
de la journée de la femme ou du pagne.
Porter un pagne en soi n'est pas mauvais, au contraire
d'aucuns, sans se faire passer pour des moralisateurs, le
préfèrent tellement qu'ils auraient bien voulu qu'il soit le
principal sinon le seul habit féminin. Cela se remarque aisément
dans des propos du genre « botikala kaka bongo ou pantalon
toboyi » (soyez toujours comme ca c'est-à-dire en pagne ou
gare pantalon).
Et le faire un jour aussi mémorable que celui là
ajoute son grain de sel dans l'auto prise de conscience féminine,
principal ou l'un des principaux objectifs de la consécration de cette
journée. Par rapport à cela des questions se posent : Que
représente le port du pagne le 8 mars de chaque année ? En
quoi est - il nécessaire ?
Ainsi nous essayerons dans cette réflexion
d'évaluer ou d'analyser la valeur symbolique et fonctionnelle du port
de pagne ce jour.
I. Valeur symbolique
Nul n'est besoin de tergiverser dans cette
matière : le pagne dans notre société
représente la femme. Mais pas n'importe laquelle. Celle - ci est ou doit
être la femme avec un grand F c'est-à-dire la femme -
épouse, dignité du mari et la femme - mère, modèle
des enfants.
Du coup il exclu la femme tout le monde, la femme de la rue ou
encore celle prostituée. Bref toute celle qui d'une manière ou
d'une autre, par sa façon d'être ou de se tenir s'écarte du
format femme avec un grand F selon qu'elle est épouse ou mère.
Donc porter un pagne ce jour a une grande valeur symbolique
dans ce sens qu'il met en exergue la femme congolaise traditionnelle. Et toute
celle qui se le propose à cette occasion informe à tous son
appartenance à la lignée des femmes véritables avec tout
ce que cela comporte comme suite logique à savoir la
prédisposition à être femme - épouse ou femme -
mère.
Aussi le pagne symbolise cette dame pour qui la décence
passe par dessus tout. Il symbolise la mère de famille qui sans
exagération certes se couvre le corps. Et cela pour la grandeur de son
mari, la fierté de ces enfants et le respect de son entourage (ces
termes doivent être pris dans leur sens le plus coutumier - voir à
ce sujet MBOYO EPENGE, Cours de droit coutumier, UNIKIN, faculté de
droit, 2èmegraduat, 2010 - 2011, inédit) fondés
sur un accoutrement responsable. C'est ainsi que dans la rue une femme en pagne
est beaucoup plus considérée sinon respectée que
différemment habillée.
Ainsi donc porter un pagne ce 8 semble symboliser une sorte de
renouement avec sa dignité entant que femme. Il parait être un
message du genre « détrompez - vous la dignité
féminine existe toujours ». Et pris dans ce sens il est un
moyen d'expression par lequel on fixe l'opinion sur son existence entant que
telle.
Certaines s'y sont conformées, avec beaucoup de
succès d'ailleurs. Alors que d'autres loin de cacher leur nature
véritable ont préféré s'étaler au grand jour
en se faisant confectionner, avec ces mêmes pagnes, de truc que la
décence nous empêche de désigner par le terme habit avec
une incongruité inouïe.
Il fallait les voir moulées dans leurs chemisiers
trop échancrés pour couvrir les seins sinon les soutien - gorges,
leurs mini - jupes, très fendues de surcroit ou carrément leurs
pagnes noués avec désinvolture à la hanche dans une
technique autre que celle traditionnelle. Laquelle consiste à faire un
noeud juste en haut de l'une des cuisses qui à cet effet reste nue. La
retenue inactive, l'extravagance a inspiré des modèles de
couture marqués par une légèreté
outrancière.
II. Valeur fonctionnelle
Il nous convient avant de dégager la valeur
fonctionnelle du port de pagne le 8 mars de préciser le sens de certains
concepts à l'instar de celui femme - épouse et femme -
mère.
En effet ces termes ne sont pas à prendre au sens
propre de la femme, épouse du monsieur X ou Y, ou mère de tel ou
tel enfant, ce qui du coup écarterait de la course les religieuses, les
célibataires et jeunes filles pour n'en citer que celles là.
Par femme - épouse, j'entends toute celle qui comme au
ménage, se considère comme l'alter ego de l'homme en apportant au
profit de la société, de son pays ou de l'humanité toute
entière son assistance, son aide ou son savoir -faire. Ainsi par
l'utilité qu'elle s'est faite, soit en allant au champ ou à son
poste de travail respectif même le plus modeste elle se revêt d'une
certaine importance, beaucoup plus importante qu'on serait tenté de le
croire puisqu'elle offre des services qui ne seraient pas rendus sans elle.
Par contre femme - mère laisse sous - entendre celle
qui peut nourrir, éduquer et entretenir. Donc il ne suffit pas
d'être mère biologique pour l'être réellement au tant
que nombreuses le sont sans s'être le moins du monde rendues à la
maternité. Comme ces religieuses qui encadrent les orphelins ou ces
institutrices qui enseignent les élèves contrairement à
celles qui enfantent dans la rue et ensuite jettent ou tuent le
bébé par exemple.
En définitive donc, comme on peut bien s'en rendre
compte les concepts femme - épouse et femme - mère
relèvent plus d'un état d'esprit que d'un critère
matériellement objectivé, lequel, selon le cas peut être
inclusif ou restrictif.
Le sens de ces concepts ainsi précisé, la valeur
fonctionnelle du port du pagne le 8 mars peut être dégagée.
Comme dit précédemment porter le pagne symbolise la femme. Qui de
ce fait est honorée, valorisée, glorifiée,
respectée et que sais - je encore : Et c'est là que se situe
cette valeur fonctionnelle, puisqu'en ce jour elle est élevée,
vénérée même par cette tenue de marque.
En d'autres termes porter un pagne le 8 mars sert simplement
à valoriser la femme. Sous réserve certes d'une prise en compte
de sa valeur symbolique. Ainsi une dame ou demoiselle qui s'habille en pagne
non pas pour se couvrir mais plutôt pour s'exhiber est en dehors de la
plaque et si le fait d'être femme constituait en soi un ordre comme celui
des médecins ou des avocats, elle mériterait d'être
radiée pour violation du code de déontologie.
III. conclusion
Le pagne représente la femme, entendons femme -
épouse et femme - mère, dont le port valorise et honore. Tel est
le double sens de se le choisir comme emblème lors de cette
journée internationale leurs consacrée. Cependant le porter en
soi ne suffit pas pour élucider le mystère qu'il porte en lui
car comme on ne doit pas l'oublier il n'est qu'un habit dont le sort
dépend de celui qui le porte. Donc la femme donne du sens au pagne qui
au tournant la symbolise et la valorise, et non pas le contraire.
Donc celle qui porte un pagne le 8 mars pour s'exhiber ne
saisit pas la portée de l'événement. Nous ne sommes pas
contre celles qui s'exhibent mais seulement préférons que cela se
fasse en ordre. Elles peuvent bien le faire les autres jours ou le même
le jour mais différemment habillées. Dans ce cas au moins il n'y
aura pas de transition et la vie sera la même sur toute la lignée.
Au lieu de feindre se conformer aux prescrits dont on ignore les
modalités et de ce fait se discréditer.
Il conviendrait ainsi pour conserver le symbolisme du pagne en
ce jour que son port fasse l'objet d'une sélection rigoureuse dont ne
pourront figurées que celles qui répondront aux critères
de la femme - épouse et de la femme - mère d'une part et de
l'autre aux règles de la bienséance. Mais puisque cela n'est pas
le cas encore que peu nombreuses souhaiteront qu'il le soit réellement
nous préférons les laisser faire tout en se ressassant à
chaque fois que la cause l'exige l'adage « l'habit ne fait pas le
moine ».
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