3-Analyse dynamique : modele dynamique inverse
La modélisation du corps de l'athlète par un
système poly-articulé de solides rigides constitue l'une des
étapes préliminaires nécessaire à l'étude
mécanique des forces intersegmentaires et moments articulaires. En
effet, afin de pouvoir appliquer les lois de la mécanique des solides
rigides pour chacun des n corps rigides qui constituent la
chaîne il importe de considérer :
§ que la répartition des masses de chaque segment
reste constante à chaque instant. Cela
revient à supposer que la forme des muscles est
invariante lors de la contraction ;
§ que les frottements et glissements entre les surfaces
articulaires sont négligés.
L'adoption de ces hypothèses simplificatrices introduit
des erreurs dans le calcul de dynamique inverse. Ainsi, il est
recommandé de ne pas prendre en compte plus de trois segments afin de
limiter la multiplication des incertitudes de mesures d'un segment à
l'autre. De ce fait, pour l'analyse du mouvement du rameur [Coll 03], de la
marche [Fros 98], de soulevé de charge [Moua 01], ou de pédalage
[Bouc 05] la plupart des calculs s'arrêtent au niveau de la hanche.
Dans le cas de l'analyse du départ de course vitesse,
les forces calculées au niveau de la cinquième vertèbre
lombaire obtenues à partir de deux stratégies (descendante et
ascendante) sont comparées pour valider le modèle.
Dans la même logique que l'analyse cinématique
(§-VIII2.1), l'écriture des équations de la dynamique
adoptée correspond au formalisme introduit par Legnani et al. (1996). Il
s'agit, rappelons-le, d'une formulation très synthétique des
théorèmes de Newton-Euler qui emploie les matrices de
roto-translation pour la modélisation dynamique d'un système
polyarticulé.
3.1-Procedure d'estimation de la dynamique articulaire
La mise en équation de la dynamique articulaire
nécessite un bilan des torseurs des actions mécaniques qui
s'exercent sur chaque segment de la chaîne articulée. La figure
92
présente un exemple d'une chaîne composée de
trois solides rigides (Sol, S1 et S2) en liaisons
ponctuelles (O1 et O2).
- Si : Solide i
-
Y0
X0
S2
Ö( Sol /S1 )
O1
O2
Ö( S2 / S1 )
Ö (pesanteur/ S1 )
Sol
Z0
g0
S1
G1 : centre de gravité de S1
- O1 : point d'application de R1
- O2 : point d'application de R2
- Ö ( Sol / S 1 ) : TAM exercée
par le Sol sur S1
- Ö ( S 2 / S 1 )
: TAM exercée par S2 sur S1
- Ö(
pesanteur/
S1 ) : TAM de la pesanteur sur S1
Figure 92 Représentation des torseurs des actions
mécaniques (TAM) qui s'exercent sur le solide S1
La détermination du bilan des torseurs des actions
mécaniques qui s'exercent sur le solide S1 (figure 17) permet
d'écrire, à chaque instant, l'équation de
l'équilibre dynamique de ce segment dans g0 en
appliquant le principe fondamental de la dynamique (§-III.3) :
N
Ö( SoilS 1 Yet0
+ Ö ( S 2 / S 1 Va0 (
pesanteur/ S1 ) / gt0 = AS1
/ Éq.VIII. 12RD
Ö( Sol /S1 ) / ~
0 : torseur des actions mécaniques exercées par
le Sol sur S1 dans 0 en O1
: torseur des actions mécaniques exercées par
S2 sur S1 dans gt0 en O1
Ö( S2 /S1)
/a0
Ö( pesanteur/S1 ) /
910 : torseur d'action de la pesanteur exercée
sur S1 dans R.0 en O1 AS1 /
90 : torseur dynamique associé au
mouvement de S1 dans R.0 en O1
Ayant déjà défini le torseur
Ö(Sol/S1)/~0 par
mesure dynamométrique, il devient possible d'estimer le torseur
Ö ( S 2 / S 1 ) / ~ 0
comme suit :
Ö( S 2 / S 1 Vet0
= A S1 /91.0 - Ö(
SollS 1 )/ a0 -
Ö( pesanteur/ S1
)/9t0Éq.VIII. 13 Finalement,
afin d'estimer le torseur des actions mécaniques exercées par un
solide
Si+1 sur Si dans g0, il
importe de définir deux constantes :
§ l'opérateur du champ de pesanteur Hi/ 0
nécessaire à la définition du torseur d'action de la
pesanteur Ö (
Pesanteur / i )/910 .
§ la pseudo matrice d'inertie J
iei d'un segment
Si nécessaire au calcul du torseur dynamique Ai/
~ 0 et du torseur d'action de la pesanteur
Ö(
Pesanteur/ i ) / e0 .
Definition de l'opérateur du champ de
pesanteur
Par analogie avec la matrice Hi/ ~ 0 ,
l'opérateur du champ de pesanteur possède la forme matricielle
suivante :
~~
H
g
g/= 0
0 0 0 0
0
~~
où g= 0
-9,81
~
[ 0]
Éq.VIII. 14
~~
avec g accélération gravitationnelle
Definition de la pseudo-matrice d'inertie
Définie en Gi suite à l'application des
équations de régression proposées par Zatsiorsky (1985),
la matrice d'inertie de Si est d'abord transférée
à l'origine Oi de ~i en appliquant le
théorème de Huygens :
I( Oi
)91.i = I( Gi
)91.i +
I91. Éq.VIII. 15
Où I ~i
représente la matrice d'inertie en Oi du point Gi
affecté de la masse mi de Si.
L'expression de I ( O i ) .
est la suivante :
I ( Oi
)a = [-F B -D i
[
O i G i = Yi
Zi ai
A -F -E
-E -D C
X
i
~~~~~~
Éq.VIII. 16
et
9Li
En adoptant cette notation (Éq.VIII.), la pseudo-matrice
d'inertie défini en Oi de ~i
s'écrit :
S 2- A F E m i Xi
F S 2- B D m i Yi
E D S 2- C m i Zi
Éq.VIII. 17
9Li
avec S = A + B + C
m i X i m i Y i m i Z i mi
9Li
Architecture de la chaine cinematique lors d'un depart de
course vitesse
Lors d'un départ de course vitesse, l'étude de
l'architecture de la chaîne cinématique permet de distinguer trois
types de configurations (figure 93).
Bipédie Unipodale
Quadrupédie
CC fermée (Membres inférieurs et
supérieurs)
CC ouverte membres supérieurs CC fermée
membres inférieurs
CC ouverte (Membres inférieurs et
supérieurs)
Figure 93 Chaînes cinématiques (CC) lors
d'un départ de course vitesse
La disposition d'un dynamomètre au niveau de chaque
appui (C1 : pied avant, C2 : pied arrière, C3 : main droite, C4 : main
gauche) (figure 76) estime le torseur des actions mécaniques externes
qui s'y exercent.
Les quatre torseurs exprimant la résultante et le
moment des actions mécaniques réduit à l'origine du
repère R.0 sont écrit sous forme matricielle
4x4. L'expression d'un torseur
décrivant les actions mécaniques d'un segment
Si sur un capteur Ci dans R.0 est de la
forme
suivante :
0 - M M F
z y x
Ö S i C i ~
( )
/ / 0
0 - M F
z x y
M M 0 F
z z z
M
=
-
-
Éq.VIII. 18
F - F -F
x y z
0
9t0
Mx Fx
~~~ ~~
avec M( O , PSvCi)/
gt0 = I My
Mz
et ( ) 0
F S i C i ~
/ /
910
= Fy
Fz
910
Il importe de signaler que l'introduction de ces torseurs dans
l'écriture de l'équation de l'équilibre dynamique doit
tenir compte de la définition de la configuration de la chaîne
cinématique et la détermination des instants de décollage
de chaque segment (§-IV.1.2). Le bilan des torseurs des actions
mécaniques qui s'exercent sur l'athlète lors des
différentes configurations figure dans le tableau 3.
-1
( )
T 0 i
Tableau 10 Bilan des torseurs décrivant les
actions mécaniques exercée par l'athlète sur son milieu
extérieure lors de différentes configurations
Configurations
|
Pied Avant [Pv]
|
Pied arrière [Pr]
|
Main droite [md]
|
Main gauche [Mg]
|
Quadrupédie
|
Ö( Pv /C1 ) /
g0
|
Ö ( Pr /C2 )
/a0
|
Ö( Md/C3 )
/R0
|
Ö (
Mg/C4)/91.0
|
Bipédie
|
Ö( Pv /C1) /
90
|
Ö( Pr /C2 )
/g0
|
Torseur nul
|
Torseur nul
|
Unipodale
|
Ö( Pv /C1 ) /
g0
|
Torseur nul
|
Torseur nul
|
Torseur nul
|
Au cours de cette étude la masse des mains est
négligée, les torseurs mesurés au niveau de ces appuis
sont donc directement rapportés au centre fonctionnel du poignet.
Structure de l'algorithme de calcul
Pour t = temps Pour i =
segment
Calcul des matrices vitesses du segment
Si dans g0
W = T 0 ·
i
i / ~ 0
Calcul des matrices accélérations du
segment Si dans gt0
·
-1
Hi
·T= i
/e0
( T0i )
J = T · J ·
i
i ~ 0 i ~
0 i
( T0i )
Calcul de la pseudo-matrice d'inertie dans g0
À chaque itération (i) l'algorithme
fournit la matrice Ö (i+1/ i )
/ai+1 décrivant le torseur
des efforts inter-segmentaires entre les segments
Si+1 et Si. Ce torseur est par convention symétrique
et il est exprimé dans le repère du segment Si+1. Son
centre de réduction est par hypothèse confondu avec le centre
articulaire Oi+1 de gi+1. Par analogie avec
le torseur des actions mécaniques externes, le torseur des actions
mécaniques internes de Si+1 sur Si s'écrit :
Ö ( )
i+1 i
/
|
/
|
~ i+1
|
[ 0 - N M X
i i i
N 0 - L Y
i i i
- M i L i 0 Zi
- X i - Y i -Z i 0
|
~ i+1
|
Éq.VIII. 19
|
L i
~ = M
i+1 i
N i
X i
et /
F Y
i+1 i = i
~ i+1 Z i ~
i+1
avec (
M O , i+1 i
/ ) /
i
Le choix du centre de réduction au centre fonctionnel
de l'articulation trouve origine dans une hypothèse classique : la
distance entre la droite d'action de la force de contact et le centre
articulaire est négligée. Les forces ligamentaires sont
également négligées au regard des forces musculaires [Coll
03]. Ainsi, le moment calculé représente, au signe près,
les actions musculaires croisant l'articulation.
Validation du modele dynamique inverse
Afin d'éliminer l'effet des méthodes de
traitement et de calculs et permettre la comparaison des deux procédures
de solidification, les matrices issues de la PSR et de la PSG sont
injectées dans le même algorithme de calcul. La validation du
modèle dynamique inverse est effectué en calculant le torseur des
actions inter segmentaires au niveau de la cinquième vertèbre
lombaire en adoptant deux stratégies de dynamique inverse :
descendante : Ö ( ) 0
/ ~ = A ~ +
Pelv/ Cuisse / - pesanteur / Pelvis /
0 Ö ( Ö
Abdomen/ Pelvis Pelvis / ) ~ ( )
~
0 0
~ascendante : Ö ( ~ = A
~ + Abdomen/Thorax / - pesanteur / Abdomen
/
Ö Ö
Pelvis / Abdomen ) Abdomen/
/ 0 ( ) ~ ( ) ~
0 0 0
En appliquant le principe de réciprocité
(§-III.3) aux segments abdomen et pelvis (figure 94), nous
vérifions que Ö( Abdomen/Pelvis )
/g0 et Ö( Pelvis/Abdomen )
/a0 sont équivalents au signe prêt.
Force exercees par ('abdomen sur le pelvis exprimees
dans ao [N]
Figure 94 Forces exercées par l'abdomen sur le
pelvis suivant les trois dimensions de l'espace
to. Données issues de la PSR et PSG en adoptant deux
stratégies : ascendante (Asc) et descendante (Desc)
La figure 94 montre, jusqu'à l'instant
ta, une bonne concordance entre les données issues
des deux stratégies de dynamique inverse (ascendante et descendante).
Cela permet, d'une part, de valider notre processus de dynamique inverse
basé sur le formalisme matriciel de Legnani et al. (1996) et, nous
autorise, d'autre part, à étudier l'effet des deux
procédures de solidification sur l'estimation de la dynamique
articulaire.
À partir de l'instant ta, la
concordance entre les deux stratégies de dynamique inverse est
perturbée. Cette perturbation est due à :
§ l'amplification des incertitudes provoquée par la
double dérivation des données
cinématographiques lors du calcul des
accélérations ;
§ l'accumulation de ces incertitudes suite à
l'application de la procédure itérative de
dynamique inverse.
Il importe de souligner que ces perturbations n'entravent pas
l'étude comparative des torseurs d'actions inter segmentaires issus de
la PSR et de la PSG. Ayant subie exactement la même procédure de
calcul de dynamique inverse, une éventuelle différence dans les
résultats serait fortement due à l'application de la PSR
versus la PSG.
Elements permettant l&interpretation des
resultats
Suite au calcul itératif, les torseurs des actions
mécaniques inter segmentaires entre les
segments Si+1 et Si exprimées dans
Si+1 sont quantifiés. Tenant compte de l'arborescence de la
chaîne cinématique (§-VII.2.figure 78) les
vecteurs forces et moments inter segmentaires au niveau d'une articulation
donnée caractérisent l'action d'un segment amont sur le segment
aval pour les membres inférieurs et supérieurs et d'un segment
aval sur un segment amont pour le tronc et la tête. Ces
éléments sont décrits dans le tableau 11 ci-dessous.
Tableau 11 Définition des actions
mécaniques inter segmentaires au niveau des articulations
Articulations
|
Si+1 / Si
|
Articulations
|
Si+1 / Si
|
Cheville
|
Jambe / Pied
|
C7
|
Thorax / Tête
|
Genou
|
Cuisse / Jambe
|
T12
|
Abdomen / Thorax
|
Hanche
|
Pelvis / Cuisse
|
L5
|
Pelvis / Abdomen
|
Coude
|
Bras / Av. bras
|
Épaule
|
Thorax / Bras
|
L'interprétation des forces et des moments doit tenir
compte de l'orientation des repères segmentaires qui possèdent
des bases différentes selon le coté gauche ou droit.
L'orientation de ces repères est détaillée dans le
précédent chapitre (§-VII.2.figure 78).
Dans le plan sagittal, les articulations du tronc (C7, T12 et
L5) ainsi que celles du côté droit du corps : cheville, hanche,
coude et épaule, présentent une valeur positive du moment lors de
la flexion49. Quant au genou droit, c'est une valeur négative
du moment qui traduit sa flexion (Voir orientation des axes §-VII.2.figure
78). Mis à part le genou gauche qui présente un moment positif
lors de sa flexion, les articulations du coté gauche du corps (cheville,
hanche, coude et épaule) présentent un moment négatif lors
de leur flexion.
Dans le plan frontal, une valeur positive du moment, au niveau
d'une articulation du coté droit du corps traduit une adduction d'un
segment droit. Contrairement elle traduit une abduction dans le cas d'une
articulation du coté gauche. Concernant les articulations du tronc, un
moment positif signifie une inclinaison latérale sur le coté
droit.
Dans le plan horizontal, une valeur positive du moment
articulaire traduit invariablement une rotation médiale (interne) du
segment.
|