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Université Catholique de Louvain
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Faculté des sciences économiques,
sociales, politiques et de communication
Faculté ouverte de politique économique
et sociale XIème Promotion (2009-2011)
EXPLOITATIONS AGRICOLES FAMILIALES ET PROJETS
D'AGROCARBURANTS DE PROXIMITÉ AU SÉNÉGAL : CAS DU PROJET
JATROPHA DANS LE DÉPARTEMENT DE FOUNDIOUGNE.
Mémoire présenté pour l'obtention du
Master en Politique Economique et Sociale, à Finalité
spécialisée en Développement : Politique et Gestion de
Projets
Par M. Amadiane DIALLO
Directeur de mémoire : Pr Etienne
VERHAEGEN Accompagnateurs : Pr André NSABIMANA et M.
Daniel GAYE
DÉDICACES
Je dédie ce modeste travail :
? A mes parents Khassime et Marième DIALLO sans oublier
ma tante Diary FAYE et ma défunte grand-mère Ya Aïs DIALLO
qui m'ont inculqué des valeurs sures pour affronter la vie et relever
des défis.
? A mon épouse Moussoucoto CAMARA pour sa patience, son
soutien et son amour sans faille.
? A la mémoire de mon beau père, Kimintang
CAMARA décédé le samedi 29 janvier 2011 à Dakar.
Avant sa mort, il a partagé avec moi sa riche expérience du
développement agricole et rural au Sénégal.
? A la mémoire de Ndar FAYE, Directeur des ressources
humaines et ardent combattant de la « nouvelle économie rurale
» chère à la SODEFITEX, décédé le
dimanche 24 janvier 2010 à Dakar. En tant que développeur, ses
conseils de doyen d'age et de profession resteront gravés dans ma
mémoire comme « boussoles intérieures ».
Que le Tout puissant les accueille dans son Paradis
éternel. A tous les acteurs qui oeuvrent pour que Vive le
Développement endogène, inclusif et harmonieux.
i
Mémoire Master Amadiane DIALLO
REMERCIEMENTS
Je remercie :
? la DGCD qui m'a permis à travers la bourse de la CTB, de
suivre cette formation dont le présent mémoire est
l'aboutissement.
? la FOPES dans son ensemble ; mention spéciale à
Michel ELIAS, un conseiller pédagogique qui a su jouer son rôle
à fond pour nous permettre de réaliser nos études dans les
meilleures conditions.
? les camarades de la XIème et hélas
dernière promotion de FOPES SUD, un creuset de savoir, savoir-faire et
savoir-être : Adrien, Angélique, Claire, Désiré,
Dismas, Emmanuel, Ester, Fatou, Jean Franklin, Lydia, Mamadou, Moussa, Oswald,
Philippe, Providence, Thierry, Yacoubou.
? ma commission de mémoire, en l'occurrence, M. Etienne
VERHAEGEN, M. André NSABIMANA et M. Daniel GAYE qui m'ont bien «
coaché » pour arriver à présenter un travail
académiquement réalisable et scientifiquement acceptable.
? toute la famille SODEFITEX à travers son Directeur
Général de la SODEFITEX qui a bien voulu m'accordé une
disponibilité de deux ans pour suivre cette formation
? toute l'équipe de SOPREEF et Performance
particulièrement Bruno LEGENDRE, Abdoulaye DIAKHATÉ, Mouhamadou
L. SECK et Mbaye DIOUF n'ont ménagé aucun effort pour me mettre
dans des conditions de collecte de données optimales.
? Dr Fatima NDIAYE et Dr El Hadji LEYE de l'ISRA pour leur
collaboration décisive.
? toute la petite mais « très grande »
communauté sénégalaise de Ottignies-Louvain-LaNeuve pour
la solidarité inégalable, marque culturelle des
sénégalais. Grâce à vous le Sénégal si
loin devenait si proche ! Mention spéciale aux grands Lamine et Abou
DIOP, des hommes d'une sociabilité incommensurable, et à travers
eux, toutes leurs familles.
? toutes les connaissances enrichissantes de Belgique : Abouba,
Anna, Babacar, Bachal,
Bintou, Claude, Diarra, Ibrahim, Kader, Khady, Moriba, Narcis,
Tapha, Samba, Serge. ? tous les membres de ma famille et de ma belle-famille
pour leur soutien moral capital
et surtout doyen KRUMA pour ses encouragements et ses conseils
précieux.
? tous les amis du Sénégal qui m'ont apporté
leur soutien à l'image de Racine, Mboup...
Que tous ceux qui, de près ou de loin, m'ont
apporté leur soutien précieux pour l'aboutissement de ce
travail, se voient ici sincèrement remerciés.
RESUME
L'objet de cette présente étude est d'analyser
les stratégies des exploitations agricoles familiales face aux enjeux
d'un projet de plantations de Jatropha dans le département de
Foundiougne au Sénégal, dans un contexte mondial de changement
climatique rythmé par la fièvre des agrocarburants.
Une étude bibliographique confrontée aux
résultats des enquêtes des producteurs concernés et des
personnes ressources sur le terrain ont permis de mieux appréhender les
logiques d'acteurs en jeu dans la mise en oeuvre des agrocarburants. A
côté du modèle dominant caractérisé par la
conduite de monocultures dont la production est destinée à
l'exportation, des initiatives dénommées « projets
d'agrocarburants de proximité » privilégient la satisfaction
des besoins énergétiques locaux.
A travers une caractérisation et une typologie, ce
mémoire met en exergue la place qu'occupe la subsistance familiale dans
la structure et le fonctionnement des exploitations agricoles familiales
impliquées dans ce projet : 1èr objectif prioritaire
de toutes les exploitations, 77% à 95% de parts (selon les types)
réservées pour ce poste de dépenses dans l'utilisation des
revenus globaux.
Cette primauté des objectifs de subsistance familiale
oriente les exploitations agricoles familiales vers des stratégies
d'intégration minimale du projet, en l'occurrence, le choix
systématique de faire des haies vives autour de leurs parcelles de
culture au détriment des autres propositions techniques. En plus, elles
saisissent l'opportunité pour renforcer le marquage foncier et
sauvegarder leur système de productions tout en se connectant aux enjeux
matériels du projet. C'est pourquoi, il est peu probable que ces
producteurs aillent au-delà de la clôture des parcelles dans leur
rapport au projet Jatropha.
L'accompagnement des producteurs dans leur choix est la
condition essentielle pour que les projets d'agrocarburants de proximité
puisse véritablement participer à la satisfaction des besoins
énergétiques des populations locales concernées et, par
ricochet, à la réduction des émissions des gaz à
effet de serre.
Mots-clés :
Agrocarburants/Jatropha/Exploitation agricole familiale/ Marquage
foncier/Subsistance familiale/Sénégal
iii
Mémoire Master Amadiane DIALLO
ABSTRACT
The purpose of this study is to analyze the strategies of
family farm facing the challenges of a project of Jatropha plantations in the
department of Foundiougne Senegal, in a global climate change punctuated by the
excitement of agrofuels.
A literature review over the results of investigations of the
producers and resource persons on the ground have a better understanding of the
logics of actors involved in the implementation of biofuels. Besides the
dominant model characterized by the conduct of monocultures whose production is
for export, initiatives referred to as « locals agrofuels projects »
privilege the local energy needs.
Through a characterization and typology, this paper highlights
the place of family living in the structure and operation of family farms
involved in this project: 1st priority of all farms, 77% to 95% shares (by
type) set aside for this expenditure item in the use of overall profits. This
primacy of the goals of family subsistence oriented family farms to the minimum
integration strategies of the project, namely, the systematic choice to make
fences around their plots growing at the expense of other technical proposals.
In addition, they seize the opportunity to strengthen and safeguard their land
marking system of production while connecting to the material issues of the
project. Therefore, it is unlikely that these producers to go beyond the fence
in their plots to the project Jatropha.
Support for producers in their choice is the essential
condition for the locals agrofuel projects can truly participate in the energy
needs of local people involved and, in turn, reduce greenhouse gas
emissions.
Keywords: Agrofuels / Jatropha / Family farms/
Land marking / Subsistence family / Senegal
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Rendement en graines sèches
à 5,8% d'humidité (kg/ha/an) selon 3 scénarios de culture
11
Tableau 2 : Matrice des composantes (ACP avec 4
composantes) 74
Tableau 3 : ANOVA pour déterminer les
critères de typologie 74
Tableau 4 : Répartition des EAF de
l'échantillon dans les groupes 75
Tableau 5 : Récapitulatif de l'analyse de
variance (ANOVA) intergroupes 75
Tableau 6 : Synthèse des
2èmes et 3èmes objectifs
prioritaires par type d'exploitation 78
Tableau 7 : Pourcentage de marquage foncier par
type d'exploitation 81
Tableau 8 : Productions agricoles moyenne par
culture et par type d'exploitation 82
Tableau 9 : productions arboricoles moyennes par
type d'exploitation 84
Tableau 10 : Revenu annuel productions
végétales (MFCFA) 84
Tableau 11 : ANOVA Productions
végétales intergroupes 84
Tableau 12 : Activités non agricoles par
type d'exploitation 85
Tableau 13 : Décomposition du revenu
annuel global par type d'exploitation 85
Tableau 14 : Ventilation des revenus globaux par
poste de dépense selon le type d'exploitation 86
Tableau 15 : Analyse stratégique des
acteurs vis-à-vis de leurs boussoles intérieures 101
Tableau 16 : SWOT projet de plantation de
Jatropha 104
v
Mémoire Master Amadiane DIALLO
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Plant de Jatropha et Figure 2
: Feuilles et fruits de Jatropha 10
Figure 3 : Fleurs de Jatropha et Figure
4 : Graines séchées de Jatropha 11
Figure 5 : Hauteurs de pluie enregistrées
dans la communauté rurale de 1999 à 2009 50
Figure 6 : Assolement moyen pratiqué par
les EAF 65
Figure 7 : Comparaison des rendements moyens de
5 campagnes au niveau national, départemental et producteurs
enquêtés 69
Figure 8 : La hiérarchisation des
objectifs prioritaires des EAF 73
Figure 9 : Répartition des cultures selon
les plans de campagne par type d'exploitations 79
Figure 10 : Boussoles intérieures des
différents acteurs du projet de plantation de Jatropha 99
LISTE DES ANNEXES
Annexe1 : Guide d'entretien personnes ressources
I
Annexe 2 : Guide d'entretien Communauté
Rurale II
Annexe 3 : Questionnaire producteur chef
d'exploitation agricole familiale III
Annexe 4 : Données démographiques
et actifs agricoles par exploitation VI
Annexe 5 : Capital foncier et matériels
agricoles par exploitation VII
Annexe 6 : Traction animale, emblavures et
plantations par exploitation VIII
Annexe 7 : Quelques indicateurs par village
IX
Annexe 8 : Tableau ANOVA intervillages X
Annexe 9 : Tableau ANOVA intergroupes XI
Annexe 10 : ANOVA Marquage X Groupe XIV
Annexe 11 : Tableau de bord des rendements par
type d'exploitation XV
Annexe 12 : Tableau ANOVA rendements
intergroupes XVI
Annexe 13 : Localisation du
Sénégal et de la région de Fatick XVII
Annexe 14 : Carte administrative de la
région de Fatick XVIII
Annexes 15 : Carte de localisation du pôle
de développement de Dantakhoune XVIII
Annexe 16 : Mes photos XIX
Annexe 17 : Autorité Nationale
Désignée (AND) et MDP au Sénégal XXI
Annexe 18 : AND et critères de
développement durable du Sénégal XXII
vii
Mémoire Master Amadiane DIALLO
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
ACP : Analyse en Composantes Principales
ADG : Aide au Développement Gembloux
AND : Agence Nationale Désignée
ANOVA : Analysis Of Variance (Analyse de
Variance)
ARD : Agence Régionale de
Développement
AREED : African Rural Energie Entreprise
Développement
BP : British Petroleum
CADL : Centre d'Appui au Développement
Local
CILSS : Comité permanent Inter-Etats de
Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel
CIRAD : Centre de coopération
Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement
CLCOP : Cadre Local de Concertation des
Organisations Paysannes
CTB : Agence belge de développement (ex
Coopération Technique Belge)
DAPS : Direction de l'Analyse, de la
Prévision et des Statistiques
DGCD : Direction Générale de la
Coopération au Développement
EAF : Exploitation Agricole Familiale
EESF : Energie Eau Solidarité
Foundiougne
ESAM : Enquête Sénégalaise
Auprès des Ménages
FAO : Food and Agriculture Organization
(Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture)
FCFA : Franc de la Communauté
Financière Africaine (1 Euro = 655,957 FCFA) FOPES :
Faculté Ouverte de Politique Economique et Sociale
FPTF : Fédération des
groupements de Producteurs Tabanani (Jatropha) de Foundiougne
GERES : Groupe Energies Renouvelables,
Environnement et Solidarités GES : Gaz à Effet
de Serre
GOANA : Grande Offensive pour l'Agriculture, la
Nourriture et l'Abondance GRET : Groupe de Recherche et
d'Echanges Technologiques
GSM : Global System for Mobile communication
HVP : Huile Végétale Pure
IFPRI : International Food Policy Research
Institute
ISRA : Institut Sénégalais de
Recherches Agronomiques
Kcal : Kilo calorie
MDRA : Ministère du Développement
Rural et de l'Agriculture
MDP : Mécanisme de Développement
Propre
OCDE : Organisation de Coopération et de
Développement Economiques OMS : Organisation Mondiale
de la Santé
ONGD : Organisation Non Gouvernemental pour le
Développement PNUD : Programme des Nations Unies pour
le Développement RNA : Recensement National de
l'Agriculture
SODEFITEX : Société de
Développement et des Fibres Textiles
SOPREEF : Société pour la
Promotion de l'Accès à l'Energie et à l'Eau dans le
département de Foundiougne
SPSS : Statistical Package for the Social
Science THD : Technologies for Human Development TE :
Taux d'Equipement
UE : Union Européenne
ix
Mémoire Master Amadiane DIALLO
SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
PREMIÈRE PARTIE : CADRAGE THEORIQUE ET APPROCHE
METHODOLOGIQUE DE L'ETUDE 2
CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQUE ET CADRE CONCEPTUEL 2
1- Contexte de la recherche et question de départ 2
2- Hypothèses et objectifs de recherche 5
3- Pertinence du sujet 6
4- Clarification de concepts 7
4.1- Agrocarburants 7
4.2- Jatropha 8
4.2.1- Origine géographique : 9
4.2.2- Description botanique et diversité
génétique : 9
4.2.3- Une estimation du rendement jugée raisonnable :
11
4.2.4- Extraction de l'huile : 11
4.2.5- Impact potentiel sur l'environnement : 12
4.3- Exploitation agricole familiale et système de
production 13
4.4- Assolement et subsistance familiale 14
4.5- Marquage foncier 14
4.6- Acteurs, projets, stratégies et logiques d'acteurs
14
4.7- Opérationnalisation des concepts déterminants
17
5- Controverses autour des agrocarburants 18 5.1- De
l'historique des politiques agricoles mondiales aux enjeux et logiques
globales
des agrocarburants 18
5.2- Agrocarburants et accaparement des terres dans les pays du
Sud 22
5.3- Agrocarburants et sécurité alimentaire 25
5.4- Rapports à la paysannerie : monocultures
industrielles ou agrocarburants de
proximité avec la polyculture paysanne 26
5.5- Instruments coopération au développement et
projets d'agrocarburants au Sud 28
5.5.1- Mécanisme de Développement Propre (MDP) et
programmes REDD 28
5.5.2- Certification et critères de durabilité
30
CHAPITRE 2 : CADRE PHYSIQUE, HUMAIN ET INSTITUTIONNEL DE
L'ETUDE . 32
1- Aperçu sur le Sénégal et sa politique de
développement agricole et rural 32
1.1- Présentation 32
1.2- Le système foncier sénégalais 33
1.3- Politiques agricoles 36
1.4- Point sur la situation des agrocarburants au
Sénégal 39
2- Présentation du projet de Jatropha de proximité
43
2.1- Présentation générale 43
2.2- Les modes de plantation du Jatropha suggérés
aux exploitations agricoles
familiales 46
2.3- Etat d'avancement 47
3- Présentation du site de l'étude : la
communauté rurale de Nioro Alassane Tall 48
3.1- Aspects administratifs et organisationnels 48
3.2- Milieu physique 49
3.2.1- Relief, sols et climat 49
3.2.2- Végétation, faune et ressources en eau 50
3.3- Milieu humain 51
3.3.1- Démographie 51
3.3.2- Situation socio-économique 52
3.3.2.1- Activités économiques 52
3.3.2.2- Infrastructures socio-économiques 54
CHAPITRE 3: APPROCHE METHODOLOGIQUE 56
1- Sources des données documentaires 56
2- Enquêtes de terrain 56
3- Echantillonnage 58
4- Mode de traitement des données 59
5- Difficultés et limites 59
DEUXIÈME PARTIE : PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS DE
L'ETUDE 60
CHAPITRE 4 : CARACTERISATION ET TYPOLOGIE DES
EXPLOITATIONS
AGRICOLES FAMILIALES ENQUETEES 60
1- Caractérisation des exploitations agricoles familiales
enquêtées 61
xi
Mémoire Master Amadiane DIALLO
1.1- Démographie 61
1.1.1- Sexe, ethnie, niveau d'instruction et age des chefs
d'exploitation 61
1.1.2- Population des exploitations 61
1.2- Moyens de production 62
1.2.1- Main d'oeuvre familiale et actif agricole 62
1.2.2- Capital foncier 62
1.2.3- Matériels agricoles et cheptel de trait 63
1.3- Systèmes de culture et d'élevage 64
1.3.1- Appréciation paysanne de la nature et de la
fertilité des sols cultivés 64
1.3.2- Assolement, superficies emblavées et rotations
pratiquées 65
1.3.3- Fertilisation 67
1.3.4- Elevage 67
1.4- Résultats obtenus 68
1.4.1- Productions et rendements 68
1.4.2- Taux de couverture des besoins céréaliers
69
1.5- Contraintes activité agricole, stratégies de
survie et objectifs prioritaires poursuivis
71
1.5.1- Contraintes de l'activité agricole 71
1.5.2- Stratégies de survie 72
1.5.3- Objectifs prioritaires poursuivis dans le moyen terme
72
2- Typologie des exploitations agricoles familiales
enquêtées 73
2.1- Critères de regroupement 73
2.2- Classification des exploitations familiales 74
3- Caractérisation des groupes d'exploitations agricoles
familiales dégagés 75 CHAPITRE 5 : OBJECTIFS ET STRATEGIES DES
ACTEURS AUTOUR DU PROJET JATROPHA 78
1-Analyse des objectifs et des stratégies paysannes par
type d'exploitation agricole
familiale 78
1.1- Objectifs et plans de campagne 78
1.2- Résultats d'exploitation et stratégies
paysannes 82
1.2.1- Activités agricoles 82
1.2.2- Activités génératrices de revenus non
agricoles 85
1.2.3- Revenus globaux moyens par type d'exploitation et
ventilation par poste de dépenses 85
1.3- Analyse comparative entre stratégies « Jatropha
en haie vive » et « Jatropha en
plein champ » 87
1.3.1- Avantages stratégies paysannes relatives à
l'option « haie vive » 88
1.3.2- Inconvénients ou manques à gagner
liés à la stratégie paysanne 89
2- Analyse des stratégies des acteurs directs du projet
Jatropha agissant au sommet 89
3- Analyse des stratégies et opinions des acteurs
indirects 92
3.1- Au niveau national 92
3.2- Au niveau local 96
4- Synthèse des objectifs et stratégies des
acteurs : les « boussoles intérieures » 98 CHAPITRE 6 :
PROPOSTIONS D'ACTIONS POUR UNE REPONSE APPROPRIEE DU
PROJET AUX BESOINS ENERGETIQUES LOCAUX 102
1- Forces, Faiblesses, Opportunités et Menaces du projet
102
2- Points de vigilance vis-à-vis de la « logique
dominante » 105
3- Propositions sommaires d'actions locales et globales 106
3.1- Au niveau local 106
3.2- Au niveau global 107
CONCLUSION 108
BIBLIOGRAPHIE 112
ANNEXES 118
xiii
Mémoire Master Amadiane DIALLO
INTRODUCTION
Le monde est devenu un " village planétaire »
selon une formule consacrée pour parler du contexte de
mondialisation. Ce processus de globalisation n'est pas toujours porteur
d'opportunités de développement à l'image des technologies
de l'information et de la communication. Il engendre dans son sillage beaucoup
de problèmes dont les conséquences sont souvent
désastreuses pour les populations les plus vulnérables. Dans une
certaine mesure, bon nombre de résolutions de la gouvernance mondiale
pour la mitigation et l'atténuation des effets
néfastes des changements climatiques entrent dans cette
logique. En effet, la promotion à outrance des agrocarburants dans les
pays du sud pour l'approvisionnement des pays du nord en bioénergie
reste problématique. Cette dynamique globale des interactions
environnement et développement se traduit localement par la mise en
oeuvre de projets d'agrocarburants sur les terres arables des pays pauvres.
Dans ces pays, les populations rurales deviennent des " victimes du conflit
pour l'usage des terres, identifié par les «4F»: Food, Feed,
Forest, Fuel (alimentation humaine, cultures pour l'alimentation du
bétail, protection des forêts et de la biodiversité, et
culture destinées à être transformées en carburant)
» (GANDAIS-RIOLLET N., LIPIETZ A., 2008). Cette situation est
créée en grande partie par la logique dominante qui s'appuie sur
des projets de monocultures d'agrocarburants pilotés le plus souvent par
des multinationales.
A côté de cette logique, des projets dits «
d'agrocarburants de proximité » sont mis en oeuvre pour tenter de
trouver des solutions locales au problème global en partenariat avec les
acteurs locaux. Ainsi, deux rapports à la paysannerie s'opèrent
aujourd'hui dans la conduite des projets d'agrocarburants.
Au Sénégal, ces deux modèles existent
à côté du programme national biocarburant lancé par
l'état en 2006. Cependant la « cohabitation » entre les
acteurs locaux, particulièrement les exploitations agricoles familiales
et les projets aux enjeux globaux, suscite beaucoup d'interrogations. Les
détracteurs reprochent généralement aux agrocarburants
d'être à l'origine de beaucoup de méfaits notamment la
volatilité des prix des produits agricoles, la déforestation
massive, l'accaparement des terres fragilisant l'agriculture paysanne, la
compétition avec les cultures alimentaires au risque de voir les
agriculteurs s'y détourner.
C'est dans ce cadre que s'inscrit le champ
d'intérêt de mon mémoire. En effet, je me propose
d'investiguer les stratégies des exploitations agricoles familiales qui
se sont engagées dans les projets d'agrocarburants de proximité.
Dans cette optique, je vais partir des cadres
contextuel, théorique et conceptuel du thème des
agrocarburants avant de m'intéresser spécifiquement à la
relation entre un projet de plantation de Jatropha de proximité et les
exploitations agricoles familiales impliquées dans le département
de Foundiougne au Sénégal. Ainsi, il sera question de la
caractérisation et de la typologie structurelles de ces exploitations,
de leurs contraintes et stratégies de survie et le mode
d'intégration du Jatropha dans leurs systèmes de production.
Ensuite, les logiques des acteurs directs, indirects, locaux et nationaux
seront abordées avant de terminer par des propositions d'actions pour
une réponse appropriée d'un tel projet de Jatropha de
proximité aux besoins énergétiques locaux comme
alternative aux monocultures d'agrocarburants promues par le modèle
dominant.
PREMIÈRE PARTIE : CADRAGE THEORIQUE ET
APPROCHE METHODOLOGIQUE DE L'ETUDE
CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQUE ET CADRE CONCEPTUEL
1- Contexte de la recherche et question de
départ
Développeur, conseiller agricole et rural de
profession, thème de mémoire de master en développement et
gestion de projets ne saurait plus intéressant pour moi que celui ayant
trait aux rapports entre exploitations agricoles familiales et projets
d'agrocarburants. La première raison tient du fait que l'essor des
agrocarburants dans les pays du sud devient une matière à
réfléchir. La seconde procède de la curiosité du
développeur qui a toujours envie d'en savoir plus sur la perception d'un
phénomène global par les « acteurs d'en bas
».
Sur le plan global, les alternatives aux réserves
fossiles qui s'épuisent dans un horizon prévisible, l'adaptation
aux changements climatiques et le respect du Protocole de Kyoto1 sur
les émissions de gaz à effet de serre sont autant
d'éléments qui sont évoqués pour justifier la mise
en oeuvre des projets d'agrocarburants dans les pays du sud
particulièrement. Dès lors, en attendant la fin de «
l'or noir2 » prédite dans 40 ans par les
spécialistes, c'est la ruée vers « l'or vert3
». D'une part, les pays développés, dans le souci de
perpétuer le modèle dominant du développement, cherchent
à contrôler la production, la transformation et la distribution
de
1 Détails donnés plus loin dans le texte
2 Jargon désignant le pétrole
3 Jargon désignant les agrocarburants
2
Mémoire Master Amadiane DIALLO
cette nouvelle énergie. D'autre part, les pays du sud,
au nom du paradigme de développement durable, sont emportés de
gré ou de force dans cette dynamique pour continuer à jouer leur
rôle traditionnel de pourvoyeur de matières premières pour
les pays occidentaux. La carte agricole mondiale change ainsi de visage car il
faut aménager d'autres espaces pour cultiver les agrocarburants ou les
substituer tout bonnement à d'autres cultures fussent-elles
vivrières. Les institutions internationales balisent le chemin en
taillant sur mesure des accords, des traités, voire des directives
favorables à la mise en oeuvre de mégaprojets d'agrocarburants.
Elles tiennent de nouveaux discours du même registre que celui-ci : "
De grandes superficies de terre inexploitées pourraient être mises
en cultures. Quelques 1,6 milliards d'hectares pourraient s'ajouter au 1,4
milliard de terre actuellement cultivée. Plus de la moitié des
terres supplémentaires disponibles se trouve en Afrique et en
Amérique Latine. La plupart des terres disponibles dont la pertinence
serait la plus élevée pour la production de cultures sur surface
non irriguée se trouverait dans ces régions. »
(OCDE/FAO, 2009). Ainsi, l'idée d'une Révolution verte
pour l'Afrique prend forme. Elle se matérialise à travers la
mise en valeur des terres supposées inexploitées avec des
investissements fonciers à grandes échelles. C'est ce qui est
convenu d'appeler les " Land-grabbing ou accaparement des
terres.» (Rapport FAO-OCDE, 2009). Avec toutes ces dispositions
favorables, les multinationales s'activent dans l'acquisition de terres pour
l'installation de monocultures d'agrocarburants afin de se positionner sur le
marché de fourniture d'énergie verte aux grandes
métropoles du monde occidental.
Cette fièvre des biocarburants qui a fini de gagner de
nombreux pays du Sud n'a pas épargné l'Afrique. Le
Sénégal aussi n'a pas échappé à cette
mouvance. En effet, des projets d'agrocarburants commencent à
s'installer dans ses zones rurales. Malgré les nombreux défis qui
se posent à son agriculture notamment l'autosuffisance alimentaire, les
enjeux d'une éventuelle résorption de son déficit
énergétique semblent plus séduire son gouvernement qui a
opté pour une politique agricole favorable aux agrocarburants. C'est
pourquoi, un Programme national biocarburants a été
lancé à côté de celui de la Grande Offensive
pour l'Agriculture, la Nourriture et l'Abondance (GOANA). Il
prévoit, entre autres, la plantation de Jatropha dans toutes les
communautés rurales du pays. A la faveur de cette orientation de
politique agricole, beaucoup d'investisseurs et de promoteurs de projets
d'agrocarburants ont investi les zones rurales. D'aucuns s'adonnent à la
monoculture d'agrocarburants en employant des ouvriers agricoles dans le
défrichage, la mise en défens et la plantation tandis que
d'autres se mobilisent à leur tour pour la mise en oeuvre de projets
d'agrocarburants de proximité en
privilégiant la satisfaction des besoins locaux en
énergie des populations rurales. Cependant, des organisations
faitières paysannes appuyées par la société civile
tirent la sonnette d'alarme sur cette situation qu'elles qualifient de
tentative de déposséder les ruraux de leur terre et d'accentuer
leur vulnérabilité.
Dès lors, en tant que agent de développement
jouissant d'une petite expérience d'appuiconseil aux agriculteurs
sénégalais dans la polyculture élevage, j'ai
été interpellé par ces dynamiques globale et locale faites
de jeu d'intérets. Je me suis demandé si les agropasteurs
sénégalais pouvaient tirer leur épingle du jeu dans ces
logiques d'acteurs complexes. J'ai suivi avec intérêt les
rebondissements des grandes négociations internationales sur les
stratégies d'atténuation et de mitigation à
déployer face aux changements climatiques. Car les résolutions
issues de cette planification du développement par les «
acteurs d'en haut » deviennent, par la force de «
l'économie monde », une voie impérative à suivre
pour les pays du sud pour etre éligibles aux différents
mécanismes d'aide. En effet, les acteurs supranationaux
adoptent un mode de coordination par le marché global entretenu par une
territorialité concurrentielle. Sous le prétexte d'une
participation instrumentale, leurs décisions sont reprises par les
dirigeants nationaux des pays en développement qui, par le biais de la
territorialité politique, l'administrent aux acteurs
infranationaux du 1èr et 2ème niveaux «
néobraudeliens » dont les agriculteurs. (AMOUGOU, 2007).
Pourtant, les logiques de mise en oeuvre des cultures d'agrocarburants
confrontées aux défis de développement agricole et rural
des pays du sud et aux réalités du terrain font apparaître
des contradictions notoires. C'est pourquoi, la pertinence de ce nouveau
modèle normatif de développement agricole et rural imposé
aux pays du Sud est une question qui mérite d'être posée.
Ainsi, beaucoup d'interrogations se font sur les rapports des projets
d'agrocarburants aux défis de développement de la paysannerie des
états pauvres du sud. Toutefois, la relative liberté
d'exploitation de ses terres dont jouit la paysannerie de beaucoup de pays de
l'Afrique subsaharienne contrairement à celle des pays de
l'Amérique latine, constitue un point fort.
Au Sénégal, certains agropasteurs sont
impliqués dans des projets d'agrocarburants de proximité. Les
relations entre ces paysans sénégalais et les projets
d'agrocarburants de proximité restent une énigme à
élucider. Pour m'inscrire dans cet exercice de compréhension, je
me suis posé une question de départ à savoir comment les
exploitations agricoles familiales arrivent à s'impliquer dans les
projets d'agrocarburants malgré tous les défis qu'elles doivent
relever. Dans le souci d'une plus grande précision, cette question de
départ a été transformée en question de recherche
en ces termes : comment, à partir de leur assolement,
des
4
Mémoire Master Amadiane DIALLO
exploitations agricoles familiales parviennent-elles
à connecter les stratégies de gestion de leur système de
productions agricoles aux enjeux d'un projet de plantation de
Jatropha?
2- Hypothèses et objectifs de recherche
Pour apporter provisoirement des réponses à la
question de recherche, des hypothèses ont été ainsi
formulées :
? La primauté des objectifs de subsistance familiale
garantie par la sécurisation du foncier et du système de
productions oriente les exploitations agricoles familiales vers des
stratégies d'intégration minimale du projet de plantations de
Jatropha de proximité.
? Les logiques des exploitations agricoles familiales comme
acteurs dans la mise en oeuvre des plantations de Jatropha sont
déterminées par l'opportunité de renforcement du marquage
foncier pour sauvegarder leur système de productions tout en se
connectant aux enjeux matériels du projet.
Cette étude s'inscrit dans le cadre d'un travail
académique qui met l'étudiant professionnel que je suis dans un
exercice de confrontation de la théorie à la
réalité du terrain. Elle est aussi orientée vers l'action
dans le souci de converger avec les objectifs du Master
DéveloppementGestion de projets. L'objectif général de
l'étude, repris plus en détails dans la partie «Pertinence
du sujet », est de tenter, à travers ce projet de plantations de
Jatropha, une analyse des stratégies des paysans face aux enjeux globaux
des agrocarburants. Il sera donc question de la nature du rapport des
exploitations agricoles familiales au projet de plantation de Jatropha.
D'une manière spécifique, pour la
vérification des hypothèses, il est envisagé de :
? faire le point sur le contexte global des projets
d'agrocarburants et les points de vues divers y afférents
? faire le point sur les péripéties du
développement agricole et rural au Sénégal et sur le
projet de Jatropha du cas d'étude
? mettre en exergue, à travers une
caractérisation et une typologie, la place qu'occupe la subsistance
familiale dans la structure et le fonctionnement des exploitations agricoles
familiales
? analyser les motivations de ces exploitations et essayer de
comprendre la pertinence de leurs stratégies à côté
de celles des autres acteurs de ce projet Jatropha
? proposer, en marge du modèle dominant, des voies et
moyens pour que ce projet Jatropha puisse participer véritablement
à la satisfaction des besoins énergétiques des
collectivités locales concernées.
3- Pertinence du sujet
L'intérêt du sujet résulte des enjeux des
projets d'agrocarburants pour les agropasteurs du sud en général
et ceux de mon pays en particulier, dans un contexte mondial des changements
climatiques. En effet, les opinions des agropasteurs sont souvent
occultées dans l'analyse de ces mutations auxquelles ils sont
généralement les plus grands perdants. Ce sont plutôt les
hommes d'affaire qui commencent à investir le secteur à la
recherche de profit sans se soucier des intérêts des populations
locales. Toutefois, d'autres projets d'agrocarburants, plus proches des acteurs
locaux et en marge du modèle dominant, sont en train de faire leurs
petits pas.
Beaucoup de campagnes de dénonciation sont
menées sous la houlette de la société civile contre le
développement des projets d'agrocarburants et peu d'études ont
été menées dans un contexte de proximité avec des
agropasteurs impliqués. Les critiques des détracteurs, plus que
légitimes et pertinentes, ne sont généralement
basées que sur la dichotomie entre cultures vivrières et
agrocarburants. Au-delà de ses appréhensions bien fondées,
il serait aussi intéressant d'approcher les agropasteurs participant
à ces types de projets pour mieux les connaître et essayer de
comprendre leurs perceptions et les stratégies qu'ils adoptent face
à cette fièvre des agrocarburants.
Les résultats des études de cette nature peuvent
permettre de mieux comprendre les stratégies des " acteurs d'en bas
» face aux enjeux et logiques des projets parfois divergents de leurs
préoccupations majeures. Dans cette optique, la question traitée
trouve toute sa pertinence dans le fait qu'elle contribuera à
l'amélioration des connaissances sur les subtilités ou
capacités des agriculteurs sénégalais à
créer une rencontre entre leurs objectifs traditionnels de productions
agricoles et les enjeux locaux des projets d'agrocarburants de proximité
sans compromettre les fondamentaux de leurs structures. Elles serviront
certainement de jalons à des études sur les logiques d'acteurs et
la veille nécessaire à la mise en oeuvre de projets
d'agrocarburants de proximité dans les pays en développement
comme le Sénégal pour qu'ils ne versent pas dans les mémes
travers du modèle dominant. En effet, la prise en compte de ces aspects
mérite une attention particulière pour prétendre impulser
une quelconque politique ou stratégie de développement avec le
monde rural.
6
Mémoire Master Amadiane DIALLO
4- Clarification de concepts
4.1- Agrocarburants
Un biocarburant ou agrocarburant est un carburant produit
à partir de matériaux organiques renouvelables et non-fossiles,
pouvant se substituer aux carburants pétroliers pour faire fonctionner
des moteurs.
La désignation des biocarburants par agrocarburants
vient des mouvements sociaux qui soutiennent que ces derniers ne peuvent pas
être appelés «bio» car ne favorisant pas la vie
de la paysannerie. D'ailleurs Olivier DE SCHUTTER4 propose une
révision des terminologies "biocarburant ", "
bioéthanol " et "biodiesel" pour éviter une
confusion avec le mode de production biologique qui, selon une directive du
règlement du Conseil de l'Union Européenne, constitue un mode
particulier au niveau de l'exploitation agricole.
Au-delà de ces positions non moins pertinentes,
l'utilisation ici du terme Agrocarburants se justifie plutôt par son
préfixe «agro» qui renvoie plus à Agriculture
et Agriculteurs ou Agropasteurs5, les principaux centres
d'intérêt du mémoire.
Il existe deux grandes familles de biocarburant avec des
caractéristiques différentes :
? l'éthanol qui est utilisé dans les moteurs de
type « essence » ; il est obtenu à partir
de plantes sucrières (canne à sucre, betterave) et de plantes
amylacées (blé, maïs, etc.)
? les esters méthyliques d'huiles végétales
ou biodiesels qui sont utilisés dans les moteurs de type «
diesel » ; ils sont à base d'huiles végétales
(colza, tournesol, soja, palme, graines de coton, Jatropha, etc.)
Pour améliorer les connaissances sur les
agrocarburants, les scientifiques travaillent sur des filières
regroupées en trois générations.
Les agrocarburants de 1ère
génération sont les plus connus avec une technologie bien
maîtrisée. Ils peuvent être fabriqués à partir
de la trituration de graines des plantes comme le colza ou le tournesol pour
obtenir du biodiesel qui peut être incorporé par
estérification à un niveau de 15% avec du diésel dans les
moteurs du même nom. Il y aussi la filière de l'éthanol
issu de la fermentation alcoolique des sucres contenus dans le blé, le
maïs ou la betterave et qui est incorporé à l'essence. A
côté de ces transformations industrielles, les agriculteurs ont
mis en place une filière dite d'huile végétale pure (HVP),
beaucoup plus courte, basée sur
4 Professeur de droit international a l'UCL,
Rapporteur spécial des Nations-Unies sur le droit à
l'alimentation
5 Agriculteur et éleveur en même temps : c'est le
cas le plus fréquent au Sénégal
l'extraction directe de l'huile par pressage. Cette huile est
utilisée directement dans les moteurs diesel des tracteurs par
exemple.
Les biocarburants de 2ème
génération sont eux fabriqués à partir de
végétaux et de résidus de végétaux. Les
scientifiques sont à la recherche de l'option technologique la plus
écologique.
Enfin, viennent les biocarburants de 3ème
génération qui reposent sur la production d'hydrogène par
des micro-organismes mais avec des technologies encore au stade embryonnaire.
Toutefois, il a été mis au point, à partir d'algues
marines, un biocarburant de 3ème génération appelé
algocarburant.
4.2- Jatropha
Le nom Jatropha viendrait de la combinaison de deux mots grecs
"Iatros" et "trophos" qui donne en français "médecin" et
"nourrice". Il est également appelé Pourghère. C'est un
arbuste sauvage de la famille des euphorbiacées qui pousse dans les
zones arides d'Amérique centrale, d'Asie et surtout d'Afrique. Le
Jatropha était couramment utilisé pour réaliser des
clôtures autour des jardins ou le long des chemins. La toxicité de
ses parties aériennes lui évite en effet d'être
brouté par les animaux. Bien connu des paysans, il est utilisé en
médecine traditionnelle. Son huile a des propriétés
purgatives à petite dose et sert à traiter certaines maladies de
peau ou à soulager les rhumatismes. Elle trouve d'autres utilisations,
comme la fabrication de savon artisanal ou l'éclairage avec des lampes
rudimentaires. Le latex, utilisé sur les blessures, aurait des
propriétés antiseptiques et coagulantes. Toutefois, l'ingestion
d'huile ou de graines peut être mortelle à doses plus fortes.
Chauffée à plus de 110 degrés, cette
huile affiche les mêmes propriétés que le diesel.
Aujourd'hui beaucoup de compagnies aériennes sont en train de le tester
pour une alternative au kérosène. Des vols test avec l'huile de
Jatropha ont été effectués avec succès. C'est
pourquoi, malgré des études jusque-là insuffisantes
à son sujet, le Jatropha devient de plus en plus un enjeu
économique mondial.
Dans le cadre d'une étude sur les potentialités
de développement de la culture du Jatropha à grande
échelle, le Centre de coopération Internationale en Recherche
Agronomique pour le Développement (CIRAD) a réalisé un
rapport de synthèse des informations bibliographiques disponibles sur la
plante. Pour une meilleure description du Jatropha, les paragraphes
ci-après en reprennent quelques éléments.
8
Mémoire Master Amadiane DIALLO
4.2.1- Origine géographique :
"Le Jatropha est une plante ancienne. Des formes fossiles
datant de l'ère tertiaire auraient été découvertes
au Pérou. Son origine est néanmoins controversée puisque
certains auteurs la situent dans les régions sèches du
Brésil (Caatingao, Etat de Ceara) alors que pour d'autres, ce serait
plutôt l'Amérique centrale ou le Mexique (Wilbur, 1954 ; Aponte,
1978). Il semble que ce soit cette dernière origine qui soit
officiellement retenue. Cependant, son existence très ancienne
établie par les traces fossiles remonte à la période
où les continents n'étaient pas encore individualisés,
aussi beaucoup d'hypothèses peuvent être envisagées. Il
semble que la plante fut introduite au 16e siècle aux îles du Cap
Vert par les marins portugais, puis en Guinée Bissau pour se
répandre ensuite en Afrique et en Asie. On la trouve actuellement dans
toutes les régions tropicales et intertropicales ainsi que sur les
îles tropicales.
Son aire de distribution naturelle se situe principalement
dans les zones arides et semi-arides (Jones et Miller, 1992 ; Makkar et al.,
1997) mais on la rencontre également dans les régions tropicales
humides comme le Guatemala (> 4000 mm/an), ou le Nord du Vietnam et de la
Thaïlande. Ainsi, Rijssenbeek et al. (2007) situent son aire de culture
entre les latitudes 30°N et 35°S."
4.2.2- Description botanique et diversité
génétique :
" Le Jatropha se présente sous la forme d'un arbre
ou arbuste de 2 à plus de 10 m de hauteur. Son écorce grise ou
roussâtre est marquée de taches blanches. La feuille, en forme de
coeur, est plus ou moins découpée en 3 à 5 lobes. Ses
branches contiennent du latex. Souples quand elles sont jeunes, elles
deviennent cassantes avec l'âge, ce qui peut gêner les
opérations de récolte. Sa floraison est liée au
régime des pluies. L'arbre donne des fruits de couleur jaune, qui
deviennent marron foncé en séchant. Les fruits contiennent 1, 2
ou 3 graines riches en huile. La multiplication du Jatropha peut être
réalisée par graines ou par boutures ".
"En 1919, Heim témoigne de la découverte
d'une nouvelle plante oléagineuse, dans le SudOuest de Madagascar, le
Betratra (Jatropha mahafalensis), originaire du plateau de Mahafaly, qui pousse
et se reproduit comme le Jatropha curcas L. Houard (d'après Droit,
1932), signalait au Bénin 2 variétés distinctes, qui
différaient par la coloration des feuilles : l'une à feuilles
vertes, très répandue dans cette région, dont les graines
étaient nettement plus grosses, avec un tégument de teinte brun
rougeâtre, et l'autre à feuilles rouges, beaucoup moins commune,
appelée Jatropha gosipephelium. Ses feuilles étaient plus
petites. D'après Prabakanran et al. (1998), il existerait des hybrides
naturels de Jatropha curcas L. avec
d'autres espèces du même genre. Ainsi,
Jatropha tanjorensis serait un hybride naturel entre J. curcas et J.
gossypifolia. Mais cet hybride ne donne pas de graines et il est surtout
utilisé pour des haies décoratives. Il y aurait aussi un autre
hybride naturel entre Jatropha curcas et Jatropha canascens, également
stérile.
Une attention particulière est à porter
à la variété dite mexicaine qui ne serait pas toxique.
Schmook et Serralta-Peraza (1997) affirment que dans les régions de
Quintana Roo et de Campeche au Yucatan (Mexique), les graines sont
utilisées en alimentation humaine après avoir été
grillées, ou dans d'autres cas, l'huile est extraite des amandes pour
être utilisée dans la cuisine".
L'espèce la plus répandue au
Sénégal est le Jatropha curcas. Dans la classification des
plantes publiée en 1753 par le célèbre botaniste
suédois Linné, sa taxonomie est présentée ainsi
qu'il suit :
? Règne des Eucaryotes ; Sous-règne des
Cormobiontes ;
? Embranchement des Spermatophytes ; Sous-embranchement des
Angiospermes /Magnoliophytina ;
? Classe des Dycotylèdones/Magnoliatae; Sous-classe
des Rosidae ;
? Ordre des Euphorbiales ;
? Famille des Euphorbiaceae ; Genre Jatropha L. et
Espèce Jatropha curcas.
Figure 1 : Plant de Jatropha Figure 2 : Feuilles et
fruits de Jatropha
(Source :
fr.wikipedia.org,
2011) (Source : FAO, 2008)
10
Mémoire Master Amadiane DIALLO
(Source : FAO, 2008) (Source :
fr.wikipedia.org,
2011)
4.2.3- Une estimation du rendement jugée
raisonnable :
"Une étude réalisée par
l'IFEU6 (Reinhardt, 2008), à partir des données du
Central Salt and Marine Chemicals Research Institute (Inde) et de
l'Université de Hohenheim (Allemagne), donne des prédictions de
rendements en graines sèches selon 3 scénarios de production : un
scénario actuel, un scénario « optimisé », et un
scénario « idéal ». Il ressort que le rendement de 5
t/ha de graines sèches, souvent annoncé comme facilement
réalisable, est en réalité à considérer
comme un niveau de rendement optimal avec des techniques culturales
optimisées et des écotypes performants et adaptés à
la zone considérée".
Les données de cette étude sont reprises dans le
tableau ci-après.
Tableau 1 : Rendement en graines sèches à
5,8% d'humidité (kg/ha/an) selon 3 scénarios de
culture
Scénario
|
Année 1
|
Année 2
|
Année 3
|
Année 4
|
Année 5- 20
|
Moyenne
|
1
|
0
|
268
|
803
|
1 606
|
1 606
|
1 418
|
2
|
0
|
535
|
1 606
|
2 676
|
2 676
|
2 382
|
3
|
496
|
991
|
2 974
|
4 956
|
4 956
|
4 436
|
Source : IFEU, 2007
NB :
1 : scénario reflétant les conditions actuelles de
culture du Jatropha (sans optimisation)
2 : scénario avec optimisation de l'itinóaire
technique
3 : scénario avec optimisation de l'itinéraire
technique et amélioration variétale
4.2.4- Extraction de l'huile :
"Traditionnellement, l'huile de Jatropha était
extraite par des procédés simples : les graines étaient
d'abord décortiquées, puis les amandes bouilles dans l'eau.
L'huile surnageant dans le récipient était alors facile à
récupérer.
6 Institut Für Energie- und Umweltforschung (Allemagne)
11
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Pour l'extraction de graines oléagineuses à
des fins commerciales, on utilise le pressage mécanique ou l'extraction
par solvant. La première méthode permet d'extraire entre 90 et 95
% de l'huile de la graine avec une presse, et la seconde 99 % ".
4.2.5- Impact potentiel sur l'environnement :
Malgré les intérêts potentiels que
présente le Jatropha pour la production de biocarburant surtout au
bénéfice des collectivités locales, il n'en demeure pas
moins des questions à prendre en compte quant à son impact
potentiel sur l'environnement.
? Jatropha et biodiversité : dans
plusieurs pays comme l'Archipel des Comores, l'Est du Mozambique, l'Australie
occidentale, le Jatropha a été classé comme une plante
à caractère invasif où sa présence est
considérée comme problématique (LOW et al, 2007). La
difficulté à le contrôler a ainsi conduit l'Australie
occidentale à interdire sa culture en 2006. Mais le caractère
invasif du Jatropha n'est pas prouvé, et dépend des conditions
pédoclimatiques des zones considérées. La question de la
difficulté à contrôler son expansion peut toutefois se
poser en cas de développement à grande échelle. D'autre
part, la culture sur des zones plus ou moins dégradées est
susceptible de se substituer à d'autres espèces
végétales et des espèces animales associées. Il y
existe donc un réel risque de perte de biodiversité si de vastes
superficies sont implantées en Jatropha.
? Risques phytosanitaires avec une mise en
culture de grandes superficies Jatropha sur les cultures vivrières comme
le manioc qui appartient à la même famille des
euphorbiacées. L'emploi éventuel de produits phytosanitaires
à grande échelle pour contrôler ces ravageurs aura
également un impact sur la faune locale spécifique de ces
zones.
? La pollution due à la
toxicité du tourteau est à prendre en compte en cas de son
utilisation comme engrais organique. Mais aucune étude n'est aujourd'hui
disponible sur les risques de contamination du sol, des nappes
phréatiques, ou des cultures alimentaires par les substances toxiques
présentes dans le tourteau. Ce fut le cas du tourteau de ricin qui est
utilisé comme engrais organique en agriculture biologique en France
alors qu'aucune étude de toxicité n'a été
réalisée préalablement (MAURA cité par DOMERGUE
& FIROT, 2008).
? Ressource en eau : une étude
réalisée en Afrique du Sud par Holl et al (2007) sur l'impact de
la culture de Jatropha sur le milieu naturel a évalué les besoins
en eau de la culture par un suivi régulier de la consommation de plants
de 4 et 12 ans. Il s'avère que dans la plupart des cas, la consommation
de la culture (entre 200 et 1200 mm) est largement inférieure à
celle de la végétation en place sur un pas de temps annuel.
L'étude en déduit que
12
Mémoire Master Amadiane DIALLO
le risque de diminution de débit en eau des bassins
versants n'est pas à retenir et que, de ce point de vue, la culture
pluviale du Jatropha n'aura pas d'impact négatif sur l'environnement.
L'irrigation de telle culture n'étant pas envisagée, l'auteur
considère que, pour être économiquement
intéressante, elle ne peut s'envisager qu'à partir d'une
pluviométrie minimale de 800 mm.
4.3- Exploitation agricole familiale et système de
production
Le concept d'" exploitation agricole familiale »
est pluriel. En effet, parler d'exploitation agricole familiale
diffère de sens selon les pays et les contextes. Il trouverait son
origine dans l'organisation de la production agricole en Europe. C'est à
partir du début du XXème siècle que les
agronomes et les économistes agricoles l'ont adopté dans leur
discours théorique en faisant référence au modèle
d'agriculture occidentale où la famille met en oeuvre ses moyens pour
produire des denrées agricoles. Ensuite, la notion s'est
appliquée à toutes les agricultures dont l'organisation sociale
de la production est proche de ce modèle. (CIRAD-GRET, 2009)
Malgré la difficulté de sa
généralisation pour des milieux de réalités
différentes, les analystes agronomiques et économiques y font
recours en prenant le soin de l'adapter au contexte.
Au Sénégal, BENOIT-CATTIN et Jacques FAYE, en
1982, définissaient l'exploitation agricole familiale comme «
une unité de production constituée par l'ensemble des membres
d'un groupement familial qui partagent la même cuisine et dont
l'aîné assure la charge en y affectant une partie de sa
production, en contrepartie du travail que lui allouent les autres membres du
groupement..»
Dans beaucoup de sondages et d'études officielles
réalisées au Sénégal, le dernier Recensement
National de l'Agriculture (RNA) notamment, l'exploitation agricole familiale
est considérée comme étant un " groupe familial au
sein duquel s'organisent la production agricole, la préparation et la
consommation des repas ». Cette dernière définition
sera prise comme référence pour ce travail.
La notion d'exploitation agricole peut être
approchée de celle de " système de production agricole »
définie par Philippe JOUVE comme un " ensemble structuré
de moyens de production (force de travail, terre, équipement,...)
combinés entre eux pour assurer une production végétale
et/ou animale en vue de satisfaire les objectifs des responsables de la
production ». Comme tout système, il se caractérise
donc par sa structure (ses composantes), son fonctionnement (les relations
entre composantes), la régulation (ajustement) ou
mécanismes d'adaptation (sa dynamique d'évolution)
et le degré d'ouverture (relations avec l'extérieur).
4.4- Assolement et subsistance familiale
Selon le mémento de l'agronome (CIRAD-GRET, 2009),
« l'assolement de l'exploitation est la répartition à
une période donnée des surfaces entre les différentes
productions végétales. Il résulte de la combinaison des
systèmes de culture pratiqués dans les différentes
unités du milieu. L'assolement est un concept beaucoup plus proche des
préoccupations de l'agriculteur que le système de culture,
notamment lorsque l'assise foncière de l'exploitation varie peu dans le
temps. »
Le chef d'exploitation agricole familiale affecte des
productions végétales aux différentes parcelles dont il
dispose en tenant compte des considérations techniques et
socioéconomiques. C'est pourquoi, le choix d'un type assolement par
rapport à d'autres a beaucoup de significations sur les motivations et
stratégies des exploitations agricoles familiales.
La subsistance familiale est tout ce qui est nécessaire
à la nourriture et à la survie de la famille. Dans cette
étude, il s'agit principalement de la capacité des exploitations
agricoles familiales à satisfaire leurs besoins de base (nourriture,
santé, éducation, habillement) à travers leurs productions
agricoles et autres activés. D'où l'importance d'un bon
assolement pour assurer la substance familiale.
4.5- Marquage foncier
La plantation d'arbres dans les paysages agraires de l'Afrique
noire d'une manière générale et du Sénégal
en particulier permet de marquer le domaine concerné. Ce marquage
foncier par l'arbre peut être assimilé à la signification
du bornage des propriétés foncières chez les occidentaux.
C'est dans ce sens que PELISSIER, parlant de l'Afrique, a affirmé que
« le paysage végétal est l'empreinte visible des droits
fonciers, par nature inaliénables, détenus par les premiers
défricheurs et par leurs descendants. Si, en droit traditionnel, la
terre porte seulement des droits d'exploitation, le concept de
propriété s'applique intégralement à l'arbre. Mais
surtout l'exploitation de l'arbre signifie le droit à l'exploitation du
sol: elle en est le signe et, si nécessaire, la preuve juridique. De
même, c'est l'appropriation de l'arbre qui précède et
entraîne celle de la terre ». (PELISSIER, 1980).
4.6- Acteurs, projets, stratégies et logiques
d'acteurs
Selon Frédéric DEBUYST, « les acteurs sont
les individus et groupes sociaux qui interviennent, à plus d'un titre,
dans une action et se sentent impliqués dans les objectifs de
14
Mémoire Master Amadiane DIALLO
cette action. » Ces acteurs, pense-t-il,
agissent ou réagissent positivement ou négativement á des
décisions ou objectifs. Il en distingue deux types: les acteurs
institutionnels qui disposent d'une autorité légitime ou d'un
pouvoir accordé et les acteurs non-institutionnels qui n'ont pas ces
prérogatives.
Phillipe DE LEENER lui fait une différenciation entre
les acteurs directs et indirects, visibles et invisibles, agis et agissant. Par
rapport à l'action, les acteurs agissant sont proactifs alors que ceux
agis sont réactifs.
Pour le même auteur, un projet est
caractérisé par deux dimensions et quatre espaces. Les deux
dimensions sont l'action c'est-á-dire « le faire » et la
structure composée de l'organisation ("comment être
ensemble") et de l'institution ("pourquoi être
ensemble").
Concernant les quatre espaces, il s'agit de :
? cadre institutionnel du projet : chef, agents, comptables,
service financier par exemple ? population-cible : catégories d'acteurs
concernés
? Interface entre projet et population-cible : réunions,
ateliers, lieux physiques particuliers
? autres acteurs de l'environnement du projet: exemple des
ONGD du Nord et bailleurs qui définissent les critères
d'éligibilité de projets.
Dans son cours intitulé « Conception et
évaluation économique de politiques et projets »,
André NSABIMANA définit la notion de projet comme étant
« l'ensemble des actions et des interventions que des personnes (ou
une organisation humaine) réalisent afin de provoquer des changements et
atteindre des résultats ».
Pour Frédéric DEBUYST, la stratégie peut
être définie comme « la conception et le mode
d'actualisation de ressources combinées en vue d'un but ». Il
en distingue deux types que sont : les stratégies relationnelles qui
« répondent à des options et logiques d'intervention/actions
concernant les acteurs - directement impliqués, alliés ou
adversaire » et les stratégies de réalisation qui, par
contre, concernent « les voies et contenus des réalisations
pour la poursuite des objectifs ».
Le concept de « logiques d'acteurs » permet
d'appréhender le comportement des acteurs sur un territoire et parfois
de prévoir leurs réactions à l'introduction de nouveaux
projets sur l'espace considéré. En effet, Frédéric
DEBUYST, parlant des logiques d'acteurs affirme que: « les acteurs
sont mues par des motivations propres, liées à leur trajectoire
personnelle,
épousent des intérêts,
commandés en partie par leur position sociale, leur insertion dans une
institution ou organisation sociale, etc. En marge des objectifs qu'ils
explicitent, ils orientent, eux aussi, leurs actions en fonction d'objectifs
implicites correspondant à leurs intérêts
réels». Il pense que l'acteur, ne cherchant pas coûte
que coûte la meilleure solution à tout problème, choisit la
solution qui correspond à un seuil minimal de satisfaction.
D'autre part, Michel Crozier analyse le comportement des
acteurs selon deux grands principes :
? « Le comportement d'un acteur, a toujours un sens
rapporté à son contexte : il ne peut pas être rationnel par
rapport à des objectifs définis, l'acteur est rationnel par
rapport à des contraintes et des opportunités d'une part, par
rapport au comportement des autres d'autre part.
? La rationalité limité : il est illusoire
de penser que chaque acteur cherche la meilleure solution à tous les
problèmes. »
Philipe DE LEENER et DUPRIEZ ont quant à eux introduit
la notion de « boussole intérieure » qui
suggère de partir de l'idée que « les acteurs, qu'ils
soient paysans, chercheurs ou développeurs, sont à tout moment
partagés entre plusieurs objectifs qui peuvent se révéler
mutuellement exclusifs et dont il faut donc pourtant tenir compte ».
C'est l''ensemble des objectifs, éventuellement contradictoires,
que le paysan poursuit à travers une même activité ou une
méme production qui constitue ce qu'ils appellent sa boussole
intérieure. Selon toujours DE LEENER, cette « boussole est
d'autant plus complexe qu'il s'implique dans des activités
différentes ». Il donne l'exemple du paysan confronté
à plusieurs choix d'emblavures poursuivant des objectifs
contradictoires. Il est obligé de privilégier tel objectif
plutôt que tel autre pour s'en sortir. Toutefois, méme s'il
accorde la priorité à un objectif, cela ne signifie pas pour
autant qu'il sacrifiera ses autres objectifs cruciaux tels que nourrir la
famille ou protéger la terre ou encore maintenir la paix sociale. Au
contraire, poursuit l'auteur « il va tenter de forcer un compromis
entre les différents objectifs. Il visera ce qu'on appelle un
optimum circonstanciel qui tient compte autant que faire se peut des autres
objectifs qu'il poursuit. Cet optimum dépend des circonstances,
c'est-à-dire de sa situation précise lorsqu''il prend sa
décision, des paris qu'il fait sur l'avenir, des risques qu'il est
prêt à accepter, de la perception qu'il a des contraintes du
moment, etc. En dosant ses efforts et en répartissant ses facteurs de
production entre ses différentes spéculations sur un même
champ, il tentera de réussir sur tous les tableaux. »
16
Mémoire Master Amadiane DIALLO
4.7- Opérationnalisation des concepts
déterminants
Pour cette étude, j'ai voulu m'appesantir
particulièrement sur les acteurs clé que sont les exploitations
agricoles familiales tout en m'intéressant aux stratégies des
autres acteurs directs et indirects sans oublier de tenir compte de
l'environnement du projet en question.
En effet, pour paraphraser Etienne VERHAEGEN (2001), il s'agit
de discuter les tenants et les aboutissants d'un cas concret de projet
de plantation de Jatropha à partir de « . .son processus de
diffusion en termes de logique d'acteurs individuels d'une part et les
règles et normes collectives d'autre part..». Pour cela,
à la suite de YUNG et CHAUVEAU, il pense qu'il faut « passer
d'une approche déterministe, focalisé sur l'innovation-produit,
à une approche centrée sur les acteurs et privilégiant
l'analyse de l'innovation-processus ... Dans le cours du processus,
l'innovation-produit change le plus souvent de nature et de
propriétés sociales car les enjeux qui lui sont associés
se transforment du point de vue des acteurs engagés dans ce processus
». Dans le cas échéant, il s'agit d'une
innovation qui est au début de son processus mais
déjà adoptée par certains producteurs selon leur propre
vision. D'où le caractère prospectif du travail que j'entreprends
sans avoir l'ambition de cerner tous les contours de la complexité des
logiques d'acteurs du projet.
C'est pourquoi, je vais privilégier le schème
«boussole intérieure et optimum circonstanciel» de
DUPRIEZ et DE LEENER comme fil rouge. Pour l'opérationnalisation de ce
modèle d'analyse, je vais mobiliser, en partie, les outils
d'étude de la gestion technicoéconomique de l'exploitation
agricole qui permettent de décrire les pratiques des agriculteurs,
d'expliciter leur logique avant de formuler des propositions. La
démarche est basée sur la reconnaissance du savoir-faire paysan
en s'appuyant sur les principaux éléments d'analyse suivants
(CIRAD-GRET, 2009):
? Comprendre ce que font les agriculteurs, comment et pourquoi
:
o comment les agriculteurs combinent-ils plusieurs
activités et pratiques agricoles au sein de leur exploitation ?
o quelle est la rationalité de leurs pratiques ? quels
sont les problèmes techniques et économiques auxquels ils se
trouvent confrontés ? Quelles sont les contraintes qui limitent le
développement de leur exploitation ?
? Evaluer les résultats obtenus :
o quelles sont les performances techniques obtenues pour chacune
des activités ?
o quelles sont les performances économiques globales de
l'exploitation, en termes de richesse créée et de revenu de
l'agriculteur ?
Ce processus va permettre d'opérationnaliser et
d'apprécier le concept de subsistance familiale par le biais
des indicateurs comme Taux d'activité, Taux de satisfaction en Traction
animale, Taux d'Equipement en houe, Taux d'Equipement en Semoir, Taux de
couverture en Céréales, Part revenu agricole dans le revenu
annuel global, Part des dépenses de subsistance dans le revenu annuel
global.
Le concept d'exploitation agricole familiale va aussi
être mis en exergue par le biais d'une caractérisation et d'une
typologie utilisant les mémes indicateurs.
Le marquage foncier sera apprécié par le
taux de plantation d'arbres dans ou autour des parcelles de cultures.
Les stratégies d'intégration minimale
peuvent être décelées à travers la planification ou
le choix d'une option de plantation moins bouleversante de l'assolement
habituel.
Concernant les stratégies et logiques d'acteurs,
le concept acteur peut être subdivisés en deux dimensions à
savoir direct et indirect et en composantes que sont :
acteurs " au sommet » et acteurs " à la base
». Les indicateurs pour les appréhender sont : capacité
d'influence, capacité de manipulation, l'identification des
objectifs.
5- Controverses autour des agrocarburants
5.1- De l'historique des politiques agricoles mondiales aux
enjeux et logiques globales
des agrocarburants
Selon Jean-Philippe PEEMANS, les politiques agricoles
dominantes actuelles " sont le résultat de stratégies
d'acteurs qui systématiquement depuis des générations ont
cherché à remodeler la pluralité des modèles de
développement préexistants selon une logique unique qui impulse
leurs seuls intérêts et impose leur pouvoir de décision.
». Citant LANG et HEASMAN (2004), il précise que "la
marchandisation-commodification du monde, et son impact destructeur sur
l'agriculture et la paysannerie est la manifestation la plus visible de
l'extrême violence de ce modèle dominant ». En outre,
" du point de vue environnemental cette logique repose sur une
instrumentalisation sans limite de la nature et des espèces
végétales et animales, tandis que du point de vue social, elle
provoque une marginalisation et une destruction systématiques de la
paysannerie (MC MICHAEL P., 2000) ».
Dans le cadre du cours intitulé « Acteurs et
territoire » (DVLP2335, 2010) qu'il a dispensé avec Etienne
VERHAEGEN, un survol historique de l'évolution des politiques agricoles
dominantes a été réalisé. Les paragraphes qui
suivent en sont une synthèse.
18
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Tout d'abord, il faut souligner que les politiques agricoles
dans le monde ont été longtemps influencées par le
modèle dominant des grandes puissances. Depuis la seconde guerre
mondiale, les résultats spectaculaires du New Deal7
aux Etats unis d'Amérique, notamment les surplus agricoles exportables
dégagés, ont fortement orienté toutes les politiques
agricoles de modernisation. Les puissants investisseurs de l'agro-alimentaire,
en quête de conditions de rentabilité de leurs activités,
se ruent dans les pays du sud.
Pendant la décolonisation et la guerre froide, le
paradigme de développement fut la modernisation avec un rôle
central de l'Etat. Le développement est ainsi vu comme « un
processus de rattrapage et les paysanneries perçues comme figées
dans les traditions ». La production agricole et le travail paysan
étaient alors les ressources pour le développement industriel et
la consolidation des Etat-Nations.
Dans les années 1970, les limites de ce modèle
mènent à l'ouverture au commerce international. Des
réformes agraires et foncières vont faciliter les politiques
patrimoniales étatiques des ressources naturelles et les grands projets
communément appelés « éléphants blancs
». Dans les pays sahéliens, des grosses sociétés
d'encadrement et commerciales orientées vers les cultures de rente ont
été mises en place.
C'est à partir des années 1980 que le rôle
des Etats-Nations dans le développement a été
redéfini. Désormais le développement doit répondre
au processus continu d'adaptation aux exigences de la libéralisation et
de la globalisation des marchés. Le Consensus de Washington assigne
désormais aux Etats le rôle de facilitateurs de
l'intégration des populations aux marchés et logiques globaux.
Les espaces locaux deviennent alors les supports des « pôles de
performances » pour répondre aux exigences de la demande et
des conditions des marchés globaux.
Les Plans d'Ajustement Structurel (P.A.S.) ont
été imposés aux états au début des
années 80 en contrepartie de 1'octroi de nouveaux préts ou de
l'échelonnement d'anciens préts par le FMI et la Banque mondiale.
Cette période qui s'étend de 1980 à 2000, coïncide
avec la montée des grandes préoccupations environnementales
globales (Conférences des Nations Unies sur l'Environnement., la
Biodiversité, le Climat). Les grands projets ont été
abandonnés au profit de projets locaux. Les maîtres mots
deviennent : Décentralisation/Bonne gouvernance/Développement
participatif. Les acteurs locaux sont devenus «les partenaires »
du développement. Toutefois, les territoires locaux sont toujours
intégrés à l'espace global.
7 Terme désignant la politique anti-crise de Franklin
Roosevelt menée entre 1933 et 1935 notamment le soutien aux prix
agricoles
Les politiques d'appui à la privatisation de la terre
sont encouragées sous le prétexte de sécuriser les
investissements pour améliorer la productivité. C'est ainsi que
l'accès aux ressources aux " out-growners » ou "
agri-businessmen » a été facilité et
élargi.
A partir des années 2000, le contexte des changements
climatiques, de la pénurie des ressources renouvelables notamment le
pétrole sont en-tête de tous les agendas politiques sans oublier
les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) qui
stipulent dans ses objectifs 7 et 8 respectivement : Assurer un
environnement durable et Mettre en place un partenariat mondial pour le
Développement.
A cette période, le grand casse-tête qui se pose
à l'humanité reste l'alternative à l'" or noir »
dont elle a été habituée et a construit son
modèle de développement. L'urgence de l'adaptation aux
changements climatiques et de l'atténuation de ses effets
négatifs par la réduction des émissions des gaz à
effet de serre (GES) a favorisé une orientation vers des énergies
renouvelables. Dans cette optique, la convention-cadre des Nations Unies sur
les changements climatiques a adopté en 1997 le protocole de KYOTO
signé par 183 pays mais non encore ratifié par tous (les
Etats-Unis par exemple). Il dispose que les pays développés
doivent réduire leurs émissions de CO2; ils peuvent acheter et
vendre des permis négociables pour maîtriser les émissions
là où leurs réductions sont les moins coûteuses ;
ils peuvent aussi investir dans des projets dans les pays en
développement à travers le mécanisme de
développement propre8. Les agrocarburants, entrant dans cette
famille des énergies renouvelables, deviennent des
éléments centraux dans la nouvelle orientation de l'agriculture
à côté de la percée des OGM (Organismes
Génétiquement Modifiés) qui sont destinés à
booster les productions et satisfaire l'agro-industrie et par conséquent
la grande distribution.
Dès lors, les agrocarburants, émettant
potentiellement moins de gaz à effet de serre que les hydrocarbures
issus du pétrole, ont été ciblés, entre autres,
comme axes stratégiques de cette nouvelle politique. De nos jours, les
projets de cultures d'agrocarburants se développent d'une manière
spectaculaire bien que les énergies dérivées ne
représentent qu'environ 3% de la consommation mondiale de carburants.
Toutefois cette tendance sera forcément renversée quand on sait
que les grandes puissances à l'image de l'Union Européenne
livrent un combat stratégique contre le changement climatique par les
énergies renouvelables. En effet, lors du 20è congrès
mondial de l'énergie en novembre 2007, le président de la
commission de l'UE,
en l'occurrence, José Manuel BARROSO affirmait "
l'histoire nous jugera sur notre capacitéà affronter le
défi de l'énergie ainsi que sur la mitigation des effets du
changement
8 Voir infra
20
Mémoire Master Amadiane DIALLO
climatique». Ceci s'est
matérialisé par l'adoption en décembre 2008 du plan
« Trois fois 20 » pour l'horizon 2020: réduction de
20% des émissions de gaz à effet de serre, diminution de 20% de
la consommation d'énergie et production de 20% d'énergie
renouvelable (avec une utilisation de 10% d'agrocarburants pour les
transports). Pour atteindre cet objectif, l'UE sera obligée d'importer
une grande partie de sa consommation d'agrocarburants dans les pays du sud
où il est annoncé des terres non encore exploitées.
Toutefois, les organisations du Sud réunies en Equateur
en 2007 pour débattre sur les agrocarburants et le défi du «
développement » dans une société
post-pétrolière ont essayé de répondre à la
question : pourquoi et pour qui ce mot d'ordre international de la promotion de
l'agro-énergie est indispensable ? Selon eux, il est clair que les
hydrocarbures constituent le fer de lance de l'économie
mondialisée. L'extraction et le contrôle des carburants fossiles
sont des enjeux majeurs de pouvoir. Les grandes puissances gouvernent le monde
en contrôlant l'énergie. Le mode de vie occidentale devenu, au nom
de la globalisation, un modèle universel pour l'humanité est
entretenu par une forte demande en énergie et en matières
premières (alimentation, santé, vêtements, logement,
mobilité...). C'est pourquoi, pour anticiper sur la fin des
énergies fossiles, le capitalisme cherche
désespérément de nouvelles formes de production
d'énergie. La mise en oeuvre des projets d'agrocarburants constitue
ainsi une nouvelle géopolitique mondiale. A ce titre, ils
renforcent le modèle de l'agrobusiness et de l'agriculture industrielle
et sont soumis à la logique de la dette et de l'exportation. Dans cette
optique, toujours selon ces organisations du Sud, les agrocarburants sont
destinés à remplacer progressivement le pétrole afin de
servir de levier au « paradigme de la croissance ».
En Afrique, Il y a un grand nombre d'acteurs impliqués
dans la promotion des agrocarburants. Le Brésil connu pour son
rôle précurseur dans la production de biocarburant s'est
tourné vers le continent africain pour assouvir son ambition de
créer un marché mondial pour l'éthanol. Il a réussi
déjà à obtenir l'appui d'une quinzaine de pays à
travers des accords bilatéraux. Par l'intermédiaire du Forum
International des "Bio"carburants, le Brésil et ses associés (la
Chine, l'Inde, l'Afrique du Sud, les Etats-Unis et l'Union Européenne),
organisent un marché international pour les agrocarburants. Pour
alimenter ce marché, plusieurs multinationales de l'énergie comme
BP, D1 Engrasa et Petrobras ont financé des projets d'agrocarburants en
Afrique. Sous l'égide des institutions internationales, des lois ont
été taillées sur mesure pour favoriser cette production
à grande échelle des agrocarburants.
François HOUTART dans son livre «
L'agro-énergie : solution pour le climat ou sortie de crise pour le
capital ? », après avoir jeté un regard critique sur la
question, propose de changer tout bonnement le modèle de
développement actuel en passant à une logique post-capitaliste de
l'économie. Pour lui, " le modèle économique en jeu
est nettement orienté vers l'exportation..» au
détriment d'un modèle basé sur l'initiative paysanne. Il a
mis en exergue les implications et les alliances qui se
nouent autour des agrocarburants entre les sociétés
pétrolières d'une part et des industries de l'automobile d'autre
part. Parlant des motivations des premières, il précise qu' "
il s'agit de conserver les monopoles établis sur les ressources
énergétiques et dans le second, de garder le contrôle des
nouveaux carburants en les adaptant au rythme exigé par les technologies
appliquées aux moteurs ». Pour renforcer les agrocarburants
comme des éléments de la reproduction du système
capitaliste, les multinationales s'activent pour contrôler la production
et la distribution afin de diversifier leur source d'accumulation. Il
défend la même position que les organisations du Sud qui estiment
que " les initiatives dans le domaine des agrocarburants doivent
répondre en ordre prioritaire aux besoins locaux et régionaux,
plutôt qu'à l'exportation et que la production doit être
décentralisée, sur base de l'agriculture paysanne ».
Dans le cas des mégaprojets où les investisseurs
privés font systématiquement de la monoculture, c'est la logique
du profit car dit-il " les plantations représentent bien plus de
valeur ajoutée que l'agriculture paysanne et contribuent ainsi à
l'accumulation du capital ». Le paysannat est " alors
transformé en prolétariat rural ».
5.2- Agrocarburants et accaparement des terres dans les
pays du Sud
L'accaparement des terres est un phénomène
dénoncé par beaucoup de détracteurs des agrocarburants.
Méme si la pratique n'est pas nouvelle, elle a connu un nouvel essor
avec l'avènement des agrocarburants dans le monde.
Un rapport de la banque mondiale de 20109,
cité dans une récente étude10
réalisée par des experts belges, révèle que "
la promotion des agrocarburants a déclenché une intense
activation des marchés fonciers, qui a culminé en 2009, avec des
transactions foncières à grande échelle ayant atteint 45
millions d'ha, contre une moyenne de 4 millions d'ha par an pendant la
décennie précédente. Si toutes ces transactions ne
visaient pas, loin s'en faut, la production d'agroénergie, il reste que
des 389 grosses transactions répertoriées par la Banque Mondiale,
35% concernaient l'agroénergie »
9 Rising Global Interest in Farmland - Banque
Mondiale - septembre 2010
10 Intitulée « Impact de l'expansion des
cultures pour biocarburants dans les pays en développement »
22
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Du fait des politiques rendant obligatoire son incorporation
dans les combustibles destinés au transport notamment aux Etats-Unis et
dans l'Union Européenne, les agrocarburants sont de plus en plus
demandés au niveau du marché mondial. Ainsi, les investisseurs
privés essaient de contrôler le foncier pour sécuriser
leurs opérations car " pour produire des agrocarburants, il faut des
terres ».
Dans son éditorial paru dans la revue Alternatives Sud
(vol 18, 2011), François POLET, parlant de l'accaparement des terres, a
distingué deux grands types de situations décrites ainsi:
? " les terres visées sont soumises à un
régime foncier de propriété privée. Les occupants
antérieurs, petits ou gros propriétaires, sont porteurs de droits
formalisés sur la terre, sous la forme d'un titre de
propriété généralement. Ils acceptent alors de les
céder, volontairement ou après avoir subi des pressions, parfois
même après des actes de violence »
? « les terres visées sont soumises à
un régime coutumier : ces terres sont habitées ou
utilisées depuis des générations par les populations
locales, mais celles-ci ne disposent pas de documents formellement reconnus
attestant de leurs droits. Les droits d'usage (agriculture, pâturage,
ramassage de bois de feu, etc.) et des droits de propriété sont
pourtant socialement reconnus à des individus, des familles ou des
communautés, et il existe des mécanismes variés de
gouvernance, mais sont faiblement sécurisés et l'Etat estime
pouvoir, ou peut légalement, récupérer ces terres
moyennant une indemnisation. »
Dans ce dernier cas, les affectations des terres aux firmes
d'agrocarburants se font le plus souvent sans consultation aucune des
populations locales.
Une étude de mars 2009 sur les « Pressions
commerciales sur la terre dans le monde » de l'International Land
Coalition, a identifié six acteurs clés avec diverses
motivations.
D'abord, il y a les acteurs privés, entrepreneurs ou
investisseurs qui ont des motivations capitalistes, c'est-à-dire faire
des affaires en maximisant leur profit et partager les dividendes entre
actionnaires. Pour arriver à leur fin, ils sont prêts à
faire des investissements pourvus qu'ils soient rentables. Ainsi, la main mise
sur le facteur de production clé qu'est le foncier est primordial pour
assurer une production stable d'agrocarburants.
Ensuite, viennent les Etats « investisseurs » qui
accompagnent ces privés et veulent contribuer à leur
autosuffisance énergétique, en produisant hors de leurs
frontières les agrocarburants nécessaires car ne disposant sur
leur territoire que de surfaces agricoles réduites par habitant. Ils
parviennent à acquérir des superficies par le biais de
"politiques de
coopération", d'accords intergouvernementaux permettant
la signature de contrats avec de grandes entreprises privées nationales
ou multinationales de connivence.
Puis, les Etats "hôtes" qui accueillent ces projets et
justifient les affectations de surfaces par le "besoin d'investissements
externes" pour leur développement. Ils se disent convaincus que les
agriculteurs locaux, à cause de leur moyens financiers et techniques
limités, sous exploitent les ressources foncières dont ils
disposent. Malheureusement, les contrats de cession de terres qu'ils signent ne
vont pas dans l'intérêt national.
Les autorités ou entités politiques au niveau
local à savoir les communes, communautés rurales, peuvent aussi,
dans certaines mesures, adopter les mêmes comportements de compromissions
au détriment des intérêts des agriculteurs.
Quant aux populations des zones concernées par
l'accaparement des terres, leur niveau d'implication est relégué
au second plan. Néanmoins, certains propriétaires peuvent
recevoir une indemnisation pour la vente ou la location de leurs terres
espérant en plus un impact sur la communauté avec l'installation
d'entreprises privées.
Enfin, les partenaires au développement qui, en
dépit de quelques réserves, appuient les privés pour les
investissements dans l'agriculture. Ce paradoxe dans la dénonciation de
ce phénomène par la Banque Mondiale est mis en évidence
par un centre de recherche américain qui montre " comment la SFI (la
filiale de la Banque Mondiale chargée des rapports avec le secteur
privé) et la FIAS (filiale de la SFI spécialisée dans le
conseil) ont respectivement financé des accaparements de terre et
crée les conditions pour de tels accaparements par la mise en place de
législations ad hoc ». (cité par CETRI, 2010)
D'autre part, l'Oko Institut (Allemagne) a
démontré que « s'il n'y a pas de changement direct
d'utilisation des sols, il y a nécessairement un changement indirect
». Ceci est désigné par l'expression Changements
d'Affectation des Sols Indirects (CASI) ou Indirect Land Use Change
(ILUC) en anglais. Ainsi, " les 45 millions d'ha de cultures
pour agrocarburants "viennent nécessairement remplacer quelque chose
quelque part", avec des impacts a priori similaires aux impacts directs.
L'effet est le même, in fine, que les agrocarburants soient produits sur
des terres défrichées à cet effet, ou quils aient
déplacé d'autres productions avec un effet induit de
déforestation. Qu'ils aient déplacé l'agriculture
paysanne, ou déplacé d'autres plantations qui déplacent
ensuite l'agriculture paysanne. » (ibid.)
24
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Dès lors, l'utilisation de terres agricoles pour la
production de carburant en Europe ou aux Etats unis créée des
effets indirects du fait de la pression sur les terres du Sud pour remplacer
les productions abandonnées.
5.3- Agrocarburants et sécurité
alimentaire
Toujours dans son éditorial cité plus haut,
François POLET affirme que « la formidable poussée de la
consommation d'agrocarburants durant les années 2006 et 2007 constitue
bel et bien un facteur de la flambée des prix agricoles mondiaux
début 2008, avec les mauvaises récoltes, l'absence de stock et la
spéculation ». Il précise « qu'il s'agit
cependant d'un facteur ayant temporairement aggravé une situation de
vulnérabilité alimentaire structurelle liée à la
situation de dépendance vis-à-vis des marchés
internationaux dans laquelle des dizaines de pays, autrefois autosuffisants,
ont glissé ces dernières décennies ». Tout en
considérant les agrocarburants comme un facteur secondaire de la crise
alimentaire de 2008, l'auteur reconnaît qu'ils demeurent une vraie menace
pour la « sécurité alimentaire locale » du fait de
« l'affectation de surfaces à la production d'agrocarburants
dans les pays où les terres fertiles sont limitées ».
Il juge méme que le risque est réel s'il se réfère
aux expériences des cultures de rente comme le coton, le café,
l'ananas, les fleurs qui se sont substituées aux cultures
vivrières après que des investisseurs extérieurs se soient
accaparés des terres pour fructifier des productions destinées
à l'exportation. En effet, selon lui, les acteurs capitalistes n'ont pas
un intérêt particulier à se limiter à des parcelles
marginales pour gérer leur « business » méme avec des
cultures comme le Jatropha qui s'y préterait. Les rendements augmentant
avec la fertilité des sols, ils vont tout bonnement s'orienter vers les
terres propices.
La compétition entre agrocarburants et cultures
alimentaires est aussi appréhendée du point de vue des temps de
travaux consacrés aux conduites. Des paysans sénégalais
l'ont bien compris et face à des promoteurs de projets de Jatropha
destinés à l'exportation, ils ont répliqué :
« nous n'allons pas confier nos ventre à l'extérieur
».
Bien que les gouvernements des Etats-Unis et de l'Union
Européenne continuent à dédramatiser, les experts des
grandes instances multilatérales et d'imminents chercheurs (IFPRI ;
Commission Gallagher) ont désormais reconnu le lien entre la promotion
des agrocarburants et la hausse des prix alimentaires. Suivant les
hypothèses et les produits, ils ont conclu à une contribution aux
hausses de prix variant entre 30% et 75%.
Bien que des auteurs pensent que le cas américain
concernant la filière éthanol n'est pas représentatif, il
faut remarquer qu'aux USA, un plein de bioéthanol de véhicule 4X4
équivaut à 250 kg de céréales correspondant presque
à l'alimentation d'une personne par an dans de nombreux pays en
développement.
L'article de Eric HOLT-GIMÉNEZ et Annie SHATTUCK, paru
dans Food Sovereignty et repris dans la revue Alternatives Sud sous le titre
« Agrocarburants et souveraineté alimentaire : une autre transition
agraire », aborde dans le même sens. Ces deux auteurs nous
apprennent que « 5% de la récolte mondiale de maïs en 2008
a été convertie en carburant liquide pour le transport
». Citant la FAO, ils rapportent que : « à
l'échelle de la planète, les personnes les plus pauvres
dépensent déjà 50% à 80% de leur revenu familial
pour leur alimentation ». Ainsi, poursuivent-ils « elles
souffrent quand les prix élevés des cultures pour carburants font
monter le prix des aliments ».
5.4- Rapports à la paysannerie : monocultures
industrielles ou agrocarburants de
proximité avec la polyculture paysanne
Le modèle dominant dans la mise en oeuvre des
agrocarburants reste la monoculture industrielle caractérisée par
un mode de production capital-intensive basé sur une
utilisation massive d'énergie, d'eau, d'intrants chimiques dans de
très grandes superficies. « Elles s'étendent en pratique
soit aux dépens de zones dites inhabitées (forêts, savanes,
etc.), soit au détriment de la polyculture paysanne ou d'autres
activités agricoles ». (CETRI, 2010). Ce sont
généralement de grandes entreprises privées qui
travaillent en régie et emploient les petits producteurs comme ouvriers
agricoles. Malgré cette utilisation de main-d'oeuvre, les monocultures
sont taxées souvent de « destructrices d'emplois et de moyens
de subsistance ». En effet, les emplois qu'elles créent par
unité de surface exploitée sont en dessous de celles
assurées par une agriculture paysanne diversifiée de nature
labour-intensive. Dans beaucoup de pays comme l'Indonésie, les
monocultures industrielles pour agrocarburants sont « destructrices de
l'agriculture paysanne et ont accru l'insécurité alimentaire du
fait du remplacement de cultures visant l'alimentation, de la
réorientation de l'usage de cultures alimentaires, et de l'utilisation
de terre, d'eau et de main d'oeuvre précédemment
dédiée à la production d'aliments. » (Ibid.)
Une étude de la banque mondiale,
référenciée précédemment,
révèle que « les salaires payés sur les
plantations ne sont en moyenne qu'une fraction (entre 1/2 et 1/10) des revenus
de petits paysans indépendants ». Le rapport 2010 de l'UNICEF
indique que dans un pays comme le Guatemala, 2ème fournisseur
de l'Union Européenne en éthanol, ces « revenus
sont
26
Mémoire Master Amadiane DIALLO
insuffisants pour alimenter une famille : la malnutrition
atteint 1 enfant sur 2 et 80% de la population indigène qui fournit la
main d'oeuvre pour les grandes plantations (UNICEF, 2010) ».
A côté de ce modèle, d'autres projets
tentent de relever le défi de l'accès ou de la satisfaction des
besoins en énergie pour les populations rurales. Il s'agit de
filières d'agrocarburants de proximité qui, à
l'échelle d'un territoire restreint, reposent sur des savoir-faire
existants et des technologies simples, et impliquent des artisans locaux
intervenant aux différents maillons de la chaîne de production :
production de la matière première énergétique,
extraction de l'huile végétale et prestation de services divers.
Pour le cas du Jatropha, l'huile végétale pure (HVP) obtenue est
destinée à la satisfaction des besoins locaux tels que la
fourniture d'énergie aux groupes électrogènes pour les
moulins à céréales, les forages et à de petites
centrales électriques qui fonctionnaient tous avec du diésel. En
effet, l'huile du Jatropha peut remplacer progressivement le diesel dans toutes
ses utilisations en milieu rural.
Ces types de projet sont ainsi différents des
mégaprojets qui privilégient la monoculture comme principale
forme de production et transforment le paysannat en ce que François
HOUTART appelle « le prolétariat rural ».
Faisant une comparaison, il affirme que : « à
côtédu palmier à huile, plante plutôt bourgeoise qui
entraîne des déforestations massives, le
Jatropha curcas apparaît comme une plante
prolétaire car n'importe qui peut la faire pousser ».
Des expériences prometteuses de projets
d'agrocarburants de proximité avec le Jatropha existent dans beaucoup de
pays comme le Mali et la Tanzanie. Au Mali, c'est M. Reihnard HENNING de la
coopération allemande qui a initié le concept de "Système
Jatropha" basé sur l'introduction du Jatropha au sein du système
de production d'un village. Quatre composantes principales ont
été ciblées. D'abord, « la lutte contre
l'érosion » avec des haies plantées sur des pentes pour
diminuer le ruissellement et l'infiltration rapide. La « fertilisation des
sols » est la seconde composante. Elle consiste à utiliser les
produits dérivés de la plante comme les feuillages, les
tourteaux, les coques pour en faire de l'engrais organique et remplacer les
engrais minéraux coûteux importés. Ensuite, vient le volet
de la « réduction de la pauvreté » induite par :
l'utilisation de l'huile végétale pure dans des moteurs
diésel pour satisfaire des besoins locaux, l'amélioration des
rendements par la fumure organique, la diminution des pertes imputables
à la divagation des animaux avec la généralisation des
haies vives de Jatropha. Enfin, il y a la « promotion des activités
annexes pour les femmes » comme dernière
composante : organisation autour d'unités de production
de savon, rémunération des tâches comme la cueillette des
fruits et le traitement des graines, allégement des travaux avec
l'installation de moulins tournant à l'huile de Jatropha. Dès
lors, le système Jatropha est de nature à rendre la vie au
village plus aisée. (ALPHA GANO A. K., 2011).
Selon HENNING, « le système Jatropha est une
approche de développement rural intégrée dont l'avantage
capital est de pouvoir réaliser toute la chaine de production à
l'échelle d'un village ». Dans le souci de prévenir
d'éventuels impacts négatifs de l'intensification à
outrance des cultures de Jatropha au détriment des cultures
vivrières, HENNING a suggéréde :
? privilégier la plantation en haie : le projet
Jatropha Mali était, en 2007, à plus de 10 000 km de haies vives
de réalisation avec un potentiel de production de 200 000 tonnes de
graines ;
? privilégier les terrains accidentés et les
terres pauvres dans les plantations hors haie vive : sur les 1800 ha de
cultures financées par la coopération allemande au Mali, seuls
700 ha sont situés dans des zones de production de maïs.
? éviter au maximum la monoculture
? promouvoir les droits des populations des zones
d'exploitations à bénéficier prioritairement des avantages
des produits dérivés du Jatropha notamment l'huile
végétale pure (moulins, forage...) et les tourteaux (fertilisant
organique pour leurs parcelles).
5.5- Instruments coopération au développement
et projets d'agrocarburants au Sud
5.5.1- Mécanisme de Développement Propre
(MDP) et programmes REDD
L'article 3 du protocole de Kyoto précise que «
les Parties visées à l'annexe I11 font en sorte,
individuellement ou conjointement, que leurs émissions anthropiques
agrégées, exprimées en équivalent-dioxyde de
carbone, des gaz à effet de serre indiqués à l'annexe A12
ne dépassent pas les quantités qui leur sont attribuées,
calculées en fonction de leurs engagements chiffrés en
matière de limitation et de réduction des émissions
inscrits à l'annexe B et conformément aux dispositions du
présent article, en vue de réduire le total de leurs
émissions de ces gaz d'au moins 5 % par rapport au niveau de 1990 au
cours de la période d'engagement allant de 2008 à 2012.
»
11 Listes des pays développés ou «
pays en transition vers une économie de marché » et leurs
engagements chiffrés de réduction des émissions dans
l'Annexe B du Protocole de Kyoto
12 Listes des gaz à effet de serre et leurs
secteurs/catégories de sources
28
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Le mécanisme pour un développement
«propre» a été établi par l'Article 12 du
protocole de Kyoto. Son objet est " d'aider les Parties ne figurant pas
à l'annexe I à parvenir à un développement durable
ainsi qu'à contribuer à l'objectif ultime de la Convention, et
d'aider les Parties visées à l'annexe I à remplir leurs
engagements chiffrés de limitation et de réduction de leurs
émissions prévus à l'article 3. »
A travers les Mécanismes du Développement Propre
(MDP), les pays développés ayant ratifiés le Protocole de
Kyoto peuvent donc acheter une partie du « quota » auprès des
structures conduisant dans des pays émergents ou en voie de
développement des projets entraînant une réduction
quantifiable de ces gaz. La vente des Unités de Réduction
Certifiée des Émissions (URCE) également appelées
« crédit carbone », représente une source additionnelle
de revenu pour ces projets.
Cependant, les résultats ne sont pas reluisants pour
les pays pauvres car peu de projets de développement agricole et rural
ont été élus aux MDP en Afrique sub-saharienne. En effet,
entre 2004 et mai 2009, sur 1.653 projets, 80% ont été
financés en Chine, Brésil, Inde, Corée et seulement 3,3%
en Afrique. En plus, les financements ont privilégié les projets
industriels au détriment de ceux de l'agriculture avec seulement 5%.
(IMMINGA H.et al., 2010).
André Nsabimana aborde dans le même sens en
affirmant que : " en encourageant la participation à des projets
dans les pays en développement, la finance carbone constituerait ainsi
une nouvelle opportunité pour soutenir le transfert des technologies
vers les pays en développement, et soutenir le développement des
entreprises. Cependant, cinq ans après le démarrage du
marché de carbone, les effets escomptés sur le
développement sont loin de se réaliser en Afrique subsaharienne.
» Il a fait un diagnostic des causes de cet échec qui ont pour
noms :
1) L'inadaptation du MDP aux économies africaines dont
les secteurs essentiels comme l'agriculture, la foresterie avec un potentiel
énorme d'investissements et de réduction des émissions de
GES, sont exclus des systèmes de quotas. Le manque de compétences
techniques et de moyens financiers pour concevoir et manager les projets MDP
dont les coûts de transactions peuvent affecter considérablement
la rentabilité des micro-entreprises qui représentent plus de 90
% en Afrique subsaharienne.
2) La non implication du secteur bancaire africain qui est en
traine dans le financement des projets MDP.
3) Le principe d'additionalité rend complexe et peu
incitatif l'éligibilité au MDP pour les entreprises africaines.
En tant que pays hôtes, elles n'ont pas les mémes faveurs que
celles des
pays développés alors que « la
réduction des émissions de GES a le même impact positif
indépendamment de l'endroit où elle intervient ».
Pour que le MDP soit incitatif pour les promoteurs de projets
de l'Afrique subsaharienne, il pense que « le système de calcul de
crédits devrait être basé sur le même scénario
de référence, quel que soit le promoteur du projet ».
(NSABIMANA A., 2010).
Par ailleurs, les stratégies de réduction des
émissions de gaz à effet de serre au niveau des foréts
font l'objet de programmes de l'ONU et ont connu beaucoup d'amendements
à la faveur des négociations au cours des différents
sommets. Il s'agit successivement de la:
? 1ère étape avec RED : Réductions des
Emissions liées à la Déforestation (Montréal et
Nairobi, 2005-2006);
? 2ème étape avec REDD : Réductions des
Emissions liées à la Déforestation et à la
Dégradation des forêts (Bali, 2007) ;
? 3ème étape avec REDD+ : REDD et
intégration des activités d'augmentation des stocks de carbone en
forêt, de la conservation et de la gestion forestière durable
(Bali et Poznañ, 2007- 2008)
? 4ème étape avec REDD++: REDD+ et
intégration de l'usage des terres à vocation agricole
notamment
Ce mécanisme international, en perpétuelle
discussion sous la convention cadre des nations unies sur les changements
climatiques (CCNUCC), a pour objectif de renforcer les capacités des
pays forestiers tropicaux qui s'engagent dans les objectifs cités
ci-dessus et de rémunérer ainsi leurs efforts dans ce sens.
5.5.2- Certification et critères de
durabilité
L'Union Européenne a adopté une Directive
2009/28 avec des critères de durabilité. En pratique, les
critères contraignants ne concernent que les deux aspects suivants:
1) « les émissions de gaz à effet de
serre : la Directive énonce que l'utilisation des biocarburants doit
résulter en une réduction de ces émissions d'au moins 35%
en 2020 et 50% au 1er janvier 2017;
2) les changements directs d'utilisation des sols : la
Directive énonce que la matière première, qu'elle soit
produite en Europe ou ailleurs, ne peut pas avoir été produite
dans des zones écologiquement sensibles ou importantes
(biodiversité, captation de carbone). »
30
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Ces critères s'appliquent à la mise en culture
et concernent donc les entreprises productrices. Pour vérifier le
respect des critères de durabilité, les opérateurs
économiques doivent "montrer que les critères de
durabilité [...] ont été respectés",
étant entendu que le système de vérification ne doit pas
"imposer une charge déraisonnable aux entreprises".
Pour Olivier DE SCHUTTER, la certification et les
critères de durabilité se limitent à vérifier qu'il
y a une réduction des émissions de GES, qu'il n'y a pas de
production sur des terrains de haute biodiversité et de production dans
des zones de stockage de carbone. Il considère qu'il y a une absence de
critères contraignants concernant le mode de production et les aspects
sociaux et de droits humains. Pour étayer ses réserves, il a
donné des exemples de productions certifiées « durables
» au sens de la Directive actuelle mais qui ne prennent pas en compte les
aspects cités :
? canne à sucre au Guatemala (malgré la
malnutrition chronique constatée)
? huile de palme dans le Chocó (malgré les
massacres et destruction de biodiversité) ? Jatropha sur le Kapunga Rice
Farm (malgré le remplacement du riz par Jatropha)
? éthanol produit par Cosan (malgré le travail
esclavagiste constaté par le Ministère du Travail) ; ce site a
même reçu la visite de Monsieur Herman Van Rompuy13 en
juillet 2010.
Comme alternatives, il a fait, entre autres, les propositions
suivantes :
? la suppression de l'obligation d'importer car
c'est « un feu vert à la spéculation foncière,
à la déforestation, à la priorité donnée aux
besoins étrangers par rapport aux besoins nationaux »
? le renforcement des critères de
durabilité avec l'introduction d'autres critères
contraignants relatifs à :
o l'environnement À climat : gaz à effet de
serre avec une prise en compte de l'ILUC ou CASI (Changement Affectation Sols
Indirect) ; biodiversité en n'accordant pas de certification «
durable » aux monocultures ; pollution chimique ; eau
o aspects humains : conditions contractuelles et de travail des
salariés; droits humains ; sécurité alimentaire
? La Certification indépendante pour
éviter de la confier à des « instances
contrôlées par les acteurs à contrôler » ou
« aux pays tiers exportateurs » qui ne font que gérer leurs
intérêts.
13 L'actuel président du Conseil européen
CHAPITRE 2 : CADRE PHYSIQUE, HUMAIN ET INSTITUTIONNEL
DE L'ETUDE
1- Aperçu sur le Sénégal et sa
politique de développement agricole et rural
1.1- Présentation
Le Sénégal est un pays situé à
l'extrême ouest du continent africain entre 12°5 et 16°5 de
latitude Nord et 11°5 et 17°5 de longitude ouest. Il couvre une
superficie de 196 712 Km2 et compte une population totale estimée
à 12.855.155 d'habitants en 2011 (ANSD, 2011). Il est limitrophe de la
Mauritanie au Nord, du Mali à l'Est, de la Guinée et de la
Guinée Bissau au Sud et de l'Océan Atlantique à l'Ouest
sur une façade de plus de 500 km.
Son climat de type soudano-sahélien est
caractérisé par l'alternance d'une saison sèche allant de
novembre à mai et d'une saison des pluies allant de juin à
octobre. La pluviométrie passe, en moyenne, de 300 mm au Nord
semi-désertique à 1200 mm à la zone forestière du
sud.
L'organisation de l'administration territoriale et locale se
matérialise par deux modes de gestion simultanés du territoire
que sont le mode déconcentré et le mode
décentralisé. Pour le premier, il s'agit des circonscriptions
administratives composées de 14 régions, 45 départements
et 117 arrondissements « administrées » respectivement par des
gouverneurs, des préfets et des sous-préfets nommés par
décret présidentiel. Le mode décentralisé se
réfère aux collectivités locales qui comptent 14 conseils
régionaux, 113 communes, 370 communautés rurales «
managés » par des élus locaux appelés respectivement
présidents de conseil régional, maires et présidents de
conseil rural.
L'agriculture sénégalaise, plus
précisément l'agriculture vivrière et l'agriculture
industrielle et d'exportation, contribue pour environ 8% à la formation
du Produit Intérieur Brut. Elle représente près de 50% du
secteur primaire. Depuis 2008, l'agriculture est le principal contributeur
à la croissance économique du Sénégal. En effet,
elle contribue à hauteur de 1,1% pour un taux de croissance du PIB
évalué à 2,2% en 2009. (ANSD, 2010). Le secteur agricole
emploie environ 70% de la population active. C'est pourquoi, ce secteur demeure
un levier essentiel pour amorcer un développement harmonieux dans le
pays.
Le Sénégal dispose de 3 804 900 ha de terres
arables représentant 20% de la superficie totale du pays. 65% de ces
terres cultivables sont exploitées. 1 877 684 ha sont cultivées
par 437 037 exploitations agricoles soit une superficie moyenne nationale par
exploitation de 4,3
32
Mémoire Master Amadiane DIALLO
ha. (CSAO-CILSS, 2008). Dans la grande majorité, les
producteurs agricoles sont de petits exploitants, qui cultivent la terre avec
des régimes fonciers traditionnels et pratiquent des assolements
traditionnels, en culture pluviale. La plupart combinent cultures de rente et
cultures vivrières de subsistance tout en possédant quelques
animaux, en élevage extensif ou intensif associés aux cultures.
L'agriculture sénégalaise est dominée par les cultures
pluviales pratiquées par 94,6 % des ménages ruraux agricoles.
D'autres types de cultures sont aussi pratiquées par ces ménages
ruraux : cultures irriguées (18,63 % des ménages), cultures de
décrue (9,20 % des ménages) et cultures de bas-fonds (7,6 % des
ménages).
Les principales cultures pluviales sont le mil, l'arachide, le
maïs, le sorgho, le sésame, le niébé (petit haricot),
le riz, le coton. L'aménagement de la vallée du fleuve
Sénégal au Nord et quelques autres petits aménagements
à l'intérieur du pays facilitent, dans ces zones, la conduite
sous culture irriguée de la canne à sucre, du riz, de la tomate
industrielle etc.
1.2- Le système foncier sénégalais
Au Sénégal, les terres sont divisées en
trois domaines :
? Le domaine de l'Etat qui comprend le domaine public et le
domaine privé qui sont les biens et droits immobiliers appartenant
à l'Etat.
? Le domaine des particuliers qui constitue les terres
immatriculées au nom des particuliers.
? Le domaine national qui, selon l'article premier de la loi
n° 64-46 du 17 juin 1964, constitue " toutes les terres non
classées dans le domaine public, non immatriculées et dont la
propriété n'a pas été transcrite à la
Conservation des hypothèques à la date d'entrée en vigueur
de la présente loi. Ne font pas non plus partie de plein droit du
domaine national, les terres qui, à cette même date, font l'objet
d'une procédure d'immatriculation au nom d'une personne autre que
l'Etat. » Il occupe plus de 90% des terres du
Sénégal.
Cette loi sur le domaine national fait la particularité
du système foncier sénégalais. C'est " un droit de
synthèse original poursuivant deux objectifs essentiels: la
socialisation de la propriété foncière plus conforme
à la tradition négro-africaine et le développement
économique du pays ». (SIDIBÉ A.S., 1997). Le
Président SENGHOR14 affirmait qu'il s'agissait " de
revenir du droit romain au droit négro-africain, de la conception
bourgeoise de la propriété foncière à la conception
socialiste qui est celle de l'Afrique Noire traditionnelle ».
14 Premier président du Sénégal
de 1960 à 1980
Les terres du domaine national sont classées en quatre
zones :
? zones urbaines situées dans les territoires communaux et
qui servent pour l'habitat en milieu urbain. La création de zones
touristiques est possible dans cet espace.
? zones classées à vocation forestière ou
de protection, qui ont fait l'objet d'un classement suivant une
réglementation particulière ; les terres de ces espaces
protégés sont considérées comme une réserve
foncière permanente et prévues spécialement pour assurer
la protection de l'environnement. Sauf déclassement, les
activités économiques sont interdites dans cet espace.
? zones de terroirs qui correspondent, en principe, aux terres
régulièrement exploitées pour l'agriculture, l'habitat
rural, l'élevage et le parcours du bétail. Ce sont les zones les
plus importantes aussi bien en superficie qu'en enjeux.
? zones pionnières qui sont des zones d'action
spéciales non encore aménagées. Il n'existe pratiquement
plus de zones pionnières au Sénégal depuis que celles du
Delta du fleuve (au Nord du pays) ont été reversées dans
les zones de terroirs. (SOW A. A, 2011).
La nature juridique du domaine national est assez originale
car les terres y afférentes ne font pas l'objet d'une
propriété individuelle. Au contraire, la législation
s'inspire de la propriété de tenure collective du système
négro-africain reconnaissant aux individus de simples droits d'usage sur
la terre. En effet, l'article 2 de la loi de 1964 précise que l'Etat
« détient les terres du domaine national en vue d'assurer leur
utilisation et leur mise en valeur rationnelles, conformément aux plans
de développement et aux programmes d'aménagement ».
Donc, il est clair que le domaine national est la propriété de la
nation et l'Etat en est simplement le détenteur car « la
détention n'est pas la propriété ». Selon
Amsatou S. SIDIBE (1997), « en réalité, l'Etat est
substitué au chef de terre traditionnel. Il devient le
"maître de la terre", remplaçant ainsi les
anciens "lamanes"15. »
Dans le cadre de la décentralisation, l'Etat, en tant
que détenteur des terres du domaine national, a transféré
les compétences de gestion aux collectivités locales.
Néanmoins, l'Etat, à travers ses services
déconcentrés, exerce un contrôle en vue d'assurer
l'intérêt général et d'aider au bon fonctionnement
des nouveaux organes chargés de l'affectation ou la
désaffectation des terres.
Les terres du Domaine national ne peuvent être
cédées par l'État qu'à la condition de leur
immatriculation au préalable. Malgré la longue procédure
administrative, des terres du Domaine national peuvent être
immatriculées et entrer ainsi dans le domaine privé de l'Etat.
15 Nom donné au maître traditionnel de la
terre
34
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Les terres des zones de terroir sont affectées aux
populations ou membres des communautés rurales par un conseil rural,
sous le contrôle de l'autorité étatique. Les conditions
d'affectation et de désaffectation des terres du domaine national sont
fixées par décret et sont essentiellement de deux sortes.
La première, héritée du droit
traditionnel négro-africain, est relative à l'appartenance
à la collectivité qui va servir de titre juridique à
l'exploitation des terres. Ainsi, dans les terroirs, l'affectation peut
être décidée en faveur soit d'un membre de la
communauté rurale, soit de plusieurs membres regroupés en
association ou coopérative. Dès lors, les étrangers
à savoir ceux qui sont extérieur à la collectivité
n'ont pas droit à ces terres de terroirs. Mais, dans la pratique,
beaucoup d'étrangers non-résidents des collectivités
locales arrivent à occuper des terres affectées.
La seconde condition de l'affectation des terres du domaine
national est l'exigence d'une mise en valeur des terres en question. La terre
est affectée à ceux qui la travaillent personnellement et
matériellement.
Les motifs habituels de désaffectation sont : le
décès de l'occupant personne physique ou la dissolution du
groupement bénéficiaire, la demande de l'affectataire
lui-même, le constat d'insuffisance, d'absence ou de cessation de la mise
en valeur. Il est aussi prévu la désaffectation pour motifs
d'intérêt général mais dans ce cas, l'affectataire
dépouillé de sa parcelle en reçoit une autre
équivalente à titre de compensation.
L'affectation d'une terre dans le cadre du domaine national ne
procure aux bénéficiaires qu'un droit d'usage sur la terre. Cette
affectation ne permet donc pas de possibilités de garantie au niveau des
banques qui demandent un titre de propriété. Le droit de
propriété a des niveaux de jouissance différents qui
passent par l'usus (le droit d'utiliser le bien), le fructus (la
possibilité de fructifier le bien) et l'abusus, qui est le degré
le plus absolu de la jouissance d'un bien.
Ainsi, la configuration actuelle du domaine national est, en
principe, non propice à l'accaparement de terres pour les agrocarburants
à moins que l'Etat, par complicité, diligente les
procédures d'immatriculation de terres à l'insu des populations
locales et au profit d'entreprises privées.
Face à cette contrainte dissuasive pour les
investisseurs privés, des pressions sont exercées au sommet de
l'Etat pour le vote et la promulgation d'une réforme du système
foncier plus favorable. Les résistances des mouvements paysans
justifient la prudence des autorités
politiques qui ont retardé le processus de mis en place
de cette réforme sans y renoncer. C'est ce qui explique d'ailleurs son
extirpation de la loi d'orientation agro-sylvo-pastorale qui stipule dans son
Article premier que " La politique conduite par l'Etat dans le domaine du
développement agro-sylvo-pastoral est marquée par le retrait
progressif de l'Etat et est conforme aux principes de recentrage de ses
missions sur des fonctions régaliennes, de poursuite de la politique de
décentralisation, d'amélioration du cadre et des conditions de
vie en milieu rural, ainsi que de création d'un environnement propice
aux investissements privés en milieu rural. »
Dès lors, le Sénégal va inexorablement
vers une réforme de son système foncier par une privatisation de
certaines terres du domaine national pour favoriser la transaction
foncière et le développement de l' « agrobusiness ».
Pour y arriver, les défenseurs de cette thèse disent vouloir une
plus grande intégration des agriculteurs dans le marché en
accédant à des terres avec des titres de propriété
qui leurs garantissent des prêts auprès des banques afin que les
transactions (location, vente, prêts, gage etc.) puissent les aider
à trouver les financements nécessaires à leurs
activités agricoles. (SOW A.A., 2011)
1.3- Politiques agricoles
Après l'indépendance, les politiques de
développement rural au Sénégal ont suivi pendant plusieurs
années les grandes lignes préconisées dans les plans de
développement économique et social. Ces derniers
définissent " des grandes orientations qui déterminent, pour
un horizon de moyen terme, les stratégies, les objectifs et les
programmes à mettre en oeuvre pour développer l'économie
aussi bien au niveau national que sectoriel ».
La première période de politique agricole est
marquée par la production arachidière qui a
représenté 87% des exportations jusqu'en 1965. En effet, durant
toute cette période, " l'arachide a exercé sur toute
l'économie du Sénégal une écrasante
souveraineté ». Le monde rural vivait au rythme de la «
traite » de l'arachide qui " a été la seule qui ait
donné lieu à des échanges massifs et organisés.
.Elle a été le moteur de toute la circulation monétaire
intéressant la paysannerie ». (VERHAEGEN E., 1984).
Mais la volatilité de son cours a entraîné
une récession au niveau de l'activité du secteur primaire. Les
2è et 3è plans de développement
économique et social ont mis l'accent sur la « diversification de
la production » pour résorber le déficit vivrier et
réduire le déficit du commerce extérieur. A la suite de la
sécheresse et son corollaire de baisse des principales productions
(arachide, mil, riz), l'état s'est appuyé sur ses relais
d'intervention que sont les
36
Mémoire Master Amadiane DIALLO
structures d'encadrement pour sensibiliser et encadrer les
paysans sur les thèmes techniques relatifs à la diversification
et à l'amélioration de la productivité. Ce fut la
création des sociétés régionales de
développement rural (SRDR) privilégiant ainsi l'approche
régionale sur l'approche filière (TOURE, 2002). L'Etat poursuit
ainsi des objectifs contradictoires en voulant préserver les recettes
tirées de l'arachide tout en visant l'autosuffisance alimentaire. Les
producteurs sont encouragés à accroître leurs superficies
allouées à l'arachide et les intrants y afférents. Ceci a
accentué leur endettement.
La seconde période coïncide avec l'ère des
politiques d'ajustement structurel qui marque une rupture d'avec les
formulations de plans de développement économique et social. A
cause de la baisse des recettes d'exportation, l'état ne peut plus
supporter les charges financières nécessaires pour assumer le
rôle d'intermédiaire en amont et en aval des productions
agricoles. Les attentes des paysans deviennent inadéquates
vis-à-vis des possibilités de l'état (GAYE D., 1992). Ce
fut la suppression progressive de l'encadrement. L'approche filière
s'est imposée dans la formulation de la Nouvelle Politique Agricole (NPA
de 1984 à 1994) et du Programme d'Ajustement Sectoriel de l'Agriculture
(PASA de 1994 à 1997). C'est le début du désengagement de
l'état et de la responsabilisation progressive des paysans avec une
redynamisation de l'action coopérative. La politique d'interventionniste
de l'état cède la place au mécanisme du marché avec
notamment la suppression des monopoles et la libéralisation des
importations de riz, principale céréale de consommation au
Sénégal.
Le retrait brutal de l'état a fragilisé le monde
rural qui n'a plus droit aux subventions d'intrants et de matériels
agricoles. Selon GAYE (1992), « en privilégiant le milieu
urbain, l'Etat accentue le poids démographique de la ville et, en
conséquence, son déficit alimentaire ».
A partir de 1998, l'état, avec l'appui de la banque
mondiale, met en oeuvre le Programme des Services Agricoles et Organisations de
Producteurs (PSAOP) dont l'objectif principal est de mettre en place un nouveau
système d'appui au monde rural comprenant cinq (5) composantes : la
Recherche agricole et agroalimentaire, les Organisations de Producteurs, le
Conseil agricole et rural, le Fonds national de recherche
agricole et agroalimentaire et le Ministère de l'Agriculture et de
l'élevage.
Cependant, toutes ces réformes politiques n'ont pas
donné les résultats escomptés. L'agriculture n'arrive
toujours pas à assurer une sécurité alimentaire. Le
Sénégal fait face à une dépendance aux importations
de denrées alimentaires.
A la faveur de l'alternance politique de 2000, le nouveau
président a voulu marquer son passage en mettant en oeuvre des
programmes spéciaux tout azimut pour faire face à des
difficultés conjoncturelles. C'est ainsi que les programmes de relance
des filières maïs, manioc, bissap ont été
déroulés de 2004 à 2008.
Face à l'émigration clandestine et à
l'exode rural galopant, le Plan de Retour Vers l'Agriculture (Plan REVA) a
été mise en oeuvre par les pouvoirs publics appuyés par
des partenaires extérieurs. Ce plan ambitionne de développer
l'agro-industrie avec des fermes pilotes comme base des productions et
d'impulser la commercialisation et la transformation de la production agricole,
animale et halieutique.
A la suite du renchérissement des prix des
céréales au niveau mondial en 2008, le président lance le
programme GOANA (Grande Offensive pour l'Agriculture, la Nourriture et
l'Abondance) qui avait pour objectif global « d'assurer une production
suffisante en nourriture afin d'assurer la souveraineté alimentaire du
pays en ce qui concerne tout au moins les principaux produits agricoles
consommés par les sénégalais et en s'appuyant sur les
potentialités de chaque région ».
La dernière trouvaille de ces programmes
spéciaux est celui des biocarburants qui a été
lancé durant la campagne agricole 2007-2008. Le Président
sénégalais, Abdoulaye WADE a convoqué en 2006 à
Dakar une conférence internationale des Pays Non Producteurs de
Pétrole (PANPP) en vue de définir une stratégie commune
face à la flambée des prix du pétrole et de ses
conséquences négatives sur leurs économies. C'est ainsi
qu'un comité pluridisciplinaire chargé de la promotion des
biocarburants a été mise en place. En novembre 2006, le
Sénégal a créé un Ministère chargé
des Biocarburants. En conséquence, il s'est lancé dans la
production de biocarburants en mettant l'accent sur la promotion du Jatropha
curcas (Pourghère en Français et Tabanani en wolof) qui est une
espèce poussant naturellement dans le pays.
Malgré tout, le secteur agricole souffre de beaucoup de
maux. Selon la publication de la situation économique du
Sénégal de l'Agence Nationale de la Statistique et de la
Démographie de 2008, la production agricole nationale demeure
limitée par : la dépendance à un régime
pluviométrique marqué par son irrégularité
impliquant une faible activité saisonnière en milieu rural
(quatre mois) ; la faible productivité des systèmes de production
dominés par une agriculture de subsistance ; la vétusté et
l'insuffisance du parc de matériel agricole ; la faible qualité
du capital semencier ; sa désarticulation par rapport au régime
alimentaire national (riz, légumes, autres céréales)
largement dépendant des importations.
38
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Une étude sur le profil sécurité alimentaire
du Sénégal (CSAO-CILSS, 2008) a permis de faire les constats
suivants :
? la production agricole assure de moins en moins la
couverture des besoins nationaux : le taux de couverture est passé de
64% pour la campagne agricole 1987/88 à 43% en 2006/2007 du fait surtout
du désengagement de l'état par rapport aux ressources
allouées (semences, engrais) durant le plan d'ajustement structurel. En
outre, il faut remarquer la diminution des superficies par actif agricole qui a
chuté de moitié entre 1960 et 1998 suite à la
multiplication des micro-exploitations agricoles.
? par conséquent, le pays fait un recours croissant aux
importations commerciales pour combler le déficit : le
Sénégal importe plus de 600.000 tonnes de riz par an
? dès lors, la pauvreté gagne du terrain en
milieu rural et touche davantage les ménages dépendant
strictement des activités agricoles, une situation qui les expose
à une insécurité alimentaire.
Cet état de fait maintient le Sénégal
dans une dépendance inquiétante des importations de vivres. Pour
renverser cette tendance, les politiques agricoles doivent mettre plus
l'accent, dans leurs orientations, sur la dynamisation de la production, de la
transformation et de la commercialisation des produits agricoles afin
d'améliorer la sécurité alimentaire des populations.
Au final, il est clair que la priorité du
Sénégal en matière de développement agricole et
rural est le renforcement de la sécurité alimentaire par le biais
d'un secteur primaire productif, assurant des revenus substantiels aux
ruraux.
1.4- Point sur la situation des agrocarburants au
Sénégal
Traditionnellement, le Jatropha était présent en
milieu paysan sénégalais au niveau des clôtures des
parcelles maraîchères, des vergers et très rarement des
champs des grandes cultures.
La première expérience connue de projet de
plantation de Jatropha au Sénégal serait l'oeuvre
d'ATI16 (Appropriate Technology International) une ONGD
américaine spécialisée dans la promotion des Technologies
Appropriées et des Petites Entreprises de production. Ce projet de
plantation, d'extraction et d'utilisation de l'huile de Pourghère a
été mis en oeuvre entre 1999 et 2000 au niveau des
arrondissements de Fimela (région de Fatick) et de Pout
16 Devenue Enterprise Works
(région de Thiès) : 12.000 boutures de Jatropha
curcas ont été plantées par des groupements
féminins. Avec une presse manuelle mise au point par des artisans
locaux, des essais concluants ont été réalisés
à partir de graines collectées pour l'extraction de l'huile qui a
permis de faire fonctionner des moulins à mil. Malheureusement,
après le programme, les quelques plantations ont été
délaissées sans suivi et la production de graine a
été compromise.
La deuxième expérience avérée est
celle du PROGEDE (Programme de Gestion Durable et participative des Energies
traditionnelles et de substitution) qui a procédé depuis 2003
à la mise en place d'une plantation de Jatropha curcas sur une
superficie de 25 ha. L'objectif était de tester les possibilités
de production de biodiesel à partir de l'huile de Jatropha. Les
résultats encourageants des premières réalisations ont
justifié la généralisation de l'initiative sur l'ensemble
des parcelles maraîchères et des vergers sous forme de plantations
de haies vives. Avec l'appui technique et financier de la Banque Mondiale et
d'une firme norvégienne (GreenTrac), un véhicule multiservices a
été conçu pour utiliser l'huile végétale
pure comme carburant pour son fonctionnement à l'image d'une plateforme
multifonctionnelle. Cette innovation a été primée lors de
la tenue du « Development Market Place », organisé par la
Banque Mondiale en 2006. Ce prix a permis au projet d'acquérir cinq
prototypes de ces véhicules pour les villages encadrés. Le
PROGEDE, en rapport avec des artisans nationaux, a aussi mis au point un
prototype de réchaud à base d'huile de Jatropha en vue de le
substituer au gaz butane pour les ménages. Selon l'actuel coordinateur,
les performances énergétiques feront l'objet de tests de
laboratoire comparativement aux autres sources d'énergie. Il
précise aussi que l'huile de Jatropha n'est pas encore disponible
à grande échelle dans leur zone d'intervention.
C'est à la suite de ces premières
expériences, que le gouvernement du Sénégal a lancé
un programme spécial biocarburants qui a pour objectif d'atteindre
l'autosuffisance énergétique nationale, et de permettre par
ricochet la réduction des importations de pétrole qui absorbent
à elles seules 40% des bénéfices d'exportations du pays.
Il vise des plantations de Jatropha d'une superficie globale de 321.000 ha et
des prévisions de récoltes de 3.210.000 tonnes de graines par an
permettent d'assurer la production de 1.190.000.000 litres d'huile brute et de
1.134.000.000 litres de biodiésel suffisant aux besoins nationaux
actuels estimés à 1.095.500.000 litres. Comme indiqué
supra, l'option de l'espèce Jatropha curcas a été prise
pour réaliser des plantations massives, des haies vives, en bordures des
concessions et des routes, délimitation des parcelles de cultures dans
les zones du Centre, de l'Est et du Sud du pays. Il est prévu d'emblaver
une superficie de 321 000 ha à répartir par communauté
rurale.
40
Mémoire Master Amadiane DIALLO
(MDRA, 2008). Pour ce faire, une distribution de plants aux
producteurs et aux porteurs de projet selon les superficies demandées a
été faite. Les réalisations de la campagne agricole
2008-2009 ont porté sur la plantation de 5 000 ha à partir de 5
555 000 plants de Jatropha fournis aux producteurs (individuels et
organisations de producteurs, secteur privé) soit sous forme de plants
âgés de 4 à 8 mois, soit sous forme de semences
importées. Ce matériel végétal a été
produit à partir de graines collectées dans différentes
régions du pays (Thiès, Fatick, et Diourbel notamment), d'une
part, et d'un stock de 128 tonnes de graines importées, d'autre part.
(ANSD, 2008). Les résultats n'ont pas été à la
hauteur des attentes jusqu'à présent.
Toutefois, grâce à un appui du gouvernement de
Ténériffe, une station de serre déjà
opérationnelle d'une capacité de production minimale de 500.000
plants tous les deux mois, est implantée à Sangalkam. Elle va
renforcer l'approvisionnement en plants aux producteurs de Jatropha du pays.
Selon le point focal du programme, si la production atteint sa vitesse de
croisière, il est prévu l'installation de mini-industries de
transformation dans les sites de production.
Malgré les résultats mitigés obtenus et
les mouvements contestataires de certaines plateformes paysannes, force est de
reconnaitre que le programme spécial Jatropha a suscité une
certaine curiosité, voire engouement d'une frange de la population
rurale. C'est ce qui a, sans doute, facilité la tâche aux
différents promoteurs de projets de Jatropha qui sont parvenus à
disposer de terres au niveau des communautés rurales pour s'implanter et
développer leurs activités.
La situation des agrocarburants au Sénégal permet
de distinguer quatre types d'intervenants.
1) Les investisseurs privés nationaux et
internationaux, voire les multinationales qui s'implantent pour faire de la
monoculture en régie sur de grandes superficies dans des zones
favorables à de meilleurs rendements. La production est exclusivement
destinée à l'exportation. C'est le cas de la présence,
dans les zones les plus humides du Sénégal, à savoir la
vallée du Fleuve et les rives du fleuve Gambie, zone de production de
bananes, d'investisseurs nationaux et de grandes multinationales telles que
Trans Danubia, Agro Africa, Afrique Energie Développement, African
National Oil Corporation.
2) Les investisseurs privés nationaux et
internationaux qui s'introduisent dans les communautés rurales par le
biais des fils du terroir (eux-mêmes impliqués) pour se faire
affecter des terres : ils emploient les populations locales
comme ouvriers agricoles ; la production est aussi destinée à
l'exportation mais des promesses d'investissements sociaux sont faites aux
populations locales. En 2008, dans la région orientale du pays
(Tambacounda), les superficies affectées à des acteurs
étrangers pour la seule culture du Jatropha sont de 23.438 ha. Dans la
même région, plus précisément dans la
communauté rurale de Nétéboulou, un projet Italien de
plantation de Jatropha y a été lancé en 2010. Il s'agit
d'un holding italien, Tozzi Renouvelable Energie, qui veut financer la
plantation de 50.000 ha de Jatropha dans la zone en collaboration avec un fils
du terroir lui-même membre d'une structure spécialisée dans
la technologie du Jatropha. Ces investisseurs disent avoir signé un
protocole d'accord avec l'état leur permettant d'exporter les 80% de la
production d'agrocarburants. Seule, les 20% seront mis à la disposition
du Sénégal à un prix négocié. D'autres
investisseurs agissant de la même manière sont signalés
dans des communautés rurales du nord au Sud du Sénégal
où des milliers d'ha de terres leur ont été
affectées pour la culture du Jatropha principalement.
3) Les promoteurs de projets d'agrocarburants qui, en
synergie avec les producteurs locaux, veulent introduire le Jatropha dans le
système de production traditionnel et envisagent la transformation sur
place en huile végétale pure pour satisfaire les besoins locaux
en énergie. L'ADG17 s'inscrit dans cette mouvance, en
appuyant une organisation paysanne partenaire dans la zone de Dialakoto au
Sud-est du pays où elle menait déjà des actions. Elle a
fait le choix d'accompagner les producteurs afin de voir avec eux les avantages
et inconvénients liés à l'augmentation de ces plantations
de Jatropha dans le cadre d'un projet intitulé " Validation du
Système Jatropha en milieu rural sénégalais »
mis en place en 2008. Il ne vise pas " une production
massive d'agrocarburants à base de Jatropha mais à analyser les
avantages éventuels de l'intégration de cette plante dans les
systèmes culturaux et dans la dynamique villageoise. » Les
premiers tests d'utilisation de la plante qui ont été
effectués, ont abouti déjà à la réalisation
d'une lampe à huile de Jatropha. Le projet qui fait l'objet du cas
d'étude de ce mémoire peut être classé dans la
même catégorie.
4) Les promoteurs « hybrides » qui veulent
travailler d'une part en régie pour sécuriser leur production
destinée à l'exportation et d'autre part, collaborer avec les
organisations des producteurs en signant des contrats de production. C'est la
stratégie adoptée par le projet «Green Oil Development»
qui compte travailler directement avec les coopératives agricoles et
avec les groupes d'intérêt économique sur la base d'un
contrat entre la société
17 Aide au Développement Gembloux (ONG
belge)
42
Mémoire Master Amadiane DIALLO
SBE18 Sénégal et les diverses
communautés rurales concernées. Le projet négocie des
contrats exclusifs d'achat de graine de Jatropha curcas à un prix fixe
n'étant pas sujet aux fluctuations du marché.
Au-delà de ces acteurs, certains industriels
sénégalais essaient de se mettre au diapason de l'énergie
verte pour suppléer aux énergies fossiles. En effet, deux projets
de biocombustibles ont été lancés et méme
introduits dans le portefeuille des projets MDP dirigé par
l'Autorité Nationale Désignée (AND). Cette dernière
est chargée des aspects réglementaires et promotionnels du MDP
pour attirer des financements et favoriser les investissements sous ce
mécanisme au Sénégal (confère annexe).
Le premier projet agro-industriel inscrit à l'AND pour
l'étude d'éligibilité aux MDP est celui de la SOCOCIM
(Société Ouest africaine des Ciments). Il consiste à
utiliser des fruits de Jatropha et autres biomasse en substitution aux
combustibles fossiles dans la cimenterie de SOCOCIM Industries. L'objectif dans
le moyen terme est d'atteindre un taux de substitution thermique d'environ 40%
dans la cimenterie grace à l'utilisation du Jatropha.
Le deuxième projet est initié par la CSS
(Compagnie Sucrière Sénégalaise) pour la production de
bioéthanol. L'objectif visé est la production d'éthanol
à partir des déchets de canne à sucre. Le
bioéthanol sera mélangé avec du diesel et utilisé
dans le transport. La proportion de bioéthanol envisagé est de
10%. Le projet a une capacité annuelle de production de 10 000 tonnes
soit 60 000 litres/jour.
2- Présentation du projet de Jatropha de
proximité
2.1- Présentation générale
Le cas d'étude est un projet de plantations de Jatropha
localisé dans le département de Foundiougne (confère carte
en annexe). Les acteurs directs de ce projet sont la Fédération
des groupements de Producteurs de Tabanani (Jatropha) de Foundiougne (FPTF)
composée de 10 groupements de 400 agriculteurs et la
société Performances qui est un cabinet spécialisé
dans le conseil pour un développement durable.
Ce partenariat entre la structure sénégalaise de
conseil (Performances) et l'association de producteurs a abouti à
l'initiative du programme dénommé « Energie Eau
Solidarité Foundiougne (EESF) » murie et portée depuis 2007.
Son objectif est « de créer les conditions d'une
amélioration significative et durable des conditions de vie dans le
département de
18 SBE est le nom de la Société
Boulonnerie Europe S.p.A, société faisant partie du groupe
Vescovini
Foundiougne (Région de Fatick,
Sénégal) : les revenus générés par la
valorisation de la production de plantations de Jatropha (Tabanani en langue
locale) permettront de développer et de pérenniser l'accès
des populations à des services d'eau et d'électricité de
qualité. ». Il se veut « porteur de valeurs de
solidarité et d'équité, sans lesquelles il ne peut y avoir
de développement durable. » (EESF, 2009).
La stratégie retenue est le développement d'une
filière courte de production d'huile végétale pure
à base de Jatropha contrôlée par les acteurs ruraux
eux-mêmes à savoir les producteurs, les transformateurs et les
promoteurs de produits et services dérivés. Ainsi, le programme
s'est structuré autour d'une trentaine de pôles de
développement, zones de production regroupant 5 à 10 villages.
Le programme EESF lancé en juin 2008, a fait ses premiers
pas selon la chronologie suivante :
? la mise en place de la structure de gestion du programme en
l'occurrence la SOPREEF (Société pour la Promotion de
l'Accès à l'Energie et à l'Eau dans le département
de Foundiougne), société à responsabilité
limitée (SARL) de droit sénégalais créée par
les deux protagonistes cités supra. Le capital de la
société est ouvert à d'autres partenaires. Seulement, la
signature d'une convention d'associés est un préalable à
l'entrée de tout nouvel associé au capital de SOPREEF.
? La mobilisation de 400 agriculteurs de la
Fédération des Producteurs de Tabanani pour la réalisation
des premières plantations;
? L'identification des 5 premiers pôles de
développement, la définition de leur mode de gestion et
l'étude de faisabilité pour l'établissement d'une
première plateforme multifonctionnelle dans un pôle.
Les instigateurs entendent donner à SOPREEF le cachet
d'une entreprise solidaire au sein de laquelle l'ensemble des acteurs sont
représentés et bénéficient d'une méme
capacité de participation aux processus de décision. C'est ainsi
qu'ils ont arrêté que les paysans et les experts décident
à voix égales au sein du conseil d'administration.
Néanmoins, les experts mettent souvent à profit leur savoir-faire
et leurs relations au service de l'entreprise commune pour « faire avancer
les choses ».
Les premiers acquis du programme EESF capitalisés dans les
rapports 2008-2009 sont les suivants :
44
Mémoire Master Amadiane DIALLO
? Expression d'un engagement fort, de chacune des parties
impliquées, à réaliser le programme : le programme a
été entièrement autofinancé jusqu'en fin
février 2009, et le niveau de cohésion est très
élevé entre la FPTF et le concepteur du projet, la
société Performances. L'investissement réalisé par
ses promoteurs représente à cette date environ 50 Millions
FCFA.
? Contribution active à la promotion d'un modèle
de développement durable : le programme diffuse sur le site internet
du RIAED (Réseau International d'Accès aux Energies Durables) les
connaissances qu'il a capitalisées (notes relatives à la culture
du Jatropha, à la conception d'une unité de trituration
villageoise, à la relation entre biocarburants et développement
durable, sécurité alimentaire notamment...).
? Etablissement de partenariats pour le développement
des connaissances sur la culture du Jatropha : partenariat avec ADG (qui
met déjà en oeuvre un programme d'expérimentation sur la
culture du Jatropha au Sénégal, avec l'appui de la Faculté
d'Agronomie de Gembloux) et GERES (ONG française animant un
réseau régional de porteurs de projets de production d'huile
végétale pure).
? Recrutement d'un technicien agricole : sa mission
à court terme est d'accompagner les producteurs de la FPTF afin de
maximaliser le taux de réussite dans l'établissement des
plantations et de capitaliser leur expérience.
? Etablissement d'un partenariat avec le Programme National
Plateformes Multifonctionnelles financé par le PNUD : l'objectif est
d'installer au niveau de 5 pôles de développement, des plateformes
fonctionnant à l'huile Jatropha équipées d'un moteur de 20
cv, d'un broyeur et d'un " décortiqueur » à
céréales, d'un alternateur (recharge de batteries, soudure) et
d'une presse à huile.
Le programme EESF a aussi prévu l'installation d'une
huilerie polyvalente de trituration de Jatropha, d'arachide et de sésame
au niveau central du département. Un des objectifs sera de produire des
huiles alimentaires de première extraction à froid, avec option
« label bio » en plus de la production de biodiésel. Ce qui
implique une logique de production globale avec des consommations
énergétiques minimes (pas d'engrais minérales, ni de
pesticides...). En plus, il sera établi au niveau de chaque zone de
production une petite huilerie locale de même type pour favoriser la
" production au niveau des pôles de développement ruraux
d'huile végétale brute et son utilisation au niveau local pour
générer de la force motrice ou de l'électricité
».
Ainsi, le programme met en oeuvre des activités qui
visent « à développer les capacités locales
à trois niveaux : intégration de plantations villageoises de
Jatropha dans les systèmes agricoles existants, gestion des
investissements réalisés dans les zones de production, et
techniques de transformation et de commercialisation. Sa stratégie est
de décentraliser les activités de transformation afin de
maximiser les revenus générés directement au niveau
villageois. »
Le lancement du programme EESF a été
facilité par :
? les premiers investissements du principal promoteur qu'est le
cabinet Performance
? la mise en place du cadre de gestion du programme (EESF) qui a
bénéficié d'un appui financier de la Fondation Veolia pour
ses 6 premiers mois d'activité.
? L'établissement d'une convention cadre qui
définit les partenariats stratégiques sur lesquels s'appuiera le
programme EESF ; elle a été officiellement validée par
l'Agence Sénégalaise d'Electrification Rurale (ASER), le
Programme Régional Energie Pauvreté (PREP), le Programme Eau
Potable et Assainissement pour le Millénaire (PEPAM), le Conseil
Régional de Fatick (CRF), le programme AREED de l'ONG ENDA Tiers
Monde.
? la distribution de semences de Jatropha curcas auprès de
10 groupements de
producteurs pour la plantation d'environ 400 ha dans une
vingtaine de villages.
Le démarrage opérationnel du volet «
biocarburant » du programme EESF a été effectif en fin juin
2008 avec le début des plantations de Jatropha.
2.2- Les modes de plantation du Jatropha
suggérés aux exploitations agricoles familiales Trois
modes de plantations ont été recommandés aux producteurs
pour la plantation du Jatropha.
? En culture pure : la première recommandation est de
semer dès les premières pluies afin de bénéficier
d'une période de croissance la plus longue possible. Les
écartements préconisés sont de 2,5 x 2,5 m pour une
densité de semis de 1600 plants/ha.
? En culture associée : il a été
conseillé d'alterner, dans une même parcelle, le Jatropha et la
culture annuelle de préférence l'arachide avec des
écartements entre les lignes de Jatropha de 10 m et 2,5 m sur la ligne.
Ce qui va donner une densité de 400 plants à l'hectare. Les
lignes de semis de l'arachide doivent aussi être espacées de
celles du
46
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Jatropha d'au moins 50 cm. C'est le mode de plantation qui a
été le plus conseillé par le projet.
? En haie vive : le Jatropha doit être planté en
deux rangées espacées de 0,50 m avec des écartements de 1
m entre les plants. Ce qui donne l'équivalent de 800 plants pour la
clôture d'une parcelle d'un ha ou 2000 plants sur une haie d'un km.
Les semis directs ont été encouragés
dès la première année. Mais, face aux attaques
dévastatrices des iules et des sautereaux au stade plantule, le recours
aux pépinières a été l'alternative salvatrice. Le
traitement avec le «margousier» ou «neem» (Azadirachta
indica) est préconisé pour lutter contre les éventuelles
attaques.
2.3- Etat d'avancement
Le nombre des producteurs impliqués dans la plantation
de Jatropha a connu une augmentation très significative. De 400
producteurs en 2008, il est passé à 603 pour l'année 2009
malgré les faibles résultats de la première campagne de
plantation. Un nouveau groupement de 181 producteurs a adhéré
à la FPTF.
Les intentions de plantations qui s'élevaient
initialement à 514 ha en 2009, soit l'équivalent, en culture
associée d'environ 200.000 plants ont été
dépassées en réalisation avec environ 340.000 plants dans
la même campagne agricole.
Au niveau de la SOPREEF, l'entrée d'un nouveau membre
au Conseil d'Administration a été acceptée. Il s'agit de
l'association française (sans but lucratif) Présent d'Avenir qui
a pour objectif de « soutenir les actions en faveur du
développement durable, de l'accès à l'eau potable et aux
énergies renouvelables, et de la création d'entreprises
solidaires, en France et dans les pays du Tiers-Monde ». Son
rôle dans la SOPREEF est « d'en faciliter le bon
déroulement en donnant aux acteurs locaux les moyens de conserver leur
indépendance vis à vis de leurs partenaires externes
...». C'est pourquoi, elle a pris en charge les frais de
fonctionnement du programme (location bureau, salaires employés,
logistique...) pour un montant de 30.000 euros pour une durée de 5 ans.
En outre, elle participe à la recherche de financements pour les
investissements de SOPREEF notamment l'installation des unités de
trituration. Une première huilerie est en cours de construction à
Sokone, au centre du département depuis janvier 2011. C'est une huilerie
"pilote" qui servira de modèle pour les huileries
décentralisées à installer au niveau des pôles de
développement. Cette huilerie a pour vocation « d'assurer
l'autofinancement de la coordination du programme EESF et de servir
de centre de formation de techniciens ruraux qui seront
installés dans chacune des zones de production ».
3- Présentation du site de l'étude : la
communauté rurale de Nioro Alassane Tall
3.1- Aspects administratifs et organisationnels
Le pôle de développement de Dantakhone choisi
pour cette étude est situé dans la communauté rurale de
Nioro Alassane Tall (confère carte en annexe). Le choix de
présenter la communauté rurale au lieu du pôle de
développement se justifie par le fait que toutes les études
monographiques officielles et les plans de développement local (PDL)
sont réalisés à cette échelle.
Avec une superficie de 330 Km2, Nioro Alassane Tall
est la communauté rurale la plus vaste de l'arrondissement de Toubacouta
sis département de Foundiougne, région de Fatick. Elle est
composée de soixante et un (61) villages. Elle est sous
l'autorité d'un conseil rural composé de 46 membres élus
au suffrage universel au sein duquel un président est choisi. La
répartition géographique des élus est plus ou moins
homogène avec le pourcentage théorique de représentation
villageoise qui est de l'ordre d'un conseiller pour 1,32 village. Le conseil
rural fonctionne avec des collèges de réflexion appelés
commissions qui forment les instances techniques du conseil rural. La
commission des finances s'occupe du processus d'élaboration du budget,
du recouvrement de la taxe rurale principalement, et de toutes les questions
liées aux finances de la communauté rurale. La commission
domaniale traite des questions liées à l'affectation et à
la désaffectation des terres du domaine National. La commission de la
planification est chargée du suivi de l'élaboration du Plan Local
de Développement (PLD). Les autres commissions de l'Education, de la
jeunesse et culture, de l'environnement et de la Santé jouent aussi leur
partition dans leurs domaines respectifs.
L'administration territoriale est assurée, à
l'échelle de l'arrondissement, par un Sous- Préfet. Il exerce un
contrôle à posteriori des activités des
collectivités locales et veille à la cohérence des
orientations locales de développement. De ce fait, il est
représenté aux différentes séances du conseil
rural. Il s'appuie sur le Centre d'Appui au Développement Local (CADL)
qui est la cellule étatique d'encadrement technique de l'économie
planifiée dans l'arrondissement chargée d'encadrer les acteurs
locaux pour un développement socioéconomique harmonieux des
terroirs de sa compétence. Il est composé d'agents techniques
spécialisés en agriculture, élevage, foresterie et
économie familiale.
48
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Comme toutes les communautés rurales du
Sénégal, Nioro Alassane Tall bénéficie aussi de
l'appui technique et financier de plusieurs partenaires au développement
dans des domaines d'intervention très variés tels que les ONG,
les projets et programmes nationaux et internationaux. L'Agence
Régionale de développement (ARD) est le point d'ancrage des
projets d'appui à la décentralisation, au développement
local et se charge parfois d'assurer la maîtrise d'ouvrage des
opérations que la région, les villes, les communes et les
communautés rurales de Fatick lui délèguent. L'Agence
Nationale de Conseil Agricole et Rural (ANCAR) est représentée
dans la communauté rurale par un conseiller agricole et rural. Il est
chargé de piloter le conseil agricole et rural selon une approche
fondée sur la demande des producteurs et en partenariat avec les
principaux acteurs du développement rural et les organisations paysannes
(OP) regroupées dans un cadre local de concertation (CLCOP).
3.2- Milieu physique
3.2.1- Relief, sols et climat
La Communauté Rurale de Nioro Alassane Tall
possède un relief relativement plat. Mais elle abrite quelques
successions d'élévations dunaires et de dépressions plus
connues sous le nom de « bas-fonds ».
Les différents sols rencontrés dans cette
communauté rurale sont communément appelés : « Dior
», « Deck » et « Deck-Dior ».
Les « Dior » sont des sols ferrugineux tropicaux
lessivés. Dans ces sols meubles et à forte
perméabilité, les éléments minéraux peuvent
migrer en profondeur et occasionner des carences en azote, phosphore et
potassium. Ce sont des sols propices à la culture de l'arachide et du
mil. Compte tenu de leur appauvrissement progressif, ces terres offrent de
faibles rendements. Ils occupent 71% des terres cultivables de la
communauté rurale.
Les « Deck » sont des sols ferrugineux tropicaux non
lessivés. Ils sont caractérisés par une forte teneur en
limons et en argile avec une grande capacité de rétention des
eaux de surface et de ruissellement. Ils couvrent 6% des terres cultivables et
sont localisés généralement au niveau des bas-fonds. Ils
sont souvent réservés aux cultures maraîchères et
rizicoles.
Les sols « Deck-Dior » sont des sols de transition
entre les « Deck » et « Dior ». Leur fertilité est
fonction de la proportion de chacun de ces types de sols. Etant plus riches que
les sols Dior en matière organique et en éléments
minéraux, ils sont plus favorables à une diversification des
cultures. Ils représentent 23% des surfaces cultivables.
Avec un climat de type soudano-sahélien, Nioro Alassane
Tall est caractérisé par une saison sèche relativement
longue de huit (08) mois qui dure d'octobre à mai et une saison des
pluies qui s'installe de juin à octobre. Sous l'influence de l'harmattan
(vent chaud et sec) pendant la saison sèche, la température varie
entre 25 à 40°. Les pluies sont généralement intenses
durant les mois d'aoüt et de septembre période durant laquelle la
mousson se fait sentir avec des températures minimales de 30 °C. La
pluviométrie enregistrée varie d'une année à une
autre. La moyenne décennale de 1999 à 2008 est de 709,3 mm (voir
histogramme ci-après).
Figure 5 : Hauteurs de pluie enregistrées dans
la communauté rurale de 1999 à 2009
Source : PLD Nioro Alassane Tall, 2009 3.2.2-
Végétation, faune et ressources en eau
La communauté rurale de Nioro Alassane Tall a une
végétation clairsemée à cause de la surexploitation
du couvert végétal qui se détériore
progressivement. Cette végétation peu riche est composée
de trois strates : la strate arborée qui est peuplée d'essences
forestières dont les plus importantes sont Cordyla pinata et Adonsonia
digitata ; la strate arbustive composée essentiellement de Combretum
glutinosum et Guiera senegalensis disséminés au niveau du terroir
communautaire et la strate herbacée qui est formée de
graminées très prisées pour le fourrage et se rencontre
surtout au niveau des terres réservées au parcours du
bétail.
La dégradation avancée des ressources
végétales est la résultante d'une faune devenue
très pauvre. En effet, il ne reste plus que quelques rares
lièvres, écureuils et singes dans la brousse. Toutefois, quelques
chacals sont recensés dans la partie orientale du terroir où une
reconstitution timide est notée.
50
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Les ressources de la communauté rurale de Nioro
Alassane Tall sont constituées par les eaux de surfaces (hydrographie)
et souterraines (hydrologie) qui sont de profondeurs variables.
L'hydrographie de la communauté rurale est
caractérisée par la présence de la vallée de
Diambang et de 79 mares qui sont essentiellement alimentées par les eaux
de ruissellement et ont une durée de rétention qui varie entre 04
et 06 mois. (PNDL, 2009). Ces eaux de surfaces sont d'une très grande
utilité pour les populations riveraines en général et pour
les éleveurs et les exploitants maraîchers en particulier.
Les eaux souterraines (hydrologie) sont essentiellement
constituées par le Continental Terminal, le paléocène et
le Maestrichtien. Le Continental Terminal, source épuisable, est
exploitée pour l'alimentation des puits traditionnels du fait de la
qualité de son eau qui est très douce. Le Paléocène
est capté à une profondeur de 60 mètres pour
l'approvisionnement des puits villageois hydrauliques de profondeur moyenne. Le
Maestrichtien lui est atteint à une profondeur supérieure
à 80 mètres avec des débits très importants
d'où son exploitation pour alimenter les forages de la communauté
rurale.
3.3- Milieu humain
3.3.1- Démographie
La population de la communauté rurale est estimée
à 28 922 habitants en 2009 (PLD, 2009). Avec une croissance annuelle de
3,8%.
La structure démographique montre que les jeunes et les
femmes sont majoritairement représentés avec respectivement plus
de 65% et près de 54,3 % de la population totale. Le rapport de
masculinité homme-femme est de 0,86 soient 100 femmes pour 86 hommes.
Avec une superficie totale de 330 km2, la
communauté rurale a une densité d'environ 88 habitants au
km2.
La composition ethnique de la population se présente
comme suit : les Wolofs sont majoritaires avec 60%, les Sérères
représentent 20%, les Socés constituent 5%, les Peuls font 2%,
les Mandingues, les Diolas et les Maures sont minoritaires et sont
éparpillés dans toute la collectivité locale.
Les mouvements migratoires se manifestent à travers des
flux internes et externes au pays. La communauté rurale n'échappe
pas au phénomène de l'exode rural qui découle d'une
répartition déséquilibrée des infrastructures
socio-économiques et culturelles défavorisant les
campagnes. Ainsi, les populations rurales, principalement les
jeunes, faute d'activités génératrices de revenus pendant
la saison sèche, migrent à partir du mois de janvier vers Fatick
et Dakar où ils mènent de petites activités pour soutenir
les parents restés au village. Certains vont aussi à Toubacouta
pour s'adonner aux activités maraîchères et touristiques.
Le retour au bercail se fait généralement au début de
l'hivernage, vers le mois de juin. (Ibid.). Une autre migration interne
liée aux études concerne les jeunes élèves et
étudiants qui partent souvent dès le mois d'octobre vers les
grandes villes du pays pour y passer l'année scolaire et universitaire.
Certains reviennent au terroir pendant leurs vacances à partir du mois
Juillet. Cependant, de plus en plus, beaucoup d'entre eux prolongent leur
séjour, voire ne retournent pas une fois les études
terminées. Enfin, la transhumance est une autre forme de migration
interne. En effet, l'extension des terres de culture due principalement aux
gros exploitants agricoles a pour conséquence la raréfaction de
zones de pâturage et de parcours du bétail dans la
communauté rurale. Ainsi les éleveurs, dans le souci
d'éviter d'éventuels conflits avec les agriculteurs, se
déplacent avec leur troupeau à la recherche de pâturage
dès le début de l'hivernage au mois juin. Ils reviennent
habituellement à la fin de l'hivernage vers le mois de
décembre.
La migration internationale concerne surtout les wolofs qui
émigrent principalement vers l'Italie qui comptent environ 600 fils du
terroir, les Etats-Unis avec environ une quarantaine de ressortissants et
l'Afrique du sud pour une vingtaine de départs. (Ibid.).
3.3.2- Situation socio-économique
3.3.2.1- Activités économiques
A l'image des autres zones rurales du Sénégal,
l'agriculture est la principale activité à Nioro Alassane Tall.
En effet, 80% de la population active s'adonne à l'agriculture pluviale
sur plus de 90% de la superficie totale de la communauté rurale. (PLD,
2002). L'activité agricole est fortement tributaire aux aléas
climatiques.
Le mil, l'aliment de base des populations, est la principale
spéculation dans la communauté rurale. Il est cultivé par
la quasi-totalité des ménages et occupe plus de 50% des terres de
culture. Toutefois, les rendements et par ricochets la production continuent de
baisser du fait des dégradations des sols et des faibles
capacités d'investissement des ménages.
L'arachide, première culture de rente dans cette partie
du bassin arachidier, demeure très prépondérante aussi
bien dans les emblavures que dans les ressources financières des
ménages en ce sens qu'elle détermine méme le statut
socioéconomique des familles. Les ménages les
52
Mémoire Master Amadiane DIALLO
plus nantis sont ceux qui récoltent plus d'arachide
compte tenu des charges financières que sa conduite nécessite. En
plus d'être source de revenus, son importance dans l'alimentation humaine
et du bétail par le biais de son sous-produit lui donne un statut
particulier dans les plans de campagne des exploitations agricoles
familiales.
D'autres spéculations comme le sorgho, le maïs, le
niébé (petit haricot), le coton, le sésame et la
pastèque sont pratiquées comme cultures d'appoint pour soit
renforcer le stock vivrier, soit augmenter le niveau de revenu des
exploitations agricoles familiales qui les conduisent. La percée de
l'anacardier comme « culture » de rente est à mettre dans ce
registre.
Le maraîchage et la riziculture, malgré un potentiel
réduit à 8% du terroir et peu accessible, sont pratiqués
dans la localité et participent à la diversification des
cultures.
L'agriculture avec un poids financier dans l'économie
locale estimée à plus de trois milliards FCFA en 2001 (PLD, 2002)
reste plombée par :
? la baisse de la fertilité des sols
? la vétusté du matériel agricole
? la mauvaise qualité des semences utilisées
? l'insuffisance et la cherté de semences
certifiées
? la divagation des animaux
? la déprédation des cultures
? la faible maîtrise des eaux de surface
? la mauvaise organisation des filières
maraîchères et arboricoles ? la difficulté de
conservation, stockage de certaines productions
L'agro-pastoralisme est une longue tradition dans la
localité du fait de l'intégration agriculture-élevage.
L'élevage pratiqué par la majorité demeure encore de type
traditionnel avec un caractère extensif. Cette forme d'élevage,
grace au faible coüt d'entretien des animaux dont 50% sont des petits
ruminants, constitue un moyen sûr d'épargne et participe de
façon très efficace à la réduction de la
vulnérabilité des ménages. Toutefois, 9% d'entre eux sont
des éleveurs professionnels. Ils essaient d'améliorer leur race
avec l'insémination artificielle et de pratiquer la stabulation
laitière et d'embouche.
Le cheptel est aussi un facteur de production agricole car il est
utilisé dans la culture attelée et assure l'évacuation des
productions via des charrettes (véhicules hippomobiles).
La localité ne disposant que de quelques zones
boisées, l'exploitation forestière se limite au ramassage du bois
de chauffe, du bois d'oeuvre et à la cueillette de fruits sauvages. Mais
cette activité est menacée par l'ampleur de la carbonisation
clandestine, la coupe abusive, les feux de brousse qui sévissent
généralement en saison sèche.
Face au contexte économique difficile, la
majorité des habitants ne se limite pas aux seules activités
agricoles pour assurer les besoins familiaux. En plus de ces activités
phares, 5% des ménages s'activent dans le commerce, 3% exercent dans
l'artisanat et 3% sont dans d'autres corps de métiers.
3.3.2.2- Infrastructures
socio-économiques
De par sa position centrale par rapport à
l'arrondissement et de sa proximité avec la Gambie, la communauté
rurale de Nioro Allasane Tall constitue un pôle d'échanges
important. En effet, le marché hebdomadaire (« louma »)
créé en 1983 dans le village de Touba Mouride est le point de
convergence, tous les dimanches, de l'ensemble des communautés rurales
et communes voisines. Ce grand centre enregistre un volume considérable
d'échanges et de transactions. Il est très
fréquenté par les commerçants « banabana » des
grandes villes du pays telles que Dakar, Thiès, Kaolack. C'est une
occasion pour les producteurs d'écouler leurs stocks de produits
agricoles en réserve et quelques têtes de bétail. Les
marchés hebdomadaires de Sokone, de Toubacouta et Passy situés
hors de la communauté rurale leur servent aussi de
débouchés.
Pour soutenir toutes ces activités, le Crédit
Mutuel du Sénégal (CMS) est la seule institution de microfinance
présente dans la communauté rurale. Ce réseau de caisses
d'épargne et de crédit intervient dans la communauté
rurale depuis 1998. Le crédit est généralement
destiné aux activités d'agriculture, d'élevage,
d'artisanat et de commerce. Les groupements féminins sont leurs plus
fidèles clients. Cependant, les populations tout en reconnaissant
l'importance de ses interventions, déplorent ses conditions difficiles
d'éligibilité notamment la garantie et le taux
d'intérêt élevé.
Pour l'éducation et la formation, la communauté
rurale compte 27 écoles primaires françaises et un Collège
d'Enseignement Moyen (CEM) de huit (08) cours en 2009. Les écoles arabes
sont au nombre de 37 tandis que 77 « daaras» ou internats
d'enseignement religieux ont été dénombrés en 2009
dans les 61 villages de la communauté rurale. Malgré tous ces
centres d'apprentissage, la déperdition scolaire est courante.
54
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Les infrastructures sanitaires de la communauté rurale
se résument à deux (02) postes de santé et à douze
(12) cases de santé avec un taux de couverture de 14.461 habitants pour
un Infirmier Chef de Poste (ICP) alors que les normes cibles de l'OMS sont de
un ICP pour 5 000 habitants. En outre, Il est diagnostiqué que
près de la moitié de la population vit à plus de 5
kilomètres du poste de santé le plus proche.
Les infrastructures hydrauliques sont composées de 2
forages avec bornes fontaines raccordées aux réseaux d'adduction
d'eau permettant l'accès à l'eau potable des populations de 25
villages en tout. Ils sont complétés par 172 puits
disséminés dans tous les villages. Mais la non
fonctionnalité de 45% de ces puits ne fait qu'accentuer le
déficit dans l'approvisionnement en eau potable de la communauté
rurale.
Dans le cadre du programme d'électrification rurale,
seuls 82 ménages sont connectés au réseau conventionnel
tandis que les panneaux solaires permettent l'alimentation de 61% des
ménages que compte la collectivité locale. L'introduction de
l'énergie électrique a suscité de nouveaux besoins que la
capacité d'un module solaire par maison ne peut pas satisfaire.
Toutefois, les combustibles ligneux restent la principale
source d'énergie des habitants. Dans le but de les brûler
efficacement, des foyers améliorés ont été
introduits dans la communauté rurale. C'est ainsi que 571 ménages
disposent de foyers améliorés.
En voies de communication, Nioro Allassane Tall est desservie
sur trente (30) kilomètres par la piste latéritique qui la relie
aux communautés rurales voisine de Keur Saloum Diané et
Toubacouta débouchant sur la nationale n°5 qui mène vers
Fatick et Gambie. Les villages de l'intérieur sont reliés entre
eux par un réseau de pistes de fortune qui deviennent de plus en plus
étroites à cause de l'extension anarchique des champs de culture
situés de part et d'autre.
Concernant les échanges et communications entre villes,
les technologies de l'information et de la communication prennent le relais des
circuits traditionnels notamment le rôle de vecteur d'information que
jouaient les griots. La téléphonie mobile, en pleine expansion,
facilite la communication entre les habitants de la communauté rurale
qui comptent plus de 5000 abonnés. Ainsi, chaque ménage compte en
moyenne un membre qui possède un téléphone portable. La
radio constitue toutefois la principale source d'information des populations,
chaque ménage dispose d'un poste de radio pour capter les
fréquences des radios publiques, privées et communautaires. La
télévision est aussi un outil de communication permettant
à un bon nombre d'habitants d'avoir accès aux informations
nationales et
internationales. Il y a même une minorité qui
possède des antennes paraboliques leur permettant de capter plus de
télévisions nationales et étrangères.
CHAPITRE 3: APPROCHE METHODOLOGIQUE
1- Sources des données documentaires
Une recherche documentaire a permis, dans un premier temps, de
faire une étude bibliographique afin de mieux cerner la
problématique des agrocarburants, des changements climatiques, des
Mécanismes du Développement Propre, des exploitations agricoles
familiales. Les ressources documentaires de l'UCL et du Sénégal
ont été mises à profit. Certains ouvrages abordant le
thème à traiter ont été acquis au niveau des
bibliothèques privées. Afin de peaufiner mon angle d'analyse du
sujet, un accent particulier a été mis sur la lecture d'articles
et de contributions traitant de la question des projets d'agrocarburants.
En outre, des entretiens exploratoires avec des personnes
ressources (membres commision mémoire, experts dans le domaine des
agrocarburants, promoteurs de projets, collègues et quelques conseillers
agricoles et ruraux) m'ont aidé à mettre en lumière des
aspects du problème étudié.
Des recueils de données socio-économiques
nationales et locales ont été faits au niveau de l'Agence
Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), de la Direction
de l'Analyse, de la Prévision et des Statistiques (DAPS), de la
Direction de l'agriculture, de l'Institut Sénégalais de
Recherches Agricoles (ISRA) , du Programme National de Développement
Local (P.N.D.L), de l'Agence Nationale Désignée pour les MDP, du
projet Jatropha de Foundiougne.
2- Enquêtes de terrain
Le travail de terrain a démarré avec des
interviews de différentes « personnes ressources » dans les
instituts et agences des ministères à Dakar. Ensuite, des visites
de terrain, des enquêtes au niveau des producteurs se sont
déroulées tour à tour dans les départements de
Louga et de Foundiougne. J'ai moi-même effectué toutes les
interviews et enquêtes.
Deux guides d'entretiens ont servi de support aux interviews
des personnes ressources et des autorités des collectivités
locales. Le guide d'entretien « personnes ressources » met l'accent
sur les logiques globales des projets d'agrocarburants et leurs impacts sur le
local (voir annexe 1). Tandis que celui des autorités des
collectivités locales aborde les problèmes
56
Mémoire Master Amadiane DIALLO
de la gestion foncière, du plan de développement
local vis-à-vis des projets d'agrocarburants. (confère annexe
2).
Le choix des personnes ressources a été
guidé par leur implication dans des questions de dynamique globale et
locale du développement. Il n'a pas été difficile de
cibler les autorités locales car ils sont nommés ou élus,
donc connus de tous.
Les enquêtes auprès des chefs d'exploitations
agricoles familiales sont composé de différentes parties :
population ; foncier disponible ; Cheptel ; Installation et équipement ;
Activités ; Productions végétales ; Productions animales ;
Plan de campagne et des questions relatives à leur motivation
personnelle pour le projet Jatropha.
Les données structurelles font une « photographie
» globale des exploitations agricoles familiales enquêtées.
Une première rubrique donne les renseignements sur la population du
ménage : tranche d'age des membres, tranche d'age des actifs, tranche
d'age des lettrés. Ensuite vient le foncier de l'exploitation :
superficie disponible, superficie cultivée par année, superficie
en jachère, l'appréciation de la fertilité et la
possibilité d'extension. Des informations ont aussi été
obtenues sur les installations et équipements agricoles de
l'exploitation, le cheptel, les activités menées, les moyennes
des productions végétales et animales des cinq dernières
années, les objectifs prioritaires de productions
végétales, animales et autres activités non agricoles.
Dans un souci de faciliter la saisie et la synthèse, toutes ces
données ont été enregistrées directement dans les
fiches d'enquête sous forme de matrices au fur et à mesure des
interviews avec les chefs d'exploitation.
A travers le questionnaire « producteur chef
d'exploitation agricole familiale », des réponses quantifiables ont
aussi été obtenues aux questions ayant trait à :
l'âge, l'ancienneté de la famille dans le village, l'estimation du
revenu annuel et la ventilation par poste de dépenses, le mode de
plantation et superficie réservée au Jatropha, les
prévisions d'augmentation de superficie de Jatropha en hectares.
Ce même questionnaire a permis d'avoir des
données qualitatives relatives à : ethnie, types de sol, mode
d'acquisition du noyau initial de l'exploitation, motivations par rapport aux
principales cultures vivrières et de rentes conduites, dangers
menaçant la vie de l'exploitation, réactions/adaptations à
ces menaces, raisons de l'implication dans le programme Jatropha, mode de
plantation adopté, principales contraintes de la conduite de la culture
et perspectives.
Au-delà du questionnaire « producteur chef
d'exploitation agricole familiale », différentes interviews ont
été enregistrées sur un dictaphone. Ces fichiers
comprennent les avis des
personnes ressources sur les projets d'agrocarburants et
l'agriculture sénégalaise ; les opinions des élus et
techniciens locaux qui ont abordé la question sous l'angle foncier et
les points de vigilance qui interpellent les acteurs de la mise en oeuvre des
projets d'agrocarburants en milieu rural.
Des données socio-économiques nationales et locales
ont été aussi collectées.
3- Echantillonnage
Pour le choix des villages où je devais
séjourner pour réaliser les enquêtes, la liste des
pôles de développement a été choisie comme base de
sondage primaire. Il fallait choisir un pôle de développement qui
comptait plus de membres et de superficies de Jatropha plantées.
Pour éviter des biais liés au statut du
président de la fédération des producteurs, son pôle
de développement d'appartenance a été d'office
éliminé du tirage. Ainsi, il ne restait qu'à choisir le
pôle qui compte le plus de producteurs et qui a enregistré plus
d'emblavures de Jatropha la campagne passée. Avec 71 ha plantés
par 40 producteurs membres durant la campagne agricole 2008-2009, le pôle
de développement de Dantakhoun a été choisi pour abriter
les enquêtes de terrain. Il est composé de 7 villages. Pour le
choix des villages, j'ai tenu compte de leur ancienneté et de leur
composition ethnique. Les quatre villages suivants ont été
identifiés : Dantakhoun, Kimintang, Keur Sambaré, Ngoungou. Un
autre gros village du nom de Keur Serigne Bamba d'un autre pôle mais
contiguë au premier a été aussi enquêté par
souci de diversification des réponses. L'unité d'observation de
l'enquête est l'exploitation agricole familiale.
Dans un village, tous les producteurs membres ont
été interrogés. Néanmoins des chefs d'exploitation
ont été sollicités bien qu'ils n'aient pas encore
planté de Jatropha.
Pour plus d'anonymat et de confidentialité dans
l'enquête, j'ai encouragé les producteurs à me recevoir
chez eux plutôt que dans les places publiques des villages. Les visites
dans les concessions m'ont aussi permis de faire des observations directes
au-delà des questions posées.
Mon souci n'étant pas d'avoir une
représentativité absolue de l'échantillon au niveau
départemental, j'ai choisi de me limiter à 25 exploitations
agricoles familiales à enquêter. Cet échantillon semble
suffisant pour faire l'analyse des stratégies d'une cinquantaine
d'exploitations agricoles familiales impliquées dans le projet de
plantation de Jatropha au niveau du pôle de développement, voire
de la communauté rurale concernée.
58
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Néanmoins, la typologie des exploitations agricoles
familiales prendra en compte certainement la diversité des exploitations
impliquées dans le projet.
Par ailleurs, 10 producteurs de la zone nord (Louga)
travaillant comme ouvriers agricoles dans les plantations de Jatropha ont
été interviewés spontanément sans
référence particulière. Leurs témoignages vont
servir de mieux cadrer les points de vigilance à ressortir sur la mise
en oeuvre des projets d'agrocarburants de proximité.
Dans les plantations du Nord comme dans les parcelles de notre
zone d'étude, la méthode d'observation directe participante a
été adoptée. J'ai observé pendant des semaines les
comportements des producteurs dans l'exercice de leurs activités
agricoles pour essayer de les mettre en confrontation avec les réponses
qu'ils m'ont données au cours des enquêtes.
4- Mode de traitement des données
Le dépouillement des données a été
effectué à l'aide des matrices sur des feuillées
liées conçues sous tableur Excel.
Les premières consolidations des données mettant
en exergue certains indicateurs clé par exploitation ont
été réalisées sous Excel avec des tableaux
croisés dynamiques. Pour un traitement plus approprié aux tests
statistiques, à la classification et à la typologie, les
données saisies sous Excel ont été exportées vers
le logiciel SPSS.
La comparaison des moyennes par village ou par groupe
identifié a été réalisée par une analyse des
variances notamment le test de Fisher (F). Le seuil d'erreur á = 0,05
soit 95% de chance a été privilégié. Ainsi,
l'hypothèse nulle (H0), qui suppose
l'égalité des moyennes, est acceptée si F est
inférieure ou égale à 1. Par contre, si F > 1 et la
signification asymptotique (sig) est inférieure à á =
0,05, alors il y a une différence statistiquement significatif entre les
moyennes.
Les données socio-économiques nationales et
locales servent de références pour l'analyse des
résultats. Les récits d'entretien sont utilisés comme
éléments de recoupements afin de mieux argumenter les conclusions
à tirer.
5- Difficultés et limites
La difficulté majeure réside dans le fait que le
projet pris comme cas d'étude est presque à l'état
embryonnaire. Ainsi, les stratégies des acteurs sont plus difficiles
à cerner à ce niveau de mise en oeuvre d'autant plus que le temps
imparti au stage était très limite.
Le fait que mon introduction dans le milieu et ma
présentation aux producteurs soient facilitées par les
techniciens de SOPREEF pouvait constituer un biais dans la qualité des
réponses que j'ai reçues des exploitations agricoles familiales
enquêtées. En effet, certains seraient tentés de me dire ce
que les défenseurs du projet veulent entendre, d'autres
détracteurs d'adopter l'attitude contraire. Mon expérience dans
l'appui conseil dans cette même zone m'a permis d'être vigilant
à ces tentatives qui n'ont pas manquées tout au long de mon
terrain.
La taille réduite de l'échantillon ne permet pas de
faire une extrapolation judicieuse à l'échelle de tout le
département.
D'autre part, je suis conscient de la limite de certains
indicateurs difficiles à collecter par enquête. Le remplacement
des valeurs précises par des ordres de grandeurs sera effectué
avec prudence car l'essentiel est de conduire des raisonnements qualitatifs
pertinents que suggèrent ces données plutôt que de vouloir
traduire la réalité par une série de chiffres.
L'utilisation du logiciel SPSS serait plus intéressante si
l'échantillon était grand. C'est pourquoi son apport a
été plus sur le plan des tests statistiques et de la
typologie.
Finalement cette taille réduite de l'échantillon
a permis de mieux cerner certaines réalités et
spécificités des exploitations agricoles familiales. Il est
même arrivé d'identifier des erreurs du fait qu'on se rappelle de
l'exploitation en question.
DEUXIÈME PARTIE : PRESENTATION ET ANALYSE DES
RESULTATS DE L'ETUDE
CHAPITRE 4 : CARACTERISATION ET TYPOLOGIE DES
EXPLOITATIONS AGRICOLES FAMILIALES ENQUETEES
Une discussion que j'ai eue avec un chef d'exploitation
mérite d'être relater pour introduire ce chapitre. En
prélude d'une interview, j'ai tenté d'expliquer à un
producteur les motivations et l'objet de mes enquêtes mais il a
réagi en ces termes : « Si c'est au sujet du projet Jatropha que tu
enquêtes, pourquoi tu veux poser autant de questions sur mon
ménage ? » Je lui ai répondu « C'est simplement pour
prendre une photographie de votre exploitation qui sera confrontée avec
l'image que vous projetez en cheminant avec le projet Jatropha ».
Après un rire familier, il acquiesce de la tête et réplique
: « tu es rusé car tu
60
Mémoire Master Amadiane DIALLO
m'obliges ainsi à être cohérent dans mes
réponses, donc à te révéler mes vraies
motivations..., tu es un vrai peulh toi » (les sénégalais de
l'ethnie peulh sont des cousins à plaisanterie de celle des
sérères : le vieux est un sérère et moi
peulh....)
1- Caractérisation des exploitations agricoles
familiales enquêtées
1.1- Démographie
1.1.1- Sexe, ethnie, niveau d'instruction et age des
chefs d'exploitation
Les chefs d'exploitation enquêtés sont
généralement des hommes à l'exception d'une femme qui a
acquis ce statut à la suite du décès de son mari. Au
Sénégal, la proportion des femmes rurales chefs de ménage
est faible. Elle est de l'ordre de 13% selon le rapport de l'Enquête
Sénégalaise auprès des Ménages (ESAM2, 2004). Le
statut de « femme au foyer avec un mari chef de ménage » a
longtemps été ancré dans les mentalités des
sociétés agricoles traditionnelles. Certes, les femmes jouissent
de libertés et d'indépendance mais dans des domaines qui ne
frisent pas la « défiance » ou la « déviance
» de l'ordre établi et accepté « culturellement »
de tous. Ceci dénote, en milieu rural, d'une résistance aux
changements de mentalités favorables à la promotion des femmes
à travers leur responsabilisation et leur autonomisation.
Les chefs d'exploitation enquêtés sont de quatre
ethnies différentes : Wolof (au nombre de 03), Sérère (au
nombre de 09), Socé (au nombre de 11), Peulh (au nombre de 02).
Concernant leur niveau d'instruction, 14 d'entre eux ont fait
l'école coranique, 05 ont arrêté leurs études
à l'école primaire française, 02 au secondaire dont un
instituteur, 02 sont alphabétisés dans leur langue, 01 a
fréquenté les écoles coranique et primaire français
et 01 n'a aucun niveau d'instruction.
L'age moyen des chefs d'exploitation est d'environ 50 ans avec
un écart type de 9,88. 56% des chefs d'exploitation ont plus de 50 ans.
Si l'on considère qu'un chef d'exploitation est jeune s'il a moins de 40
ans, notre échantillon est alors composé de seulement 24 % de
jeunes chef d'exploitation.
1.1.2- Population des exploitations
La taille moyenne des exploitations enquêtées est
de 13,96 #177; 5,01 personnes. Le test de Fisher (F=8,72>1 et sig=0,001<
á=5%) montre qu'il y a une différence significative entre les
tailles moyennes par village. L'écart vient surtout du village de Keur
Serigne Bamba qui a une taille moyenne de 20,80 #177; 4,91 personnes par
exploitation. La moyenne nationale tourne
autour de 10 personnes par ménage rural. Ce qui peut
signifier que les exploitations enquêtées ont des tailles de
population très élevées.
Concernant les lettrés toutes langues confondues
(locale, arabe, français), ils sont en moyenne de 6,92#177;5,03
personnes par exploitation soit 49,57 % de ses membres. Il n'y a pas de
différences entre les moyennes par village d'après le test de
Fisher.
1.2- Moyens de production
1.2.1- Main d'oeuvre familiale et actif agricole
La main d'oeuvre familiale est constituée par les
membres dont le chef d'exploitation juge qu'ils participent activement aux
travaux champétres. La population active moyenne par exploitation est de
8,92#177;4,46 personnes. L'analyse de variance ((F = 4,311>1 et sig =
0,016< á=5%) montre qu'il y a une différence significative
entre les moyennes des villages. Ce qui donne un taux d'activité moyen
de 63%#177;15% par exploitation sans différence significative entre les
villages (F=0,32<1). Un tel taux peut-être jugé acceptable en
zone rurale car signifiant que plus de 6 personnes travaillent aux champs pour
nourrir 10 personnes de l'exploitation agricole familiale.
A côté de cette réalité du terrain
qui privilégie la population active comme travailleur agricole, il est
couramment utilisé dans les études en zone tropicale la notion
d'actif agricole. Il correspond à un homme adulte valide
âgé de 15 à 55 ans avec une pondération selon l'age
et le sexe : un homme (15 à 55 ans) = 1 actif ; une femme (15 à55
ans) = 0,7 actif ; un homme (5 à 14 ans) = 0,5 actif ; une femme (5
à 14 ans) = 0,25 et une personne âgée (> 55 ans) = 0,5
actif. Le calcul des actifs agricoles avec ces normes donne une moyenne de
5,79#177;2,71 par exploitation avec une différence significative entre
les moyennes des villages (F=3,974>1 et sig=0,022 < á=5%).
1.2.2- Capital foncier
Le capital foncier est considéré ici comme
l'ensemble des terres exploitées et en jachère dont dispose
l'exploitation agricole familiale. En moyenne, chaque exploitation de
l'échantillon possède 10,96 #177; 8,70 ha. L'écart type
très élevé dénote d'une très grande
dispersion des valeurs entre les exploitations. En effet le test de Fisher le
confirme (F=3,82 > 1 et sig=0,025 < 5%) avec une différence
significative entre les moyennes des villages. Le village de Keur Serigne Bamba
semble sortir du lot car ayant une moyenne de 20#177;14,57 ha de disponible
foncier par exploitation. L'écart type élevé et la
différence significative peuvent
62
Mémoire Master Amadiane DIALLO
s'expliquer par la présence dans l'échantillon
d'une exploitation de ce village totalisant à elle seule 45 ha de
disponibilité foncière.
Concernant le mode d'acquisition ou de faire valoir des
terres, les tendances sont les suivantes: 84% sont acquises par
héritage, 10% par affectation, 4% par défriche et 2% par un
prêt à long terme. Il faut aussi remarquer que toutes les
exploitations de tous les villages ont répondu « non »
à la question « est ce qu'il y a une possibilité d'extension
de vos parcelles dans le village ? ». En effet dans cette zone, les
réserves foncières sont quasi-épuisées.
1.2.3- Matériels agricoles et cheptel de
trait
Le semoir et la houe sont des matériels agricoles
essentiels pour la conduite des cultures dans ces zones. C'est surement ce qui
justifie la disponibilité moyenne de plus de 1,28 semoir et de 1,64 houe
par exploitation. Pour le semoir, il y a une différence non
significative entre les villages (F = 3,968 >1 et sig= 0,082 >
á=5%). Concernant la houe, il n'y a pas de différence entre les
disponibilités moyennes par village.
Je vais maintenant m'intéresser aux taux
d'équipement en semoir et en houe pour voir si les exploitations
possèdent un niveau d'équipement suffisant à la conduite
correcte de leur plan de campagne agricole. Pour cela, les normes de l'ISRA
seront mobilisées. La formule du Taux d'équipement est
donnée avec des normes et des clés d'interprétation qui
découlent de plusieurs années de recherche sur le terrain :
? Taux d'équipement (TE) = (Effectif
matériel x normes surface équipée
/ Surface de l'exploitation) x 100
? Normes surface équipée par type de
matériel: 1 semoir a une capacité de semis de 4 ha ; la
capacité de sarclage d' 1 houe est de 3,5 hectares.
? Les interprétations sont basées sur les
indications ci-après : si TE < 50%, l'exploitation est "très
sous-équipée" ; si 50% < TE ~ 90%, elle est
"sous-équipée" ; si 90% < TE ~ 110%, elle est "bien
équipée" ; si 110% < TE ~ 150%, c'est un cas d'exploitation
"suréquipée" et si TE > 150%, la situation correspond au cas
d'une exploitation "très suréquipée".
Pour une simplification dans le cadre de ce travail, les
exploitations sont regroupées en deux types : les exploitations dites
sous équipées si TE ~ 90% et bien équipées si TE
> 90%. (DIAW F. D., 2003).
Seules 09 exploitations sur les 25 sont « bien
équipées » en semoir. Pour la houe, 11 exploitations peuvent
être considérés comme « bien équipées
». Ce qui montre que malgré la présence des deux
matériels essentiels, leur nombre reste insuffisant pour l'exploitation
convenable des superficies à cultiver. C'est pourquoi, certaines
exploitations sont obligées de recourir à des locations ou des
prêts de matériels durant la campagne agricole. Les fortes
pressions sur le semoir en début d'hivernage et sur la houe pendant les
périodes de sarclage constituent des goulets d'étranglement
difficiles pour certaines exploitations. Ces dernières sont parfois
obliger de décaler les dates de semis ou abandonner des parcelles
déjà semées.
Concernant les animaux de trait, l'âne est presque
présent dans toutes les exploitations avec une moyenne de 1,04#177;
1,09. Il n'y a pas de différence significative entre village. Par
contre, il y a moins d'un bovin et de cheval de trait, en moyenne, par
exploitation. La traction asine est plus accessible aux exploitations car la
valeur de l'âne est moins élevée. Les sols de culture plus
ou moins meubles et le matériel agricole léger utilisé
dans cette zone sont très compatibles avec cette traction asine qui se
pratique à côté de celles équines et bovines.
De la méme manière que le matériel
agricole, je vais faire recours aux normes de l'ISRA pour tenter
d'apprécier les capacités de traction des exploitations
relativement à la conduite de leurs cultures. Ces normes indiquent que
les capacités de traction, quelle que soit la spéculation, sont
de 6 hectares pour 1 paire de boeufs adulte, de 3,5 hectares pour 1 cheval
adulte et de 2,5 ha pour 1 âne.
Les capacités totales de traction des exploitations
comparées aux superficies cultivées annuellement montrent qu'il
n'y a que 10 exploitations qui possèdent une capacité suffisante
de traction à la hauteur des surfaces cultivées. Ainsi, le taux
de satisfaction de la demande en traction des exploitations est en moyenne de
92%#177;7%. La différence des moyennes entre villages n'est pas
significative (F = 1,008 >1 et sig= 0,409 > á=5%). Il faut quand
méme souligner la présence dans l'échantillon de 3
exploitations qui n'ont pas d'animaux de trait en possession et font recours
à la location.
1.3- Systèmes de culture et d'élevage
1.3.1- Appréciation paysanne de la nature et de
la fertilité des sols cultivés
L'enquête sur l'appréciation des chefs
d'exploitation de la nature des sols cultivées donne :
64
Mémoire Master Amadiane DIALLO
? 16 chefs d'exploitation disent avoir des sols
majoritairement de type « Deck-Dior » à forte proportion
« Dior » ; ces sols que l'on peut qualifier de sablo-argileux leur
permettent de diversifier leurs cultures
? 09 chefs d'exploitation disent plutôt que leurs sols sont
« Dior », c'est-à-dire sablonneux et plus propices aux
cultures de l'arachide et du mil.
En ce qui concerne l'appréciation de la fertilité
des parcelles de culture, les réponses agrégées indiquent
:
? 41% de bonne fertilité ? 25% de fertilité
passable ? 37% de fertilité faible
1.3.2- Assolement, superficies emblavées et
rotations pratiquées
La moyenne des Superficies Cultivées Annuellement (SCA)
est de 7,36 #177; 4,51 ha pour toutes les 25 exploitations. L'analyse de
variance avec le test de Fisher (F = 4,457 >1 et sig= 0,014< á=
5%) révèle des différences significatives entre les
moyennes des villages. Il faut noter que dans l'échantillon, il y a 8
exploitations qui emblavent en moyenne par année moins de 5 ha ; 07 qui
font entre 5 et 9,99 ha par an, et 10 qui cultivent plus de 10 ha par an.
Sur une moyenne de 5 campagnes agricoles, les exploitations
agricoles familiales ont réparti les cultures sur les surfaces comme
indiquées dans le graphique ci-après.
Figure 6 : Assolement moyen pratiqué par les
EAF
L'arachide occupe une grande partie des surfaces cultivées
(49%). La superficie totale consacrée aux cultures
céréalières (mil, maïs, sorgho, riz) est de 48%.
Malgré les difficultés
liées à la disponibilité de semences en
quantité suffisantes et la cherté des engrais, les paysans
portent toujours leur espoir d'une bonne campagne agricole sur les bons
résultats de l'arachide. Elle est ainsi devenue un « mal
nécessaire » pour eux du moment où ils ne peuvent pas s'en
passer pour leur propre alimentation et celle des animaux surtout de trait.
Le mil et le maïs sont souvent cultivés dans les
parcelles de case (près des concessions). Tandis que l'arachide et le
sorgho sont conduits dans les parcelles plus éloignées de la
concession.
La rotation bisannuelle céréales-arachide est
pratiquée dans les parcelles de brousse tandis que dans les parcelles de
case qui bénéficient d'une bonne restitution en matière
organique, la monoculture de céréales y est de mise.
Les femmes pratiquent des « cultures
dérobées » soit à l'intérieur des parcelles,
soit sur des lignes intercalées ou autour de la parcelle. C'est une
forme d'association de culture qui permet de retrouver dans la même
parcelle arachide et bissap (Hibuscus sabdarifa) ou arachide et
niébé (petit haricot).
Concernant le Jatropha, le mode de plantation « haie vive
en bordure des parcelles de culture » est essentiellement adopté
par les exploitations. Seule deux exploitations sur les 25
enquêtées ont fait, en plus de leurs haies vives, l'une, 1 ha de
Jatropha en plein champ et l'autre, 1 ha d'association avec l'anacardier. Les
superficies des parcelles de cultures qui ont fait l'objet de haie vive sont en
moyenne de 1,56#177;1,17 ha par exploitation. Il n'y a pas de différence
entre les moyennes des villages (F=0,678<1). Pour les superficies des
parcelles prévues pour le Jatropha en haie vive dans le moyen terme, la
moyenne est de 2,24#177;3,07 ha avec une différence non significative (F
= 1,539 >1 et sig= 0,234 > á= 0,05). La corrélation
positive de 24% entre la superficie cultivée annuellement et la
superficie prévue en clôture Jatropha n'est pas significative.
Pour mieux apprécier, dans mon analyse, la culture de
Jatropha en bordure, je vais essayer de faire une estimation de la superficie
correspondante à 1 ha de haie vive en rapport avec la superficie d'1ha
de Jatropha en plein champ en me focalisant sur la densité de
plantation.
Pour 1 ha de Jatropha en plein champ, les écartements 2,5
m X 2,5 m sont préconisés par le projet. Ce qui fait une
densité de semis de (100/2,5)*(100/2,5) soit 1600 plants par ha.
Pour l'implantation des haies vives, il est pratiqué
une plantation de 2 bandes de pourtour avec des écartements de 1m X 0,5
m. Ce qui donne (400/1) plants par bande soit 800 plants pour toute la haie
vive de 2 bandes. Toute chose étant égale par ailleurs, une
déduction faite
66
Mémoire Master Amadiane DIALLO
des 1600 plants par ha, permet d'obtenir la superficie
fictive d'une haie vive plantée sur 1 ha de culture : 800/1600 soit
0,50 ha. En clôturant une parcelle en Jatropha avec la méthode
décrite, le producteur réalise 50% du nombre de plants de
Jatropha, voire la superficie correspondante en culture pure.
Ainsi, en choisissant d'opter pour le mode de plantation
« haie vive », les exploitations enquêtées ont fait en
moyenne 1,56*0,5 #177;1,17*0,5 ha de superficie fictive en Jatropha soit
0,78#177;0,58 ha et compte en faire dans le moyen terme 2,24*0,5 #177;3,07*0,5
ha soit 1,12#177;1,53 ha.
Ces superficies fictives de moins de 2 ha (0,78+1,12)
d'engagement dans le moyen terme par producteur montrent que les producteurs
ont choisi la stratégie d'intégration minimale du projet de
plantation de Jatropha.
1.3.3- Fertilisation
Tous les chefs d'exploitation enquêtés disent
connaître les avantages de la fertilisation organique notamment
l'épandage du fumier de bétail ou du parcage des animaux dans des
parcelles de cultures en vue d'améliorer la fertilité. Cependant,
les quantités de fumier épandues par ha sont très faibles.
Ceci s'explique, entre autres, par la taille réduite du cheptel bovin
notamment, le mode de conduite des troupeaux, le manque de main d'oeuvre et de
moyen adéquat pour le transport au champ. Malgré quelques
épandages dans des champs de brousse, les parcelles de case qui sont
à cheval de leurs concessions sont privilégiées.
Quant à la fertilisation minérale, elle est
pratiquée à des degrés divers. Le niveau d'utilisation des
engrais minéraux dépend des disponibilités
financières au moment où les ventes se déroulent au niveau
des communautés rurales ou au niveau des marchés hebdomadaires.
Il faut préciser que les producteurs sont maintenant obligés
d'épargner de l'argent pour acheter les engrais subventionnés au
moment venu car il n'y a plus de crédit intrants dans le programme
national.
1.3.4- Elevage
Le cheptel bovin détenu par 11 exploitations sur 25
varie de 0 à 7 têtes par exploitation. Les ovins sont aussi
présents dans 12 exploitations avec des variations de la taille de 0
à 15 par exploitation (moyenne de 2,4 #177; 3,8).
La volaille et les caprins, gérées
généralement par les femmes, sont présents dans toutes les
exploitations. Leurs effectifs sont plus importants : environ 12 par
exploitation pour la volaille et 5,4 pour les caprins.
Il faut préciser que l'élevage pratiqué
est, par excellence, de type extensif. L'alimentation du bétail est
assurée d'abord par la vaine pâture puis par les résidus de
récoltes stockés à cet effet.
La volaille, les petits ruminants (ovins, caprins) jouent un
rôle très important dans les stratégies de survie des
exploitations. Pendant les périodes de soudure, la vente d'une partie
permet aux exploitations de faire face aux dépenses quotidiennes et aux
frais de santé. Les bovins permettent aussi une capitalisation non
négligeable. Les équins et asins sont utilisés pour la
traction animale et le transport avec les charrettes.
1.4- Résultats obtenus
1.4.1- Productions et rendements
La moyenne des productions et rendements agricoles des 5
dernières campagnes donnent une idée des performances des
exploitations agricoles familiales. Pour l'arachide, les 24 exploitations qui
l'ont cultivé sur les 5 années ont produit en moyenne 2633 kg
soit un rendement de 702#177;213 kg/ha. Le mil, cultivé par toutes les
25 exploitations, donne une production moyenne par exploitation de 1120 kg avec
un rendement de 421#177;271 kg/ha. Le sorgho a permis à 8 exploitations
de récolter en moyenne 494 kg pour un rendement de 687#177;148 kg/ha. Le
maïs a été conduit durant les 5 dernières
années par 13 exploitations avec une production moyenne de 708 kg pour
un rendement de 755#177;330 kg/ha. Quant au riz, seules 3 exploitations l'ont
cultivé durant ces dernières années avec une production
moyenne de 387 kg et un rendement de 773 kg à l'hectare. L'analyse des
variances montre qu'il y a une égalité des rendements moyens par
village pour l'arachide, le mil et le sorgho. Pour le maïs, il y a une
différence qui n'est pas statiquement significative (F = 2,224 >1 et
sig= 0,155 > á= 0,05).
Il faut préciser que les producteurs ne comptabilisent
que ce qu'ils ont réellement récolté et stocké,
c'est pourquoi dans le jargon développeur au Sénégal, il
est souvent utilisé le terme de « rendement au stock » pour
faire la nuance avec le « rendement au champ ».
Une comparaison avec les rendements nationaux et
départementaux permet de mieux apprécier ces performances.
68
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Figure 7 : Comparaison des rendements moyens de 5
campagnes au niveau national, départemental et producteurs
enquêtés
Source : DAPS & Mes enquêtes, 2010
Ces différences peuvent s'expliquer par :
? le fait que les données agrégées cachent
toujours des disparités au niveau le plus bas
? les estimations des superficies et des productions par les
agriculteurs sont très décalées du dispositif d'estimation
des rendements de la DAPS (Division d'Analyse et de Prévisions des
Statistiques) : les productions données par les paysans lors des
enquêtes sont approximativement celles qu'ils ont effectivement
utilisées (« productions au
stock ») sans tenir compte des « productions au champ
»
· les pertes au champ, à la récolte, au
transport et au stockage des productions agricoles
sont considérables en milieu rural
Cependant, le fait que les exploitations agricoles familiales
enquêtées aient des rendements en dessous des moyennes nationales
et départementales, prouve que ces dernières ne sont pas aussi
performantes que l'on puisse le penser. L'analyse discriminante édifiera
sur la disparité ou la ressemblance des exploitations vis-à-vis
des rendements obtenus.
1.4.2- Taux de couverture des besoins
céréaliers
Ici, deux normes vont être mobilisées. La
première découle des normes de la FAO. D'abord, il faut partir
des Besoins énergétiques alimentaires minimaux
(kcal/personne/jour) élaborées par le
FAO/OMS qui correspondent, pour une population totale donnée, «
à la
moyenne pondérée des besoins en énergie
alimentaire minimum des différents groupes de genre-age dans la
population... »
Il est de 1770 kcal par personne par jour pour le
Sénégal en 2004-2006. (FAQ, 2007)
Ensuite, selon toujours la FAQ « malgré les
différences de forme et de taille, tous les grains de
céréales ont à peu près la même structure et
la même valeur nutritive: 100 g de grains entiers apportent environ 350
Calories...».
Sur la base de ces deux données, les besoins
minimaux en céréales sont de 505,7g/personne-adulte/j soit 184,5
kg/personne-adulte/an. Ce chiffre est très proche
de la norme de consommation établie par le CILSS19 pour les
pays du Sahel qui s'élève à 185 kg/hab./an pour le
Sénégal. (NDIAYE Q. et al., 2006)
Les besoins alimentaires variant selon l'âge et le sexe,
il est important de ramener l'effectif d'un ménage à un nombre
d'adultes, ou plutôt d'« équivalent-adulte ». Pour ce
faire, il est appliqué un coefficient de 0,5 aux individus de moins de
15 ans, de 0,8 aux femmes de plus de 15 ans, et de 1 aux hommes de plus de 15
ans. (Ibid.)
La deuxième norme s'opère sur les pratiques
paysannes en matière de prélèvements sur leur stock de
récolte de céréales de départ. Ils sont
constitués généralement :
? des réserves personnelles de semences pour la campagne
agricole à venir
? de l'aumône obligatoire (Zakat) de 10% sur les produits
de l'agriculture sous pluie que
les producteurs musulmans sont tenus de respecter au risque
d'être stigmatisé comme
déviant de la pratique religieuse
? des dons aux tiers qui ne seront pas pris en compte ici car
il est plus facile de les considérer comme des pratiques d'entre aide,
voire des stratégies de débrouille des exploitations agricoles
familiales.
Calculer le taux de couverture des besoins en
céréales va consister à faire le rapport du
disponible céréalier à la récolte moins les
prélèvements estimés sur les besoins selon les normes FAQ
: {(Disponible céréalier -
prélèvements)/besoins} x 100
Le taux moyen de satisfaction des besoins
céréaliers pour les 25 exploitations agricoles est de
82%#177;43%. L'analyse de la variance (F=0,627<1) montre qu'il n'y a pas de
différence entre les taux de couverture par village.
19 Le Comité inter-États de lutte contre
la sécheresse dans le Sahel
70
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Les tests avec les groupes obtenus de la typologie vont
être faits pour voir si cette égalité inter-village ne
cache pas des disparités entre groupes d'exploitations supra-village.
La formation des revenus agricoles et leurs ventilations par
poste de dépenses sera traitée
dans le chapitre qui va suivre.
1.5- Contraintes activité agricole,
stratégies de survie et objectifs prioritaires poursuivis
1.5.1- Contraintes de l'activité agricole
Elles sont d'ordre climatique, technique et
socio-économique.
L'activité agricole dans cette zone reste tributaire de
la pluviométrie qui est irrégulière dans l'espace et dans
le temps. Ainsi, un mauvais hivernage est synonyme de mauvaises récoltes
et de difficultés quotidiennes dans le fonctionnement des exploitations
agricoles familiales. C'est pourquoi 21 chefs d'exploitations sur 25 pensent
que le déficit pluviométrique demeure la plus grande menace de la
survie de leurs exploitations.
Sur le plan technique, les exploitations agricoles familiales
sont handicapées par la vétusté et l'insuffisance de leur
matériel mais aussi par l'accès difficile aux intrants agricoles
du fait de leur cherté comparativement à leur revenu. D'ailleurs,
20 enquêtés sur 25 trouvent que ces éléments sont
les contraintes principales à l'essor de leur activité
agricole.
L'autre contrainte majeure mentionnée par les
enquêtés est la baisse de la fertilité des sols. Elle
résulte de la dégradation des terres de cultures soumises durant
des décennies à la prépondérance de la culture de
l'arachide et de la disparition progressive de la jachère dans ces
zones. La divagation des animaux dans les parcelles de cultures est aussi
citée comme facteur limitant car occasionnant parfois des pertes de
récolte considérables.
Sur le plan socio-économique, les contreperformances de
l'arachide ont fini de fragiliser le tissu économique local longtemps
bâti autour de cette culture de rente. Concomitamment, la production
céréalière bat de l'aile et les circuits de
commercialisation des produits agricoles notamment l'arachide sont
contrôlés par des hommes d'affaires véreux exploitant les
failles d'une organisation étatique qui laisse à désirer.
La combinaison de ces différents facteurs ne permet pas aux paysans
d'assurer la sécurité alimentaire dans le long terme. Ils se
retrouvent alors dans une vulnérabilité telle que la seule voie
de salut reste diverses stratégies de survie soutenues par des
activités non agricoles.
1.5.2- Stratégies de survie
Il faut souligner que parmi les exploitations agricoles
enquêtées, les 16 possèdent des plantations de mangue ou
d'anacardier. La vente de la production issue de ces plantations est une source
de revenu considérable et permet à beaucoup d'exploitations
d'amortir les effets néfastes de la soudure.
D'autres activités génératrices de
revenus permettent aux producteurs de faire face aux situations difficiles
liées à la faiblesse des revenus agricoles. En effet, parmi les
25 exploitations enquêtées, en plus de l'activité agricole,
17 exercent une activité de petit commerce, 05 s'adonnent à des
métiers ruraux (artisanat, maçonnerie), 04 au maraîchage et
02 au transport.
L'exode rural vers les grands centres urbains du pays touche
aussi la moitié des exploitations. Toutefois, seuls 03 chefs
d'exploitation ont reconnu être véritablement appuyés par
les membres de la famille en exode.
Cependant, il n'en demeure pas moins des exploitations
agricoles familiales qui restent confrontées à la gestion
difficile des périodes de soudure. Ces dernières coïncident
habituellement avec les mois d'aoüt et de septembre
caractérisés par un épuisement des réserves
alimentaires pendant que les cultures ne sont pas encore en maturité.
Ainsi, pour faire face au déficit alimentaire, ces exploitations
agricoles adoptent des stratégies de survie comme la vente de
bétail, le nantissement du matériel agricole, voire sa vente.
Une analyse comparative des stratégies de survie par type
d'exploitations plus ou moins homogènes sera faite dans le prochain
chapitre.
1.5.3- Objectifs prioritaires poursuivis dans le moyen
terme
Tous les chefs d'exploitations interrogés ont choisi la
subsistance comme 1er objectif prioritaire. Pour le
2ème objectif prioritaire, 17 d'entre eux se disent
préoccuper par l'achat de matériel agricole pour mieux conduire
les travaux champêtres, 04 veulent construire, 03 veulent épouser
une autre femme. En 3ème priorité, 22 sont favorables
à la construction en dur de leur concession, 02 à l'achat de
matériel agricole et 01veut célébrer un nouveau
mariage.
72
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Figure 8 : La hiérarchisation des objectifs
prioritaires des EAF
NB : Série1= 1ère priorité ;
Série 2= 2ème priorité ; Série 3=
3ème priorité Source : mes enquêtes, 2010
2- Typologie des exploitations agricoles familiales
enquêtées
Dans l'optique de constituer des groupes homogènes, je
vais établir une typologie surtout structurelle des exploitations
agricoles familiales enquêtées. L'intérêt de cette
typologie est de permettre une description des exploitations à partir de
critères discriminants aptes à distinguer un nombre réduit
de classes.
2.1- Critères de regroupement
Une Analyse en Composantes principales (ACP) a
été réalisée avec les variables les plus
discriminants, voire pertinents. Il s'agit de : Population, Total foncier
disponible, Taux d'activité, Actifs agricoles, Superficie
Cultivée Annuellement, Taux de satisfaction en Traction animale, Taux
d'Equipement en houe, Taux d'Equipement en Semoir, Taux de couverture en
Céréales , Lettrés en toute langue, Superficie parcelles
clôturées en Jatropha, Superficie parcelles prévues en haie
vive Jatropha, Age du Chef d'Exploitation.
Selon l'importance des scores factoriels obtenus, la matrice des
composants a permis de dégager les variables suivants qui seront
utilisés pour faire la classification :
? composante 1 : Actifs agricoles, Population, Total foncier
disponible, Superficie Cultivée Annuellement, Taux d'activité
? composante 2 : Lettrés toute langue, Taux d'Equipement
en Semoir
? Composante 3 : Superficie parcelles clôturées en
Jatropha
? Composante 4 : Superficie parcelles prévues en haie vive
Jatropha
Tableau 2 : Matrice des composantes (ACP avec 4
composantes
|
Composante
|
|
1
|
2
|
3
|
4
|
Actifs agricoles
|
,891
|
,197
|
-,192
|
-,183
|
Population Exploitation Agricole Familiale
|
,875
|
,235
|
|
,143
|
Total foncier disponible Exploitation Agricole Familiale
|
,734
|
,152
|
,553
|
-,119
|
Superficie Cultivée Annuellement
|
,638
|
-,533
|
-,270
|
,149
|
Taux Traction Totale
|
-,578
|
|
-,259
|
-,377
|
Taux Equipement en Houe
|
-,533
|
,503
|
-,160
|
|
Taux de couverture Besoins Céréaliers
|
,108
|
-,788
|
,202
|
|
Lettrés Exploitation Agricole Familiale
|
,325
|
,710
|
,140
|
|
Taux Equipement en Semoir
|
-,388
|
,535
|
,167
|
,365
|
Superficie Parcelles Plantation Jatropha
|
|
,191
|
,677
|
-,563
|
Age du Chef d'Exploitation
|
,381
|
,390
|
-,485
|
,412
|
Superficie Parcelles Prévue en Jatropha
|
,206
|
|
,427
|
,674
|
Taux d'activité
|
,521
|
,115
|
-,414
|
-,525
|
Source : mes enquêtes via SPSS, 2010
2.2- Classification des exploitations familiales
La classification est effectuée avec le logiciel SPSS. La
méthode utilisée est la classification en nuée
dynamique.
Les meilleurs critères de typologie, en
référence aux F de l'ANOVA et selon le degré de
discrimination sont : foncier total disponible (F=49,465), Superficie parcelles
prévues en haie vive Jatropha (F= 22,129), Actifs agricoles (F=9,167) et
Superficie Cultivée Annuellement (F= 7,052).
Tableau 3 : ANOVA pour déterminer les
critères de typologie
|
Classe
|
Erreur
|
F
|
Signification
|
Moyenne des carrés
|
ddl
|
Moyenne des carrés
|
ddl
|
Population Exploitation Agricole Familiale
|
100,661
|
3
|
14,332
|
21
|
7,023
|
,002
|
Superficie Cultivée Annuellement
|
81,594
|
3
|
11,570
|
21
|
7,052
|
,002
|
Taux d'activité
|
,057
|
3
|
,018
|
21
|
3,167
|
,046
|
Taux Equipement en Semoir
|
,252
|
3
|
,377
|
21
|
,669
|
,581
|
Superficie Parcelles Plantation Jatropha
|
3,054
|
3
|
,861
|
21
|
3,548
|
,032
|
Actifs agricoles
|
33,221
|
3
|
3,624
|
21
|
9,167
|
,000
|
Lettrés Exploitation Agricole Familiale
|
17,247
|
3
|
9,510
|
21
|
1,814
|
,176
|
Total foncier dispo EA
|
530,716
|
3
|
10,729
|
21
|
49,465
|
,000
|
74
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Sup PrévueJatropha 57,372 3 2,593 21 22,129 ,000
Source : mes enquêtes via SPSS, 2010
A l'issue du traitement statistique, il est ressorti que le
"foncier total disponible», avec le F le plus élevé, est le
critère le plus déterminant pour la classification des
exploitations agricoles familiales. En conséquence, quatre groupes
d'exploitations se sont dégagés. Le tableau cidessous en donne
les détails.
Tableau 4 : Répartition des EAF de
l'échantillon dans les groupes
Types
|
Caractéristique Générale groupe
|
Nombre d'EAF concernées
|
N°EAF et nombre de villages concernés
|
A
|
foncier< 5 ha
|
4
|
12 ;
|
13 ;
|
18 ;
|
20 (3 villages)
|
B
|
5 ha = foncier < 10 ha
|
8
|
7 ; 8
|
; 9 ;
|
10
|
; 11 ; 16 ; 21 ; 23 (3villages)
|
C
|
10 ha = foncier <15ha
|
7
|
3 ; 4
|
; 6 ;
|
14
|
; 15 ; 22 ; 25 (5 villages)
|
D
|
foncier = 15ha
|
6
|
1 ; 2
|
; 5 ;
|
17
|
; 19 ; 24 (4 villages)
|
3- Caractérisation des groupes d'exploitations
agricoles familiales dégagés
Une analyse de variance avec le test de Fisher permet
d'apprécier les différences ou les ressemblances intergroupes
pour des variables données. Comme indiqué dans la démarche
méthodologique, les valeurs observées statistiquement notamment
les F et les significations asymptotiques (sig) seront comparées aux
valeurs théoriques du test F et á=0,05.
Tableau 5 : Récapitulatif de l'analyse de variance
(ANOVA) intergroupes
Variables dont égalité des
moyennes
|
Variables dont différence non significative entre
moyennes
|
Variables dont différence significative
entre
moyennes
|
âge des chefs d'exploitation
|
rendement mil des 5 dernières années
|
disponible foncier
|
taux d'activité
|
rendement maïs des 5 dernières années
|
taille de la population
|
lettrés
|
rendement sorgho des 5 dernières années
|
actifs agricoles
|
superficie parcelles clôturées en Jatropha
|
superficie des plantations d'anacardiers et de mangues
|
superficie cultivée annuellement
|
|
taux de traction animale
|
superficie des céréales
|
|
superficie parcelles prévues en haie vive Jatropha
|
superficie d'arachide
|
|
taux d'équipement en semoir
|
taux de couverture en céréales
|
|
jachère annuelle
|
taux d'équipement en houe
|
D'abord, sont repérées les variables pour
lesquelles il n'y a pas de différences entre les moyennes des groupes
selon les résultats des tests de Fisher. Il s'agit des variables
suivants: âge des chefs d'exploitation (F=0,365<1), taux
d'activité (F=0,960<1), lettrés (F=0,692<1), Superficie
parcelles clôturées en Jatropha (F=0,641<1).
Ensuite, il y a les variables qui présentent des
différences statistiquement non significatives : rendement mil des 5
dernières années (F = 1,087>1 et sig=0,376 >
á=0,05), rendement maïs des 5 dernières années (F =
1,322 >1 et sig= 0,327 > á =0,05), rendement sorgho des 5
dernières années (F = 2,146 >1 et sig= 0, 212> á =0,
05), superficie des plantations d'anacardiers et de mangues (F = 2,176 >1 et
sig= 0, 121> á =0, 05) , taux de traction animale (F = 2,670 >1 et
sig= 0, 74> á =0, 05), Superficie parcelles prévues en haie
vive Jatropha (F = 1,820 >1 et sig = 0,174 > á =0, 05), taux
d'équipement en semoir (F = 2,917 >1 et sig = 0,058 > á =0,
05), jachère annuelle (F = 2,380 >1 et sig=0,098 > á=0,
05).
Enfin, viennent les variables qui montrent des
différences statiquement significatives entre les moyennes des groupes.
Ce sont : le disponible foncier ayant servi principalement à la
typologie avec un F de 11,189 et une signification asymptotique nulle, la
taille de la population (F = 5,885>1 et sig = 0,004< á =0,05), les
actifs agricoles (F = 4,373 >1 et sig= 0,015< á =0,05), la
superficie cultivée annuellement (F = 9,306 >1 et sig= 0,000<
á =0,05), la superficie des céréales (F = 4,639 >1 et
sig= 0, 012< á =0,05), la superficie d'arachide (F = 6,443 >1 et
sig= 0, 003< á 0,05), le taux de couverture en céréales
(F = 3,228 >1 et sig= 0, 012< á =0,05), le taux
d'équipement en houe (F = 11,865 >1 et sig= 0, 012< á
=0,05).
A la suite de cette analyse de variance, les
caractéristiques générales des quatre groupes sont
obtenues par une analyse statistique descriptive pour principalement les
variables statistiquement discriminantes.
? Exploitations de type A (au nombre de 4):
foncier disponible < 5 ha
Elles ont en moyenne une population de 9 personnes dont un peu
plus de la moitié (52%) est active. A l'aide d'un équipement
satisfaisant en semoir et en houe et une traction animale suffisante, 3,05
actifs agricoles exploitent annuellement 2,75 ha dont 1,12 ha en arachide.
Elles couvrent en moyenne 85% des besoins en céréales. Elles ont
déjà clôturé en moyenne 1,12 ha de leurs parcelles
de culture en Jatropha et ont prévu d'en faire 1 ha de plus.
76
Mémoire Master Amadiane DIALLO
? Exploitations de type B (au nombre de 8): 5 ha
= foncier < 10 ha
Elles sont des exploitations de taille moyenne de 12,62
personnes. En moyenne, 5,51 actifs agricoles conduisent annuellement 4,62 ha
dont 1,94 ha en arachide. Elles sont bien équipées en houe et
sous équipées en semoir. Elles sont bien dotées en
traction animale. Toutefois, elles ne parviennent pas à satisfaire leurs
besoins en céréales par leurs récoltes (48,75% en
moyenne). Pourtant, 1,94 ha en moyenne de leurs parcelles sont
clôturés en Jatropha et 1,12 ha sont prévus.
? Exploitations de type C (au nombre de 7): 10
ha = foncier disponible<15ha
Elles sont de taille plus importante avec une moyenne de 13,86
personnes par exploitation. Avec 5,51 actifs agricoles, elles exploitent aussi
des superficies non négligeables par année (9,71 ha)
comparées aux groupes précédents. Leurs taux
d'équipements en semoir et houe sont très bas (50% et 40%). Elles
ne sont pas aussi bien pourvues en traction animale (68,29% de taux de
satisfaction). Toutefois, elles assurent leurs besoins en
céréales (101,29 %). Elles ont planté en moyenne 1,43 ha
de Jatropha autour de leurs parcelles et comptent en faire 2,28 ha de plus.
? Exploitations de type D (au nombre de 6):
foncier disponible = 15ha
Avec une grande taille de population (19,17 personnes) et un
taux d'activité de 68%, en moyenne 8,26 actifs conduisent annuellement
11,33 ha malgré qu'elles soient sous équipées en semoir et
en houe (88,33% et 76,67%) avec une traction animale déficiente (49%).
Elles emblavent 6,08 ha d'arachide et parviennent à couvrir 101,67% de
leur besoins en céréales.
Elles n'ont déjà clôturé que 1,33
ha avec du Jatropha mais elles comptent réaliser 4,5 ha de haie vive en
plus.
La subdivision des groupes en sous-groupes permettrait d'aller
plus loin dans la typologie. Un tel exercice n'est pas envisageable comme tenu
du nombre limité d'exploitations de l'échantillon.
La caractérisation des groupes fait remarquer que les
exploitations agricoles familiales, malgré quelques dissemblances
structurelles, ont la même stratégie d'intégration du
projet par rapport aux superficies des parcelles déjà
clôturées (égalité des moyennes) et à celles
prévues en haie vive Jatropha (différence non significative).
Le chapitre suivant va aborder plus en détails les
stratégies des groupes d'exploitations.
CHAPITRE 5 : OBJECTIFS ET STRATEGIES DES ACTEURS AUTOUR
DU PROJET JATROPHA
1-Analyse des objectifs et des stratégies
paysannes par type d'exploitation agricole familiale
1.1- Objectifs et plans de campagne
Comme expliqué supra, tous les chiffres donnés
ci-après représentent des moyennes sur les cinq dernières
campagnes agricoles avant l'enquête.
Pour rappel, dans le chapitre précédent, il a
été établi que tous les chefs d'exploitations agricoles
familiales enquêtés ont pour première priorité la
subsistance de la famille.
Le tableau ci-après résume les
éléments des deuxièmes et troisièmes objectifs
prioritaires qui confirment l'uniformité des agendas des exploitations
quel que soit le groupe d'appartenance dans la typologie
dégagée.
Tableau 6 : Synthèse des
2èmes et 3èmes objectifs
prioritaires par type d'exploitation
N° Priorités
|
Groupe
|
Nature objectifs prioritaires des Exploitation Agricoles
Familiales (EAF)
|
2ème
|
A
|
achat matériel agricole (3 EAF) et construction (1 EAF)
|
2ème
|
B
|
achat matériel agricole (5 EAF) et mariage (2 EAF)
|
2ème
|
C
|
achat matériel agricole (5 EAF); mariage (1 EAF) et
construction (1 EAF)
|
2ème
|
D
|
achat matériel agricole (4 EAF) ; construction (1 EAF) et
autre (1 EAF)
|
3ème
|
A
|
construction (4 EAF)
|
3ème
|
B
|
construction (7 EAF) et achat matériel agricole (1 EAF)
|
3ème
|
C
|
construction (6 EAF) et achat matériel agricole (1EAF)
|
3ème
|
D
|
construction (5 EAF) et mariage (1 EAF)
|
Pour réaliser ces objectifs dans le court ou le moyen
terme, les exploitations agricoles familiales essaient tant bien que mal de
mettre en oeuvre des plans de campagne d'une manière empirique. Ainsi,
je me suis intéressé à ces plans de campagne pour essayer
de comprendre leurs liens avec les objectifs prioritaires donnés par les
chefs d'exploitations.
Les schémas ci-après montrent la répartition
des cultures selon les plans de campagne par type d'exploitations (moyenne sur
5 années).
NB : SupAra=superficie moyenne arachide ; SupMil=superficie
moyenne mil ; SupSorgho =superficie moyenne sorgho ; SupMaïs=superficie
moyenne maïs ; SupRiz =superficie moyenne riz ; SupJachère
=superficie moyenne jachère.
78
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Figure 9 : Répartition des cultures selon les
plans de campagne par type d'exploitations
Source : mes enquêtes, 2010
Les exploitations de type D possédant plus de terres,
font plus d'arachide que les autres. Il en découle que plus le foncier
disponible des exploitations est élevé, plus la part des
superficies d'arachide est importante dans l'assolement.
Malgré les objectifs prioritaires poursuivis qui sont
plus ou moins identiques pour tous les groupes, les exploitations de type C et
D semblent plus s'orienter vers les cultures de rente que celles des types A et
B qui privilégient plutôt les céréales.
Concernant le Jatropha, toutes les réalisations et les
prévisions de plantations des 25 exploitations enquêtées
portent essentiellement sur la mise en place de haies vives autour des
parcelles de culture. Pour en connaitre davantage sur les raisons du choix de
ce mode de plantation parmi ceux qui étaient préconisés
par le programme, la question indirecte suivante a été
posée aux chefs d'exploitation: « quelles sont vos motivations et
intérêts pour la culture du Jatropha ? »
Les réponses les plus explicites sont reprises
ci-après :
? « Au cours des séances de sensibilisation du
projet, ce qui a plus motivé mon adhésion, c'est l'information
selon laquelle la plante peut faire 50 ans ! Là je me suis dit que c'est
une chance pour la délimitation de mes parcelles que je vais
léguer à mes enfants ! Et en même temps, on ne sait jamais,
des revenus supplémentaires sont possibles ! »
? « Même si on ne va pas gagner beaucoup
d'argent, c'est une plante qui va nous permettre de mieux maîtriser notre
patrimoine foncier dans le long terme et de lutter contre la divagation des
animaux dans le court terme »
? « En tout cas, nous ne perdrons rien en
clôturant nos propres parcelles ! Au contraire cela évitera
à terme d'éventuelles bisbilles entre agriculteurs et
éleveurs mais aussi
entre agriculteurs eux-mêmes... C'est une plante connu
déjà comme étant épargnépar le
bétail...». Ici, le chef d'exploitation fait
référence aux divagations des animaux
occasionnant parfois des dégâts obligeant, selon
la loi en vigueur, l'éleveur incriminé à indemniser le
propriétaire de la parcelle. Entre agriculteurs eux-mêmes, il
s'agit généralement des petites brouilles sur la
délimitation de leurs parcelles contiguës.
Ces réponses semblent confirmer l'idée selon
laquelle l'arbre est avant tout un élément important de marquage
foncier en milieu rural avant d'être une source de revenus. Ainsi, j'ai
supposé que toute parcelle abritant une plantation de Jatropha ou
susceptible d'en abriter permet un marquage foncier pour l'agriculteur qui
l'exploite. En d'autres termes, clôturer ou
80
Mémoire Master Amadiane DIALLO
planter une parcelle d'1ha signifie faire un marquage foncier sur
1 ha. J'ai alors exprimé les superficies clôturées ou
plantées en pourcentage de marquage sur le foncier disponible.
Le tableau ci-dessous donne les pourcentages de marquage
foncier par type d'exploitation pour les plantations de mangues et
d'anacardiers existantes, les haies vives de Jatropha déjà
installées et les plantations de haies vives Jatropha à faire
dans le moyen terme (d'ici la campagne 2011-2012). Le pourcentage des
Superficie Cultivées Annuellement (SCA) sur le foncier total est aussi
indiqué. Il s'agit des cultures annelles autres que les plantations de
manguiers et d'anacardiers. Il faut préciser que le total des
pourcentages SCA, plantations de manguiers et d'anacardiers et des
jachères supérieur à 100% s'explique par le fait que
certaines exploitations font des emblavures dans les plantations
d'anacardiers.
Tableau 7 : Pourcentage de marquage foncier par type
d'exploitation
Source : mes enquêtes, 2010
NB : EAF= Exploitation Agricole Familiale ; MoyG= Moyenne
Générale ; % Plant° Ana/Mang= Pourcentage plantation
anacardiers et/ou manguiers ; % Jachère annuel= pourcentage
jachère annuel ; % Marqg Jatph djà fait= pourcentage marquage
Jatropha déjà fait ; % Marqg Jatph à faire= pourcentage
marquage Jatropha à faire ;
% Tmarqg Jatropha= pourcentage total marquage Jatropha dans le
moyen terme ; % Tmarqg foncier= i % Plat° % Jachèr % Mqg %
Marqg % Tm % T pourcentage total marquage foncier (Jatropha +
plantation Anacardiers et Manguiers)
SCA
g p j p p
Dans le moyen terme, les exploitations de type A et B qui sont
moins dotées en terres de
8% 0 28 86%
culture, envisagent déjà de faire un marquage
foncier Jatropha sur respectivement 59% et
50% de leur foncier disponible. Ce qui leur permettra d'atteindre
86% et 64% en prenant en 3
compte le marquage foncier déjà
réalisé grâce aux plantations de mangues et d'anacardiers.
Il 47 1
faut aussi préciser que les parcelles de case ne sont pas
généralement clôturées car
bénéficiant
96 67% 31% 3% 14% 20% 34% 66%
du marquage de la concession elle-même. Elles ne sont
pas incluses dans les pourcentages de marquage foncier. A la question «
pourquoi vous ne clôturez pas vos parcelles de case par le Jatropha ?
» certains paysans « prétextent » vouloir éviter
de planter le Jatropha à proximité des habitations car il est
susceptible, du fait de ses larges feuilles, d'attirer des serpents en
quête d'ombrage. Les observations directes sur le terrain ont permis de
voir que le Jatropha
est planté de préférence dans les
parcelles de culture de brousse plus ou moins éloignée des
concessions et différentes de celles abritant les anacardiers et
manguiers.
Il y a une différence statistiquement significative
entre les moyennes par groupe des pourcentages de marquage avec les plantations
de Jatropha déjà réalisées. Mais, pour les haies
vives Jatropha prévues dans le moyen terme, il y a une
égalité des moyennes entre les groupes. Ce qui fait que la
différence entre les pourcentages du marquage total en Jatropha n'est
pas significative. Et globalement, il n'y a pas de différence entre les
moyennes pour le pourcentage de marquage foncier.
En somme, il apparait que les exploitations, quelle que soit
la typologie, cherchent à faire un marquage foncier pour
sécuriser leurs terres dans le long terme. Ainsi, les plantations de
Jatropha en bordures des parcelles viennent renforcer cette stratégie de
marquage foncier déjà enclenchée avec les manguiers et les
anacardiers.
Les exploitations semblent adopter la logique du « coup
double » en adoptant le mode de plantation « haie vive ». Elles
adhèrent au projet sans un bouleversement de leurs assolements habituels
et consolident en même temps leur marquage foncier.
1.2- Résultats d'exploitation et stratégies
paysannes
1.2.1- Activités agricoles
L'analyse de variance montre qu'il n'y a pas de
différences entre les rendements d'arachide par type. Les rendements par
type du mil, du maïs et du sorgho présentent des différences
non significatives. (Confère annexe pour l'ANOVA)
Comme le montre le tableau ci-après, les volumes des
productions sont, en moyenne (sur 5 campagnes), plus importantes pour les
exploitations des types C et D. Ceci s'explique par les superficies en leur
faveur (différence significative).
Tableau 8 : Productions agricoles moyenne par culture et
par type d'exploitation
Types exploitation
|
Type A
|
Type B
|
Type C
|
Type D
|
Moyenne25
|
Production Arachide (kg)
|
825
|
1500
|
3214
|
5038
|
2633
|
Production Mil (kg)
|
825
|
762
|
1400
|
1466
|
1120
|
Production Maïs (kg)
|
400
|
266
|
750
|
1150
|
708
|
Production Sorgho (Kg)
|
300
|
néant
|
383
|
625
|
494
|
Production Riz (kg)
|
néant
|
néant
|
néant
|
386
|
386
|
Source : mes enquêtes, 2010
82
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Les revenus agricoles sont surtout tirés par l'arachide
qui est la principale culture de rente. La commercialisation de l'arachide est
organisée, en partie, par l'état à travers des
opérateurs privés agrées et la caisse nationale de
crédit agricole comme institution financière. Avant le
début de chaque campagne de commercialisation de l'arachide,
l'état et le Comité National Interprofessionnel de l'Arachide
(CNIA) se concertent pour déterminer le prix au producteur qui devient
de ce fait le prix directeur. Ils se réfèrent aux cours mondiaux
de l'arachide auxquels l'état applique, au besoin, une subvention pour
maintenir le prix à son niveau antérieur au moins et
éviter ainsi la vérité des prix défavorables aux
producteurs, principaux « clients électeurs ».
En outre, une commercialisation informelle s'organise au
niveau des marchés hebdomadaires de proximité (Louma en langue
locale). Les prix à ce niveau dépendent du prix directeur
annoncé par l'état, de l'offre et de l'entente entre les
acheteurs sur place. Néanmoins, beaucoup de paysans
préfèrent y écouler leurs productions d'arachide car,
contrairement au circuit officiel, les acheteurs paient au comptant sans faire
un criblage préalable des graines.
Dans la zone d'étude, les trois grands marchés
hebdomadaires qui se tiennent à des jours différents de la
semaine sont des lieux d'échange très stratégiques pour
les exploitations agricoles familiales. Elles y écoulent leurs
productions animales et végétales et se procurent des
denrées de première nécessité, d'intrants et de
matériels agricoles.
Les productions de céréales font aussi l'objet
d'échange dans ces marchés hebdomadaires malgré leur
fonction première d'assurer la sécurité alimentaire. En
effet, le mil, le sorgho et le maïs jouent de plus en plus le rôle
de cultures de rente à l'image de l'arachide. Cette transition des
cultures de subsistance vers la rente s'explique par un changement des
habitudes alimentaires en milieu rural où la population a tendance
à consommer davantage du riz. Certains vont même jusqu'à
vendre une partie de leurs productions de céréales pour acheter
du riz bien que son prix soit plus élevé.
La vente des petits ruminants (moutons, chèvres) et de
la volaille reste aussi une stratégie très déployée
par les exploitations pour faire face aux périodes de soudures notamment
aux mois d'aoüt et de septembre.
A côté de ces grandes cultures, les exploitations
agricoles familiales enquêtées disposent des plantations de
mangues et d'anacardiers qui leur rapportent des ressources
supplémentaires non négligeables. La
commercialisation est facilitée par les revendeurs qui viennent parfois
acheter la production « bord champ ».
Le tableau ci-après donne les niveaux moyens de production
(sur 5 campagnes) de ces plantations par type d'exploitation.
Tableau 9 : productions arboricoles moyennes par type
d'exploitation
Types
|
Production Anacardier (kg)
|
Production Mangue (kg)
|
Type A
|
394
|
875
|
Type B
|
815
|
1281
|
Type C
|
800
|
3000
|
Type D
|
1977
|
2333
|
Moyenne25 EAF
|
1022
|
1950
|
Source : mes enquêtes, 2010
Sur la base des informations relatives aux prix de cession des
différentes productions et des dépenses effectuées,
fournies par les agriculteurs eux-mêmes, une estimation des revenus
moyens des productions végétales par type d'exploitation agricole
familiale a été réalisée.
Tableau 10 : Revenu annuel productions
végétales (MFCFA
GroupeTypo
|
Moyenne
|
N
|
Ecart-type
|
Minimum
|
Maximum
|
A
|
305,2500
|
4
|
180,37253
|
78,00
|
510,00
|
B
|
507,8750
|
8
|
250,05796
|
55,00
|
845,00
|
C
dimension1
|
931,8571
|
7
|
483,42956
|
510,00
|
1800,00
|
D
|
1345,6667
|
6
|
817,96911
|
485,00
|
2435,00
|
Total
|
795,2400
|
25
|
607,32866
|
55,00
|
2435,00
|
Source : mes enquêtes via SPSS, 2010
Tableau 11 : ANOVA Productions végétales
intergroupes
|
|
|
Somme des carrés
|
df
|
Moyenne des carrés
|
F
|
Signification
|
Revenu productions végétales *
Groupe
|
Inter- groupes
Intra-classe Total
|
Combiné
|
3569456,745
5282897,815 8852354,560
|
3
21
24
|
1189818,915
251566,563
|
4,730
|
,011
|
84
Source : mes enquêtes via SPSS, 2010
Mémoire Master Amadiane DIALLO
L'analyse de variance décèle des
différences significatives entre les groupes (F = 4,730>1 et sig =
0,011< á =0,05). Les exploitations de type C et D dégagent
plus de revenus que celles des groupes A et B. Les recettes de la vente des
productions issues des plantations de mangues et d'anacardiers ajoutées
à celles de l'arachide semblent favoriser cette
supériorité.
1.2.2- Activités génératrices de
revenus non agricoles
Compte tenu des performances erratiques de l'agriculture d'une
manière générale et particulièrement des
difficultés notées dans la commercialisation de l'arachide ces
dernières années, les exploitations agricoles familiales ont
développé d'autres activités génératrices de
revenus non agricoles. Comme souligné dans le chapitre
précédent, Il s'agit principalement du petit commerce (17/35),
des métiers ruraux tels que l'artisanat et la maçonnerie (5/25),
le maraîchage (4/25), transport (2/25). Les activités non
agricoles par type d'exploitation sont résumées dans le tableau
ci-après.
Tableau 12 : Activités non agricoles par type
d'exploitation
Types
|
Petit commerce
|
Métiers ruraux
|
Maraîchage
|
Transport
|
A
|
3EAF / 4 EAF
|
1 EAF / 4 EAF
|
0 EAF / 4 EAF
|
0 EAF / 4 EAF
|
B
|
7 EAF / 8 EAF
|
2 EAF / 8 EAF
|
2 EAF / 8 EAF
|
1 EAF / 8 EAF
|
C
|
4 EAF / 7 EAF
|
0 EAF / 7 EAF
|
2 EAF / 7 EAF
|
1 EAF / 7 EAF
|
D
|
3 EAF / 6 EAF
|
2 EAF / 6 EAF
|
0 EAF / 6 EAF
|
0 EAF / 6 EAF
|
Source : mes enquêtes, 2010
Ainsi, il est clair que quelle que soit la typologie, les
exploitations agricoles familiales s'adonnent toutes à des
activités non agricoles pour assurer la subsistance familiale.
1.2.3- Revenus globaux moyens par type d'exploitation et
ventilation par poste de dépenses Tableau 13 : Décomposition du
revenu annuel global par type d'exploitation
Type
|
arge brute
|
M arge brute
|
Total
|
Revenu
|
Revenu
|
productions
|
productions
|
revenu
|
non
|
global
|
végétales
TM
|
ani males
|
agricole
|
agricole
|
|
FCFA
|
%
|
FCFA
|
%
|
FCFA
|
%
|
FCFA
|
%
|
FCFA
|
%
|
du
|
ns
|
roductins
|
|
|
revenu470250
|
non
|
66550
|
|
globa536800
|
100%
|
A B
|
%
|
CFA
|
%
|
CFA
|
%
|
CFA
|
%58250
|
CFA
|
%
|
100%
|
50
|
6,9% 15000
|
92,3%
|
,7%
|
02503,5%
|
7,6%
|
95,7% 550
|
4%43200 56800
|
4,3%
|
1010057 00%
|
100%
|
75
|
0,1% 68000
|
94,0%
|
,7%
|
1,7% 875
|
0,8% 5250
|
|
2%60350 64125
|
4,2%
|
1431017 00%
|
100%
|
Source : mes enquêtes, 2010
966857 957% 43
Pour tous les types d'exploitation, les productions
végétales pourvoient plus de revenus que les autres secteurs. Les
exploitations des types C et D qui conduisent de grandes superficies semblent
gagner plus des productions végétales avec respectivement 92,3%
et 94% des revenus globaux. Par contre, les types A et B améliorent leur
niveau de revenu par le biais des productions animales (31,7% et 10,7%)
notamment avec la vente des petits ruminants et de la volaille.
Les chiffres dans le tableau prouvent une fois de plus que les
exploitations enquêtées tirent l'essentiel de leur revenu dans les
activés agricoles. Les revenus non agricoles, bien qu'étant des
compléments primordiaux, ne parviennent pas à se hisser au niveau
des recettes procurées par l'agriculture. C'est pourquoi malgré
toutes les contraintes structurelles et fonctionnelles, ces exploitations ne
peuvent pas se passer des activités agricoles. Elles chercheront
toujours des activités, voire des stratégies internes et externes
de soutien pour reproduire leur système de production. Dans cette
logique, elles essaient de tirer le maximum de profit des différentes
innovations introduites dans leurs milieux sans jamais se départir de
leur ossature productive. Cela fait partie de l'axe fondamental de leur «
boussole intérieure » (DE LENEER, 1983).
Le tableau ci-dessous montre comment les revenus sont
utilisés.
Tableau 14 : Ventilation des revenus globaux par poste de
dépense selon le type d'exploitation
Source : mes enquêtes, 2010
Ces revenus globaux permettent à ces exploitations de
satisfaire surtout le premier objectif prioritaire qu'elles se sont toutes
fixées, en l'occurrence la subsistance. Les parts
8025% 14% 075% 35% 15% considérables (de 77% à
95% selon les types) qu'elles réservent pour ce poste de dépenses
dans l'utilisation de ces revenus globaux le confirment.
77,34% 16% 0,66%
86
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Malheureusement la part réservée aux
investissements est moins importante pour permettre l'atteinte, en une
campagne, des deuxième et troisième objectifs prioritaires
notamment l'achat de matériels agricoles et la construction de
bâtiments en dur.
Avec 3% des revenus globaux soit 16.104 FCFA d'investissement,
les exploitations de type A ne peuvent pas se procurer le matériel
agricole le moins cher fut-il d'occasion. Etant relativement bien
équipés en semoir et houe, elles préfèrent acheter
des chèvres ou moutons à capitaliser en vue de résoudre
des problèmes ponctuels futurs.
Malgré leur sous-équipement en semoir, les
exploitations du type B qui font des investissements de l'ordre de 9% de leur
revenus globaux, soit 57.071 FCA, déploient les mêmes
stratégies que celles du type A.
Les exploitations de type C et D qui disposent de plus de
moyens s'orientent aussi pour la plupart dans ce créneau
d'investissement dont l'achat de bétail à emboucher et à
revendre plus cher. Cette stratégie leur permet d'acheter les intrants
nécessaires à leurs emblavures prochaines. Pour combler leur taux
d'équipement bas (voir caractérisation), elles louent au besoin
du matériel agricole avec leur épargne.
Toutefois, certaines exploitations des types C et D
parviennent à faire avancer les constructions qu'elles ont
déjà démarrées au fur et à mesure des
campagnes agricoles.
Les impôts payés par les exploitations
représentent la taxe rurale instituée depuis 1972 par
décret présidentiel. Elle ne concerne que les imposables
composés de tous les membres âgés de 14 à 65 ans
à l'exception des élèves et fonctionnaires de
l'état. Elle est annuellement de 1000 FCFA par personne imposable dans
les villages enquêtés. C'est ce qui justifie la faiblesse de ses
pourcentages dans la ventilation des revenus.
En définitive, il ressort de ces analyses que les
exploitations agricoles familiales, adoptent plus ou moins la même
stratégie quel que soit le type d'appartenance. Ces stratégies
reflètent la réalité des ruraux qui ont des défis
majeurs de subsistance à relever à travers leurs productions
agricoles. Ainsi, leur logique en tant qu'acteurs dans le projet de plantation
est assujettie à cet état de fait : s'enraciner dans leur
système de production pour se sécuriser et s'ouvrir pour
survivre.
1.3- Analyse comparative entre stratégies «
Jatropha en haie vive >> et « Jatropha en
plein champ >>
Il faut préciser que l'option « culture
associée » testée sans grand succès la
première année par certains producteurs semble être
délaissée au profit de la plantation en haie vive qui cadre
plus avec la « boussole intérieure » des
exploitations agricoles enquêtées. En effet comme l'ont
insinué beaucoup de chefs d'exploitation interrogés, le mode de
plantation en bordures de champ ne bouleverse pas leur assolement.
A partir d'une analyse qualitative, je vais essayer
d'apprécier la stratégie adoptée par les exploitations.
Pour ce faire, une synthèse des avantages et des inconvénients de
la stratégie paysanne est réalisée dans les paragraphes
ci-après.
1.3.1- Avantages stratégies paysannes
? Arpenter les parcelles de culture (court terme) : tout
d'abord les parcelles de cultures sont délimitées ; ce qui
favorise une prévention des conflits sociaux qui se produisent parfois
entre agriculteurs et éleveurs car elle empêche la
divagation20 des animaux dans les parcelles de culture. De plus ces
haies vives peuvent servir de brise-vent surtout pendant le mois de septembre
où l'on note beaucoup de verses de plantes, entraînant des pertes
de récoltes non négligeables particulièrement pour les
céréales. Une bonne délimitation des champs bien
arpentés avant la plantation facilite le comptage des superficies. Les
relais techniques des villages accompagnent les producteurs pour la
réalisation de plantation de Jatropha sur deux rangées
espacées de 0,50 m avec des écartements de 1 m entre les plants
soit l'équivalent de 800 plants par ha. De la sorte, les producteurs
vont connaître en même temps la superficie de la parcelle
entourée de Jatropha. La bonne maîtrise des surfaces
cultivées est la clé de voûte d'une bonne
productivité. Elle permet d'établir et de suivre correctement les
plans de campagne21 car, au Sénégal, beaucoup de
paysans travaillent dans l'approximation. Or la maîtrise des superficies,
permet de réaliser de bons calendriers culturaux afin d'assurer
prioritairement une bonne couverture des besoins alimentaires.
? Marquage foncier (long terme) : comme souligné supra,
le Jatropha en bordure des parcelles représente un bornage du foncier
pendant toute la durée de vie de la plante (50 années). Ceci peut
aussi constituer une preuve de mise en valeur des terres comme l'exige la loi
sur le domaine national pour éviter la désaffectation.
? Amoindrir le risque lié à un échec du
Jatropha : le fait de ne pas planter le Jatropha en
culture pure dans les parcelles mémes évite de
s'exposer au risque de ne rien gagner sijamais la culture se
révèle non rentable
20 Entrée non autorisée des animaux dans
une parcelle de culture qu'ils peuvent détruire.
21 Planning d'emblavures pour une campagne agricole
donnée
88
Mémoire Master Amadiane DIALLO
? Garder la même superficie cultivée annuellement
et éviter la concurrence avec les cultures vivrières : avec
l'option « haie vive », le problème d'arbitrage dans
l'affectation des sols ne se pose pas. L'assolement traditionnel n'est donc pas
perturbé.
? Gestion plus facile du pâturage en saison sèche
avec des partenariats gagnant-gagnant entre le propriétaire et les
éleveurs transhumants pour le parcage de leur bétail dans la
parcelle clôturée.
? Avoir 50% du méme potentiel de plantation de Jatropha
que l'option « culture pure » : la double haie vive permet d'obtenir
800 plants alors que la plantation en « culture pure »
préconisée par le projet a une densité de 1600 plants.
Ainsi, les exploitations ne perdent que potentiellement 50% de coüt
d'opportunité.
1.3.2- Inconvénients ou manques à gagner
liés à la stratégie paysanne
? Goulets d'étranglement aux périodes de
plantation de Jatropha qui coïncide avec les opérations de
sarclages des autres emblavures.
? La coopération tacite entre exploitations aboutissant
aux bénéfices mutuels de l'intégration
agriculture-élevage risque de s'affaiblir car le bétail ne pourra
plus entrer librement dans les parcelles méme après l'hivernage.
Sans entente négociée au préalable, l'agriculteur qui n'a
pas beaucoup de tétes de bétail, se verra priver de
matière organique qu'auraient fournie les animaux d'autrui en vaine
pâture dans ses parcelles. De méme, l'éleveur perdra la
possibilité que son bétail entre en toute liberté dans les
parcelles d'autrui. Somme toute, si la clôture des parcelles par le
Jatropha est généralisée, il est nécessaire d'avoir
des compromis entre les agropasteurs dans le mode de gestion du troupeau afin
de contribuer à la restauration des sols dégradés.
? Risque de clôture de terres litigeuses (litige non
vidé par la communauté rurale par exemple) par certains
producteurs véreux qui peuvent dans le long terme se camper sur cet
argument de mise en valeur pour éviter la désaffectation
? Perte de 50% du potentiel de plantation en culture pure
2- Analyse des stratégies des acteurs directs du
projet Jatropha agissant au sommet
A l'image de beaucoup de projets mis en oeuvre au
Sénégal, l'idée de promouvoir des plantations de Jatropha
pour la satisfaction des besoins énergétiques des
collectivités rurales est venue de promoteurs développeurs qui
ont su mobiliser un groupe de leaders paysans.
En effet, la sensibilisation initiale et le recensement des
paysans pour l'adhésion au projet en gestation ont été
menés de bout en bout par des leaders de l'actuel bureau exécutif
de la Fédération des Groupements de Producteurs de Tabanani de
Foundiougne (FPTF) sous la houlette des experts du bureau d'étude
Performances. Certains de ces leaders producteurs ont acquis une bonne
connaissance de la zone du projet et ont bénéficié d'une
notoriété au sein de la population à la faveur de leur
participation au programme d'électrification rurale. Ce sont ces acquis
relationnels et ce capital de confiance qui ont facilité la phase
d'information et de sensibilisation auprès des producteurs.
Après leur adhésion, les paysans se sont
constitués en groupements villageois avant de former des pôles de
développement et se liguer en Fédération des Groupements
de Producteurs de Tabanani de Foundiougne (FPTF). Le bureau exécutif est
constitué principalement des leaders paysans instigateurs du projet.
Cette fédération est co-fondatrice avec le
cabinet d'étude Performances de la SOPREEF qui est maître d'oeuvre
du programme EESF. Sa mission est « de coordonner un investissement
dans 30 pôles de développement et d'organiser à
l'échelle du département une filière de production de
biocarburants à partir de plantations de Jatropha ». Une
convention d'associés a été signée entre
partenaires de SOPREEF. Les acteurs du programme y sont tous
représentés avec les modalités idéales
suivantes:
? chaque associé dispose d'une voix et d'une seule,
quelle que soit l'importance de ses engagements financiers.
? les décisions stratégiques sont prises par
consensus. La mise en oeuvre du programme EESF applique le principe de
subsidiarité en privilégiant systématiquement le
développement des capacités et la génération de
revenus au niveau villageois. SOPREEF, structure de coordination du programme,
développe des capacités organisationnelles, techniques,
commerciales avancées au profit de l'ensemble des structures
impliquées dans le programme.
La SOPREEF bénéficie de l'assistance technique
de THD (Technologies for Human Development), département de Performances
spécialisé dans l'organisation et la gestion de services d'eau et
d'électricité en milieu rural et la valorisation des
énergies renouvelables pour le développement rural. THD
connaît très bien la zone d'implantation du programme EESF pour y
avoir coordonné pendant 2 ans la mise en oeuvre d'un service
d'électrification rurale desservant 8600 usagers dans 280 villages du
département de Foundiougne.
90
Mémoire Master Amadiane DIALLO
La gérance de la SOPREEF est confiée à un
expert de ce département qui a une bonne expérience de la zone
comme coordinateur du programme d'électrification rural cité. Il
est chargé de la gestion administrative et technique du programme avec
l'appui d'un groupe de travail constitué d'un technicien agricole
assisté de deux responsables de la Fédération des
Producteurs de Tabanani de Foundiougne (FPTF).
Conscients qu'ils ne peuvent pas à eux seuls financer
leur ambitieux programme, les acteurs d'EESF ont élaboré un
document de projet intitulé « Validation d'un modèle
d'huilerie rurale » pour rechercher des financements au niveau national et
international. L'objectif de ce projet est de « développer la
capacité technique et financière de SOPREEF, à promouvoir
un modèle viable de production d'huiles végétales de
qualité en milieu rural. Les résultats attendus incluent la
validation d'un modèle d'huilerie rurale, la mise en place au niveau de
SOPREEF des capacités techniques et financières
nécessaires pour accompagner la diffusion de ce modèle au niveau
des pôles de développement du programme EESF.»
La mise en oeuvre du projet va s'appuyer sur un partenariat
technique nord-sud entre deux entreprises rurales que sont l'Atelier du Lys (en
France), inventeur de la presse AXIA et la SOPREEF qui compte prendre en charge
43% du coût total de ce projet estimé à 264 Millions FCFA
(403.000 €). Ainsi, ces acteurs sont à la quête de
compléments de financement pour l'acquisition des équipements de
production (extraction, filtration et stockage de l'huile) et la prise en
charge des coûts de développement du modèle technologique,
et des capacités techniques et commerciales de SOPREEF.
A travers ce projet « Validation d'un modèle
d'huilerie rurale », SOPREEF projette de s'établir comme un centre
de référence technique, chargé de la diffusion de ce
modèle. Elle aura alors pour rôle :
? d'assurer la filtration, le stockage, le conditionnement et
la commercialisation des huiles produites par les unités villageoises
? d'apporter une assistance technique aux opérateurs
des huileries villageoises et de mettre en oeuvre un contrôle de
qualité et un traçage détaillé des produits
? de traiter les graines de Jatropha provenant des zones de
production non encore équipées de capacité de
transformation
? d'assurer la formation initiale et le recyclage des techniciens
travaillant dans les pôles de développement.
Dans cette perspective, les acteurs directs du projet Jatropha
agissant au sommet sont tous animés d'une volonté de trouver des
partenaires financiers. En effet, lors de mes interviews cet état
d'esprit est perceptible. L'exemple de ces déclarations suivantes est
patent : « nous savons que notre programme tient la route mais il nous
manque des appuis financiers pour décoller », « les
possibilités de mobiliser des financements ne manquent pas dans le cadre
des mécanismes de développement propre, nous allons nous y mettre
à fonds ..»
Comme indiqué dans la partie théorique, ils ont
réussi à décrocher quelques partenaires. Mais ces derniers
n'ont jusqu'ici octroyé que des financements ponctuels. Malheureusement
cette attitude d'être à la quête perpétuelle de
financement risque de les déconnecter des réalités et
préoccupations des populations concernées. Les obligations et
contraintes imposées par chaque bailleur risquent d'être
érigées en feuille de route au détriment des
intérêts des acteurs à la base. D'ailleurs certains
producteurs commencent à dire : « nous n'avons pas encore vu
les retombés des premiers financements alors que les leaders de la
SOPREEF en profitent eux.... ». Ainsi, la suspicion des acteurs
à la base à l'endroit de ceux au sommet est nourrie par cette
propension à accumuler des bailleurs aux financements partiels.
3- Analyse des stratégies et opinions des
acteurs indirects
3.1- Au niveau national
Comme stratégies officielles de mise en oeuvre du
programme national Jatropha, il a été créé un
comité technique national sous l'autorité du Ministre
chargé des biocarburants. Il est dirigé par un coordonnateur
national et supervisé par le Président de l'Association Nationale
des Conseillers Ruraux (ANCR). Le comité technique comprend en outre,
les techniciens du Ministère, les Organisations Paysannes, les
Organisations Professionnelles Agricoles, les Elus locaux, les Gouverneurs
Adjoints chargés du développement, les représentants des
associations villageoises de jeunes et de femmes, les partenaires au
développement (ONG), projets et programmes de développement. Des
superviseurs sont désignés par les organisations paysannes au
niveau départemental et local. En outre, dans le processus de
syndicalisation des paysans sénégalais, une assemblée
générale constitutive de la filière biocarburant a
été tenue le 03 septembre 2009. A cette occasion, un superviseur
national « paysan » a été nommé avec comme
mission de jouer l'interface entre les producteurs, le point focal du
programme, en l'occurrence l'Institut Sénégalais de Recherches
Agricoles (ISRA) et d'autres services techniques des ministères en
charge de la filière.
92
Mémoire Master Amadiane DIALLO
L'ISRA qui assure la coordination technique du programme
national de production de biocarburants, est à pied d'oeuvre depuis
quelques années, pour se familiariser avec cette espèce culturale
et connaître ses différentes caractéristiques tant sur le
plan végétatif que dans la production. Il était
prévu que les services techniques, notamment l'Agence Nationale de
Conseil Agricole et Rural (ANCAR), les Directions Régionales du
Développement Rural, les Inspections des Eaux et Forêts seraient
chargés de la formation, de l'encadrement des producteurs et du suivi
des plantations.
Mais dans la pratique, l'implication de ces services
techniques laisse à désirer. En témoigne les
difficultés que j'ai eues pour avoir accès à des
informations sur le programme national biocarburants. Au niveau de la DA
(Direction de l'Agriculture) et de la DAPS (Direction de l'Analyse de la
Prévision et des Statistiques), les cadres contactés m'ont tous
orientés vers l'ISRA ou vers le superviseur national.
Ce dernier que j'ai pu interviewer « chez lui »,
dans la banlieue dakaroise, est un vrai « Big man »22 au sens de
Pierre Joseph LAURENT. Il est originaire de la première ville religieuse
du Sénégal et fait partie des hommes de confiance de l'influent
chef religieux de cette localité qui bénéficie même
de l'allégeance du président de la république. Ainsi, il
est très actif dans la production agricole du fait des grandes
superficies qu'il exploite pour le compte de son guide religieux. A ce titre,
il est à la tête de l'une des six plateformes paysannes du
Sénégal. Il est aussi membre du comité national de
pilotage de la distribution des intrants et matériels agricoles
subventionnés par l'Etat. Il a même le privilège de
participer à différentes rencontres internationales notamment le
salon de l'Agriculture de Paris. D'ailleurs, c'est lors de ces voyages qu'il a
établi des contacts, dit-il, avec des partenaires pour la
réalisation de pépinières Jatropha dans ses parcelles.
Cette première expérience lui a valu sa nomination comme
superviseur national aux côtés du président de
l'association nationale des Conseils Ruraux. Il affirme d'emblée que le
Jatropha est bien connu au Sénégal depuis longtemps et peut
s'intégrer facilement dans les systèmes de production notamment
en haie vive sans compromettre les cultures traditionnelles. C'est ce qui
justifie dit-il son implication totale dans le programme.
Les réponses qu'il a apportées lors de
l'interview montrent qu'il est rompu à la tâche dévolue.
Aux questions : quelle est ta mission et comment tu la remplis ? Qui sont
les
22 « Un Big man est un leader qui tire son pouvoir de
l'accaparement de ressources par le biais d'une rente issue le plus souvent
d'une confusion entre les biens privés, publics et collectifs. Il
s'impose au groupe par son charisme, sa propre force ou son habilité. Le
big man est à la tête de réseaux composés de
personnes qui à la fois l'obligent et demeurent sous sa
dépendance. Il n'est donc que l'aiguilleur de la rente. Sujet et otage
de celle-ci, il ne serait rien sans les réseaux et vice versa. »
(LAURENT P.J., 2000)
producteurs impliqués ? Qui sont les détracteurs
du programme? Pourquoi ?, il a donné les précisions suivantes
:
? « je travaille en amont avec l'ISRA pour la
planification des activités et en aval avec le président de
l'ANCR pour la mise en oeuvre des plantations avec les paysans qui sont
organisés à la base. Je me charge du
suivi/évaluation»
? « les producteurs impliqués sont
mobilisés parce qu'ils ont confiance au programme du président de
la République, d'autres connaissent la plante et sont conscients de son
utilité... »
? « les détracteurs sont des opposants au
régime au pouvoir et ne font que des jugements de valeurs..., parfois ne
sont même pas producteurs, d'autres par manque tout simplement
d'informations »
Par contre, il reconnait qu'il n'a pas une collaboration
particulière avec les autres promoteurs de projets de Jatropha en marge
du programme national.
Un autre acteur non moins important est le CNCR (Conseil
National de Concertation et de Coopération des Ruraux), plateforme qui
représente une vingtaine d'organisations paysannes
faîtières. Il a une position radicale face à l'introduction
des biocarburants notamment le Jatropha dans les soles paysannes. En tant que
principale plateforme paysanne, le CNCR dénonce le fait que l'Etat
sénégalais s'est fixé des objectifs colossaux en
plantations de Jatropha sans pour autant dialoguer avec les organisations de
producteurs et leurs différentes plates-formes. Pour les dirigeants, le
programme national Jatropha n'est pas une priorité pour le monde rural
sénégalais qui est plus préoccupé par sa
subsistance. L'un d'entre eux a affirmé, lors d'une interview
accordée à la presse, que « cultiver du Jatropha
à la place du mil, du maïs ou de l'arachide, c'est dire aux paysans
: mourrez de faim demain ».
Dans la même lancée, des ONG en collaboration
avec des organisations paysannes ont prôné dès 2009 la mise
sur pied « d'une coalition des acteurs de la société
civile pour mener une grande campagne de plaidoyer contre les agrocarburants
». Certains chercheurs sénégalais ont même
appelé le gouvernement à une prudence et à
l'approfondissement des études préliminaires à la fois sur
l'utilité des plantes et sur les risques associés à leur
culture intensive.
Ce rôle de contre poids non négligeable de ces
différents acteurs a permis d'amener l'état du
Sénégal à plus de prudence dans la promotion tout azimut
des biocarburants. C'est ce qui justifie sans doute les changements d'approches
des différents ministres « des Biocarburants et des Energies
renouvelables » qui se sont succédé à la tête
de ce département sans grand
94
Mémoire Master Amadiane DIALLO
succès. Un d'entre eux interrogé sur la
faiblesse des réalisations du programme national avait soutenu que :
" le gouvernement a décidé de ne pas s'engager dans la
production de grande envergure du biocarburant à base de Jatropha avant
de connaître les effets de cette plante ». Il avait
déclaré en même temps que : " les entreprises ne
peuvent pas se mettre à une exploitation de grande envergure des
biocarburants sans que soient résolues les questions des rendements
industriels et du foncier ».
Ce discours contraste avec ce qui passe sur le terrain
où des privés se sont lancés dans de grandes exploitations
en régie en employant des paysans comme ouvriers agricoles.
A ce sujet, les interviews d'une dizaine de producteurs
employés dans des plantations de ce type sont édifiantes.
Malgré quelques effets positifs en termes de pouvoir d'achat, ils sont
en majorité inquiets sur leur avenir comme ouvrier agricole. La plupart
disent avoir pris le risque de sacrifier les travaux champétres ou
d'élevage pour un travail sans assurance de durabilité. Un
éleveur témoigne en ces termes : " avec l'argent que je gagne
ici je suis obligé de payer mon frère qui s'occupe maintenant du
troupeau, tâche à laquelle je m'adonnais tous les jours... ».
Un autre précise : " les plantations de Jatropha dans cette
zone oblige le bétail a changé son parcours pour aller s'abreuver
au lac mais nous allons nous adapter tant que nos intérêts sont
sauvegardés... ». Mais un ouvrier agricole qui est en
même temps conseiller rural rassure " la clôture des
plantations de Jatropha a permis la campagne passée de conserver le
fourrage laissé dans les allées des plantes que de nombreux
éleveurs ont utilisé pour alimenter leur bétail en saison
sèche... le projet apporte déjà beaucoup à la
localité par le recrutement de ses fils qui étaient
obligés de faire de l'exode rural auparavant ». Mais
répondant à une question relative à ses activités
antérieures au projet, il explique : " pour le moment ce que je
gagne ici me permet de compenser mes revenus d'avant mais je ne suis plus actif
dans les activités socio-politiques ; je souhaite que le projet perdure
et serve à la collectivité par le biocarburant produit, sinon je
risque de perdre ma situation d'antan... ».
L'assemblée nationale sénégalaise a
voté une loi sur la réglementation de la production, de la
transformation et de la commercialisation des biocarburants comme la
réclamer les organisations de la société civile. Mais
cette loi tarde à être promulguée.
En définitive, il est intéressant de remarquer
qu'au-delà des considérations de « politique politicienne
», la diversité des intérêts et des points de vue des
différents acteurs au niveau national permet à l'état de
toujours recentrer le programme national de biocarburants.
3.2- Au niveau local
Malgré l'arsenal institutionnel « politiquement
correct » du comité technique national de pilotage du programme
biocarburants, la réalité du terrain est tout autre. En effet,
à force d'être le réceptacle des programmes spéciaux
qui se chevauchent, les acteurs locaux se perdent et ne savent plus à
quel saint se vouer.
Les agents des services déconcentrés des
ministères de l'agriculture et de l'environnement ont adopté la
même attitude que leur tutelle. En effet, lors de mes interviews, les
agents de l'agriculture et des eaux et forêt ont tout bonnement
rétorqué qu'ils ne s'occupent pas du programme et cachent
à peine leur sentiment de frustration d'avoir été mis
à l'écart. Néanmoins, en insistant je suis parvenu
à avoir quelques points de vue sur le programme national Jatropha d'une
manière générale et le projet de la SOPREEF
particulièrement.
L'agent d'agriculture, un ancien, jouissant d'une
réelle expérience de la zone enquêtée m'a fait
savoir en ces termes : " nous ne sommes pas impliqué maintenant dans
la vulgarisation mais plutôt dans la remontée des données
de statistiques agricoles, de la pluviométrie, de la situation
parasitaire... ». Mais poursuit-il, " au cours de mes
tournées, il m'arrive de remarquer les pépinières de
Jatropha tenues par les communautés villageoises et quelques haies vives
au stade plantule...». Son avis est sans équivoque : "
l'espace foncier manque vraiment ici pour du Jatropha car il y a même des
producteurs qui louent à d'autres producteurs des terres à 20000
FCFA par ha pour boucler leur plan de campagne... Est-ce le paysan accorde une
si grande importance au Jatropha comme le pense le projet ? Je ne pense pas
...Bref on verra... C'est pourquoi, il ne prend pas trop de risque dans la
culture pure du Jatropha mais tente de sécuriser ses parcelles avec la
clôture et donner l'impression qu'il est engagé...».
Ces propos rejoignent quelque peu mon analyse par rapport au
pourcentage élevé de parcelles clôturées ou à
clôturer qui dénote « d'un agenda caché de marquage
foncier ». Il confirme aussi la marge de manoeuvre que les paysans ont sur
la manière de gérer leurs parcelles. Il propose l'utilisation
comme brise vent du Jatropha dans les parcelles maraîchères et le
renforcement des forêts classées par des plantations de Jatropha.
Car elles ont été dévastées par les feux de brousse
et ressemble plus à de la savane. En plus, les plantations de Jatropha
serviront de pare feu. Il ne pense pas à un abandon des cultures
traditionnelles par les paysans au profit du Jatropha au Sénégal
car ils sont conscients de leurs intérêts du point de vue
socio-culturel. En effet, les nouvelles cultures sont souvent en
compétition avec
96
Mémoire Master Amadiane DIALLO
l'arachide qui, en plus de sa rentabilité globale, a
elle-même acquis un ancrage culturel presque
indétrônable.
Le chef du CADL (Centre d'Appui au Développement Local)
quant à lui, pense que « les tenants et les aboutissants du
programme national Jatropha ne sont pas bien connus mais pour le projet SOPREEF
les objectifs de satisfaction des besoins locaux sont louables... ».
Son inquiétude réside du fait que « les producteurs
n'ont même pas le droit de clôturer les parcelles sans
délibération du conseil rural... ». Selon lui, le
processus de régularisation du foncier destiné à
l'investissement implique une mission de prospection d'une commission domaniale
suivie d'une délibération du conseil rural sanctionnée par
un arrété d'attribution du président avec visa
d'approbation du sous-préfet de la circonscription. Il précise
aussi que le droit d'usage sur le domaine national dont jouissent les
producteurs n'équivaut pas à un droit de propriété.
En effet, si une parcelle est non exploitée au bout de deux à
trois ans, elle est normalement désaffectée par une autre
délibération du conseil rural. En cas de décès de
l'exploitant, le conseil rural doit se saisir des terres pour les
réaffecter. Dans la pratique, une reconduction tacite est faite en
faveur des héritiers sauf dans le cas où ils n'arrivent pas
à s'entendre.
Le chef du sous-secteur des eaux et forêts, après
avoir déploré le manque d'informations sur le programme national
Jatropha, a reconnu que les plantations de Jatropha au même titre que les
manguiers et les anacardiers sécurisent le foncier pour les producteurs
compte tenu de toutes les raisons évoquées par le chef du CADL.
D'ailleurs, précise-t-il, les producteurs cherchent de plus à
plus à avoir une attribution du foncier (PV de
délibération) abritant leurs plantations. Il exhorte le projet
SOPREEF a tenir compte de l'expérience du projet de plantation
d'anacardier pour surpasser les contraintes qui ne manquent pas quelle que soit
la pertinence d'un programme.
D'autre part, certains présidents de communauté
rurale élus lors des dernières élections locales de 2009
n'ont pas été bien sensibilisés des tenants et des
aboutissants du projet par leurs prédécesseurs. C'est pourquoi,
leurs points de vue restent parfois des généralités et des
regrets pour leur manque d'accompagnement du projet du fait de leur passation
de service bâclée par leurs prédécesseurs qui ont,
disent-ils, mal accepté leur départ à la tête des
communautés rurales. A la faveur de la décentralisation qui leur
a conféré une personnalité juridique et des
compétences transférées, leur rôle dans la
planification et la gestion du développement de leur terroir est
crucial. Ceci est clairement inscrit dans l'article 198 du code des
collectivités locales : "la Communauté Rurale élabore
le Plan Local de Développement et
donne son avis sur tous les projets de
développement concernant tout ou partie de la communauté
rurale".
Malgré l'implication des membres du conseil rural dans
le projet Jatropha SOPREEF, le dernier plan d'action prioritaire (PAP
2010-2015) de la communauté rurale de la zone d'étude ne
mentionne ni dans ses axes stratégiques, ni dans ses objectifs la
promotion des biocarburants par la plantation de Jatropha. Cet état de
fait paradoxal peut être interpréter de différentes
manières.
? Soit les leaders du projet présents lors des
consultations n'ont pas su convaincre les autres parties prenantes de la
pertinence des agrocarburants de proximité, par voie de
conséquence la communauté rurale n'en fait pas une
priorité.
? Soit la communauté rurale n'a pas encore les moyens
à consacrer à un tel projet qui ne donne pas de résultats
visibles dans le court terme ou des financements extérieurs ne sont pas
encore mobilisables pour prendre en charge ce volet
? Soit la SOPREEF, n'ayant pas encore les coudées
franches, veut faire ses preuves avant de s'ouvrir totalement à la
communauté rurale pour une prise en charge dans son budget
? Soit les dysfonctionnements constatés dans la mise en
oeuvre du programme national sont à l'origine de sa déconnection
des plans de développement local.
Cette dernière piste me paraît la plus plausible en
référence à l'analyse des stratégies des acteurs au
niveau national.
Dès lors, la mise en oeuvre du programme national
Jatropha semble déconnectée du niveau local. Cet état de
fait pousse les acteurs locaux à chercher à en savoir plus en
diversifiant leurs canaux d'informations. Ils sont ainsi ouverts aux
sensibilisations des ONG et autres détracteurs des agrocarburants. Par
contre d'autres s'engagent à côté des promoteurs pour
essayer de profiter des rentes.
4- Synthèse des objectifs et stratégies
des acteurs : les « boussoles intérieures »
L'analyse des objectifs et stratégies des
différents acteurs fait ressortir quatre groupes principaux : les
exploitations agricoles impliquées, les promoteurs du projet Jatropha,
l'état avec son programme national et les détracteurs des
agrocarburants. Je vais essayer dans ce qui suit de présenter les «
boussoles intérieures » de ces groupes et de situer leur optimum
98
Mémoire Master Amadiane DIALLO
circonstanciel avant de chercher les points de rencontre
possibles au-delà des points d'achoppement.
Figure 10 : Boussoles intérieures des
différents acteurs du projet de plantation de Jatropha 1- La boussole
intérieure (poly objectifs) des EAF avec un optimum circonstanciel
centré
2- Etat avec un double objectifs
3-
Détracteurs agrocarburants avec un mono objectif
prioritaire
4-
Promoteurs projets Jatropha avec un mono objectif
prioritaire
Les divergences et/ou convergences des boussoles
intérieures sont mises en exergue par le biais de la grille
d'analyse stratégique ci-après.
100
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Tableau 15 : Analyse stratégique des acteurs
vis-à-vis de leurs boussoles intérieures
Acteurs
|
Objectifs (problèmes à
résoudre)
|
Ressources
|
Contraintes
|
Stratégies
|
Exploitations agricoles
|
- Subsistance famille
- Tirer profit des avantages annoncés du projet tout
en maintenant les plans de
campagnes et assolements traditionnels
- Sécuriser les parcelles (marquage foncier)
|
- Foncier, - Main- oeuvre,
- Matériels agricoles
|
- Pluviométrie erratique - Baisse fertilité sols
- Insécurité foncière
|
- Option plantation Jatropha en haie vive autour des parcelles
de culture
|
Etat
|
- Réduire la facture et la dépendance
énergétique du pays
- Bénéficier des financements carbones
|
- Budget
- Moyens
étatiques - MDP,
REDD++
|
- Budget limité
- Paramètres scientifiques non maîtrisés
- Accès aux terres pour les promoteurs des plantations en
régie
- Processus financement compliqué
|
- Mise en oeuvre programme national Jatropha
- Vote lois favorables à la promotion des biocarburants -
Création AND
|
Promoteurs Jatropha de proximité
|
- Capter des rentes en promouvant la production
d'agrocarburants à base Jatropha
|
- Subsides
bailleurs - Fonds
propres
|
- Difficultés dans la mobilisation de financement pour
investir (unités de trituration...)
|
- Partenariat et synergie avec les producteurs pour la mise en
oeuvre
- Recherche de bailleurs
|
Détracteurs projets
|
- Capter des rentes en étant reconnu comme
défenseur des intérêts paysans
|
- Subsides bailleurs - Fonds propres
|
- Difficultés de mobiliser les producteurs sans leur
assurer de perdiums
- Dichotomie entre logiques leaders plates- formes paysannes et
producteurs à la base
|
- Campagne de plaidoyer contre les agrocarburants
(sécurité alimentaire et accaparement des terres comme
thèmes)
|
101
Mémoire Master Amadiane DIALLO
La stratégie paysanne « de la plantation du
Jatropha comme haie vive autour des parcelles » apparaît comme un
point de convergence circonstanciel aux différentes « boussoles
intérieures » des principaux acteurs des projets d'agrocarburants
au Sénégal. En effet, les raisons suivantes semblent conforter
cette thèse :
? le producteur maintient son système de culture de
base avec les mêmes spéculations, sécurise ses terres avec
la plantation de Jatropha autour des parcelles, approvisionne l'unité de
trituration et diversifie ses sources de revenus ;
? les promoteurs, appuyés par l'état et
éventuellement par des partenaires au développement, travaillent
en synergie avec les producteurs pour encadrer la production d'agrocarburants
et l'organisation structurelle et technique autour de la production de l'huile
végétale pure et son utilisation au bénéfice de la
communauté
? du moment que les producteurs vont continuer à
conduire les mêmes cultures dans les mêmes parcelles, les arguments
des détracteurs concernant la sécurité alimentaire et
l'accaparement du foncier ne s'appliquent pas ; par contre cette pratique peut
être défendue comme alternatives à la monoculture des
biocarburants qui favorise l'insécurité alimentaire et
foncière
? l'état, en privilégiant et en soutenant ce
modèle, va progressivement voir sa facture énergétique
baissée sans compromettre la sécurité alimentaire et
foncière des paysans et éviter que le Jatropha tombe dans le
champ d'intérêt et d'action des multinationales ; des financements
carbones sont aussi mobilisables.
CHAPITRE 6 : PROPOSTIONS D'ACTIONS POUR UNE REPONSE
APPROPRIEE DU PROJET AUX BESOINS ENERGETIQUES LOCAUX
1- Forces, Faiblesses, Opportunités et Menaces
du projet
Pour étudier les atouts, les points faibles ainsi que
les opportunités extérieures et les menaces qui pèsent sur
le projet Jatropha, la méthode SWOT (Strengths Weaknesses Opportunities
Threats) sera mobilisée. La matrice en dessous va ainsi tenter
d'analyser la capacité du projet Jatropha à satisfaire ou non les
besoins énergétiques locaux sans entrer dans les mêmes
travers du modèle dominant.
102
Mémoire Master Amadiane DIALLO
|
Tableau 16: SWOT projet de plantation de
Jatropha
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Strengths (Forces)
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Weaknesses (Faiblesses)
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Adhésion de 400 producteurs de 10 groupements
regroupés au sein d'une fédération dès le
démarrage ; adhésion de 203 nouveaux
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·
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Délai d'entrée en production du Jatropha qui est
d'au moins deux ans : risque de décourager les paysans habitués
à des cultures à cycle court et
|
·
·
|
Partenariat fédération producteurs et experts
Décisions à voix égales entre paysans et
experts dans le conseil d'administration de la SOPREEF
|
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peu enclins à conduire correctement une culture qui ne
rapporte rien pendant plus d'un an.
|
·
|
Culture Jatropha non alimentaire
|
·
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Toxicité de l'huile et des sous-produits qui peut
présenter un danger pour la population et le bétail
|
·
|
Liberté du paysan par rapport au choix de son mode de
plantation
|
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(les principes de précaution ne sont pas encore
établis)
|
·
|
Intégration du Jatropha sans grand bouleversement des
systèmes de production agricole
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(complémentarité et synergie)
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·
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Attentes (matérielles) démesurées des
producteurs à l'endroit du projet
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·
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La plupart des producteurs choisissent de faire des plantations
en haie vive qui n'affectent pas leur
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assolement habituel
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·
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Manque de moyens propres substantiels de
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SOPREEF qui dépend de subsides de partenaires
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·
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Production huile végétale pure pour faire
fonctionner au niveau local des moulins, des forages, divers groupes
électrogènes notamment l'électricité rurale
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·
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Production possible de savons avec les femmes rurales
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·
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Disponibilité de matière organique avec les
tourteaux permettant une restitution afin de garantir le maintien durable de la
fertilité des sols
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·
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Un bilan climatique a priori positif : substitution de carburant
fossile et non usage d'engrais et de pesticides dans les haies permettent une
réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES)
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103
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Tableau 16 : SWOT projet de plantation de
Jatropha
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Opportunities (opportunités)
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Threats (Menaces)
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·
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Opportunités de mobilisation de financements
internationaux à travers des initiatives comme le MDP, les fonds
carbones, les coopérations bilatérale et multilatérale
|
·
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La question des rendements réels du Jatropha en culture
extensive se pose
|
·
|
Opportunités d'investissements ou de subventions du
programme national biocarburant
|
·
|
Le risque qu'à terme la culture intensive ne prenne le pas
et se traduise par un recours aux
|
·
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Modèle reproductible d'électrification rurale grace
à des technologies simples de culture et de transformation de
Jatropha
|
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intrants chimiques et à l'irrigation excessive
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·
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Le risque que les producteurs s'adonnent au
|
·
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Besoins en énergies réelles dans la zone (moulins,
forage, électrification rurale, tracteurs des « Big men_
»
|
|
Jatropha en culture pure au détriment des
céréales
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|
·
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Des marchés parallèles peuvent s'organiser par des
intermédiaires véreux pour détourner la production locale
de Jatropha (des producteurs) en proposant des prix alléchants (à
la faveur d'une demande supérieure à l'offre)
|
104
Mémoire Master Amadiane DIALLO
105
Mémoire Master Amadiane DIALLO
2- Points de vigilance vis-à-vis de la «
logique dominante »
La logique dominante dans la mise en oeuvre des projets
d'agrocarburants reste la promotion de grandes plantations en monocultures dans
des terres fertiles avec un recours aux intrants chimiques voire l'irrigation
pour la maximisation des rendements. Les paysans sont souvent employés
comme ouvriers agricoles dans ces plantations gérées en
régie par des multinationales qui privilégient l'exportation de
la production vers les pays occidentaux.
Pour les filières de proximité, il subsiste des
questions non élucidées à prendre en compte. Cela
nécessite la poursuite de la recherche et le suivi dans la durée
pour que ces filières puissent réellement contribuer à
l'amélioration des conditions de vie des zones d'implantation par la
satisfaction des besoins énergétiques locaux. Parmi les points de
vigilances, je retiens les suivants :
1. surveiller le risque d'appropriation frauduleuse de terres
par des personnes étrangères par le biais d'un marquage foncier
avec des plantations de Jatropha
2. surveiller le risque d'occupation de terres auparavant
consacrées au pâturage pour éviter des conflits entre
éleveurs et agriculteurs
3. surveiller le risque qu'à terme la culture pure de
Jatropha ne prenne le pas de l'option « haie vive » et se traduise
par une intensification avec un recours abusif aux intrants chimiques
4. utiliser de préférence des semences de
Jatropha locales qui s'adaptent mieux aux conditions agro-écologiques si
l'on veut obtenir un optimum de coût de production et de
productivité ; elles nécessitent peu de fertilisants et d'eau,
contrairement à des variétés hybrides importées
5. vérifier la qualité de l'huile
végétale pure produite pour éviter le risque à
terme d'endommager les moteurs à faire fonctionner
6. tenir compte des enseignements des autres filières
agricoles comme le coton, l'arachide et l'anacardier en termes d'échec
et de réussite
7. faire attention à la main mise à outrance des
partenaires extérieurs au risque de détourner le projet dans le
marché capitaliste au détriment de la satisfaction des besoins
locaux
8. favoriser la responsabilisation et l'autonomisation des
groupements villageois de base pour une gestion commune des équipements,
une sécurisation de l'approvisionnement en
graine de Jatropha, le bon fonctionnement des unités de
trituration ; in fine favoriser l'émergence d'une économie
associative dans les zones de production.
Somme toute, il est indispensable de mettre en place un
système de suivi et d'évaluation pour accompagner la mise en
oeuvre de ces filières. Une telle approche permettra sans doute de
valider les référentiels technico-économiques et d'obtenir
un engagement politique sur les orientations stratégiques au niveau des
plans locaux de développement des communautés rurales
La loi actuelle sur le domaine national ne permet pas une
sécurisation foncière à la faveur des investisseurs
privés du modèle dominant qui continuent d'en réclamer sa
révision. Leurs manoeuvres soutenues par les institutions
internationales risquent finalement de faire changer cette loi au
détriment des paysans sénégalais. La société
civile doit intensifier son lobbying et plaidoyer politiques pour continuer
à jouer pleinement son rôle de contre poids.
3- Propositions sommaires d'actions locales et
globales
3.1- Au niveau local
Au Sénégal, le point d'ancrage approprié
pour la mise en oeuvre des projets agricoles de proximité doit
être la communauté rurale qui est la collectivité de base
la plus proche des paysans. Créées en 1972, les
communautés rurales amorcent la municipalisation des zones rurales. Ce
sont des subdivisions regroupant les élus d'un ensemble de villages et
jouissant de neuf compétences transférées par le biais de
la décentralisation parmi lesquelles la planification, l'environnement
et la gestion des ressources naturelles. Ces deux domaines de
compétences s'opèrent par l'élaboration et
l'exécution respectivement des plans locaux de développement et
des plans d'action locale pour l'environnement
Ainsi, les organisations paysannes de villages limitrophes
peuvent s'unir à l'image des pôles de développement de la
SOPREEF pour former des ententes qui à leur tour intègre le cadre
local de concertation des organisations paysannes (CLCOP) , une structure
déjà existante dans la quasi-totalité des
communautés rurales. Dès lors, les CLCOP sont capables de
défendre des projets Jatropha adéquats pour l'intégrer
dans les plans locaux de développement des communautés rurales.
L'état peut organiser et accompagner les collectivités locales en
mettant à leur disposition des unités de trituration. Les
pôles de développement peuvent créer à leur sein des
comités de gestion pour assurer la collecte des
107
Mémoire Master Amadiane DIALLO
graines de Jatropha cédées par les agricultures,
la trituration et la distribution de l'énergie dérivée.
Concernant la clôture des parcelles par le Jatropha, la
commission domaniale de la communauté rurale peut accompagner le
processus en collaboration avec les chefs de village. Ils peuvent
procéder à des mesures de fonciers bornés par le Jatropha
qui seront sanctionnées par des procès-verbaux d'attribution
officielle aux occupants traditionnels. Ils vont permettre ainsi à
beaucoup de producteurs de disposer d'un document d'affectation en plus de leur
marquage foncier par les plantations.
Au-delà des parcelles individuelles, en collaboration
avec les services des eaux et forêt, la communauté rurale peut
renforcer les forêts communautaires en plantant, entre autres, du
Jatropha. Des récoltes communautaires peuvent être
envisagées. L'huile végétale pure obtenue peut servir de
carburant pour des utilisations communautaires (forage, moulin,
électrification d'édifices publiques...).
3.2- Au niveau global
Le principe est de privilégier le financement public
pour éviter que ces initiatives pour la satisfaction des besoins locaux
en énergies n'entrent dans la logique dominante. Les états se
doivent alors d'encadrer et de soutenir matériellement et
financièrement ce genre de projets pour éviter qu'ils n'entrent
dans les mécanismes du marché au grand bonheur des investisseurs
privés.
Dans cette optique, un appui budgétaire par la
communauté internationale peut aider les pays pauvres à
accompagner techniquement et matériellement les communautés
rurales. Les pays développés peuvent aussi faciliter le transfert
de technologie pour la transformation et la consommation locale du carburant
sans que des intérêts capitalistes soient dominants dans ce
rapport entre les acteurs. Les fonds alloués au mécanisme de
développement propre peuvent par exemple servir à accompagner les
projets d'agrocarburants de proximité certifiés selon les
propositions d'Olivier DE SCHUTTER, c'est-à-dire avec des
critères contraignants concernant le mode de production et les
aspects sociaux et de droits humains. Ceci va, en principe, remettre en
cause l'éligibilité des projets industriels dits « propres
» mais qui sont en réalité des montages opportunistes.
Ainsi, les collectivités locales, ayant
capitalisées les technologies énergétiques du solaire, du
vent, des agrocarburants, vont utiliser de moins en moins les énergies
fossiles. Le pays va aussi progressivement sortir de la tyrannie du
pétrole et être autosuffisant en énergie
alternative. En définitive, tous ces efforts vont
participer à une véritable réduction des gaz à
effet de serre sans compromettre l'avenir des populations les plus
vulnérables.
CONCLUSION
Cette présente étude a été
réalisée dans un contexte de mondialisation secouée par
les changements climatiques et la fin annoncée du pétrole, et
rythmée par la fièvre des agrocarburants proposés comme
alternative. Elle aborde la thématique du rapport des exploitations
agricoles familiales aux projets d'agrocarburants de proximité dans le
cadre d'un projet Jatropha localisé dans le département de
Foundiougne au Sénégal.
A travers une caractérisation et une typologie, ce
mémoire met en exergue la place qu'occupe la subsistance familiale dans
la structure et le fonctionnement des exploitations agricoles familiales
impliquées dans ce projet : 1èr objectif prioritaire
de toutes les exploitations, 77% à 95% de parts réservées
pour ce poste de dépenses dans l'utilisation des revenus globaux.
Le foncier disponible, variable qui différencie le plus
les exploitations agricoles familiales, a permis de les classer en 4 groupes :
les EAF de type A avec un foncier disponible inférieur à 5 ha ;
les EAF de type B dont le foncier disponible est compris entre 5 ha et 9,99 ha
; les EAF de type C avec un foncier disponible de 10 ha à 15 ha et les
EAF de type D dont le foncier disponible est supérieur à 15
ha.
Les exploitations de type C et D, emblavant plus de
superficies, ont des taux de couverture des besoins céréaliers
plus élevés car il n'y a pas de différences significatives
entre les rendements obtenus par culture. En effet, on note une
corrélation significative entre la superficie cultivée
annuellement et le taux de couverture des besoins céréaliers.
D'où l'enjeu de la sécurisation du foncier pour les
producteurs.
Hormis quelques différences structurelles
significatives (taille de la population, actifs agricoles, superficie
cultivée annuellement, taux de couverture en céréales,
taux d'équipement en houe), les groupes d'exploitations agricoles
familiales présentent les mêmes pratiques agricoles, les
mêmes logiques de fonctionnement et par conséquent les mêmes
difficultés et stratégies de survie.
Les exploitations agricoles familiales impliquées dans le
projet Jatropha ne sont donc pas exceptionnelles, elles sont comme les
autres.
109
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Ceci me conforte dans mon appréciation globale de la
situation de ces agropasteurs après plusieurs années
d'observations participantes. Méme si l'étude ne permet pas une
généralisation, il faut reconnaitre que les agropasteurs
n'arrivent pas à bénéficier des fruits de leur dur labeur
malgré leur système de production relativement « propre
» et respectueux de l'environnement. Durant environ quatre mois
d'hivernage erratique, ils travaillent sur des terres épuisées et
dégradées avec du matériel agricole vétuste et
insuffisant (dans l'étude environ 60% sont « sous
équipés ») pour récolter des productions limites ne
parvenant même pas à leur assurer une sécurité
alimentaire (taux moyen de couverture des besoins céréaliers de
82% dans l'étude avec des différences intergroupes
significatives).
Toutefois, il apparaît, au terme de cette étude,
que les agriculteurs concernés demeurent des acteurs conscients de leurs
atouts et faiblesses et n'hésitent pas à saisir des
opportunités qui s'offrent à eux pour repousser les menaces
à leur survie. Tout en sécurisant leur foncier et leurs
productions agricoles traditionnelles, elles tentent de déployer des
stratégies d'adaptation, voire de débrouille pour tirer leur
épingle du jeu.
L'étude a montré que la quasi-totalité
des exploitations agricoles familiales enquêtées a fait le choix
de la clôture pour s'impliquer dans le projet. Ce qui leur permet de
réaliser leurs plans de campagne sans réaménagement aucun
des fondamentaux de leur structure productive.
Elles ont aussi choisi de débuter les plantations avec
des superficies planchées (1,56 #177; 1,17 ha par exploitation avec
égalité des moyennes intervillages et intergroupes).
Cette stratégie d'intégration minimale leur
donne ainsi l'opportunité de renforcer leur marquage foncier pour
sauvegarder leur système de production tout en se connectant aux enjeux
matériels du projet. Dans le moyen terme, les exploitations qui sont
moins dotées en terres de culture (types A et B) se projettent
déjà à un taux de marquage foncier par le Jatropha
supérieur à 50% de leur foncier disponible.
Tout ceci montre que, malgré les difficultés
auxquelles elles sont confrontées, les exploitations agricoles
familiales sont très attachées à la sauvegarde de leurs
facteurs de production. C'est dans cet état d'esprit d'ailleurs qu'elles
sont impliquées comme acteurs dans la mise en oeuvre du projet
Jatropha.
Ce projet regroupe d'autres acteurs directs et indirects aux
logiques, objectifs et stratégies divers. D'abord, les partenaires
directs des producteurs agissant au sommet de la SOPREEF sont tellement
obnubilés par le démarchage de bailleurs de fonds qu'ils
risquent, s'ils ne
prennent garde, de se déconnecter des
réalités des « acteurs à la base ».
Néanmoins, leur expérience acquise dans la localité et le
principe de décisions paritaires au sein du conseil d'administration de
SOPREEF sont autant d'atouts pour tenir le cap.
Au niveau national, les acteurs indirects que sont les ONG,
les plateformes paysannes et autres membres de la société civile,
grâce à leurs plaidoyers en faveur du respect des droits des
producteurs, poussent l'état et ses partenaires à toujours
recentrer le programme national de biocarburants. Ce dernier présente
beaucoup de dysfonctionnements dans sa mise en oeuvre au niveau local. Les
acteurs étatiques au niveau local semblent désorientés et
sous informés du moment que le point focal national, en l'occurrence
l'ISRA, a du mal à démultiplier l'information faute de
représentation déconcentrée.
En définitive, la stratégie paysanne d'adopter
la plantation du Jatropha comme haie vive autour des parcelles apparaît
comme un point de convergence circonstanciel aux différentes «
boussoles intérieures » des principaux acteurs des projets
d'agrocarburants de proximité au Sénégal. En effet, elle
prend le contrepied de la logique du modèle dominant qui prône la
conduite en régie, par les multinationales et autres promoteurs
capitalistes, de monocultures d'agrocarburants dont la production est
destinée à l'exportation au grand dam des agriculteurs. Par
contre, dans la conduite de projets d'agrocarburants de proximité telle
que choisie par les exploitations agricoles familiales, l'accaparement des
terres et l'insécurité alimentaire ne sont pas favorisés.
L'état et ses partenaires peuvent appuyer l'installation des
unités modulables de trituration de Jatropha et des plateformes
multifonctionnelles (moulins, électricité, eau..) pour permettre
aux zones rurales de satisfaire leurs besoins énergétiques sans
faire recours au pétrole et ses dérivées. Ce
système de production intégré au Jatropha présente
aussi l'avantage d'éviter le transfert de matière première
et l'acheminement de produits finis sur de longues distances. Tout est
réalisé sur place pour répondre à des besoins
locaux. Ainsi, en respectant et en accompagnant les producteurs dans leur
choix, il sera légitime de parler de « réduction durable des
émissions de gaz à effet de serre ».
Je ne peux terminer sans évoquer ce que j'ai appris de
nouveau de la confrontation entre théorie sur les agrocarburants et la
réalité du terrain qui, à priori, me paraissait familier.
Les leaders paysans et les chefs d'exploitation que j'ai interviewés
m'ont agréablement surpris par la hauteur de leurs analyses de la
situation des agrocarburants au Sénégal, voire dans le monde.
D'une part, la démocratisation de l'information prônée par
les médias sénégalais a sans nul doute facilité
cette prise de conscience des masses paysannes. En effet, l'utilisation des
langues nationales dans les radios et les télévisions pour la
présentation des journaux parlé
111
Mémoire Master Amadiane DIALLO
et télévisé est d'un grand apport dans la
sensibilisation du monde rural. D'autre part, le réseau GSM dont le taux
de pénétration est de plus de 70% dans le pays facilite les
correspondances et les échanges d'informations entre la ville et la
campagne. D'ailleurs tous les chefs d'exploitation enquêtés
disposent d'un numéro de téléphone portable. Tous ces
canaux ont constitué un raccourci pour les campagnes de sensibilisation
des agriculteurs menées avec abnégation par les organisations de
la société civile. Dès lors, le monde rural est de plus en
plus au diapason des dynamiques locale et globale du développement.
Cependant la société civile doit accentuer les plaidoyers et
lobbying politiques contre le projet de privatisation de la terre tant
souhaitée par les investisseurs privés.
Fort des enseignements de l'étude, je peux affirmer,
toute chose égale par ailleurs, que les exploitations agricoles
familiales du projet ne sont pas disposées à aller plus loin que
la clôture de leurs parcelles par le Jatropha. Car elles sont tellement
attachées à leurs cultures de subsistances qu'elles ne vont pas
les sacrifier au profit d'une plante non alimentaire qui entre en production au
plus tôt deux ans après installation. L'expérience de la
production cotonnière dans la zone est édifiante. Bien que
l'encadrement de la SODEFITEX préconise les semis précoces, les
producteurs ont toujours semé le coton après avoir
installé les céréales. Ils détournaient méme
l'engrais du coton pour les mettre dans les parcelles de
céréales. La société cotonnière a
été obligée d'introduire des programmes de promotion des
céréales pour regagner la confiance des agriculteurs. Ces
derniers n'ont pas hésité, quand ils l'ont souhaité,
à abandonner tout bonnement la culture du coton et, à s'adonner
à leurs spéculations favorites au détriment de leur
compagnonnage avec cette société qui pourtant les appuyait dans
beaucoup d'autres domaines. D'ailleurs, à la question «
Comptez-vous augmenter vos superficies en Jatropha dans un avenir proche ?
», les chefs d'exploitation agricole familiale ont presque toutes
répondu en commençant par l'expression « je compte
clôturer...» qui en dit long sur leur intention. C'est pourquoi, je
qualifie les rapports entre exploitations agricoles familiales et le projet
Jatropha de mariage opportuniste avec « séparation des biens
».
Mon étude suggère une question
intéressante à investiguer « Est-ce que l'objectif de
renforcement des droits fonciers ne va pas l'emporter sur l'aspect
énergétique recherché dans la mise en oeuvre de la culture
du Jatropha ? ». Pour répondre à une telle question, une
analyse plus approfondie des logiques d'acteurs est nécessaire. Mes
investigations ne sont pas allées trop loin dans les grilles d'analyse
que proposent les spécialistes de la question. Néanmoins le
modeste travail que je viens de présenter peut servir de jalons à
des études de cette nature.
En perspective, il est aussi nécessaire de questionner
les rapports de pouvoir et les relations de régulation qui vont
interférer certainement pendant la collecte, la transformation et la
redistribution à la communauté de l'énergie produite : une
autre arène!
BIBLIOGRAPHIE
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» pour l'écodéveloppement au Sahel, mémoire de
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Mémoire Master Amadiane DIALLO
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ANNEXES
Annexe 1 : Guide d'entretien personnes ressources
1- Qu'est-ce que vous pensez des mesures prises dans le cadre
des protocoles internationaux pour atténuer les effets négatifs
des changements climatiques ou plutôt s'adapter à cette nouvelle
donne?
+ les " permis d'émission" : cette disposition permet aux
firmes de vendre ou d'acheter des droits à émettre (dans les pays
industrialisés et signataires)
+ MOC : la " Mise en OEuvre Conjointe " permet, entre pays
développés, de procéder à des investissements
visant à réduire les émissions de gaz à effet de
serre en dehors de leur territoire national et de bénéficier des
crédits d'émission générés par les
réductions ainsi obtenues
+ MDP : le " mécanisme de développement propre "
(MDP), proche du dispositif précédent, à la
différence que les investissements sont effectués par un pays
développé, dans un pays en développement
+ le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) finance des
projets ayant pour but de rendre les pays moins vulnérables aux effets
négatifs des changements climatiques et de renforcer leur
capacité d'adaptation.
2- Quel rôle pour les pays en développement,
notamment le Sénégal ?
3- Pensez-vous que le programme national de biocarburant est
dans cette logique ?
4- Qu'est-ce que vous pensez des projets d'agrocarburants d'une
manière générale ?
5- Qu'est-ce que vous pensez des projets d'agrocarburants de
proximité (participation des collectivités locales)?
6- Selon vous quels sont les avantages et les
inconvénients de ces projets pour les collectivités locales et
l'économie nationale ?
7- Selon vous comment ces projets peuvent impacter positivement
ou négativement sur le processus de développement local d'une
zone rurale au Sénégal ?
8- Dans l'hypothèse que ces projets d'agrocarburants
soient éligibles par exemple aux MDP, donc bénéficiaires
de crédits carbones, comment entrevoyez-vous l'utilisation de ce
financement ?
9- Quelles jonctions entre le programme GOANA (Grande Offensive
pour l'Agriculture, la Nourriture et l'Abondance) et projets d'agrocarburants
de proximité ?
10- Votre dernier mot par rapport à l'interview ?
I
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Annexe 2 : Guide d'entretien Communauté
Rurale
1.
Quel est le foncier disponible dans votre CR ? Combien est
réservée à l'agriculture ? utile ? aux zones de
pâturage ? Y' a-t-il des possibilités d'extension ?
2. Comment se fait l'attribution des terres de culture (arable)
dans votre communauté rurale ? Qui s'en occupe ?
3. Comment les litiges fonciers sont gérés ?
4. Comment les terres dégradées sont
gérées ?
5. Comment les zones de pâturage sont
réglementées ?
6. Est-ce vous avez eu à attribuer des terres dans le
cadre des programmes agricoles nationaux tel que la GOANA ? Programme Jatropha
...etc. ?
7. Si oui comment ? Qui ont été les demandeurs
?
8. Exploitent-ils toujours ces terres ?
9. Craignez-vous le marquage foncier ?
10. Quels mécanismes avez-vous mis en place pour lutter
contre ce phénomène ?
11. Connaissez-vous un tel cas ? Comment ça
été réglé ?
12. Votre plan de développement local ?
13. Vos relations avec le projet Jatropha ?
14. Votre rôle en tant que collectivités locales
?
15. Quel est l'objectif du projet selon vous ? Comment et
pourquoi il a été créé ?
16. Quels ont été les critères de
sélection des participants au projet ?
17. Que pensez-vous de la participation des producteurs ?
Pourquoi ?
18. Quelles sont les opinions/explications de la
non-participation d'autres producteurs ?
19. Que faire pour impliquer ces producteurs ?
20. Quelles sont les critiques faites à l'égard
des participants ? Et pourquoi ?
21. Que pensez-vous des Changements Climatiques ?
22. Connaissez-vous le protocole de Kyoto et les MDP ?
23. Si oui ? Qu'en pensez-vous? Si non, après mes
explications, qu'est ce ça vous inspire ?
Annexe 3 : QUESTIONNAIRE PRODUCTEUR CHEF
D'EXPLOITATION AGRICOLE
FAMILIALE
Enquêteur :
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~Date
de l'interview : /__/__/__/
Région: «~«~«~«~«~«~«~.
Département
:«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~. ·
Arrondissement
«~«~«~«~«~«~«~..Communauté rurale
:«~«~«~«~«~«~«~
«~«~«~«~«~«~
Nomdu village :
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~.«~«~«~«~..«~..«~«~«~«~«~«~«~«~..
NomCE: «~
«~.«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
N° Exploitation : / / / / / / Nom du répondant
:
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
Statut : 1= CE ou 2= CM ou 3= SH ou 4= SF ou 5=ECE N°
téléphone :
Âge \___\
Genre \___\ 1=Homme 2= Femme
Ethnie \\
1= Ouolof ; 2= Sérère ; 3= Toucouleur ; 4= Peul
; 5= Mandingue ; 6= Diola ; 7= Manjac ; 8= Autres (à
préciser)
Ancienneté famille dans le village \___\ en année
ou en génération
1. Niveau d'éducation \\
1= aucun ; 2= coranique ; 3= alphabétisation ; 4=
primaire ; 5= secondaire 1er cycle ; 6= secondaire 2nd
cycle ; 7= universitaire ; 8= Autres (à préciser)
2. Êtes-vous membre d'une
organisation/association/mouvement de producteur ? \\
1= Oui 2= Non
3. Type de production de l'EA? \___\
1= Végétales seulement 2=animales seulement 3=
Végétales et animales
4. Quels sont les types de sol que l'on rencontre dans
le village ?
1=dior (sablonneux) 2=deck (argileux) 3=deck-dior
(argilo-sablonneux) 4=autres (à préciser)
5. Quel est le mode de gestion et de répartition
des terres dans le village ?
6. Quels sont les types de sol dans l'exploitation
?
III
Mémoire Master Amadiane DIALLO
1=dior (sablonneux) 2=deck (argileux) 3=deck-dior
(argilo-sablonneux) 4=autres (à
préciser)
7. Mode d'acquisition du noyau initial de l'exploitation
?
1=Héritage 2=Donation 3=Achat 4=Autres (à
préciser)
8. Citer par ordre d'importance 3 cultures
vivrières que vous cultivez le plus ?
9. Pourquoi ? \___\
1= qualité nutritionnelle 2= se vend mieux 4= Bon
rendement 8=Choix personnel 16=Choix culturel 32=Autres (à
préciser)
10. Citer par ordre d'importance 3 cultures de rente que
vous cultivez le plus ?
11. Pourquoi ? \___\
1= Prix intéressant 2= marché existant 4=
écoulement facile 8=culture facile 16= Autres (à
préciser)
12. Estimation et ventilation revenu annuel
:
Combien en moy ? :~~~~~.FCFA
Ventilation ? : Consommation (nritr, santé, édu,
habiyma...)= % Impôt= ..........%
Epargne= % Autres
utilisations= %
13. Enumérer des dangers perçus qui
menacent la vie de votre exploitation ?
14. Quelles sont les réactions/adaptations par
rapports à ces menaces ?
15. En quoi l'organisation/association/mouvement peut
t'y aider ?
16. Connaissez-vous le projet Jatropha ?
17. Est-ce que vous êtes impliqués dans un
programme de plantation de Jatropha ?
18. Pourquoi ?
19. D'autres membres du ménage ou de la famile
sont-ils impliqués ?
20. Si oui, quel mode de plantation adoptez-vous
?
1=pépinière et bordure champ
2=pépinière et plein champ 3=directe et bordure champ 4= directe
et plein champ 8= pépinière et association culture 32= directe et
association culture
21. Quelle est la superficie réservée au
Jatropha dans l'exploitation ? ha
22. Sur quel type sol plantez-vous la culture du
Jatropha? 1=terre de culture habituelle 2=jachère
pâturage 3= nouvelle défriche 4= terres dégradées
23. Comptez-vous augmenter vos superficies en Jatropha
dans un avenir proche (d'ici 2 campagnes) ? 1=oui 2=non
24. Si non, pourquoi ?
25. Si oui, comment et combien ?
26. Quelles sont les principales contraintes
rencontrées dans la conduite de la culture ?
27. Savez-vous le pourquoi de la participation ou
non-participation d'aucuns ?
28. Qu'est-ce qui pourrait améliorer la
participation des producteurs ?
29. Réaction par rapport à l'entretien
auquel vous avez participé ?
V
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Annexe 4 : Données démographiques et
actifs agricoles par exploitation
Village
|
N°EA
|
âge CE
|
H<15
|
F<15
|
15= F
|
15= H
|
popT
|
pop active
|
Tx d'activité
|
actH<15
|
actF<15
|
15= actF=55
|
15= actH=55
|
actF>55
|
actH>55
|
Actifs agri
|
lettrés
|
KSB
|
1
|
44
|
6
|
6
|
8
|
7
|
27
|
20
|
0,74
|
4
|
5
|
7
|
4
|
0
|
0
|
12,15
|
11
|
KSB
|
2
|
54
|
5
|
5
|
7
|
4
|
21
|
16
|
0,76
|
2
|
5
|
4
|
4
|
0
|
1
|
9,30
|
2
|
KSB
|
3
|
38
|
5
|
3
|
5
|
4
|
17
|
8
|
0,47
|
2
|
1
|
2
|
3
|
0
|
0
|
5,65
|
6
|
KSB
|
4
|
54
|
3
|
3
|
5
|
4
|
15
|
7
|
0,47
|
2
|
1
|
2
|
2
|
0
|
0
|
4,65
|
1
|
KSB
|
5
|
63
|
5
|
5
|
8
|
6
|
24
|
18
|
0,75
|
3
|
3
|
5
|
6
|
0
|
1
|
12,00
|
4
|
KS
|
6
|
50
|
2
|
2
|
3
|
3
|
10
|
8
|
0,80
|
2
|
1
|
2
|
3
|
0
|
0
|
5,65
|
6
|
KS
|
7
|
33
|
1
|
1
|
3
|
2
|
7
|
4
|
0,57
|
0
|
1
|
1
|
2
|
0
|
0
|
2,95
|
2
|
KS
|
8
|
52
|
3
|
2
|
5
|
3
|
13
|
8
|
0,62
|
2
|
2
|
2
|
2
|
0
|
0
|
4,90
|
10
|
KS
|
9
|
38
|
1
|
1
|
4
|
2
|
8
|
4
|
0,50
|
1
|
0
|
2
|
1
|
0
|
0
|
2,90
|
3
|
KS
|
10
|
55
|
2
|
3
|
6
|
3
|
14
|
9
|
0,64
|
2
|
2
|
2
|
3
|
0
|
0
|
5,90
|
10
|
KS
|
11
|
46
|
3
|
4
|
4
|
4
|
15
|
8
|
0,53
|
2
|
1
|
2
|
3
|
0
|
0
|
5,65
|
6
|
KS
|
12
|
49
|
3
|
2
|
4
|
3
|
12
|
5
|
0,42
|
1
|
0
|
2
|
2
|
0
|
0
|
3,90
|
5
|
KS
|
13
|
34
|
1
|
1
|
2
|
1
|
5
|
3
|
0,60
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
2,20
|
3
|
DT
|
14
|
60
|
3
|
3
|
4
|
3
|
13
|
8
|
0,62
|
2
|
1
|
2
|
2
|
1
|
0
|
4,90
|
7
|
DT
|
15
|
68
|
4
|
4
|
5
|
3
|
16
|
9
|
0,56
|
2
|
1
|
3
|
2
|
0
|
1
|
5,60
|
4
|
DT
|
16
|
55
|
3
|
4
|
5
|
4
|
16
|
8
|
0,50
|
1
|
2
|
2
|
3
|
1
|
0
|
5,65
|
8
|
DT
|
17
|
59
|
4
|
3
|
5
|
3
|
15
|
13
|
0,87
|
3
|
3
|
3
|
3
|
1
|
0
|
7,60
|
11
|
DT
|
18
|
47
|
2
|
2
|
3
|
2
|
9
|
5
|
0,56
|
2
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
2,95
|
6
|
KMT
|
19
|
56
|
4
|
3
|
5
|
4
|
16
|
6
|
0,38
|
2
|
0
|
2
|
1
|
1
|
0
|
3,65
|
10
|
KMT
|
20
|
58
|
2
|
3
|
3
|
2
|
10
|
5
|
0,50
|
1
|
0
|
2
|
1
|
1
|
0
|
3,15
|
3
|
KMT
|
21
|
53
|
2
|
3
|
4
|
3
|
12
|
11
|
0,92
|
2
|
2
|
4
|
3
|
0
|
0
|
7,30
|
8
|
KMT
|
22
|
40
|
3
|
4
|
5
|
4
|
16
|
13
|
0,81
|
2
|
3
|
4
|
4
|
1
|
0
|
8,80
|
9
|
KMT
|
23
|
61
|
3
|
3
|
5
|
5
|
16
|
14
|
0,88
|
2
|
3
|
4
|
4
|
0
|
1
|
8,80
|
4
|
KMT
|
24
|
44
|
3
|
2
|
4
|
3
|
12
|
7
|
0,58
|
1
|
1
|
3
|
2
|
0
|
0
|
4,85
|
2
|
KMT
|
25
|
32
|
2
|
3
|
3
|
2
|
10
|
6
|
0,60
|
1
|
2
|
1
|
2
|
0
|
0
|
3,70
|
1
|
VI
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Annexe 5 : Capital foncier et matériels
agricoles par exploitation
Village
|
N° EA
|
défriche
|
hérita ge
|
achat
|
don/ affect°
|
prêt LT
|
TFoncier dispo
|
SCA
|
SupAra
5
|
SupCér
5
|
Semoir
|
TxEquip Semoir
|
InterEquiP Semoir
|
Houe
|
TxEquiP Houe
|
InterEquiP Houe
|
KSB
|
1
|
0
|
65
|
0
|
0
|
0
|
45
|
5
|
0
|
3,5
|
1
|
0,8
|
sous équipée
|
1
|
0,7
|
sous équipée
|
KSB
|
2
|
0
|
15
|
0
|
0
|
0
|
15
|
12
|
9
|
5,5
|
2
|
0,7
|
sous équipée
|
4
|
1,2
|
bien équipée
|
KSB
|
3
|
0
|
10
|
0
|
0
|
0
|
10
|
10
|
5,5
|
4,5
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
KSB
|
4
|
0
|
0
|
0
|
10
|
0
|
10
|
10
|
2
|
4
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
0
|
0,0
|
sous équipée
|
KSB
|
5
|
0
|
20
|
0
|
0
|
0
|
20
|
20
|
10
|
9,75
|
2
|
0,4
|
sous équipée
|
4
|
0,7
|
sous équipée
|
KS
|
6
|
0
|
10
|
0
|
0
|
0
|
10
|
5
|
5
|
2
|
1
|
0,8
|
sous équipée
|
1
|
0,7
|
sous équipée
|
KS
|
7
|
0
|
5
|
0
|
0
|
0
|
5
|
4
|
2
|
2,5
|
1
|
1,0
|
bien équipée
|
1
|
0,9
|
sous équipée
|
KS
|
8
|
0
|
5,5
|
0
|
0
|
0
|
5,5
|
5
|
2
|
3
|
1
|
0,8
|
sous équipée
|
2
|
1,4
|
bien équipée
|
KS
|
9
|
0
|
5
|
0
|
0
|
0
|
5
|
5
|
2,5
|
2,5
|
1
|
0,8
|
sous équipée
|
2
|
1,4
|
bien équipée
|
KS
|
10
|
0
|
0
|
0
|
5
|
2
|
7
|
5
|
2
|
3
|
1
|
0,8
|
sous équipée
|
2
|
1,4
|
bien équipée
|
KS
|
11
|
0
|
3
|
0
|
0
|
3
|
6
|
3
|
1
|
2
|
1
|
1,3
|
bien équipée
|
1
|
1,2
|
bien équipée
|
KS
|
12
|
0
|
3
|
0
|
0
|
0
|
3
|
2
|
1
|
1,5
|
1
|
2,0
|
bien équipée
|
2
|
3,5
|
bien équipée
|
KS
|
13
|
0
|
2
|
0
|
1
|
0
|
3
|
3
|
1
|
2
|
0
|
0,0
|
sous équipée
|
1
|
1,2
|
bien équipée
|
DT
|
14
|
0
|
12
|
0
|
0
|
0
|
14
|
12
|
6
|
6
|
2
|
0,7
|
sous équipée
|
2
|
0,6
|
sous équipée
|
DT
|
15
|
12
|
0
|
0
|
0
|
0
|
12
|
10
|
4
|
2
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
DT
|
16
|
0
|
9
|
0
|
0
|
0
|
9
|
8
|
4
|
4
|
2
|
1,0
|
bien équipée
|
3
|
1,3
|
bien équipée
|
DT
|
17
|
0
|
16
|
0
|
0
|
0
|
16
|
13
|
7
|
7
|
4
|
1,2
|
bien équipée
|
3
|
0,8
|
sous équipée
|
DT
|
18
|
0
|
0
|
0
|
4
|
0
|
4
|
3
|
1
|
2,5
|
2
|
2,7
|
bien équipée
|
1
|
1,2
|
bien équipée
|
KMT
|
19
|
0
|
20
|
0
|
0
|
0
|
20
|
5
|
2,5
|
1,5
|
2
|
1,6
|
bien équipée
|
1
|
0,7
|
sous équipée
|
KMT
|
20
|
0
|
0
|
0
|
4,5
|
0
|
4,5
|
3
|
1,5
|
2
|
1
|
1,3
|
bien équipée
|
2
|
2,3
|
bien équipée
|
KMT
|
21
|
0
|
5
|
0
|
0
|
0
|
5
|
3
|
1
|
2
|
0
|
0,0
|
sous équipée
|
1
|
1,2
|
bien équipée
|
KMT
|
22
|
0
|
12
|
0
|
0
|
0
|
12
|
10
|
4
|
4,5
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
KMT
|
23
|
0
|
0
|
0
|
6
|
0
|
6
|
4
|
1
|
1
|
1
|
1,0
|
bien équipée
|
1
|
0,9
|
sous équipée
|
KMT
|
24
|
0
|
21
|
0
|
0
|
0
|
15
|
13
|
8
|
5
|
2
|
0,6
|
sous équipée
|
2
|
0,5
|
sous équipée
|
KMT
|
25
|
0
|
16
|
0
|
0
|
0
|
12
|
11
|
7
|
4
|
1
|
0,4
|
sous équipée
|
1
|
0,3
|
sous équipée
|
Annexe 6 : Traction animale, emblavures et plantations
par exploitation
Village
|
N° EA
|
TFoncier dispo
|
SCA
|
Ctract° Bovins
|
Ctract ° Equin s
|
Ctra ct° Asin
s
|
Ctract° totale
|
Tx trac t°
|
Sup /5 mil
|
Sup /5
Ara
|
Sup/5 maïs
|
Sup/5 sorgho
|
Sup /5 riz
|
Sup Plantat°
|
Jachè re /an
|
SupParcl Déjà planTJatph
|
SupParcl A planTJatph
|
KSB
|
1
|
45
|
5
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1,00
|
0
|
1,00
|
1,00
|
0,50
|
40
|
0
|
4
|
3
|
KSB
|
2
|
15
|
12
|
0
|
10,5
|
2,5
|
13
|
1,08
|
4,00
|
9
|
1,00
|
0,25
|
0,25
|
3
|
0
|
0
|
2
|
KSB
|
3
|
10
|
10
|
6
|
0
|
0
|
6
|
0,60
|
3,00
|
5,5
|
1,00
|
0,50
|
0,00
|
0
|
0
|
1
|
2
|
KSB
|
4
|
10
|
10
|
0
|
0
|
5
|
5
|
0,50
|
3,00
|
2
|
1,00
|
0,00
|
0,00
|
0
|
0
|
1,5
|
5
|
KSB
|
5
|
20
|
20
|
6
|
0
|
5
|
11
|
0,55
|
6,00
|
10
|
2,00
|
1,00
|
0,75
|
0
|
0
|
0
|
4
|
KS
|
6
|
10
|
5
|
0
|
0
|
2,5
|
2,5
|
0,50
|
2,00
|
5
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
5
|
0
|
1,5
|
5
|
KS
|
7
|
5
|
4
|
6
|
0
|
0
|
6
|
1,50
|
2,00
|
2
|
0,50
|
0,00
|
0,00
|
1
|
0
|
4
|
1
|
KS
|
8
|
5,5
|
5
|
6
|
0
|
2,5
|
8,5
|
1,70
|
2,00
|
2
|
1,00
|
0,00
|
0,00
|
1
|
0,5
|
1
|
3
|
KS
|
9
|
5
|
5
|
0
|
0
|
7,5
|
7,5
|
1,50
|
2,50
|
2,5
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0
|
0
|
4
|
1
|
KS
|
10
|
7
|
5
|
0
|
0
|
7,5
|
7,5
|
1,50
|
2,00
|
2
|
1,00
|
0,00
|
0,00
|
0
|
2
|
2
|
1
|
KS
|
11
|
6
|
3
|
0
|
0
|
5
|
5
|
1,67
|
2,00
|
1
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0
|
3
|
1
|
2
|
KS
|
12
|
3
|
2
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0,00
|
1,00
|
1
|
0,00
|
0,50
|
0,00
|
1
|
0
|
1
|
1
|
KS
|
13
|
3
|
3
|
0
|
0
|
5
|
5
|
1,67
|
1,50
|
1
|
0,50
|
0,00
|
0,00
|
0
|
0
|
1
|
2
|
DT
|
14
|
14
|
12
|
0
|
7
|
0
|
7
|
0,58
|
6,00
|
6
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
3
|
0
|
2
|
1
|
DT
|
15
|
12
|
10
|
0
|
0
|
5
|
5
|
0,50
|
2,00
|
4
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
2
|
0
|
2
|
1
|
DT
|
16
|
9
|
8
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0,00
|
4,00
|
4
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
1
|
0
|
1
|
1
|
DT
|
17
|
16
|
13
|
0
|
3,5
|
7,5
|
11
|
0,85
|
7,00
|
7
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
3
|
0
|
2
|
1
|
DT
|
18
|
4
|
3
|
6
|
0
|
0
|
6
|
2,00
|
2,00
|
1
|
0,50
|
0,00
|
0,00
|
1,5
|
0
|
1,5
|
2
|
KMT
|
19
|
20
|
5
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0,00
|
1,50
|
2,5
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
15
|
0
|
1
|
10
|
KMT
|
20
|
4,5
|
3
|
0
|
3,5
|
5
|
8,5
|
2,83
|
2,00
|
1,5
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
1,5
|
0
|
1
|
1
|
KMT
|
21
|
5
|
3
|
0
|
0
|
2,5
|
2,5
|
0,83
|
2,00
|
1
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
1,5
|
0,5
|
1,5
|
1
|
KMT
|
22
|
12
|
10
|
12
|
3,5
|
0
|
15,5
|
1,55
|
3,00
|
4
|
1,00
|
0,50
|
0,00
|
2
|
0
|
1
|
1
|
KMT
|
23
|
6
|
4
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0,00
|
1,00
|
1
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
2
|
0
|
1
|
2
|
KMT
|
24
|
15
|
13
|
0
|
3,5
|
2,5
|
6
|
0,46
|
2,00
|
8
|
2,00
|
1,00
|
0,00
|
1
|
1
|
0
|
4
|
KMT
|
25
|
12
|
11
|
0
|
3,5
|
2,5
|
6
|
0,55
|
2,00
|
7
|
1,00
|
1,00
|
0,00
|
1
|
0
|
0
|
2
|
VIII
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Annexe 7 : Quelques indicateurs par village
Village enquêté
|
Age CE
|
Actifs agricoles
|
Total foncier dispo EA
|
Population EA
|
SCA
|
TxEquiPSemoir
|
TxEquiPHoue
|
TxTract°T
|
%TmarquageJatropha
|
%Tmarquage foncier
|
TxcouvCrl
|
DT Moyenne
|
57,8000
|
5,3400
|
11,0000
|
13,8000
|
9,2000
|
1,2000
|
,8600
|
,7860
|
,2000
|
,4080
|
,6800
|
N
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
Ecart-type
|
7,66159
|
1,67160
|
4,69042
|
2,94958
|
3,96232
|
,89163
|
,38471
|
,74497
|
,10770
|
,20523
|
,17958
|
KMT Moyenne
|
49,1429
|
5,7500
|
10,6429
|
13,1429
|
7,0000
|
,7571
|
,9000
|
,8886
|
,4071
|
,6957
|
,8086
|
N
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
7
|
Ecart-type
|
10,68377
|
2,48965
|
5,79306
|
2,79455
|
4,20317
|
,56526
|
,69041
|
1,00726
|
,22507
|
,45313
|
,61732
|
KS Moyenne
|
44,6250
|
4,2563
|
5,5625
|
10,5000
|
4,0000
|
,9375
|
1,4625
|
1,2550
|
,7050
|
,8563
|
,7775
|
N
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
8
|
Ecart-type
|
8,48423
|
1,45907
|
2,25891
|
3,58569
|
1,19523
|
,56300
|
,86179
|
,64004
|
,23970
|
,31609
|
,37343
|
KSB Moyenne
|
50,6000
|
8,7500
|
20,0000
|
20,8000
|
11,4000
|
,5400
|
,6000
|
,5460
|
,2620
|
,4780
|
1,0420
|
N
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
Ecart-type
|
9,73653
|
3,49446
|
14,57738
|
4,91935
|
5,45894
|
,19494
|
,44159
|
,38351
|
,24232
|
,36458
|
,39461
|
Total Moyenne
|
49,7200
|
5,7900
|
10,9600
|
13,9600
|
7,3600
|
,8600
|
1,0120
|
,9168
|
,4320
|
,6460
|
,8196
|
N
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
25
|
Ecart-type
|
9,88062
|
2,70620
|
8,70215
|
5,01232
|
4,50814
|
,60139
|
,71023
|
,74880
|
,28879
|
,37787
|
,42692
|
Annexe 8 : Tableau ANOVA intervillages
|
Somme des carrés
|
df
|
Moyenne des carrés
|
F
|
Signification
|
Age CE * Inter-groupes Combiné
|
540,308
|
3
|
180,103
|
2,098
|
,131
|
Village enquêté Intra-classe
|
1802,732
|
21
|
85,844
|
|
|
Total
|
2343,040
|
24
|
|
|
|
Actifs agricoles Inter-groupes Combiné
|
63,651
|
3
|
21,217
|
3,974
|
,022
|
* Village Intra-classe
|
112,114
|
21
|
5,339
|
|
|
enquêté Total
|
175,765
|
24
|
|
|
|
Total foncier Inter-groupes Combiné
|
642,384
|
3
|
214,128
|
3,827
|
,025
|
dispo EA * Intra-classe
|
1175,076
|
21
|
55,956
|
|
|
Village enquêté Total
|
1817,460
|
24
|
|
|
|
Population EA * Inter-groupes Combiné
|
334,503
|
3
|
111,501
|
8,722
|
,001
|
Village enquêté Intra-classe
|
268,457
|
21
|
12,784
|
|
|
Total
|
602,960
|
24
|
|
|
|
SCA * Village Inter-groupes Combiné
|
189,760
|
3
|
63,253
|
4,457
|
,014
|
enquêté Intra-classe
|
298,000
|
21
|
14,190
|
|
|
Total
|
487,760
|
24
|
|
|
|
TxEquiPSemoir Inter-groupes Combiné
|
1,212
|
3
|
,404
|
1,136
|
,357
|
* Village Intra-classe
|
7,468
|
21
|
,356
|
|
|
enquêté Total
|
8,680
|
24
|
|
|
|
TxEquiPHoue * Inter-groupes Combiné
|
2,676
|
3
|
,892
|
1,986
|
,147
|
Village enquêté Intra-classe
|
9,431
|
21
|
,449
|
|
|
Total
|
12,106
|
24
|
|
|
|
TxTract°T * Inter-groupes Combiné
|
1,694
|
3
|
,565
|
1,008
|
,409
|
Village enquêté Intra-classe
|
11,763
|
21
|
,560
|
|
|
x
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Total
|
13,457
|
24
|
|
|
|
%TmarquageJa Inter-groupes Combiné
|
1,014
|
3
|
,338
|
7,190
|
,002
|
tropha * Village Intra-classe
|
,987
|
21
|
,047
|
|
|
enquêté Total
|
2,002
|
24
|
|
|
|
%Tmarquage Inter-groupes Combiné
|
,795
|
3
|
,265
|
2,115
|
,129
|
foncier * Village Intra-classe
|
2,632
|
21
|
,125
|
|
|
enquêté Total
|
3,427
|
24
|
|
|
|
TxcouvCrl * Inter-groupes Combiné
|
,360
|
3
|
,120
|
,627
|
,605
|
Village enquêté Intra-classe
|
4,015
|
21
|
,191
|
|
|
Total
|
4,374
|
24
|
|
|
|
Annexe 9: Tableau ANOVA interGroupes
|
Somme des carrés
|
df
|
Moyenne des carrés
|
F
|
Signification
|
Age CE * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
115,975
|
3
|
38,658
|
,365
|
,779
|
Intra-classe
|
2227,065
|
21
|
106,051
|
|
|
Total
|
2343,040
|
24
|
|
|
|
Population EA * Inter-groupes Combiné
|
275,395
|
3
|
91,798
|
5,885
|
,004
|
GroupeTypo Intra-classe
|
327,565
|
21
|
15,598
|
|
|
Total
|
602,960
|
24
|
|
|
|
Taux d'activité * Inter-groupes Combiné
|
,066
|
3
|
,022
|
,960
|
,430
|
GroupeTypo Intra-classe
|
,479
|
21
|
,023
|
|
|
Total
|
,545
|
24
|
|
|
|
Actifs agricoles * Inter-groupes Combiné
|
67,587
|
3
|
22,529
|
4,373
|
,015
|
GroupeTypo Intra-classe
|
108,178
|
21
|
5,151
|
|
|
Total
|
175,765
|
24
|
|
|
|
Lettrés EA * Inter-groupes Combiné
|
22,625
|
3
|
7,542
|
,692
|
,567
|
GroupeTypo Intra-classe
Total
|
228,815 251,440
|
21 24
|
10,896
|
|
|
Total foncier dispo EA * Inter-groupes Combiné
|
1118,006
|
3
|
372,669
|
11,189
|
,000
|
GroupeTypo Intra-classe
|
699,454
|
21
|
33,307
|
|
|
Total
|
1817,460
|
24
|
|
|
|
SCA * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
278,373
|
3
|
92,791
|
9,306
|
,000
|
Intra-classe
|
209,387
|
21
|
9,971
|
|
|
Total
|
487,760
|
24
|
|
|
|
SupCér5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
38,984
|
3
|
12,995
|
4,639
|
,012
|
Intra-classe
|
58,826
|
21
|
2,801
|
|
|
Total
|
97,810
|
24
|
|
|
|
SupAra5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
93,457
|
3
|
31,152
|
6,443
|
,003
|
Intra-classe
|
101,543
|
21
|
4,835
|
|
|
Total
|
195,000
|
24
|
|
|
|
RdtAra5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
19371,658
|
3
|
6457,219
|
,126
|
,944
|
Intra-classe
|
1026854,300
|
20
|
51342,715
|
|
|
Total
|
1046225,958
|
23
|
|
|
|
RdtMil5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
246056,053
|
3
|
82018,684
|
1,087
|
,376
|
Intra-classe
|
1584623,387
|
21
|
75458,257
|
|
|
Total
|
1830679,440
|
24
|
|
|
|
RdtMaïs5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
433381,410
|
3
|
144460,470
|
1,322
|
,327
|
Intra-classe
|
983541,667
|
9
|
109282,407
|
|
|
Total
|
1416923,077
|
12
|
|
|
|
RdtSorgho5 * Inter-groupes Combiné
|
80833,333
|
2
|
40416,667
|
2,146
|
,212
|
GroupeTypo Intra-classe
|
94166,667
|
5
|
18833,333
|
|
|
Total
|
175000,000
|
7
|
|
|
|
Bovins * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
,970
|
3
|
,323
|
,250
|
,861
|
Intra-classe
|
27,190
|
21
|
1,295
|
|
|
XII
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Total
|
28,160
|
24
|
|
|
|
Sup Plant°anaou mang Inter-groupes Combiné
|
381,681
|
3
|
127,227
|
2,176
|
,121
|
* GroupeTypo Intra-classe
|
1227,659
|
21
|
58,460
|
|
|
Total
|
1609,340
|
24
|
|
|
|
TxTract°T * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
3,715
|
3
|
1,238
|
2,670
|
,074
|
Intra-classe
|
9,742
|
21
|
,464
|
|
|
Total
|
13,457
|
24
|
|
|
|
Sup Plant° Jatropha * Inter-groupes Combiné
|
2,286
|
3
|
,762
|
,641
|
,597
|
GroupeTypo Intra-classe
|
24,954
|
21
|
1,188
|
|
|
Total
|
27,240
|
24
|
|
|
|
Sup PrévueJatropha * Inter-groupes Combiné
|
46,756
|
3
|
15,585
|
1,820
|
,174
|
GroupeTypo Intra-classe
|
179,804
|
21
|
8,562
|
|
|
Total
|
226,560
|
24
|
|
|
|
TxcouvCrl * Inter-groupes Combiné
|
1,380
|
3
|
,460
|
3,228
|
,043
|
GroupeTypo Intra-classe
|
2,994
|
21
|
,143
|
|
|
Total
|
4,374
|
24
|
|
|
|
Charrette * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
,123
|
3
|
,041
|
,153
|
,927
|
Intra-classe
|
5,637
|
21
|
,268
|
|
|
Total
|
5,760
|
24
|
|
|
|
Jachère annuelle * Inter-groupes Combiné
|
3,060
|
3
|
1,020
|
2,380
|
,098
|
GroupeTypo Intra-classe
|
9,000
|
21
|
,429
|
|
|
Total
|
12,060
|
24
|
|
|
|
TxEquiPSemoir * Inter-groupes Combiné
|
2,553
|
3
|
,851
|
2,917
|
,058
|
GroupeTypo Intra-classe
|
6,127
|
21
|
,292
|
|
|
Total
|
8,680
|
24
|
|
|
|
TxEquiPHoue * Inter-groupes Combiné
|
7,614
|
3
|
2,538
|
11,865
|
,000
|
GroupeTypo Intra-classe
|
4,492
|
21
|
,214
|
|
|
Total
|
12,106
|
24
|
|
|
|
Pop active EA * Inter-groupes Combiné
GroupeTypo Intra-classe
Total
|
200,292 277,548 477,840
|
3 21 24
|
66,764 13,217
|
5,052
|
,009
|
Tableau 10 : ANOVA Marquage X Groupe
|
Somme des carrés
|
df
|
Moyenne des carrés
|
F
|
Signification
|
%marquageJatrophaPlté * Inter-groupes Combiné
|
,435
|
3
|
,145
|
4,980
|
,009
|
GroupeTypo Intra-classe
|
,612
|
21
|
,029
|
|
|
Total
|
1,048
|
24
|
|
|
|
%marquageplant°ana&mg * Inter-groupes Combiné
|
,183
|
3
|
,061
|
1,167
|
,346
|
GroupeTypo Intra-classe
|
1,095
|
21
|
,052
|
|
|
Total
|
1,277
|
24
|
|
|
|
%MarquageJatrophaPrvu * Inter-groupes Combiné
|
,031
|
3
|
,010
|
,187
|
,904
|
GroupeTypo Intra-classe
|
1,163
|
21
|
,055
|
|
|
Total
|
1,195
|
24
|
|
|
|
%TmarquageJatropha * Inter-groupes Combiné
|
,512
|
3
|
,171
|
2,406
|
,096
|
GroupeTypo Intra-classe
|
1,490
|
21
|
,071
|
|
|
Total
|
2,002
|
24
|
|
|
|
%Tmarquage foncier * Inter-groupes Combiné
|
,419
|
3
|
,140
|
,976
|
,423
|
GroupeTypo Intra-classe
|
3,007
|
21
|
,143
|
|
|
Total
|
3,427
|
24
|
|
|
|
XIV
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Annexe 11 : Tableau de bord des rendements par type
d'exploitation
GroupeTypo
|
RdtAra5
|
RdtMil5
|
RdtMaïs5
|
RdtSorgho5
|
A Moyenne
|
700,0000
|
595,7500
|
800,0000
|
600,0000
|
N
|
4
|
4
|
2
|
1
|
Ecart-type
|
258,19889
|
480,87308
|
282,84271
|
.
|
Minimum
|
400,00
|
250,00
|
600,00
|
600,00
|
Maximum
|
1000,00
|
1300,00
|
1000,00
|
600,00
|
B Moyenne
|
731,2500
|
340,6250
|
333,3333
|
|
N
|
8
|
8
|
3
|
|
Ecart-type
|
225,09918
|
137,54058
|
57,73503
|
|
Minimum
|
400,00
|
200,00
|
300,00
|
|
Maximum
|
1000,00
|
600,00
|
400,00
|
|
C Moyenne
|
706,0000
|
535,7143
|
750,0000
|
566,6667
|
N
|
7
|
7
|
4
|
3
|
Ecart-type
|
228,20386
|
257,98883
|
506,62281
|
57,73503
|
Minimum
|
273,00
|
200,00
|
400,00
|
500,00
|
Maximum
|
1000,00
|
1000,00
|
1500,00
|
600,00
|
D Moyenne
|
652,2000
|
530,6667
|
762,5000
|
775,0000
|
N
|
5
|
6
|
4
|
4
|
Ecart-type
|
199,81541
|
268,00572
|
205,64938
|
170,78251
|
Minimum
|
360,00
|
300,00
|
500,00
|
600,00
|
Maximum
|
857,00
|
1000,00
|
1000,00
|
1000,00
|
Total Moyenne
|
702,2083
|
481,6800
|
665,3846
|
675,0000
|
N
|
24
|
25
|
13
|
8
|
Ecart-type
|
213,27936
|
276,18528
|
343,62323
|
158,11388
|
Minimum
|
273,00
|
200,00
|
300,00
|
500,00
|
Maximum
|
1000,00
|
1300,00
|
1500,00
|
1000,00
|
Annexe 12 : Tableau ANOVA rendements intergroupes
|
Somme des carrés
|
df
|
Moyenne des carrés
|
F
|
Signification
|
RdtAra5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
19371,658
|
3
|
6457,219
|
,126
|
,944
|
Intra-classe
|
1026854,300
|
20
|
51342,715
|
|
|
Total
|
1046225,958
|
23
|
|
|
|
RdtMil5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
246056,053
|
3
|
82018,684
|
1,087
|
,376
|
Intra-classe
|
1584623,387
|
21
|
75458,257
|
|
|
Total
|
1830679,440
|
24
|
|
|
|
RdtMaïs5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
433381,410
|
3
|
144460,470
|
1,322
|
,327
|
Intra-classe
|
983541,667
|
9
|
109282,407
|
|
|
Total
|
1416923,077
|
12
|
|
|
|
RdtSorgho5 * GroupeTypo Inter-groupes Combiné
|
80833,333
|
2
|
40416,667
|
2,146
|
,212
|
Intra-classe
|
94166,667
|
5
|
18833,333
|
|
|
Total
|
175000,000
|
7
|
|
|
|
XVI
Mémoire Master Amadiane DIALLO
Annexe 13 : Localisation du Sénégal et
de la région de Fatick
Source : Abdoulaye SENE (2008). Président du Conseil
Régional de Fatick (Sénégal), La Région de
Fatick face au défi du changement climatique, Saint Malo,
décembre.
DIAGL
N
IAFFE
KEUR BIRANE KH
#
#
Annexe 14: Carte administrative de la région de
Fatick
Source :
www.au-senegal.com,
2010
#
Annexe 15: Carte de localisation du pôle de
développemment de Dantakhoune
Source : SOPREEF, 2010
KEUR SETTE
Annexes 16: Mes photos
1ère photo en haut : interview du chef de village de
Dantakhoune
2ème photo : un agropasteur qui revient du champ avec un
attelage d'une paire de boeuf 3ème photo : clôture avec du
Jatropha faite bien avant le projet (Dantakhoune)
Source : mes photos, 2010
1ère photo en haut : jeunes plants de Jatropha
plantés en 2010 autour d'une parcelle de brousse
2ème photo : des agropasteurs salariés journaliers
sont en oeuvre pour installer une monoculture Jatropha 3ème photo :
jeunes plants de Jatropha en monoculture
Source : mes photos, 2010
Annexes 17 : Autorité Nationale
Désignée (AND) et MDP au Sénégal
Annexes 18 : AND et critères de
développement durable du Sénégal
Mémoire Master Amadiane DIALLO
XXII
|