2.2.2. L'Approche d'Analyse des Moyens d'Existence Durable
(AMED) « The Substainable Livelihood Analyse (SLA) »
Les changements climatiques sont un phénomène
qui entraîne des changements sociaux, ils ont des impacts sur le
bien-être des populations locales. A cet effet, nous retenons dans le
cadre de notre étude l'AMED ou « Livelihood » pour l'analyse
des stratégies d'adaptation développées par les
producteurs. Cette approche trouve son origine dans les débats
initiés à la fin des années 1980 autour des notions et des
caractérisations de la pauvreté. Ces débats visaient le
dépassement des visions réductionnistes basées simplement
sur le niveau de revenus ou de consommation des personnes (Bucci, 2008). Dans
sa substance, le
<< livelihood >> est un concept alternatif
à celui de << système >> comme paradigme de
conceptualisation des modes de production et de vie des producteurs et groupes
sociaux (FIDA, 2007).
Dans sa conception théorique, l'AMED est une approche
construite autour du concept de << Moyen d'Existence Durable
(MED)>> et d'une théorie du changement. Celle-ci identifie un
certain nombre de niveaux et facteurs stratégiquement importants qui,
dans une logique d'ensemble, expliquent comment la maîtrise et
l'orientation des facteurs vers les stratégies d'existence devrait
engendrer des effets positifs sur l'existence d'individus dans un territoire
déterminé.
Les moyens d'existence englobent les capacités, les
atouts (y compris les ressources matérielles et sociales) et les
activités nécessaires pour vivre. Ils sont durables lorsqu'ils
permettent aux groupes sociaux concernés de faire face à des
contraintes et à des chocs, de maintenir ou d'accroître les
capacités et les actifs présents et à venir, sans porter
atteinte à la disponibilité des ressources naturelles pour les
générations futures (DFID, 1999). Ainsi, le concept de moyen
d'existence durable est construit autour de trois éléments :
- les capacités nécessaires pour mener une
existence décente,
- les biens tangibles qu'un individu ou un ménage
possède ou au quels il a accès,
- les biens intangibles, comme la possibilité de faire
des demandes ou des requêtes ou d'accéder à des services,
à la technologie, à une activité génératrice
de revenus, etc (Chambers et Corway 1991)
Le << livelihood >> intègre beaucoup de
données (quantitatives et qualitatives) et peut permettre de fournir une
analyse socio - économique et surtout politique sur ce que cache les
disparités entre ménages dans la mobilisation des atouts et le
déploiement des stratégies de subsistance (Ann Whitehead, 2002).
Il est basé sur sept principes fondamentaux : les populations locales au
coeur du développement, une vision holistique, la flexibilité et
le dynamisme, la valorisation du capital des individus ou des ménages,
les interrelations micro-macro, des alliances partenariales larges, et la
durabilité (DFID, 1999). De ce point de vu, le << livelihood
>> est une démarche centrée sur l'humain, les individus ou
ménages constituent le point d'entrée privilégié et
non, par exemple, une région ou un secteur d'activité
donné. Il est une approche englobante, c'est-à-dire qu'il ne se
cantonne pas à un seul secteur, un seul lieu
ou un niveau donné ; et il intègre la
multiplicité des acteurs et des stratégies. Il se fonde avant
tout sur l'analyse des dynamiques de changement, les relations de cause
à effet, l'enchaînement d'événements, et non sur une
vision statique et figée des populations et de leurs moyens d'existence.
Il s'appuie, ceci est très important, sur les atouts et les forces
disponibles au sein des populations, afin de les appuyer et de les renforcer,
et non sur leurs besoins. En rupture avec les pratiques de développement
qui tendent à se concentrer de manière exclusive sur des aspects
macro ou micro, le << livelihood >> vise à
réconcilier les deux échelles, notamment en décortiquant
l'impact des politiques macro sur les populations à l'échelle
locale. Les interventions s'envisagent en partenariat avec d'autres acteurs de
développement, du secteur privé ou public. Enfin l'approche du
<< livelihood >> situe la durabilité à quatre niveaux
que sont : le niveau financier en limitant la nécessité d'un
recours aux financements extérieurs ; le niveau institutionnel, à
travers l'intégration dans des institutions existantes ; le niveau
environnemental, en tenant compte du potentiel physique à long terme et
le niveau social, en minimisant l'exclusion sociale.
Elaboré par la DFID, le cadre analytique de l'AMED est
un outil pratique pour faire comprendre et assimiler l'approche en favorisant
l'analyse des moyens réels d'existence des populations. La figure 2
présente les cinq composantes de ce cadre.
Légende
H = capital Humain S = capital Social
N = capital Naturel P = capital Physique F = capital
Financier
AVOIR DE MOYENS D'EXISTENCE
CONTEXTE DE VULNERABILITE
CHOCS
TENDANCES SAISONNALITE
STRUCTURE ET PROCESSUS DE TRANSFORMATION
STRUCTURES
· Niveau de gouvernement
· Secteur
privé
Lois
Politique
Culture Institution
RESULTATS DE MOYENS D'EXISTENCE
· Plus de
revenus
· Bien être accru
· Vulnérabilitéréduite
· Plus grande
sécuritéalimentaire
· Utilisation plus durable
STRATEGIES DE MOYENS D'EXISTENCE
Pour obtenir des
Influence & accès
H S N
P F
Figure 2: Cadre analytique du « livelihood Source
: DFID, 1999
Ces cinq composantes peuvent être décrites dans
le cadre du présent travail de la manière suivante : (i) le
contexte de vulnérabilité aux changements climatiques du monde
dans le quel opèrent les producteurs agricoles ; (ii) leurs atouts en
capital (social, humain, naturel, physique et financier) ; (iii) les
politiques, institutions et processus qui influent sur leur vie ; (iv) les
stratégies adoptées par ces producteurs qui peuvent soit
être basées sur l'exploitation des ressources naturelles, soit sur
l'exploitation d'autres types de ressources, soit encore sur le changement de
contexte de la part de l'exploitation et (v) les résultats qu'ils
obtiennent ou auxquels ils aspirent.
Ce cadre ne fonctionne pas de manière linéaire
et ne cherche pas à donner une représentation exacte de la
réalité. Il vise plutôt à fournir une façon
de considérer les moyens d'existence des producteurs qui stimule le
débat et la réflexion sur les nombreux facteurs en l'occurrence
le risques climatiques, influençant ces moyens d'existence, la
façon dont ils interagissent et leur importance relative dans une
situation donnée, ce qui devrait faciliter l'identification de
manières plus efficaces d'appuyer les moyens d'existence et de
réduire leur vulnérabilité (FIDA, op.cit).
Pour la présente étude, l'AMED permettra une
meilleure prise en compte des aspirations, des atouts et des contraintes des
producteurs, de leur inhérente diversité, de la complexité
de leur environnement et de leurs stratégies d'existence dans un
contexte globale de changement climatique.
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