2.3. Logiques d'acteurs
Nous analysons le système d?action et de
décision entre acteurs, où les protecteurs de la ressource ainsi
que les communautés locales riveraines de Monkoto sont
considérés comme des acteurs privilégiés pour
l?analyse. Ce sont les intérêts et logiques des acteurs qui
confèrent du sens aux décisions et qui, dans une large mesure,
expliquent la réussite ou l?échec des actions menées.
Ces acteurs ont des intérêts divergents et
chaque groupe conçoit une stratégie propre qu?il met en place
pour atteindre son objectif. Cette stratégie peut consister en la
sélection d?un espace ou territoire d?opérations, la
considération d?étapes et d?un échelonnement de
décisions ou d?actions dans le temps, anticipation des actions des
opposants et des capacités réactives à celles-ci (jeu
d?acteurs), revalorisation des acquis et la récupération face aux
pertes.
Les rapports sociaux, conflictuels ou de coopération, au
même titre que les conditions matérielles et les capacités
techniques, indiquent les limites ou les potentialités des projets de
changement.
Il y a lieu de distinguer parmi les acteurs, deux types de
stratégies: (i) stratégies relationnelles, celles qui
répondent à des options et logiques d?interventions/actions
concernant les acteurs qui sont directement impliqués, alliés ou
adversaires et (ii) stratégies de réalisation, qui concernent les
voies et contenus des réalisations pour la poursuite des objectifs (cfr
figure.5).
2.3.1. Logiques des protecteurs du PNS (l'ICCN et ses
partenaires)
Lors de la création du Parc National de la Salonga,
aucune consultation publique n?a été faite. Et cette
création a suscité une multiplicité
d?intérêts locaux et extra locaux en concurrence. La conservation
de la biodiversité reste principalement du ressort de l?Etat central et
des décideurs internationaux pour qui les aires protégées
constituent des outils privilégiés de protection de la faune.
Sur le plan institutionnel, le PNS est l?arène de
rivalités et divergences d?intérêts qui s?appesantissent
sur sa gestion. L?obstacle majeur est la présence de plusieurs acteurs
institutionnels et des partenaires qui ne partagent pas la même vision
des stratégies de conservation, ni du partage du pouvoir et des
responsabilités. En plus, au niveau provincial, s?ajoutent
également les autorités politico-administratives à la fois
nombreuses et quasi totalement dépourvues de moyens (gouverneur de
province, commissaire de district, administrateurs des territoires avec,
à chaque niveau, leur services respectifs de l?Environnement et
Conservation de la Nature, la Police Nationale et la justice)146.
Du fait que l?ICCN a mandat de veiller à la protection
du patrimoine mondial qu?est le Parc National de la Salonga, il
bénéficie d?un intérêt particulier de la part de la
communauté internationale. Plusieurs partenaires l?appuient dans sa
mission plus que d?autres acteurs étatiques. Ce privilège
encourage l?ICCN à considérer la gestion du parc comme une quasi
exclusivité et à négliger l?importance de la concertation
institutionnelle. Ce caractère fortement centralisé du pouvoir de
décision au niveau du site réduit en tout cas les marges de
manoeuvre des échelons inférieurs pour collaborer avec les autres
parties prenantes.
Cependant, les structures étatiques centrales
connaissent d?extrêmes difficultés pour faire appliquer les
politiques de conservation sur le terrain du fait que le statut juridique des
ressources de la biodiversité ne permet pas son appropriation par des
communautés locales. Ainsi les représentants du PNS doivent
gérer les craintes des populations locales riveraines de se voir retirer
ou confisquer leur pouvoir d?utilisation et de gestion d?un territoire qui leur
appartient.
146 TREFON T.et KABUYAYA N. (2009). Evaluation
Socio-économique au Parc National de la Salonga. Rapport
d?enquête rapide des réalisations faite par WWF et
présentation de l?outil méthodologique, Kinshasa-RDC, p4-5
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