PROGRAMME UNIVERSITÉ PAR SATELLITE
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)
MASTER DROIT INTERNATIONAL ET COMPARÉ DE
L'ENVIRONNEMENT
Formation à distance, Campus Numérique
« ENVIDROIT »
Application du droit international au plan interne :
examen de la mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA
FASO.
Mémoire présenté par
Monsieur SOMDA SAABESELE JEAN AUGUSTIN Sous la
direction de
Monsieur GERARD MONEDIAIRE
Professeur de Droit public à la faculté de Droit et
des Sciences Economiques de Limoges, Directeur
du CRIDEAU. Août 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
RFMFrCIFMFNTs
J'exprime ma gratitude au professeur GERARD MONEDIAIRE pour la
disponibilité et la promptitude dont il a fait montre dans le suivi de
mon mémoire,
Je remercie spécialement mon oncle le Dr MATHIAS SOME
et son épouse MARIE THERESE ARCENS SOME pour les conseils et les
soutiens multiformes qu'ils m'ont apporté,
J'exprime ma reconnaissance à KONDE N. K. ADELINE pour son
assistance inconditionnelle,
A mon père et à ma mère, à mes
frères et surs,
Aux camarades de formation DICE 2009/2010, au personnel du Campus
numérique de Ouagadougou et à tous ceux qui ont contribué
à la réalisation de ce mémoire,
Que Dieu vous garde et vous bénisse.
2
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
SOMMAIRE
Introduction 3
Titre I : consécration et réception de principe de
précaution 7
Chapitre I : l'avènement du principe de précaution
en droit international
8
Chapitre II : l'avènement du principe de
précaution au BURKINA FASO
18
Titre II : La mise en ~uvre du principe de précaution au
BURKINA FASO
33
Chapitre I : principe de précaution et
développement du Burkina Faso
34
Chapitre II : exemple illustratif de l'application du principe
de
précaution : les biotechnologies modernes au BURKINA FASO
46
Conclusion générale 65
BIBLIOGRAPHIE 68
TABLE DES MATIERES 70
INTRODUCTION
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Le droit international de l'environnement est la branche du droit
international public qui édicte les règles juridiques tendant
à la suppression ou du moins à la limitation des atteintes
à l'environnement. Le projet de pacte international sur l'environnement
(1997) élaboré par l'UICN1 (union internationale pour
la conservation de la nature), définit l'environnement en son article
1er comme étant
« l'ensemble de la nature et des ressources naturelles, y
compris le patrimoine culturel et l'infrastructure humaine indispensable pour
les activités socioéconomiques et pour le meilleur cadre de vie
». Cette définition prend en compte deux éléments
constitutifs traditionnels de l'environnement à savoir d'une part la
nature, composée des espèces animales et végétales
et d'autre part les ressources naturelles, composées des eaux, de l'air,
des sols de même que le patrimoine culturel et les ressources
humaines.
L'environnement est donc une affaire commune qui a un
caractère transversal touchant tous les domaines de l'activité
des hommes et affectant tous les continents. Cette universalité est
illustrée dès 1987 dans le rapport de la commission mondiale sur
l'environnement et le développement intitulé <notre avenir
à tous>. Ce rapport élaboré dans le cadre de la
préparation de la conférence de RIO de 19922 a
identifié les grands défis en matière environnementale et
proposé des solutions. A partir des propositions faites dans le
rapport3, la conférence de RIO a adopté en 1992 deux
catégories d'instruments pour assurer une protection efficiente de
l'environnement.
La première catégorie d'instruments dite
conventionnelle est composée de deux textes qui sont : la convention
cadre des nations unies sur les changements climatiques ; la convention des
nations unies sur la diversité biologique. Par la suite cette
catégorie a été renforcée par la convention des
nations unies sur la lutte contre la désertification dans les pays
gravement touchés par la sécheresse et la désertification
en particulier en Afrique du 17 juin 1994.
La deuxième catégorie rassemble les instruments non
conventionnels tels que le plan d'action de la commission des nations unies sur
l'environnement et le
1 Uicn : maintenant union mondiale pour la nature
2 Deuxième conférence mondiale sur l'environnement
après celle de Stockholm de 1972
3 Rapport de la commission mondiale sur l'environnement et le
développement
4
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
développement (CNUED) ou Action 21 ou encore Agenda 21, on
a la déclaration sur les forests et la déclaration de la CNUED.
Ce dernier instrument contient un ensemble de vingt sept (27) principes dont la
mise en oeuvre est plus que nécessaire pour assurer une protection
globale et efficace de l'environnement. Ces principes du droit international de
l'environnement apparaissent comme une bougie devant servir à construire
un cadre juridique pour assurer une société écologiquement
viable.
Pour ce faire et pour remédier aux limites des pratiques
anciennes en matière d'environnement basées sur la
réparation des dommages, un principe novateur a été
consacré par la déclaration de la CNUED de RIO 1992, il s'agit du
principe de précaution4. Constituant le principe 15 de la
déclaration de la CNUED de 1992, le principe de précaution y est
rédigé en ces termes : « pour protéger
l'environnement, des mesures de précaution doivent être largement
appliquées par les Etats selon leurs capacités. En cas de risque
de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique
absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard
l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la
dégradation de
l'environnement ». Il apparait donc de cette
disposition que la précaution vise à limiter les risques encore
hypothétiques, ou potentiels. Le principe de précaution prend en
compte le long terme en préconisant l'utilisation de mesures
démocratiques pour mieux contrôler la techno-science. Il convient
donc d'associer au principe de précaution le dicton selon lequel
«dans le doute, mets tout en oeuvre pour agir au mieux ».
L'exercice de la précaution se traduit par le respect d'un jeu de
procédures5 fiables et transparentes.
Par son objet, le principe de précaution marque une
différence fondamentale avec le principe de prévention. En effet,
la prévention, bien qu'étant un aspect de la prudence, se limite
à la gestion à priori des risques connus ou avérés
tandis la précaution, elle, s'intéresse à la gestion
à priori des risques mal connus, potentiels ou hypothétiques.
Cette faculté d'anticipation du principe de précaution lui a
prévalu d'être considéré comme l'une des innovations
majeures de la dernière décennie du 20e siècle,
un principe juridique particulièrement utile par rapport à la
protection de l'environnement et de la santé humaine, une réponse
aux défaillances de la prévention.
4 Principe 15 de la déclaration de la cnued Rio
92
5 Philippe kourilsky « principe de précaution »
rapport au premier ministre, 15 octobre 1999, p 5.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Cependant, pour les détracteurs de ce principe, il serait
un frein à l'innovation, au progrès de la science et au
développement en général. Il ne définit pas de
règles spécifiques mais plutôt un cadre d'action, ce qui
peut être source d'incertitude ou d'insécurité juridique
pour les différents acteurs.
Au regard de tout ce qui précède, le principe de
précaution se présente de nos jours comme une
nécessité dans un monde en quête croissante et incessante
de progrès et de développement. Des Etats les plus
industrialisés aux Etats les moins avancés, l'application de ce
principe est plus que nécessaire pour la préservation de
l'environnement et celle de la santé humaine.
Si dans les pays développés le principe de
précaution parait plus aisé à mettre en cuvre, dans les
pays pauvres la situation est tout autre. Dans ces pays, tout est prioritaire
à telle enseigne que les avis et les interprétations divergent
sur l'objet du principe de précaution et la nécessité de
sa mise en cuvre. Cette situation nous conduit à un certain nombre de
questionnements liés d'une part à l'avènement du principe
de précaution dans le champ du droit international de l'environnement et
dans les droits nationaux et d'autre part à l'état de la mise en
cuvre de ce principe au plan national notamment dans les pays pauvres.
La présente étude prend comme champ d'étude
le BURKINA FASO, un pays pauvre de 274 200 km2 avec une population
de 14 017 262 habitants6. Comment le principe de précaution
est -il entré dans le droit burkinabè ? Quelle est sa
portée, ses niveaux d'application et son impact dans le droit
burkinabè ? Quelle pourrait être l'importance du principe de
précaution dans la dynamique du développement endogène du
BURKINA FASO ?
Cela revient donc à examiner la mise en cuvre du principe
de précaution au BURKINA FASO en faisant le parallèle entre le
principe de précaution et le développement mais aussi en
étudiant l'application du principe dans les biotechnologies modernes au
BURKINA FASO (titre II). Mais au paravent il convient d'examiner
l'avènement et la consécration du principe de précaution
en droit international puis sa réception et sa consécration en
droit national burkinabè (titre I).
6 INSD, recensement général de la population
humaine RGPH 2006
6
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
TiTrE I : consécraTion ET récEpTion DE
principE DE précauTion
Le principe de précaution est un principe aussi bien
novateur que fondamental dans le droit moderne de l'environnement. Son champ
d'application est de nos jours très vaste allant des risques
technologiques7 aux risques naturels comme la gestion des
catastrophes naturels8 (surveillance d'un volcan inactif etc.). Ce
champ d'application va au delà des trois secteurs habituellement
distingués (santé, alimentation et environnement) pour couvrir
d'autres domaines comme celui des libertés publiques. La notion de
principe de précaution rassemble plusieurs situations. L'objectif
principal du principe de précaution est de diminuer les risques en
incitant à la recherche scientifique pour dissiper l'incertitude et,
éviter les dommages graves et irréversibles.
De par son contenu et ses objectifs, le principe de
précaution s'impose à nous. Sa place est plus qu'évidente
tant sur le plan international que sur le plan national. Le concept de
précaution, apparu tout d'abord dans certaines législations
nationales9, a finit par être consacré
dans le droit international par plusieurs procédés (chapitre I).
Cette consécration internationale a poussé un pays comme le
BURKINA FASO à intégrer le principe dans sa législation
nationale (chapitre II).
7 Ce principe a été invoqué lors de la
catastrophe écologique survenue dans le golfe d u Mexique en avril 2010.
Un disfonctionnement de la plateforme pétrolière avait
entrainé une gigantesque marée noire aux Etats unis notamment
dans l'Etat de la Louisiane.
8 Plusieurs personnes et organisation de la société
civile ont vu dans l'ampleur des inondations du 1er septembre 2009 survenues
à Ouagadougou, capitale du BURKINA FASO, une non ou mauvaise application
du principe de précaution notamment dans les zones inondables de la
ville.
9 Philippe Sands, principles of international environnemental Law
208 (1996)
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Chapitre I : l'avènement du principe de
précaution en droit international
Le principe de précaution a vu le jour dans la
société technicienne, dans le cadre des rapports entre droit et
science pour assurer une meilleure gestion des risques. Cet avènement
s'est révélé par la suite par une consécration
formelle au plan international (section I) et aussi par une consécration
régionale de plus en plus dynamique (section II).
Section I: La consécration formelle du principe
de précaution au plan international
L'acceptation internationale du principe de précaution est
l'uvre de deux idées fortes : d'une part, il y a que nous ne pouvons pas
toujours nous fier aux certitudes scientifiques pour prendre des mesures
coercitives, d'autre part, les conséquences résultant de ne la
non prise de mesures préventives en temps utile peuvent être
irréversibles. Ces deux idées maîtresses ont
contribué à la consécration du principe de
précaution dans un droit dit « mou » (paragraphe II) et
à son inscription dans des conventions internationales (paragraphe
I).
Paragraphe I : Les sources conventionnelles
Le principe de précaution s'est développé
principalement dans le contexte des politiques environnementales même si
son champ d'application est de nos jours très vaste. Le droit
international fit d'abord référence à des mesures de
précaution dans la convention de Vienne du 22 mars 1985 pour la
protection de la couche d'ozone et le protocole de Montréal de septembre
1987, qui mettent en place un régime original10. Mais la
consécration formelle de ce principe au plan international dans le droit
conventionnel a débuté dans le cadre des conventions des nations
unies de RIO de 1992.
10 « ... le régime spécial institué par
l'ensemble constitué sur la base de la convention de 1985
privilégie d'une façon générale la
coopération préventive sur la responsabilité
curative.», Pierre-Marie DUPUY, « À propos des
mésaventures de la responsabilité internationale des États
dans ses rapports avec la protection de l'environnement»,
Mélanges KISS, op. Cit. p.279
8
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
La convention des nations unies sur la diversité
biologique de 1992 prévoit le principe de précaution dès
son préambule en ces termes : « (...) Notant également
que lorsqu'il existe une menace de réduction sensible ou de perte de la
diversité biologique, l'absence de certitudes scientifiques totales ne
doit pas être invoquée comme raison pour différer les
mesures qui permettraient d'en éviter le danger ou d'en atténuer
les effets (...) »
Cette disposition montre bien la place que les parties
à la convention sur la diversité biologique entendent faire
occuper au principe de précaution dans la préservation et la
conservation de la biodiversité dans le monde.
Quant à la convention-cadre des nations unies sur les
changements climatiques de 1992, son article 3 dispose qu'il incombe aux
parties de « prendre des mesures de précaution pour
prévoir, prévenir ou atténuer les causes des changements
climatiques et en limiter les effets néfastes. Quand il y a risque de
perturbations graves ou irréversibles, l'absence de certitude
scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour différer
l'adoption de telles mesures, étant entendu que les politiques et
mesures qu'appellent les changements climatiques requièrent un bon
rapport coût-efficacité, de manière à garantir des
avantages globaux au coût le plus bas possible. Pour atteindre ce but, il
convient que ces politiques et mesures tiennent compte de la diversité
des contextes socio-économiques, soient globales, sétendent
à toutes les sources et à tous les puits et réservoirs de
gaz à effet de
serre qu'il conviendra, comprennent des mesures d'adaptation
et s'appliquent à tous les secteurs économiques. Les initiatives
visant à faire face aux changements climatiques pourront faire l'objet
d'une action concertée des Parties intéressées
».
Les changements climatiques représentent un enjeu majeur
pour la stabilité et la sécurité du monde car les
conséquences liées à ces manifestations sont de plus en
plus dramatiques. Le principe de précaution doit donc s'appliquer dans
toute sa rigueur.
A la suite de ces deux textes, d'autres instruments
internationaux majeurs consacrent le principe de précaution. On a tout
d'abord la convention de Paris pour la protection du milieu marin pour
l'Atlantique du nord-est de septembre 1992. Dans
cette convention le principe de précaution est ainsi
qualifié « principe selon lequel les mesures de
prévention doivent ttre prises lorsqu'il y a des motifs raisonnables de
s'inquiéter du fait des substances ou de l'énergie introduites
directement ou
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
indirectement dans le milieu, qu'elles puissent
entraîner des risques pour la santé de l'homme, nuire aux
ressources biologiques ou aux écosystèmes, porter atteinte aux
valeurs d'agrément ou entraver d'autres utilisations du milieu,
méme s'il n'y a pas de preuves concluantes d'un rapport de
causalité entre les apports et les effets ».
Par la suite on a aperçu une consécration
intéressante du principe de
précaution dans le protocole sur
la biodiversité, adopté à Montréal le 28 janvier
2000.
La conférence des parties à la convention a
expressément reconnu dans son article
10 paragraphe 6 le recours au principe de précaution. Il
est, en effet, indiqué : « L'absence de certitude scientifique
due à l'insuffisance d'information et de connaissance scientifique
pertinente en ce qui concerne les effets négatifs potentiels d'un
organisme vivant modifié sur la conservation et l'utilisation durable de
la diversité biologique dans la Partie importatrice, prenant
également en compte les risques pour la santé humaine,
n'empéche pas cette Partie de prendre une décision, si
approprié , concernant l'importation de l'organisme vivant
modifié en question, dans le but d'éviter ou de réduire de
tels effets potentiellement négatifs »
En sus, une autre convention originale consacre explicitement et
implicitement le principe de précaution. Il s'agit de la convention sur
les polluants organiques persistants (POP), convention adoptée par une
conférence des plénipotentiaires tenue du 22 au 23 mai 2001
à Stockholm en Suède. La Convention toute entière
s'inspire donc de l'esprit de précaution puisqu'elle encourage les
Parties à prendre diverses mesures pour empêcher le rejet et la
diffusion des polluants organiques persistants et en prévenir les effets
néfastes à la santé humaine et à l'environnement.
Aussi bien le préambule que les articles, premier, huit
(8) et l'annexe C (partie V) de cette convention, mentionnent
explicitement le principe de précaution.11
En dehors des textes cités plus haut, d'autres textes
consacrent le principe de précaution. Ce sont entre autres, le protocole
de Barcelone (1995) sur les zones spécialement protégés en
méditerranée ; le protocole de New York de 1995 sur la
conservation et la gestion des stocks de poissons chevauchant plusieurs
catégories de zones maritimes et les grands migrateurs.
11 Cf. Travaux d'une table ronde organisée par le
Réseau Environnement de Genève ; la précaution de Rio
à Johannesburg p 15,16.
10
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Ces différents textes sectoriels ou globaux permettent une
application un peu plus contraignante et généralisée d'un
principe qui occupe une grande place dans les textes de droit souple ou «
mou ».
Paragraphe II : Les sources souples
La doctrine considère que le principe de précaution
est apparu tout d'abord en droit allemand dans les années 1970, sous le
nom de Vorsorgeprinzip12. Cette disposition a
été très souvent interprétée comme un
principe de bon sens13, une notion civiliste d'un bon père de
famille. Cependant, au niveau international, la première reconnaissance
du principe de précaution s'est faite dans la charte mondiale de la
nature adoptée par l'assemblée générale des nations
unies le 28 octobre 1982. L'article 11, b de cette charte dispose «(...)
lorsque les effets nuisibles éventuels de ces activités ne
sont qu'imparfaitement connus, ces dernières ne devraient pas être
entreprises » ; la charte bien que n'ayant une valeur
déclaratoire, ne constituait pas moins un texte précurseur en la
matière.
A la suite de la charte mondiale de la nature, d'autres textes de
« soft law » peuvent être cités avant la
consécration plus globale de RIO 1992. Il s'agit d'une part, de la
déclaration interministérielle de la seconde conférence
sur la protection de la mer du nord de Londres 198714 ; la
déclaration ministérielle adoptée le 07 novembre 1990 par
la seconde conférence mondiale sur le climat15 ; de la
déclaration ministérielle sur le développement durable de
Bergen en mai 1990 et d'autre part, des recommandations du conseil de
l'Organisation de Coopération et Développement Economique
(O.C.D.E ) de janvier 1991 sur la prévention et le contrôle
intégré de la pollution.
12 2 Cf. : Sonja BOEHMER-CHRISTIANSEN, « The Precautionary
Principle in Germany - Enabling Government », in T. O'RIORDAN
& J. CAMERON (dir.), Interpreting the Precautionary Principle,
Earths can, 1994, pp.33-35 ; F.
EWALD e.a. Le principe de précaution, PUF, 2001,
pp.6-7
13 1 « The Precautionary principle is a statement of
commonsense », Land and Environment Court of New South
Wales, Leach v. National Park and Wild life Service
(1993) 81 LGERA 270 (Stein, J.), cité par James
14 La déclaration affirme : « les gouvernements
signataires doivent appliquer le principe de précaution,
c'est-à-dire prendre des mesures pour éviter les impacts
potentiellement dommageables des substances, même lorsqu'il n'existe pas
de preuves scientifiques de l'existence d'un lien de causalité entre les
émissions et leurs effets ».
15 137 Etats ont signé cette déclaration qui
affirme : « on ne peut attendre les certitudes des scientifiques pour
prendre dès maintenant des mesures de réduction de gaz à
effet de serre »
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Mais la consécration la plus originale du principe de
précaution est l'oeuvre de la déclaration de RIO. En effet, lors
de la conférence des nations unies sur l'environnement et le
développement (CNUED) de 1992, le principe de précaution a
été explicitement reconnu. Il figure en bonne place dans la
déclaration issue de cette conférence. L'article 15 de la
déclaration dispose que « pour protéger l'environnement,
des mesures de précaution doivent ~tre largement appliquées par
les Etats selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou
irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas
servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de
mesures effectives visant à prévenir la dégradation de
l'environnement ».
Le principe de précaution intègre des enjeux
économiques et financiers. Il existe des liens de plus en plus
étroits entre le commerce international et l'environnement16.
Pour ce faire, des références au principe de précaution
existent dans les accords de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Il
s'agit notamment des accords sur les obstacles techniques au commerce (TBT) et
des dispositions du Codex Alimentarius17.
On retrouve également des pratiques de précaution
dans l'Accord sur l'application de mesures sanitaires et phytosanitaires
(accord SPS) qui autorise clairement l'utilisation du principe de
précaution, même si ce terme n'est pas explicitement
utilisé. Bien que la règle générale soit de fonder
toute mesure sanitaire ou phytosanitaire sur des principes scientifiques et de
ne pas les maintenir sans preuves scientifiques suffisantes, une
dérogation à ces principes est prévue à l'article
5(7) qui stipule que: "Dans les cas oil les preuves scientifiques
pertinentes seront insuffisantes, un Membre pourra provisoirement adopter des
mesures sanitaires ou phytosanitaires sur la base des renseignements pertinents
disponibles, y compris
16 Cf. préambule de l'accord de l'OMC : « Les Parties
au présent accord, ... reconnaissant que leurs rapports dans le domaine
commercial et économique devraient être orientés vers le
relèvement des niveaux de vie, la réalisation du plein emploi, et
d'un niveau élevé toujours croissant du revenu réel et de
la demande effective, et l'accroissement de la production et du commerce de
marchandises et de services, tout en permettant l'utilisation optimale des
ressources mondiales conformément à l'objectif de
développement durable, en vue à la fois de protéger et de
préserver l'environnement et de renforcer les moyens d'y parvenir d'une
manière qui soit compatible avec leurs besoins et soucis respectifs
à différents niveaux de développement
économiques,... »
17 Créé en 1962 sous la double
égide de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et
l'agriculture (F.A.O.) et de l'Organisation mondiale de la santé
(O.M.S.), les normes élaborées en son sein sont adoptées
comme références scientifiques par l'O.M.C., Cf. : R. ROMI,
« Codex alimentarius : de l'ambivalence à
l'ambiguïté », RJE, XXV, 2001, pp.203-207
12
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Section II : Les consécrations régionales
du principe
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
ceux qui émanent des organisations internationales
compétentes ainsi que ceux qui découlent des mesures sanitaires
ou phytosanitaires appliquées par d'autres Membres. Dans de telles
circonstances, les Membres s'efforceront d'obtenir les renseignements
additionnels nécessaires pour procéder à une
évaluation plus objective du risque et examineront en conséquence
la mesure sanitaire ou phytosanitaire dans un délai raisonnable".
Par conséquent, selon l'accord SPS, les mesures adoptées en
application du principe de précaution en cas d'insuffisance des
données scientifiques sont provisoires et impliquent que des efforts
aient lieu pour obtenir ou générer les données
scientifiques nécessaires18.
Aussi, une jurisprudence abondante fait une utilisation
multiforme du principe de précaution. On a les arrêts de la Cour
Internationale de Justice (CIJ)19, les décisions du tribunal
international du droit de la mer et celles de l'organe d'appel de
l'OMC20
Loin d'être exhaustives, les dispositions
conventionnelles et de « soft law », citées plus haut
ont contribué grandement à la consécration et à la
vulgarisation du principe de précaution dans les différentes
régions du monde.
Le principe de précaution a plusieurs facettes, il impose
des obligations de moyens et de résultats aux Etats. L'accomplissement
satisfaisant de mesures de précaution requiert donc la conjugaison des
efforts notamment sur le plan sous régional. Pour ce faire il apparait
nécessaire par une analyse des mesures juridiques et jurisprudentielles
de faire l'économie de l'état de consécration du principe
de précaution en Europe (A) puis en Afrique (B).
18 Cf. communication de la commission des communautés
européennes sur le principe de précaution, Bruxelles, 2.2.2000
COM (2000) 1 final.
19 Requête de la Nouvelle-Zélande, para.105; voir
aussi CIJ CR/95/20, pp. 20 -1, 36 -8). CIJ CR/95/20, pp. 71-2. 75. Rapports de
la CIJ, 1995. Voir aussi: Dissenting in Opinion dans Threat or Use
of Nuclear Weapons, 1996 rapports de la CIJ.
20 Cf. affaire sur les hormones dans la viande et les produits
carnés
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Paragraphe I : En Europe
La place du principe de précaution dans la
communauté européenne est très bien dépeinte dans
la communication de la commission des communautés européennes sur
le recours au principe de précaution de l'an 2000.
La communauté a constamment poursuivi l'objectif d'une
protection élevée, notamment en matière d'environnement et
de santé humaine, animale ou végétale. De ce fait, le
principe de précaution a été politiquement accepté
comme stratégie de gestion des risques dans plusieurs domaines. Cet
état des faits se reflète à travers les textes
législatifs et la jurisprudence de la communauté.
Pour ce qui est des sources textuelles, il faut noter que le
principe de précaution a pénétré timidement le
droit communautaire par des décisions et directives du conseil des
communautés européennes.21 Cette consécration
concerne aussi bien les domaines de l'environnement que celui de la
santé, de la sécurité et du développement
durable.
C'est dans cette optique que l'article 6 du traité de la
communauté européenne (CE) prévoit que « les
exigences de la protection de l'environnement doivent être
intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des
politiques et actions de la Communauté visées à l'article
3, et en particulier afin de promouvoir le développement durable »
; l'article 95, paragraphe 3, du même traité prévoit
que « La Commission, dans ses propositions prévues au
paragraphe 1er en matière de santé, de sécurité, de
protection de l'environnement et de protection des consommateurs, prend pour
base un niveau de protection élevé en tenant compte notamment de
toute nouvelle évolution basée sur des faits scientifiques. Dans
le cadre de leurs compétences respectives, le Parlement européen
et le Conseil s'efforcent également d'atteindre cet objectif » ;
tandis que l'article 152 du traité CE prévoit dans son
premier paragraphe : « Un niveau élevé de protection de
la santé
humaine est assurée dans la définition et la
mise en oeuvre de toutes les politiques et actions de la Communauté
».
21 Décision CCE 80/372 relative aux chlorofluorocarbones ;
directive s,83/129 du 28 mars 1983 relative à l'importation de peaux de
phoques, 90/220 du 23avril 1990 sur la dispersion volontaire dans
l'environnement d'organismes génétiquement modifiés
(O.G.M), ...
14
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Des dispositions relatives au principe de précaution se
retrouvent également dans le traité d'Amsterdam. Reprenant
l'article 174 du traité de Maastricht de 1992, le traité indique
que : « La politique de la Communauté dans le domaine de
l'environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant
compte de la diversité des situations dans les différentes
régions de la Communauté. Elle est fondée, sur le principe
de précaution et d'action préventive, sur le principe de la
correction, par priorité à la source, des atteintes à
l'environnement et sur le principe du pollueur- payeurl »
Il convient également de signaler que sur la base de la
communication de la commission de février 2000, deux résolutions
ont été adoptées, l'une par le conseil au sommet de Nice
du 7 décembre 2000 et l'autre par le parlement européen le 14
décembre de la même année.
Toutes ces dispositions laissent cependant la
responsabilité aux décideurs et aux instances juridictionnelles
de définir les contours de ce principe. Mais il ne faut pas voir en cela
une insécurité juridique car le recours au principe de
précaution dans les instances communautaires et de contrôle
juridictionnel se fait de plus en plus présent. En effet, la cour de
justice des communautés européennes ainsi que le tribunal de
première instance ont fait une large utilisation du principe lui
conférant ainsi une juridicité en matière de
sécurité alimentaire, de protection des ressources halieutiques,
de protection de la couche d'ozone et de stockage des déchets
22. Le principe, s'imposant donc aux institutions communautaires a
été mis en oeuvre dans les Etats membres. C'est le cas dans le
Royaume-Uni23, en Allemagne et en France24.
Si en Europe le principe semble bien reçu par le droit
communautaire, la jurisprudence et les droits nationaux, la situation est
mitigée pour ce qui est de l'Afrique.
22 CJCE, 5 octobre 1999, Procédures
pénales contre Paolo Lirussi et Franco Bizzaro - Q.P. Pretore di
Udine, CJCE, 24 novembre 1993, Armand Mondiet c. Armement Islais,
aff. C-405/92, Rec., p.I-6176
23 Le principe de précaution est un principe directeur des
politiques relatives à l'environnement et définit dans le livre
blanc de 1990
24
Loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la
protection de l'environnement ou loi Barnier ; code de l'environnement et code
rural ; loi du 30 décembre 1996 relative à l'air et à
l'utilisation rationnelle de l'énergie ; loi du 1er juillet
1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la
sécurité sanitaire des produits destinés à
l'homme.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Paragraphe II : En Afrique
La première consécration du principe de
précaution dans le droit africain est l'oeuvre de la convention sur la
conservation de la nature et des ressources naturelles d'Alger du 15 septembre
1968. Mais cette consécration était implicite. C'est en ce sens
que la révision de la convention d'Alger à Maputo le 11 juillet
2003 révèle tout son intérêt pour ce qui concerne la
place du principe de précaution. Cette convention révisée
prend explicitement en compte le principe de précaution.
Son article IV traitant des obligations fondamentales, dispose :
« les Parties prennent et mettent en oeuvre toutes les mesures
nécessaires pour réaliser les objectifs de la présente
Convention, notamment par des mesures de prévention et l'application du
principe de précaution, et en tenant compte des valeurs éthiques
et traditionnelles ainsi que des connaissances scientifiques dans
l'intérêt des générations présentes et
futures ».Cette consécration formelle renforce la
portée du principe en Afrique.
A la suite de la convention d'Alger il est important de noter
qu'il ressort d'une disposition de la charte africaine des droits de l'homme et
des peuples de 1981 une prise en compte implicite du principe de
précaution. En effet l'article 24 de la charte dispose que «
Tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global,
propice à leur développement ». Cette disposition,
consacrant un droit fondamental à l'environnement intègre la
nécessité de promouvoir et de protéger l'environnement
dans une dynamique de durabilité, le principe trouve donc ici
matière à application.
Des éléments essentiels du principe de
précaution se retrouvent également dans la convention de Bamako
de Janvier 1991 sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets
dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la
gestion des déchets produits en Afrique25. Cette convention
intègre une prise en compte renforcée de la prévention
dans des domaines sensibles où il est nécessaire de mettre
l'accent sur les mesures de prévention et de précaution que
celles de réparation. Elle stipule que « Chaque Partie
s'efforce d'adopter et de mettre en °oeuvre, pour faire face au
problème de la pollution, des mesures de précaution qui
comportent, entre autres, l'interdiction d'évacuer dans l'environnement
des substances qui pourraient présenter des risques pour la santé
de l'homme et pour
l'environnement, sans attendre d'a
».
25 Cf. art 4 al3 (f) de la convention
16
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Cependant, la consécration la plus récente et la
plus globale (sur le plan géographique), est celle initiée dans
le cadre de la loi type de l'Union Africaine (UA) sur la sécurité
en biotechnologie de 2001. La Loi type reconnaît le principe de
précaution comme étant un moyen de réglementer toutes les
opérations d'importation, d'utilisation en milieu confiné, de
libération ou de mise sur le marché des organismes
génétiquement modifiés ou des produits des organismes
génétiquement modifiés. La Loi type est un modèle
que l'UA a recommandé aux États membres a travers le vote de lois
nationales. Il s'agit là d'une tentative pour faciliter l'harmonisation
de la législation existante dans le secteur de la
biosécurité et assurer l'adoption de la législation
unifiée en Afrique. La Loi n'est donc pas obligatoire pour les pays, ils
sont simplement encouragés à prendre toutes dispositions
nécessaires à l'atteinte de cet objectif. Et c'est là,
toute la faiblesse de cette loi qui tombe dans la catégorie du droit
« mou ».
Au plan régional ouest africain, deux organisations
d'intégration régionale prennent en compte dans leurs
traités constitutifs des préoccupations environnementales.
S'agissant de la Communauté Economique Des Etats de l'Afrique de
l'Ouest(CEDEAO), son traité constitutif consacre de nombreuses
dispositions à la protection de l'environnement et des ressources
naturelles. Il impose aux Etats membres, l'obligation de «
protéger, préserver et améliorer l'environnement
naturel de la région et coopérer en cas de désastre
naturel » (art.29, 1) et interdit le transfert des déchets
étrangers dans la région ouest africaine. Mais comme cela semble
transparaitre, aucune disposition ne fait expressément cas du principe
de précaution comme un principe fondamental applicable de façon
autonome.
Quant au traité de l'Union Economique et Monétaire
Ouest Africain (UEMOA), il est plutôt sommaire sur les questions de
l'environnement. Il évoque l'environnement comme l'un des domaines dans
lesquels l'Union peut instituer une coordination des politiques sectorielles
par la mise en ~uvre d'actions communes et éventuellement de politiques
communes. Il faut se reporter au protocole additionnel n°2 consacré
aux politiques sectorielles de l'Union pour voir plus d'éléments
de prise
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
en compte des préoccupations
environnementales26. C'est précisément ces actions et
politiques27 qui intègrent le principe de
précaution.
L'étude du processus de consécration du principe de
précaution au plan international et régional démontre
l'importance de ce principe dans la protection et la conservation, de
l'environnement, mais aussi de la santé humaine. Ce principe s'impose
désormais aux Etats développés mais également
à ceux qui aspirent au développement. Le Burkina Faso, pays
sous-développé n'est pas en marge des nouvelles
nécessités mondiales en matière d'environnement et de
santé publique. Pour ce faire, il ne serait pas inintéressant de
voir comment le principe de précaution a fait son entrée dans le
droit burkinabè (chapitre II).
Chapitre II : l'avènement du principe de
précaution au BURKINA FASO
Le principe de précaution dans sa conception moderne est
tout à fait nouveau au Burkina Faso. Pays pauvre de l'Afrique au sud du
Sahara, le Burkina Faso a depuis longtemps privilégié la
prévention à la précaution. Tout étant prioritaire,
le pays est resté longtemps dans une logique de réactions
plutôt que de prévoyance. De nos jours la situation a beaucoup
évolué, plusieurs progrès sont enregistrés
notamment dans les domaines juridiques et institutionnels. Le principe de
précaution est entré dans le droit burkinabè et ce, par le
jeu des rapports entre le droit international et le droit national. De nombreux
instruments juridiques nationaux et internationaux prennent en compte le
principe précaution (section I) de même que plusieurs institutions
intègrent le principe dans leur fonctionnement. Aussi la
consécration du principe s'est poursuivie dans des domaines sectoriels
par des politiques, plans et programmes (section II). Cependant des efforts
doivent encore être fournis pour assurer au principe une meilleure
juridicité, une plus grande vulgarisation et surtout une meilleure prise
en compte par tous les acteurs (classiques ou nouveaux) intervenant dans la
protection de l'environnement.
26 Protocole additionnel n°2 relatif aux politiques
sectorielles de l'UEMOA
27 Exemples : politique minière commune du 29/06/2000 ;
politique agricole de l'union et politique énergétique commune du
19/12/2001
18
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Section I : La consécration juridique du principe
de précaution
Les questions environnementales sont relativement nouvelles dans
l'ordonnance juridique du Burkina Faso. La consécration d`un droit de
l'environnement demeure assez récente et, avec elle, le principe de
précaution. L'avènement du principe de précaution en droit
interne s'est réalisé d'une part par l'entremise des instruments
internationaux ratifiés par le Burkina Faso (paragraphe II) et d'autre
part par des dispositions juridiques nationales (paragraphe I).
Paragraphe I : La consécration par les sources
nationales
Les sources nationales jadis très peu fournies, sont de
nos jours, multiples et très fragmentaires. Mais aucune disposition ne
traite spécifiquement et exclusivement du principe de précaution,
qui se retrouve à chaque fois comme un corollaire ou un annexe à
des dispositions juridiques traitant de problèmes sectoriels. Cette
caractéristique de la place du principe dans le droit Burkinabè
est illustrée aussi bien dans la loi fondamentale du pays (A) que dans
les autres textes législatifs et règlementaires (B).
A) La constitution
Aucune disposition des constitutions antérieures à
celle de 1991 ne font allusion de façon expresse à
l'environnement. C'est donc la constitution du 11 juin 1991 qui consacre le
doit à l'environnement. En effet, l'année1991,
considérée comme la phase décisive de la
préparation de la CNUED a coïncidé avec la phase
charnière du processus de rétablissement de la
légalité constitutionnelle et de l'Etat de droit au Burkina Faso,
avec l'adoption d'une nouvelle constitution28. Nombre d'observateurs
avisés sont convaincus que la consécration d'un droit à
l'environnement, et l'institution d'une obligation générale de
préservation de l'environnement dans cette constitution, et ce pour la
première fois au Burkina Faso,
28 La légalité constitutionnelle, rompue depuis
1980 était rétablie grace à l'adoption par
référendum de la Constitution de la 4ème république
le 2 juin 1991, constitution promulguée le 11 juin de la même
année.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
sont le résultat d'une profonde influence des travaux
préparatoires de Rio'92 sur ceux de la commission constitutionnelle
burkinabé d'alors.
Cependant la constitution de 1991 quoique consacrant le droit
à l'environnement ne fait pas expressément
référence au principe de précaution. Néanmoins, ce
principe se dégage de façon implicite à travers certaines
dispositions de la constitution. La constitution affirme dès son
préambule, la nécessité absolue de protéger
l'environnement. La protection efficace de l'environnement ne peut cependant se
faire que par une anticipation basée sur des données
scientifiques fiables. Le principe de précaution, par son objet et son
but29 se présente comme un moyen pour le peuple
Burkinabè d'atteindre ou du moins se rapprocher de son objectif.
Deux autres dispositions de la constitution permettent
d'entrevoir le principe de précaution. On a l'article 14 : «
(~) les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont
utilisées pour l'amélioration de ses conditions de vie
» et l'article 29 : « Le droit à un environnement
sain est reconnu; la protection, la défense et la promotion de
l'environnement sont un devoir pour tous ».La constitution consacre
l'environnement comme un droit fondamental de l'homme tout en indiquant les
devoirs qui pèsent sur tous les acteurs dans le cadre de
la préservation de l'environnement. Elle prend donc en compte l'aspect
démocratique et participatif du principe de précaution. La
consécration constitutionnelle de la protection de l'environnement
emporte une double conséquence juridique. D'abord, la protection de
l'environnement est hissée au rang de principe de valeur
constitutionnelle. Ensuite, elle implique le contrôle de
l'environnementalité des lois c'est-à-dire le contrôle, par
le conseil constitutionnel, de la conformité des lois à
l'exigence constitutionnelle de la protection de l'environnement30.
Mais cette constitution reste limitée dans la mesure où elle
permet des interprétations diverses sur la constitutionnalité du
principe de précaution. Il apparait donc nécessaire de se mettre
à l'abri en constitutionnalisant ce principe, en suivant l'exemple de la
France en 2005.
29
Evaluation scientifique des risques potentiels non
avérés, renforcement de la recherche en cas d'incertitude.
30 PRIEUR(M). Droit de l'environnement, p. 66
20
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
B) Les mesures législatives et
règlementaires
Les mesures législatives et règlementaires sont
multiples et concernent différents domaines allant de la protection de
l'environnement à celle de la santé publique. Mais de cette
diversité existe un facteur commun en ce qui concerne le principe de
précaution. Ce principe est très souvent consacré de
façon implicite quand il n'est pas tout simplement oublié. Une
présentation non exhaustive des lois et décrets pris dans le
cadre de l'environnement et de la santé publique permettra une meilleure
compréhension.
En dehors de la constitution, nous pouvons citer les lois
suivantes :
- la loi n°005/97/ADP du 30 janvier 1997, portant Code de
l'Environnement au Burkina Faso
Faso et son décret n°2001-342/PRES/PM/MEE du 17
juillet 2001 ;
- la Loi n°006/97/ADP du 31 janvier 1997, portant code
forestier au Burkina Faso - la loi N° 034-2002/AN du 14 novembre 2002,
portant loi d'orientation relative au pastoralisme au Burkina Faso
- la Loi n° 002-2001/AN du 8 février 2001, portant
Loi d'orientation relative à la gestion de l'eau.
- Loi n° 023/97/II/ AN du 4 décembre 1997, portant
code minier au Burkina Faso
- La loi sur le contrôle des pesticides, Loi n°
41/96/ADP du 08/11/1996 modifiée par la Loi n° 006/98/AN du
26/03/1998 ;
- Loi n° 23/94/ADP du 19/05/1994, portant code de
santé publique;
- loi n°055/ AN du 21 Décembre 2004, portant code
général des collectivités territoriales au Burkina
Faso.
- La loi n° 010-2006/AN du 31 mars 2006, portant
réglementation des semences végétales au Burkina Faso ;
- loi n° 034/2002/AN du 14 novembre 2002 relative au
pastoralisme au Burkina Faso ;
- loi n° 022/2005/AN du 24 mai 2005 portant Code de
l'hygiène publique au Burkina Faso ;
- loi 2005-010/AN portant sécurité nucléaire
et protection contre les rayonnements ionisants ;
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
- loi n° 005/2006/AN du 17 mars 2006 portant régime
de sécurité en matière de biotechnologie au Burina
Faso.
A ces lois nous pouvons ajouter les décrets suivants :
-Décret n°
98-321/PRES/PM/MEE/MIHU/MATS/MEF/MEM/MCC/MCIA du 28 juillet 1998 portant
règlementation des aménagements paysagers au Burkina Faso ;
- Décret
n°98-322/PRES/PM/MEE/MCIA/MEM/MS/MATS/METSS/MEF du 28 juillet 1998 portant
conditions d'ouverture et de fonctionnement des établissements
dangereux, insalubres et incommodes ;
- Décret n° 99-377/PRES/PM/MS du 28 octobre 1999
portant création du laboratoire national de santé publique
- Décret n°2003-478/PRES/PM/MS du 22 septembre 2003
modifiant le décret n° 99- 377/PRES/PM/MS du 28 octobre 1999
portant création du laboratoire national de santé publique ;
- Décret n° 97-054/PRES/PM/MEF du 06 février
1997 portant Réorganisation Agraire et Foncière au Burkina
Faso
- Décret n°2001-185/PRES/PM/MEE du 07 mai 2001
portant fixation des normes de rejet de polluants dans l'air, l'eau et le sol
;
- Décret 2001-342/PRES/PM/MEE du17 juillet 2001 portant
champ d'application, contenu et procédures de l'étude d'impact et
de la notice d'impact sur l'environnement
- Décret n° 96-061/PRES/PM/MEE/MATS/MEFP/MCIA/MTT du
11 mars 1996 portant règlementation de l'exploitation de la faune au
Burkina Faso
- Décret n° 2003-220/PRES/PM/MAHRH du 06 mai 2003
portant approbation du Plan d'Action pour la Gestion Intégré des
Ressources en Eau (PAGIRE)
- Décret n° 2003-265/PRES/PM/MAHRH du 27 mai 2003
portant prérogatives du Ministre chargé de l'eau en cas de
circonstances exceptionnelles
- Décret n°2004-262/PRES/PM//MECV/ MAHRH/MS du 18
juin 2004 portant réglementation de la sécurité en
biotechnologie moderne au Burkina Faso.
La consécration législative de la protection de
l'environnement traduit la reconnaissance de la protection de l'environnement
comme un intérêt général31. Cette longue
liste mais non exhaustive fait penser que le principe de précaution
est
31 GARANE (A), VINCENT (Z), Droit de l'environnement
Burkinabè, collection précis de droit burkinabè, septembre
2008
22
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DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
largement consacré au Burkina Faso. Cela n'est pas le cas
car le législateur burkinabè a opté depuis longtemps pour
le principe de prévention beaucoup plus facile à mettre en ~uvre
et plus à la portée des pays pauvres comme le Burkina Faso. Le
principe de précaution n'est pas consacré au Burkina Faso comme
un principe général du droit de l'environnement. Il est cependant
d'application en matière d'Etude d'Impact environnemental (EIE), car le
décret qui organise cette matière indique que l'EIE doit
comporter un contenu minimum dont « une indication des lacunes
relatives aux connaissances ainsi que des incertitudes rencontrées dans
la mise au point de l'information nécessaire »32
Cependant, avec l'entrée du pays dans l'ère des biotechnologies
le principe de précaution s'est imposé au législateur qui
l'a intégré dans la loi relative aux biotechnologies au Burkina
Faso33. Cette loi a été précédée
d'un décret de 2004 sur la règlementation de la
sécurité en matière de biotechnologies34.
Il ya des efforts à fournir pour renforcer la codification
du principe de précaution au plan législatif et
règlementaire, car l'architecture législative actuelle
révèle des insuffisances liées entre autres au
mépris de principe majeurs (principes de précaution,
d'information et de participation). Mais ce déficit de la
législation nationale ne signifie pas qu'il existe un vide juridique en
la matière. L'essentiel de la matière est régit par des
instruments internationaux reçus dans l'ordre juridique interne du
Burkina Faso par le biais de la ratification.
Paragraphe II : Les instruments internationaux
ratifiés par le BURKINA FASO
La constitution du Burkina Faso dispose à son article 151
que « Les traités et accords régulièrement
ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve,
pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie
». La constitution consacre la suprématie des normes du droit
international ratifiées par le pays sur celles du droit interne. Ces
normes du droit international après ratification, intègrent
l'ordonnancement juridique interne à un
32 Décret n°2001.PRES/PM/MEE du 17 juillet 2001
portant champ d'application, contenu et procédure de l'étude
d'impact et de la notice d'impact sur l'environnement (art. 7, §5)
33 Loi de 2006 précité, voir liste plus haut
34 Décret de 2004 précité.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
niveau supérieur aux lois mais toute de même
inférieur à la constitution, on dit qu'elles sont «
supra législatif » mais « infra constitutionnel
».
Le Burkina Faso a ratifié de nombreux instruments
consacrant le principe de précaution. Certains de ces instruments sont
internationaux (A), d'autres régionales (B).
A) Les instruments universels
Les instruments internationaux peuvent être
regroupés en deux catégories : les instruments conventionnels et
les instruments non conventionnels.
Ces instruments constituent un maillon essentiel dans la
construction du droit de l'environnement du Burkina Faso.
Le Burkina Faso a ratifié plusieurs instruments
internationaux de protection de l'environnement, mais en nous rapportant au
champ spécifique des instruments internationaux conventionnels
consacrant le principe de précaution, on remarque qu'une grande place
est faite aux trois conventions issues du cycle de Rio 1992. Ce sont : la
convention cadre des nations unies sur les changements climatiques (New-York, 9
mai 1992 ; la convention des nations unies sur la diversité biologique
(Rio, 5juin 1992) ; la convention internationale sur la lutte contre la
désertification dans les pays gravement touchés par la
sécheresse et ou la désertification en particulier en Afrique
(Paris, 17 juin 1994).
A ces conventions, on peut ajouter des instruments post-Rio comme
: le protocole additionnel à la convention sur les changements
climatiques, protocole de Kyoto de 1997 ; la convention de Stockholm sur les
polluants organiques persistants (POPs) (Aarhus, 24 juin 1998) ; le protocole
de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques
(Montréal, 29 janvier 2000) ; le traité international sur les
ressources phytogénetiques pour l'alimentation et l'agriculture (Rome, 3
novembre 2001), mais aussi des instruments antérieurs au cycle de Rio
comme : la convention pour la protection de la couche d'ozone (Vienne, 22 mars
1985) ; le protocole relatif à des substances qui appauvrissent la
couche d'ozone (Montréal, 16 septembre
1987) et enfin la convention sur les mouvements
transfrontières de déchets dangereux et de leur
élimination (Bâle, 22 mars 1989).
24
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Pour ce qui est des instruments non conventionnels ou «
soft law » en raison de leur souplesse, on en distingue plusieurs
allant des directives et recommandations des organisations
intergouvernementales (OIG)35 , aux programmes d'action tel que, le
programme d'action des nations unies sur l'environnement et le
développement (Agenda 21 ou Action 21) adopté à Rio de
Janeiro en1992, en passant par les déclarations. Ces dernières
sont d'une portée
particulière parce qu'elles consacrent le plus souvent des
principes dont certains sont juridiquement contraignants. C'est l'illustration
de la Déclaration des nations unies sur l'environnement et le
développement de Rio 1992, faisant suite à la déclaration
de Stockholm de 1972 et qui consacre un ensemble de 27 principes
universellement applicables pour aider à orienter l'action
internationale sur la base de la
responsabilité environnementale et économique.
Cette architecture est complétée au plan
régional et sous- régional africain par d'autres instruments.
B) Les instruments régionaux et sous-
régionaux (africains)
Lees instruments juridiques africains prenant en compte le
principe de précaution et ratifiés par le Burkina Faso sont peu
nombreux. Cependant nous en dénombrons quelques uns. On a la convention
d'Alger dont la révision de Maputo du11 juillet 2003 intègre de
façon explicite le principe de précaution36. On note
également la ratification par le Burkina Faso de la convention sur
l'interdiction d'importer des déchets dangereux et le contrôle des
mouvements transfrontières en Afrique (Bamako, 30 janvier
1991)37. Aussi, le Burkina Faso étant membre de l'Union
Africaine, se voit appliquer les dispositions de la loi type de l'Union
Africaine sur la sécurité en biotechnologie (2001).
Au plan sous-régional ouest africain, les dispositions
communautaires des deux organisations (CEDEAO, UEMOA) auxquelles appartient le
Burkina Faso, se
35 OCDE, recommandation C(72) sur les principes
directeurs relatifs aux aspects économiques des politiques de
l'environnement sur le plan international (26 mai 1972), code de conduite
pratiqué sur le mouvement transfrontière de déchets
radioactifs (27 juin 1990).
36 Ordonnance n°68-50/PRES/AGRI-EL du 23 novembre
1968 (JO, 23 janvier 1969, p 58)
37 Loi n°19-93 ADP du 24 mai 1994.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
font rares. Le principe de précaution intervient de
façon incidente notamment dans des politiques
sectorielles38.
Section II : La consécration sectorielle du
principe au BURKINA FASO
Le principe de précaution est un principe fonctionnel, il
emporte des considérations économiques et de
développement. De ce fait, il est intégré dans divers
instruments nationaux et locaux visant la protection de l'environnement et
celle de la santé humaine. Il existe une consécration sectorielle
du principe dans les politiques, plans et programmes de protection et de
conservation de l'environnement (paragraphe I) mais aussi en matière de
santé humaine (paragraphe II).
Paragraphe I : En matière de conservation de la
diversité biologique
Plusieurs politiques sont élaborées et mises en
~uvre en matière environnementale. Dans cette partie nous nous
intéresserons d'une part aux plans et programmes dans la politique
nationale de protection et de la conservation de la diversité biologique
(A) et d'autre part à la portée du principe de précaution
dans ces plans et programmes (B).
A) Une multiplicité de plans et
programmes
Plusieurs instruments de protection et de conservation de
l'environnement ont été adoptés au Burkina Faso tant au
plan national que local. Tous ces documents ont comme point de départ le
plan d'action national pour l'environnement (PANE).Le plan d'action national
pour l'environnement a été entrepris dans le contexte des
préparatifs de la Conférence des Nations Unies sur
l'environnement et le développement (CNUED) et a été
achevé en 199139. Il a ensuite fait l'objet d'une
révision en 1994 pour l'adapter aux principes de protection de
l'environnement
38 Cf. paragraphe II de la section II du chapitre
I.
39 Ministère de l'environnement et du tourisme.
Plan d'action national pour l'environnement (PANE), juillet 1991.
26
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DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
adoptés au plan international. Ce renforcement de la
stratégie nationale de
protection de l'environnement fait ressortir les liens, d'une
part, entre l'environnement et le développement et d'autre part, entre
l'environnement et la pauvreté, le PANE devient l'Agenda 21 national.
A la suite du PANE, il y a eu une floraison de plans, programmes
et stratégies en matière environnementale. Nous avons par exemple
dans le secteur minier le Programme de Renforcement des Capacités en
Gestion Minière et de l'Environnement (PRECAGEME) qui a permis
l'élaboration du Plan d'Action National d'Education Environnementale
pour le Développement Durable (PANEEDD)40. On a
également le Plan d'Action pour la Gestion Intégrée des
Ressources en Eau (PAGIRE)41.
Pour la diversité biologique de manière
spécifique, le Burkina Faso est Partie contractante de la Convention
sur la Diversité Biologique, suite à sa ratification par le
pays le 2 septembre 1993. Aussi, en application de la disposition de l'article
6 de cette convention, le Burkina Faso s'est progressivement doté
à partir de l'année 2000 de:
-une monographie nationale en matière de diversité
biologique;
-une stratégie nationale et d'un plan d'action en
matière de diversité biologique;
-un rapport sur l'état des ressources
phytogénetiques; -un rapport sur l'état des ressources
animales.
Aussi, des outils influençant directement la conservation
de la diversité biologique ont été adoptés :
- Programme d'Action National de lutte contre la
désertification, adopté en juin 2000 en application de la
Convention des Nations Unies sur la Lutte contre la Désertification;
40 Décret
n°2004-625/PRES/PM/MECV/MEBA/MESSRS du 30 décembre 2004 portant
adoption du Plan d'Action National d'Education Environnementale pour le
Développement Durable.
41 Décret n° 2004-220/ PRES/PM/MAHRH du 30
décembre 2004 portant adoption du plan d'action pour la gestion
intégrée des ressources en eau (PAGIRE).
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
- Stratégie Nationale de mise en ~uvre de la Convention
Cadre sur les Changements Climatiques;
- Stratégie de mise en cuvre Concertée des trois
Conventions de Rio, élaborée pour susciter la synergie de leur
mise en cuvre.
A ces nombreux outils intéressant l'environnement, on peut
ajouter, d'une part, le Cadre Stratégique de Lutte contre la
Pauvreté (CSLP) qui doit être remplacé en 2011 par la
Stratégie de Croissance Accélérée et de
Développement Durable (SCADD) jusqu'à l'horizon 2025 et d'autre
part, les plans d'actions locaux pour l'environnement.
B) La portée du principe de précaution dans
les plans et
programmes
Le nombre important d'outils et d'instruments de planification en
matière environnementale reflète l'état de prise de
conscience des gouvernants sur la nécessité d'une protection
aussi bien globale que sectorielle de l'environnement. Certes, ces outils et
instruments ont contribué à une meilleure connaissance de la
biodiversité, à une utilisation durable et à un partage
juste et équitable des bénéfices tirés de
l'exploitation de la biodiversité. Mais, ces outils et instruments
restent limités à deux égards.
Le premier aspect concerne l'effectivité et
l'efficacité de ces outils et instruments. Plusieurs facteurs limitent
leur portée. Il y a, d'une part, l'éparsité des outils et
instruments qui entrainent avec elle, une dispersion des forces, d'autre part,
il existe des difficultés liées aux moyens financiers et
logistiques malgré l'institution du Fonds d'Intervention pour
l'Environnement (FIE) par le code de l'environnement de 1994 et l'apparition de
nouvelles sanctions pénales en matière
environnementale42.
Le deuxième aspect, est lié à la place
très peu reluisante du principe de précaution au sein de ces
outils et instruments. La plus part de ces instruments font une large place
à la prévention en témoigne le mécanisme de
financement institué pour la promotion des politiques environnementales
(FIE), qui est destiné à la
42 Cf. code de l'environnement de 1994
précité
28
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
réparation des atteintes à l'environnement. Aussi,
la prise en compte du principe de précaution suppose, une maîtrise
parfaite des techniques et outils nécessaire à sa mise en place
mais aussi, la disponibilité d'une expertise nationale à
même de procéder à l'évaluation des risques par une
recherche scientifique poussée.
Le principe de précaution bien qu'étant un principe
majeur dans la protection et la conservation de la biodiversité, a donc
une portée limitée et, au regard des difficultés
énoncées plus haut, il apparaît comme un luxe pour les pays
pauvres comme le Burkina Faso.
Paragraphe II : En matière de protection de la
santé humaine
La protection de l'environnement apparaît aujourd'hui comme
un impératif de santé publique dans tous les pays du monde. La
dégradation de l'environnement constitue une menace grave pour la
santé publique car elle emporte d'énormes conséquences sur
la santé humaine. Aussi, le maintien d'un environnement sain et propre
est une condition nécessaire pour la préservation de la
santé publique. Il faut donc, en application du principe 1 de la
Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, du 14
juin 1992 « les êtres humains sont au centre des
préoccupations relatives au développement durable. Il ont droit
à une vie saine et productive en harmonie avec la nature »,
mettre en place des politiques environnementales prenant en compte les
questions de santé publique. Le principe de précaution se
présente en la matière comme une solution avant-gardiste,
malheureusement sa place reste encore limitée au Burkina Faso en
matière de santé publique.
A) Une plus grande place à la prévention en
matière de santé publique
La politique sanitaire du Burkina Faso est basée sur les
mesures préventives. Compte tenu du niveau de développement du
pays, de l'insuffisance des moyens financiers et technologiques, la
prévention apparaît comme une exigence essentielle des politiques
de santé publique afin de limiter les dangers. Les dispositifs de veille
et d'alerte sont quasi inexistants pour permettre une prise de mesures de
précaution. Pour pallier ces défaillances, la prévention
est pratiquée à profusion. Rien que
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
l'étude du circuit de décision en matière de
santé publique démontre la place occupée par la
prévention. Le circuit de décision en matière de
santé publique est globalement le suivant :
- apparition d'un problème de santé publique
à un niveau,
-
-
saisine des responsables locaux de centre de santé,
description du phénomène et notification au
district sanitaire (DS)
avec prélèvement éventuel des pièces
à conviction,
- vérification par les responsables techniques de
l'évidence et de
son acuité, de son ampleur,
-
Saisine des autorités administratives locales et de la
Direction
Régionale,
- Prise de mesures pour circonscrire le risque, informer la
population, la protéger contre les risques (vaccination,
désinfection, etc.)
- Saisine du niveau central avec comme porte d'entrée la
Direction
Générale de la santé, qui rend compte au
Secrétaire Général, lequel s'en réfère au
Ministre. Concomitamment, le haut commissaire saisit le gouverneur, lequel
saisit son ministre de tutelle qui entre en contact avec son collègue de
la santé après en avoir avisé le premier Ministre.
On remarque aussi des mesures de prévention en
matière de protection de la santé des consommateurs à
travers diverses mesures de contrôle des produits destinés
à la consommation humaine. Il en va ainsi, par exemple, des normes
environnementales de qualité ou de rejet, des mesures restrictives
à l'importation de certains produits susceptibles de mettre en danger la
vie ou la santé des consommateurs nationaux.
Cependant, la préférence des décideurs
burkinabè vis-à-vis du principe de prévention n'emporte
pas une méconnaissance du principe de précaution.
B) Vers une meilleure prise en compte du principe de
précaution
Le principe de précaution n'est pas un principe
ignoré par le droit burkinabè en matière de santé
publique. C'est un principe assez récent en la matière, qui exige
pour sa mise en cuvre efficace, l'existence d'un paquet technologique
important
30
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
voire trop important pour un pays pauvre. Néanmoins, ce
principe trouve de plus en plus un écho favorable auprès des
autorités. En effet, depuis les années 2000, le gouvernement
burkinabè met un effort particulier dans la recherche scientifique. Des
mesures concrètes sont prises dans ce sens, telles que, l'augmentation
du budget consacré à la recherche, l'apport de subventions
diverses aux institutions de recherche telles que le Centre National de
Recherche Scientifique et Technique (CNRST), l'Institut National de
l'Environnement et la Recherche Agricole (INERA) , la divulgation, la
vulgarisation et l'aide à la promotion des résultats des
institutions de recherche citées plus haut, mais aussi, la
création du Laboratoire National de Santé Publique
(LNSP)43. Certes, le laboratoire national de santé publique a
pour fonction première de contrôler la qualité des produits
destinés à la consommation humaine, donc une mission de
prévention par excellence, mais, il constitue aussi un canal de mise en
~uvre du principe de précaution. Le laboratoire national de santé
publique est un cadre privilégié pour le débat autour du
principe de précaution. Par les résultats des examens auxquels il
procède, le laboratoire peut susciter le débat au sein de
l'opinion publique et ainsi contrai ndre l'Etat à la prise de mesure de
précaution. Malheureusement, et pour l'heure les résultats des
analyses du laboratoire national de santé publique ne font pas l'objet
de divulgation au près du publique.
Sur le plan politique, le renforcement de place du principe de
précaution se lie à travers l'obligation de soumettre au
contrôle du laboratoire national de santé publique, les produits
destinés à la consommation humaine avant leur mise sur le
marché. Nous avons aussi l'intégration des questions de
santé publique dans certaines politiques nationales, telles que,
l'exploitation minière44, l'assainissement45 et de
radioactivité46.
Au-delà, de toutes ces dispositions et politiques il n'est
pas utopique de dire que le principe de précaution n'est pas
suffisamment entré dans le droit burkinabè de santé
publique. Pourtant, une bonne application de ce principe peut permettre au
Burkina Faso d'éviter les crises sanitaires survenues en occident telles
que le
43 Décret n° 99-377/PRES/PM/MS du 28
octobre 1999 portant création du laboratoire national de santé
publique ; Décret n°2003-478/PRES/PM/MS du 22 septembre 2003
modifiant le décret n° 99- 377/PRES/PM/MS du 28 octobre 1999
portant création du laboratoire national de santé publique.
44 Voir code minier précité
45 Code de l'environnement de 1994, art 58.
46 Loi 2005-010 sur la sécurité
nucléaire et la protection contre les rayonnements ionisants,
précité.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
scandale du sang contaminé ou l'affaire de la vache folle.
Il convient donc pour les décideurs du Burkina Faso, de tirer des
leçons des expériences des pays occidentaux, pour mettre des
politiques de santé publique prenant en compte le principe de
précaution qui constitue un avatar contemporain du principe de
prévention.
Le principe de précaution tel que conçu par le
droit international, est un principe fonctionnel, un principe directeur dont
l'importance n'est plus à démontrer. Ce principe a fait une
entrée mitigée dans le droit national burkinabè, il est
consacré implicitement et parfois explicitement par la constitution et
certaines dispositions règlementaires dans plusieurs domaines tels que
la protection et la conservation de la diversité biologique, la
protection de la santé humaine. Cependant, au-delà de cette
consécration, se pose le problème de la mise en cuvre du
principe, son rôle dans le développement du Burkina Faso en
général et particulièrement dans les biotechnologies
(titre II).
32
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
TiTRe II : La mise en oeuvre du principe de
pRécAuTioN Au BURKINA FASO
Le principe de précaution est l'une des innovations
normatives les plus récentes et les plus importantes du droit de
l'environnement47. Apparu dès la fin des années 80, il
jouit aujourd'hui d'une large consécration juridique, tant au plan
national qu'au plan international et apparaît comme un véritable
principe directeur du droit de l'environnement. Le principe de
précaution repose sur l'idée selon laquelle l'absence de
certitudes scientifiques sur une question donnée ne doit pas conduire
à différer l'adoption de mesures visant à prévoir,
prévenir ou atténuer les causes de la dégradation de
l'environnement et à en limiter les effets néfastes. Etant une
forme d'application plus avancée du principe de prévention, le
principe de précaution est tout entier tourné vers le futur,
compte tenu de son caractère anticipatif.
Pour un pays comme le Burkina Faso, qui a une aspiration
quotidienne au développement, il paraît important de s'interroger
sur comment mettre en cuvre le principe de précaution dans la dynamique
de développement du pays, sachant que tout est prioritaire (chapitre I).
L'évaluation de l'apport du principe de précaution dans le
développement du Burkina Faso apparaît d'autant plus
intéressante, que depuis près d'une décennie maintenant,
le Burkina Faso a fait son entrée dans les biotechnologies modernes.
Cette entrée dans les biotechnologies modernes donne un champ
d'expérimentation de la mise en ~uvre pratique du principe de
précaution au Burkina Faso (chapitre II).
47 Amidou Garané et Vincent Zakané, op.
Cit
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Chapitre I : principe de précaution et
développement du Burkina Faso
Le principe de précaution n'est une solution à
l'incertitude scientifique, il s'agit d'un processus interactif régulier
entre action et connaissance. Il ne s'agit pas non plus d'une règle, le
principe de précaution fournit des repères abstraits qui ne
permettent pas d'éviter de solliciter le jugement au cas par cas. Deux
bornes balisent toutefois le domaine d'application pertinente du principe de
précaution : à une extrémité, il y a l'obtention
d'une certitude sur l'existence du risque, à l'autre
extrémité il y a l'ignorance. Le principe apparaît comme
une nécessité et son application, un enjeu important pour un
développement durable (section I). Néanmoins, compte tenu de la
technicité qui entoure ce principe, des difficultés subsistent
dans son application du fait du niveau de développement du Burkina Faso
(section II).
Section I : Le rôle du principe de
précaution dans le développement du Burkina Faso
Du point de vue des pays en voie de développement, le
principe de précaution peut être considéré comme le
signe d'une invasion des pays nantis en raison de la psychose croissante qui
anime leurs populations. En outre, ce principe peut être vu comme un
instrument de protectionnisme déguisé dirigé contre les
plus pauvres. Son champ d'application est potentiellement illimité et
intéresse aussi bien l'environnement que la santé humaine. Son
intégration dans les politiques de développement apparaît
indéniable pour le Burkina Faso. Ce principe pourrait booster le
développement (paragraphe I), tout en étant un instrument de
protection des droits de l'homme (paragraphe II).
Paragraphe I : Un facteur incontournable dans le processus
de développement
Le principe de précaution révèle toute son
importance dans le développement d'un pays pauvre comme le Burkina Faso
a deux niveaux :
34
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
C'est tout d'abord, un instrument permettant une prise de risques
mesurés (A) et ensuite, un facteur d'un dynamisme participatif des
différents acteurs du développement du pays (B).
A) Une prise de risque mesurée
Le principe de précaution vise à protéger la
société contre les risques inconnus ou incertains
découlant de certaines activités humaines. En effet, de
nombreuses activités humaines sont susceptibles d'engendrer des risques
même si l'état de connaissances scientifiques ne permet pas pour
le moment de les identifier avec précision, de déterminer la
probabilité de leur survenance ou encore de leur degré de
gravité. Les risques sont ici des risques soupçonnés comme
en matière de biotechnologies modernes ou en matière
nucléaire.
L'objectif du principe de précaution est de diminuer les
risques. La démarche de précaution commence par l'analyse des
risques. Le risque doit être défini, évalué et
gradué48. Ensuite il faut faire une étude comparative
des risques associés aux différends scénarii (le risque
d'agir doit être comparé au risque de ne pas agir pour relever
l'impact économique et social et vérifier les conséquences
à long terme), pour s'assurer que le remède ne soit pas pire que
le mal. Aussi, il faut éclairer toute décision prise au vu
d'analyses économiques. Enfin, il faut instituer un organisme
indépendant d'évaluation et de suivi des risques. Cette
démarche doit aboutir à des décisions possibles,
révisables avec des solutions réversibles et
proportionnées (rapport coûts/avantages).
Le principe de précaution ne constitue pas une mesure
aveugle d'inaction comme le pensent ses détracteurs. Il procède
d'un raisonnement logique et méthodique, d'une prise en compte des
risques, de l'impact de ces risques sur la société. Le principe
de précaution se met à l'avant-garde du risque que court la
société toute entière dans sa quête d'innovation et
de développement.
Le Burkina Faso doit voir en ce principe, un moyen pour lui,
d'éviter de graves erreurs dont les conséquences seront
irréversibles ou très couteuses pour l'économie nationale,
encore embryonnaire. Le principe ne prône donc pas l'inaction, mais
plutôt une action encadrée et mesurée pour plus
d'efficacité. Cela doit
48 Philippe Kourilsky, le principe de
précaution, Rapport au premier ministre, 15 octobre 1999.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
constituer une opportunité pour le Burkina Faso qui est
pays en construction où « tout est prioritaire »,
pour utiliser de manière raisonnable ses deniers.
Il est donc regrettable de constater que jusqu'à nos
jours, le principe de précaution reste très faiblement
appliqué dans les politiques et plans de développement (Cf. titre
I, chapitre 2, section II, paragraphe I, A.)
B) Un dynamisme participatif
Contrairement au principe de prévention qui se manifeste
comme un pouvoir matériel de l'administration, une police
administrative, le principe de précaution implique un plus grand nombre
d'acteurs. La décision de mettre en cuvre ce principe, même s'il
relève des autorités administratives, fait appel à divers
autres acteurs tels que les scientifiques, les promoteurs de l'activité,
mais aussi au public.
Les structures d'évaluation des risques doivent être
indépendantes vis-à-vis de celles dont les intérêts
pourraient se révéler incompatibles avec l'objectivité
requise pour l'expertise. Aussi, le circuit de décision et les
dispositifs sécuritaires en la matière doivent être fiables
et transparents. Enfin, en matière de précaution, une large place
est faite à l'information du public et à sa
participation49.
Il y a avec le principe de précaution une sorte de
synergie d'action nécessaire pour sa mise en ~uvre diligente. C'est un
principe permettant d'intégrer les préoccupations des divers
acteurs de la chaîne de décision. Pour le Burkina Faso, ce
processus est en cours d'installation et de plus en plus le public est
informé des actions des autorités en matière de
conservation de la diversité biologique et de protection de la
santé humaine, en témoigne de nombreux ateliers d'information des
collectivités locales sur les enjeux des biotechnologies au Burkina
Faso. Mais le processus est encore imparfait dans la mesure où les
activités intégrant le public sont essentiellement des actions de
pure information et rien d'autre. Le circuit de décision reste encore
trop centralisé, ce qui démontre une application partielle du
principe de précaution même si pour certains, ce principe
constitue un droit de l'homme.
49 Voir les dix commandements de la précaution,
Philippe Kourilsky, principe de précaution, Rapport au premier ministre,
15 octobre 1999, précité
36
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Paragraphe II : Un droit de l'homme
La place du principe de précaution dans
l'amélioration des conditions de vie des populations est aujourd'hui
plus qu'une réalité. Ce principe est érigé en un
droit fondamental de l'homme. Il est consacré (même si c'est de
façon implicite) aussi bien par la charte européenne des droits
de l'homme que par la charte africaine des droit de l'homme et des
libertés publiques. Ce principe constitue pour les nations, une garantie
de leurs intérêts (A) mais aussi un moyen pour elles, d'instaurer
une démocratie participative (B).
A) Une garantie des intérêts de la
nation
Le principe de précaution est de nos jours un moyen de
protection des intérêts des communautés car son application
judiciaire se fait de plus en plus forte. Au plan international et notamment
devant les institutions judicaires internationales, ce principe est un argument
de plus en plus utilisé pour soutenir les prétentions des Etats
dans la mesure où il est facile à évoquer. Le principe
consacre une sorte de renversement partiel de la charge de la preuve du droit
commun, il revient au promoteur de l'activité de démontrer
l'innocuité de l'activité qu'il entreprend.
Au niveau du la Cour International de Justice, le principe semble
avoir été mentionné pour la première fois dans la
requête de la Nouvelle -Zélande au sujet des essais
nucléaires français. La Nouvelle-Zélande se fondait
essentiellement sur ce principe qu'elle décrivait comme un principe de
droit largement acquis en matière de droit international, devant
s'appliquer pour imposer à la France la charge de prouver que les essais
envisagés ne provoqueraient pas de dommages
environnementaux50. Une autre illustration de l'invocation du
principe de précaution devant la CIJ est celle de l'affaire
Gabcikovo/Nagymaros, où la Hongrie et la Slovakie ont
invoqué aussi le principe de précaution.
On peut également relever l'apparition du principe de
précaution en 1999, dans les affaires relatives au thon à
nageoire bleue, l'Australie et la Nouvelle- Zélande ont
invoqué le principe de précaution pour appuyer leur
prétention selon laquelle, le Japon ne devrait pas avoir le droit de
continuer son programme de pêche scientifique expérimentale en
raison de la nécessité impérieuse de préserver
les
50 Requête de la Nouvelle-Zélande,
para.105; voir aussi CIJ CR/95/20, pp. 20 -1, 36 -8).
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
stocks en diminution de thon à nageoire bleue dans le
Pacifique Sud. L'Organe d'appel de l'OMC a aussi examiné ce principe. En
1998, pour l'affaire sur les hormones dans la viande et les produits
carnés, la Communauté européenne a invoqué le
principe de précaution pour justifier sa prétention à
avoir le droit d'interdire des importations de viande des bcufs
élevés aux Etats-Unis et au Canada à l'aide d'hormones
artificielles, puisque leur impact sur la santé humaine était
incertain. Selon la Communauté, «ce principe est
déjà une règle coutumière générale du
droit international ou du moins un principe de droit
général»
Au plan interne Burkinabè, il n'existe pour l'instant
aucune référence jurisprudentielle à ce principe. Cela
s'explique d'une part, par la méconnaissance des mécanismes de ce
principe par les acteurs et même par les juges et d'autre part, la
priorité accordée au principe de prévention beaucoup plus
connu et plus facile à invoquer devant les juridictions nationales.
Au regard de la pratique internationale, il est loisible de dire
que le principe de précaution permet aux Etats, même pauvres, de
préserver leurs intérêts vis-à-vis des autres Etats
et des grands groupes industriels. La charge de la preuve revenant donc au
défendeur, le principe de précaution constitue une vraie
révolution en procédure judiciaire. Il protège mieux les
faibles car la recherche de la preuve en matière de dommage
environnemental oü de santé publique, demande très souvent
d'énormes moyens techniques et financiers qui sont souvent hors de
portée des Etats pauvres.
Le principe de précaution est donc un principe plus
équitable dans sa protection mais aussi un principe
démocratique.
B) L'instauration d'une démocratie
participative
Le principe de précaution « consiste
essentiellement à responsabiliser l'individu au défaut
d'anticiper et de prévenir des risques qui restent impossibles à
vérifier dans le présent, mais dont la réalisation future
est susceptible d'entraTner un préjudice sérieux et
généralisé »51. Il y a une prise en
compte dans le principe de précaution de la nécessité de
faire jouer aux individus un rôle important, puisque, les
conséquences dommages produiront leurs effets principalement sur ces
derniers.
51 Jean-Louis Beaudoin et Patrice Deslaurier, la
responsabilité civile, vol. 1- principes généraux,
éditions yvons Blais, 2007, p 159.
38
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Le circuit de décision tel que dessiné en
matière de précaution prend en compte les communautés
à la base par deux procédés :
- L'organisation de l'information ; le public a le droit
d'être informé au
mieux et son degré de participation clairement fixé
par le pouvoir politique. Le public dispose d'un véritable droit
à l'information qui leur permet de juger de la transparence et de la
qualité des systèmes en cause.
- La nécessité d'équilibrer les
responsabilités entre l'Etat et les citoyens
conduit à l'instauration d'un véritable principe de
transparence.
En combinant ces deux éléments, on aboutit à
l'institution d'un véritable système d'assurance qualité
intégrant des outils de contrôle tels que l'étiquetage et
la traçabilité. Les citoyens sont de mieux en mieux
associés aux débats à travers le droit à
l'information. Ils sont responsabilisés et ont de plus en plus un droit
de regard
sur les orientations et l'utilisation des innovations sous
réserve des secrets industriels et de défense nationale. De nos
jours, il est indéniable que le principe de précaution a
contribué à la diffusion d'une information scientifique et
technique fiable au moins dans les pays développés.
Au Burkina Faso, le principe de précaution n'étant
pas entrée dans les mcurs, il est difficile d'évaluer son apport
dans la démocratie nationale. Cependant, on peut dire qu'une bonne
utilisation de ce principe permettrait une meilleure participation du public
aux débats, ce qui pourrait améliorer la qualité de la
démocratie nationale. Pour cela, il faudra faire des reformes pour
permettre une plus grande diffusion de l'information scientifique au
près du public pour qu'il puisse agir en connaissance de cause. Aussi,
il faudra permettre à l'appareil judiciaire de s'imprégner de la
technicité de la lecture de l'information scientifique notamment par la
formation et la mise à la disposition des magistrats de l'information
scientifique. Il est aujourd'hui plus que nécessaire pour mieux
protéger l'environnement de mettre en place une approche participative,
car comme le dit le professeur Prieur, « la protection de
l'environnement, si elle est devenue une obligation de l'Etat, est avant tout
un devoir des citoyens »52.
Le principe de précaution est aujourd'hui un principe
fondamental des droits de l'homme. Il permet une prise mesurée du
risque, garantissant les intérêts de la
52 M. Prieur, Droit de l'environnement, p 112
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
nation. Il entraine de ce fait un dynamisme au sien des acteurs
sociaux et renforce le processus démocratique. Cependant, son
application reste difficile dans les pays sous-développés comme
le Burkina Faso.
Section II : Difficile conciliation entre
précaution et développement
Les détracteurs du principe de précaution le
considèrent comme un principe qui s'oppose au progrès
scientifique, un principe qui pousse à l'abstention en cas de doute. Il
n'en est rien, car le principe de précaution est un principe dynamique
qui s'appuie sur le progrès scientifique pour décider des actions
à prendre et de la démarche à suivre. C'est
précisément en cela que sa mise en cuvre dans les pays pauvres
comme le Burkina Faso, trouve des limites graves. Il n'existe pas dans ces pays
de technologies suffisantes pour éclairer les décideurs. Mais
au-delà de tout ça l'application du principe de précaution
et des outils de protection de l'environnement en général, est
minée par une faiblesse dans le fonctionnement des institutions et
l'application des textes (paragraphe II) mais aussi par l'existence de causes
socioculturelles défavorables (paragraphe I)
Paragraphe I : Difficultés liées au niveau
de développement du pays
Le principe de précaution est un principe dont
l'application efficace nécessite un certain état de
développement des Etats. Le niveau de développement est
très important car le principe implique des choix de
société. Cette réalité est très bien
perçue au Burkina Faso dont le processus de développement est
miné par une pauvreté grandissante (A) et aussi par le fait
qu'une bonne partie de la population est analphabète (B).
A) La pauvreté
La pauvreté est un fléau au Burkina Faso. Elle
touche plus de la moitié de la population. En effet plus de 85 % de la
population se trouve en milieu rural et
40
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
pratique une agriculture traditionnelle53 qui ne leur
permet pas d'assurer une vie descente. Aussi, le taux de chômage est
très élevé (9,3%) en milieu urbain54. La
combinaison de ces deux facteurs entraine une paupérisation de la
population aussi bien des villes que des villages. Certes la pauvreté
n'est pas un facteur direct du non respect de la loi en général,
mais, force est de reconnaitre que la pauvreté peut être source de
non respect de la loi en matière environnementale dans la mesure
où l'environnement constitue la base des ressources alimentaires des
populations.
La pauvreté retire aux populations leur « libre
arbitre ». Elles font des choix pour survivre sans tenir
nécessairement compte des atteintes à l'environnement. C'est le
cas au Burkina Faso ou les choix de la population sont toujours guidés
par la rentabilité et le coût. Deux exemples sont illustratifs de
cet état des faits :
- En matière de locomotion, les burkinabè ont
opté pour des moyens de
locomotions moins chers sans tenir compte des
effets sur l'environnement à long terme. C'est le cas des motocyclettes
et vélomoteurs qui pullulent les rues surtout des grandes villes avec
des conséquences énormes en matière de pollution et de
nuisance sonore.
- En matière agricole, il n'a pas été
difficile de faire accepter aux paysans
burkinabè les semences transgéniques dans la
mesure où les taux de rendement exposés par les promoteurs ne
leur donnaient aucune alternative compte tenu de leur état de
précarité. C'est le cas du coton transgénique,
cultivé au Burkina Faso depuis 2004.
Ces deux exemples nous permettent de dire qu'il existe un lien
fort entre pauvreté et respect de l'environnement. C'est dans ce cadre
que le Burkina Faso a décidé de lutter contre la pauvreté
en mettant en place le Cadre Stratégique de Lutte contre la
Pauvreté (CSLP). Cette structure sera remplacée en 2011 par la
stratégie de Croissance Accélérée et du
Développement Durable (SCADD) jusqu'à l'horizon 2025.
Il apparait donc évident que le principe de
précaution, par les choix qu'il emporte ne peut pas être
appliqué dans toute sa rigueur et donc ne peut révéler
toute son efficacité, la réalité économique
contraignant les populations à des choix de survie et non de
précaution.
53 Source INSD, RGPH 2006
54 Source INSD, RGPH 2006
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
En dehors de la pauvreté, les actions et choix de la
population sont également liés à leur niveau
d'instruction.
B) L'analphabétisme
Le principe de précaution est un principe méconnu
au Burkina Faso. Pourtant pour être efficace, toute règle de droit
doit être connue des citoyens qui en sont les principaux
destinataires.
La méconnaissance du principe de précaution par les
citoyens est liée à la méconnaissance du droit de
l'environnement en général. Cette méconnaissance entraine
une inefficacité des règles de droit dans la mesure où il
est difficile pour les populations de se soumettre à des règles
qu'elles ignorent ou ne comprennent pas. Dans le cas du Burkina Faso, l'adage
« nul n'est censé ignorer la loi » a une
portée réduite. La plupart des règles de droit
édictées sont ignorées par la majorité de la
population qui reste analphabète et n'a pas accès au droit de
l'Etat, lequel est rédigé dans un langage qu'elle ignore et est,
pour l'essentiel, très peu diffusé55. Aussi, il faut
noter que le droit de l'environnement est une matière technique, peu
connue même des spécialistes du droit. Seuls les
spécialistes en la matière et les professionnels du domaine en
détiennent les secrets. Le droit de l'environnement apparait comme un
droit illégitime aux yeux des populations. Pour elles, les règles
du droit de l'environnement sont étrangères à leur
réalité et leurs sont imposées par les puissances
publiques.
Dans ce contexte le principe de précaution, encore plus
technique que le droit général de l'environnement, ne peut
trouver un écho favorable et une application satisfaisante. Il est
ignoré de la population, et méconnu par les spécialistes
du droit tels que les magistrats. Cette situation conduit à une inertie
de l'action administrative.
Paragraphe II : Difficultés dans l'application des
textes et politiques Le droit de l'environnement burkinabè est
de plus en plus codifié, il possède
de nombreuses dispositions applicables aux divers domaines de
l'environnement.
55 Zakané V, Aspects contemporains du droit de
l'environnement en Afrique de l'ouest et centrale ,UICN, Droit politique de
l'environnement, n°69.
42
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Aussi de nombreux efforts sont fournis par les décideurs
en termes de politiques de protection de l'environnement et de la santé
humaine. On remarque cependant une ineffectivité de ce droit. Cette
ineffectivité est liée d'une part, au faible degré
d'application des textes (A) et d'autre part, à une suivie insuffisante
des plans et politiques (B).
A) L'application des textes
Un rapide coup d'il sur le dispositif législatif
environnemental du Burkina Faso laisse entrevoir un foisonnement des textes. En
effet, à partir de la conférence de Rio sur l'environnement et le
développement de 1992, le Burkina Faso a mis en place un arsenal
juridique en matière de protection et de conservation de
l'environnement. Outre la constitution de 1991 qui consacre le droit à
l'environnement et surtout la nécessité de protéger
l'environnement, de nombreuses lois ont été adoptées en la
matière. A ces dispositions du droit interne, il faut ajouter plus d'une
vingtaine de traités internationaux ratifiés par le pays.
Au vu de cela on est porté à croire que
l'environnement bénéficie de la protection la plus exemplaire
possible au Burkina Faso, il n'est rien, dans la mesure où il existe une
certaine ineffectivité des textes.
Cette ineffectivité s'explique d'une part, par des causes
socioculturelles et d'autre part, par des causes institutionnelles.
Les causes socioculturelles sont de trois ordres56
:
- On a tout d'abord, la pauvreté et ses nombreuses
conséquences. La
pauvreté est un facteur favorisant les atteintes aux
dispositions règlementaires de protection de l'environnement dans la
mesure ou l'environnement constitue la base des ressources alimentaires d'une
grande partie de la population.
- On a ensuite, l'ignorance du droit de l'environnement par les
citoyens et
son manque de légitimité. La majorité de la
population est analphabète et ressent très souvent l'impression
d'être contrainte à se soumettre à un droit qui lui est
étranger.
56 V. Zakané, Aspect s contemporains du droit
de l'environnement en Afrique de l'ouest et centrale ,UICN, Droit politique de
l'environnement, n°69, p 25
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
- On a enfin, la montée de l'incivisme écologique.
Il y a un
développement de plus en plus grand de l'incivisme.
Très souvent les populations ont conscience de l'existence du droit mais
manquent de bon sens.
Les causes institutionnelles sont aussi de trois ordres :57
- La première cause est liée à
l'ineffectivité des sanctions des atteintes à
l'environnement. Certes, le code de l'environnement du Burkina
Faso prévoit des sanctions, mais dans la pratique, ceux qui sont
chargés de la répression s'abstiennent très souvent de le
faire.
-
En second lieu, il n'y a pas de contrôle du respect des
règles
environnementales. Les services chargés du contrôle
manquent souvent de moyens financiers et humains pour assurer un contrôle
régulier de l'ensemble du territoire national.
- La troisième cause quant à elle, est liée
à la complexité des normes
environnementales et au déphasage de ces normes
vis-à-vis des pratiques traditionnelles.
A la lecture des causes de l'ineffectivité des textes
environnementaux, il apparaît claire que même si ces textes
consacraient avec force le principe de précaution, son application
serait aussi minée par ces mêmes causent. Le principe de
précaution ne peut s'appliquer efficacement (et constituer un facteur de
développement) que dans un état de droit, alors que le tableau
ci-dessus dépeint entraine une situation de non droit.
Il faut donc pour mettre en place un droit de l'environnement
digne de ce nom, élaborer des règles prenant en compte aussi bien
les coutumes des populations que leurs réalités
économiques, mais aussi veiller à une vulgarisation et une
application efficace de ces règles.
B) Le suivi des politiques
Les politiques du Burkina Faso dans le domaine de l'environnement
sont diverses et prennent plusieurs appellations. Certaines se
présentent sous forme de plans et programmes, d'autres en
stratégies. Ces différentes politiques n'offrent
57 Zakané. V. Aspects contemporains du droit de
l'environnement en Afrique de l'ouest et centrale ,UICN, Droit politique de
l'environnement, n°69, p 22
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SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
cependant pas une protection satisfaisante de l'environnement. En
effet, les politiques environnementales burkinabè sont très
éparses et touchent plusieurs domaines. Il ressort donc une
difficulté de suivi et de contrôle de ces politiques. Les
politiques environnementales manquent de moyens financiers et humains pour leur
exécution. Les mécanismes de financement ne sont pas fluides et
le personnel d'appoint est insuffisant et mal équipé.
Aussi, ces politiques ne prennent pas suffisamment en compte
certains principes novateurs comme le principe de précaution. Elles font
plutôt une large intégration du principe de prévention et
sont plus promptes en matière de réparation des dommages
causés à l'environnement. Or, en matière environnementale,
il est plus souhaitable, pour être efficaces, que les politiques agissent
beaucoup plus en amont des dommages pour les prévenir, la
réparation étant toujours très coûteuse et pas
toujours possibles à faire.
Cependant, il est bon de relever des avancées en
matière de contrôle et de suivi des projets ayant un impact sur
l'environnement. En effet, depuis 1997, ces projets sont soumis au
contrôle et suivi du mécanisme de concertation, d'orientation, de
suivi et d'évaluation créé par l'article 7 du code de
l'environnement : CONAGESE. Cet organe se présente comme un cadre de
coordination mais fait souvent office d'organe d'exécution des projets.
Mais le rattachement du CONAGESE au cabinet du Ministre en charge de
l'environnement lui a causé d'énormes difficultés de
fonctionnement, ce qui a entrainé sa transformation en Conseil National
pour l'Environnement et le Développement Durable (CONEDD) beaucoup plus
autonome.
Le concept de précaution est à la base de toutes
les politiques écologiques modernes. Aucun Etat ne peut aspirer au
développement sans prendre des mesures de précaution. Dans ce
sens le principe de précaution doit être au ccur de ces politiques
de développement. Le principe s'appuie sur les résultats de la
science pour impulser une prise de risque mesurée et instaurer un
développement participatif de tous les acteurs de la
société. Le principe est donc un droit de l'homme dont la mise en
~uvre est importante pour garantir les intérêts de la nation.
Cependant, compte tenu du sous-développement du Burkina Faso,
miné par la pauvreté et l'analphabétisme, le principe
apparait comme un luxe. Néanmoins, le principe trouve
application dans certains domaines spécifiques. C'est le
cas pour ce qui concerne les biotechnologies modernes au Burkina Faso (chapitre
II).
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Chapitre II : exemple illustratif de l'application du
principe de précaution : les biotechnologies modernes au BURKINA
FASO
Le Burkina Faso est un pays essentiellement agricole où
environ 85% de la population tirent ses moyens de subsistance de l'exploitation
de la terre et des autres ressources naturelles. L'agriculture est le moteur de
l'économie en contribuant pour 35,4% au produit national brut (PNB). Le
pays a donc opté d'améliorer la production agricole en entrant
dans les biotechnologies modernes.
Le Burkina Faso utilise trois générations de
biotechnologies58 avec une importance marquée pour les
biotechnologies traditionnelles, reflétant ainsi le faible niveau de
maîtrise des biotechnologies modernes. Cependant depuis maintenant une
dizaine d'années, le pays a fait une entrée remarquable dans les
biotechnologies modernes notamment en matière agricole.
L'article 3,§1 du protocole de Cartagena sur la
prévention des risques biotechnologiques, définit les
biotechnologies modernes comme étant « ...de l'application de
techniques in vitro aux acides nucléiques y compris la recombinaison de
l'acide désoxyribonucléique (ADN) et l'introduction directe
d'acides nucléiques dans des cellules ou organites (ainsi que) la fusion
cellulaire d'organismes n'appartenant pas à une mrme famille
taxonomiquekqui surmontent les barrières naturelles de la physiologie de
la reproduction et la sélection de type classique ». les
biotechnologies sont également définies comme «
l'application de techniques de recombinaison de l'acide nucléique et la
fusion cellulaire in vitro qui franchissent les barrières physiologiques
naturelles de la reproduction ou de la recombinaison, autrement que par la
reproduction et la sélection naturelles ». Les biotechnologies
modernes constituent pour le Burkina Faso, un progrès incontestable, un
immense espoir au regard de leurs nombreuses applications. Mais elles peuvent
constituer une menace sérieuse pour la santé humaine,
l'environnement et en particulier la diversité biologique, si leurs
effets ne sont pas bien maîtrisés. C'est pourquoi, un cri d'alarme
a été lancé par la communauté internationale
dès l'avènement des
58 Biotechnologies traditionnelles, biotechnologies
conventionnelles et biotechnologies modernes.
46
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
biotechnologies modernes, invitant les Etats à mettre en
place une biosécurité pour la gestion des risques réels ou
potentiels susceptibles de survenir de par ces biotechnologies modernes.
Ces risques sont très souvent inconnus ou incertains au
regard des connaissances scientifiques et techniques. L'état des
connaissances scientifiques et techniques des Etats
sous-développés ne leur permet pas d'agir avec promptitude, de
quantifier le degré de gravité et la probabilité de
survenance des risques. C'est pourquoi, il a été
recommandé, l'utilisation du principe de précaution pour
anticiper sur les risques. Ce principe est contenu le droit interne
burkinabè de l'environnement ainsi que dans les instruments
internationaux ratifié par le pays comme la convention sur la
diversité biologique (RIO 1992) et son protocole additionnel sur la
prévention des risques biotechnologiques (Montréal, 29 janvier
2000). On remarque donc, avec l'avènement des biotechnologies modernes
au Burkina Faso, d'énormes préoccupations sur la
nécessité de préserver la diversité biologique et
la santé humaine. Est-ce à dire, que le Burkina Faso ne dispose
pas de l'encadrement juridique, institutionnel et technique suffisant pour une
saine application de ces technologies (section I) ? Le principe de
précaution a-t-il reçu application dans le contexte des
biotechnologies modernes au Burkina Faso ? Comment l'application du principe
est t'elle perçue aussi bien par le gouvernement que par les
organisations de la société civile (section II).
Section I : l'avènement des biotechnologies
modernes au Burkina Faso
Le Burkina Faso est entré dans les biotechnologies
modernes autour des années 2000, avec l'autorisation de
l'expérimentation du coton transgénique. L'Etat a conclue en
juillet 2003, une convention avec deux firmes américaines, Monsanto
(pour le coton Bt Bollgard II) et Syngenta (pour Vegetativ insecticidal
proteine coton)59. La signature de ces conventions a
constitué le point de départ de l'expérimentation du coton
transgénique pour une période de cinq (5) ans. Cette
expérimentation a débuté en milieu confiné dans
deux stations de l'Institut National
59 Institut du sahel. Etat des lieux de la
règlementation, des directives, de l'autorisation et de la circulation
des OGM dans le sahel, mai 2004, p. 10.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
de l'Environnement et de Recherche Agricole (INERA) que sont :
Faraoba, près de la ville de Bobo-Dioulasso et Kouaré,
près de la ville de Fada N'Gourma.
Cette technologie qui a attiré l'attention des
autorités burkinabè compte tenu des prévisions de
rendements plus élevés et de résistance à la
prédation, a néanmoins suscité dès son
entrée, des interrogations. Ces interrogations sont justifiées
d'une part, par l'absence ou l'insuffisance d'un cadre juridique (paragraphe I)
et d'autre part, par la non intégration de la population et des acteurs
de la société civile à la prise de la décision
d'autorisation des expérimentations (paragraphe II).
Paragraphe I : l'absence d'un cadre juridique et
institutionnel préalable
Le Burkina Faso est entré dans les biotechnologies
modernes pour trois raisons essentielles. Il y a tout d'abord le
récurrent problème de sécurité alimentaire compte
tenu des déficits constants de la production
céréalière nationale. On a ensuite, une forte tendance
à l'adoption de système moderne de production et enfin le
désir des autorités de ne pas rester en marge de la
mondialisation. Le Burkina Faso a donc opté de rendre compétitifs
les produits d'exportations pour ainsi pallier le déficit
céréalier. Cette noble idée s'est traduite par une
entrée hasardeuse dans les biotechnologies modernes en raison de
l'absence de cadre juridique préalable pour une meilleure application de
cette technologie (A) mais aussi, de l'absence d'institutions adéquates
pour la gestion des risques probables de ces biotechnologies (B).
A) L'absence de textes juridiques internes
L'introduction des biotechnologies et notamment du coton
transgénique s'est faite dans un contexte particulier, un contexte de
vide juridique. En effet, les autorisations d'expérimentation en milieu
confiné ont été accordées aux firmes
américaines sans que le Burkina Faso ne se dote d'un cadre juridique
national de prévention des risques biotechnologiques. Or, ce cadre est,
pour les principes internationaux et les conventions internationales en
matière de biotechnologies (d'ailleurs ratifiés par le Burkina
Faso), un préalable indispensable à toute
48
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
introduction, utilisation et diffusion des biotechnologies. C'est
bien plus tard que se mettra en place le cadre juridique de la gestion des
biotechnologies au Burkina Faso.
Cette construction juridique a connu des insuffisances. La
première tentative d'encadrement juridique s'est opérée en
juin 2004 par l'adoption d'un décret portant sur les règles
nationales en matière de sécurité en
biotechnologie60. Ce décret a été adopté
à la veille de la conférence internationale sur les sciences et
les technologies tenue à Ouagadougou en juin 200461. Cette
conjugaison des dates laisse entrevoir donc une volonté des
autorités de prouver à la communauté internationale,
l'existence d'un cadre de gestion des biotechnologies au Burkina Faso. La
deuxième limite de ce décret liée à la valeur de la
forme juridique utilisée dans la hiérarchie des normes compte
tenu de l'importance de la question des biotechnologies. Du point de vue
politique et social, les organismes Génétiquement modifiés
(OGM) posent une cruciale question de choix de société en raison
de ses conséquences potentielles sur l'environnement, la santé
humaine et même la sécurité alimentaire. En bonne
démocratie, il appartient au peuple d'opérer de tel choix par une
loi à travers ses représentants qui siègent à
l'Assemblée Nationale (AN). D'ailleurs, la constitution du Burkina Faso
du 11 juin 1991, par son article 101 fait entrer la détermination des
principes fondamentaux de la protection de l'environnement, dans les
compétences du pouvoir législatif. La troisième limite de
ce cadre juridique est liée à la compétence même du
pouvoir règlementaire. Ce pouvoir ne peut édicter des sanctions
pourtant nécessaires pour assurer le respect des procédures
établies par le décret. De telles sanctions relèvent du
pouvoir législatif.
Les insuffisances de ce décret ont conduit à la
mise en place d'un véritable cadre juridique de gestion des risques
biotechnologies à travers l'adoption de la loi n° 005-2006/AN du 17
mars 2006 portant régime de sécurité en matière de
biotechnologie au Burkina Faso. Cette loi au champ d'application
vaste62, est venue combler le déficit juridique en
règlementant l'utilisation des biotechnologies pour ainsi
60 Décret n°
2004-262/PRES/PM/MECV/MAHRH/MS du 18 juin 2004 portant adoption de
règles nationales en matière de sécurité en
biotechnologie.
61 Conférence internationale sur «
l'exploitation de la science et de la technologie pour accroître la
productivité en Afrique : perspectives ouest africaines »
Ouagadougou, 21-23 juin 2004.
62 La loi couvre les produits issus des
biotechnologies modernes ainsi que, toutes les opérations ou utilisation
des OGM (mise au point, expérimentation, diffusion, stockage,
élimination, destruction, mouvements transfrontières et
transit.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
minimiser leur impact négatif
éventuel63. La loi soumet les opérations relatives aux
OGM, à une autorisation préalable mais également au
respect des mesures de biosécurité une fois l'autorisation
acquise. Elle institue également, une double responsabilité,
civile et pénale, pour ainsi contraindre à plus de respect des
mesures édictées. La loi de 2006 se présente comme une
réponse aux inquiétudes émises quant aux dangers
réels ou potentiels des biotechnologies au Burkina Faso. Cette loi est
l'une des rares, à prendre en compte le principe de précaution
explicitement64
« l'absence de connaissances scientifiques ne doit pas
être interprétée comme un indicateur de linexistence de
risque ». La loi impose une évaluation des risques pour toute
activité relative aux OGM pour identifier les risques probables et
évaluer les probabilités que ces risques se produisent. Aussi il
faut gérer les risques identifiés, analyser les coûts et
bénéfices liés aux risques identifiés en
considérant les alternatives à l'introduction des OGM. Cette
prise en considération du principe de précaution a conduit
à la mise en place des institutions de gestions des biotechnologies.
Au-delà de cette loi, d'autres textes juridiques viennent
compléter le dispositif national. Ce sont entre autres :
- La loi portant ratification du plan d'action mondiale sur les
ressources phytogénetiques pour l'alimentation et l'agriculture ;
- La loi de 2OO4, portant ratification des statuts de l'Agence
Africaine de Biotechnologies (AAB) ;
- La loi sur les semences (2005) ;
- Les conventions de recherche pour l'expérimentation du
coton Bt et Vip, signées avec MOSANTO et SYNGENTA en 2003 ;
- La loi sur les contaminations des champs etc.
B) L'absence d'institutions
adéquates
L'entrée du Burkina Faso dans l'ère des
biotechnologies modernes s'est opérée en l'absence d'un cadre
scientifique et technique adéquat65.
63 Garané. A et Zakané. V, droit de
l'environnement burkinabè, précité, p.152.
64 Voir articles 15-16 de la loi de 2006
65 Garané. A et Zakané. V, droit de
l'environnement burkinabè, précité, p.150
50
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DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Cette absence d'organes spécialisés dans le domaine
des biotechnologies n'occulte pas l'existence dans le pays de nombreux cadres
de recherches scientifiques. En effet, depuis longtemps le Burkina Faso s'est
inscrit dans une dynamique de programme action dans ses politiques de
développement endogène. De nombreux laboratoires sont mis en
place ainsi que des centres de recherche comme le CNRST et l'INERA. Ce dernier
institut a d'ailleurs beaucoup contribué à l'application des
biotechnologies conventionnelles à travers le système de
l'amélioration des semences et des embryons. Il a aussi servi de cadre
de lancement des biotechnologies modernes car c'est sur deux de ses stations
que cette expérimentation a débuté. Mais, malgré
l'existence de nombreux laboratoire travaillant dans le domaine des
technologies, force est de reconnaitre qu'il ressort d'une évaluation de
l'état des lieux en 2004 que « la capacité en
biotechnologie du Burkina Faso reste globalement faible en raison de l'absence
d'activités de recherches susceptibles de rendre opérationnel le
personnel »66. Cette lacune institutionnelle constitue une
grosse faiblesse dans l'application des biotechnologies dans la mesure
où cette technologie nécessite de grandes capacités
scientifiques. L'évaluation des risques potentiels avérés
et ceux non avérés, l'étude comparative des rapports
coûts/avantages, doivent être une routine dans l'utilisation des
biotechnologies modernes, pour impulser un développement propre,
respectueuse des valeurs sociales des populations et prenant en compte la
conservation de la diversité biologique et la protection de la
santé humaine.
Cependant, avec l'avènement de la loi de 2006 portant
régime de sécurité en matière de biotechnologie au
Burkina Faso, le déficit institutionnel a quelque peu été
corrigé. En effet, le décret a consacré la création
de plusieurs organes en matière de sécurité en
biotechnologie. Conformément à l'article 19 du protocole de
Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques, la loi a mis
en place un cadre institutionnel avec un organe délibérant
à savoir l'Agence Nationale de Biosécurité (ANB). Cet
organe fait office d'autorité compétente en matière de
biosécurité. Il collabore avec des organes consultatifs à
savoir ; l'Observatoire National de
66 Institut du sahel. Etat des lieux de la
règlementation, des directives, de l'autorisation et de la circulation
des OGM dans le Sahel, mai 2004, p.13.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Biosécurité (ONB) chargé de la veille et de
l'éducation en matière de biosécurité67
; le Comité Scientifique National de Biosécurité (CSNB)
chargé de l'évaluation des risques et enfin le Comité
Scientifique Interne de Biosécurité (CSIB) institué au
sein des départements ministériels concernés par la
question.
Il y a donc à partir de la loi de 2006, une floraison
d'institutions à telle enseigne que la question de leur
effectivité se fait de plus en plus présente. Cette loi corrige
également les errements législatifs des années 2003-2004,
ce qui laisse croire à l'application de procédures plus
démocratiques que par le passé.
Paragraphe II : l'absence de procédures
démocratiques
L'avènement des biotechnologies modernes, notamment des
organismes génétiquement modifiés (OGM) ne laisse personne
indifférente. Les OGM sont restés longtemps un sujet de
controverses entre les pays et à l'intérieur des pays. Au Burkina
Faso l'entrée des biotechnologies modernes s'est faite dans conditions
très peu démocratiques. Les biotechnologies modernes n'ont pas
donné lieu à un véritable débat public (A) et il
n'a pas été procédé à une étude
d'impact environnemental préalable à cette introduction (B).
A) L'absence de débat public
L'introduction au Burkina Faso des biotechnologies à
travers le coton transgénique s'est opérée grace à
une procédure administrative unilatérale. Cette introduction des
OGM n'a pas été précédée d'un débat
public national sur les enjeux de ces OGM. L'argument en défense de
cette procédure serait lié au domaine d'application de ces OGM.
En effet, les OGM introduits sont des OGM non alimentaires, ce qui diminue les
risques directs sur la santé humaine. Cet argument est bien trop faible
et ne semble pas résister aux différentes critiques pertinentes
sur la question. Faire le choix des biotechnologies modernes c'est quelque part
un choix de société, une orientation des habitudes de la
population. Pour ce faire, le public doit bénéficier d'une large
information à travers des consultations nationales. La
67 Dans ce cadre, l'ONB organise des séances de
formation et de sensibilisation des responsables des collectivités
locales pour amener une responsabilisation à la base. Les
dernières séances, organisé en 2010 ont concerné la
région du centre-est et se sont tenues à Bagré et
Tenkodogo (deux villes du centre-est du Burkina Faso).
52
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
bonne information du public doit consister en la mise à sa
disposition de l'information sur les avantages et les inconvénients des
OGM ainsi que les avantages et les inconvénients des solutions
alternatives. Etant bien informé, le public sera à même
d'assurer une participation aussi bien quantitative que qualitative au
débat.
Le recours aux OGM a été motivé par des
considérations d'intérêt national qui impliquent un choix
de société en raison des impacts d'ordre éthique, social
et économique sur les populations, mais également de leurs effets
potentiels sur la santé humaine et l'environnement68. Pour ce
faire, une consultation publique nationale, aurait eu l'avantage d'harmoniser
les points de vues et surtout l'examen d'alternatives aux OGM, notamment
l'adoption d'un échéancier ou un moratoire afin d'organiser une
entrée consensuelle, collective, échelonnée et
transparente dans les biotechnologies modernes.
L'absence d'une telle procédure est une porte ouverte
à toutes les spéculations et supputations sur les intentions des
autorités administratives dans les autorisations accordées pour
la phase d'expérimentation en milieu confiné. Heureusement, ce
vide a été très vite comblé par la loi de 2006 sur
la gestion des risques biotechnologiques. Cette loi soumet les activités
biotechnologiques à deux sortes d'obligations. Premièrement,
toute personne qui désire procéder à une opération
relative aux OGM doit notifier son intention à l'autorité
nationale compétente en matière de
biosécurité69. Cette notification doit comporter la
documentation et informations nécessaires pour une bonne
appréciation du dossier de la demande. Deuxièmement, il
pèse sur l'autorité nationale compétente, l'obligation de
susciter la participation du public. Elle doit porter toute information
importante et non confidentielle au public70. Il peut s'agir de
simples publications de l'information ou d'une consultation publique sur la
question et ce, à la charge du notifiant. Les consultations publiques
telles qu'organisées par la loi, ont un caractère
démocratique dans la mesure où elles consistent en des
échanges avec les populations sur la question, leur permettant de faire
leur choix en étant bien informé des avantages et
inconvénients sur la santé humaine et l'environnement.
68 Garané. A et Zakané. V, droit de
l'environnement, précité, p.149
69 Voir article 19 de la loi
précitée.
70 Voir article 23 de la loi
précitée.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
La loi permet aussi au public de faire des commentaires et
observations sur le projet d'utilisation des OGM à lui soumis.
La loi prend en compte le droit à l'information
prôné par certaines conventions internationales en matière
de protection de l'environnement ou des droits de l'homme. Consacrant le
principe de précaution, la loi de 2006, par sa règlementation du
droit à l'information et celui de la participation du public, confirme
la nécessité de l'instauration de procédures
démocratiques dans l'application de ce principe et surtout une
protection globale et satisfaisante de l'environnement et de la santé
humaine. Cependant cette protection passe également par
l'évaluation des risques potentiels.
B) L'absence d'étude d'impact
environnemental
La mise en ~uvre de grands projets emportant des
conséquences probables sur la santé humaine et l'environnement,
doivent nécessairement faire l'objet d'une évaluation des
risques. Cette évaluation des risques se fait généralement
à travers une étude d'impact environnementale, qui est l'outil le
plus intégré et le plus participatif de l'évaluation des
risques. Il va s'en dire que la question des OGM, posant un problème de
choix de société, devait faire l'objet d'une évaluation
des risques avant leur autorisation. Cela était d'autant plus
nécessaire, que le Burkina Faso possédait déjà des
règles en la matière avant même l'avènement des
biotechnologiques modernes. L'étude d'impact environnemental a pour
objectif de prévenir les dommages environnementaux. Elle
détermine les conséquences négatives qu'une
activité envisagée est susceptible d'avoir sur l'environnement et
la santé humaine. Le code de l'environnement71 consacre la
nécessité de procéder à cette évaluation des
risques avant de telles activités. Pour permettre une bonne application
des dispositions du code de l'environnement de 1997, un décret a
été adopté. Il s'agit du décret n°
2001-342/PRES/PM/MEE du 17 juillet 2001 portant champ d'application, contenu et
procédures de l'étude d'impact et de la notice d'impact sur
l'environnement. Ce décret consacre les mesures, procédures et
règles
71 Le code de l'environnement de 1997définie
l'étude d'impact environnemental comme étant « une
étude à caractère analytique et prospectif
réalisée aux fins de l'identification et de l'évaluation
des incidences sur l'environnement d'un projet ou programme de
développement ».
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DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
en matière d'étude d'impact environnemental. Cette
étude comporte deux volets ; un volet purement technique et un volet
enquête publique. Pourtant, les OGM ont fait une entrée presque
clandestine au Burkina Faso. Aucune étude d'impact intégrant le
public n'ayant été accomplie. Certes, les expérimentations
se faisaient sous le contrôle voire sous les auspices d'un centre de
recherche national (INERA), mais ce suivi scientifique des chercheurs locaux
s'est réduit à l'étude des données en cours
d'exécution des expérimentions. Cette étude aurait due se
tenir en amont avant la délivrance des autorisations
d'expérimentation. Aussi, l'on peut se poser des questions sur les
capacités des institutions nationales (à l'époque et
même de nos jours) d'évaluer les risques des activités d'un
secteur tout à fait nouveau que certains pays développés
ont du mal à maîtriser. Cependant une tentative
d'évaluation des risques en amont aurait eu le mérite
d'éclairer l'opinion publique sur les intentions des
autorités.
Néanmoins, et ce depuis l'avènement de la loi de
2006, il y a un encadrement plus dynamique. En effet, la loi impose une
évaluation des risques pour toute activité relative aux OGM.
L'évaluation des risques à pour objectif d'identifier les risques
probables, d'évaluer les probabilités que ces risques se
produisent, de gérer les risques identifiés, d'analyser les
coûts et bénéfices liés aux risques
identifiés, de considérer les alternatives à
l'introduction d'OGM, ainsi que le principe de précaution. Bien que
cette loi semble privilégier la prévention, elle considère
aussi le principe de précaution comme une attitude de
préservation et de conservation de l'environnement et de la santé
humaine.
De nos jours, on peut dire que l'encadrement juridique de
l'étude d'impact environnemental permet de rassurer la population sur la
prise en compte des intérêts de la nation dans la mise en ~uvre
des projets et programmes susceptibles de produire des effets négatifs
sur la santé humaine et l'environnement. La loi sur la
biosécurité vient quelque peu dissiper les controverses qui ont
vue le jour avec l'avènement des OGM aux Burkina Faso.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Section II : de la controverse des points de vue sur
le respect du principe de précaution dans les biotechnologies au Burkina
Faso.
Les biotechnologies modernes constituent sans aucun doute
l'orientation politique qui a suscité le plus de controverses en
début du 21e siècle au Burkina Faso. De nombreuses
questions étaient soulevées relativement aux enjeux de cette
technologie nouvelle mal maîtrisée en Afrique et très
décriée en Europe. Les avis divergent (sur la prise en compte du
principe de précaution), selon qu'on est dans le gouvernement ou proche
de celui-ci ou selon qu'on est dans la société civile. Pour les
premiers, il y a un bon encadrement et une prise en compte réelle du
principe de précaution dans l'application de cette nouvelle technologie
(paragraphe I). Pour les seconds, le principe qui constitue est droit de
l'homme n'a pas reçu une bonne application (paragraphe II).
Paragraphe I : du point de vue du
gouvernement
Pour le gouvernement, faire le choix des biotechnologies modernes
est logique et la phase d'application est conduite avec un suivi rigoureux. Il
a bâti son argument sur deux idées essentielles : d'une part, le
choix des biotechnologies modernes est un choix qui s'imposait compte tenu de
l'état de développement du pays (B). D'autre part et en ce qui
concerne l'application des biotechnologies modernes, de nombreuses mesures ont
été prises pour garantir la sécurité et
gérer les risques éventuels (A)
A) Une prise en compte du principe de précaution
dans la politique des biotechnologies au Burkina Faso
La faible maîtrise technologique du Burkina Faso en
matière de biotechnologies modernes, combinée aux incertitudes
scientifiques sur les dangers réels ou potentiels des biotechnologies
modernes, rendent primordial l'application du principe de précaution
dans toute approche concernant cette technologie. Pour le gouvernement
burkinabè, cette réalité est indéniable. C'est
d'ailleurs ce qui l'a conduit à mettre en place toute une politique en
matière de biotechnologies en
56
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
général et particulièrement des OGM. Loin de
méconnaitre le principe de précaution, cette politique
intègre ce principe fonctionnel aussi bien au niveau juridique qu'au
niveau institutionnel.
Au niveau juridique, il faut noter la mise place d'un arsenal
juridique en matière d'OGM. En effet, il existe un cade légal et
réglementaire comprenant aussi bien des règles nationales que des
règles internationales. Ces règles ont pour objectif d'assurer la
sécurité en biotechnologies modernes, une recommandation du
protocole de Cartagena sur la prévention des risques
biotechnologiques.
Les textes légaux et règlementaires, pertinents
pour les biotechnologies et la biosécurité sont les
suivants72 :
· les textes légaux:
- la constitution du Burkina Faso, qui consacre
la protection de l'environnement comme une nécessité absolue,
- le code de l'environnement, qui repose sur la
gestion et la protection de l'environnement, la lutte contre les formes de
pollution et l'amélioration des conditions de vie des populations,
- le code forestier, dont la finalité
est d'assurer la compatibilité de la protection des ressources
forestières avec la satisfaction des besoins des populations en produits
forestiers,
- le code de santé publique, qui fixe
les normes pour les soins et une alimentation sans danger pour la
population,
- la loi sur le contrôle phytosanitaire
et la réglementation des conditions d'importation des
végétaux, produits d'origine végétale ou animale et
autres matières entrant ou sortant du Burkina Faso, qui
légifère la transaction des organismes vivants sur le territoire
national;
-la loi de 2006 sur la gestion des risques
biotechnologiques ;
· les textes réglementaires:
- décret portant sur l'interdiction de la
culture de toute espèce ou variété de cotonnier, autre que
celle dont les semences sont fournies par les organismes officiels,
72 Comité National de
Biosécurité, cadre national pour la prévention des risques
biotechnologiques au Burkina, janvier 2005. (Source partielle)
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
- décret portant création du
laboratoire national de santé publique, dont la compétence peut
être étendue à l'évaluation des risques,
- décret portant réglementation de
la circulation et de la sortie du mil, du sorgho et du maïs au Burkina
Faso,
- décret portant établissement de
règles nationales en matière de sécurité en
biotechnologie, dont l'objectif est de contribuer au Burkina Faso à
assurer un degré adéquat de protection pour le transfert, la
manipulation et l'utilisation 24 sans danger des organismes
génétiquement modifiés résultant de la
biotechnologie moderne qui peuvent avoir des effets défavorables sur la
conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique, et
comporter également des risques pour la santé humaine,
- kiti (décret) portant procédure
d'homologation des spécialités agropharmaceutiques et des
spécialités assimilées,
- Raabo (arrêté) portant
réglementation de la sortie de prélèvements biologiques du
Burkina Faso,
- arrêté portant contrôle de
la qualité des produits au Burkina Faso,
- arrêté fixant la liste des
produits soumis au certificat national de conformité.
· les conventions internationales et accords
internationaux et régionaux:
- la Convention sur la Diversité
Biologique dont un des objectifs est d'assurer l'accès aux ressources
génétiques, matières premières pour la
biotechnologie moderne,
- le Protocole de Cartagena sur la
prévention des risques biotechnologies, dont l'objet est de
prévenir les risques potentiels liés aux mouvements
transfrontières des Organismes Génétiquement
Modifiés, notamment les semences, les plantes et les animaux
transgéniques, qui affectent l'environnement et la santé
humaine,
- la Convention Internationale sur la Protection
des Végétaux, qui a pour objectif d'établir une action
commune et efficace contre la diffusion et l'introduction des ennemis des
végétaux et des produits végétaux,
- le Traité international sur les
Ressources Phytogénetiques pour l'Alimentation et l'Agriculture, dont un
des objectifs a trait à l'accès à la technologie, y
compris la biotechnologie,
- le Codex alimentarius (de la FAO) dont l'objet
consiste à protéger le consommateur des effets pervers des
produits alimentaires,
- les Accords de l'Organisation Mondiale du
Commerce (OMC), qui s'appliquent tacitement aux produits du génie
génétique.
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SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
· Autres instruments régionaux:
La Loi Modèle Africaine sur la Sécurité en Biotechnologie
de l'Union Africaine, qui vise l'harmonisation des lois africaines sur le
développement et l'utilisation des OGM. Cette loi cadre a
été adoptée en 2001.
Parmi ces textes légaux et règlementaires, la loi
sur la gestion des risques biotechnologiques est celle qui offre le meilleur
cadre au plan national. Elle organise un cadre de biosécurité
intégrant explicitement en ces articles 15-16, le principe de
précaution. Elle intègre également le principe de
prévention qui est le principe phare du droit de l'environnement
burkinabè.
Au niveau institutionnel, il y a la mise en place de
stratégies et d'organes de gestion des biotechnologies au Burkina Faso.
Pour le gouvernement, ce processus s'est mené de façon
participative et implique les acteurs étatiques, les
collectivités locales, les organisations paysannes, les organisations
non gouvernementales, les associations locales, les opérateurs
privés et les organismes de coopération. Cette envie de
transparence, de participation et d'efficacité des mécanismes de
gestion
des risques biotechnologiques a conduit à la
création de structures telles que : l'Agence national de
biosécurité (ANB) ; l'Observatoire National de
Biosécurité (ONB) ; le Comité Scientifique National de
Biosécurité (CSNB) et le Comité Scientifique Interne de
Biosécurité (CSIB). A ces structures nouvellement
créées, il fait ajouter les structures anciennes telles l'INERA,
le CNRST...
Pour le gouvernement, l'ensemble des mesures juridiques et
institutionnelles mises en place sont à même d'encadrer
efficacement les biotechnologies modernes aux Burkina Faso. A ces arguments, il
faut ajouter l'importance que peut jouer les biotechnologies modernes dans le
développement du pays.
B) La priorité entre développement et
principe de précaution
L'application du principe de précaution dans les pays
sous-développés pose souvent la question de priorité.
Priorité entre l'application d'un principe très rigoureux et
coûteux considéré souvent comme un frein au progrès
scientifique, au développement tout court et, les aspirations
quotidiennes de développement.
Pour les autorités, il ne fait aucun doute que les
biotechnologies modernes représentent un moyen puissant pour
répondre aux besoins des populations burkinabè. En effet, le
Burkina Faso fait face chaque année à un déficit de la
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
production céréalière. Cette faiblesse de la
production agricole en général est liée à la
faiblesse des moyens de production au niveau technique et à la
pauvreté grandissante des paysans. Les biotechnologies modernes
apparaissent au vu de cette situation comme un espoir dans un Burkina Faso
où les ressources naturelles ne permettent pas de satisfaire les besoins
croissants de la population et ce pour plusieurs raisons. Elles permettent :
- d'augmenter la production dans les secteurs agricole,
forestier, halieutique et de l'élevage, par l'amélioration
génétique,
- de réduire la pression sur l'environnement, en raison de
la faculté de certains de leurs produits, destinés à la
culture, d'augmenter les rendements,
- de minimiser la pollution de l'environnement, par la
réduction de l'utilisation des pesticides chimiques nuisibles,
- d'augmenter les capacités de soins de santé et de
protection sanitaire par les traitements avec des produits pharmaceutiques et
de vaccination qui en sont issus, - de réduire les investissements
financiers dans la production végétale grâce à
l'utilisation des OGM dotés de toxine en lieu et place des pesticides
chimiques.
Les avantages des biotechnologies sont donc nombreux et
nécessaires pour permettre au Burkina Faso, d'atteindre l'autosuffisance
alimentaire, base de toute dynamique de développement. Il va s'en dire
que l`application du principe de précaution, bien que nécessaire
doit être examiné de manière à le concilier avec les
ambitions de développement du pays. Le principe de précaution
apparait comme un luxe pour le Burkina Faso. Ce principe doit
s'apprécier en fonction du niveau de développement des Etats.
Cela permettra aux Etats pauvres d'éviter d'être l'objet d'une
colonisation scientifique ou idéologique. Enfin, il faut remarquer que
les farouches opposants aux biotechnologies sont pour les plus part du temps
issus des pays développés. Pour critiquer la position de ces
écologistes, il leur est très souvent opposé l'argument
géographique. On estime qu'ils sont mal placés pour juger des
choix des populations des pays pauvres, eux qui ne souffrent pas de faims et de
maladies. Le choix des biotechnologies modernes est donc très logique
pour le Burkina Faso malgré les critiques de cette politique par les
membres de la société civile.
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SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Paragraphe II : du point de vue des organisations de la
société civile
Du point de vue des acteurs de la société
civile, l'entrée du Burkina Faso dans les biotechnologies modernes est
hasardeuse. Les dispositions sécuritaires n'étaient pas
réunies et la population n'a pas été
préparée à l'avènement de cette technologie. Cela
dénote une non application ou une mauvaise application du principe de
précaution. Pourtant ce principe doit recevoir ici une
application rigoureuse à un double titre. Ce principe constitue un droit
fondamental de l'homme (B) et son application est d'autant plus importante que
les perceptions des risques biotechnologiques sont inquiétantes (A).
A) Perception sur les risques
biotechnologiques
Les perceptions des acteurs tels que les producteurs et les
organisations de la société civile sur les risques des
biotechnologies peuvent être classées en cinq groupes73
:
- les risques socio-économiques,
- les contraintes règlementaires, politiques et
stratégiques,
- les risques environnementaux,
- les risques relatifs à la santé humaine ainsi
que
- les considérations éthiques
Au niveau socio-économique, les risques sont liés
à l'accès des producteurs aux semences. Les semences ne sont pas
réutilisables, alors que leur coût d'achat au près des
firmes étrangères reste élevé. Cela ne permet pas
à tous les producteurs de payer ces semences à chaque campagne
agricole. Notons que la majorité des producteurs du Burkina Faso ne font
que des exploitations familiales et que les exploitations familiales sont le
socle de la sécurité alimentaire74 dans la mesure
où ces exploitants familiaux ne produisent que des
céréales.
73 Secrétariat du Club du Sahel et de l'Afrique
de l'Ouest (CSAO/OCDE), biotechnologie agricole et transformation de
l'agriculture ouest-africaine : synthèse de la consultation
régionale des acteurs ouest-africains, septembre 2006.
74 3D--Trade-Human Rights-Equitable Economy, rapport
soumis au comité des droits de l'enfant, 53e groupe de
travail de presession, octobre 2009.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Au niveau règlementaire, politique et stratégique,
les risques sont de deux ordres. Il y a d'une part, les risques liés aux
enjeux du commerce dans la mesure oüse pose des
problèmes de droit de brevetabilité, ce qui risque fort de mettre
en
marge les acteurs locaux. D'autre part, il y a l'épineuse
question de l'effectivité de l'encadrement juridique et
institutionnel.
Au niveau environnemental, la contamination
génétique par transfert de gènes modifiés vers des
souches primaires locales, constitue une des principales craintes. Tirant les
leçons des exemples concrets de contamination observées dans
d'autres continents, les acteurs redoutent fortement une perte de la
biodiversité, mais surtout une désorganisation de
l'écosystème et la disparition à terme du patrimoine
génétique locale. Aussi le transfert de gènes de
résistance à certains insectes au niveau des plantes peut aussi
constituer un danger pour d'autres insectes utiles non visés, dont leur
destruction entraînerait un déséquilibre écologique.
C'est notamment le cas des abeilles dont le rôle pollinisateur est
essentiel pour la reproduction de nombreuses espèces
végétales.
Au niveau de la santé humaine, les supputations sont
relatives aux risques de maladies cancérigènes à long
terme. Aussi des inquiétudes existent relativement aux risques pour les
consommateurs de développer des résistances aux antibiotiques
surtout dans un pays comme le Burkina Faso où ces médicaments
sont très utilisés notamment dans le traitement du paludisme.
Au niveau de l'éthique, les préoccupations des
acteurs sont relatives à la possibilité de transfert de
gènes entre espèces animales, végétales et
humaines. Ces considérations sont pour la plus part basées sur
les religions.
D'une façon générale, les biotechnologies
suscitent beaucoup de questions qui n'ont pas toujours de réponses
adéquates75. Ces questions en suspens renforcent la
conviction des acteurs de la société civile de
l'impérieuse nécessité d'appliquer le principe de
précaution, considéré par eux comme un droit de l'homme,
dans les biotechnologies.
75 Exemples de quelques questions en suspens : quel
est le niveau d'engagement du Burkina Faso pour assurer sa souveraineté
nationale en termes de capacités scientifiques en biotechnologies ? N
n'y a-t-il pas de risques de disparitions des exploitants familiaux ? Comment
le Burkina Faso compte gérer le problème de droit de
propriété intellectuelle ? Etc.
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DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
B) Principe de précaution, un droit fondamental de
l'homme en matière de biotechnologies modernes
Pour les détracteurs des biotechnologies modernes, cette
technologie constitue une forme de colonisation. Une colonisation scientifique
et culturelle. Pour eux, le niveau de développement du Burkina Faso ne
lui permet pas d'être autonome dans la maîtrise de cette
technologie et même s'il en avait les capacités techniques, les
conventions avec les firmes étrangères de promotion des
biotechnologies modernes l'en empêcherait. Le pays doit constamment se
faire assister par les dépositaires de cette technologie, ce qui limite
sa capacité d'opérer des choix libres. Aussi, ces
biotechnologies, constituent une forme de colonisation
culturelle car elles poussent les paysans à abandonner
leur méthode culturale pour essayer de s'approprier des techniques qui
leurs sont complètement étrangères. Or les techniques de
ces firmes sont complexes et doivent être appliquées de
façon stricte pour assurer un bon rendement. Cela parait difficile
compte tenu du taux élevé de l'analphabétisme au sein des
producteurs. En plus des difficultés liées à la
maîtrise des techniques de production, il faut ajouter la
dépendance du pays vis-à-vis des firmes industrielles dans
l'acquisition des semences.
Ce tableau très peu reluisant quant à l'avenir de
l'agriculture burkinabè, ajouté aux incertitudes quant à
l'innocuité des biotechnologies modernes et l'ensemble de ses produits
dérivés sur la santé humaine et sur l'environnement,
affirment avec force la nécessité d'une protection de la
population à travers des mesures de précaution. La constitution
du Burkina Faso énonce la nécessité de protéger
l'environnement et la santé des populations. De même plusieurs
textes, nationaux et internationaux en vigueur au Burkina Faso, font
état du lien entre développement durable et protection de
l'environnement. Le principe de précaution, consacré aussi bien
par les dispositions internes que celles internationales, offre cette
protection fonctionnelle de l'environnement sans compromettre les efforts de
développement. Ce principe protège les intérêts des
Etats pauvres notamment par le renversement partiel de la preuve, mais
également permet d'instaurer à l'intérieur des Etats une
démocratie participative assez dynamique.
Pour les détracteurs des OGM, ce principe est une
nécessité, un droit fondamental dont la mise en cuvre ne doit
être conditionnée ou opposé à de
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
quelconques velléités de développement.
On ne peut, au nom du développement mettre en péril la
santé humaine et la diversité biologique. Cette position a
été défendue par le professeur Jean Didier Zongo,
président de la coalition de veille face aux OGM, lors d'une sortie
médiatique contre la décision du gouvernement d'autoriser la
production à grande échelle du coton
transgénique76. Pour lui, la décision gouvernementale
viole les lois en matière de biosécurité et il convient de
tirer une sonnette d'alarme pour amener la population à prendre ses
responsabilités et exiger le respect des droits conférés
par les textes légaux.
Pour les acteurs de la société civile, il est
claire que le principe de précaution est le principe qui peut le mieux
protéger la population contre les effets néfastes des
biotechnologies modernes en général et les OGM en particulier.
76 Journal l'opinion n° 472 du 25 au 31 octobre
2006.
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
U oNcLusioN g1kN1kRAL1
La prise en compte de mesures de précaution dans la
protection de l'environnement et de la santé a toujours depuis longtemps
existé dans le monde. Ces mesures étaient l'émanation de
politiques internes des Etats77 ou la résultante de
politiques sectorielles78. Ces mesures de précaution se sont
transformées par la nécessité des choses, en principe qui
a connu sa consécration international dès 1992 avec les
conventions du cycle de RIO. Cette consécration internationale qui s'est
faite par l'entremise de sources conventionnelles et des sources de droit
souple, s'est poursuivie après RIO, par d'autres dispositions
conventionnelles internationales, régionales et sous-régionales
mais aussi par des dispositions internes des Etats.
Le Burkina Faso n'est pas resté en marge de ce dynamisme
international. D'ailleurs sa constitution, qui est antérieure à
la consécration internationale généralisée du
principe de précaution, intégrait ne serait ce qu'implicitement
le principe. En consacrant dans son préambule la nécessité
de protéger l'environnement et en établissant un lien entre la
protection de l'environnement et le développement, la constitution a
suscité la prise de nombreux textes intégrant des mesures de
précaution. C'est ainsi qu'on peut constater un foisonnement normatif en
matière de protection de l'environnement. Mais, force est de reconnaitre
que ces textes regorgent de beaucoup de lacunes. Il y a une faible prise en
compte du principe de précaution par ces textes qui se
réfèrent le plus souvent au principe de prévention.
Néanmoins, il faut observer que la faiblesse des textes
légaux n'emporte pas vide juridique en matière de
précaution. Les quelques règles internes sont
complétées par une panoplie d'instruments internationaux
consacrant explicitement et implicitement le principe de précaution.
Aussi, il parait important de souligner la faible prise en
compte du principe de précaution dans les plans et programmes aussi bien
en matière de conservation et de préservation de la
diversité biologie que de la protection de la santé humaine.
Ces
77 Cf. droit allemand de l'environnement
78 Cf. convention de Vienne du 22 mars 1985 et son
protocole additionnel de septembre 1987.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
différentes politiques bien que nombreuses,
n'intègrent pas suffisamment le principe de précaution compte
tenu de la technicité qui entoure ce principe. Le pays manque de moyens
logistiques pour accompagner scientifiquement la mise en ~uvre du principe,
évaluer méthodiquement les risques, faire des études
comparatives des coûts et avantages liés aux risques.
La mise en ~uvre peu satisfaisante du principe de
précaution dans les textes et politiques a lancé le débat
sur la place de principe dans le développement d u Burkina Faso. Bien
que considéré comme un principe anti-progrès, le principe
de précaution a trouvé un écho favorable au Burkina Faso
du moins quant à sa nécessité dans le développement
du pays. Il est considéré unanimement comme un moyen d'assurer un
développement participatif et éclairé intégrant
tous les acteurs de la vie sociale. Il permet une prise de risque
mesurée et surtout permet aux Etats faibles de se protéger
vis-à-vis des Etats développés. Tout compte fait, il reste
réelle la difficulté de l'application du principe de
précaution au Burkina Faso. La technicité de ce principe fait
qu'il est difficile à appréhender par une population à
majorité analphabète. Aussi, la pauvreté et ses nombreuses
conséquences sont des facteurs qui poussent la population à
ignorer les règles de protection de l'environnement.
C'est dans ce contexte peu enviable que l'avènement des
OGM au Burkina Faso a soulevé d'énormes controverses. Cette
entrée dans les OGM s'est produite dès 2003 alors qu'aucun cadre
juridique n'existait, aucune institution de gestion des risques n'était
mise en place. Ce n'est qu'en 2004 puis en 2006 que ce cadre a
été réellement mis en place à traves un
décret puis une loi. Il faut remarquer que l'entrée du Burkina
Faso dans les biotechnologies modernes s'est fait dans la clandestinité,
ni le peuple dans son ensemble, ni les organisations de la
société civile, n'ont été associés dans le
circuit de la décision d'autorisation des
expérimentations. Ce défaut de participation
semble aujourd'hui quelque remédié car des associations de la
société civile comme la Ligue des Consommateurs du Burkina (LCB)
sont membres de l'Agence National de Biosécurité (ANB). Aussi, de
nombreux ateliers de formations sont organisés à travers le pays
à l'attention des élus locaux
pour permettre à ces derniers de s'imprégner des
réalités des OGM et d'être à leur tour des maillons
de sensibilisation de la population. Toutes ces activités se justifient
par le désir du gouvernement de booster l'économie nationale
à travers les OGM
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SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
dans la mesure où cette technologie présente des
avantages quant au rendement des productions agricoles.
Par contre, pour les acteurs de la société civile,
le slogan est très souvent le même « les OGM d'accord,
mais précaution d'abord ». Pour eux, les OGM constituent un
potentiel danger aussi bien pour les hommes et les animaux, que pour
l'environnement dans la mesure ou la preuve de leur innocuité n'est pas
apportée. Il faut donc aller progressivement dans les OGM, voire
instaurer un moratoire pour permettre à la science de faire son travail,
mais aussi à la population de faire un choix libre en toute connaissance
de cause.
Au-delà de toutes ces controverses, se pose le
problème des moyens d'application du principe de précaution et
surtout de l'impact du principe dans l'économie nationale. Il ne faut
pas oublier le fait que l'usage très médiatique du principe de
précaution dénature son sens. Le principe de précaution
est invoqué tout azimut par des personnes qui ignorent très
souvent le sens et la portée du principe. Il est très souvent
confondu avec le principe de prévention qui convient lorsque les risques
sont avérés79.
Somme toute, que ça soit au Burkina Faso ou dans le
reste du monde, le principe de précaution divise l'opinion. En effet,
pendant que des pétitions sur la nécessité du principe de
précaution sont mises en ligne et que des personnalités comme le
ministre français de l'Ecologie Jean Louis Borloo, clament la
bonté de celui-ci, d'autres personnes s'attaquent à ce principe.
Pour eux, le principe de précaution empêche le progrès
comme le dit si bien un ancien ministre français (Claude
Allègre), «le principe de précaution est une arme contre
le progrès ».
Au vu des développements ci-dessus, on peut affirmer comme
l'a fait Léopold Cedar Senghor pour la colonisation de l'Afrique, que le
principe de précaution est mal nécessaire pour le monde de nos
jours en proie aux catastrophes de tout genre, conséquences des choix
que nous faisons tous les jours.
79 Cf. Affaire du volcan Islandais en matière
de sécurité du transport aérien.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
El ElU El EIEI U U U U U UU
- Ewald. E. A, le principe de précaution, PUF, 2001 pp.
6-7 ;
- Garané. A et Zakané. V, droit de l'environnement
burkinabè, collection précis de droit burkinabè, septembre
2008 ;
- Jean-Louis Beaudoin et Patrice Deslaurier, la
responsabilité civile, vol. 1- principes généraux,
éditions Yvons Blais, 2007. p. 159 ;
- Laraba Ily et Roger. G. Zangré : étude sur la
portée et l'impact de la mise en circulation des OGM et produits
dérivés au Burkina Faso, étude pour le projet PNUE-FEM
intitulé « développement d'un cadre national pour la
prévention des risques biotechnologiques au Burkina Faso », 2003
;
- Philippe Kourilsky, « principe de précaution
», rapport au premier ministre, 15 octobre 1999 ;
- Philippe Sands, principles of international environnement law,
1996, p. 208 ;
- Pierre-Marie Dupuy, responsabilité internationale des
Etats dans ses rapports avec la protection de l'environnement, mélanges
Kiss, p.279 ;
- Prieur Michel, droit de l'environnement, p. 66 & 112 ;
- Raphael Romi, « codex alimentarius : de l'ambivalence
à l'ambigüité » RJE XXV, 2001, pp. 203-207 ;
- Sifana I. Koné, évolution du droit de
l'environnement depuis 1992 pp. 324- 333 ;
- Sonja Boehmer-Christiansen, «the precautionary principle
in Germany-Enabling Government », in T. O'riordan et J. Cameron (dir),
Interpreting the precautionary principle, Earths can, 1994 pp. 33-35;
- Wales. Leach V, national park and wild life service, 1993, 81
LGERA 270; - Zakané Vincent, aspects contemporains du droit de
l'environnement en
Afrique de l'ouest et centrale, UICN, droit politique de
l'environnement, n° 69.
Autres sources :
- Communication de la commission des communautés
européennes sur le principe de précaution, Bruxelles, 2.2.2000
COM (2000) 1 final ;
68
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
- Journal l'opinion n° 472 du 25 au 31 octobre 2006 ;
- Rapport des travaux d'une table ronde organisée par le
Réseau Environnement de Genève, la précaution de Rio
à Johannesburg, 2002 ;
- Rapport du Secrétariat du Club du Sahel et de l'Afrique
de l'Ouest (CSAO/OCDE), biotechnologie agricole et transformation de
l'agriculture ouest-africaine : synthèse de la consultation
régionale des acteurs ouestafricains, septembre 2006 ;
- Rapport de la 3D-Trade-Human Rights-Equitable Economy, soumis
au comité
des droits de l'enfant, 53e groupe de travail de
presession, octobre 2009.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
El U El UE U U S U U U UU U U U
Remerciements 2
Introduction 3
Titre I : consécration et réception de principe de
précaution 7
Chapitre I : l'avènement du principe de précaution
en droit international 8
Section I: La consécration formelle du principe de
précaution au plan international 8
Paragraphe I : Les sources conventionnelles 8
Paragraphe II : Les sources souples 11
Section II : Les consécrations régionales du
principe 13
Paragraphe I : En Europe 14
Paragraphe II : En Afrique 16
Chapitre II : l'avènement du principe de précaution
au BURKINA FASO 18
Section I : La consécration juridique du principe de
précaution 19
Paragraphe I : La consécration par les sources nationales
19
A) La constitution 19
B) Les mesures législatives et règlementaires
21
Paragraphe II : Les instruments internationaux ratifiés
par le BURKINA FASO 23
A) Les instruments universels 24
B) Les instruments régionaux et sous- régionaux
(africains) 25
Section II : La consécration sectorielle du principe au
BURKINA FASO 26
Paragraphe I : En matière de conservation de la
diversité biologique 26
A) Une multiplicité de plans et programmes 26
B) La portée du principe de précaution dans les
plans et programmes 28
Paragraphe II : En matière de protection de la
santé humaine 29
A) Une plus grande place à la prévention en
matière de santé publique 29
B) Vers une meilleure prise en compte du principe de
précaution 30
Titre II : La mise en ~uvre du principe de précaution au
BURKINA FASO 33
Chapitre I : principe de précaution et
développement du Burkina Faso 34
Section I : Le rôle du principe de précaution dans
le développement du Burkina Faso 34
Paragraphe I : Un facteur incontournable dans le processus de
développement 34
A) Une prise de risque mesurée 35
B) Un dynamisme participatif 36
Paragraphe II : Un droit de l'homme 37
70
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
A) Une garantie des intérêts de la nation 37
B) L'instauration d'une démocratie participative 38
Section II : Difficile conciliation entre précaution et
développement 40
Paragraphe I : Difficultés liées au niveau de
développement du pays 40
A) La pauvreté 40
B) L'analphabétisme 42
Paragraphe II : Difficultés dans l'application des textes
et politiques 42
A) L'application des textes 43
B) Le suivi des politiques 44
Chapitre II : exemple illustratif de l'application du principe de
précaution : les biotechnologies modernes au BURKINA FASO 46
Section I : l'avènement des biotechnologies modernes au
Burkina Faso 47
Paragraphe I : l'absence d'un cadre juridique et institutionnel
préalable 48
A) L'absence de textes juridiques internes 48
B) L'absence d'institutions adéquates 50
Paragraphe II : l'absence de procédures
démocratiques 52
A) L'absence de débat public 52
B) L'absence d'étude d'impact environnemental 54
Section II : de la controverse des points de vue sur le respect
du principe de précaution dans les biotechnologies au Burkina Faso.
56
Paragraphe I : du point de vue du gouvernement 56
A) Une prise en compte du principe de précaution dans la
politique des biotechnologies au Burkina Faso 56
B) La priorité entre développement et principe de
précaution 59
Paragraphe II : du point de vue des organisations de la
société civile 61
A) Perception sur les risques biotechnologiques 61
B) Principe de précaution, un droit fondamental de
l'homme en matière de biotechnologies modernes 63
Conclusion générale 65
BIBLIOGRAPHIE 68
TABLE DES MATIERES 70