De l'art de gouverner par les lois et par la force d'après Nicolas Machiavel( Télécharger le fichier original )par Julien Bukonod Université Saint Augustin de Kinshasa - Gradué en philosophie 2009 |
III.1.3. Denis Sassou N'guesso (né en 1943)Présenter un Mandela ou un Gandhi comme exemple d'un chef d'État c'est mettre tout le monde à l'aise, mais faire autant avec un Sassou c'est susciter des tensions. Tout de suite l'on va évoquer ses dépenses somptueuses à Paris et ailleurs, son intérêt dans la politique gabonaise, etc. Pourtant, pour André Soussan, « l'histoire de cet enfant, Denis Sassou Nguesso, qui rêvait d'être instituteur mais qu'une injustice sociale écarta de l'enseignement, est exemplaire »113(*). Pour cet écrivain franco-danois, le chef d'État congolais (République du Congo), est un des hommes politiques pour qui l'honneur est la vertu cardinale ; une vertu qui constitue le pivot de l'enseignement politique de Machiavel comme le pouvoir en constitue celui de Hobbes114(*). Ainsi, Soussan le classe dans la trempe des Ben Gourion, des Sadate, des De Klerk, des Reagan, des Mandela... Sassou N'guesso est un homme d'un sourire franc et d'une rectitude morale, attentif aux besoins de son peuple. Comme militaire, N'guesso n'hésitait pas à dire non au président de la République « quand la vie des civils innocents était en jeu »115(*). Comme chef d'État, il se distingua plus, au cours de son deuxième mandat, lors de la Conférence Nationale Souveraine en 1991, avec son fameux « J'assume », un discours dans lequel il se fit lui-même bouc émissaire pour le bien de sa nation. « Il ne reste donc que moi aujourd'hui, dernier chef d'État que la démocratie pluraliste a trouvé pour répondre en leur nom (des dirigeants passés) de la gestion de notre pays par le système monopartite. Des compagnons de grande expérience et de profonde conviction vous ont dit leur part de vérité et tout le bien qu'ils ont fait. Le mal, je suis donc le seul à l'assumer et je l'assume à titre collectif et individuel, au nom de tous les dirigeants de ce pays qui ne sont plus »116(*). Les propos pertinents soulevés dans son discours d'investiture (29 août 2009), parlent exactement de ce que l'on attend d'un prince vertueux : « Convertissez-vous à la religion du travail bien fait. Visez tous et pour tout l'excellence. Jetez bas la médiocrité, la tricherie et toutes les autres anti-valeurs » ; « Qu'il soit clair pour tous que le peuple ne veut pas et ne doit pas être conduit sur le `Chemin d'Avenir'117(*) par des dirigeants sans scrupule ni vertu. De même que le peuple ne veut plus et ne doit plus être mené par des hommes qui ne donnent pas le meilleur d'eux-mêmes pour le servir » ; « Parmi les premières attentes de notre peuple, il y a l'espoir que s'arrête rapidement la dérive morale qui est en train de gangrener notre société. Je veillerai donc davantage avec rigueur à ce que les personnes que je nomme aux différentes fonctions d'État soient exemplaires et de bonne éthique, capables de faire respecter, au nom de l'autorité impartiale de l'État qu'elles incarnent, les lois et les règlements de notre pays. Tout manquement, toute faiblesse m'amènera à en tirer les conséquences » 118(*)... Aujourd'hui, la République du Congo a atteint le point d'achèvement des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE), sous sa gouvernance, et il est, d'après le Club des medias africains, l'homme politique de l'année 2009119(*). Dans les rues de certaines villes africaines, on entend dire de lui qu'« il aime bien son pays », tout comme aimait le dire le sagace Machiavel : « Moi, j'aime bien ma patrie plus que mon âme (...) »120(*). * 113 A. SOUSSAN, Un homme d'honneur. Le destin exceptionnel d'un enfant de la brousse, Paris, Ramsay, 2001, p. 287. * 114 Cf. M. REVAULT D'ALLONES, op. cit., p. 115. * 115 A. SOUSSAN, op. cit., p. 66. * 116 Ibid., p. 191. * 117 Son nouveau projet de société. * 118 D. SASSOU N'guesso, Disours d'investiture, Brazzaville, 29 août 2009. * 119Cf. N. NDONG, Denis Sassou N'guesso élu homme de l'année 2009, in http://www.brazzaville-adiac.com, visité le 28 avril 2010. * 120 N. MACHIAVEL, Lettre à Piero Vettori, cité par E. GARIN, Machiavel entre politique et histoire, s. l., Alia, 2006, p. 53. |
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