La recherche de l'Absolu dans la pensée de Plotin: dépassement du premier moteur d'Aristote( Télécharger le fichier original )par Jean Claude NGENZIRABONA NIYITEGEKA Université catholique d'Afrique Centrale/ institut catholique de Yaoundé - Licence en philosophie 2008 |
III.3. Convergences et divergencesBien que Plotin doive quelques considérations à Aristote, il se démarque considérablement de lui. Si déjà la métaphysique du Stagirite repose sur une vision du monde selon laquelle le principe premier est un acte pur, la pensée qui se pense et l'objet du désir, il invite ses interlocuteurs et ses lecteurs à s'efforcer de devenir semblables à ce principe moyennant la contemplation109(*). Au contraire, Plotin se déclare non comme un détenteur d'une doctrine quelconque, mais comme un homme qui se veut d'abord initiateur d'une vie nouvelle ou d'une activité d'un plus haut degré de la vie110(*). III.3.1. Les convergencesa) L'objectif commun et la même source d'inspirationChez Aristote, tout comme chez Plotin, la recherche du premier principe occupe une place privilégiée sous forme d'une volonté commune de saisir la réalité aussi bien intelligible que sensible. Ce principe ainsi découvert est unique et premier dans la série des êtres. De lui dépendent toutes choses et elles s'y rattachent nécessairement. Mais cette conception n'est pas le monopole d'Aristote et de Plotin puisqu'elle était déjà dans le projet de leurs prédécesseurs notamment Platon. On comprend donc pourquoi ils tirent leurs propres réflexions dans la pensée de Platon, soit pour s'y opposer, soit pour prolonger ses positions. Ici, c'est Plotin qui, puisqu'il discute et critique largement la conception d'Aristote, reste beaucoup fidèle à la pensée de Platon, d'où l'école néoplatonicienne dont il est l'initiateur. b) La transcendance du principe et l'idée du désirS'il y a encore d'autres ressemblances dans l'entreprise de la recherche du principe absolu chez Aristote et chez Plotin, c'est d'abord la transcendance du principe par rapport aux choses qui dépendent de lui, puis le désir qu'il suscite dans ces choses. En abordant donc le problème de savoir comment les choses se rattachent à leur principe, ils tirent des conclusions selon lesquelles l'exigence de ce principe aboutit d'abord à la nécessité de poser sa supériorité. Puis, puisqu'il est supérieur aux choses qui dépendent et viennent de lui, le principe attire pour ainsi dire toutes choses vers lui. Pour Aristote, séparé du monde qu'il contribue à mettre en mouvement, le Premier moteur est cause de ce mouvement en raison du désir qu'il suscite dans le monde111(*). Bien que la démarche soit toute autre, Plotin n'affirme pas le contraire. D'une part, toutes les choses tendent vers le principe, vers le Bien. Ce « Bien lui-même ne doit viser à rien et ne rien désirer »112(*) puisqu'il est le désirable par excellence. D'autre part, du fait que toutes ces choses dépendent et viennent du Bien ou de l'Un, ce dernier ne cesse de garder son caractère transcendantal et il demeure omniprésent dans toutes choses. Bref, chez Aristote tout comme chez Plotin, le principe absolu dont il est question demeure supérieur à toutes choses et il reste le principe de tout désir et de tout bonheur. En effet, ce principe absolu est ce dont toutes choses désirent et cherchent à rejoindre pour être vraiment ce qu'elles sont à la seule différence que chez Plotin le principe doive être nécessairement assimilé au générateur des êtres qui le désirent puisqu'il les engendre tous. Il cesse donc d'être seulement cause finale, mais il devient aussi une cause émanatrice dans la mesure où ce qui est engendré devra rester en contact avec son générateur. * 109 Cf. S. ROUX, Op. cit., pp. 187 - 189. * 110 Cf. Enn. IV 8 [6], 1, 1 - 10. * 111 Cf. ARISTOTE, Métaphysique Ë, 8, 1073 a - 1073 b 17. * 112 Enn. I 7 [54], 1, 13. |
|