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Ressources fourragères et représentations des éleveurs, évolution des pratiques pastorales en contexte d'aire protégée. Cas du terroir de Kotchari à  la périphérie de la Réserve de biosphère du W au Burkina Faso

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par Issa Sawadogo
Museum national d'histoire naturelle de Paris (ED 227) - Docteur du museum national d'histoire naturelle spécialité physiologie et biologie des organismes  2011
  

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3.5. Les autres activités socio- économiques

3.5.1. Les activités agricoles

L'agriculture est la première occupation en milieu rural dans la Tapoa (DREP-Est, 2010) où elle occuperait environ 93,7% de la population rurale (Sanou, 2005). A l'instar de l'élevage, c'est une activité conduite de manière itinérante et sur brûlis. Jusqu'en 1997, période de retour du coton dans la zone, cette agriculture était essentiellement orientée vers la subsistance. Les principales spéculations agricoles sont le sorgho, le mil, le maïs (qui a pris un grand essor avec la généralisation de la cotonculture). Le riz est en essor avec l'aménagement des bas-fonds entrepris par les projets (PADL/T, PICOFA). Les spéculations de rente sont

35 Pendant tout le temps de nos enquêtes nous n'avons rencontré que deux troupeaux d'éleveurs gourmantché venant de la commune de Botou.

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l'arachide, le coton, le niébé, la patate, le soja, le sésame et le manioc. D'autres spéculations plutôt marginales et maraîchères (pastèque, choux, oignon, pomme de terre, tomate, aubergine) sont conduites par endroits (ACRA, 2009).

Le retour du coton dans la région pendant la campagne 1996/97 a occasionné de grands bouleversements dans le paysage agricole et dans l'économie rurale. La pression sur l'espace a été accrue avec l'arrivée de migrants agricoles et l'installation de grandes exploitations qui ont accéléré le taux d'occupation des sols dans toutes les communes cotonnières comme celle de Tansarga. La corrélation entre la cotonculture et l'accélération de l'occupation de l'espace est si forte que lorsqu'en 2007 l'engouement pour cette culture a baissé, faute de prix rémunérateur (Renaudin, 2007)36, on a observé une déprise agricole après une longue période de forte progression du front agricole ; cette déprise semble se poursuivre actuellement (figure III-5)37. Il faut signaler que, dans cette partie du Burkina Faso, seule la commune de Botou, où l'élevage représente la première activité économique et qui présente des traits physiques soudano-sahéliens, ne connaît pas la culture du coton.

Figure III-5 : Évolution des superficies totales emblavées (1999 à 2008) et des superficies en coton (2004 à 2008) dans la commune de Tansarga (Données: DPAHRH/Tapoa38, 2008 ; SOCOMA39, 2010).

3.5.2. Les activités extractives : la chasse et la pêche.

La province de la Tapoa dispose d'un réseau hydrographique assez important. Trois plans d'eau d'importance, la Tapoa, la Boudieri et l'Arly, peuvent être signalés. Ils offrent un potentiel halieutique assez important, dont l'exploitation reste cependant au stade rudimentaire (Sanou, 2005). Les acteurs du secteur sont en effet très peu organisés et les

36 A l'échelle du pays, selon l'auteure, ce recul a occasionné une baisse de production du coton graine de l'ordre de 10% (de 715000 à 660000 tonnes).

37 Les données sur les superficies totales emblavées avant 2003/2004 n'étaient pas exploitables.

38 Direction provinciale de l'agriculture, de l'hydraulique et des ressources halieutiques de la Tapoa

39 Société cotonnière du Gourma.

produits issus de cette activité sont destinés essentiellement à l'autoconsommation et au marché local (Zouri, 2003).

La province dispose, par ailleurs, d'un potentiel faunique très important dû à la concentration en aires protégées et surtout de leur structuration en réseau. Un recensement aérien conduit par Bouché et al. (2003) en 2002 avait donné les statistiques suivantes pour l'ensemble du complexe WAPOK (ensemble d'aires protégées W, Arly, Pendjari, et OtiKéran): 442 éléphants, 399 buffles et 421 hippotragues. La présence du buffle (Syncerus caffer), du bubale (Alcelaphus buselaphus), du cobe defassa (Kobus defassa), du phacochère (Phacochoerus africanus), etc., témoigne d'une faune sauvage assez riche qui attire chaque année beaucoup de touristes en période de chasse. Par ailleurs, quatre espèces de primates s'y rencontrent: le cynocéphale ou babouin (Papio hamadryas), le singe rouge (Erythrocebus patas), le singe vert ou vervet (Chlorocebus aethiops) et le galago du Sénégal (Galago senegalensis). Notons en outre que le parc W est classé zone d'importance pour les oiseaux et qu'on y a dénombré en 1979, 278 espèces d'oiseaux. Quelques rapaces comme l'oricou, le gyps africain, le gyps de Rüppel, le percnoptère brun, le vautour huppé, l'aigle martial, le messager serpentaire, le bateleur, ainsi que de nombreux échassiers et passereaux ont été enregistrés. Certains estiment même que plus de 70% des ressources fauniques du Burkina Faso se trouvent dans le complexe d'aires protégées de la région (Tankoano et al. 2010).

Ce potentiel faunique permet l'émergence d'un secteur touristique qui commence à être dynamique. De nombreuses réserves partielles de faune ont, en effet, été concédées à des particuliers (exemple de la réserve partielle de faune de la Kourtiagou)40 et chaque année la saison de chasse draine de nombreux touristes pour la chasse sportive et la vision. Par ailleurs, pour aller dans le sens des recommandations de la Convention sur la biodiversité (CBD) et des différentes conventions internationales et programmes (notamment le programme MAB (Man And Biosphere) de l'UNESCO de 1971) qui suggèrent que, dans un souci d'équité et de développement durable, les communautés riveraines soient associées dans la gestion des ressources naturelles (concept de gestion participative ou inclusive), l'État et ses partenaires promeuvent localement la mise en place de zones villageoises d'intérêt cynégétique (ZOVIC). Une ZOVIC est définie comme "une partie du terroir d'une communauté de base, affectée par elle à l'exploitation des ressources cynégétiques" (article 99 ; code forestier) ou comme "une aire de protection faunique créée sur le terroir d'une communauté de base" (article 4 ; décret 2008-312). Selon Kaboré (2010) « l'idée de ZOVIC a été introduite dans la législation forestière nationale comme mesure d'accompagnement des nouvelles décisions de concéder les réserves de chasse aux opérateurs privés ». Les ZOVIC sont régies à la fois par le code forestier (loi 006/97/ADP du 31 janvier 1997), le décret 2008- 312/PRES/PM/MECV/MATD/MEF portant conditions de création et de gestion et par la loi 055-2004/AN portant code général des collectivités territoriales (CGCT). Ces zones de chasse, lorsqu'elles sont adossées aux aires fauniques, peuvent jouer le rôle de zones tampons

40 Cela à la faveur des nouvelles orientations (à partir de 1987 puis de 1996) en matière de politique de gestion des aires fauniques (Baillon & Sournia, 1987 ; Kaboré, 2010) qui veut que, pour mieux assurer leur surveillance, celles-ci soient confiées à des opérateurs privés (guides de chasse puis concessionnaires).

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pour celles-ci41, et permettre ainsi de les sécuriser en réduisant la pression anthropique sur leur noyau central. Elles permettent la valorisation du petit gibier local qui procure des revenus, peu importants pour l'instant42, aux populations. Dans le terroir de Kotchari, quatre ZOVIC sont enregistrés (Gnimboama : 162 ha ; Lada : 279 ha ; Nangbanli : 221 ha et Pielgou) mais elles sont à des stades différents de développement et certaines comme celle de Pielgou sont d'ailleurs contestées alors que celle de Lada attend d'être consensuellement délimitée (Sawadogo, 2011)43. La contestation des ZOVIC, qui s'inscrit dans la continuité de celle des aires fauniques elles-mêmes44, est généralement du fait d'agriculteurs faisant face à un besoin crucial en terres ou devant déguerpir ou alors d'éleveurs qui craignent que les ZOVIC ne constituent une astuce supplémentaire des agriculteurs pour les exclure de certaines portions du terroir45. La majorité des agriculteurs locaux (plus de 89%) (Zombra, 2008 ; Kaboré, 2009) montrent, quant à eux, un grand intérêt à la mise en place de ces entités de gestion et de valorisation de la petite faune villageoise.

Il faut signaler par ailleurs, qu'une grande portion du terroir (423 ha) située dans le secteur sud du côté du village de Gnimboama (Sawadogo, 2004 ; Sawadogo, 2011) constituant initialement la ZOVIC dudit village est passée depuis une dizaine d'années sous la gestion de l'ONG Nature et Vie46. C'est une zone assez particulière en ce qu'elle regorge une importante diversité faunique, notamment aviaire et végétale.

41 L'état encourage en effet qu'autour des aires fauniques, soient mises en place des zones tampons, définies comme des bandes ceinturant les aires et dans lesquelles les aménagements socioculturels et économiques doivent être compatibles avec les objectifs de l'aire protégée (article 79, code forestier). Les ZOVIC, en tant que zones tampons, sont un compromis efficace en ce qu'elles permettent de répondre à ces objectifs tout en mobilisant les communautés qui tirent profit de leur gestion (il y a alors une sorte de compensation face aux interdictions d'accès au noyau central des réserves); ce qui rejoint l'esprit du programme MAB (Man And Biosphere) de l'UNESCO de 1971.

42 Kaboré (2010) note par exemple qu'au titre de la campagne de chasse 2006-2007 seulement une somme de 50000 FCFA à 200000 FCFA ont été redistribués à chacun des villages bénéficiaires dans la zone de la réserve de Pama Nord (province du Gourma)

43 Selon les dispositions réglementaires en la matière (code forestier, décret 2008-312, CGCT), la ZOVIC est mise en place et gérée par le CGF « Commission de gestion de la faune » (article 6, décret 2008-312) sous le contrôle du conseil villageois de développement (CVD) et du Conseil communal (article 11, décret 2008-312) et qui doit, avec l'appui technique des services étatiques de gestion faunique (article 3, décret 2008-312), assurer la gestion de la zone à travers des actions d'aménagement comme la surveillance, l'ouverture des pistes, les reboisements.

44 Kaboré (2010) montre que le rejet des aires fauniques n'est pas seulement mû par la seule considération de l'accès aux ressources qu'elles regorgent. Des considérations comme le désir d'exercer un droit de contrôle ou de la poursuite de la pratique des rites sacrificiels sont causes aussi des revendications.

45 La loi dispose que c'est le CGF (représentant les communautés de base) qui définit les activités autorisées (article 101, code forestier du 31 janvier 1997) avec l'appui des services techniques. On peut craindre alors qu'il ne naisse des velléités tendant à soustraire ces zones à l'exploitation animale.

46 La cession de cette zone à l'ONG ne s'est pas faite par consentement. Les villageois, se sont vus obligés de le faire car la promotrice est l'épouse du premier Ministre de l'époque qui est par ailleurs, natif de Tansarga, chef-lieu de la commune.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway