UNIVERSITE DE YAOUNDE I THE UNIVERSITY OF
YAOUNDE I
FACULTE DES ARTS' LETTRES ET SCIENCES
HUMAINES
DEPARTEMENT DE GEOGRAPHIE
FACULTY OF ARTS' LETTERS AND SOCIAL
SCIENCES
DEPARTMENT OF GEOGRAPHY
DYNAMIQUE FORESTIERE POST-EXPLOITATION INDUSTRIELLE
: LE CAS DE LA FORET DENSE SEMI-DECIDUE D E MBALMAYO (SUD
CAMEROUN)
Mernoire presente pour l'evaluation en vue de
l'obtention du diplorne de Master en Geographie
Option: Dynamique de l~enyironnement et
risques
Par
Deric Larey KEMADJOU MBAKEMI
Licencie en geographie physique
Sous la direction de
Dr YOUTA HAPPI Charge de cours
Soutenu le 1er aoilt
2011 Jury Président : Pr Roger
NGOUFO Examinateur : Dr Louis DEFO Rapporteur : Dr YOUTA
HAPPI
DEDICACE
A Alexandre Nathan KEMADJOU NYAMI, pour ses cris
et ses pleurs plutôt stimulants A Annie, compagne
attentionnée, pour sa sollicitude et ses égards constants
A Séraphin ASSONGUO SONWAH pour le
soutien permanent
A mes frères et soeurs pour leurs
encouragements
A mes parents, pour leur encadrement
REMERCIEMENTS
J'ai par deux fois déjà auparavant tenté
une aventure au cycle de recherche. Ces deux tentatives se sont soldées
par des défections. Pourtant, je meurs d'admiration devant tous ceux qui
ont pu poursuivre leurs études au-delà de la Licence, pire encore
devant ceux qui ont intégré le cercle prestigieux des Docteurs.
Mes forfaitures répétées m'ont poussé à
m'interroger sur mes capacités à conduire à terme un
projet de mémoire. Au-delà de tout, c'est surtout pour me
convaincre à moi-même qu'il m'était possible de
rédiger « quelque chose » en géographie, que je me suis
cette fois ci encore inscrit en cycle de Master. Le seul fait d'être
parvenu à la reliure du document, de le soumettre à la critique
d'un jury est pour moi déjà une grande victoire. Au moins,
j'aurai cessé d'être un simple velléitaire.
Je ne serais jamais parvenu à ce stade si je n'avais
pas évolué dans un environnement enthousiasmant et stimulant. En
effet, tout au long des deux années qu'aura duré la
rédaction de ce mémoire, j'ai bénéficié de
l'aide et de l'attention de nombreuses personnes qui ont participé,
chacun à sa manière à l'élaboration ou à la
progression du travail. Le moment est venu pour moi de leur dire combien j'ai
été réconforté et galvanisé par leurs
conseils, leurs critiques, leur soutien, leurs égards...
Je remercie avant tout le Dr YOUTA HAPPI qui
a accepté de me conduire dans ces travaux de recherche. Sa
présence à mes côtés sur le terrain, sa lecture
très critique de mes manuscrits, les nombreuses recommandations qu'il
m'a faites, ses mails et appels téléphoniques pendant mes «
désertions » occasionnelles ne m'ont pas laissé autre choix
que celui de terminer ce mémoire.
Mes remerciements s'adressent ensuite à tous les
enseignants du Département de Géographie de l'Université
de Yaoundé I qui m'ont encadré depuis mon entrée en
première année.
Je suis sensible à l'aide précieuse de M. OWONO
NGUELE Paul pendant les relevés floristiques sur le terrain, à
celle de Loo Ivo pour la traduction.
Merci à Séraphin ASSONGUO SONWAH pour les
encouragements, le bureau climatisé et les heures de navigation
gratuites sur Internet allant presque toujours jusqu'à tard dans la
nuit.
Des remerciements particuliers vont à l'égard de
mes amis de toujours NYEMECK TJADE Nestor, KITIO BOUBA Colin, Landry SIMO
, Yves TANKEU; de mes frères et soeurs Hervé
Diane, Rigaud, Franck, Caroline, Maximène; de mes compagnons d'aventure
MEWASSI, LOUNANG, EVINA, MBOGNE. Merci à M. et Mme NOBEP, M. et Mme
PONDJA, M. et Mme NDJEUTCHA, M. et Mme KEMAMI, M. et Mme TCHAPMI, M. BICHIM.
Merci spécial à Annie, ma compagne, pour
l'attention, la bienveillance et l'encadrement.
Merci éternel à M.M. MBAKEMI David, NZOATOM Robert;
Mmes NGASSAM Justine et TCHAPTCHET Lydie, mes parents.
A tous ceux à qui je n'ai pas pensé ici et qui ont
souvent marqué un intérêt pour mon parcours, j'adresse mes
plus sincères remerciements.
RESUME
L'étude présente l'évolution d'un espace
forestier après une exploitation industrielle de bois d'oeuvre
près de la localité de Faekélé située au
sud-est de la ville de Mbalmayo. Le constat le plus marquant est que
l'exploitation industrielle, même si elle est sélective, se
traduit par des impacts écologiques et économiques à court
et moyen termes. Les relevés ont été effectués sur
deux placettes de 1 hectare chacune, l'une (P1) située en forêt
exploitée en 2002 et l'autre (P2) restée relativement intacte que
nous avons considéré comme la parcelle de
référence. Dans chacune des parcelles d'expérimentation,
les arbres et arbustes de diamètre (Dbh) = 5 cm ont été
recensés et localisés dans une grille millimétrée.
Les variables liées à la structure (densité,
diamètre, surface terrière et recouvrement des couronnes des
individus) et à la biodiversité (composition floristique) de
chaque parcelle ont été étudiées. La comparaison
des parcelles indique, d'une part, une modification de la structure de la
parcelle exploitée. Elle compte 990 individus/ha contre 1133 pour la
forêt non exploitée. D'autre part, la forêt exploitée
comporte une surface terrière des arbres et arbustes de 28,33
m2/ha contre 36,38 m2/ha pour la forêt non
exploitée. De plus, l'exploitation induit une fragmentation du
peuplement forestier ainsi qu'une perforation de la canopée comme la
restitution de la projection des couronnes des arbres et arbustes au sol l'a
démontré. Toutefois, il n'existe pas une différence
significative en terme d'impacts sur la biodiversité floristique. La
forêt non exploitée compte 161 espèces/ha contre 165 pour
la forêt exploitée, mais celle-ci se singularise par l'abondance
des individus appartenant aux espèces dites de cicatrisation de la
forêt. Ces espèces héliophiles pionnières partagent
les caractères suivants : croissance rapide, bois mou et courte
durée de vie. Ces espèces sont aussi présentes dans la
forêt mature, mais en nombre réduit. En revanche, même si
les deux parcelles partagent les mêmes espèces commerciales, le
nombre d'individus de gros diamètre et le volume en bois sont plus
importants dans la forêt non exploitée.
Mots clés : biodiversité, bois
d'oeuvre, dynamique, exploitation industrielle, Faekélé,
forêt dense, Mbalmayo, placette, régénération,
surface terrière.
ABSTRACT
This study presents the evolution of a forest area after a
selective timber exploitation near the locality of Faekélé, found
in the south-east of the town of Mbalmayo. The most striking finding is that
the industrial exploitation, eventhough it is selective, experienced ecological
and economic impacts both in the short and medium terms. Surveys were carried
out on two plots of 1 hectare each, one (P1) located in logged forest in 2002
and the other (P2) remained relatively intact as we considered the reference
plot. In each of these experimental plots, trees and shrubs in diameter (DBH) =
5 cm were identified and located in a millimeter grid. Variables related to the
structure (density, diameter, basal area and crowns cover of individuals) and
biodiversity (species composition) of each plot were studied. Comparison of the
two plots shows a change in the structure of the exploited forest area.
Exploited forest has 990 individuals/ha against 1133 for the unlogged forest.
On the other hand, logged forest has a basal area of 28.33 m2/ha
against 36.38 m2/ha in unlogged forest. In addition, forest
exploitation prompts a fragmentation of the forest stand and a perforation of
the canopy as the restitution of the projection of the crowns of trees and
shrubs on the ground showed. However, there exists no significant difference in
terms of impacts on the flora biodiversity. Unlogged forest has 161 species/ha
as against 165 for the logged forest. Exploited forest area has an abundance of
individuals belonging to heliophilous species. These pioneer species share the
following characteristics: fast growth, soft wood and short life span. These
species are also present in the unlogged forest, but in reduced numbers. But
even if the two plots also share the same commercial species, the number of
individuals of large diameter and volume of wood are more important in the
unlogged forest.
Keywords: biodiversity, timber, dynamic,
industrial logging, Faekélé, dense forest, Mbalmayo, plot,
regeneration, basal area.
SOMMAIRE
Dédicace I
Remerciements II
Résumé III
Abstract IV
Sommaire V
Liste des tableaux VII
Liste des figures VII
Liste des photos VIII
Liste des acronymes et abréviations
VIII
INTRODUCTION 1
I- Cadre conceptuel de l'étude 2
II- Délimitation spatiale et présentation
de la zone d'étude 5
II-1 Délimitation spatiale et justification
5
II-2 Présentation de la zone d'étude
7
III- Problématique 8
IV- Questions de recherche 10
V- Intérêt de l'étude 11
VI- Objectifs de l'étude 12
VII- Hypothèses de travail 12
VIII-Le contexte scientifique 12
VIII.1. Des théories controversées au sujet des
successions végétales 13
VIII.2. Les modèles de la dynamique forestière
15
VIII.3. Etat de la question 15
IX- Les techniques d'approche de la dynamique du
peuplement forestier 27
IX.1. Les enquêtes et les relevés de terrain 27
IX.2. Le traitement des données 31
X- Présentation du mémoire 37
CHAPITRE 1 : LES CONDITIONS ECOLOGIQUES DU SITE
38
1.1. Le relief et les sols 38
1.1.1. Un plateau peu accidenté marqué par des
interfluves surbaissés 38
1.1.2. Le Nyong, cours d'eau principal aux nombreux tributaires
39
1.1.3. Des sols ferralitiques associés aux sols
hydromorphes 40
1.2. Les conditions climatiques 41
1.3. Une végétation
caractérisée par la forêt dense humide semi décidue
43
1.3.1. La forêt dense humide semi-décidue 44
1.3.2. La forêt secondaire ou forêt
dégradée 46
1.3.3. Les champs et les plantations 46
1.4. Les pressions anthropiques 48
1.4.1. La mise en place de la population 48
1.4.2. Les groupes ethniques 48
1.4.3. Les activités de production 49
1.4.3.1. Une agriculture de plus en plus orientée vers la
spéculation 49
1.4.3.2. Les activités complémentaires de
l'agriculture 50
1.4.3.2.1. La chasse 50
1.4.3.2.2. La cueillette et le ramassage
51
1.4.3.2.3. La pêche artisanale
52
1.4.3.2.4 L'exploitation du bois d'oeuvre et de
chauffage 53
CHAPITRE 2 : LES IMPACTS DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE
DE LA FORET SUR LA BIODIVERSITE 56
2.1. Les paramètres de la diversité
biologique 56
2.2. La diversité des familles 57
2.3. La diversité des genres 60
2.4. La diversité des espèces
62
2.5. Les indices de diversité et de
similarité 71
CHAPITRE 3 : LES IMPACTS DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE
DE LA FORET SUR LA PHYSIONOMIE ET LA STRUCTURE DE LA FORET 73
3.1. Les densités des peuplements 73
3.2. Les surfaces terrières 77
3.3. Les classes de diamètres 81
3.3.1. Les valeurs statistiques 81
3.3.2. La distribution des classes de diamètre dans les
parcelles 86
3.4. L'indice de valeur d'importance ou le critère
d'abondance-dominance 89
3.5. Le recouvrement des couronnes 94
3.6. La typologie des recouvrements post exploitation
forestière 100
CHAPITRE 4: LES CONSEQUENCES ECOLOGIQUES ET ECONOMIQUES
DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE LA FORET 105
4.1. Une légère modification de la
biodiversité floristique 105
4.2. Une diminution des gros arbres et une
réduction de la densité du peuplement 107
4.3. Une réduction du volume en bois à
court terme 108
4.3.1. Les indices de la surface terrière 112
4.3.2. Les indices des classes de diamètres 113
CONCLUSION GENERALE 121
BIBLIOGRAPHIE 126
ANNEXES 133
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Données de
températures et de précipitations de Mbalmayo
42
Tableau 2 : Comparaison des taxons entre les
parcelles 56
Tableau 3 : Nombre d'individus par famille dans
les deux parcelles 59
Tableau 4 : Proportion des principales familles
recensées dans les parcelles 60
Tableau 5 : Les genres dominants sur les deux
sites (nombre d'individus > 5) 61
Tableau 6 : Relevé de la parcelle
exploitée 63
Tableau 7 : Relevé de la parcelle non
exploitée (forêt mature) 67
Tableau 8 : Densité des espèces
pionnières de la cicatrisation des clairières
71
Tableau 9 : Les 20 espèces abondantes sur
les deux sites 74
Tableau 10 : Les 20 familles dominantes des deux
parcelles 79
Tableau 11 : Les 20 espèces dominantes
dans les deux parcelles 80
Tableau 12 : Les caractéristiques des
classes de diamètres dans les deux parcelles 81
Tableau 13 : Densité et surface
terrière par classe des diamètres 86
Tableau 14 : Paramètres floristiques des
principales espèces dans la forêt exploitée
90
Tableau 15 : Paramètres floristiques des
principales espèces dans la forêt non exploitée
91
Tableau 16 : Essences forestières
commerciales relevées sur le site de Faékélé
II 109
Tableau 17 : Répartition des classes de
diamètre des espèces commerciales 114
Tableau 18 : Les individus de diamètre
(dbh) = 50 cm dans la parcelle exploitée 116
Tableau 19 : Les individus de diamètre
(dbh) = 50 cm dans la parcelle non exploitée 117
Tableau 20 : Les essences exploitables dans la
parcelle exploitée (dbh = DME) 118
Tableau 21 : Les essences exploitables dans la
parcelle non exploitée (dbh = DME) 119
Tableau 22 : Valeur en densité et en
volume de bois dans les deux parcelles 119
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Localisation de la zone
d'étude 6
Figure 2 : La reconstitution de
l'évolution de la végétation au cours du Quaternaire au
Sud 17
Cameroun, le cas du lac Barombi Mbo (Kumba)
Figure 3 : La dynamique de la
régénération naturelle de la forêt dense
tropicale 19
Figure 4 : Méthodologie des
relevés botaniques sur les placettes 30
Figure 5 : Le relief du site de
Faekélé II 39
Figure 6 : Les principales unités
pédologiques de la région de Mbalmayo 41
Figure 7 : Diagramme ombro-thermique de la
station de Mbalmayo 43
Figure 8 : Les principaux
écosystèmes de la région de Mbalmayo
46
Figure 9 : La distribution des peuplements
végétaux à l'échelle locale sur un transect
47
Figure10 : La densité relative des 20
espèces abondantes dans la forêt exploitée
75
Figure 11 : La densité relative des 20
espèces abondantes dans la forêt non exploitée
76
Figure 12 : La surface terrière des 20
espèces dominantes dans la forêt exploitée
78
Figure 13 : La surface terrière des 20
espèces dominantes dans la forêt mature 78
Figure 14 : Les densités par classes de
diamètres sur les deux sites 83
Figure 15 : La relation densité - surface
terrière par classe de diamètre en parcelle
exploitée 85
Figure 16 : La relation densité-surface
terrière par classe de diamètre en forêt mature
85
Figure 17 : Distribution des classes de
diamètres dans la forêt exploitée (1 ha)
87
Figure 18 : Distribution des classes de
diamètres dans la forêt non exploitée (1 ha)
88
Figure 19 : L'indice de valeur d'importance des
20 espèces dominantes dans la forêt exploitée
93
Figure 20 : L'indice de valeur d'importance des
20 espèces dominantes dans la forêt mature 93
Figure 21 : Recouvrement des couronnes des
arbres et arbustes dans la forêt non exploitée
95
Figure 22 : Recouvrement des couronnes des
arbres et arbustes dans la forêt exploitée 96
Figure 23 : Les modèles physionomiques
primaires de fragmentation 101
Figure 24: La variation des surfaces
terrières des espèces commerciales sur les deux sites
113
Figure 25 : La distribution des classes de
diamètres des essences commerciales 115
LISTE DES PHOTOS
Photo 1 : Mesure de la circonférence des
ligneux dans la forêt 31
Photo 2 : Le Nyong, principal cours d'eau de la
région 52
Photo 3 : Traces d'une ancienne piste de
débardage dans la parcelle exploitée 54
Photo 4 : Souche d'arbre prélevé
par l'exploitant forestier en 2002 54
Photo 5 : Clairière artificielle à
Marantaceae et Zingibéraceae dans la forêt exploitée.
98
Photo 6 : Chablis dans la forêt mature de
Faekélé II 99
Photo 7 : Le sous bois de la forêt mature
à faible luminosié et pauvre en couvert herbacé
103
Photo 8 : Trouée occasionnée par
une coupe d'arbre 104
Photo 9 : Un gros pied de Erythrophleum
ivorense (Tali) de 119 cm de diamètre dans la
111
forêt mature
Photo 10 : Un gros pied de Gambeya
africana de 98 cm de diamètre dans la forêt exploitée
112
LISTE DES ACRONYMES ET ABREVIATIONS
ARB Autorisation de récupération
du bois
CED Centre pour l'Environnement et le
Développement
COCAM Contre-plaqué du Cameroun
COVIMOF Communauté villageoise de
Melombo, Okekat et Faekelé
DBH Diameter at breast height
DHP Diamètre à hauteur de
poitrine
DME Diamètre minimum d'exploitation
FAO Food and agricultural organization
ONADEF Office national de développement
forestier
PIB Produit intérieur brut
RCA République Centrafricaine
RDC République Démocratique du
Congo
WRI World Ressource Institute
INTRODUCTION
L'étude se rapporte à une question essentielle
qui se pose au moins depuis la Conférence des Nations unies sur
l'environnement tenue à Stockholm en 1972. Il s'agit de la question de
l'interdépendance entre l'environnement et le développement
économique. Il faut désormais prélever les ressources
naturelles de manière à ne pas inhiber les capacités du
milieu à se renouveler. Dans le cas de l'exploitation forestière
dont il est question ici, il s'agit d'abord de satisfaire un besoin
économique important, celui du bois d'oeuvre, source de devises pour les
pays en voie de développement comme le Cameroun. Ce faisant, il s'agit
du même coup des menaces portées sur une végétation
dont on convient désormais qu'elle est déterminante dans
l'amélioration de la qualité de la vie sur terre et, par
delà, de la régulation du climat régional et global.
L'étude se fonde sur l'idée que l'intervention humaine en
forêt, comme dans tous les milieux naturels, est porteuse de
conséquences à court ou à long terme. Les ressources
forestières étant considérées comme renouvelables,
on pense qu'à terme, les zones exploitées peuvent se reconstituer
pour reprendre une physionomie proche des formations primaires. Cette
reconstitution passe par des stades d'évolution qui se traduisent par
des marques sur la végétation. Les indices peuvent être
d'ordre floristique ou structural. Il s'agira donc d'évaluer les
modifications de la couverture forestière consécutive à la
coupe industrielle du bois et de comprendre le processus et les étapes
de l'évolution vers des stades plus ou moins proches de l'état
initial. C'est pourquoi nous avons intitulé ce travail « Dynamique
forestière post-exploitation industrielle : le cas de la forêt
dense semi décidue de Mbalmayo (Sud Cameroun) ».
I- CADRE CONCEPTUEL DE L'ETUDE
La bonne compréhension de ce travail exige des
définitions précises des termes essentiels de son libellé.
Il s'agit principalement des concepts de dynamique forestière et
d'exploitation industrielle.
La dynamique forestière est
perçue par certains comme la régression ou l'extension spatiale
de la forêt par rapport à un autre biome, la savane le plus
souvent. La dynamique est donc ici synonyme de phases successives affectant un
paysage végétal avec en général une modification de
la composition et/ou de la structure de la forêt. D'autres assimilent la
dynamique aux changements affectant une forêt suite à des
perturbations naturelles ou anthropiques.
composition intra et interspécifique des populations
qui constituent un espace boisé". Cette définition intègre
les paramètres liés à la composition spécifique et
à la structure de la végétation. En effet,
l'écosystème forestier se caractérise par une occupation
de l'espace dont les éléments (le cortège floristique, la
densité du peuplement, la répartition des classes de
diamètres) sont naturellement amenés à évoluer avec
ou sans intervention humaine. Cette évolution est due à divers
facteurs : changement du microclimat, glissement de terrain, incendie,
défrichement, chablis... Toute modification d'un ou de plusieurs de ces
paramètres peut induire une dynamique forestière. Celle-ci est
à la fois quantitative (dynamique spatiale et accroissement en hauteur
des individus) et qualitative (transformation ou réduction de la
biodiversité). Nous allons donc considérer la dynamique
forestière comme l'évolution ou la transformation de la
composition et de la structure de la forêt. Nous ne nous limiterons dans
ce travail qu'à l'étude des modifications provoquées
principalement par l'exploitation industrielle du bois.
Les diverses approches de la dynamique de la
végétation tiennent toujours compte de la notion
d'échelles (temporelle et spatiale). Pour ce qui est de l'échelle
temporelle, la dynamique se traduit par une évolution de la
végétation entre un temps repère T0 et le temps
d'observation T1. Dans notre travail, T0 correspond à la date de la
perturbation (l'exploitation forestière) en 2002 et T1 à la
période pendant laquelle nous avons effectué nos relevés
et observations. Nous nous sommes donc limités à une
période de 7 ans après exploitation. On se demandera toujours si
elle est représentative. Peut-on en effet apprécier la dynamique
de la végétation sur un laps de temps aussi court ? Quelle est la
période qui conviendrait le mieux ? 10, 20, 70 ans ? On ne saurait
répondre de façon catégorique et péremptoire
à cette question car « il n'existe pas a priori une
échelle temporelle standard applicable par tous ». Il faut
cependant préciser que les difficultés pratiques et
matérielles ont orienté ce choix.
Autrement dit, le choix de l'échelle temporelle a
été dicté par la présence sur un site relativement
accessible d'une étendue de forêt dense non exploitée qui
côtoie des parcelles soumises à des coupes sélectives
d'arbres il y a 7 ans de cela. Des zones d'exploitation plus anciennes
n'existent pas sur le site et le souci de travailler sur une zone
homogène (sur le plan de la composition floristique et de la structure
de la forêt) a été prioritaire dans les choix. Nous avons
cependant parcouru des sites d'exploitation plus âgés
situés plus loin de la localité de Fakélé pour nous
faire une idée de l'évolution à long terme du peuplement
forestier exploité industriellement.
Le Larousse agricole (1981) définit
l'exploitation forestière comme l'ensemble des
opérations d'abattage, de façonnage, de débardage et de
transport de bois. Elle est exécutée par des entrepreneurs
appelés exploitants forestiers qui emploient des bûcherons pour
l'abattage et le façonnage du bois, des débardeurs pour sortir en
bordure de route les bois façonnés et des camions grumiers pour
le transport de ces bois à la scierie ou à l'usine utilisatrice.
L'exploitation industrielle fera référence au
prélèvement ou à la récolte du bois d'oeuvre
consécutive à l'obtention d'un titre d'exploitation des
autorités forestières, prélèvement effectué
à l'aide d'engins roulants tels que les débardeurs, les grumiers,
les camions... Au Cameroun, selon la législation forestière de
1994, deux étapes sont nécessaires pour exploiter les ressources
forestières : obtenir un agrément et détenir un titre
d'exploitation. Cette exploitation est sélective et s'oppose à la
coupe « à blanc » qui procède au
prélèvement de tous les arbres d'une parcelle même s'ils ne
sont pas tous commercialisables.
La coupe sélective se caractérise par le
prélèvement d'une fraction importante des arbres situés au
dessus d'un seuil de diamètre, appelé diamètre minimum
d'exploitabilité (DME), fixé pour chaque espèce par la loi
forestière, et mesuré à 1,30 mètre du sol (voir
annexe III). Le diamètre minimum est arrêté pour assurer
une bonne régénération des espèces
exploitées. Il est fixé par rapport au diamètre
observé à maturité pour l'espèce à
exploiter. Les essences d'intérêt commercial justifiant une
exploitation sélective sont dans leur majorité des espèces
à bois précieux dense, et sont souvent des émergents
constitués par des espèces dominantes de la canopée. Les
individus exploités ont un très gros diamètre et sont
supposés être adultes.
Pour Lourmas (2005), le terme exploitation sélective
rassemble toutes les pratiques sylvicoles qui répondent aux trois
critères suivants :
· l'arbre sélectionné pour être abattu
est une essence d'intérêt commercial ;
· son diamètre mesuré à hauteur de
poitrine (DHP ou DBH) dépasse le diamètre minimum
d'exploitabilité (DME) fixé pour chaque espèce
par les lois forestières en vigueur dans le pays concerné ;
· des pistes de débardage sont ouvertes
spécifiquement pour chaque arbre ou bouquet d'arbres abattus (ouverture
du milieu limitée).
L'exploitation sélective est le mode d'exploitation le
plus répandu dans le Bassin du Congo, d'une part en raison de son faible
coût de revient, d'autre part en raison d'une densité trop faible
d'espèces précieuses ne justifiant pas des coupes en masse ou
coupes rases (Lourmas2005).
On distingue souvent deux types d'exploitation industrielle de
la forêt d'un point de vue environnementaliste:
· le type minier qui se caractérise par une
exploitation, un prélèvement des essences sans souci ou
contrainte de régénération. C'est ce type qui a
été appliqué sur la parcelle exploitée retenue pour
l'étude. Il est en règle générale, le plus
pratiqué dans nos forêts et compromet l'équilibre de la
couverture forestière.
· le type qui associe exploitation et
régénération. Dans ce cas, le cahier de charge de
l'exploitant lui impose des actions visant la préservation de la
forêt.
L'exploitation forestière industrielle telle que
définie ci-dessus s'oppose à l'exploitation forestière
artisanale qui peut elle-même prendre plusieurs formes : exploitation
illégale du bois d'oeuvre avec le plus souvent la tronçonneuse
comme unique engin, l'exploitation du bois pour la cuisson des aliments et la
construction des habitations.
II- DELIMITATION SPATIALE ET PRESENTATION DE LA ZONE
D'ETUDE
II-1 Délimitation spatiale et justification
Le village Faekélé II qui abrite les parcelles
ayant servi à l'étude est situé sur le plateau
sudcamerounais, vaste unité morphologique d'une altitude moyenne de 750
m. Cet ensemble relativement homogène est caractérisé par
une végétation de forêt dense, un climat humide (ou climat
équatorial) à quatre saisons avec une moyenne annuelle de
précipitations tournant autour de 1500 mm.
Le village Faekélé II est situé au
sud-est de la ville de Mbalmayo. Il est administrativement rattaché
à l'arrondissement de Mbalmayo, département du Nyong et So'o,
région du Centre. Les parcelles expérimentales sont
implantées au sein d'une forêt gérée par les
populations du village.
Le choix du site de cette étude tient à
plusieurs facteurs. Le premier est lié à la nature même de
la formation végétale en présence ici: la forêt
dense semi-décidue. Des études de phytogéographie
attestent qu'elle a subi une influence profonde de l'homme. Elle serait, selon
Letouzey (1968) en partie le produit de la dégradation de la forêt
sempervirente environnante sous l'effet des activités humaines
(défrichement, agriculture, exploitation industrielle...).
Figure 1 : Localisation de la zone
d'étude
La deuxième raison qui a orienté le choix,
certainement la plus déterminante, est la possibilité qu'offre le
site d'une parcelle ayant fait l'objet d'une exploitation industrielle de la
forêt à côté d'une autre située non loin qui
n'a pas été exploitée. De plus, dans la parcelle non
exploitée, l'action de l'homme a peu ou pas porté atteinte
à la structure de la forêt. Cette proximité garantit une
certaine homogénéité des caractéristiques
écologiques du milieu et permet de minimiser les facteurs pouvant
biaiser la comparaison des deux parcelles au moment d'étudier
l'évolution du couvert végétal sur le plan floristique et
sur les aspects physionomiques. Autrement dit, le rapprochement des deux
parcelles étudiées laisse présumer qu'elles ont eu au
départ les dispositions physionomiques et floristiques semblables.
II-2 Présentation de la zone d'étude
La zone d'étude se trouve dans une forêt qui
appartient au vaste ensemble que constitue la forêt dense humide
semi-décidue de moyenne altitude du Cameroun (figure 1). Elle est
caractérisée par la perte des feuilles des émergents en
saison sèche, soit environ 10 % des arbres. Au plan floristique, cette
forêt est dominée par les Sterculiaceae et les Ulmaceae (Letouzey,
1968). Elle présente par endroit un faciès de dégradation
prononcé dont l'un des traits caractéristiques est l'importance
des plantes herbacées de grande taille appartenant essentiellement aux
familles des Marantaceae et Zingiberaceae qui se développent sous un
ombrage léger (Santoir et Bopda, 1995).
Les cultures vivrières (manioc, banane-plantain,
macabo, maïs...) occupent la plus grande partie des terres
cultivées. Elles coexistent avec une agriculture de rente dont le cacao
est la culture majeure. Mais la cacaoculture reste une activité
très limitée sur le territoire du village Faekelé. La
forêt étudiée a été sujette à une
exploitation régulière de ses ressources ligneuses. En effet,
entre 1996 et 2004, elle a subi les activités des exploitants au travers
de l'autorisation de récupération du bois (ARB)
précédant l'aménagement de la route qui traverse le
village. Au départ, le bois devait être coupé sur une
distance de 500 m de part et d'autre de la route. Malheureusement,
l'exploitation s'est faite sur plus de 10 km de la route, dépouillant
ainsi une partie de la forêt de l'essentiel de ses essences nobles. C'est
sur cette surface exploitée que nous essayerons d'apprécier la
dynamique forestière à travers la comparaison avec une parcelle
de forêt ancienne qui n'a pas encore été exploitée
et que nous considérerons comme site témoin.
III- PROBLEMATIQUE
L'Afrique centrale qui intègre le bassin forestier du
Congo présente, après le bassin de l'Amazonie, la deuxième
plus vaste étendue contiguë de forêt tropicale humide.
Celle-ci occupe une surface d'environ 2 millions de km2 (Mayaux et
al, 2006)1. Plus particulièrement, les forêts du bassin
du Congo réparties entre le Cameroun, la RCA, le Congo, la RDC, la
Guinée Equatoriale et le Gabon, constituent par endroits de vastes
espaces ininterrompus considérés comme des «forêts
frontières» (WRI, 2000). Ce nom attribué par le WRI
désigne les zones forestières primaires suffisamment grandes pour
que l'écosystème reste intact à long terme. Elles
constituent donc un réservoir génétique pour les
espèces animales et végétales et un important bassin de
stockage de CO2. On y compte près de 400 espèces de
mammifères, 1000 espèces d'oiseaux, 200 espèces
d'amphibiens, 300 espèces de reptiles et plus de 900 espèces de
papillons (Duveiller et al 2007). Ici, l'accroissement de la
population, les difficultés économiques, l'ouverture des fronts
pionniers, les besoins en bois d'oeuvre et l'émergence des
opportunités de marché en Asie en l'occurrence sont à
l'origine de la forte pression que l'on observe sur ces forêts. Pour les
pays d'Afrique centrale essentiellement pauvres, l'exploitation
forestière représente une part très importante des revenus
d'exportation (Hall et al 2002). Celle-ci est la cause d'un taux de
déforestation annuel estimé à 0.21% et de
dégradation de près de 0.15% (Duveiller, op.cit.). Même si
à l'échelle régionale cette déforestation est peu
importante comparée à celle observée dans d'autres zones
(Afrique de l'Ouest par exemple ou Asie du Sud est), il est à craindre
des répercussions importantes sur les forêts du bassin du
Congo.
Du fait de son appartenance à cet ensemble, le
Cameroun présente sur sa partie méridionale une importante
couverture forestière estimée à 22 millions d'hectares par
la FAO (1998), soit environ 45 % du territoire national. Avec cette superficie,
il est placé au deuxième rang des pays forestiers africains
après la République Démocratique du Congo. L'espace
forestier camerounais représente un volume total en bois de 4 milliards
de m3 soit 12,6 % des forêts denses tropicales mondiales
(Ngoufo, 2005). La grande richesse de cette forêt en essences
exploitables en a vite fait un enjeu économique. Ainsi, les
activités d'exploitation forestière du Cameroun commencent au
début du XXè siècle sous la colonisation allemande.
Letouzey (op. cit.) situe les origines de ces activités à partir
de 1906. Elles se développent d'abord en zone côtière avant
de gagner
1 Mayaux P., Defourny P., Devers D., Hansen M.,
Duveiller G.2006. «Cartographie et évolution du couvert forestier
en Afrique centrale», Etat des forêts d'Afrique centrale
.PP 80-89
progressivement l'intérieur à la faveur de la
multiplication des voies de communication, surtout le chemin de fer. Cette
exploitation s'est poursuivie sous la période franco-britannique. Au
lendemain de son indépendance, le Cameroun comme tous les autres pays en
voie de développement présente une économie
essentiellement fondée sur le secteur primaire. Cette économie
est d'abord développée grâce aux produits agricoles de
rente comme le cacao et le café. Le pétrole prendra le relais par
la suite du fait de l'effondrement des prix des grands produits agricoles sur
le marché international. Avec la crise économique de la fin des
années 80, la forêt apparaît comme un capital plus important
dont il faut profiter pour assurer le développement économique et
social. Pour l'Etat et les exploitants forestiers, la forêt constitue une
importante source de dévises. En effet, le Cameroun est devenu le
deuxième grand exportateur africain de bois après le Gabon et en
tire une partie importante de son PIB. Selon la Direction des forêts, les
recettes forestières sont passées de 36,3 milliards en 1984-1985
à 53,4 milliards de francs cfa en 1993. Les recettes fiscales
dérivées sont elles aussi passées de 4,5 milliards
à 8 milliards dans la même période. Mais cette
participation au PIB s'est malheureusement accompagnée d'une
dégradation de la couverture végétale c'est-à-dire
un ensemble de changements progressifs introduits dans les forêts,
changements parfois difficiles à déceler et à quantifier.
La FAO utilise l'expression « dégradation forestière »
pour désigner « les changements de catégorie de
forêt affectant négativement le peuplement ou le site, et
abaissant ainsi sa capacité de production de biens et/ou de services
»2.
L'exploitation forestière pour le bois d'oeuvre est
ainsi considérée comme un facteur de dégradation des
forêts denses. Cette dégradation est qualitative et peut
entraîner la disparition des porte-graines de certaines espèces
parmi les plus prélevées, mettant en cause les
possibilités de régénération naturelle. La
forêt dense camerounaise a ainsi été marquée par son
intense exploitation qui devait se traduire par des modifications parfois
difficilement perceptibles. En même temps, l'exploitation
forestière a été citée parmi les causes de
déforestation3.
2 FAO cité par Tsayem, 2002.
3 Le concept de déforestation,
qui diffère selon les auteurs, signifie ici la diminution ou la
perte de la biodiversité de la forêt. Pour Puig (2001), le concept
renvoie à la transformation du couvert végétal d'un
état « naturel » à un état artificialisé
qui peut entraîner la perturbation du fonctionnement de
l'écosystème. Pour la FAO, la déforestation «
implique la disparition durable ou permanente du couvert forestier ainsi
que le passage à une autre utilisation des terres (...). Elle inclut
aussi les cas où la surexploitation et la modification de
l'environnement affectent la forêt de façon telle qu'elle ne peut
maintenir un couvert arboré dépassant le seuil de 10 %
» (FAO, 2001, cité par Tsayem). Pour la FAO, le terme
déforestation « exclut spécifiquement les zones
où les arbres ont été enlevés par exemple pour en
exploiter le bois et où la forêt devrait se
régénérer soit naturellement, soit avec l'aide de mesures
sylvicoles ». En d'autres termes, la déforestation est la
transformation ou la conversion des forêts en d'autres types de couvert,
plus ou moins dépourvus de végétation ligneuse (Tsayem,
2002).
En 1980, le rythme de déforestation au Cameroun
était estimé à 80 000 ha par an par la FAO. Entre 1980 et
1995, près de 2 millions d'hectares de forêt ont disparu (WRI,
2000). L'évolution du couvert forestier entre 1990 et 2000 indique un
taux de déforestation de 0,9% au Cameroun, soit le maximum absolu dans
la sous-région Afrique centrale (FAO, 2001 cité par Makon Wehiong
et al, 2005). L'espace forestier sud-camerounais est désormais
considéré comme un "hot spot", un espace présentant un
risque majeur de déforestation (Mayaux et al, 2003).
La région de Mbalmayo n'a pas échappé
à cette ruée sur les ressources ligneuses de la forêt. Avec
la construction de l'embranchement de chemin de fer
Mbalmayo-Otélé terminé en 1927 et l'aménagement
d'un quai fluvial sur le Nyong en 1934, l'arrondissement connaît une
forte exploitation forestière doublée d'une importante
activité agricole qui ont fortement contribué à amenuiser
et à dégrader son espace forestier. Il a par exemple perdu 54 786
ha de forêt entre 1952 et 1985, soit un taux de déforestation
annuel de 2,9 % (Mbida Fils, 1999). De nombreuses entreprises (COCAM, ECAM
Placages, IBC, PK...) se sont très tôt installées dans la
région et ont écrémé les forêts alentour.
Leur activité n'a pas été sans dommages pour le couvert
végétal car elle a modifié forcément la physionomie
des forêts tout comme la composition floristique des peuplements
végétaux. L'exploitation commerciale du bois constituant une
grande menace pour l'intégrité des forêts (Verbelen, 1999),
elle soulève forcément des problèmes écologiques
qui reposent sur la problématique de la préservation des
écosystèmes forestiers et la conservation de leur
biodiversité. C'est de ce constat que nait la nécessité de
s'interroger sur le scénario de l'évolution de ces espaces
abandonnés par les exploitants forestiers.
IV- QUESTIONS DE RECHERCHE
L'utilisation des ressources naturelles est intimement
liée à l'apparition de l'homme sur la terre. Avant le
Néolithique, l'homme vit exclusivement aux dépens de la nature
simplement en cueillant et en chassant ce dont il a besoin. Vers 10 000 avant
J.-C., période correspondant au début du Néolithique, le
couvert végétal connaît ses premières agressions
avec la conversion des espaces en champs vivriers et les pâturages
liés à la domestication des animaux. C'est à partir du
Vè millénaire avant J.-C. que l'exploitation de la forêt
devient plus importante avec l'utilisation du fer et du feu (Obam, 1992). En
Afrique tropicale et particulièrement au Cameroun, l'exploitation
forestière prend une nouvelle dimension avec la colonisation et son
corollaire qu'était l'économie de traite qui supposait
pratiquement un pillage des ressources naturelles, et donc du bois, en
direction de la métropole. Depuis la période des années
60, les pays africains
devenus indépendants s'appuient fortement sur la sylve
pour financer leur développement économique et social. Le rythme
et l'intensité des sollicitations sont tels que nous sommes en droit de
nous inquiéter sur l'avenir des forêts ainsi perturbées par
les multiples intrusions de l'homme. De cet état de fait, découle
la question principale suivante: comment se présente la
végétation de forêt semi-décidue ayant subi l'action
des prélèvements industriels du bois dans les premières
années de sa reconstitution ?
De façon plus spécifique, nous voulons
répondre aux questions suivantes:
· Quels sont les effets du prélèvement des
ressources ligneuses sur l'évolution de la forêt ?
· Quelles sont les caractéristiques aux plans
spécifique et physionomique de la forêt au lendemain de
l'exploitation forestière ? Ces caractéristiques sont-elles en
relation à la fois avec l'intensité et la durée des coupes
?
V- INTERET DE L'ETUDE
Il est aujourd'hui établi que la forêt
présente une certaine résilience lui permettant de se
régénérer si on lui en laisse le temps et la
possibilité. Ainsi, une forêt exploitée peut
entièrement se reconstituer si elle est mise en défens pendant
une longue période. Une étude de la succession forestière
après des coupes industrielles est intéressante à plus
d'un titre. Au plan écologique, elle peut entre autres permettre de
déterminer, pour le cas de la région de Mbalmayo, le temps
nécessaire à la reconstitution d'une forêt dense
semi-décidue soumise à une exploitation. Mais avant tout, cette
étude permet d'évaluer les effets des activités
anthropiques, notamment l'exploitation industrielle du bois sur
l'évolution de la forêt. Elle peut ainsi aider à
apprécier les réponses du peuplement forestier aux
prélèvements sélectifs d'arbres de manière à
prédire les tendances de son évolution à long terme.
Au plan économique, Il est interessant de savoir dans
quelles conditions l'exploitation sélective d'arbres peut permettre de
préserver à la fois les intérêts économiques
et l'équilibre de l'écosystème forestier sur un site en
particulier et au sud-Cameroun en général. On peut donc utiliser
ces connaissances pour maitriser l'intensité optimale d'exploitation.
Celle-ci permettra la bonne régénération des sites
exploités de manière à s'assurer de nouvelles
exploitations au bout d'un certain temps.
VI- OBJECTIFS DE L'ETUDE
L'objectif général visé par cette
étude est de montrer que la coupe industrielle du bois influence la
structure de la forêt et conduit à sa perturbation.
Cet objectif général se décline en 2
objectifs spécifiques à savoir:
· évaluer l'impact de l'exploitation
forestière sur la végétation.
· étudier l'évolution de la structure et de
la dynamique des peuplements forestiers après exploitation, pour en
déduire des règles de gestion durable des
écosystèmes forestiers.
VII- HYPOTHESES DE TRAVAIL
Le présent travail s'attelle à étudier
l'effet de l'anthropisation et particulièrement de l'exploitation
industrielle du bois sur une forêt dense-semi décidue. Pour ce
faire, deux hypothèses seront testées:
· l'exploitation industrielle de l'écosystème
forestier entraîne la fragmentation de la forêt et la
réduction de sa surface terrière.
· les prélèvements d'arbres conduisent
à un appauvrissement de la biodiversité et à la
raréfaction des individus de gros diamètre.
VIII- LE CONTEXTE SCIENTIFIQUE
Les études portant sur la dynamique de la
végétation sont relativement anciennes et remontent à la
fin du XIXè siècle, lorsque Cowles (1899) étudie les
stades de végétation sur les bords du lac Michigan aux Etats Unis
(Vanpeene Bruhier, 1998). Depuis cette date, l'observation de la succession de
la végétation sur un site a passionné de nombreux
chercheurs. Ainsi vont naître de nombreux débats et
théories souvent contradictoires. En effet, Clements en 1905 et Gleason
en 1917 seront à l'origine de deux théories fondamentalement
opposées sur la nature des communautés végétales
qui elles mêmes vont entraîner des visions différentes de la
dynamique de la végétation. Mais un rapprochement de ces deux
théories a pu être opéré par la suite.
VIII.1. Des théories controversées au sujet
des successions végétales
VIII.1.1. La théorie organiciste de
Clements
Clements (cité par Vanpeene Bruhier, 1998)
développe une vision holistique des communautés
végétales c'est-à-dire qu'il les envisage comme un tout.
On lui doit d'ailleurs le concept de succession végétale. Pour
lui, les communautés végétales sont comparables à
des super organismes qui naissent, se développent, meurent et laissent
la place aux autres. Les espèces pionnières, par leur
présence et leurs effets sur le milieu, créent des conditions
favorables à l'installation de nouvelles espèces qui les
remplacent graduellement. Les espèces pionnières qui ont une
croissance rapide, une durée de vie courte et qui sont souvent
héliophiles colonisent l'espace, le modifient pour faciliter et
favoriser l'installation d'autres espèces plus longévives. C'est
par exemple le cas de Musanga cecropioides ou parasolier dans notre
zone d'étude. Ces plantes pionnières ont donc un effet de
facilitation. L'aboutissement de cette succession conduirait au climax, stade
mature de la communauté végétale. Ce développement
illustre le « modèle de facilitation » qui est l'un des
modèles utilisés pour étudier les processus de la
dynamique naturelle des forêts.
VIII.1.2. La théorie stochastique de
Gleason
Gleason considère plutôt que la dynamique de la
végétation est fondée sur l'individu. La communauté
végétale n'est donc pas un organisme mais un assemblage
d'espèces qui ont chacune des réactions individuelles face
à l'environnement. L'évolution de la végétation est
le fait des seuls individus qui se déploient plus ou moins rapidement en
fonction du niveau de leur accommodation aux conditions du milieu.
VIII.1.3. La théorie du continuum
Whittaker fera en 1953 la synthèse de ces deux
théories. Il considère qu'une communauté
végétale connaît non pas un, mais plusieurs climax
possibles en fonction du milieu et des perturbations. Il rejette aussi la
notion d'association végétale en proposant celle du continuum
végétal. Celle-ci reconnaît dans les transitions entre
milieux, une certaine continuité de végétation, tout en
admettant qu'il existe des communautés rassemblant des assemblages
d'espèces adaptées aux pressions anthropiques.
Par la suite, la prise en compte de la dimension spatiale et
temporelle de la végétation a abouti au concept de succession
végétale c'est-à-dire la description des changements de la
végétation dans le temps et l'espace. Blondel (1979)4
définit la succession végétale comme « l'ensemble des
processus par lesquels un écosystème naturellement ou
artificiellement altéré ou détruit entreprend
spontanément de se reconstituer pour recouvrer un état qui soit
en quelque sorte un fac-similé de son état initial ». Les
successions sont de deux types: la succession primaire lorsqu'il s'agit de la
colonisation d'un sol nu par la végétation et la succession
secondaire quand il s'agit de la "réparation" par la
végétation des conséquences d'une perturbation qui peut
entre autres être d'origine anthropique. C'est ce dernier type de
succession qui sera étudié dans le cadre de ce travail, la
perturbation de la forêt du site de l'étude étant due
à l'exploitation industrielle du bois qui suppose un
prélèvement sélectif des arbres et non une coupe rase. Il
convient de noter à ce niveau que dans le cas de la succession primaire,
c'est la modification des facteurs de l'environnement qui déterminent la
succession alors que c'est surtout l'interaction entre les espèces
(facilitation, inhibition, tolérance) qui est le moteur de
l'évolution dans les successions secondaires.
La succession végétale a elle aussi
généré des oppositions d'école. Ainsi, pour
certains auteurs les changements de végétation au cours de la
succession sont contrôlés par la végétation
ellemême car chaque groupe d'espèces occupe un site à un
moment donné, rendant le milieu défavorable pour lui-même
et favorable pour le groupe d'espèces suivant. Pour d'autres encore
comme Egler (1954, cité par Saccone, 2007) qui a étudié la
succession sur les champs abandonnés, la succession n'existe pas
réellement. En effet la composition floristique initiale (les
espèces présentes avant ou après l'abandon) explique le
développement de la végétation après l'abandon.
Pour une troisième théorie dite réductionniste, la
succession est basée sur l'individu. Chaque individu a ses
capacités, son degré de tolérance par rapport aux
autres.
Les études sur la dynamique de la
végétation apparaissent donc très complexes au vue des
théories contradictoires qu'elles ont suscitées au cours du
temps. Mais, les dernières approches à ce sujet allient toutes
ces différentes écoles et courants de pensée.
4 Blondel, J. 1979. Biogéographie et
écologie. Masson, Paris.
VIII.2. Les modèles de la dynamique
forestière
Plusieurs modèles ont été
élaborés qui essayent de mettre en évidence les
étapes de la succession ou de la dynamique végétale. On
peut par exemple citer :
· le « modèle de facilitation ». c'est
celui qui est assuré par les espèces pionnières qui, en
modifiant le milieu qu'elles occupent en premier, facilitent l'installation des
espèces à plus longue durée de vie. Ainsi, après
l'exploitation de la forêt, celle-ci se reconstitue rapidement d'abord
à partir d'espèces héliophiles souvent à bois
tendre comme Musanga cecropioides, Myrianthus arboreus, Macaranga
spinisa... Ces espèces cèdent par la suite le terrain
à d'autres comme Alstonia boonei, Pycnanthus angolensis, Terminalia
superba, Triplochiton scleroxylon...
· le « modèle de tolérance ». Il
suppose la coexistence d'espèces pionnières dominantes avec
d'autres espèces peu abondantes dont elles tolèrent la
présence.
· le « modèle d'inhibition ». Ici, les
espèces pionnières très dynamiques laissent difficilement
la possibilité aux autres de s'installer. Ces espèces
protègent donc leur espace contre toute forme de colonisation
étrangère ce qui peut pendant quelques temps bloquer la
reconstitution de la forêt.
VIII.3. Etat de la question
La dynamique forestière a été
envisagée de plusieurs manières en fonction des disciplines des
chercheurs qui ont abordé cette problématique (biologie,
botanique, zoologie, écologie, sciences de l'environnement,
géographie) même si, du fait de l'interdisciplinarité, les
démarches méthodologiques utilisées sont voisines et les
conclusions parfois convergentes. La littérature consultée aborde
la dynamique forestière sous deux angles principaux: la dynamique
naturelle des peuplements forestiers et la dynamique provoquée par les
activités humaines.
VIII.3.1. La dynamique naturelle des forêts
Les forêts ne sont pas des entités statiques ou
immuables. Elles connaissent une évolution permanente, un
perpétuel processus dynamique même en dehors de toute intervention
humaine. Des études sont par exemple formelles sur l'évolution
des forêts tropicales à travers le temps.
VIII.3.1.1 La dynamique induite par les fluctuations
climatiques passées
Les changements radicaux des climats dans le temps et dans
l'espace ont toujours laissé des héritages importants sur le
relief, mais aussi sur la végétation qui a du s'étendre ou
se rétracter pour survivre. Les forêts tropicales ont par exemple
connu une évolution provoquée par les grandes fluctuations
climatiques intervenues au cours du Quaternaire (Figure 2). Les surfaces
actuellement occupées par les forêts n'ont pas toujours
été celles que nous connaissons aujourd'hui. De nombreuses
recherches fondées sur l'étude des matières organiques des
sols (MOS) et sur des analyses polliniques ont montré que les
forêts tropicales ont connu plusieurs fluctuations au gré des
changements paléoclimatiques. Elles ont été soumises
à d'importantes transformations de la biodiversité et à
une modification de leur distribution dans le temps et dans l'espace. Les
forêts tropicales se sont adaptées aux changements climatiques en
fluctuant c'est-àdire en entrant dans un processus dynamique. En
périodes climatiques humides, elles sont en phase d'extension. Par
contre, en périodes sèches, elles régressent pour assurer
leur survie dans les zones refuges qui ont conservé une humidité
suffisante.
Au Cameroun par exemple, pendant les périodes
sèches du quaternaire, la végétation a migré vers
les zones refuges comme le pourtour de la zone
côtière...5 C'est à partir de ces zones refuges
que s'est développée la reconquête une fois que le climat
est redevenu favorable. De nombreuses autres recherches ont montré que
les forêts tropicales ont régressé et se sont
fragmentées durant le dernier maximum glaciaire il y a environ 20 000
ans (Maley, 2001, Giresse et al, 2004). Entre 23 000 et 15 000 ans BP on a
observé un retrait de la forêt au profit de la savane du fait de
la baisse de la pluviosité. Entre 10 000 et 4 000 ans BP, on note une
forte extension de la couverture forestière à l'ouest de
Yaoundé consécutive à une phase climatique humide (Giresse
et al, 1994). A partir de 2500 ans BP les forêts d'Afrique centrale ont
subi des destructions importantes provoquées par une phase climatique
sèche. Les formations savanicoles vont s'étendre durant cette
période. Depuis environ 1500 ans BP, la rehumidification a
entraîné la reconquête de la forêt sur la savane
(figure 2)
5 Polycopié Cours UE Géo 422 :
Dynamique des espaces forestiers et risques, année 2007-2008.
Figure 2 : La reconstitution de l'évolution de la
végétation au cours du Quaternaire au Sud Cameroun, le cas du lac
Barombi Mbo (Kumba) (Giresse et al, 1994)
D'autres travaux de reconstitution menés en Afrique
centrale atlantique ont formulé les mêmes hypothèses.
Trois périodes apparaissent : le début de
l'Holocène6, humide et forestier ; l'Holocène
supérieur plus sec, constitué de mosaïques
forêt-savane ; enfin, depuis environ six
siècles, la période actuelle à nouveau
plus humide (Schwartz, 1997)7. L'histoire de la forêt
tropicale au Quaternaire est donc celle d'une dynamique constante liée
aux fluctuations climatiques et qui s'est traduite par des transgressions et
des régressions de la forêt sur la savane. Mais la dynamique de la
forêt n'est pas que passée. Aujourd'hui encore, la forêt est
en continuelle évolution. Cette évolution est par exemple
contrôlée par des chablis au sein des peuplements forestiers.
VIII.3.1.2 La dynamique causée par les chablis ou
la régénération naturelle
Pour Riera et al. (1990), le chablis correspond
à la perturbation provoquée par un arbre tombé au sol.
Avec la mortalité des arbres, on le considère comme le moteur de
la sylvigénèse car il est à l'origine de la
régénération ou du rajeunissement graduel de la
végétation. Dans les chablis, la mort des individus
âgés offre l'opportunité à d'autres espèces
de se développer et de se reproduire, faisant de la forêt une
mosaïque où cohabitent des phases de jeunesse, de maturité
et de vieillesse. En effet, la chute d'un arbre en forêt causée
par des vents violents ou des fortes pluies provoque l'ouverture de la
canopée. Cette situation entraîne une modification des conditions
microclimatiques avec une intensité de lumière plus forte qui
parvient au niveau du sol. De nombreuses espèces surtout
héliophiles profitent de cette ouverture et des changements induits pour
entreprendre leur régénération. Selon Riera et al
(1990) ou Kahn (1982), les espèces qui interviennent dans les processus
de régénération ainsi enclenchés sont
classées en trois groupes (figure 3) :
· Les espèces pionnières qui peuvent
germer facilement lorsque la lumière est intense. Elles participent les
premières à la reconstitution de la végétation.
C'est d'ailleurs à cela qu'elles doivent leur nom. Leur croissance est
rapide et leur durée de vie courte (3 à 30 ans) ;
· Les cicatricielles ou nomades. Elles germent à
la lumière et ont une durée de vie plus longue que les
espèces pionnières (100 ans). Elles doivent leur nom à
leur capacité à cicatriser les forêts perturbées ou
à leur isolement les unes des autres. Leurs plantules se
développent facilement lorsque la luminosité est
intermédiaire entre la pleine lumière et le sous-bois;
· Les espèces structurantes ou dryades. Elles ont
une croissance lente et une longue durée de vie. Leur présence
à l'état mâture confère au peuplement un
caractère ancien et une certaine stabilité. Les espèces
structurantes ont une croissance lente et une durée de vie longue.
7 Cité par Henri Puig, 2001, La
forêt tropicale humide, Belin, 448 P. P.29
Figure 3 : La dynamique de la
régénération naturelle de la forêt dense tropicale
(adapté de Kahn, 1982)
Ces différents groupes d'espèces se relaient
après une perturbation au sein du peuplement forestier pour reconstituer
la végétation. Le maintien de la biodiversité dans les
forêts tropicales est en partie du à ces phénomènes
de perturbations cycliques que sont les chablis qui maintiennent la
biodiversité tout en la faisant évoluer. Le résultat de
cette dynamique à l'échelle d'un peuplement végétal
est qu'il n'existe pas une uniformité dans la structure et la
composition de la forêt. Celle-ci constitue désormais un
assemblage où cohabitent des unités élémentaires
différentes par leur architecture et leur composition floristique. Ces
unités élémentaires sont considérées par
Oldeman (1990, cité par Blanc, 1998) comme des éco-unités
c'est-à-dire des unités de végétation ayant
commencé leur développement au même moment et sur la
même surface à la suite d'une perturbation.
La forêt est en équilibre dynamique, son
renouvellement étant assuré par la modification successive de
petites taches (Bormann et Likens, 1979 cités par Carrière,
1999). On aura ainsi des unités mâtures composées de
grands arbres, des chablis en phase de croissance et de
cicatrisation, des unités de dégradation.
Toutes ces unités juxtaposées forment la mosaïque
forestière, expression proposée par Aubreville. Cette
mosaïque selon Oldeman est l'ensemble d'éco-unités à
différentes phases de développement et caractérisant
différents stades de la succession. On assiste ainsi à une
régénération cyclique de la forêt. La perturbation
naturelle n'est pas toujours synonyme d'érosion ou de perte de la
biodiversité. Car, le maintien de la biodiversité dans les
forêts tropicales est en partie assigné au phénomène
de perturbations cycliques que sont les chablis qui maintiennent la
biodiversité et la font évoluer.
VIII.3.1.3 La dynamique des marges ou des
interfaces
Un autre aspect de la dynamique végétale est
celui qui concerne les mouvements à la limite des biomes ainsi que nous
l'avons évoqué plus haut en ce qui concerne le balancement de la
limite forêt savane au quaternaire.
L'évolution de la zone de contact forêt savane a
longtemps marqué les études de biogéographie et de
botanique. De nombreux termes ont été employés pour
signifier cette évolution des marges dans un sens comme dans l'autre:
transgression, recul, avancée, reconquête, afforestation,
emboisement, savanisation, invasion. Certains précurseurs de la
phytogéographie tropicale comme Aubreville traitaient
déjà, au milieu du siècle dernier, de l'évolution
de la ligne de démarcation entre la forêt et la savane en parlant
par exemple du "recul des lisières de la grande forêt
guinéenne et équatoriale" (Aubreville, 1948 cité par
Youta, 1998)...
Au centre Cameroun, la dynamique spatiale de la forêt
sur sa lisière a été étudiée par Youta (Op.
cit.). Son étude établit l'avancée de la forêt sur
la savane, prenant ainsi à contre pied les tenants de la thèse de
la forêt figée ou en recul. Cette première approche de la
dynamique fondée sur l'évolution spatio-temporelle et même
floristique renvoie à la dynamique des marges ou écotones en zone
de contact forêt-savane. Elle s'appuie généralement sur la
superposition diachronique des images satellites ou des photographies
aériennes. La structure horizontale de la végétation est
donc étudiée à travers une comparaison des états du
couvert végétal à différentes périodes.
Certaines recherches ont tenté d'appréhender
l'évolution de la forêt dans ses aspects fonctionnels, sans
intervention humaine. C'est le cas des travaux de Kouob et Sonke
(2001)8 qui étudient la mortalité, le recrutement et
l'accroissement en hauteur et en diamètre des arbres à
l'intérieur de la réserve du Dja, sur deux transects permanents
entre 1993 et 2000. Ici, le comportement des individus est étudié
à l'intérieur des placettes ou des transects. Ces
différentes approches de la dynamique nous intéressent peu du
fait qu'elles ne sont pas strictement liées aux activités
humaines et à l'exploitation forestière plus
particulièrement.
VIII.3.2 La dynamique forestière induite par
les activités anthropiques
Les activités anthropiques qui imposent les marques
les plus visibles sur la végétation sont surtout l'agriculture et
l'exploitation du bois. Leur influence sur l'évolution du couvert
végétal a été diversement documentée.
VIII.3.2.1. La régénération
post-culturale
Les champs abandonnés après récolte
connaissent eux aussi une activité dynamique. La vitesse de la
reconstitution qui s'opère est fonction du nombre de cycles culturaux
antérieurs. Un espace qui a été pendant longtemps
exploité verra son potentiel de régénération
réduit. Certains éléments de l'environnement
immédiat peuvent également avoir une influence sur la
reconstitution. C'est par exemple le cas de la présence sur les
jachères de certains arbres épargnés par un abattage
sélectif pendant l'activité agricole. Ces « orphelins de la
forêt » (Carrière, 1999) ont un rôle déterminant
dans la dynamique forestière. En effet, l'arbre au sein de
l'agrosystème crée les conditions favorables à
l'installation des essences ligneuses et facilite la
régénération du couvert forestier (Yarranton et Morrison,
1974)9.
Certains auteurs comme Carrière (1999)
considèrent que l'agriculture extensive traditionnelle basée sur
le système de cultures itinérantes ou essartage, joue un
rôle proche de celui des chablis dans la dynamique forestière.
Pour cet auteur, dans certaines situations, les perturbations induites par les
agriculteurs ne sont pas préjudiciables à la biodiversité
de la forêt, mais au contraire, elles en constituent un des
éléments. Cela s'explique par le fait que les agriculteurs en
aménageant les parcelles de cultures, épargnent un certain nombre
d'arbres pour diverses raisons comme la fertilisation pour le cas des
légumineuses. D'autres raisons expliquent la préservation des
arbres
dans les champs. C'est le cas des arbres fruitiers, des
arbres d'ombrage, des essences à valeur culturelle ou rituelle, des
éléments à valeur médicinale ou culinaire. Aussi,
une fois la parcelle abandonnée en jachère, ces arbres
dispersées favorisent ou accélèrent la reconstitution de
la forêt du fait qu'ils sont des portes graines et servent aussi de
perchoirs aux oiseaux et animaux grimpeurs qui s'y attardent pour manger ou
pour expulser leurs déjections. Aussi, les perturbations induites par
l'agriculture itinérante pratiquée en forêt dense humide
dans un contexte de faible densité démographique
présentent quelques caractéristiques semblables aux perturbations
naturelles. Plusieurs raisons expliquent cela :
· Les perturbations cycliques qui y sont pratiquées
correspondent à des éclaircies temporaires que le calendrier
agricole des terroirs autorise ;
· Le terroir agricole en mosaïque de phases de
jeunesse (construction, jeune jachère), de maturité
(jachère âgée) et de vieillesse (destruction par essartage,
retour à la culture) y constitue un facteur de maintien de la
biodiversité;
· Les perturbations fréquentes (temps de
jachère de 20-30 ans) tout comme les chablis loin de diminuer la
diversité biologique, y permettent plutôt le renouvellement ;
· La variabilité des intensités des
perturbations (faibles superficies défrichées, dispersion des
champs dans le terroir, courte durée des cultures, rotations
déclenchées avant la diminution de la fertilité des sols)
concourt également à un maintien de la biodiversité
globale et même parfois à un enrichissement par le biais
d'introduction d'espèces.
Toutes ces perturbations anthropiques améliorent la
forêt en tant que ressource utilisable pour l'homme et contribuent de
manière significative à la structuration en taches de la
forêt et donc au maintien de sa biodiversité à
l'échelle locale. Le maintien et surtout l'évolution de la
biodiversité s'expliqueraient par les changements climatiques et
écologiques (pénétrations de nouvelles espèces)
ainsi que par les facteurs historiques (sédentarisation des villages),
sociaux (évolution des maîtrises foncières, agencement des
cultures dans l'espace) et culturels (abattage ou non de certaines
espèces d'arbres culturellement valorisées). Dans une perspective
dynamique, on peut résumer l'action de l'agriculture itinérante
par une altération puis une reconstitution de la forêt, donc un
maintien de la biodiversité et une évolution de celle-ci à
travers l'histoire des populations et leurs activités de subsistance.
Kahn (1982) a étudié la reconstitution de la
forêt tropicale humide après culture traditionnelle
au Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire sur 14 jachères d'âges
différents (de 3 à 60 ans). Pour lui, la forêt tropicale
humide se reconstitue par une série de stades successifs, chaque stade
étant le résultat
de l'installation, du développement et du
dépérissement d'un ensemble floristique qui facilite
l'installation et le développement du stade suivant. La théorie
de la reconstitution qui découle de cette étude établit
que le développement de la forêt passe par une série de 4
stades successifs:
· Le stade herbacé graminéen où la
végétation présente essentiellement les adventices surtout
graminéennes;
· Le stade à herbacées et sous ligneux qui
correspond aux cultures associées de manioc, taro, bananier...
· Le stade arbustif pionnier qui est
caractérisé par la présence de nombreuses espèces
secondaires et principalement Musanga cecropioides, Macaranga hurifolia,
Harungana madagascariencis. Ce stade disparaît par sénescence
et absence de régénération.
· Le stade préclimacique. Il met en place une
forêt secondaire qui précède la forêt climacique.
C'est le dernier stade avant la reconstitution complète de la
végétation.
Le schéma de la succession tel que
présenté par Kahn est à peu près comparable
à ceux élaborés par certains de ses
prédécesseurs en ce qui concerne la reconstitution de la
forêt tropicale humide. Celle-ci, une fois perturbée, tend
à se reconstituer à travers une série d'étapes qui
passent par les plantes herbacées, les arbres à croissance rapide
et à faible longévité, les grands arbres
héliophiles et enfin les arbres caractéristiques de la
forêt primaire qui sont constutiés essentiellement
d'espèces sciaphiles.
Aubreville (1947, cité par Kahn, 1982) distingue trois
phases dans le processus de reconstitution :
· la première phase ou genèse qui est
celle des espèces caractéristiques des forêts secondaires.
Les espèces en présence sont essentiellement héliophiles.
Elles s'élèvent à une taille située entre 15 et 20
m de haut ;
· la deuxième phase qui connaît la formation
d'un sous-bois comparable à celui d'une forêt primaire.
D'autres espèces héliophiles encore plus grandes que les
premières dominent ;
· la troisième phase ou reconstitution de la
forêt primaire. Ici les espèces secondaires de
la première phase ont disparu. Ce sont désormais les grands
arbres longévives qui dominent.
héliophiles, de la forêt secondaire jeune
constituée par des espèces à croissance rapide qui
éliminent par leur ombrage les arbres de la phase
précédente, la forêt secondaire haute qui présente
une voute qui tend à se refermer. Cette dernière phase est dite
préclimacique et renferme de plus en plus des espèces de la
forêt primitive.
Dans la partie septentrionale du Cameroun, Aboubakar Moussa
(1997) a déterminé les conséquences de l'exploitation des
espaces boisés ainsi que les risques qui en découlent. Il note la
réduction du couvert ligneux causée par les défrichements
culturaux croissants et la raréfaction de certaines espèces
ligneuses (Trichilia roka, Dalbergia melanoxylon). Aoudou (2001) a
observé une augmentation du recouvrement des ligneux, une
diversité de structures de la végétation en fonction de la
durée de l'abandon sur les terroirs anciennement habités et mis
en défens dans la Haute Benoué.
Dans la région autour de Mbalmayo, les
activités agricoles induisent la perte et/ou la réduction des
ressources ligneuses. Parfois elles provoquent la conversion de la forêt
dense humide en forêts secondaires. De plus, la réduction de la
durée de la jachère (moins de 5 ans) limite la reconstitution de
la forêt, d'où la présence permanente de Chromolaena
odorata dans les friches (Mbida Fils, Op. cit.).
La reconstitution de la forêt après
activités pastorales et agricoles a été
étudiée au Panama par De Walt et al (2003). Cette
reconstitution est plus rapide du point de vue de la structure que de la
composition spécifique car la structure de la forêt
exploitée est comparable à celle d'une forêt peu
perturbée 70 années après abandon.
VIII.3.2.2. La régénération
post-exploitation industrielle
Le prélèvement industriel du bois est à
l'origine de nombreuses perturbations au sein d'un massif forestier. En effet,
l'exploitation forestière cause presque toujours automatiquement des
dégâts collatéraux consécutifs par exemple à
l'abattage des arbres qui entraînent dans leur chute d'autres arbres
pourtant pas ciblés, à l'ouverture des routes et pistes de
débardage, au compactage et à l'exposition du sol... Les
répercussions écologiques de l'exploitation forestière sur
la végétation ont également été
étudiées. Ces répercussions varient en fonction du type ou
mode d'exploitation. Ainsi, les coupes rases ne présentent pas les
mêmes conséquences écologiques que l'exploitation
sélective qui est généralement considérée
comme un mode d'exploitation durable.
White et al (1994) et Asner et al. (2004)
ont montré que les conséquences de l'exploitation
sélective sur les peuplements forestiers étaient très
réduites comparativement aux autres modes d'exploitation. L'exploitation
forestière entraîne une ouverture importante de la canopée.
Dans les forêts africaines peu denses, Abebe et Holm (2003)
considèrent que cette ouverture est de l'ordre de 10%. Pour Cannon
et al. (1994) elle peut atteindre jusqu'à 75% dans les
forêts denses à Dipterocarpaceae d'Asie du Sud-Est. L'ouverture
correspond essentiellement aux trouées d'abattage et aux chablis
liés aux dégâts d'abattage et dans une moindre mesure
à l'ouverture des pistes de débardage. Elle n'entraîne pas
de fractionnement majeur des massifs mais des trouées passagères
(Asner et al. 2004).
Palla (2000) qui a évalué l'impact de
l'exploitation forestière sur les ressources naturelles à la
périphérie du Dja révèle une grande secondarisation
de la forêt. Elle montre une forte réduction des effectifs de
certaines espèces parmi les plus prélevées de même
qu'une raréfaction des arbres de diamètre supérieur
à 65 cm. L'étude montre aussi un faible impact de l'exploitation
forestière sur la diversité spécifique et une modification
notable de la structure de la forêt de par la diminution de la surface
terrière des arbres à dbh > 70 cm.
Malcolm et Ray (2000) ont étudié la
reconstitution de la forêt sur les routes principales et secondaires, les
pistes de débardage, ayant servi à l'exploitation du bois au
Sud-ouest de la République Centrafricaine. Le réseau des routes
et pistes a été comparé à des portions de
forêt relativement intactes 12 et 19 ans après exploitation. Ils
arrivent à la conclusion que les effets écologiques sont plus
perceptibles sur les routes principales et secondaires dans la mesure où
la densité des plantes du sous-bois est plus grande sur ces routes qu'en
forêt non exploitée. De plus la diversité et la richesse en
espèces sont faibles sur routes principales, moyennes sur routes
secondaires et importante sur pistes de débardage et en forêt non
exploitée. Les routes principales et secondaires présentent
après exploitation une structure forestière modifiée avec
un sous-bois dense et très peu de plantules.
La régénération des espèces
commerciales a été étudiée 14 mois après
l'extraction du bois dans une forêt sèche en Bolivie par
Fredericksen et Mostacedo (2000). La densité, la composition
spécifique, la croissance des plantules ont été
étudiées sur les différents points d'impact de
l'exploitation (routes, pistes de débardage, parc à bois...) et
comparés à un site non exploité. L'étude
révèle une forte densité et un accroissement rapide des
arbres sur les sites où les sols ont
été fortement perturbés (parc à
bois, routes) car ici, l'exposition à la lumière et la
perturbation du sol réduisent la compétition avec les autres
plantes.
Akamba (2000) relève que la causalité directe
entre exploitation forestière et dégradation du couvert
végétal n'est pas évidente du fait de la présence
des recrûs forestiers dans les secteurs déjà
exploités tout comme la présence de petits îlots de
forêt au sein des faciès de dégradation au sud du Nyong et
Mfoumou. A partir d'une évaluation écologique basée sur le
comptage et la mesure du dbh des essences, elle observe que les zones
intensément exploitées se caractérisent par l'absence des
espèces de catégorie exceptionnelle.
Hall et al (2003) ont étudié les effets
de l'exploitation industrielle sur la forêt en République
Centrafricaine en procédant à une comparaison entre une parcelle
vierge et deux parcelles respectivement de 6 mois et de 18 ans
post-exploitation. Ils arrivent à la conclusion que l'exploitation
sélective a très peu d'influence sur la diversité
spécifique même si elle modifie la structure de la
végétation. Cette perturbation de la structure de la forêt
pourrait limiter la régénération des principales
espèces exploitées.
Les travaux de Makana et Thomas (2005) montrent que
l'augmentation de l'intensité de la lumière liée à
l'exploitation sélective ne favorise pas significativement la
germination des graines de certaines espèces exploitées comme le
Sapelli. En revanche, la croissance des plantules (hauteur et diamètre)
semble favorisée dans les trouées d'exploitation par rapport au
sous-bois (près de deux fois plus rapide)
Au total, les travaux précédents montrent que
l'exploitation d'une forêt influence son fonctionnement et son
évolution en modifiant surtout sa structure et sa composition
floristique. Dans les chapitres suivants, nous voulons voir si ces conclusions
s'appliquent également à notre zone d'étude. De plus, au
stade actuel des recherches, il reste à déterminer (1) en combien
de temps et (2) dans quelles conditions d'exploitation industrielle une
parcelle de forêt exploitée peut retrouver sa composition
floristique et sa structure initiale. Cela passe par la mise en application
d'une technique qui fait intervenir les démarches de la
géographie, de l'écologie et de la botanique.
IX- LES TECHNIQUES D'APPROCHE DE LA DYNAMIQUE DU
PEUPLEMENT FORESTIER
Ce travail vise à faire une étude comparative
entre un massif forestier ayant subi une exploitation forestière
industrielle à une date précise et un autre contigu qui lui, est
relativement resté à l'abri des perturbations d'origine
anthropique. La démarche indiquée pour appréhender les
phénomènes de la dynamique forestière est la
méthode diachrone. Celle-ci suppose une interprétation de
l'évolution du peuplement forestier qui découle de l'exploitation
sélective du bois. Elle peut s'appuyer sur la comparaison d'images
prises à différentes dates. Cette approche n'est pas
utilisée dans ce travail compte tenu de l'indisponibilité de
couvertures aériennes à haute résolution. La
méthode synchrone qui s'appuie essentiellement sur des relevés
botaniques a été privilégiée. Elle se base sur des
relevés floristiques d'une parcelle "vierge" et d'une parcelle
exploitée il y a 7 ans. Les observations croisées permettront de
comprendre la dynamique des peuplements végétaux.
IX.1. Les enquêtes et les relevés de terrain
IX.1.1. Le matériel de terrain
Sur le terrain, nous avons eu recours à une petite
batterie de matériel devant faciliter le parcours du site et le travail
de collecte des données en forêt. Il a ainsi été
nécessaire d'utiliser :
· une machette pour se frayer le chemin en forêt,
délimiter les placettes et écorcher les arbres identifiés
;
· un mètre ruban pour mesurer la
circonférence des arbres ; un décamètre utilisé
pour mesurer les distances entre les pieds d'arbres et d'arbustes
· une ficelle étalonnée à 10 m pour
dimensionner les placettes et les placettes élémentaires ;
· une boussole et un appareil photo ;
· un lexique utilisé par le botaniste pour
déterminer le nom scientifique de chaque individu.
IX.1.2. La collecte des informations
IX.1.2.1 Les enquêtes et entretiens de
terrain
Un entretien avec le délégué
départemental des forêts du Nyong et So'o et nos
observations personnelles de terrain nous ont permis de localiser les sites.
Il s'agissait de localiser avec précision dans une zone
homogène les emplacements d'un peuplement forestier resté vierge
de
toute coupe d'arbre, d'une part, et d'autre part, l'assiette
d'une ancienne coupe d'arbres. Le choix s'est porté sur Faekele, village
de moins de 200 habitants. Il est situé relativement non loin de la
ville de Mbalmayo et n'est accessible que par une piste très mal
entretenue. Une fois sur le terrain, des entretiens se sont poursuivis avec les
chefs des villages Faekélé I et II pour avoir une idée de
l'histoire de l'exploitation forestière dans la zone, puis avec certains
habitants du village réputés pour leur grande connaissance des
forêts de leur localité. C'est au terme de ces entretiens et
après des randonnées dans la forêt que notre choix a
été porté sur les deux sites devant servir de cadre aux
relevés botaniques.
IX.1.2.2. Les relevés botaniques
Deux sites ont été repérés
à la suite de nos observations personnelles, mais aussi après des
entretiens avec les chefs et les résidents des villages. Le secteur qui
a été concédé à un exploitant industriel en
2002 est situé à environ 4 km du village
faékélé II ; le second, non exploité, est
situé non loin du premier site (ceci pour avoir les mêmes
conditions écologiques et la même composition floristique). Sur la
parcelle exploitée, nous avons pu repérer trois souches des
essences prélevées ainsi que les marques encore visibles qui
témoignent du passage des engins et de la réalité d'une
exploitation récente.
Le mode d'échantillonnage est celui des placettes
c'est-à-dire des relevés sur des parcelles de forêt de
faible dimension. Une placette de 100 m de côté, soit 1 ha a
été établie dans la zone perturbée et une autre
à l'intérieur de la zone mâture relativement intacte devant
alors servir de parcelle témoin. Pour réaliser une placette, nous
avons repéré le nord à l'aide de la boussole et
tracé un axe de 100 m de long. Toujours avec la boussole, nous avons pu
tracer sur le même principe les trois côtés restants.
La collecte des données floristiques s'est faite en
deux temps. D'abord dans la parcelle exploitée (que nous appellerons
indifféremment site exploité, parcelle perturbée ou P 1)
puis dans la parcelle non exploitée (encore désignée ici
site témoin, P 2 ou encore forêt mature).
Pour faciliter les relevés et la cartographie des
ligneux sur le terrain, des layons perpendiculaires reliant les cotés
opposés de chacune des parcelles ont été tracés.
Les layons parallèles ont été subdivisés en
placettes élémentaires (ou quadrats) de 10 m de côté
(soit 100 m2) séparées les unes des autres par des
jalons matérialisant leurs limites. La figure 4 permet de distinguer
chacune des parcelles d'échantillonnage partant par exemple de 1-1, 1-2,
4-10 à10-10 etc. Les
parcelles d'échantillonnage ont ainsi été
quadrillées de manière à faciliter la lisibilité et
la compréhension des opérations de relevés botaniques.
Au terme de cette opération, chaque parcelle
présentait 100 placettes élémentaires de 100 m2
identifiables sur papier grâce à une grille numérique. Sur
chacune de ces mini-placettes, des relevés ont été
effectués avec l'assistance d'un technicien en botanique et ancien agent
spécialisé dans la prospection et l'identification des plantes
à l'ex-ONADEF. Ces relevés portent sur les arbres dont la
circonférence à 1,30 m du sol est supérieure ou
égale à 15,7 cm (ou diamètre = 5 cm). Classiquement, les
recherches menées dans le cadre des travaux précédents se
sont intéressées surtout aux ligneux de 10 cm de diamètre
au moins. Notre originalité sur le plan méthodologique tient
aussi au fait que nous sommes descendus à 5 cm pour avoir un
échantillon assez large, mais aussi pour prendre en compte les jeunes
individus qui interviennent activement dans la
régénération de la forêt.
Pour chaque individu, le protocole suivant a
été appliqué: l'identification de l'espèce par son
nom scientifique, la mesure de la circonférence à 1,30 m du sol
à l'aide d'un mètre ruban. Tous les individus ainsi
répertoriés ont été cartographiés et
positionnés dans la représentation schématique de la
placette. Nous avons également procédé à un
décompte des clairières et des arbres morts au sol ou
prélevés. Dans un carnet, un numéro d'ordre est
affecté à chaque individu. Sur la grille
millimétrée, le recouvrement des couronnes des arbres et arbustes
a également été restitué en estimant la projection
au sol. Nous nous sommes servis à cet effet du décamètre
qui a également été utilisé pour mesurer les
distances entre les pieds des arbres et des arbustes.
Photo: Kemadjou, décembre
2009.
Photo 1 : Mesure de la circonférence des ligneux
dans la forêt.
IX .2. Le traitement des données
Toutes les informations collectées sur le
terrain ont par la suite fait l'objet de traitements appropriés.
D'abord, l'orthographe des noms scientifiques des individus a été
vérifiée à l'aide
10
des listes des noms scientifiques, des familles et des
espèces dressée par Vivien et Faure (1985) et celle
dréssée par Letouzey (1968
.). Les valeurs de circonférence ont
été converties en diamètre
en utilisant l
a formule d = C /3,14 où d est le diamètre
et C la circonférence. Ces calculs nous ont permis
d'élaborer des diagrammes, des tableaux qui expriment les
différentes variables.
IX.2.1. Les paramètres
étudiés
Il est ici question de définir les
paramètres qu
i vont servir à caractériser la
végétation des deux sites. En effet, pour
caractériser une formation végétale, il est important de
prendre en compte certains éléments. Ces éléments
se rapportent à sa structure et à sa composition floristique.
Les paramètre
s structuraux renvoient à la distribution
spatiale des arbres et les paramètres
10 J. Vivien, J.J. Faure (1985), Arbres
des forêts denses d'Afrique centrale. PP 537-549.
floristiques décrivent les compositions des
végétaux et leur répartition spécifique. L'analyse
de tous ces paramètres nous permettra de mieux comprendre les
différences qui existent entre le site exploité et le site
relativement intact afin de dégager les aspects de la dynamique de la
végétation.
IX.2.1.1 Les paramètres structuraux
Les paramètres structuraux permettent
d'apprécier le stade de développement d'une formation
forestière. Ils peuvent être analysés à deux niveaux
: au niveau horizontal et au niveau vertical. La structure horizontale est
celle qui étudie la répartition des individus et la
manière dont ils occupent l'espace. La structure horizontale est
définie par la répartition des végétaux suivant le
plan horizontal (Gounot, 1969)11 . Elle correspond aux
différents types de distribution des arbres en fonction de leur
répartition par unité de surface. La structure horizontale permet
d'évaluer l'abondance, la dominance et la fréquence relative.
La structure verticale s'intéresse aux
différentes strates d'une formation végétale. En effet,
les plantes qui occupent un espace sont souvent constituées en ensemble
d'arbres, d'arbustes, de graminées de hauteur semblable qui forment
plusieurs strates. La structure verticale permet de visualiser les
différentes strates du peuplement. En dehors de quelques observations
sommaires, la structure verticale des forêts n'a pas été
étudiée dans ce travail. Seuls les paramètres de la
structure horizontale suivants ont été abordés :
· La surface terrière
La surface terrière d'un arbre est l'aire de la
section du tronc de cet arbre calculée à 1,30 m du sol. Pour un
peuplement, la surface terrière (St) est la somme des surfaces des
sections transversales des troncs des arbres sur un hectare. Elle s'exprime en
cm2/ha pour les individus et en m2/ha pour un peuplement
à partir d'une limite inférieure de diamètre.
11 Cité par Stéphanie M.
Carrière, Eric Randrianasolo et Julie Hennenfent, « Aires
protégées et lutte contre les bioinvasions : des objectifs
antagonistes ? Le cas de Psidium cattleianum Sabine (Myrtaceae) autour
du parc national de Ranomafana à Madagascar. », VertigO - la
revue électronique en sciences de l'environnement, Volume 8
Numéro 1 | avril 2008, [En ligne], mis en ligne le 12 avril 2008. URL :
http://vertigo.revues.org/1918.
Consulté le 23 février 2010.
Nous avons pu calculer la surface terrière de chaque
individu à partir de sa circonférence en obtenant d'abord son
diamètre par la formule :
d = C/3,14
avec d = diamètre et C = circonférence.
Par la suite, nous avons calculé le rayon (r) en
appliquant la formule r = d / 2. Ce n'est qu'après avoir trouvé
le rayon que nous avons calculé la surface terrière de chaque
individu par la formule St = r2 x 3,14.
Dans chaque placette, la surface terrière de chaque
individu, de chaque espèce, de chaque famille et de l'ensemble des
individus de la placette a été calculée.
La surface terrière relative (STr) d'une
espèce est le rapport de la surface basale de tous les individus
appartenant à cette espèce sur la surface basale de tous les
individus du peuplement.
· La distribution en classes de diamètre ou
structure diamétrique
Le diamètre de chaque individu a été
déduit de sa circonférence à partir de la formule
présentée ci-dessus. Les arbres ont ainsi été
répartis en plusieurs classes de diamètre pour chaque placette.
Ces classes ont une amplitude de 10 m à l'exception de la
première (5-10m). La structure diamétrique de chaque placette
nous a permis d'établir une comparaison entre les deux sites
étudiés. Elle permet en effet de caractériser la structure
végétale et d'apprécier l'évolution de celle-ci. On
devra donc voir s'il existe une différence fondamentale dans la
répartition des individus en classes de diamètre entre la
parcelle exploitée et celle restée intacte.
· Le recouvrement des couronnes
Encore appelé taux de couverture, le recouvrement des
couronnes exprime la surface occupée par la projection au sol de la
couronne des arbres. Elle permet d'estimer le pourcentage de la surface du sol
couvert par la canopée par rapport au pourcentage de la surface
où la lumière atteint le sol. Il est possible après
observation du recouvrement de dire si la formation végétale est
très fermée, fermée ou ouverte.
Le recouvrement des couronnes dans les deux sites a
été estimé sur le terrain par une cartographie de la
projection des houppiers des arbres au sol. On peut ainsi avoir une
représentation de la disposition horizontale de la
végétation.
· La densité et la densité
relative
La densité D est le nombre d'individus (de
diamètre = 5 cm dans cette étude) d'une espèce ou d'un
peuplement par unité de surface (l'hectare dans le cas
présent).
La densité relative d'une espèce est le rapport
du nombre d'individus de cette espèce sur le nombre total d'individus de
toutes les espèces dans l'échantillon. La densité est un
indicateur de la compétition entre les espèces dans un
peuplement. Elle permet aussi d'apprécier la
représentativité d'une espèce par rapport à toutes
les autres espèces de l'échantillon.
IX.2.1.2. Les paramètres floristiques
La structure floristique de nos parcelles sera
étudiée à travers la détermination de la richesse
spécifique, la diversité spécifique, de l'abondance, de la
dominance, de la fréquence des taxons.
· La richesse et la diversité
spécifiques
La richesse spécifique est le nombre total
d'espèces (S) rencontrées dans un peuplement.
La diversité spécifique quant à elle
renvoie au nombre d'espèces présentes dans le peuplement, mais
aussi et surtout la répartition de l'effectif total (N) entre les
différentes espèces. Elle permet de caractériser le type
de communauté. Si par exemple dans une communauté l'essentiel des
individus appartient à une même espèce, on pourra conclure
que cette communauté est peu diversifiée. C'est à ce
niveau qu'apparaît la différence entre richesse spécifique
et diversité spécifique.
La richesse et la diversité des familles et des genres
seront aussi prises en compte dans la recherche des indices pouvant
caractériser les populations végétales des deux sites.
· L'abondance et abondance relative
L'abondance est le nombre total des individus de chaque
espèce ou de chaque famille dans l'échantillon total. L'abondance
de taxons renseigne sur le nombre d'individus dune espèce
ou d'une famille sans tenir compte de la taille. Elle nous
permet de calculer la densité relative des taxons et s'obtient par le
rapport du nombre d'individus d'une espèce ou d'une famille au nombre
total des individus de ces taxons appartenant à l'échantillon.
L'abondance relative d'une espèce est le rapport du
nombre total d'individus de cette espèce sur l'effectif total du
peuplement (N).
· La dominance et la dominance relative
La dominance est l'aire couverte par une espèce dans
un peuplement. Autrement, c'est la somme des surfaces terrières basales
des individus de la même espèce ou de la même famille. Elle
exprime ainsi la proportion de la surface terrière d'une espèce
ou d'une famille par rapport à la surface terrière totale.
La dominance relative est le rapport de la surface couverte par
une espèce sur la surface couverte par toutes les espèces.
· L'Indice de Valeur d'Importance (IVI)
L'indice de valeur d'importance détermine l'importance
d'une espèce dans un relevé.
Sur une parcelle, l'Indice de Valeur d'Importance (IVI) peut
être calculé pour chacune des espèces. C'est la somme pour
chaque espèce de la densité relative (Dr) et de la
surface terrière relative (STr). IVI = Dr +
STr
Pour caractériser la structure floristique, plusieurs
autres indices sont utilisés. Le plus répandu est
l'indice de Shannon. Il est un indicateur de la richesse
spécifique d'un peuplement et permet de mesurer la biodiversité.
Il est calculé de la manière suivante :
H' : indice de biodiversité de Shannon i : une
espèce du milieu d'étude
pi : Proportion d'une espèce i par
rapport au nombre total d'espèces (S) dans le milieu d'étude (la
richesse spécifique), qui se calcule de la façon suivante:
p (i) = ni / N
où ni est le nombre d'individus pour
l'espèce i et N est l'effectif total (les individus de toutes
les espèces).
Un indice de Shannon élevé signifie que les
conditions de milieu sont favorables et permettent l'installation de nombreuses
espèces, ces espèces étant représentées par
un petit nombre d'individus.
L'indice de Simpson D' est
généralement aussi calculé. C'est une mesure de la
dominance. Il exprime la probabilité pour que deux individus choisis au
hasard dans une population appartiennent à la même espèce.
Il s'exprime à partir de la fréquence des espèces.
D'= ? (ni/N) 2
De nombreux autres indices de mesure de la similarité
des deux peuplements existent. C'est par exemple le cas de l'indice de Sorensen
qui mesure le recouvrement des espèces (échantillons) de deux
relevés. Cet indice ou coefficient de similitude (K) est
déterminé par la formule suivante :
K= (2c / a + b) x 100
avec a = nombre d'espèces du relevé 1 (ici la
parcelle exploitée), b = nombre d'espèces du relevé 2 (la
parcelle non exploitée),
c= nombre d'espèces communes aux deux relevés
Lorsque K > 50%, les deux relevés appartiennent
à la même communauté végétale.
Les paramètres structuraux et floristiques
présentés ci-dessus vont nous servir de base pour l'étude
des peuplements de chacun des sites retenus pour l'étude. Chacun de ces
paramètres sera individuellement appliqué à la
végétation de la parcelle exploitée et à celle de
la parcelle non exploitée de manière à apprécier
les similitudes ou les contrastes entre les deux sites.
Le mémoire comporte quatre chapitres. Le premier
chapitre présente le contexte écologique du site d'étude
en insistant sur les particularités physiques et humaines. Les chapitres
suivants exposent les résultats auxquels nous sommes parvenus. Ainsi, le
chapitre 2 établit les impacts de l'exploitation industrielle du bois
sur le plan de la biodiversité tandis que le chapitre 3 fait une analyse
des impacts structuraux de la coupe sélective des arbres. Enfin, le
chapitre 4 est consacré à la synthèse des impacts
écologiques et économiques de l'exploitation forestière
industrielle.
CHAPITRE 1:
LES CONDITIONS ECOLOGIQUES DU SITE
Introduction
Le présent chapitre a pour but de présenter les
caractéristiques de la zone où est menée cette
étude. Il s'attache donc à faire ressortir les descripteurs du
milieu que sont le relief, les sols, la végétation,
l'hydrographie en même temps que les principales activités
humaines autour du site de l'étude. Il s'agit de voir dans le
détail l'environnement physique et humain qui d'une manière ou
d'une autre influence l'évolution de la forêt sur le site de
Faékelé.
1.1. Le relief et les sols
1.1.1. Un plateau peu accidenté marqué par
des interfluves surbaissés
Le relief de la région de Mbalmayo est un plateau dont
l'altitude moyenne, comme sur l'ensemble du plateau sud-camerounais, se situe
entre 650 et 800 m. La morphologie générale présente une
relative platitude qui peut apparaître comme un facteur favorable au
déplacement des engins dans le cadre de l'exploitation
forestière. Cette platitude est par endroit perturbée par la
présence des collines aux sommets arrondis et aux versants convexes,
avec affleurement rocheux et des vallées principalement occupées
par le Nyong et ses affluents.
Le relief de plateau que l'on observe ici est
caractérisé par la succession des collines aux sommets applanis
et allongés. La monotonie est rompue par quelques mornes rocheux qui
semblent avoir mieux résisté à l'érosion par
applanissement. Le village Faekéle est situé sur une zone
où les altitudes s'établissent autour de 700 m (Figure 5). La
structure qui soutient ce relief est formée de roches cristallines
d'âge précambrien constituées par les schistes, les
micaschistes et les granites. Ces roches ont été soumises
à une pénéplanation poussé qui donne au relief son
aspect peu marqué.
Figure 5 : Le relief du site de Faekélé
II (adapté de la carte topographique de l'IGN de Yaoundé
NB-32-XVIII 2c au 1/50000)
1.1.2. Le Nyong, cours d'eau principal aux nombreux
tributaires
La région entière appartient au bassin du
Nyong. Le Nyong est le principal cours d'eau de l'arrondissement de Mbalmayo et
l'un des plus importants du plateau sud-camerounais. D'orientation
générale est-ouest, il limite au nord le territoire du village
Faekélé d'où partent d'ailleurs certaines de ses
rivières tributaires comme Mokorava, Opala, Mbembé, Toro,
Otongoué. La dernière rivière citée jouxte
pratiquement les deux sites qui ont servi de cadre aux relevés
botaniques.
L'abondance des pluies assure un débit assez important
tout le long de l'année. Le régime est équatorial et
caractérisé par deux périodes de hautes eaux et deux
périodes d'étiage
correspondant aux quatre grandes saisons du climat
équatorial de transition qui règne sur la région.
1.1.3. Des sols ferralitiques associés aux sols
hydromorphes
La combinaison des facteurs climatiques, géologiques
et géomorphologiques a contribué à la formation des sols
ferrallitiques rouges, jaunes et ocre. Dans l'ensemble, ces sols se
caractérisent par une grande épaisseur des profils car le climat
équatorial et sa pluviosité constante, associés au couvert
végétal forestier favorisent l'altération. On y distingue
classiquement six horizons de la surface vers les profondeurs : A0, peu
épais et constitué par la litière ; A1 qui a environ 20 cm
de profondeur, est humifère, grumeleux et présente une
activité biologique intense ; A2 d'environ 1m d'épaisseur. Cet
horizon est limoneux et de couleur ocre-beige, appauvri en argile; B0, d'une
épaisseur d'environ 80 cm, cet horizon est argileux, compact
imprégné d'eau et de couleur rouge-brique. C'est ici que l'on
retrouve les argiles accumulés ; B1 est épais d'environ 1 m.
c'est un horizon tacheté, argileux, imprégné d'eau et de
couleur rouge-brique ; C est un horizon d'altération qui est parfois
épais de 3 m ; au-delà de 6 m de profondeur, se trouve la
roche-mère non altérée.
Avec un pH faible compris entre 4.5 et 5.5, ces sols sont
très acides. Les sols ferrallitiques rouges sont les plus
représentés. Ils occupent les interfluves ou les collines. A
certains endroits, on note une association de sols ferrallitiques typiques et
des régosols ou sols très peu évolués. C'est le cas
par exemple tout autour du village Faekelé II (Figure 6).
Les bas-fonds présentent des sols essentiellement
hydromorphes. Ces sols se rencontrent le long de la vallée du Nyong
où ils forment d'ailleurs des marécages peu propices à
l'agriculture car ici le sol ne s'assèche jamais. La topographie plane y
favorise des conditions de stagnation saisonnière des eaux, conditions
très contraignantes pour une grande majorité des espèces
ligneuses.
A l'approche des bas-fonds et le long des petites
rivières tributaires du Nyong, quand les pentes s'adoucissent, les sols
ferrallitiques typiques cèdent la place à une association de sols
ferrallitique et de sols hydromorphes. Ces sols jaunes qui se
caractérisent entre autres par leur texture sableuse, un horizon
humifère réduit (3 à 10 cm), une sensibilité
à l'érosion sur les pentes servent souvent à la pratique
des cultures de contre saison.
Figure 6 : Les principales unités
pédologiques de la région de Mbalmayo (Adapté de
Vallerie, 1973)
1.2. Les conditions climatiques
Mbalmayo est fortement influencé par les
paramètres climatiques propres aux régions équatoriales.
En effet les températures sont élevées et constantes tout
le long de l'année. La moyenne annuelle se situe autour de 24,8°C.
Située à une altitude moyenne de 700 m, la région
connaît une très légère augmentation des
températures moyennes par rapport à la région autour de
Yaoundé.
Tableau 1 : Données de températures et de
précipitations de Mbalmayo
|
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Moyenne
|
Mois
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J
|
F
|
M
|
A
|
M
|
J
|
J
|
A
|
S
|
O
|
N
|
D
|
annuelle
|
Pmm
|
12,4
|
47,6
|
126,4
|
220,9
|
184,7
|
165,6
|
62,4
|
78
|
217,7
|
258,6
|
129,9
|
26,7
|
1531
|
T °C
|
25,6
|
26,6
|
26,9
|
25,9
|
25,4
|
24,7
|
23,9
|
23,9
|
24,4
|
24,5
|
24,9
|
25,3
|
25,2
|
|
Source : Délégation d'Arrondissement de
l'Agriculture et du Développement Rural de Mbalmayo. (Compilation des
relévés couvrant la période allant de 1999 à
2008).
Dans l'ensemble, les précipitations sont abondantes et
bien réparties dans l'année. Mbalmayo reçoit en moyenne
1531 mm de pluies. La répartition annuelle des précipitations
présente deux saisons pluvieuses bien marquées encadrées
par deux saisons relativement sèches.
La distribution des pluies (figure 7 et tableau 1) montre
quatre saisons au cours de l'année: une petite saison sèche qui
s'étale de juillet à août ; une grande saison de pluies de
septembre à novembre ; une grande saison sèche de décembre
à février ; une petite saison pluvieuse de mars à juin.
Toutefois, les maxima pluviométriques se situent en septembre et octobre
tandis que les minima sont observés en décembre et janvier. La
région présente 9 mois pluvieux (P = 50 mm) contre 3 mois secs (P
< 50 mm). La raison est que la petite saison dite sèche de juillet
à août n'est pas contraignante pour la végétation.
Cette période connaît juste un fléchissement des pluies,
soit 62 mm pour juillet et 78 pour août). En effet, d'après
Gaussen (cité par Birot, 1965), le mois sec dans les régions
tropicales correspond à celui au cours duquel la courbe de la
température passe au dessus de celle des précipitations (soit P
mm =2T). Or la figure 7 montre que la courbe des précipitations est
largement au dessus de celle des températures au cours de ces mois.
Figure 7 : Diagramme ombro-thermique de la station de
Mbalmayo
Au total, ce climat offre des conditions favorables au
développement de la forêt en même temps qu'il facilite son
exploitation pendant les deux périodes sèches. Les saisons
sèches sont en effet celles qui sont mises en valeur par les exploitants
forestiers pour leurs activités de récolte des essences
ligneuses, alors que les saisons pluvieuses ralentissent ou suspendent
momentanément leur activité.
1.3. Une végétation
caractérisée par la forêt dense humide semi
décidue
Le climat équatorial de type guinéen qui
règne sur la région est favorable à l'établissement
de la forêt. L'humidité permanente au cours de l'année
entretient la forêt dense. Cette forêt marque la transition entre
la forêt sempervirente méridionale et les savanes
péri-forestières septentrionales du territoire camerounais. Au
sein de cette forêt, l'empreinte des actions anthropiques est très
visible et apparaît nettement dans le modelage des paysages. Le milieu
est désormais caractérisé par un couvert
végétal en mosaïque comme c'est le cas du site de
Faekelé II : la forêt dense
humide semi-décidue dite « primaire », la
forêt secondaire post-culturale, la forêt marécageuse, les
prairies inondables, les champs et les plantations.
1.3.1. La forêt dense humide semi-décidue
Le grand bloc forestier qui occupe le sud du territoire
camerounais se décompose en deux principaux types : la forêt dense
humide sempervirente dans l'extrême-sud (d'Ebolowa à Yokadouma) et
la région côtière (de Campo jusqu'au bassin de la Cross
River et la forêt dense semi-décidue qui borde la première
en progressant vers le Nord entre 3° et 5° (figure 1). Si la
forêt dense toujours verte se met en place à la faveur d'un climat
très humide (précipitations moyennes annuelles comprises entre
2000 et 4000 mm et réparties sur 9 à 11 mois), la forêt
dense semi-caducifoliée quant à elle se développe sous un
climat un peu moins humide (1400 à 1600 mm/an réparties sur 9
mois en moyenne). Au plan physionomique, cette forêt ne diffère
pas significativement de la forêt dense sempervirente, sinon qu'environ
10 % des arbres (essentiellement les émergents) perdent
entièrement leurs feuilles au cours de la saison sèche. En
revanche, dans la forêt toujours verte, les arbres perdent leurs feuilles
individuellement et à des moments imprécis. Mais en gros, la
structure des deux forêts est tout à fait la même et la
valeur en bois est comparable, même s'il faut préciser que les
deux types sont dominés par des boisements appartenant à des
familles et des espèces différentes.
Le trait floristique caractéristique de la forêt
dense semi-décidue est la forte présence des Sterculiaceae qui
englobent un nombre considérable d'espèces appartenant au genre
Cola (Cola altissima, C. lateritia, C. lepidota, C. gigantea) ou
d'autres espèces comme Nesogordonia papaverifera, Triplochiton
scleroxylon, mais aussi des Ulmaceae qui regroupent surtout les
espèces du genre Celtis (C. tessmannii, C. soyauxii, C.
adolfi-friderici, C. zenkeri) (Letouzey, 1968).
Dans les bas-fonds mal drainés, le faciès de
cette forêt change et se caractérise par des espèces comme
Uapaca guineensis et Uapaca togoensis. On la retrouve en
position de liseré bordant les principaux affluents du Nyong. Dans ces
peuplements, le sol est constamment inondé en saison de pluies.
Certaines espèces comme Alchornea cordifolia, Anthonotha
macrophylla, Gilbertiodendron dewevrei, Drypetes sp., Leea guineensis,
Macaranga sp sont également fréquentes dans ces milieux. Il
faut également signaler que, lorsque la topographie est plane et
P2
P1
que les eaux d'écoulement stagnent durant plus de la
moitié de l'année, des tapis herbacés
monospéficiques à Echinocloa stagina et Hyparrhenia
sp se substituent aux arbres (figure 9). C'est le cas dans certains
secteurs de la plaine d'inondation du Nyong en particulier. Toujours dans des
conditions de mauvais drainage des sols, les principaux affluents du Nyong
comportent dans leur lit majeur des peuplements monospécifiques à
Raphia monbutorum et Raphia hookeri.
Cette forêt dense semi-décidue a longtemps subi
des dégradations variables selon les localités. Les
dégradations sont cependant plus sensibles en bordure des regroupements
humains et des pistes du fait de l'introduction du cacaoyer, de l'agriculture
itinérante sur brûlis et de l'exploitation forestière
légale et illégale (figure 8).
1.3.2. La forêt secondaire ou forêt
dégradée
Il s'agit ici des forêts secondaires jeunes ou
âgées qui se développent à l'emplacement des
anciennes exploitations agricoles. Les forêts secondaires sont avant tout
composées d'espèces d'arbres et arbustes dites "anthropophiles ou
commensales de l'homme" (Letouzey, 1985) car elles se trouvent souvent à
proximité d'une zone d'activité agricole où elles
disposent de conditions propices à leur développement (Letouzey,
1968). En réalité, lorsque ces formations secondaires sont jeunes
(moins de 15 ans de jachères), elles présentent une
canopée discontinue et une faible densité d'arbres et d'arbustes.
Dans leur composition floristique, ces étendues sont dominées par
Elaeis guineensis (palmier à huile), Musanga
cecropioides (parasoliers), Ceiba pentandra (fromager).
Toutefois, il est difficile de distinguer par la structure une vieille
jachère d'une forêt âgée. La composition floristique
permet de le faire puisque les espèces précédentes restent
dominatrices à côté d'autres comme Albizia
adianthifolia, Albizia glaberrima, Alstonia boonei, Anthocleista
schweinfurthii, Bombax buonopozense.
Dans l'ensemble, les forêts secondaires correspondant
aux diverses stades de reconstitution post culturales partagent la forte
présence d'espèces dites héliophiles à croissance
rapide et très souvent à bois mou. Toutefois, des espèces
et des individus épargnés lors des défrichements pour leur
intérêt alimentaire, médicinal, écologique ou
culturel restent présents dans les parcelles et contribuent à la
cicatrisation. Il s'agit principalement de Ricinodendron heudelottii
(djanssan), Irvingia gabonense, Rauvolphia vomitori. A ces
essences s'ajoutent aussi des espèces introduites, comme c'est le cas
principalement des arbres fruitiers comme Persea americana (avocatier)
Mangifera indica ou (manguier), Dacryodes edulis (safoutier).
Quelques espèces à bois précieux sont aussi
présentes parce que épargnées lors des
défrichements : Desbordesia glaucescens, Discoglypremna caloneura,
Erythrophleum suaveolens, Chlorophora excelsa, Petersianthus macrocarpus,
Piptadeniastrum africanum, Triplochiton scleroxylon, Terminalia
superba.
1.3.3. Les champs et les plantations
Nous avons regroupé dans cette classe les parcelles
cultivées ou abandonnées il y a moins de 5 ans. En effet,
jusqu'à 5 ans de jachère, le tapis herbacé à
Chromolaena odorata domine encore largement l'espace qui comporte
néanmoins de manière isolée des arbres fruitiers ou des
essences à bois utiles épargnés lors des
défrichements. L'ensemble de ces surfaces couvrant
généralement moins de 0,2 ha comporte des cultures en
association. Le manioc, la banane plantain, le macabo, le maïs et les
arachides sont les cultures les plus répandues.
D'autre part, des espaces de moins en moins entretenus sont
voués à la culture du cacao. Cette culture de rente aurait perdu
partiellement l'intérêt que les populations lui portaient pour
deux raisons : d'une part, la baisse du prix du kg à l'achat aux
planteurs intervenue à la fin des années 1980 et, d'autre part,
l'intérêt désormais porté aux cultures
vivrières dont l'essentiel est destiné désormais à
la vente et non à l'autoconsommation.
Les champs et les plantations occupent les espaces
situés sur une bande d'environ 1 km de part et d'autre de la route
principale qui traverse le village en direction de Mbega. On les retrouve aussi
éparpillés dans la forêt de l'intérieur.
Sources : Relevés de terrain
Figure 9 : La distribution des peuplements
végétaux à l'échelle locale sur un transect
perpendiculaire à la vallée du Nyong
1.4. Les pressions anthropiques
1.4.1. La mise en place de la population
Les populations de la région du Nyong et So'o
appartiennent au grand groupe dit Pahouin ou Fang-Beti qui occupe dans
l'ensemble une zone allant de la Sanaga au sud du Gabon. Ce groupe rassemble
plusieurs ethnies parmi lesquelles on dénombre les Ewondo, les
Béné, les Bulu, les Fong, les Yebekolo. L'occupation de la zone
forestière du Cameroun est le résultat d'une série de
mouvements migratoires sur une période dont il est difficile d'estimer
la durée. La mise en place des Fang-Beti est cependant relativement
récente. D'après E. Mveng12 ces peuples sont encore en
marche dans la première moitié du XIXè siècle. Ils
partent de l'Adamaoua bousculés par les Babouté et les
Foulbé. Ils arrivent chez les Bafia qu'ils bousculent à leur tour
avant d'entamer la traversée de la Sanaga. La tradition orale à
travers une légende très célèbre transmise de
père en fils suggère que cette fameuse traversée s'est
faite sur le dos d'un immense serpent miraculeux. Ces migrations ne prendront
fin que vers la fin du XIXè siècle avec l'arrivée des
colonisateurs européens.
1.4.2. Les groupes ethniques
Le village Faekelé II est presque entièrement
peuplé d'Ewondo répartis en plusieurs familles. Faekelé II
est constitué de 5 quartiers ou « hameaux » tous situés
le long de la piste secondaire qui mène vers à Akak. Ils sont
séparés les uns des autres par des lambeaux de forêt
secondaire qui bordent la piste.
En 1976, le recensement général de la
population et de l'habitat indiquait pour ce village 126 habitants, soit 54
hommes et 72 femmes. Plus de trois décennies après, ces
données n'ont pas fondamentalement changé. En effet, La
population est estimée à environ 200 âmes par le chef du
village. Comme ailleurs dans le sud-Cameroun, la population est en
majorité constituée de femmes, les hommes alimentant pour la
plupart l'essentiel du flux de migrants vers la ville proche de Mbalmayo. Les
raisons scolaires mais aussi et surtout économiques motivent leur
départ. Il est en effet souvent question de se faire embaucher dans les
entreprises industrielles de transformation de bois. Cet important exode rural
contribue à maintenir les densités rurales très
faibles.
12 Mveng, E (1983), Histoire du Cameroun,
CEPER, Yaoundé, P. 127.
1.4.3. Les activités de production
1.4.3.1. Une agriculture de plus en plus
orientée vers la spéculation
L'agriculture reste l'activité dominante des
populations du village Faekelé II. Cette agriculture essentiellement
vivrière mobilise à peu près également aussi bien
les hommes que les femmes, car la cacaoculture, si souvent commune aux
populations en zone forestière, est très peu pratiquée
ici. Les hommes sont donc très impliqués dans l'agriculture
vivrière. Mais on observe encore une division sexuelle des tâches
dans les travaux champêtres. L'abattage et le défrichement sont
encore presque exclusivement le fait des hommes tout comme la création
et l'entretien des petites plantations de banane-plantain. Les femmes
labourent, sèment, sarclent et récoltes les plantes
vivrières.
Le système de polyculture vivrière de type
itinérante sur brûlis est largement pratiqué. Une parcelle
de forêt est défrichée généralement en
début de saison sèche. Les débris végétaux
qu'on aura laissé sécher pendant plusieurs semaines seront
brûlés. La cendre obtenue par ce moyen sert à la
fertilisation du sol. Les semailles commencent au lendemain du brûlis,
avec les premières pluies. La parcelle est mise en culture pour 3
à 5 ans avant d'être ensuite laissée en jachère pour
permettre au sol de se reposer et se fertiliser à nouveau. La
jachère est utilisée pour d'autres activités, comme le
piégeage et la collecte. L'éventail des plantes cultivées
est varié. A côté des tubercules qui constituent la base de
l'alimentation, on trouve le maïs, les courges, l'arachide, la
banane-plantain.
Les récoltes sont en priorité destinées
à l'autoconsommation. Mais de plus en plus, l'objectif des paysans en
début de saison agricole est d'aller au-delà de la satisfaction
des besoins familiaux. Il est désormais question de se procurer des
revenus à partir de l'activité agricole. C'est pourquoi une bonne
partie des récoltes alimente les marchés de la ville de Mbalmayo.
On peut considérer cette agriculture comme une agriculture
vivrière de rente.
L'élevage est de type « sentimental » et
encore très traditionnel car les animaux sont rarement vendus. La part
belle est faite surtout au petit bétail mais aussi aux
gallinacés. Des ovins, caprins et porcins sont élevés en
divagation. Ils errent librement aux abords des cases et occasionnent souvent
des dégâts aux cultures vivrières près du village.
Ils sont d'une grande importance à l'occasion de certaines
cérémonies liées à des évènements
heureux comme la dot et la célébration des mariages ou à
des funérailles. Les animaux domestiques, chèvres, moutons,
cochons, poules et canards sont souvent gérés par
les hommes. Toutefois, pour accroître leurs revenus, les populations de
Faekelé II pratiquent d'autres activités non agricoles.
1.4.3.2. Les activités complémentaires
de l'agriculture.
La forêt du site offre des possibilités
d'exploitation variées qui sont loin d'être marginales. Ces
activités sont la chasse, la cueillette et la pêche.
1.4.3.2.1. La chasse
Les animaux de la forêt constituent non seulement une
source de nourriture mais aussi une source de revenus. Les produits de la
chasse constituent la première source de protéine, la viande de
boeuf issue de l'élevage ne parvenant dans les ménages ici que de
façon très irrégulière du fait du niveau des prix
pratiqués sur le marché et du faible pouvoir d'achat des
populations. Les produits de la chasse qui jadis étaient destinés
à la subsistance des ménages, sont désormais
orientés vers les marchés, spécialement lorsque les prises
sont considérées comme des espèces rares ou nobles
(chimpanzé, vipère, porc-épic...)
Les chasseurs utilisent généralement deux
techniques : le piégeage et le fusil. Les pièges répandus
sont ceux qui consistent en la pose de câbles d'acier munis d'un noeud
coulant sur les pistes de parcours des animaux. Ils sont plus efficaces en
saison de pluies. Les animaux, en évitant la rosée, empruntent
des pistes balisées et sont souvent facilement pris aux pièges
que les chasseurs posent sur des itinéraires presque connus à
l'avance. Les pièges sont aussi posés près des champs
vivriers et visent les petits rongeurs et autres animaux fruigivores comme les
singes.
La chasse au fusil est réservée à
quelques privilégiés qui possèdent une arme ou sont en
mesure de la louer. Les chasseurs l'utilisent quasiment sans autorisation. La
chasse est nocturne et à l'occasion, les chasseurs munis de lampes
torches à lumière vive, éblouissent les animaux surpris
avant de les abattre. La cible ici c'est les grands mammifères.
Certaines espèces interdites de chasse comme le chimpanzé tombent
régulièrement sous les feux des chasseurs. Ils entrent alors dans
un circuit de transport et de distribution au noir et sont acheminés
dans la plus grande discrétion, généralement à la
faveur de la nuit, vers des acheteurs initiés, tenanciers de restaurant
dans la ville de Mbalmayo.
1.4.3.2.2. La cueillette et le ramassage
La cueillette ou ramassage concerne aussi les produits de la
forêt. Elle est fondée sur la grande connaissance que les
populations ont de leur milieu, sur la maîtrise des usages des produits
forestiers. Cette activité à l'origine est destinée
à la satisfaction des besoins des populations des zones de forêt.
Aujourd'hui, la cueillette est une activité beaucoup plus extractiviste
c'est-à-dire une activité fondée sur l'exploitation des
produits forestiers généralement non ligneux à des fins
commerciales. La cueillette est orientée vers le ramassage du bois de
chauffe, le prélèvement des écorces et de certaines
plantes médicinales. Il faut aussi noter la place primordiale de
certaines plantes de la famille des Marantacées. C'est par exemple le
cas des Maranthochloa spp. Ces plantes ont des feuilles qui sont
largement utilisées dans toute la zone forestière du Cameroun
comme « papier » d'emballage. Elles permettent d'emballer les
pâtes de manioc lors de la cuisson des « batons » de manioc,
elles sont utilisées dans la cuisson des mets, dans la vente des
beignets, du gibier... Elles remplacent les sachets plastiques qui
représentent l'une des principales sources de pollution dans les
villes13.
Les noisettes, criquets et fruits sauvages comme ceux
d'Irvingia gabunenis ou mangue sauvage ne sont pas en reste.
Ils sont très juteux et leur graine est un ingrédient
important dans la cuisson d'une sauce très appréciée.
Gnetum africanum (Okok) est utilisé comme légume dans
une sauce très consommée au sud Cameroun. Cette espèce est
une liane que l'on rencontre dans les jachères et les forêts
secondaires jeunes où elle se ramifie abondamment. Son exploitation
désormais très intense pour le marché national et
même international en fait une denrée très
recherchée.
Si certains produits collectés en forêt sont
utilisés comme compléments dans l'alimentation ou comme
médicaments, d'autres servent de support à l'activité
économique. Les rotins sont par exemple coupés en forêt
pour être vendus à Yaoundé clandestinement (ce sont des
produits forestiers non ligneux dont l'exploitation est interdite par les
agents de contrôle des eaux et forêts).
13 Zapfack Louis, Ngobo Nkongo Martine,
Inventaire participatif des produits forestiers non ligneux et ligneux de
la region de Djoum: Sud du cameroun, RAPPORT DE
IR1/CARPE, PP 42-43.
La cueillette du vin de palme a une double fonction sociale
et économique. Le vin, extrait le matin et le soir est consommé
sur le lieu d'extraction ou au village le plus souvent entre hommes. A cette
occasion, des discussions et causeries nourries apparaissent comme des
passe-temps et des distractions avant ou après les travaux quotidiens.
Mais le vin de palme est de plus en plus cueilli pour être par la suite
fermenté au sucre et distillé de façon traditionnelle pour
obtenir un alcool dur très prisé qui est pour l'essentiel vendu
soit en détail, soit au litre.
1.4.3.2.3. La pêche
artisanale
La pêche est une activité complémentaire
de la chasse, de la cueillette et de l'agriculture. C'est une activité
relativement marginale qui est pratiquée de temps à autre dans
les nombreuses rivières tributaires du Nyong (photo 2). La pêche
dans ces rivières est faite à la nasse, au filet et au barrage
spécialement au coeur de la saison sèche. La baisse du niveau des
eaux limite les efforts à fournir pour la vidange à l'occasion de
la pêche au barrage. Les produits halieutiques servent prioritairement
à la consommation. Ils constituent la deuxième source de
protéine après la viande de brousse.
Photo Youta Happi, novembre 2009
1.4.3.2.4 L'exploitation du bois d'oeuvre et de
chauffage
A côté de ces activités de subsistance et
génératrices de revenus, il faut noter une autre qui est purement
spéculative: l'expérience de la gestion d'une forêt
communautaire. En effet, Faekelé et quatre autres villages voisins ont
initié depuis 1996 une expérience de gestion d'une forêt
communautaire de 5 000 ha, la forêt de COVIMOF (Communauté
Villageoise de Melombo, Okekat et Faekelé).
De cette façon, ces populations pensent pouvoir
satisfaire leurs besoins essentiels en matière d'adduction d'eau
potable, d'accès à l'électricité,
d'éducation... Cette exploitation connaît à l'heure
actuelle de nombreuses pesanteurs qui font qu'elle ne remplit pas encore les
attentes des populations. Les difficultés renvoient par exemple au
manque d'expertise en matière d'exploitation forestière de la
part des populations de cette communauté. C'est la raison pour laquelle
les gestionnaires de cette forêt ont par deux fois fait appel à
des exploitants de métier dans le cadre de contrats de partenariat
d'abord avec les établissements de Transformation du bois camerounais
(Ets TBC), puis avec la structure Akoa Nicolas et Abega Jean Baptiste. Ceuxci
se sont toujours achevés aux dépens de la communauté qui
était souvent écartée des activités d'abattage, de
sciage et de transport et par conséquent ne pouvait maîtriser les
retombées de l'exploitation ainsi que la quote-part à attendre
des exploitants14.
Depuis 2005, la COVIMOF se charge elle-même des
activités d'exploitation forestière de façon à
devenir autonome. Des formations aux techniques d'inventaire et de gestion,
à l'abattage et au sciage ont été organisées avec
l'aide du CED (Centre pour l'Environnement et le Développement). La
collaboration s'est aussi étendue à la fourniture du
matériel de production, à l'appui à la production et
à la commercialisation à travers la recherche des marchés
porteurs.
14 Révélations du Chef de
Faekelé II
Photo Kemadjou, août 2009
Photo 3 : Traces d'une ancienne piste de
débardage dans la parcelle exploitée
Photo Kemadjou, août 2009
Conclusion
Dans ce chapitre, nous nous sommes attaché à
l'identification des caractéristiques écologiques du milieu
c'est-à-dire le relief, le climat, les sols, l'hydrographie et les
activités humaines. Ainsi on retient que l'environnement du village
Faekelé partage les caractéristiques essentielles de tous les
autres villages du sud-Cameroun forestier. La proximité de ce village
avec Mbalmayo, haut lieu d'exploitation et de transformation de bois, l'aura
desservi du fait du passage régulier des exploitants forestiers qui y
ont intensément prélevé des essences conduisant à
une certaine évolution de sa couverture forestière (photos 3 et
4).
CHAPITRE 2 :
LES IMPACTS DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE LA FORET
SUR LA BIODIVERSITE
Introduction
Nous nous consacrons ici à une analyse taxonomique.
Elle consiste à décrire la quantité de la
biodiversité ainsi que la distribution de celle-ci dans l'espace.
L'avantage de cette description est de permettre de caractériser la
composition floristique des parcelles étudiées. Nous ferons appel
dans cette caractérisation à des indices utilisés par de
nombreux auteurs. L'objectif à la fin est de déterminer les
conséquences de la mise en exploitation d'une parcelle de forêt.
Autrement dit, il s'agit de répondre à la question de savoir
quels sont les impacts à moyen terme des coupes sélectives
d'arbres aux plans de la biodiversité et du volume de bois
2.1. Les paramètres de la diversité
biologique
Dans la forêt non exploitée, on a pu recenser
1133 individus de diamètre (dbh) = 5 cm. Ils sont répartis entre
43 familles, 161 espèces et 122 genres. La forêt exploitée
en 2002 compte 990 individus appartenant à 42 familles, 165
espèces et 121 genres.
Tableau 2 : Comparaison des taxons entre les
parcelles
Site Individus Espèces Genres
Familles
Parcelle exploitée
|
990
|
165
|
121
|
42
|
Parcelle non exploitée
|
1133
|
161
|
122
|
43
|
|
Sources : Relevés de terrain
A l'observation du tableau ci-dessus, on note qu'au plan
uniquement statistique les deux parcelles présentent à peu
près le même nombre d'espèces, de genres et de familles. La
diversité biologique sur la parcelle exploitée semble n'avoir pas
a priori souffert de l'exploitation forestière. L'étude
détaillée de la composition des espèces, genres et
familles déterminera la différence qui peut exister entre les
deux parcelles au-delà de l'égalité numérique que
l'on note.
2.2. La diversité des familles
Au plan de la richesse biologique, les familles les plus
représentées sur la parcelle exploitée sont les
Euphorbiaceae (13 espèces), les Sterculiaceae (12 espèces), les
Annonaceae et Méliaceae (11 espèces chacune), les Mimosaceae et
Moraceae (9 espèces chacune). Sur la parcelle non exploitée, on a
par ordre les Sterculiaceae (13 espèces), les Euphorbiaceae (12
espèces), les Annonaceae et les Méliaceae (11 espèces pour
chacune des familles), Mimosaceae et Fabaceae (8 espèces pour chaque
famille) (tableaux 3 et 4).
Sur l'ensemble des 2 placettes, on note la présence de
45 familles dont 40 sont communes aux deux sites. Deux familles
rencontrées sur le site perturbé n'apparaissent pas sur le site
relativement intact. Il s'agit des Astéraceae
(représentées par un individu de l'espèce Vernonia
concerta) et des Bombacaceae (représentées par Bombax
brevicuspe avec 8 individus et Bombax sp qui compte 2 individus).
De l'autre côté, trois familles observées en forêt
non exploitée sont absentes de la parcelle exploitée en 2002. Il
s'agit des Mélastomataceae représentées par 2 individus de
l'espèce Memexylon sp, des Leguminosaceae avec crudia
gabonensis et les Rhizophoraceae représentées par un seul
individu de l'espèce Anopyxis klaineana.
En dehors des familles exclusives à l'un des sites, Il
existe 15 familles rares (représentées par une seule
espèce) communes aux deux sites : Acanthaceae, Chrysobalanaceae,
Clusiaceae, Guttiferaxeae, Lauraceae, Lécythidaceae, Lepidibotriaceae,
Myrtaceae, Ochnaceae, Pandaceae, Passifloraceae, Rhamnaceae, Samydaceae,
Simaroubaceae, Violaceae. La famille des Tiliaceae et celle des
Verbénaceae qui sont rares en parcelle exploitée sont
représentées par au moins deux espèces en parcelle non
exploitée. A l'opposé, il existe également de nombreuses
familles dont le nombre d'espèces est relativement important. Il s'agit
pratiquement des mêmes familles qui apparaissent presque dans les
mêmes proportions sur les deux sites comme l'illustre le tableau 4. Il
s'agit des familles suivantes : Euphorbiaceae, Sterculiaceae, Annonaceae,
Méliaceae, Mimosaceae, Moraceae, Césalpiniaceae, Cecropiaceae.
Ces familles sont représentées par au moins six
espèces.
On note aussi qu'il n'existe pas de grande
différence en ce qui concerne la composition spécifique. A
quelques rares exceptions, les différentes familles se retrouvent sur
l'une et l'autre parcelle. A ce niveau on peut estimer que l'exploitation
forestière sélective n'a pas modifié fondamentalement la
composition floristique du peuplement forestier. La parcelle
exploitée est d'ailleurs plus riche en
espèces (165) que celle qui est restée relativement intacte
(161).
Les Sterculiaceae et les Apocynaceae sont les plus abondantes
et présentent les plus grandes densités sur les deux sites
(tableau 3). En revanche, les familles secondaires sont différentes :
Méliaceae et Anacardiacee dans la parcelle non exploitée,
Myristicaceae et Euphorbiaceae dans la parcelle non exploitée.
Lorsqu'on consédère le nombre d'individus, les
Sterculiaceae constituent la famille largement dominante sur les deux sites,
soit 126 individus dans la forêt exploitée et 105 individus dans
la forêt mature (tableaux 3 et 4). Les différences se situent dans
la représentation des familles secondaires. Dans la forêt mature,
les familles qui complètent le groupe des 5 principales familles sont
les suivantes : Apocynaceae, Méliaceae, Anacardiaceae, Samydaceae. Au
sein de la forêt exploitée, ce sont, par ordre décroissant
aussi, les familles suivantes : Myristicaceae, Apocynaceae, Euphorbiaceae,
Césalpiniaceae. En revanche, la forêt mature porte seule la
famille des Rhizophoraceae tandis que la forêt exploitée
héberge exclusivement les Astéraceae
Pour les cinq familles abondantes, les deux parcelles
partagent uniquement les Sterculiaceae et les Apocynaceae. D'autre part,
lorsqu'on descend dans la hiérachie, on se rend compte que les Ebenaceae
(bois d'énène), qui comptent 65 invidividus dans la forêt
mature, sont sous représentées dans la forêt
exploitée dans laquelle on compte seulement 26 individus. De l'autre
côté, la forêt exploitée comporte 62 individus de la
famille des Moraceae alors que la forêt mature n'en compte que 25, soit
moins de la moitié de la population du premier site. Les analyses
montreront plus loin que les ouvertures artificielles pratiquées dans la
forêt au cours de la période de coupe sélective du bois ont
favorisé la prolifération d'une espèce de lumière
à croissance rapide et à bois mou comme Musanga
cecropioides. Cette espèce compte 25 individus dans la parcelle
exploitée alors qu'on dénombre seulement 2 individus dans la
forêt mature. Dans ce peuplement, on la retrouve uniquement au sein des
chablis.
Tableau 3 : Nombre d'individus par famille dans les
deux parcelles
|
Forêt non exploitée (forêt
mature)
|
Forêt exploitée
|
No
|
Famille
|
Nombre d'individus
|
Famille
|
Nombre d'individus
|
1
|
Sterculiaceae
|
105
|
Sterculiaceae
|
126
|
2
|
Apocynaceae
|
76
|
Myristicaceae
|
93
|
3
|
Meliaceae
|
69
|
Apocynaceae
|
93
|
4
|
Anacardiaceae
|
67
|
Euphorbiaceae
|
72
|
5
|
Ebenaceae
|
65
|
Caesalpiniaceae
|
63
|
6
|
Rubiaceae
|
64
|
Meliaceae
|
59
|
7
|
Annonaceae
|
63
|
Ulmaceae
|
35
|
8
|
Sapindaceae
|
62
|
Annonaceae
|
35
|
9
|
Myristicaceae
|
51
|
Burseraceae
|
33
|
10
|
Ulmaceae
|
50
|
Mimosaceae
|
29
|
11
|
Euphorbiaceae
|
48
|
Sapindaceae
|
29
|
12
|
Irvingiaceae
|
47
|
Moraceae
|
62
|
13
|
Olacaceae
|
41
|
Irvingiaceae
|
27
|
14
|
Papilionaceae
|
34
|
Ebenaceae
|
26
|
15
|
Burseraceae
|
32
|
Anacardiaceae
|
23
|
16
|
Lecythidaceae
|
28
|
Rubiaceae
|
21
|
17
|
Violaceae
|
27
|
Combrétaceae
|
17
|
18
|
Caesalpiniaceae
|
26
|
Lecythidaceae
|
17
|
19
|
Mimosaceae
|
25
|
Olacaceae
|
17
|
20
|
Clusiaceae
|
20
|
Sapotaceae
|
12
|
21
|
Flacourtiaceae
|
14
|
Guttiferaceae
|
12
|
22
|
Guttiferaceae
|
13
|
Papilionaceae
|
12
|
23
|
Sapotaceae
|
12
|
Flacourtiaceae
|
12
|
24
|
Tiliaceae
|
12
|
Bombacaceae
|
10
|
25
|
Moraceae
|
25
|
Violaceae
|
8
|
26
|
Combrétaceae
|
9
|
Rutaceae
|
4
|
27
|
Chrysobalanaceae
|
7
|
Acantaceae
|
4
|
28
|
Samydacées
|
5
|
Ochnaceae
|
3
|
29
|
Bignoniaceae
|
6
|
Tiliaceae
|
3
|
30
|
Rutaceae
|
4
|
Clusiaceae
|
3
|
31
|
Lauraceae
|
3
|
Lepidibotriaceae
|
3
|
32
|
Lepidibotryaceae
|
3
|
Chrysobalanaceae
|
3
|
33
|
Pandaceae
|
3
|
Lauraceae
|
3
|
34
|
Simaroubaceae
|
3
|
Passifloraceae
|
2
|
35
|
Acanthaceae
|
2
|
Samydaceae
|
2
|
36
|
Mélastomaceae
|
2
|
Bignionaceae
|
2
|
37
|
Ochnaceae
|
2
|
Rhamnaceae
|
2
|
38
|
Verbenaceae
|
2
|
Pandaceae
|
1
|
39
|
Myrtaceae
|
1
|
Simaroubaceae
|
1
|
40
|
Passifloraceae
|
1
|
Asteraceae
|
1
|
41
|
Rhamnaceae
|
1
|
Myrtaceae
|
1
|
42
|
Rhizophoraceae
|
1
|
Verbenaceae
|
1
|
43
|
leguminosaceae
|
1
|
/
|
8
|
|
/
|
1
|
|
|
Total
|
43
|
1133
|
42
|
990
|
|
Tableau 4 : Proportion des principales familles
recensées dans les parcelles
|
Site non exploité
Familles Nombre
d'individus %
|
Site exploité
Familles Nombre
d'individus
|
%
|
1
|
Sterculiaceae
|
105
|
9,26
|
Sterculiaceae
|
126
|
12,73
|
2
|
Apocynaceae
|
76
|
6,70
|
Apocynaceae
|
93
|
9,39
|
3
|
Méliaceae
|
69
|
6,09
|
Myristicaceae
|
93
|
9,39
|
4
|
Anacardiaceae
|
67
|
5,91
|
Euphorbiaceae
|
72
|
7,27
|
5
|
Ebénaceae
|
65
|
5,73
|
Césalpiniaceae
|
63
|
6,36
|
6
|
Rubiaceae
|
64
|
5,64
|
Moraceae
|
62
|
6,26
|
7
|
Annonaceae
|
63
|
5,56
|
Méliaceae
|
59
|
5,96
|
8
|
Sapindaceae
|
62
|
5,47
|
Annonaceae
|
35
|
3,54
|
9
|
Myristicaceae
|
51
|
4,50
|
Ulmaceae
|
35
|
3,54
|
10
|
Ulmaceae
|
50
|
4,41
|
Burseraceae
|
33
|
3,33
|
11
|
Euphorbiaceae
|
48
|
4,23
|
Mimosaceae
|
29
|
2,93
|
12
|
Irvingiaceae
|
47
|
4,14
|
Sapindaceae
|
29
|
2,93
|
13
|
Olacaceae
|
41
|
3,61
|
Irvingiaceae
|
27
|
2,73
|
14
|
Papilionaceae
|
34
|
3,00
|
Ebenaceae
|
26
|
2,63
|
15
|
Burseraceae
|
32
|
2,82
|
Anacardiaceae
|
23
|
2,32
|
16
|
Lecythidaceae
|
28
|
2,47
|
Rubiaceae
|
21
|
2,12
|
17
|
Violaceae
|
27
|
2,38
|
Combretaceae
|
17
|
1,72
|
18
|
Cesalpiniaceae 26
|
2,29
|
Lécythidaceae
|
17
|
1,72
|
19
|
Mimosaceae 25
|
2,20
|
Olacaceae
|
17
|
1,72
|
20
|
Moraceae
|
25
|
2,20
|
Flacourtiaceae
|
12
|
1,21
|
|
Source : Relevés de terrain.
2.3. La diversité des genres
Le nombre de genres sur les deux parcelles est sensiblement
égal. On compte 121 genres sur la parcelle exploitée contre 122
dans la forêt mature. 21 genres sont exclusifs pour l'un et l'autre site.
Ils sont pour la plupart représentés par un nombre très
limité d'individus. Les deux sites ont 101 genres en partage.
Lorsque l'on considère le nombre d'individus, les
genres les plus représentés sont par ordre décroissant
Cola (90 individus soit 9,09% des effectifs), Tabernaemontana
(80 individus, 8,08%), Staudtia (65 individus, 6,57%),
Hylodendron (34 individus, 3,43%), Celtis (33individus,
3,33%) pour la parcelle exploitée. En parcelle non exploitée, on
a Cola (86 individus soit
7,59%), Tabernaemontana (67 individus, 5,91%),
Blighia (61 individus, 5,38%), Celtis (50 individus, 4,41%),
Diospyros (43 individus, 3,8%) (Tableau 5).
Les effectifs et les proportions des genres montrent qu'il
n'y a pas une différence significative entre les deux peuplements. La
question qui se pose est donc celle de savoir si l'exploitation
sélective de la forêt n'entraîne pas à court terme
une érosion ou tout au moins une modification de la diversité des
genres ? L'examen de la diversité des espèces nous permettra de
répondre de manière plus concluante à la question.
En termes de nombre d'espèces, les genres les plus
diversifiés dans la parcelle exploitée sont : Cola,
Diospyros (6 espèces), Sterculia et Trichilia (4
espèces), Klainedoxa, Irvinguia, Celtis (3
espèces). Dans la parcelle non exploitée les genres abondants
sont comme pour la première parcelle Cola et Diospyros
(6 espèces). Ils sont suivis par Celtis,
Entandrophragma, Fagara et Sterculia (3
espèces).
Tableau 5 : Les genres dominants sur les deux sites
(nombre d'individus > 5)
Forêt exploitée
|
Nombre d'individus
|
%
|
Forêt non exploité
|
Nombre d'individus
|
%
|
Cola
|
90
|
9,09
|
Cola
|
86
|
7,59
|
Tabernaemontana
|
80
|
8,08
|
Tabernaemontana
|
67
|
5,91
|
Staudtia
|
65
|
6,57
|
Blighia
|
61
|
5,38
|
Hylodendron
|
34
|
3,43
|
Celtis
|
50
|
4,41
|
Celtis
|
33
|
3,33
|
Diospyros
|
43
|
3,80
|
Trichilia
|
33
|
3,33
|
Sorindeia
|
40
|
3,53
|
Blighia
|
29
|
2,93
|
Desbordesia
|
35
|
3,09
|
Musanga
|
25
|
2,53
|
Petersianthus
|
28
|
2,47
|
Coelocaryon
|
22
|
2,22
|
Rinorea
|
27
|
2,38
|
Uapaca
|
21
|
2,12
|
Trichilia
|
26
|
2,29
|
Diospyros
|
20
|
2,02
|
Rothmannia
|
23
|
2,03
|
Santiria
|
19
|
1,92
|
Santiria
|
23
|
2,03
|
|
Source : Relevés de terrain.
2.4. La diversité des espèces
Le nombre d'espèces sur les deux sites est
sensiblement le même, soit 165 dans la parcelle exploitée et 161
dans la parcelle non exploitée. Les deux parcelles ont en commun 119
espèces. Ce qui diffère fondamentalement est l'effectif de la
population de ces espèces. On note un nombre plus considérable de
la population appartenant aux espèces de lumière à
croissance rapide, à bois mou et à faible durée de vie
dans la forêt exploitée. En revanche, une plus forte
représentation des individus de gros diamètre et d'espèces
à bois précieux caractérise la forêt non
exploitée (tableaux 6 et 7). Autrement dit, l'exploitation
forestière a entraîné une modification de la densité
de certaines espèces. Il s'agit de certaines espèces reconnues
comme faisant partie généralement du cortège floristique
qui participe à la régénération des forêts
perturbées. Ainsi Musanga cecropioides et Myrianthus
arboreus dont la présence est très significative dans la
parcelle exploitée (tableau 6) ont été reconnus au Sud de
la Côte-d'Ivoire comme étant des espèces très
actives dans le processus de la cicatrisation (Alexandre, 1989).
Tableau 6 : Relevé de la parcelle
exploitée
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40
|
40-50
|
50-80
|
> 80
|
Total
|
1
|
Desbordesia glaucescens
|
2
|
3
|
3
|
|
1
|
3
|
1
|
13
|
2
|
Ricinodendron heudelotii
|
|
|
|
1
|
2
|
|
1
|
4
|
3
|
Gambea africana
|
3
|
2
|
1
|
|
1
|
|
1
|
8
|
4
|
Pteleopsis hylodendron
|
|
1
|
1
|
2
|
1
|
2
|
|
7
|
5
|
Lophira alata
|
|
|
|
1
|
|
2
|
|
3
|
6
|
Duboscia macrocarpa
|
|
|
1
|
|
|
2
|
|
3
|
7
|
Bosqueia angolensis
|
2
|
2
|
|
|
|
2
|
|
6
|
8
|
Petersianthus macrocarpus
|
8
|
2
|
1
|
2
|
3
|
1
|
|
17
|
9
|
Hylodendron gabunense
|
10
|
8
|
11
|
3
|
1
|
1
|
|
34
|
10
|
Uapaca guineensis
|
6
|
7
|
5
|
2
|
|
1
|
|
21
|
11
|
Musanga cecropioides
|
12
|
5
|
6
|
1
|
|
1
|
|
25
|
12
|
Coelocaryon preussii
|
10
|
6
|
4
|
1
|
|
1
|
|
22
|
13
|
Celtis zenkeri
|
3
|
7
|
|
1
|
|
1
|
|
12
|
14
|
Irvingia gabunensis
|
2
|
2
|
1
|
|
|
1
|
|
6
|
15
|
Distemonanthus benthamianus
|
4
|
1
|
1
|
|
|
1
|
|
7
|
16
|
Celtis adolfi-friderici
|
|
|
1
|
|
|
1
|
|
2
|
17
|
Xylopia aethiopica
|
|
1
|
|
|
|
1
|
|
2
|
18
|
Lannea welwitchii
|
1
|
|
|
|
|
1
|
|
2
|
19
|
Aningeria altissima
|
|
|
|
|
|
1
|
|
1
|
20
|
Celtis tessmannii
|
6
|
4
|
7
|
|
2
|
|
|
19
|
21
|
Pentachlethra macrophylla
|
2
|
2
|
|
1
|
1
|
|
|
6
|
22
|
Sterculia rhinopetala
|
3
|
1
|
2
|
|
1
|
|
|
7
|
23
|
Trichilia welwitschii
|
11
|
11
|
1
|
|
1
|
|
|
24
|
24
|
Lovoa trichilioides
|
1
|
1
|
|
|
1
|
|
|
3
|
25
|
Guarea thompsonii
|
|
1
|
|
|
1
|
|
|
2
|
26
|
Anonidium mannii
|
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
27
|
Allanblackia kissongui
|
3
|
3
|
3
|
3
|
|
|
|
12
|
28
|
Myrianthus arboreus
|
5
|
2
|
3
|
2
|
|
|
|
12
|
29
|
Parkia bicolor
|
|
1
|
|
2
|
|
|
|
3
|
30
|
Enantia chloranta
|
|
|
|
2
|
|
|
|
2
|
31
|
Tabernaemontana crassa
|
33
|
44
|
2
|
1
|
|
|
|
80
|
32
|
Trichoscypha acuminata
|
7
|
6
|
2
|
1
|
|
|
|
16
|
33
|
Coula edulis
|
3
|
3
|
1
|
1
|
|
|
|
8
|
34
|
Monodora tenuifolia
|
4
|
1
|
|
1
|
|
|
|
6
|
35
|
Discoglypremna caloneura
|
|
1
|
|
1
|
|
|
|
2
|
36
|
Cola argentea
|
12
|
10
|
4
|
|
|
|
|
26
|
37
|
Santiria trimera
|
8
|
7
|
4
|
|
|
|
|
19
|
38
|
Pausinystalia macroceras
|
|
2
|
3
|
|
|
|
|
5
|
39
|
Cola lateritia
|
15
|
7
|
2
|
|
|
|
|
24
|
40
|
Blighia welwitschii
|
12
|
6
|
2
|
|
|
|
|
20
|
|
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40 40-50 50-80
|
> 80
|
Total
|
41
|
Bombax brevicuspe
|
1
|
5
|
2
|
|
|
8
|
42
|
Cleistopholis patens
|
|
3
|
2
|
|
|
5
|
43
|
Piptadeniastrum africanum
|
4
|
2
|
2
|
|
|
8
|
44
|
Terminalia superba
|
|
|
2
|
|
|
2
|
45
|
Bombax sp
|
|
|
2
|
|
|
2
|
46
|
Dacryodes igaganga
|
2
|
6
|
1
|
|
|
9
|
47
|
Funtumia elastica
|
4
|
5
|
1
|
|
|
10
|
48
|
Eribloma oblonga
|
11
|
4
|
1
|
|
|
16
|
49
|
Sterculia tragacantha
|
3
|
3
|
1
|
|
|
7
|
50
|
Carapa procera
|
4
|
2
|
1
|
|
|
7
|
51
|
Zanhtoxilum tesmannii
|
|
2
|
1
|
|
|
3
|
52
|
Khaya anthotheca
|
5
|
1
|
1
|
|
|
7
|
53
|
Diospyros sanza-minika
|
4
|
|
1
|
|
|
5
|
54
|
Tetrapleura tetraptera
|
|
1
|
1
|
|
|
2
|
55
|
Trichilia drégeana
|
|
1
|
1
|
|
|
2
|
56
|
Staudtia trimera
|
1
|
|
1
|
|
|
2
|
57
|
Albizia glaberrima
|
|
|
1
|
|
|
1
|
58
|
Erythrophleum ivorense
|
|
|
1
|
|
|
1
|
59
|
Rauwolfia macrophylla
|
|
|
1
|
|
|
1
|
60
|
Staudtia kamerunensis
|
51
|
12
|
|
|
|
63
|
61
|
Cola lepidota
|
22
|
7
|
|
|
|
29
|
62
|
Rothmannia lujae
|
4
|
6
|
|
|
|
10
|
63
|
Macaranga sp
|
4
|
4
|
|
|
|
8
|
64
|
Ebène sp
|
2
|
4
|
|
|
|
6
|
65
|
Canarium schweinfurthii
|
1
|
4
|
|
|
|
5
|
66
|
Blighia sp
|
6
|
3
|
|
|
|
9
|
67
|
Diospyros suaveolens
|
5
|
3
|
|
|
|
8
|
68
|
Pycnanthus angolensis
|
3
|
3
|
|
|
|
6
|
69
|
Chlorophora excelsa
|
2
|
3
|
|
|
|
5
|
70
|
Cola balayii
|
1
|
3
|
|
|
|
4
|
71
|
Trichilia tessmannii
|
1
|
3
|
|
|
|
4
|
72
|
Antiaris welwitschii
|
|
3
|
|
|
|
3
|
73
|
Cola sp
|
4
|
2
|
|
|
|
6
|
74
|
Ficus mucuso
|
4
|
2
|
|
|
|
6
|
75
|
Tetrorchidium didymostemon
|
3
|
2
|
|
|
|
5
|
76
|
Indeter
|
3
|
2
|
|
|
|
5
|
77
|
Parkia filicoidea
|
3
|
2
|
|
|
|
5
|
78
|
Sorindeia grandifolia
|
2
|
2
|
|
|
|
4
|
79
|
Strombosiopsis tetrandra
|
2
|
2
|
|
|
|
4
|
80
|
Meiocarpidium lepidetum
|
1
|
2
|
|
|
|
3
|
|
No
|
Espèces
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
10-20 20-30 30-40 40-50 50-80
|
> 80 Total
|
81
|
Entandrophragma candolei
|
1
|
2
|
3
|
82
|
Garcinia mannii
|
1
|
2
|
3
|
83
|
Diospyros angolense
|
1
|
2
|
3
|
84
|
Sterculia oblongum
|
|
2
|
2
|
85
|
Nesogordonia papaverifera
|
|
2
|
2
|
86
|
Hymenocardia heudolotii
|
|
2
|
2
|
87
|
Keayodendron bridelioides
|
|
2
|
2
|
88
|
Drypetes sp
|
8
|
1
|
9
|
89
|
Macaranga burifolia
|
7
|
1
|
8
|
90
|
Rinorea sp
|
7
|
1
|
8
|
91
|
Strephonema sp
|
7
|
1
|
8
|
92
|
Scottelia minifiencis
|
4
|
1
|
5
|
93
|
Antidesma membranaceum
|
3
|
1
|
4
|
94
|
Hexalobus crispiflorus
|
3
|
1
|
4
|
95
|
Treculia africana
|
2
|
1
|
3
|
96
|
Pterocarpus soyauxii
|
2
|
1
|
3
|
97
|
Khaya ivorensis
|
2
|
1
|
3
|
98
|
Lepidobotrys staudtii
|
2
|
1
|
3
|
99
|
Baphia sp
|
2
|
1
|
3
|
100
|
Sterculia mildbraedii
|
1
|
1
|
2
|
101
|
Trema orientalis
|
1
|
1
|
2
|
102
|
Milletia sanagana
|
1
|
1
|
2
|
103
|
Porterandia cladantha
|
1
|
1
|
2
|
104
|
Homalium letestui
|
1
|
1
|
2
|
105
|
Canthium sp
|
1
|
1
|
2
|
106
|
Diospyros sp
|
1
|
1
|
2
|
107
|
Gambeya boukokoensis
|
1
|
1
|
2
|
108
|
Barteria fistulosa
|
1
|
1
|
2
|
109
|
Albizia zygia
|
|
1
|
1
|
110
|
Amphimas pterocarpiodes
|
|
1
|
1
|
111
|
Corynanthe pachycera
|
|
1
|
1
|
112
|
Diospyros simulance
|
|
1
|
1
|
113
|
Draspera mannii
|
|
1
|
1
|
114
|
Entandrophragma cylindricum
|
|
1
|
1
|
115
|
Erythrina excelsa
|
|
1
|
1
|
116
|
Malacantha alnifolia
|
|
1
|
1
|
117
|
Odyendyea gabonensis
|
|
1
|
1
|
118
|
Panda oleosa
|
|
1
|
1
|
119
|
Pseudospondias microcarpa
|
|
1
|
1
|
120
|
Strombosia grandifolia
|
|
1
|
1
|
|
Tableau 6 (suite) : Relevé de la parcelle
exploitée (suite)
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40
|
40-50
|
50-80
|
> 80
|
Total
|
121
|
Anthonotha macrophylla
|
12
|
|
|
|
|
|
|
12
|
122
|
Polyalthia suaveolens
|
7
|
|
|
|
|
|
|
7
|
123
|
Caloncoba gilgiana
|
5
|
|
|
|
|
|
|
5
|
124
|
Dialium bipindense
|
5
|
|
|
|
|
|
|
5
|
125
|
Klainedoxa grandifolia
|
4
|
|
|
|
|
|
|
4
|
126
|
Thomandersia hensii
|
4
|
|
|
|
|
|
|
4
|
127
|
Beilschmiedia obscura
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
128
|
Mallotus oppositifolius
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
129
|
Maranthes inermis
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
130
|
Tetrorchidium oppositifolium
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
131
|
Xylopia staudtii
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
132
|
Anthonotha sp
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
133
|
Calpocalyx denklagei
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
134
|
Heisteria parvifolia
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
135
|
Maesopsis eminii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
136
|
Markhamia lutea
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
137
|
Pterocarpus mildbraedii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
138
|
Trichilia welwitschii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
139
|
Alaeophorbia drupifera
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
140
|
Alstonia boonei
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
141
|
Caloncoba glauca
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
142
|
Calpocalyx sp
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
143
|
Casearia
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
144
|
Cola acuminata
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
145
|
Copaïfera sp
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
146
|
Diospyros crassiflora
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
147
|
Ficus exasperata
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
148
|
Grisea grandifolia
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
149
|
Irvingia grandifolia
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
150
|
Irvingia klainedoxa
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
151
|
Isolona hexaloba
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
152
|
Klainedoxa macrophylla
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
153
|
Klainedoxa microphylla
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
154
|
Massularia acumilata
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
155
|
Milletia mannii
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
156
|
Ongokea gore
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
157
|
Picralima nitida
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
158
|
Schumanniophyton magnificum
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
159
|
Strombosia christilata
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
160
|
Syzygium rowlandii
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
161
|
Treculia obovodea
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
162
|
Trichilia tragacanta
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
163
|
Vernonia concerta
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
164
|
Vitex grandifolia
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
165
|
Xylopia sp
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
166
|
Zanthosilum macrophyla
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
|
Total
|
506
|
316
|
96
|
29
|
17
|
23
|
3
|
990
|
|
Tableau 7 : Relevé de la parcelle non
exploitée (forêt mature)
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40
|
40-50
|
50-80
|
> 80
|
Total
|
1
|
Petersianthus macrocarpus
|
3
|
7
|
4
|
5
|
4
|
3
|
2
|
28
|
2
|
Tabernaemontana crassa
|
16
|
41
|
6
|
1
|
1
|
1
|
1
|
67
|
3
|
Celtis zenkeri
|
13
|
11
|
4
|
2
|
|
1
|
1
|
32
|
4
|
Bosqueia angolense
|
2
|
1
|
1
|
1
|
|
1
|
1
|
7
|
5
|
Desbordesia glaucescens
|
12
|
15
|
5
|
2
|
|
|
1
|
35
|
6
|
Coula edulis
|
7
|
8
|
4
|
1
|
|
|
1
|
21
|
7
|
Lophira alata
|
|
1
|
|
|
|
|
1
|
2
|
8
|
Erythrophleum ivorense
|
|
|
|
|
|
|
1
|
1
|
9
|
Ricinodendron heudelotii
|
|
|
|
|
|
|
1
|
1
|
10
|
Triplochiton scleroxylon
|
|
|
|
|
|
|
1
|
1
|
11
|
Pycnanthus angolensis
|
4
|
3
|
2
|
|
1
|
1
|
|
11
|
12
|
Pteleopsis hylodendron
|
|
1
|
1
|
|
|
2
|
|
4
|
13
|
Celtis tessmannii
|
3
|
4
|
4
|
1
|
1
|
1
|
|
14
|
14
|
Sterculia rhinopetala
|
|
1
|
|
2
|
1
|
1
|
|
5
|
15
|
Pterocarpus mildbraedii
|
3
|
1
|
3
|
1
|
|
1
|
|
9
|
16
|
Khaya ivorensis
|
5
|
|
|
|
|
1
|
|
6
|
17
|
Musanga cecropioides
|
|
|
1
|
|
|
1
|
|
2
|
18
|
Fernandoa fernandini
|
|
|
|
|
|
1
|
|
1
|
19
|
Markhamia lutea
|
|
|
|
|
|
1
|
|
1
|
20
|
Diospyros simulance
|
14
|
5
|
4
|
1
|
1
|
|
|
25
|
21
|
Celtis adolfi-friderici
|
1
|
|
1
|
1
|
1
|
|
|
4
|
22
|
Amphimas pterocarpiodes
|
|
2
|
|
1
|
1
|
|
|
4
|
23
|
Enantia chloranta
|
3
|
2
|
1
|
|
1
|
|
|
7
|
24
|
Gambeya africana
|
1
|
2
|
1
|
|
1
|
|
|
5
|
25
|
Pausinystalia macroceras
|
3
|
1
|
1
|
|
1
|
|
|
6
|
26
|
Hylodendron gabonense
|
|
1
|
1
|
|
1
|
|
|
3
|
27
|
Homalium letestui
|
1
|
3
|
|
|
1
|
|
|
5
|
28
|
Alstonia boonei
|
|
3
|
|
|
1
|
|
|
4
|
29
|
Macaranga sp
|
|
2
|
|
|
1
|
|
|
3
|
30
|
Ficus exasperata
|
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
31
|
Penthachlethra macrophylla
|
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
32
|
Terminalia superba
|
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
33
|
Myrianthus arboreus
|
6
|
3
|
2
|
2
|
|
|
|
13
|
34
|
Tetrapleura tetraptera
|
|
|
1
|
2
|
|
|
|
3
|
35
|
Anonidium mannii
|
4
|
2
|
|
2
|
|
|
|
8
|
36
|
Trichoscypha acuminata
|
13
|
3
|
4
|
1
|
|
|
|
21
|
37
|
Cola lateritia
|
6
|
12
|
3
|
1
|
|
|
|
22
|
38
|
Allanblackia kissongui
|
5
|
4
|
3
|
1
|
|
|
|
13
|
39
|
Santiria trimera
|
12
|
8
|
2
|
1
|
|
|
|
23
|
40
|
Corynanthe pachycera
|
2
|
7
|
2
|
1
|
|
|
|
12
|
|
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40
|
40-50 50-80
|
> 80
|
Total
|
41
|
Cola argentea
|
17
|
6
|
2
|
1
|
|
|
26
|
42
|
Milletia sp
|
3
|
2
|
1
|
1
|
|
|
7
|
43
|
Entandrophragma candollei
|
1
|
3
|
|
1
|
|
|
5
|
44
|
Xylopia aethiopica
|
|
3
|
|
1
|
|
|
4
|
45
|
Aubrevillea kerstingii
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
46
|
Chlorophora excelsa
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
47
|
Drypetes gossweileri
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
48
|
Maesopsis eminii
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
49
|
Nauclea diderrichii
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
50
|
Uapaca guineensis
|
4
|
3
|
7
|
|
|
|
14
|
51
|
Blighia welwitschii
|
20
|
25
|
3
|
|
|
|
48
|
52
|
Coelocaryon preussii
|
4
|
12
|
3
|
|
|
|
19
|
53
|
Blighia sp
|
6
|
5
|
2
|
|
|
|
13
|
54
|
Desplatsia dewerei
|
|
3
|
2
|
|
|
|
5
|
55
|
Duboscia macrocarpa
|
2
|
2
|
2
|
|
|
|
6
|
56
|
Fernandoa adolfi-frederici
|
|
1
|
2
|
|
|
|
3
|
57
|
Garcinia manii
|
10
|
9
|
1
|
|
|
|
20
|
58
|
Sorindeia grandifolia
|
32
|
7
|
1
|
|
|
|
40
|
59
|
Meiocarpidium lepidetum
|
7
|
6
|
1
|
|
|
|
14
|
60
|
Staudtia kamerunensis
|
15
|
5
|
1
|
|
|
|
21
|
61
|
Trichilia welwitschii
|
10
|
5
|
1
|
|
|
|
16
|
62
|
Ebène sp
|
17
|
4
|
1
|
|
|
|
22
|
63
|
Scottelia minifiencis
|
7
|
4
|
1
|
|
|
|
12
|
64
|
Cola acuminata
|
5
|
4
|
1
|
|
|
|
10
|
65
|
Coffea sp
|
4
|
4
|
1
|
|
|
|
9
|
66
|
Rinorea sp
|
23
|
3
|
1
|
|
|
|
27
|
67
|
Rothmannia lujae
|
19
|
3
|
1
|
|
|
|
23
|
68
|
Lovoa trichilioides
|
5
|
3
|
1
|
|
|
|
9
|
69
|
Strombosiopsis tetrandra
|
3
|
2
|
1
|
|
|
|
6
|
70
|
Aningeria robusta
|
2
|
3
|
1
|
|
|
|
6
|
71
|
Pseudospondias microcarpa
|
|
3
|
1
|
|
|
|
4
|
72
|
Calpocalyx denklagei
|
12
|
2
|
1
|
|
|
|
15
|
73
|
Hannoa klaineana
|
1
|
1
|
1
|
|
|
|
3
|
74
|
Sterculia tragacantha
|
1
|
1
|
1
|
|
|
|
3
|
75
|
Cleistopholis patens
|
|
1
|
1
|
|
|
|
2
|
76
|
Guarea thompsonii
|
|
1
|
1
|
|
|
|
2
|
77
|
Keayodendron bridelioides
|
|
1
|
1
|
|
|
|
2
|
78
|
Diospyros sanza-minika
|
2
|
|
1
|
|
|
|
3
|
79
|
Fagara lemairei
|
1
|
|
1
|
|
|
|
2
|
80
|
Klainedoxa macrophylla
|
1
|
|
1
|
|
|
|
2
|
|
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40 40-50 50-80
|
> 80
|
Total
|
81
|
Albizia glaberrima
|
|
|
1
|
|
|
1
|
82
|
Anona sp
|
|
|
1
|
|
|
1
|
83
|
Fagara macropylla
|
|
|
1
|
|
|
1
|
84
|
Piptadeniastrum africanum
|
|
|
1
|
|
|
1
|
85
|
Vitex grandifolia
|
|
|
1
|
|
|
1
|
86
|
Vitex microphylla
|
|
|
1
|
|
|
1
|
87
|
Cola lepidota
|
6
|
13
|
|
|
|
19
|
88
|
Carapa procera
|
4
|
8
|
|
|
|
12
|
89
|
Dacryodes igaganga
|
2
|
5
|
|
|
|
7
|
90
|
Hexalobus crispiflorus
|
7
|
5
|
|
|
|
12
|
91
|
Trichilia tessmannii
|
5
|
5
|
|
|
|
10
|
92
|
Heisteria parvifolia
|
8
|
4
|
|
|
|
12
|
93
|
Antidesma membranaceum
|
1
|
4
|
|
|
|
5
|
94
|
Drypetes sp
|
9
|
3
|
|
|
|
12
|
95
|
Irvingia gabonensis
|
4
|
3
|
|
|
|
7
|
96
|
Maranthes imernis
|
4
|
3
|
|
|
|
7
|
97
|
Dialium bipindense
|
3
|
3
|
|
|
|
6
|
98
|
Diospyros crassiflora
|
1
|
3
|
|
|
|
4
|
99
|
Funtumia elastica
|
|
3
|
|
|
|
3
|
100
|
Polyalthia suaveolens
|
8
|
2
|
|
|
|
10
|
101
|
Anthonotha macrophylla
|
5
|
2
|
|
|
|
7
|
102
|
Eribloma oblongum
|
4
|
2
|
|
|
|
6
|
103
|
Diospyros suaveolens
|
3
|
2
|
|
|
|
5
|
104
|
Khaya anthotheca
|
2
|
2
|
|
|
|
4
|
105
|
Anthonotha fragrans
|
1
|
2
|
|
|
|
3
|
106
|
Parkia bicolor
|
1
|
2
|
|
|
|
3
|
107
|
Berlinia grandiflora
|
|
2
|
|
|
|
2
|
108
|
Klainedoxa grandifolia
|
|
2
|
|
|
|
2
|
109
|
Baphia sp
|
9
|
1
|
|
|
|
10
|
110
|
Cola sp
|
7
|
1
|
|
|
|
8
|
111
|
Pterocarpus soyauxii
|
2
|
1
|
|
|
|
3
|
112
|
Panda oleosa
|
2
|
1
|
|
|
|
3
|
113
|
Mallotus oppositifolius
|
2
|
1
|
|
|
|
3
|
114
|
Lepidobotrys staudtii
|
2
|
1
|
|
|
|
3
|
115
|
Entandrophragma cylindricum
|
2
|
1
|
|
|
|
3
|
116
|
Diospyros sp
|
1
|
1
|
|
|
|
2
|
117
|
Aningeria altissima
|
|
1
|
|
|
|
1
|
118
|
Anopyxis klaineana
|
|
1
|
|
|
|
1
|
119
|
Caloncoba gilgiana
|
|
1
|
|
|
|
1
|
120
|
Canarium schweinfurthii
|
|
1
|
|
|
|
1
|
|
|
|
|
|
Classe des diamètres (cm)
|
|
|
No
|
Espèces
|
5-10
|
10-20
|
20-30
|
30-40
|
40-50
|
50-80
|
> 80
|
Total
|
121
|
Cola balayii
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
122
|
Crudia gabonensis
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
123
|
Fagara tessmannii
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
124
|
Gossweilerodendron joveri
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
125
|
Guarea cedrata
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
126
|
Nesogordonia papaverifera
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
127
|
Markhamia tomentosa
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
128
|
Scottelia coriacea
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
129
|
Sterculia lateritia
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
130
|
Vuacanga thouarsii
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
131
|
Xylopia quintasii
|
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
132
|
Massularia acumilata
|
12
|
|
|
|
|
|
|
12
|
133
|
Diospyros hoyleana
|
4
|
|
|
|
|
|
|
4
|
134
|
Strephonema sp
|
4
|
|
|
|
|
|
|
4
|
135
|
Beilschmiedia obscura
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
136
|
Hymenocardia heudolotii
|
3
|
|
|
|
|
|
|
3
|
137
|
Angylocalyx zenkeri
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
138
|
Antidesma laciniatum
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
139
|
Garcinia kola
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
140
|
Lannea welwitschii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
141
|
Memexylon sp
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
142
|
Pachypodanthium staudtii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
143
|
Thomandersia hensii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
144
|
Xylopia staudtii
|
2
|
|
|
|
|
|
|
2
|
145
|
Alaeophorbia drupifera
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
146
|
Albizia zygia
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
147
|
Assila badjoué
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
148
|
Baphia leptobotrys
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
149
|
Barteria fistulosa
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
150
|
Dacryodes edulis
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
151
|
Entandrophragma angolensa
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
152
|
Grewia coriacea
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
153
|
Irvingia sp
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
154
|
Maesobotrya sp.
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
155
|
Majidea fosteri
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
156
|
Ongokea gore
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
157
|
Picralima nitida
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
158
|
Porterandia cladantha
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
159
|
Strombosia fistulosa
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
160
|
Syzygium rowlandii
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
161
|
Treculia africana
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
|
Total
|
537
|
394
|
115
|
39
|
21
|
16
|
11
|
1133
|
|
Source : Relevés du terrain
Parmi les espèces à faible durée de vie,
Musanga cecropioides et les espèces du genre Macaranga
(M. sp, M. burifolia) sont les mieux représentées
(tableau 8). Dans la forêt non exploitée, ces espèces sont
présentes en petit nombre. Si elles ne sont pas toujours les plus denses
à l'échelle de la parcelle, leur présence en nombre
relativement important dans les clairières naturelles et artificielles
témoigne de la mise en place du cortège floristique
spécialisé dans le processus de cicatrisation de la forêt.
Ces espèces sont presque toutes héliophiles, à bois tendre
et à croissance rapide. Leur présence sur le site non
exploité est souvent consécutive à l'occurrence des
trouées naturelles ou chablis, points où elles attendent la
pénétration de la lumière dans le sous bois pour assurer
leur germination ou leur développement en hauteur comme les travaux de
Kahn (1982) et Alexandre (1989) l'ont montré dans la forêt dense
du SudOuest de la Côte-d'Ivoire.
Tableau 8 : Densité relative des espèces
pionnières de la cicatrisation des clairières
Espèces Parcelle exploitée Parcelle non
exploitée
Caloncoba glauca 1 0
Macaranga sp 16 3
Maesopsis eminii 2 1
Musanga cecropioides 25 2
Myrianthus arboreus 12 13
Barteria fistulosa 2 1
Total 58 20
Source : Relevés de terrain
2.5. Les indices de diversité et de
similarité
Nous avons calculé l'indice de diversité de
Shannon pour évaluer la diversité biologique dans les parcelles
étudiées. La valeur de l'indice de Shannon calculée sur
nos parcelles montre une grande diversité biologique sur chacun des deux
sites. En effet, l'indice de Shannon est de 4,44 en parcelle exploitée
contre 4,45 en parcelle non exploitée.
L'indice de diversité de Simpson a été
calculé pour chacune des parcelles. Il est de 0,13 en forêt
mâture contre 0, 22 en parcelle exploitée. Ces deux indices
administrent la preuve de ce que l'exploitation sélective du bois n'a
pas affecté la diversité biologique de la parcelle
exploitée.
De nombreux autres indices de mesure de la similarité
des deux peuplements existent. C'est par exemple le cas de l'indice de Sorensen
qui mesure le recouvrement des espèces (échantillons) de deux
relevés. Appliqué à nos relevés sur les deux
parcelles, K= 73%, ce qui indique une très grande similitude entre les
peuplements des deux parcelles étudiées. Cette similitude est
corroborée par le calcul du coefficient de communauté floristique
(C) qui présente le pourcentage d'espèces que les deux parcelles
partagent.
Le coefficient de communauté floristique pour
nos deux parcelles est de 72,56%, ce quiconfirme donc la forte
ressemblance entre les parcelles exploitée et non exploitée sur
le
plan floristique. L'exploitation sélective du
bois dans la forêt du site n'a pas entrainé un bouleversement de
la biodiversité, encore moins une réduction de
celle-ci.
Conclusion
D'après le critère d'abondance-dominance, nous
constatons que pour les deux parcelles, la suprématie d'une
espèce particulière n'est pas nette. Cela confirme une faible
perturbation de la forêt au plan de la biodiversité floristique
globale. La forêt exploitée reste très riche en
biodiversité des familles, des genres et des espèces. Cela semble
attester du fait que l'exploitation a été effectivement
sélective et que les règles d'exploitation visant à
préserver la flore ont été appliquées, tout au
moins dans le sens de la diversité biologique. Cela semble signifier que
l'exploitation industrielle du bois qu'a connue le site n'a
entraîné aucune perte en biodiversité aux plans qualitatif
et quantitatif. Est-ce qu'il en est de même de la structure et de la
physionomie du peuplement forestier ? Une réponse claire à cette
question sera donnée par l'analyse de la structure des deux peuplements.
De la sorte, on percevra les changements en terme de densité des
individus et de volume en bois.
CHAPITRE 3 :
LES IMPACTS DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE LA FORET
SUR LA PHYSIONOMIE ET LA STRUCTURE DE LA FORET
Introduction
Dans ce chapitre, il sera question d'établir un bilan
de l'exploitation de la forêt (coupe et évacuation du bois) 7 ans
après la cessation des activités. Il s'agit, sur la base des
traitements statistiques des relevés, de faire un état des lieux
sur le double plan de la physionomie et de la structure du peuplement
forestier. L'objectif ici est de relever les indices pouvant nous permettre de
retracer les étapes de la régénération du
peuplement et de dresser les perspectives de la reconstitution de la
forêt à moyen et long termes. Il s'agit ici de caractériser
la structure et la physionomie des peuplements dans les parcelles. Cette
étape passe par l'analyse des densités des individus, leur taille
et le recouvrement de leurs couronnes. Cette analyse se fera aux plans
horizontal et vertical.
3.1. Les densités des peuplements
Sur l'ensemble des deux placettes, 2123 arbres et arbustes de
dbh = 5 cm ont été inventoriés dont 990 sur la parcelle
exploitée et 1133 sur la placette non exploitée. La plus forte
densité relative des individus est donc observée sur le site non
exploité. Dans la parcelle exploitée, les familles qui
présentent une forte densité (avec au moins 50 individus à
l'hectare) par ordre d'importance décroissante sont : Sterculiaceae (126
individus soit 12,73% des effectifs), Apocynaceae (93 individus soit 9,39%),
Myristicaceae (93 individus soit 9,39%), Euphorbiaceae (72 individus, soit
7,27%), Césalpinaceae (63 individus, soit 6,36%), Moraceae (62 individus
soit 6,26 %), Méliaceae (59 individus, soit 5,96%).
En ce qui concerne les densités relatives par
espèce, on remarque que Tabernaemontana crassa (80 individus
soit 8%), Staudtia kamerunensis (63 individus soit 6%),
Hylodendron gabunense (34 individus soit 3%), Cola lepidota
(29 individus 2%), Cola argentea (26 individus 2%) sont les plus
représentées en forêt exploitée (Tableau 9 et Figure
10). Par ailleurs, 46 espèces sont représentées par un
seul individu et 30 espèces par seulement deux individus.
Tableau 9 : Les 20 espèces abondantes sur les
deux sites
Site exploité
Site non exploité
|
Espèces
|
Nombre d'individus
|
1)
|
Tabernaemontana crassa
|
67
|
2)
|
Blighia welwitschii
|
48
|
3)
|
Sorindeia grandifolia
|
40
|
4)
|
Desbordesia glaucescens
|
35
|
5)
|
Celtis zenkeri
|
32
|
6)
|
Petersianthus macrocarpus
|
28
|
|
7)
|
Rinorea sp
|
27
|
8)
|
Cola argentea
|
26
|
9)
|
Diospyros simulance
|
25
|
10)
|
Santiria trimera
|
23
|
11)
|
Rothmannia lujae
|
23
|
12)
|
Cola lateritia
|
22
|
13)
|
Diospyros sp
|
22
|
14)
|
Coula edulis
|
21
|
15)
|
Trichoscypha acuminata
|
21
|
16)
|
Staudtia kamerunensis
|
21
|
17)
|
Garcinia manii
|
20
|
18)
|
Coelocaryon preussii
|
19
|
19)
|
Cola lepidota
|
19
|
20)
|
Trichilia welwitschii
|
16
|
|
Espèces
|
Nombre d'individus
|
Tabernaemontana crassa
|
80
|
Staudtia kamerunensis
|
63
|
Hylodendron gabunense
|
34
|
Cola lepidota
|
29
|
Cola argentea
|
26
|
Musanga cecropioides
|
25
|
Trichilia welwitschii
|
24
|
Cola lateritia
|
24
|
Coelocaryon preussii
|
22
|
Uapaca guineensis
|
21
|
Blighia welwitschii
|
20
|
Celtis tessmannii
|
19
|
Santiria trimera
|
19
|
Petersianthus macrocarpus
|
17
|
Trichoscypha acuminata
|
16
|
Eribloma oblonga
|
16
|
Desbordesia glaucescens
|
13
|
Celtis zenkeri
|
12
|
Allanblackia kissongui
|
12
|
Myrianthus arboreus
|
12
|
Source : Relevés de terrain
Figure 10 : La densité relative des 20
espèces abondantes dans la forêt exploitée
Dans la parcelle non exploitée, les densités les
plus fortes sont celles des familles suivantes : Sterculiaceae (105 individus
pour 9,26% des effectifs), Apocynaceae (76 individus soit 6,70% des effectifs),
Méliaceae (69 individus, soit 6,09% des effectifs), Anacardiaceae (67
individus, soit 5,91% des effectifs), Ebénaceae (65 individus, soit
5,73% des effectifs), Rubiaceae (64 individus, soit 5,64% des effectifs,
Annonaceae (63 individus, soit 5,56% des effectifs), Sapindaceae (62 individus,
soit 5,47% des effectifs) Myristicaceae (51 individus, soit 4,50% des
effectifs) et Ulmaceae (50 individus, soit 4,41% des effectifs).
Tabernaemontana crassa, reste l'espèce la plus répendue
en terme de densité relative avec 67 individus soit 5,91% de l'effectif.
Sur les deux sites, cette espèce est dominante lorsque l'on
considère le nombre d'individus. Elle est suivie respectivement par les
espèces comme Blighia welwitschii (48 individus, 4,24%),
Sorindeia grandifolia (40 individus, 3,53%), Desbordesia
glaucescens (35 individus, 3,09%), Celtis zenkeri (32 individus,
2,82%) en forêt non exploitée (Figure 11).
51 espèces sont représentées par un
individu et 18 espèces par deux individus. Si l'on excepte
Tabernaemontana crassa qui est partout très présente, la
classification des espèces suivant le nombre d'individus montre une
forte différence en valeur relative entre les deux sites.
Figure 11: La densité relative des 20
espèces abondantes dans la forêt non exploitée
Les espèces abondantes dans la parcelle non
exploitée sont relativement les mêmes (figures 10 et 11) qu'en
parcelle exploitée. Les deux sites ont 13 espèces abondantes en
partage. Il s'agit de Tabernaemontana crassa, Blighia welwitschii,
Desbordesia glaucescens, Celtis zenkeri, Celtis zenkeri, Petersianthus
macrocarpus, Cola argentea, Santiria trimera, Cola lateritia, Trichoscypha
acuminata, Coelocaryon preussii, Cola lepidota, Trichilia welwitschii. On
remarque donc un recouvrement floristique important. Seules 7 espèces
parmi les 20 plus abondantes ne sont pas communes aux deux sites.
présence est insignifiante dans la forêt mature
où elle n'est plus représentée que par 2 individus. Par
contre, le genre Rinorea qui regroupe essentiellement des
espèces de sous-bois caractéristiques des vielles forêts
comme Rinorea sp, Rinorea dentata, Rinorea oblongofolia Rinorea
yaoundeensis (Achoundong, 2000) est très abondant dans la
forêt mature (27 individus) et est peu repésenté dans la
parcelle exploitée (8 individus seulement). Il en est de même du
genre Diospyros (bois d'ébène) avec un effectif de 20
individus dans la forêt exploitée alors qu'on retrouve 43
individus dans la forêt non exploitée. La forte présence de
ces deux genres (caractéristiques chacun d'un stade de longue
évolution de la forêt) en abondance sur l'un des sites est
certainement un indice pouvant permettre d'apprécier l'influence de la
perturbation liée à l'exploitation forestière. L'ouverture
de la forêt a créé des conditions favorables à
Musanga cecropioides qui en a profité pour se déployer
de façon significative. 17 des 25 individus de cette espèce
rencontrés en zone exploitée ont un diamètre
inférieur à 20 cm. Ces petits diamètres indiquent que leur
installation est récente et leur implantation pourrait correspondre
à la période post exploitation.
3.2. Les surfaces terrières
La surface terrière est généralement
proportionnelle au nombre d'individus, mais aussi et surtout à la taille
des individus présents. Aussi, les valeurs très
élevées correspondent aux parcelles qui comportent des individus
de grande taille (figures 12 et 13 et tableaux 13, 14 et 15). Le constat fait
est que la surface terrière sur un hectare est plus importante dans la
forêt non exploitée, soit en tout 36,38 m2 contre 28,33
m2 pour la forêt exploitée. Cela représente une
différence nette de 8 m2, ce qui est particulièrement
significatif. La différence tient au grand nombre d'individus
dénombrés dans la parcelle âgée (1133), mais aussi
à la forte représentation des gros arbres.
Figure 12 : La surface terrière des 20
espèces dominantes dans la forêt exploitée
Tableau 10: Les 20 familles dominantes des deux
parcelles.
|
Site 1 exploité
|
Site 2 non exploité
|
|
|
Familles
|
St en cm2
|
%
|
Familles
|
St en cm2
|
%
|
1
|
Euphorbiacées
|
27483,04
|
9,71
|
Lécythidacées
|
38697,26
|
10,63
|
2
|
Irvingiacées
|
23323
|
8,24
|
Apocynacées
|
30392,82
|
8,35
|
3
|
Moracées
|
21520,46
|
7,60
|
Ulmacées
|
27349,19
|
7,52
|
4
|
Césalpinacées
|
21270,22
|
7,51
|
Sterculiacées
|
27121,31
|
7,45
|
5
|
Ulmacées
|
19020,46
|
6,72
|
Moracées
|
19468,2
|
5,35
|
6
|
Sterculiacées
|
17422,21
|
6,15
|
Euphorbiacées
|
18470,91
|
5,08
|
7
|
Apocynacées
|
13856,29
|
4,89
|
Irvingiacées
|
18440,05
|
5,07
|
8
|
Myristicacées
|
12689,64
|
4,48
|
Césalpiniacées
|
18217,32
|
5,01
|
9
|
Sapotacées
|
12638,61
|
4,46
|
Myristicacées
|
14951,59
|
4,11
|
10
|
Annonacées
|
12296,17
|
4,34
|
Olacacées
|
13888,36
|
3,82
|
11
|
Méliacées
|
11729,69
|
4,14
|
Annonacées
|
12376,64
|
3,40
|
12
|
Lécythidacées
|
10956,68
|
3,87
|
Méliacées
|
11485,54
|
3,16
|
13
|
Mimosacées
|
10628,98
|
3,75
|
Ochnacées
|
10835,07
|
2,98
|
14
|
Combrétacées
|
10472,61
|
3,70
|
Combrétacées
|
10647,59
|
2,93
|
15
|
Anacardiacées
|
7929,61
|
2,80
|
Rubiacées
|
10171,41
|
2,80
|
16
|
Tiliacées
|
7600
|
2,68
|
Ebénacées
|
10166,58
|
2,79
|
17
|
Ochnacées
|
7442,83
|
2,63
|
Sapindacées
|
9258,18
|
2,54
|
18
|
Burséracées
|
5661,94
|
2,00
|
Papilionacées
|
8667,13
|
2,38
|
19
|
Guttifères
|
5642,67
|
1,99
|
Anacardiacées
|
8493,65
|
2,33
|
20
|
Rubiacées
|
4190,2
|
1,48
|
Mimosacées
|
7851,88
|
2,16
|
Source : Relevés de terrain
10 familles sur les deux sites comptent pour plus de 60 % de
la surface terrière totale des parcelles. Les plus grandes surfaces
terrières des familles ne sont pas identiques sur les deux sites
même si leurs valeurs sont assez proches. La forêt non
exploitée est dominée dans l'ordre décroissant par les
Euphorbiaceae, les Irvingiaceae, les Moraceae et les Césalpinaceae. Par
contre la forêt perturbée est dominée par les
Lécythidaceae, les Apocynaceae, les Ulmaceae et les Sterculiaceae.
La confrontation des figures 12 et 13 indique que les
espèces dominantes ne sont pas les mêmes sur les deux parcelles
dans leur ordre d'importance. Hylodendron gabunense, Musanga cecropioides,
Gambeya africana, Duboscia macrocarpa, Coelocaryon preussi, Allanblackia
kissongui, Pentaclethra macrophyla, Staudtia kamerunensis, Cola argentea
et Irvingia
gabunense sont dominants en parcelle exploitée
et dominées en parcelle non exploitée. De l'autre
côté, les espèces comme Coula edulis, Erytrophleum
ivorense, Pycnanthus angolensis, Blighia welwitshii, Diospyros simulance,
Sterculia rhinopetala, Triplochiton scleroxylon, Pterocarpus mildbraedii, Cola
lateritia, Trichoscypha acuminata dominent en forêt mâture et
sont dominées en forêt exploitée.
Tableau 11: Les 20 espèces dominantes dans les
deux parcelles.
Parcelle exploitée Parcelle non
exploitée)
%
Espèces St (cm2) % Nbre
indiv
%
Espèces St (cm2) % Nbre
indiv
Petersianthus macrocarpus
Musanga cecropioides
10956,69 3,87 17 1,72
10184,87 3,59 25 2,53
Desbordesia
glaucescens 18662,18 6,59 13 1,31
Hylodendron gabunense 15423,49 5,44 34 3,43
Petersianthus macrocarpus
Tabernaemontana
crassa
Ricinodendron
heudelotii 13146,89 4,64 4 0,40
Desbordesia
glaucescens 16556,28 4,55 35 3,09
Tabernaemontana
crassa
11497,93 4,06 80 8,08
Coula edulis 11702,72 3,22 21 1,85
Erythrophleum
ivorense 11196,87 3,08 1 0,09
Bosqueia
angolensis 10884,12 2,99 7 0,62
Lophira alata 10835,07 2,98 2 0,18
Pteleopsis
hylodendron 8847,71 2,43 4 0,35
Pycnanthus
angolensis 8623,23 2,37 11 0,97
Celtis tessmannii 8276,41 2,27 14 1,24
Ricinodendron
heudelotii 7651,87 2,10 1 0,09
Blighia
welwitschii 6806,47 1,87 48 4,24
Diospyros
simulance 6131,74 1,69 25 2,21
Sterculia
rhinopetala 6077,06 1,67 5 0,44
Triplochiton
scleroxylon 5933,47 1,63 1 0,09
Pterocarpus
mildbraedii 5497,56 1,51 9 0,79
Cola lateritia 4811,83 1,32 22 1,94
Trichoscypha
acuminata 4639,45 1,27 21 1,85
Uapaca
guineensis 4591,25 1,26 14 1,24
38697,27 10,63 28 2,47
27448,45 7,54 67 5,91
Celtis zenkeri
16068,03 4,42 32 2,82
Gambeya africana 9808,44 3,46 8 0,81
Uapaca guineensis 9309,08 3,29 21 2,12
Pteleopsis hylodendron 9043,39 3,19 7 0,71
Celtis tessmannii 8326,04 2,94 19 1,92
Duboscia macrocarpa 7600 2,68 3 0,30
Lophira alata 7442,83 2,63 3 0,30
Coelocaryon preussii 7138,93 2,52 22 2,22
Celtis zenkeri 7058,28 2,49 12 1,21
Allanblackia kissongui 5642,68 1,99 12 1,21
Bosqueia angolensis 5513,61 1,95 6 0,61
Pentaclethra
macrophylla 4646,89 1,64 6 0,61
Staudtia kamerunensis 4381,77 1,55 63 6,36
Cola argentea 4377,15 1,54 26 2,63
Irvingia gabonensis 4316,32 1,52 6 0,61
Source : relevés de terrain
Le lien entre la densité et la surface terrière
des espèces ici est peu évident.
Tabernaemontana crassa qui est l'espèce la mieux
représentée en terme de densité (8,08% d'individus sur
la
parcelle exploitée et 5,91% pour la parcelle non
exploité) arrive en 4è et en 2è position respectivement
sur les deux parcelles lorsqu'on considère les surfaces
terrières.
3.3. Les classes de diamètres
Les classes de diamètre constituent une
caractéristique essentielle du peuplement. Les figures 12 et 13
présentent la répartition des individus des deux parcelles en
classe de diamètre. On remarque que la distribution des effectifs des
arbres entre les classes de diamètre montre un très grand nombre
de petits arbres dans les deux parcelles. On observe aussi une réduction
constante du nombre d'individus d'une classe inférieure à celle
qui lui est supérieure.
3.3.1. Les valeurs statistiques
Comme le montre le tableau 12, la forêt exploitée
comporte 1 individu de plus de 100 cm de diamètre, contre 3 dans la
forêt âgée. Celle-ci compte 10 individus de la tranche
80-100 cm contre 2 seulement en forêt exploitée. Enfin, pour la
classe 50-80 cm, on retrouve 20 individus en forêt mature contre 24 dans
la forêt exploitée.
Autrement dit, la forêt mature comporte une plus forte
densité relative des individus, mais aussi plus d'individus de gros
diamètres que la forêt exploitée. L'exploitation
sélective du bois pratiquée par la compagnie industrielle a
conduit non seulement à une réduction du nombre d'individus, mais
aussi à une diminution profonde du volume en bois.
Tableau 12 : Les caractéristiques des classes de
diamètres dans les deux parcelles
Parcelles
|
Total individus
|
[50-80] cm
|
[80-100] cm
|
d > 100 cm
|
Forêt mature Forêt exploitée
|
1133 990
|
20 24
|
10 2
|
3 1
|
Nous avons procédé à une
catégorisation des individus à partir de leurs diamètres
respectifs. Ainsi, les très petits individus sont ceux ayant entre 5 et
10 cm de diamètre, les petits individus entre 11 et 40 cm, les individus
moyens entre 41 et 70 cm et les gros individus au-delà de 70 cm de
diamètre. Les très petits individus sont numériquement
dominants. Les individus de la classe de [5-10] sont les plus nombreux. Ces
individus de diamètre inférieur ou égal à 10 cm
sont souvent considérés comme la
régénération naturelle. Ce concept assez complexe est
défini de diverses manières par différents auteurs.
La régénération naturelle est l'ensemble
des phénomènes liés au remplacement des arbres adultes
morts à la suite d'un chablis ou par exploitation. Elle correspond
à l'ensemble des semis, brins et petites tiges existant dans un
peuplement (Rollet, 1969 cité par Puig, 2001). La
régénération naturelle est d'une part au sens statistique,
l'ensemble des semis et petites tiges existant dans un peuplement, d'autre part
au sens dynamique, l'ensemble des processus naturels par lesquels la
forêt dense se reproduit naturellement.
Pour Alexandre (1989), la régénération
naturelle est un processus qui fait appel à l'ensemencement
spontané: elle s'oppose aux techniques d'enrichissement ou de
plantation. Pour Foggie, c'est l'ensemble des processus dynamiques qui
permettent de reconstituer un couvert qui a été entamé
(Foggie, 1960 cité par Alexandre, 1989). Pour les forestiers, la
régénération naturelle renvoie à l'ensemble des
plantules, jeunes plantes et arbres issus de semis naturels et par extension au
devenir de ces semis. Dans le cadre de nos travaux, les individus de dbh
inférieur à 5 cm n'ont pas été pris en compte.
L'analyse des effectifs et de la composition floristique des
individus qui constituent la régénération naturelle est
importante pour mettre en évidence les tendances de la dynamique
forestière post-exploitation industrielle. Ils représentent
51,11% des effectifs de la parcelle exploitée (506 individus) contre
47,40% de ceux de la parcelle non exploitée (537 individus). Si la
différence en terme de proportion n'est pas grande entre les deux
parcelles pour cette classe de diamètre, l'écart en faveur de la
parcelle exploitée peut traduire le dynamisme de la
régénération observable par le déploiement des
individus de très petit diamètre qui comptent pour plus de la
moitié des effectifs. La modification des conditions écologiques
induite par la trouée consécutive à l'exploitation
forestière a favorisé le recrutement d'un grand nombre
d'individus dans cette classe de diamètre. On peut penser à ce
niveau que l'exploitation forestière a stimulé le
développement ou le recrutement des individus de la
régénération naturelle.
La classe [11-20] rassemble également un grand nombre
d'individus. En proportion, elle fait 31,91% des effectifs en parcelle
exploitée et 34,86% en parcelle non exploitée. Les effectifs
décroissent encore dans les classes de [31 à 40]. Les deux
parcelles présentent donc une très large proportion d'individus
de petit diamètre (Figure 14).
5
|
11
|
21
|
31
|
41
|
51
|
61
|
71
|
81
|
91
|
>
|
10]
|
20]
|
30]
|
40]
|
50]
|
60]
|
70]
|
80]
|
90]
|
100]
|
100
|
Classes de diamètre
Parcelle exploitée Parcelle non exploitée
Nombre d'individus
400
600
200
500
300
100
0
Figure 14 : Les densités par classes de
diamètres sur les deux sites
L'histogramme ci-dessus présentant la distribution des
diamètres donne des courbes d'allure exponentielle décroissante
(c'est-à-dire une diminution régulière des effectifs
chaque fois que l'on part d'une classe de diamètre à celle qui
lui est supérieure) indiquant une inégale répartition des
individus dans les classes de diamètres (Figures 14, 15 et 16).
D'après Birot (1965), ce type de distribution des diamètres est
souvent caractéristique des forêts dominées par les
espèces sciaphiles. Il peut aussi être la preuve que les
espèces en présence présentent une forte
régénération.
On compte 822 individus de diamètre < 20 cm dans la
forêt exploitée, soit une proportion de 83 % de tous les individus
recensés. Ces arbustes et petits arbres sont au nombre de 931 dans la
forêt non exploitée, soit un pourcentage de 72 % de l'ensemble des
essences. On compte donc plus d'individus de faible diamètre dans la
forêt mature, mais en proportion, la forêt exploitée
comporte une plus forte représentativité des
individus de faible taille. Autrement dit, la forêt non exploitée
comporte la plus forte densité des individus, mais aussi le plus grand
nombre d'essences de diamètres élevés.
Dans la classe moyenne, les arbres sont nettement moins
nombreux. Dans la classe [41 - 70], on dénombre seulement 38 individus
sur la parcelle exploitée soit environ 4% des effectifs et 33 individus
sur la parcelle non exploitée c'est-à-dire environ 3% des
effectifs.
Seuls 5 individus (Celtis zenkeri, Musanga
cécropioides, Gambeya africana, Desbordesia glaucescens et Ricinodendron
heudelotii) présentent des diamètres supérieurs
à 70 cm en forêt exploitée. Le plus gros arbre ici est
Ricinodendron heudelotii (Euphorbiaceae) avec 108,28 cm de dbh suivi
d'un individu appartenant à l'espèce Desbordesia
glaucescens (Irvingiaceae) de 100 cm de dbh. On peut faire le constat que
l'exploitation forestière a entraîné une réduction
des effectifs dans les grandes classes de diamètre en forêt
exploitée.
En forêt non exploitée, on dénombre 14
individus de gros diamètre (> 70 cm) appartenant à 12 familles
: Pteleopsis hylodendron (Combretaceae),Tabernaemontana crassa
(Apocynaceae) avec deux individus, Pycnanthus angolense
(Myristicaceae), Petersianthus macrocarpus (Lécythidaceae)
représenté par deux individus, Triplochiton scleroxylon
(Sterculiaceae),Bosqueia angolensis (Moraceae), Celtis
zenkeri (Ulmaceae), Coula edulis (Olacaceae), Ricinodendron
heudelotii (Euphorbiaceae), Desbordesia glaucescens
(Irvingiaceae), Lophira alata (Ochnacées),
Erythrophleum ivorense (Césalpiniaceae). Avec 119 cm de
diamètre, Erythrophleum ivorense est le plus gros individu de
la parcelle non exploitée. Dans l'ensemble, en dehors des classes
[51-60] et [61-70], les effectifs dans toutes les autres classes de
diamètre sont plus importants en valeur absolue en forêt non
exploitée.
On observe une forte concentration des individus de petit
diamètre et une rareté des gros diamètres sur les secteurs
qui ont été les plus touchés par les manoeuvres des engins
des exploitants. C'est la preuve que la cicatrisation de ces secteurs est juste
en train d'être entamée.
Il n'existe pas de corrélation nette entre les
densités relatives et les classes de diamètres. Il n'en existe
pas non plus entre les densités relatives et les surface
terrière. C'est ainsi par exemple qu'avec 51% et 47% des individus
respectivement sur les parcelles exploitée et non exploitée, la
classe des arbres ayant un diamètre compris entre 5 et 10 cm ne
représente que 9 et 7% de la
surface terrière totale de chaque parcelle comme le
montrent le tableau et les figures ci-dessous (Tableau 13, Figures 15 et 16).
L'abondance de ces individus ne se traduit donc pas par leur dominance comme on
aurait pu l'envisager. S'ils sont présents en très grand nombre,
ils n'occupent qu'une portion marginale de l'espace lorsque l'on fait la somme
de leur surface terrière. Cela veut aussi dire que ce qui fait le volume
en bois, ce n'est pas le nombre d'essences, mais la grosseur des fûts ou
la taille des individus.
41
51
61
71
81
50]
60]
70]
80]
90]
91
> 100
100]
5
|
11
|
21
|
31
|
10]
|
20]
|
30]
|
40]
|
Classes de diamètre
%
40
60
20
50
30
10
0
Densité relative Surface terrière relative
Figure 15 : La relation densité-surface
terrière par classe de diamètre en parcelle
exploitée
41
51
61
71
81
50]
60]
70]
80]
90]
91
> 100
100]
5
|
11
|
21
|
31
|
10]
|
20]
|
30]
|
40]
|
Classes de diamètre
%
40
50
30
20
10
0
Densité relative Surface terrière relative
Figure 16 : La relation densité-surface
terrière par classe de diamètre en forêt mature
Classe de
|
|
Forêt exploitée
|
|
|
Forêt non exploitée
|
|
diamètre
|
Nbre
|
|
|
|
Nbre
|
|
|
|
|
d'indiv
|
%
|
St (Cm2)
|
%
|
d'indiv
|
%
|
St (Cm2)
|
%
|
5 10]
|
506
|
51,11
|
25940,1
|
9,16
|
537
|
47,4
|
26805,89
|
7,37
|
11 20]
|
316
|
31,92
|
59078,4
|
20,85
|
395
|
34,86
|
72920,24
|
20,04
|
21 30]
|
96
|
9,7
|
48875,6
|
17,25
|
114
|
10,06
|
56529,15
|
15,53
|
31 40]
|
29
|
2,93
|
28577,6
|
10,09
|
40
|
3,53
|
40371,6
|
11,09
|
41 50]
|
16
|
1,62
|
24455,9
|
8,63
|
20
|
1,77
|
33761,59
|
9,28
|
51 60]
|
13
|
1,31
|
31795,6
|
11,22
|
10
|
0,88
|
25165,14
|
6,92
|
61 70]
|
9
|
0,91
|
31207,6
|
11,01
|
3
|
0,26
|
9667,51
|
2,66
|
71 80]
|
2
|
0,2
|
9520,14
|
3,36
|
3
|
0,26
|
14968
|
4,11
|
81 90]
|
0
|
0
|
0
|
0
|
5
|
0,44
|
30251,3
|
8,31
|
91 100]
|
2
|
0,2
|
14685,1
|
5,18
|
3
|
0,26
|
23251,72
|
6,39
|
> 100
|
1
|
0,1
|
9203,83
|
3,25
|
3
|
0,26
|
30206,46
|
8,3
|
Total
|
990
|
100
|
283339,87
|
100
|
1133
|
99,98
|
363898,6
|
100
|
Sources : Relevés de terrain
3.3.2. La distribution des classes de diamètre dans
les parcelles
Les figures 17 et 18 montrent dans l'ensemble une distribution
irrégulière et désordonnée des individus. On
remarque néanmoins une implantation en bouquets dans les deux parcelles.
Les individus apparaissent implantés comme en regroupement. Ces
regroupements semblent s'être faits autour d'un noyau central qui est un
individu de gros diamètre. Tout autour de ces individus (le plus souvent
de dbh > 80 cm), viennent s'éparpiller des individus de moyenne et de
petite taille (dbh variant entre 5 et 50 cm). Entre ces regroupements ou ces
bouquets, des espaces à faible densité des éléments
ligneux s'observent. En réalité, ces étendues sont
colonisées par des plantules qui n'ont pas été prises en
compte dans la cartographie et les relevés de terrain. D'autres
étendues à fort regroupement de plantules correspondent aux
chablis, pour ce qui est de la forêt mature et aux points de
prélèvements d'arbres dans la parcelle exploitée.
Figure 17 : Distribution des classes de diamètres
dans la forêt exploitée (1 ha)
Figure 18 : Distribution des classes de diamètres
dans la forêt non exploitée (1 ha)
3.4. L'indice de valeur d'importance ou le
critère d'abondance-dominance
L'indice de valeur d'importance regroupe la densité
relative et la surface terrière relative de chaque espèce. Elle
permet de caractériser les peuplements végétaux, de
reconnaître les espèces dominantes c'est-à-dire celles qui
ont un meilleur recouvrement. Elle détermine donc l'importance d'une
espèce dans un relevé.
Sur une parcelle, l'Indice de Valeur d'Importance (IVI) peut
être calculé pour chacune des espèces. C'est la somme pour
chaque espèce j de la densité relative (Dr) et
de la surface terrière relative (STr). Il est dérivé de
l'Importance Value Index de Curtis & McIntosh (1950). La somme des
indices de toutes les espèces d'une parcelle vaut 100.
Ainsi, IVIr = Drj+STrj
Où : Drj = nj/n*(100) STrj = STj/ST*(100)
D'après les tableaux 14 et 15, les figures 19 et 20,
Tabernaemontana crassa possède l'indice de valeur d'importance
relative (IVIr) le plus élevé dans les deux parcelles. Celui-ci
est de 12,14% sur la parcelle exploitée et de 13,45% pour la parcelle
témoin. Cela signifie que cette espèce tient le premier rang
selon le critère dabondance et de dominance. Mais somme toute, sa
population, même nombreuse (66 individus sur 1133 dans la forêt
mature, soit 6 % de l'effectif et 80 individus sur 990 dans la forêt
exploitée, soit 8,2 % de l'effectif) est composée
d'éléments de petits diamètres. Aucun arbre de plus de 30
cm de diamètre dans la forêt mature, et seulement 2 dans la
parcelle exploitée.
En revanche, il existe quelques espèces qui dominent
par leur taille, mais qui sont peu fréquentes. Dans la forêt
mature 13 individus sur 1133 qui ont un diamètre supérieur
à 80 cm (Hylodendron gabunense, Desbordesia glaucesens,
Petersianthus macrocarpus, Celtis zenkeri, Alstonia boonei, Bosqueia angolense,
Pycnanthus angolensis, Coula edulis, Lophira alata, Triplochiton scleroxylon,
Ricinodendron heudelotii, Erythrophleum ivorense) comptent à eux
seuls 9,9 m2 de surface terrière, soit près 30 % de
l'ensemble de la parcelle qui compte 36,4 m2.
Dans la forêt exploitée, les 3 individus de plus
de 80 cm de dbh (Desbordesia glaucescens, Ricinodendron heudelotii et
Gambeya lacourtiana) totalisent une surface terrière de 2,4
m2 seulement, soit une proportion de 8,40 % de l'ensemble de la
population de cette parcelle.
Les tableaux ci-dessous montrent entre autres pour chacune des
parcelles, le pourcentage de l'Indice de Valeur d'Importance (IVI) des
espèces. N'y figurent que les espèces avec un IVI
supérieur ou égal à 2 %.
Tableau 14 : Paramètres floristiques des
principales espèces dans la forêt exploitée
Espèces
|
St en cm2
|
St relative
|
Nbre
|
Densité
|
IVI en %
|
|
|
(%)
|
d'indiv
|
relative (%)
|
|
Tabernaemontana crassa
|
11497,93
|
4,06
|
80
|
8,08
|
12,14
|
Hylodendron gabunense
|
15423,49
|
5,44
|
34
|
3,43
|
8,88
|
Staudtia kamerunensis
|
4381,77
|
1,55
|
63
|
6,36
|
7,91
|
Desbordesia glaucescens
|
18662,18
|
6,59
|
13
|
1,31
|
7,90
|
Musanga cecropioides
|
10184,87
|
3,59
|
25
|
2,53
|
6,12
|
Petersianthus macrocarpus
|
10956,69
|
3,87
|
17
|
1,72
|
5,58
|
Uapaca guineensis
|
9309,08
|
3,29
|
21
|
2,12
|
5,41
|
Ricinodendron heudelotii
|
13146,89
|
4,64
|
4
|
0,40
|
5,04
|
Celtis tessmannii
|
8326,04
|
2,94
|
19
|
1,92
|
4,86
|
Coelocaryon preussii
|
7138,93
|
2,52
|
22
|
2,22
|
4,74
|
Gambeya africana
|
9808,44
|
3,46
|
8
|
0,81
|
4,27
|
Cola argentea
|
4377,15
|
1,54
|
26
|
2,63
|
4,17
|
Trichilia welwitschii
|
4260,83
|
1,50
|
24
|
2,42
|
3,93
|
Pteleopsis hylodendron
|
9043,39
|
3,19
|
7
|
0,71
|
3,90
|
Celtis zenkeri
|
7058,28
|
2,49
|
12
|
1,21
|
3,70
|
Cola lepidota
|
1973,65
|
0,70
|
29
|
2,93
|
3,63
|
Cola lateritia
|
3205,49
|
1,13
|
24
|
2,42
|
3,56
|
Allanblackia kissongui
|
5642,68
|
1,99
|
12
|
1,21
|
3,20
|
Santiria trimera
|
3459,39
|
1,22
|
19
|
1,92
|
3,14
|
Blighia welwitschii
|
2800,08
|
0,99
|
20
|
2,02
|
3,01
|
Duboscia macrocarpa
|
7600
|
2,68
|
3
|
0,30
|
2,99
|
Lophira alata
|
7442,83
|
2,63
|
3
|
0,30
|
2,93
|
Trichoscypha acuminata
|
3457,09
|
1,22
|
16
|
1,62
|
2,84
|
Bosqueia angolensis
|
5513,61
|
1,95
|
6
|
0,61
|
2,55
|
Myrianthus arboreus
|
3605,57
|
1,27
|
12
|
1,21
|
2,48
|
Pentaclethra macrophylla
|
4646,89
|
1,64
|
6
|
0,61
|
2,25
|
Eribloma oblonga
|
1686,94
|
0,60
|
16
|
1,62
|
2,21
|
Distemonanthus benthamianus
|
4226,91
|
1,49
|
7
|
0,71
|
2,20
|
Irvingia gabonensis
|
4316,32
|
1,52
|
6
|
0,61
|
2,13
|
Source : Relevés de terrain.
Tableau 15 : Paramètres floristiques des
principales espèces dans la forêt non
exploitée.
Espèces
|
St en cm2
|
St relative (%)
|
Nbre d'indiv
|
Densité relative (%)
|
IVI en %
|
Tabernaemontana crassa
|
27448,45
|
7,54
|
67
|
5,91
|
13,45
|
Petersianthus macrocarpus
|
38697,27
|
10,63
|
28
|
2,47
|
13,1
|
Desbordesia glaucescens
|
16556,28
|
4,55
|
35
|
3,09
|
7,64
|
Celtis zenkeri
|
16068,03
|
4,42
|
32
|
2,82
|
7,24
|
Blighia welwitschii
|
6806,47
|
1,87
|
48
|
4,24
|
6,11
|
Coula edulis
|
11702,72
|
3,22
|
21
|
1,85
|
5,07
|
Sorindeia grandifolia
|
2744,52
|
0,75
|
40
|
3,53
|
4,28
|
Diospyros simulance
|
6131,74
|
1,69
|
25
|
2,21
|
3,9
|
Bosqueia angolensis
|
10884,12
|
2,99
|
7
|
0,62
|
3,61
|
Celtis tessmannii
|
8276,41
|
2,27
|
14
|
1,24
|
3,51
|
Pycnanthus angolensis
|
8623,23
|
2,37
|
11
|
0,97
|
3,34
|
Cola argentea
|
3597,11
|
0,99
|
26
|
2,29
|
3,28
|
Cola lateritia
|
4811,83
|
1,32
|
22
|
1,94
|
3,26
|
Erythrophleum ivorense
|
11196,87
|
3,08
|
1
|
0,09
|
3,17
|
Lophira alata
|
10835,07
|
2,98
|
2
|
0,18
|
3,16
|
Trichoscypha acuminata
|
4639,45
|
1,27
|
21
|
1,85
|
3,12
|
Santiria trimera
|
3557,53
|
0,98
|
23
|
2,03
|
3,01
|
Rinorea sp
|
1957,29
|
0,54
|
27
|
2,38
|
2,92
|
Coelocaryon preussii
|
4310,42
|
1,18
|
19
|
1,68
|
2,86
|
Pteleopsis hylodendron
|
8847,71
|
2,43
|
4
|
0,35
|
2,78
|
Garcinia manii
|
2781,92
|
0,76
|
20
|
1,77
|
2,53
|
Uapaca guineensis
|
4591,25
|
1,26
|
14
|
1,24
|
2,5
|
Rothmannia lujae
|
1668,37
|
0,46
|
23
|
2,03
|
2,49
|
Ebène sp
|
1777,13
|
0,49
|
22
|
1,94
|
2,43
|
Staudtia kamerunensis
|
2017,94
|
0,55
|
21
|
1,85
|
2,4
|
Cola lepidota
|
2285,85
|
0,63
|
19
|
1,68
|
2,31
|
Pterocarpus mildbraedii
|
5497,56
|
1,51
|
9
|
0,79
|
2,3
|
Ricinodendron heudelotii
|
7651,87
|
2,1
|
1
|
0,09
|
2,19
|
Myrianthus arboreus
|
3734,66
|
1,03
|
13
|
1,15
|
2,18
|
Allanblackia kissongui
|
3562,84
|
0,98
|
13
|
1,15
|
2,13
|
Sterculia rhinopetala
|
6077,06
|
1,67
|
5
|
0,44
|
2,11
|
Corynanthe pachycera
|
3601,11
|
0,99
|
12
|
1,06
|
2,05
|
Source : Relevés de terrain.
En dehors de Tabernaemontana crassa dont la
domination est établie sur les deux parcelles, et qui présente
ainsi un meilleur recouvrement, les autres espèces dominantes, si elles
sont souvent communes aux deux parcelles, ne se présentent pas dans le
même ordre de grandeur.
L'échelle d'abondance-dominance a été
proposée par Lecoq en 1844 puis reprise par Lacoste et Salanon en
1969 (Ondo Assoumou, 2006). Elle associe les valeurs d'abondance et de
dominance d'une espèce (IVI). En effet, chaque espèce est
représentée par un nombre donné d'individus ce
qui lui confère une certaine densité
(abondance). Ces individus occupent eux aussi une certaine surface (dominance).
Ces deux paramètres sont associés pour chaque espèce et
permettent d'estimer l'abondance-dominance des espèces à l'aide
d'une échelle conventionnelle de 5 chiffres présentée de
la manière suivante:
Pourcentage de recouvrement Index attribué
Espèce juste présente +
Recouvrement < 5% 1
Recouvrement de 5 - 25 2
Recouvrement de 25 - 50% 3
Recouvrement de 50 - 75% 4
Recouvrement > 75% 5
Cette échelle d'abondance-dominance a été
reprise et légèrement modifiée par des auteurs comme
Guilbert S. (2004) pour faciliter son utilisation en lui donnant de nouvelles
correspondances pas très différentes de celles
présentées ci-dessus. On a ainsi :
+ pour un recouvrement < 1%
1 pour > 1%
2 pour >5%
3 pour > 25%
4 pour >50%
5 pour 80%
L'échelle d'abondance-dominance de Guilbert,
rapportée à l'IVI des différentes espèces montre
qu'il n'y a aucune espèce dont l'abondance-dominance dépasse la
valeur de 3. Seules 6 espèces dans la parcelle non exploitée et 8
dans la parcelle exploitée ont une valeur de 2 correspondant à un
recouvrement supérieur à 5 % et inférieur à 25%.
Figure 19 : L'indice de valeur d'importance des 20
espèces dominantes dans la forêt exploitée
3.5. Le recouvrement des couronnes
La disposition aérienne de la végétation
est perçue par la représentation de la projection des couronnes
des arbres et arbustes au sol. Elle donne un aperçu du degré
d'ouverture ou de fermeture d'une parcelle et permet de visualiser
l'interpénétration des cimes des arbres et arbustes qui est
tantôt importante, tantôt lache. Sur certains points, la
canopée est trouée (figures 21 et 22). La restitution des
couronnes présentée par ces figures montre que le recouvrement
des couronnes est faible ou nul à la hauteur des clairières
naturelles (chablis) ou artificielles (points de prélèvement des
arbres ou lignes de dégagement des arbres coupés). C'est à
ce niveau que la lumière du soleil parvient au sol sans être
interceptée par les cimes des arbres. La différence
fondamentale entre les deux parcelles réside dans la fréquence et
les dimensions de ces trouées. Elles sont plus nombreuses et plus
étendues dans la forêt exploitée.
Autrement dit, la forêt exploitée est plus
fragmentée que la forêt mature. Les voies tracées pour
l'extraction du bois en forêt sont en partie responsables de l'ouverture
de cette parcelle. En effet, une piste a été tracée en
forêt pour tirer les arbres abattus. Les manoeuvres des engins durant les
opérations d'extraction sont à l'origine de la réduction
du recouvrement. Il faut aussi noter que l'exploitation forestière est
à l'origine de la mortalité des arbres et arbustes qui au
départ ne sont pas visés par l'activité. En Amazonie par
exemple, on a remarqué que l'exploitation forestière
entraîne la modification de la structure forestière avec en
moyenne 14 à 50 % de la canopée détruit et une
mortalité de 10 à 20 % des arbres de la strate supérieure
(Schulze et Zweede, 2006). Nombre d'arbres et d'arbustes partiellement
endommagés ne présentent pas immédiatement les
conséquences pendant les opérations d'exploitation. Lors de
l'abattage et du débardage, les dégâts les plus
fréquents que connaissent les arbres sont l'ébranchage et
l'écorçage. C'est quelques années après
l'exploitation que l'on enregistre parmi les individus bléssés un
taux de mortalité assez élevé. Ceci contribue à
ouvrir davantage la canopée et à fragmenter la forêt
exploitée, la rendant ainsi plus vulnérable aux vents violents
que la forêt non perturbée. On comprend pourquoi notre parcelle
exploitée est plus ouverte et plus fragmentée que la parcelle non
exploitée. L'exploitation forestière a dû provoquer la
mortalité de certains individus sur cette parcelle.
De plus, les pistes laissées par l'exploitation
forestière sont empreintées par les populations du village qui,
pour entretenir le passage, en défrichent les abords, contribuant ainsi
à limiter la pousse des jeunes plantes. Très souvent, c'est
à travers ces tracés facilement accessibles qu'ils se
déplacent pour atteindre les champs, pour chercher du bois de chauffage
ou des perches pour la construction des habitations et des hangars.
Figure 22 : Recouvrement des couronnes des arbres et
arbustes dans la forêt exploitée.
La fragmentation poussée de la forêt
exploitée se traduit sur le site par une forte densité des
ouvertures ou clairières. Ces discontinuités occasionnées
par des trouées d'abattage sont amplifiées par des reliques de
pistes et de parcs à bois qui découlent de l'exploitation. La
fragmentation des habitats est donc parmi les conséquences de
l'exploitation forestière. Dès que ces habitats sont en
deçà d'une taille critique, les relations interspécifiques
sont profondément modifiées et l'écosystème change
radicalement de nature (Laurance et al, 1997). Cela conduit à
une mise en danger de la faune et de la flore, et à un taux d'extinction
dramatique, de l'ordre de 40 000 espèces par an (Hughes et al,
1996).
La parcelle non exploitée quant à elle
connaît moins de trouées et apparaît ainsi plus
fermée et, même si des clairières sont également
visibles, elles ne traduisent pas forcément la fragmentation de la
forêt. Le recouvrement des couronnes ici est compris entre 80 et 150 %.
Par rapport à leur nombre et leur surface réduite, on comprend
que ce sont des ouvertures qui sont surtout dues au chablis et qui entrent dans
l'ordre naturel du fonctionnement d'une forêt. Les couronnes sont
très souvent jointives et s'interpénètrent
étroitement. Cette parcelle est relativement plus homogène par
rapport au site exploité qui connaît quant à lui un
recouvrement des couronnes qui varie entre 40 et 150 %. Autrement dit, le
recouvrement de la forêt exploitée est discontinu du fait de
l'abondance des clairières. Celles-ci sont présentes en nombre
plus important sur le secteur ayant directement subi les effets de l'extraction
du bois (Figure 22). Les secteurs de cette placette qui ont été
épargnés par l'exploitation présentent un recouvrement
relativement plus important. Ainsi, ces ouvertures correspondent aux
clairières et aux chablis créés par la chute des arbres
mais aussi aux points de passage des engins qui ont servi à l'extraction
du bois. Ces ouvertures sont alors généralement occupées
par des monocotylédones de la famille des Marantacées et des
Zingibéracées (photos 5). Ce sont des plantes herbacées
héliophiles qui profitent de la lumière qui arrive au sol pour se
développer. Elles participent selon certains auteurs à la
cicatrisation de la forêt dense après sa destruction et sont par
conséquent considérées comme des formations de transition
qui conduisent à terme à la forêt dense.
A
D
B
C
Photo Kemadjou, décembre 2009
Photo 5 : Clairière artificielle à
Marantaceae et Zingibéraceae dans la forêt
exploitée.
Notes : Cette clairière occupe l'emplacement d'une
coupe d'arbre opérée en 2002 et laisse filtrer très
abondamment la lumière jusqu'au sol. Aussi, l'abondance de la
lumière favorise la croissance et la germination des espèces
héliophiles à croissance rapide et à faible durée
de vie.
Après 7 ans, le stade de
régénération est caractérisé par des plantes
herbacées comme les Zingiberaceae (feuilles lancéolées au
premier plan) (A), et les Marantaceae (au milieu de la photo
une feuille de cette plante dont les femmes se servent pour emballer les batons
de manioc et autres « miondo ») (B). On note aussi
que le cortège floristique est composé de palmiers rotin
(feuilles palées) (C). Il faut également
remarquer un jeune plant de Musanga cecropioides au milieu de la photo
dont les feuilles de couleur vert clair traduisent sa jeunesse
(D).
Photo Kemadjou, décembre 2009
Photo 6 : Chablis dans la forêt mature de
Faekélé II
Notes : Même sans l'intervention de l'homme, la
forêt connaît natuellement des chutes d'arbres ou de branches
(violis). La chute des arbres est provoquée soit parce que l'arbre est
mort, soit par déracinement suite à un vent violent. Sur ces
points d'impact, les trouées ainsi faites permettent la
pénétration de la lumière dans le sous bois qui
d'ordinaire ne reçoit que moins de 5 % de la lumière du soleil.
Lorsque cette lumière parvient en abondance au sol, c'est l'occasion
pour les graines ou les plantules d'espèces héliophiles en
état de dormance de germer (cas des graines) et de se développer
(pour les plantules). D'après Alexandre (1989), ces chablis contribuent
au rajeunissement naturel de la forêt. De plus, d'après cet
auteur, sans ces trouées, la forêt ne pourrait pas renouveller ses
propres espèces.
D'autres auteurs comme Lejoly (1996)15 qui a
étudié la forêt à Marantaceae du parc national de
d'Odzala en République du Congo pensent que les Marantaceae peuvent
conduire à la régression ou même à la disparition de
la couverture forestière par absence de
régénération des arbres et arbustes. L'explication
réside dans le fait que l'ouverture de la canopée est
défavorable à la présence des animaux arboricoles, surtout
les petits primates et les oiseaux frugivores qui disséminent les
graines à travers la forêt, mais qui se perchent sur les branches
des arbres pour le faire. La banque des graines du sol (le potentiel
séminal édaphique) est ainsi appauvrie en semences d'arbres
zoochores. Les peuplements à Marantaceae, parce que très
couvrant, ont également une action inhibitrice sur la germination des
ligneux héliophiles qu'elles privent ainsi de lumière. A partir
d'un certain stade, ce processus peut conduire de façon
irréversible à la disparition de la forêt à cause de
l'absence de régénération des ligneux. D'après cet
auteur, les Marantacées participent donc à une dynamique qui peut
s'avérer dangereuse pour la reconstitution de la forêt
après perturbation. La présence de nombreuses clairières
à Marantaceae sur notre parcelle exploitée s'inscrit-elle
déjà dans cette logique là ?
Il convient toutefois de remarquer que ces travaux ne
précisent pas par quoi est remplacée la forêt. Le doute de
cette thèse subsiste d'autant plus que ces peuplements à
Marantaceae existent à l'état naturel dans la forêt non
perturbée. Il conviendrait, pour apporter plus de précisions, de
procéder à un suivi de ces parcelles sur un pas de temps plus
important, c'est-à-dire de l'ordre de 15 à 20 ans.
3.6. La typologie des recouvrements post-exploitation
forestière
La fragmentation est un concept de la
télédétection issu de l'analyse des images satellites.
Elle s'applique donc à grande échelle avec le pixel comme
unité. Ainsi, la forêt dense correspond à une surface
où au moins70 % des pixels appartiennent à la classe forêt.
Lorsque 40 à 70 % des pixels sont classés forêt, la
forêt est fragmentée. A moins de 40 % de pixels de forêt, on
parle de non-forêt. La fragmentation peut être abordée
suivant deux approches : l'approche quantitative qui fait appel aux outils
mathématiques pour mesurer et caractériser la fragmentation ;
l'approche qualitative quant à elle permet de caractériser
visuellement les types de fragmentation sur la base d'une typologie
fondée sur la physionomie de la fragmentation telle qu'elle est
perçue par l'oeil. C'est avec cette approche qualitative que nous allons
caractériser la fragmentation de la
parcelle exploitée. Nous le faisons, non pas à
grande échelle, mais à l'échelle de la placette où
la carte du recouvrement se substitue aux images satellites. La carte du
recouvrement nous donne une sorte de vue de dessus de notre parcelle que l'on
va comparer avec les quatre modèles physionomiques primaires de
fragmentation élaborés par Jeanjean et al.
(1995)16 :
· Le type linéaire correspond à une bande
plus ou moins étroite qui traverse une classe homogène. C'est par
exemple le cas des forêts ripicoles ou des forêts galerie qui
traversent des formations de savane. C'est aussi le cas des routes qui
traversent un massif forestier ;
· Le type insulaire se caractérise par une
apparition de taches importantes isolées appartenant à une classe
sur un fond uniforme appartenant à une autre classe. C'est par exemple
le cas avec les champs ou des plantations éparpillés dans un
massif forestier ;
· Le type diffus se caractérise par
l'émiettement d'éléments fins d'une classe sur un fond
constitué d'éléments d'une autre classe.
· Le type massif distingue deux espaces compacts
séparés par une frontière très nette. C'est par
exemple un front pionnier d'occupation humaine qui peut jouxter une forêt
dense.
Linéaire Insulaire Diffus Massif
Figure 23 : Les modèles physionomiques primaires
de fragmentation (Jeanjean et al. 1995).
La confrontation du recouvrement de la parcelle
exploitée avec les modèles ci-dessus nous autorise à
conclure à une fragmentation diffuse de cette parcelle. C'est la preuve
d'une certaine modification de la structure spatiale de la forêt du fait
de l'exploitation forestière et de ses répercussions
collatérales. Ce morcellement est de nature à modifier davantage
le milieu ainsi que le fonctionnement de l'écosystème. Mais la
fragmentation ici n'est que provisoire car avec le temps, les espaces ainsi
ouverts vont progressivement se refermer avec le déploiement d'une
succession d'espèces réparatrices, à condition qu'aucune
autre atteinte ne soit portée par la suite à la
végétation à très court terme.
16 Cité par Puig, H. (Opcit)
Conclusion
La structure verticale des deux parcelles est similaire
à quelques exceptions près. On retrouve les mêmes
espèces dans les différentes classes de diamètre. Une
différence nette est remarquable au niveau du sous-bois. En effet, les
ouvertures faites dans la forêt exploitée ont modifié par
endroit les conditions écologiques de la parcelle ainsi que la
biodiversité (importance des Marantaceae et Zingiberaceae). Cette
situation a joué en faveur de la strate herbeuse qui s'y est
développée encore plus qu'en forêt mâture (photos 5,
6, 7 et 8). Il faut cependant noter que la densité du sous-bois en
parcelle exploitée n'est pas généralisée. On
remarque cette situation en général sur les zones directement
marquées par les activités d'extraction du bois, notamment les
points de chute des arbres abattus, les pistes secondaires ayant servi à
l'évacuation des billes de bois.
Photo Youta Happi, Décembre 2009
Photo 7 : Le sous bois de la forêt mature à
faible luminosié et pauvre en couvert herbacé.
Notes : La faible pénétration de la
lumière limite le développement des herbacées et d'autres
plantes héliophiles. En effet, la fermeture de la canopée en
forêt mâture limite le développement des herbacées.
Le sous-bois est donc dégagé, ce qui rend la circulation
aisée. La majorité des jeunes plants qui jonchent le sol sont des
espèces sciaphiles. Elles sont mélangées à quelques
espèces héliophiles qui peuvent demeurer à l'état
de plantule durant des dizaines d'années en attendant une ouverture pour
assurer leur croissance en hauteur.
Photo Kemadjou, Décembre 2009
Photo 8: Trouée occasionnée par une coupe
d'arbre
Notes : Le point d'impact de la coupe d'un arbre laisse en
place un sous-bois touffu encombré principalement par des plantes
herbacées dominées par des Zingiberaceae et Marantaceae. Ces
herbacées profitent de l'importance du rayonnement qui arrive au sol.
Les coupes sélectives d'arbres ont ainsi pour conséquences une
diminution de la densité des arbres et arbustes, mais aussi une
perforation de la canopée. La multiplication des coupes et des
trouées augmente donc les clairières artificielles dans la
forêt. Noter aussi que la situation est comparable aux trouées
naturelles que sont les chablis.
CHAPITRE 4 : LES CONSEQUENCES ECOLOGIQUES ET
ECONOMIQUES DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE LA FORET
Introduction
Dans la parcelle exploitée, trois essences ont
été prélevées. Ces espèces n'ont pu
être identifiées du fait de l'ancienneté du
prélèvement. On retrouve aussi le tracé des anciennes
pistes d'évacuation du bois dont la cicatrisation est en cours
d'achèvement. L'objectif de ce chapitre est de caractériser la
dynamique du peuplement en terme de biodiversité globale et en terme
bilan sur la valeur en bois de la parcelle exploitée il y a 7 ans de
cela. Il s'agit de voir si l'exploitation sélective affecte
particulièrement le développement des principales essences
commerciales. Il s'agit, sur la base des paramètres structuraux, de
faire un état des lieux sur le double plan écologique et
économique. L'objectif ici est de relever les indices pouvant nous
permettre de retracer les étapes de la régénération
du peuplement et de dresser les perspectives à moyen et long termes.
4.1. Une légère modification de la
biodiversité floristique
La coupe sélective par définition répond
à deux critères : une catégorie précise
d'espèces à bois précieux demandée sur le
marché et un diamètre minimum d'exploitabilité (DME). Pour
optimiser la rentabilité, l'exploitant a pour souci de prélever
uniquement les espèces sollicitées par les marchés. De
l'autre côté, l'Etat propriétaire de la forêt doit
préserver son patrimoine et éviter les critiques des
organisations qui militent pour la conservation des écosystèmes
forestiers intertropicaux. De nombreux travaux indiquent qu'il est difficile
d'établir les conséquences de l'exploitation sélective en
termes d'impact sur l'ensemble de l'écosystème et de la
biodiversité (Bawa et Sidler, 1998) et en termes démographiques
pour les principales espèces exploitées (Fashing et al.
2004). Bien que le DME ait été fixé de
façon à permettre le renouvellement des espèces
exploitées dans leur milieu (les arbres étant supposés
être sexuellement mûrs avant d'avoir atteint ce seuil), certaines
études permettent d'établir des perturbations qui ont des
conséquences sur les processus devant assurer la
régénération de la diversité
génétique, et en particulier les mécanismes reproducteurs
(Jennings et al. 2001 cités par Lourmas, 2005). En effet, le
prélèvement concerne des individus qui sont supposés
être reproducteurs, des individus âgés qui sont souvent
considérés comme des réservoirs de la diversité
génétique. Leur exploitation est de nature à limiter la
reproduction de l'espèce.
Même si l'exploitation sélective des
forêts se caractérise par le prélèvement des arbres
situés au dessus d'un seuil de diamètre (appelé
diamètre minimum d'exploitabilité) fixé par espèce,
et mesuré à 1,30 mètre du sol, elle ne cause pas moins des
dégâts sur la forêt. L'exploitation pourrait conduire
à la raréfaction des arbres les plus vieux dont certaines ne se
régénèrent que très lentement. Elle entraîne
aussi une ouverture importante du milieu forestier (ouverture de la
canopée) (Lourmas, 2005).
Les principales conséquences de l'exploitation ont ainsi
été résumées par Lourmas (2005):
· Une modification locale de la distribution
diamétrique d'une espèce qui correspond à une diminution
de la densité en arbres reproducteurs potentiels ;
· Une modification de la distribution de la
diversité biologique. Cette modification concerne aussi bien la flore
(du fait du développement des espèces pionnières) que la
faune car la diversité biologique des insectes de la canopée
comme les papillons diminue considérablement ;
· Une perturbation peut aussi porter sur le comportement
du pollinisateur, qui peut par exemple augmenter le temps passé à
prospecter chaque arbre, entraînant une augmentation de
l'autofécondation ou de la fécondation entre individus
apparentés s'ils sont spatialement agrégés. En
conséquence, la production de fruits peut diminuer, soit parce que
l'espèce est autoincompatible, soit que le nombre de visites par les
insectes diminue;
· La perturbation de la structure de la forêt,
notamment les changements de rang de dominance des espèces, pourrait
limiter la régénération des principales espèces
exploitées (Hall et al. 2003).
A côté de ces thèses pessimistes,
d'autres travaux évoquent des effets positifs de la coupe
sélective des arbres dans le processus de
régénération et de renouvellement de la forêt dense
tropicale humide. Ces travaux soutiennent que les coupes sélectives
peuvent conduire à un rajeunissement de la population si l'ouverture de
la canopée profite à l'espèce, soit par l'installation de
nouveaux individus (nouveaux espaces pour les espèces pionnières
ou semipionnières), soit par redémarrage de la croissance vers
les strates supérieures de la canopée pour les individus qui
végétaient (Fashing et al. 2004). Webb (1999) montre par
exemple que l'exploitation sélective favorise la
régénération de Carapa guianensis (Meliaceae),
les semis installés dans les trouées d'abattage ayant un plus
grand succès d'installation, et les arbres
adultes ayant une croissance plus rapide qu'en milieu naturel
du fait de la mise en lumière. L'effet est donc particulièrement
important dans les premières années qui suivent
l'exploitation.
4.2. Une diminution des gros arbres et une
réduction de la densité du peuplement
La forêt camerounaise renferme environ 300
espèces commercialisables. « Parmi les 300 essences
théoriquement commercialisables des forêts camerounaises,
seulement 113 sont exploitées dont une quinzaine d'essences
représentent à elles seules près de 90 % des volumes
prélevés, les cinq essences principales [toutes présentes
sur notre site] étant l'Ayous (Triplochiton scleroxylon), le
Sapelli (Entandrophragma cylindricum), l'Azobe (Lophira
alata), le Fraké (Terminalia superba) et l'Iroko
(Milicia excelsa ou Chlorophora excelsa). Ces
dernières constituent pour leur part environ 70% de la production en
volume »17
Le potentiel exploitable sur la base des conditions actuelles
du marché du bois s'élève à environ 750 millions de
m3. A côté de cette exploitation pour le bois d'oeuvre, il faut
ajouter les autres types d'utilisation des produits forestiers (plantes
médicinales, plantes nutritives, plantes de service etc.) aux
possibilités tout aussi diversifiées et importantes. Dans cette
section, nous ne nous intéressons qu'aux essences
prélevées comme bois d'oeuvre.
Pour apprécier les tendances de l'état des
essences commerciales après exploitation, nous avons
procédé à un recensement systématique des
espèces qui présentent une certaine valeur commerciale, les
espèces principales (c'est-à-dire les plus sollicitées sur
le marché) comme les espèces secondaires (les espèces les
moins prisées). Ce recensement a été fait à partir
de la liste des essences forestières commerciales établie par les
services du Ministère des Forêts et de la Faune (Voir annexe
3).
4.3. Une réduction du volume en bois à
court terme
Parmi les espèces à valeur commerciale, seule
la catégorie ayant une côte actuelle sur le marché nous a
intéressé. La liste de ces espèces actuellement
valorisées et qui ont été observées sur nos deux
parcelles est présentée par le tableau 16. 72 espèces
commerciales ont été ainsi recensées sur l'ensemble des
deux parcelles. Parmi elles, 28 sont considérées comme essences
commerciales principales. On a compté 65 espèces de bois
commercialisables dans la parcelle dite forêt mature contre 60
espèces dans la forêt exploitée. 53 espèces
commerciales rencontrées sont communes aux deux sites, preuve qu'il
demeure entre eux une certaine similitude au plan floristique. L'exploitation
n'a au final eu que très peu d'impact sur la composition
spécifique à court terme (7 ans).
Dans la forêt non exploitée, les 7
espèces commerciales abondantes sont par ordre décroissant
Desbordesia glaucescens, Celtis zenkeri, Petersianthus macrocarpus,
Santiria trimera, Cola lateritia, Coula edulis, Staudtia kamerunensis.
Dans la parcelle exploitée par contre, les espèces les plus
fréquemment rencontrées sont par ordre Staudtia kamerunensis,
Cola lateritia, Coelocaryon preussii, Celtis tessmannii, Santiria trimera,
Petersianthus macrocarpus, Eribloma oblonga. Ces espèces
commerciales parmi les plus abondantes ne sont malheureusement pas, pour nombre
d'entre elles, les plus prisées sur le marché. Néanmoins,
même en nombre réduit par rapport au total des effectifs, la
majorité des espèces de la forêt dense parmi les plus
côtées sur le marché sont présentes. Il s'agit par
ordre décroissant de : Triplochiton scleroxylon (Ayous)
Entandrophragma cylindricum, Entandrophragma condolei (Sapeli
pour les deux), Erythrophleum ivorense (Tali) (photo 9), Lophira
alata (Azobé), Milicia excelsa (Iroko), Terminalia
superba (Fraké), Diospyros spp (Ebène).
En terme de nombre d'individus ou de densité en
essences commerciales, la forêt mature est plus riche que la forêt
exploitée. Sur le premier site en effet, on compte 426 individus contre
403 sur le second. Toutefois, lorsque l'on considère uniquement les
espèces commerciales principales, la densité est plus importante
dans la parcelle exploitée que dans la parcelle témoin. Cette
différence est surtout liée au fait que Staudtia
kamerunensis est fortement représentée sur la parcelle
soumise à l'exploitation. Cette espèce appartient au groupe des
principales essences de grande valeur dont l'exploitation est interdite au
Cameroun sauf sur dérogation spéciale.
Tableau 16 : Essences forestières commerciales
relevées sur le site de Faékélé II
Nom scientifique
|
Nom commercial
|
Parcelle non exploitée
|
Parcelle exploitée
|
Côte des essences
sur le marché
|
|
Nbre d'indiv
|
|
Essak / Alow kouaka
|
1
|
1
|
*
|
2. Albizia zygia
|
Ouochi
|
1
|
1
|
*
|
3. Alstonia boonei
|
Emien
|
4
|
1
|
**
|
4. Amphimas pterocarpiodes
|
Lati parallèle
|
4
|
1
|
*
|
5. Aningeria altissima
|
Aningré A
|
1
|
1
|
***
|
6. Aningeria robusta
|
Aningré R
|
6
|
0
|
***
|
7. Anopyxis klaineana
|
Bodioa
|
1
|
0
|
*
|
8. Anthonotha fragrans
|
Kibakoko
|
3
|
0
|
*
|
9. Antiaris welwistchii
|
Ako W
|
0
|
3
|
*
|
10. Berlinia grandiflora
|
Ebiara Yaoundé
|
2
|
0
|
*
|
11. Canarium schweinfurthii
|
Aiélé / Abel
|
1
|
5
|
***
|
12. Carapa procera
|
Crabwood d'Afrique
|
12
|
7
|
*
|
13. Celtis adolfi-friderici
|
Diana parallèle
|
4
|
2
|
*
|
14. Celtis tessmannii
|
Diana T
|
14
|
19
|
*
|
15. Celtis zenkeri
|
Diana Z
|
32
|
12
|
*
|
16. Coelocaryon preussii
|
Ekouné
|
19
|
22
|
*
|
17. Cola lateritia
|
Efok ahié
|
22
|
24
|
*
|
18. Coula edulis
|
Coula
|
21
|
8
|
*
|
19. Dacryodes igaganga
|
Assa mingoung / Igaganga
|
7
|
9
|
*
|
20. Desbordesia glaucescens
|
Alep
|
35
|
13
|
***
|
21. Dialium bipindense
|
Eyoum rouge
|
6
|
5
|
*
|
22. Diospyros crassiflora
|
Ebène
|
4
|
1
|
***
|
23. Discoglypremna caloneura
|
Dambala
|
0
|
2
|
*
|
24. Distemonanthus benthamianus
|
Movingui
|
0
|
7
|
**
|
25. Duboscia macrocarpa
|
Akak
|
6
|
3
|
*
|
26. Enantia chloranta
|
Moambé jaune
|
7
|
2
|
*
|
27. Entandrophragma angolense
|
Tiama
|
1
|
0
|
***
|
28. Entandrophragma candolei
|
Kossipo
|
5
|
3
|
***
|
29. Entandrophragma cylindricum
|
Sapelli
|
3
|
1
|
***
|
30. Eribloma oblonga
|
Eyong
|
6
|
16
|
**
|
31. Erythrophleum ivorense
|
Tali
|
1
|
1
|
***
|
32. Funtumia elastica
|
Mutondo
|
3
|
10
|
*
|
33. Fagara macrophylla
|
Bongo brousse
|
1
|
0
|
*
|
34. Fagara tessmannii
|
Bongo T
|
1
|
0
|
*
|
35. Gambeya africana
|
Longhi
|
5
|
8
|
**
|
|
Tableau 16 (suite) : Essences forestières
commerciales relevées sur le site de Faékélé
II
Nom scientifique
|
Nom commercial
|
Parcelle non exploitée
|
Parcelle exploitée
|
Côte sur le marché
|
|
Nbre d'indiv
|
|
36. Garcinia kola
|
Onié
|
2
|
0
|
*
|
37. Gossweilerodendron joveri
|
Odouma
|
1
|
0
|
*
|
38. Guarea cedrata
|
Bossé clair
|
1
|
0
|
**
|
39. Guarea thompsonii
|
Bossé foncé
|
2
|
2
|
**
|
40. Irvingia gabonensis
|
Andok
|
7
|
6
|
*
|
41. Irvingia grandifolia
|
Andok ngoé
|
0
|
1
|
**
|
42. Khaya anthotheca
|
Acajou blanc
|
4
|
7
|
***
|
43. Khaya ivorensis
|
Acajou de bassam
|
6
|
3
|
***
|
44. Klainedoxa microphylla
|
Eveuss
|
0
|
1
|
*
|
45. Lannea welwitschii
|
Kumbi
|
2
|
2
|
*
|
46. Lophira alata
|
Azobé
|
2
|
3
|
***
|
47. Lovoa trichilioides
|
Dibétou
|
9
|
3
|
**
|
48. Maranthes inermis
|
Assila omang
|
7
|
3
|
*
|
49. Nauclea diderrichii
|
Bibinga
|
1
|
0
|
***
|
50. Nesogordonia papaverifera
|
Kotibé
|
1
|
2
|
**
|
51. Ongokea gore
|
Angueuk
|
1
|
1
|
*
|
52. Parkia bicolor
|
Lo
|
3
|
3
|
*
|
53. Parkia filicoidea
|
Eseng grandes feuilles
|
0
|
5
|
*
|
54. Pentaclethra macrophylla
|
Mubala
|
1
|
6
|
*
|
55. Petersianthus macrocarpus
|
Abalé
|
28
|
17
|
*
|
56. Piptadeniastrum africanum
|
Dabéma
|
1
|
8
|
***
|
57. Pteleopsis hylodendron
|
Osanga
|
4
|
7
|
*
|
58. Pterocarpus mildbraedii
|
Padouk blanc
|
9
|
2
|
***
|
59. Pterocarpus soyauxii
|
Padouk rouge
|
3
|
3
|
*
|
60. Pycnanthus angolensis
|
Ilomba
|
11
|
6
|
**
|
61. Ricinodendron heudelotii
|
Essessang
|
1
|
4
|
*
|
62. Santiria trimera
|
Ebap / Adjouaba
|
23
|
19
|
*
|
63. Staudtia kamerunensis
|
Niové
|
21
|
63
|
*
|
64. Sterculia mildbraedii
|
Efok ayous nkol
|
0
|
2
|
*
|
65. Sterculia rhinopetala
|
Lotofa / Nkanang
|
5
|
7
|
*
|
66. Sterculia tragacantha
|
Efok afum
|
3
|
7
|
*
|
67. Syzygium rowlandii
|
Bibolo afum
|
1
|
1
|
*
|
68. Terminalia superba
|
Fraké / Limba
|
1
|
2
|
***
|
69. Tetrapleura tetraptera
|
Akpa
|
3
|
2
|
*
|
70. Trichoscypha acuminata
|
Amvout
|
21
|
16
|
*
|
71. Triplochiton scleroxylon
|
Ayous / Obeche
|
1
|
0
|
****
|
72. Vitex grandifolia
|
Evoula / Evino
|
1
|
1
|
*
|
|
Total 426 403
Probablement, les ouvetures provoquées par les coupes
d'arbres ont favorisé la multiplication de cette espèce
héliophile à cet emplacement. On peut donc considerer que la
forêt non exploitée limiterait le développement de
certaines espèces de lumière à forte valeur
économique et écologique.
Photo Kemadjou, Décembre 2009
Photo 9: Un gros pied d'Erythrophleum ivorense
(Tali) de 119 cm de diamètre dans la forêt mature
Notes : L'espèce est considérée par les
exploitants comme une essence noble du fait de la grande densité de son
bois.
NB. La bouteille plastique au pied de l'arbre indique
l'échelle
Photo Kemadjou, Décembre 2009
Photos 10: Un gros pied de Gambeya africana de
98 cm de diamètre dans la forêt exploitée
4.3.1. Les indices de la surface terrière
La surface terrière des espèces
commercialisables en forêt non perturbée est plus importante
comparée à celle de la forêt exploitée. On a en
effet 217391,68 cm2 contre 168107,095 cm2. Cette
différence est le fait de la forte densité des essences à
bois précieux et de l'importance des individus de gros diamètre
en forêt mâture. La faiblesse de la surface terrière en
parcelle exploitée peut être attribuée au
prélèvement de 3 gros individus par l'exploitation
sélective mais aussi à la destruction de certains individus lors
des manoeuvres des engins pendant le débardage. De nombreux individus
ont été détruits pendant la création des pistes et
leur absence affecte la surface terrière de la parcelle soumise à
l'exploitation forestière.
La répartition de l'ensemble des individus ligneux
répertoriés sur les deux sites signalait la domination de la
parcelle non exploitée en terme de densité dans la classe de
diamètre 5-10. La prise en compte des seules espèces
commerciales établit actuellement la forte domination de la
parcelle exploitée (191 individus) sur celle non
exploitée (154 individus) dans cette même classe de
diamètre que l'on considère comme la classe rassemblant les
individus de la régénération naturelle c'est-à-dire
les individus qui pourront à terme contribuer au renouvellement de la
forêt (Figure 25). La régénération des
espèces commerciales est donc stimulée par l'exploitation
forestière. Ces essences sont pour la plupart héliophiles
et profitent ainsi des changements induits par l'ouverture de la canopée
pour se développer. En ceci, l'exploitation forestière
sélective constitue une chance d'épanouissement pour les essences
commerciales qui s'adaptent un peu plus que les autres aux modifications des
conditions du milieu. C'est surtout le cas de Staudtia
kamerunensis.
Deux des plus gros arbres encore présents en
forêt exploitée sont certainement restés parce que leur
abattage est interdit. Il s'agit de Ricinodendron heudelottii
(Djanssan), arbre dont les fruits servent d'assaisonnement pour les populations
locales et d'Irvingia gabonense (mangue sauvage) dont les fruits
servent également à l'alimentation des hommes.
Stre (cm2
250000 200000 150000
|
|
|
|
|
|
Stre (cm2
|
100000 50000 0
|
|
|
|
Forêt mature Forêt exploitée
|
|
|
|
Figure 24 : La variation des surfaces terrières
des espèces commerciales sur les deux sites
4.3.2. Les indices des classes de diamètres
faible diamètre (dbh >20 cm), soit 80 % de
l'ensemble de la population. Pour les 20 % qui restent (233 individus), seuls
32 ont un diamètre important (dbh > 80 cm). Et, compte tenu des
diamètres minima d'exploitabilité et de la protection dont
bénéficient certaines espèces, les arbres exploitables
constituent un effectif réel de moins de 8 arbres.
En revanche, dans la forêt exploitée, les
classes de diamètres des essences commerciales (Tableau 17) attestent
que si le temps de repos observé est suffisamment long, les individus de
très grandes tailles (comme les émergents) se mettront en place
à moyen et long termes. En effet, dans la parcelle exploitée les
3 individus parmi ceux qui sont déjà exploitables appartiennent
à des espèces dont la coupe est soumise à conditions
(Ricinodendron heudelottii, Desbordesia glaucescens, Gambeya
africana). Mais on compte dans cette parcelle exploitée 19
individus dans la tranche des 50-80 cm de diamètre, ce qui se rapproche
des diamètres minima d'exploitabilité. Bien entendu, tous les
individus n'ont pas la côte du marché, mais quelques essences dans
cette fourchette en ont (Celtis zenkeri, Lophira alata, Petersianthus
macrocarpa, etc). Dans un avenir proche, ces essences auront atteint des
dimensions requises pour l'exploitation. Comme seuls les individus de
très grande taille ont été coupés, la parcelle
pourrait être soumise à nouveau à l'exploitation
sélective dans environ 20 ans en moyenne. Il faut cependant qu'aucune
intervention de grande ampleur (cultures vivrières, coupe d'arbres par
des scieurs clandestins) n'y soit opérée durant ce temps de
repos. D'après ce constat, la coupe sélective d'arbres
pratiquée sur le site de Faékélé peut ainsi
être qualifiée d'exploitation « durable ».
Tableau 17 : Répartition des classes de
diamètre des espèces commerciales
Diamètres
|
Parcelle exploitée
|
Parcelle non exploitée
|
5 10
|
191
|
154
|
11 20
|
117
|
161
|
21 30
|
45
|
54
|
31 40
|
15
|
24
|
41 50
|
14
|
13
|
51 60
|
10
|
6
|
61 70
|
7
|
3
|
71 80
|
1
|
2
|
81 90
|
1
|
4
|
91 100]
|
1
|
2
|
> 100
|
1
|
3
|
Total
|
403
|
426
|
|
Sources : Relevés de terrain
5
|
11
|
21
|
31
|
41
|
51
|
61
|
71
|
81
|
91
|
>
|
10]
|
20]
|
30]
|
40]
|
50]
|
60]
|
70]
|
80]
|
90]
|
100]
|
100
|
|
Nbre d'individus
250
200
150
100
50
0
Classes de diamètre
Parcelle exploitée Parcelle non exploitée
Figure 25 : La distribution des classes de
diamètres des essences commerciales
La comparaison des sites sur la base de la figure 25 et du
tableau 17 montre tout de même qu'on retrouve un plus grand nombre
d'individus de gros diamètre (Dbh = 80 cm) dans la forêt non
exploitée, soit 11 individus contre 4 pour la forêt
exploitée. On peut également remarquer que l'exploitation
forestière n'a pas fondamentalement affecté la
végétation du site exploité. La forêt
exploitée présente encore tout de même 20 individus ayant
dépassé le DME et pouvant par conséquent
déjà être exploités. Ces individus appartiennent
à 14 espèces. A ce niveau, il existe une similitude avec la
parcelle non exploitée, du moins en ce qui concerne le nombre
d'individus exploitables car ici, on compte également 20 individus ayant
atteint le DME (Tableau 20). Cependant, les plus gros arbres se retrouvent
proportionnellement en forêt non exploitée ; celleci
présente un volume en bois plus significatif, soit 13,6 m2 de
surface terrière des arbres de dbh = 50 cm contre 8,5 m2 pour
la forêt exploitée (Tableau 22).
Tableau 18 : Les individus de diamètre (dbh) =
50 cm dans la parcelle exploitée
No
|
Espèces
|
Circonférence
|
Diamètre
|
Str (cm2)
|
1
|
Ricinodendron heudelotii
|
340
|
108,28
|
9203,82
|
2
|
Desbordesia glaucescens
|
314
|
100
|
7850
|
3
|
Gambeya africana
|
293
|
93,31
|
6835,11
|
4
|
Musanga cecropioides
|
247
|
78,66
|
4857,40
|
5
|
Xylopia aethiopica
|
220
|
70,06
|
3853,50
|
6
|
Duboscia macrocarpa
|
220
|
70,06
|
3853,50
|
7
|
Lannea welwitschii
|
213
|
67,83
|
3612,18
|
8
|
Distemonanthus benthamianus
|
210
|
66,87
|
3511,14
|
9
|
Lophira alata
|
209
|
66,56
|
3477,78
|
10
|
Irvinguia gabunensis
|
204
|
64,96
|
3313,37
|
11
|
Uapaca guineensis
|
201
|
64,01
|
3216,64
|
12
|
Uapaca guineensis
|
201
|
64,01
|
3216,64
|
13
|
Lophira alata
|
200
|
63,69
|
3184,71
|
14
|
Duboscia macrpcarpa
|
200
|
63,69
|
3184,71
|
15
|
Desbordesia glaucescens
|
188
|
59,87
|
2814,01
|
16
|
Celtis adolfi-friderici
|
184
|
58,59
|
2695,54
|
17
|
Bosqueia angolense
|
176
|
56,05
|
2466,24
|
18
|
Coelocaryon preussii
|
175
|
55,73
|
2438,29
|
19
|
Petersianthus macrocarpus
|
175
|
55,73
|
2438,29
|
20
|
Pteleopsis hylodendron
|
175
|
55,73
|
2438,29
|
21
|
Pteleopsis hylodendron
|
175
|
55,73
|
2438,29
|
22
|
Aningeria altissima
|
172
|
54,77
|
2355,41
|
23
|
Desbordesia glaucescens
|
171
|
54,45
|
2328,10
|
|
Total surface terrière
|
|
|
85583,0414
|
|
Sources : Relevés de
terrain
Tableau 19 : Les individus de diamètre (dbh) =
50 cm dans la parcelle non exploitée
No
|
Espèces
|
Circonférence
|
Diamètre
|
Str (cm2)
|
1
|
Erythrophleum ivorense
|
375
|
119,43
|
11196,86
|
2
|
Lophira alata
|
364
|
115,92
|
10548,39
|
3
|
Desbordesia glaucescens
|
326
|
103,82
|
8461,19
|
4
|
Petersianthus macrocarpus
|
312
|
99,36
|
7749,84
|
5
|
Ricinodendron heudelotii
|
310
|
98,73
|
7651,87
|
6
|
Coula edulis
|
282
|
89,81
|
6331,68
|
7
|
Celtis zenkeri
|
280
|
89,17
|
6241,76
|
8
|
Bosqueia angolensis
|
278
|
88,54
|
6153,87
|
9
|
Triplochiton scleroxylon
|
273
|
86,94
|
5933,47
|
10
|
Petersianthus macrocarpus
|
265
|
84,39
|
5590,51
|
11
|
Alstonia boonei
|
252
|
80,25
|
5055,44
|
12
|
Pycnanthus angolensis
|
252
|
80,25
|
5055,44
|
13
|
Pteleopsis hylodendron
|
247
|
78,66
|
4857,10
|
14
|
Petersianthus macrocarpus
|
212
|
67,52
|
3578,77
|
15
|
Celtis tessmannii
|
199
|
63,38
|
3153,36
|
16
|
Pteleopsis hylodendron
|
192
|
61,15
|
2935,36
|
17
|
Khaya ivorensis
|
191
|
60,83
|
2904,72
|
18
|
Celtis zenkeri
|
190
|
60,51
|
2874,24
|
19
|
Bosqueia angolense
|
188
|
59,87
|
2813,76
|
20
|
Pterocarpus mildbraedii
|
182
|
57,96
|
2637,09
|
21
|
Fernandoa fernandini
|
177
|
56,37
|
2494,39
|
22
|
Petersianthus macrocarpus
|
177
|
56,37
|
2494,39
|
23
|
Petersianthus macrocarpus
|
175
|
55,73
|
2438,07
|
24
|
Fernandoa adolfi-friderici
|
172
|
54,78
|
2355,66
|
25
|
Fernandoa adolfi-friderici
|
172
|
54,78
|
2355,66
|
26
|
Sterculia rhinopetala
|
162
|
51,59
|
2089,29
|
27
|
Musanga cecropioides
|
161
|
51,27
|
2063,46
|
28
|
Petersianthus macrocarpus
|
160
|
50,96
|
2038,58
|
29
|
Petersianthus macrocarpus
|
160
|
50,96
|
2038,58
|
30
|
Homalium letestui
|
160
|
50,96
|
2038,58
|
31
|
Petersianthus macrocarpus
|
160
|
50,96
|
2038,58
|
|
Total surface terrière
|
|
|
136170,13
|
|
Tableau 20 : Les essences exploitables dans la parcelle
exploitée (dbh = DME1)
.
No
|
Espèce
|
Dbh (cm)
|
DME (cm)
|
Côte
|
1
|
Desbordesia glaucescens
|
51,59
|
50
|
***
|
2
|
Desbordesia glaucescens
|
54,46
|
50
|
***
|
3
|
Pentaclethra macrophylla
|
54,78
|
50
|
*
|
4
|
Coelocaryon preussii
|
55,73
|
50
|
*
|
5
|
Petersianthus macrocarpus
|
55,73
|
50
|
*
|
6
|
Pteleopsis hylodendron
|
55,73
|
50
|
*
|
7
|
Pteleopsis hylodendron
|
55,73
|
50
|
*
|
8
|
Celtis adolfi-friderici
|
58,6
|
50
|
*
|
9
|
Desbordesia glaucescens
|
59,87
|
50
|
*
|
10
|
Duboscia macrocarpa
|
63,69
|
50
|
***
|
11
|
Lophira alata
|
63,69
|
60
|
***
|
12
|
Irvingia gabonensis
|
64,97
|
50
|
*
|
13
|
Lophira alata
|
66,56
|
60
|
*
|
14
|
Distemonanthus benthamianus
|
66,88
|
60
|
***
|
15
|
Lannea welwitschii
|
67,83
|
50
|
*
|
16
|
Duboscia macrocarpa
|
70,06
|
50
|
*
|
17
|
Celtis zenkeri
|
77,07
|
50
|
*
|
18
|
Gambeya africana
|
93,31
|
60
|
*
|
19
|
Desbordesia glaucescens
|
100
|
50
|
***
|
20
|
Ricinodendron heudelotii
|
108,28
|
50
|
Protégé
|
|
Sources : Relevés de
terrain
Tableau 21 : Les essences exploitables dans la parcelle
non exploitée (dbh = DME)
No
|
Espèces
|
Dbh (cm)
|
DME (cm)
|
Côte des espèces
|
1
|
Petersianthus macrocarpus
|
50,96
|
50
|
***
|
2
|
Petersianthus macrocarpus
|
50,96
|
50
|
***
|
3
|
Petersianthus macrocarpus
|
50,96
|
50
|
***
|
4
|
Petersianthus macrocarpus
|
55,73
|
50
|
***
|
5
|
Petersianthus macrocarpus
|
56,37
|
50
|
***
|
6
|
Celtis zenkeri
|
60,51
|
50
|
*
|
7
|
Pteleopsis hylodendron
|
61,15
|
50
|
*
|
8
|
Celtis tessmannii
|
63,38
|
50
|
*
|
9
|
Petersianthus macrocarpus
|
67,52
|
50
|
***
|
10
|
Pteleopsis hylodendron
|
78,66
|
50
|
*
|
11
|
Pycnanthus angolensis
|
80,25
|
60
|
***
|
12
|
Petersianthus macrocarpus
|
84,39
|
50
|
***
|
13
|
Triplochiton scleroxylon
|
86,94
|
80
|
****
|
14
|
Celtis zenkeri
|
89,17
|
50
|
*
|
15
|
Coula edulis
|
89,81
|
50
|
*
|
16
|
Ricinodendron heudelotii
|
98,73
|
50
|
Protégée
|
17
|
Petersianthus macrocarpus
|
99,36
|
50
|
*
|
18
|
Desbordesia glaucescens
|
103,82
|
50
|
***
|
19
|
Lophira alata
|
115,92
|
60
|
***
|
20
|
Erythrophleum ivorense
|
119,43
|
50
|
***
|
|
Sources : Relevé de terrain
Petersianthus macrocarpus qui a le plus grand nombre
d'individus à dbh supérieur au DME en forêt non
exploitée est une espèce zoochore, tout comme Triplochiton
scleroxylon d'oül'importance de la faune dans l'entretien
et la reconstitution du capital forestier en essences commerciales.
Tableau 22 : Valeur en densité et en volume de
bois dans les deux parcelles
Station Nombre d'individu Total surface
terrière
dbh > 50 cm (m2)
Forêt mature 31 13,61
Forêt exploitée 23 8,55
Conclusion
La forêt est une ressource renouvellable à court
et moyen termes si les prélèvements d'arbres ne sont pas abusifs.
Dans le cas de notre parcelle d'expérimentation, le respect des normes
de coupe semble avoir été effecftif puisque sur un 1 hectare,
seul 3 arbres de gros diamètres ont été abattus. 7 ans
après, la composition floristique est comparable à celle de la
forêt mature. La biodiversité de la flore n'a pas souffert des
prélèvements d'arbres 7 ans après l'exploitation. Sur le
plan de la structure, l'avantage de la sélection en fonction de la
demande du marché et du respect des normes est qu'au moins une partie de
la population ligneuse, celle qui ne correspond pas aux besoins actuels du
marché, est épargnée. Cependant, les médias et
certains scientifiques pensent qu'on peut reprocher à cette pratique la
surexploitation d'un nombre limité d'essences. Certaines espèces
de forêts tropicales humides sont trop exploitées et leur
dynamique naturelle ne leur permet pas de reconstituer leur stock, du fait de
cycles de rotation d'exploitation de plus en plus courts.
Il n'en demeure pas moins vrai que les perspectives peuvent
être optimistes quant à la survie et la conservation de la
biodiversité des forêts tropicales si les normes d'exploitation et
le cahier de charge sont respectés. En effet, lorsque le cahier de
charge est respecté, la forêt ne subit que des dégâts
passagers qui sont à mesure de se résorber. Les clairières
artificielles créées par l'homme finissent par se cicatriser,
même si le processus prend plus de temps que les chablis du fait de leurs
tailles et de l'intensité de la perturbation subie à la fois au
sol et au sein de la population qui entoure les arbres abattus.
CONCLUSION GENERALE
Le grand bloc forestier sud-camerounais recèle une
importante biodiversité qui justifie autant les intérêts
économiques que l'attention de la communauté scientifique
internationale. Si l'exploitation industrielle de la forêt permet une
rentrée considérable de devises au plan national, en même
temps, elle favorise une recomposition de la biodiversité floristique.
Le prélèvement des essences forestières et les
aménagements de pistes et autres parcs à bois contribuent
à un éclaircissement parfois poussé du couvert. A priori,
une contradiction apparaît entre les objectifs économiques et la
nécessité de préserver l'environnement. Comment exploiter
la forêt sans la détruire ou la dégrader de façon
irréversible? C'est en ces termes que se posent les problèmes
liés à l'exploitation industrielle des forêts dans les pays
pauvres en ces temps où la protection de la forêt loin
d'être un luxe est devenue un enjeu économique. La recherche d'une
réponse à cette question nous a emmené à envisager
l'étude de l'évolution de la forêt au lendemain de
l'exploitation au Sud Cameroun conscient que la connaissance de cette
évolution peut permettre de mieux orienter et planifier son
exploitation. Ainsi nous avons mené l'étude de la dynamique
forestière post-exploitation industrielle avec pour ambition non
seulement d'évaluer l'impact de l'exploitation forestière sur la
végétation mais aussi d'étudier l'évolution de la
structure et de la dynamique des peuplements forestiers après
exploitation, pour en déduire des règles de gestion durable de
ces écosystèmes forestiers. Il a fallu choisir une parcelle
exploitée il y a 7 ans et une parcelle restée « intacte
» qui a servi de placette témoin ou de site de
référence pour les comparaisons.
Tout au long de cette étude, nous avons essayé
de répondre à la question de savoir quels sont les effets du
prélèvement des ressources ligneuses sur l'évolution de la
forêt? Quelles sont les caractéristiques aux plans floristique et
physionomique au lendemain de l'exploitation forestière? Ce
questionnement nous a conduit à formuler les hypothèses suivantes
:
· l'exploitation industrielle de l'écosystème
forestier entraîne un éclaircissement et une réduction de
la surface terrière et du volume en bois.
· les prélèvements d'arbres conduisent
à une recomposition de la biodiversité floristique et à la
raréfaction des individus de gros diamètre.
Au plan méthodologique, l'analyse synchrone
basée sur des relevés floristiques d'une parcelle "vierge" d'un
hectare et d'une autre de même dimension exploitée en 2002 a
été privilégiée. Sur le terrain, la collecte des
données s'est appuyée sur la mesure des paramètres de la
structure spatiale (densité, Dbh, surface terrière) et des
données de la biodiversité (richesse et diversité
spécifiques, abondance, IVI...). Sur l'ensemble des
deux placettes, 2123 arbres de dbh supérieur à 5 cm ont
été recensés dont 990 sur la parcelle exploitée et
1133 sur la parcelle non exploitée. Les observations croisées de
ces différents paramètres ont permis d'établir les
constats suivants :
· Les impacts structurels post-exploitation
industrielle : l'étude révèle que l'exploitation
forestière sélective ne modifie que très
légèrement la structure de la parcelle exploitée. Les
valeurs obtenues à partir de la mesure des paramètres de la
structure spatiale sont dans l'ensemble à l'avantage de la forêt
non exploitée, même si la différence avec la parcelle
exploitée est parfois peu sensible. Ainsi, avec 1133 individus contre
990, la plus forte densité caractérise la forêt
mâture. De plus, la surface terrière est de 28,33 m2
dans la forêt exploitée contre 36,38 m2 pour la
parcelle non exploitée. Le recouvrement des couronnes est presque
discontinu en forêt exploitée, alors qu'il est très peu
perforé par les chablis dans la forêt mature. Le taux de
recouvrement des couronnes des individus varie entre 80 et 150 % dans la
placette non exploitée alors qu'il ne varie plus qu'entre 40 et 150 %
dans la parcelle exploitée. Autrement dit, en plus des chablis, la
parcelle exploitée est affectée par des trouées
artificielles occasionnées par les coupes d'arbres qui ont réduit
relativement le recouvrement des couronnes. Ceci conduit à une relative
fragmentation de cette parcelle du fait de l'exploitation du bois. Ces constats
faits sur la base des mesures de terrain nous permettent de valider notre
hypothèse de départ selon laquelle l'exploitation industrielle de
l'écosystème forestier entraîne un éclaircissement
et une réduction de la surface terrière.
· Les impacts floristiques post-exploitation
industrielle contredisent une opinion couramment répandue qui
considère que l'exploitation forestière est à l'origine de
la perte de la biodiversité. Après vérification de cette
hypothèse on constate que d'un site à l'autre, il n'existe pas de
grande différence en ce qui concerne la composition spécifique. A
quelques rares exceptions, les différentes familles se retrouvent sur
l'une et l'autre parcelle, certes en proportion variable. Il en est de
même des genres et des espèces. On compte 121 genres sur la
parcelle exploitée contre 122 sur la parcelle non exploitée. Au
plan spécifique, l'équilibre persiste car la parcelle
exploitée compte 165 espèces contre 161 pour la parcelle qui est
restée relativement intacte et que nous avons considéré
comme site de référence. A ce niveau on peut conclure que
l'exploitation forestière sélective ne modifie pas
fondamentalement la composition floristique d'un peuplement forestier. Il
existe une base floristique commune à l'ensemble des deux parcelles.
· Les impacts sur l'abondance et la dominance
des individus et des espèces : dans l'ensemble, les indices de
similitude attestent d'une grande ressemblance entre les deux parcelles.
Lorsqu'on combine les critères abondance (nombre d'individus) et
dominance (taille des individus), ce sont des espèces appartenant aux
familles des Ulmaceae (Celtis spp) et des Sterculiaceae (Sterculia
spp, Cola spp) qui sont les plus importantes. Il en est de même des
familles secondaires qui sont les mêmes dans les deux parcelles
(Apocynaceae, Euphorbiaceae, Sapindaceae). Toutefois, les Violaceae
(Rinorea spp) et les Ebenaceae (Diospyros spp) sont plus
représentées en forêt mature qu'en forêt
exploitée. Par contre, la forêt exploitée a la
particularité d'une forte présence des Cecropiacea ou Moraceae
(Musanga cecropioides, Myrianthus arboreus) moins
représentées en forêt mature. On note aussi des
différences liées par exemple à la densité des
catégories d'individus. La forêt exploitée comporte 51,1 %
d'individus de diamètre compris entre 5 et 10 cm pour 47,4 % dans la
forêt mature. A l'opposé, on dénombre 28 grands individus
(Dbh = 50 cm) dans la forêt exploitée contre 32 dans la
forêt non exploitée. De plus, l'exploitation forestière
semble stimuler le développement de certaines monocotylédones
comme les Marantaceae et les Zingiberaceae et aussi de certaines espèces
commerciales.
Notre deuxième hypothèse n'est que partiellement
vérifiée car l'étude établit que l'exploitation
industrielle sélective ne modifie pas très sensiblement la
composition de la forêt, à moyen terme, d'une part, mais conduit
tout de même à la raréfaction des individus de gros
diamètre d'autre part. Pour le cas particulier des espèces
à bois précieux, les deux parcelles partagent les mêmes
caractéristiques en terme de biodiversité mais pas en taille. De
plus, la parcelle exploitée a mis en évidence des espèces
ayant un rôle important dans les successions forestières. Les
connaissances sur le fonctionnement naturel des forêts et de leur
reconstitution après dégradations sont essentielles car elles
constituent les bases scientifiques permettant de proposer des méthodes
sylvicoles de réhabilitation de zones dégradées. Elles
permettent également aux acteurs impliqués dans l'exploitation de
la forêt d'agir en connaissance de cause pour planifier le rythme des
rotations d'exploitation et éviter une dégradation
irréversible de la forêt.
Au bilan, la dynamique forestière 7 ans
après exploitation se traduit par le développement des
herbacées appartenant à la famille des Zingiberaceae et des
Marantaceae, le développement des jeunes arbres et arbustes de la classe
de 5-10 cm qui assurent la régénération forestière
et la multiplication de certaines espèces héliophiles tels que
Musanga cecropioides, Macaranga sp.
Cette étude aurait pu être encore plus
intéressante si elle avait associé la méthode diachronique
à la méthode synchronique en prenant par exemple appui sur des
photographies aériennes prises sur la période d'étude
considérée, mais aussi si elle s'était faite sur une
chronoséquence plus longue, en prenant par exemple d'autres parcelles de
forêt post-exploitation de 15, 25 et 40 ans. L'épaisseur de temps
ainsi considérée nous aurait permis de mieux apprécier
l'évolution de la réaction de la forêt à
l'exploitation sélective. Mais, compte tenu du temps relativement court
imparti à notre étude et de la modicité des moyens
à consacrer à des relevés de grande ampleur, nous nous
sommes limités à l'étude d'une seule parcelle 7 ans
après son exploitation. Les éléments de la dynamique
constatée dans ce cas ne seront pas forcément les mêmes que
ceux qu'on pourra observer sur une parcelle 40 ans après son
exploitation. La dynamique de la forêt sera déjà rendue
à une autre phase de son évolution. Il serait donc souhaitable de
compléter ce travail par une étude couvrant des parcelles
exploitées plus âgées.
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