UNIVERSITE DE LIMOGES
FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE
LIMOGES
PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE
(AUF)
MASTER DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE
L'ENVIRONNEMENT
Formation à distance, Campus Numérique
« ENVIDROIT »
LA NORME CONVENTIONNELLE EN DROIT INTERNATIONAL DE
L'ENVIRONNEMENT : L'EXEMPLE DE LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
Mémoire présenté par Aviol
FLEURANT,
Sous la Direction de M. le Professeur Aenza
KONATE
AOUT / 2009
UNIVERSITE DE LIMOGES
FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE LIMOGES
PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)
MASTER DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE L'ENVIRONNEMENT
Formation à distance, Campus Numérique
« ENVIDROIT »
LA NORME CONVENTIONNELLE EN DROIT INTERNATIONAL DE
L'ENVIRONNEMENT : L'EXEMPLE DE LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
Mémoire présenté par Aviol FLEURANT,
Sous la Direction de M. le Professeur Aenza KONATE
AOUT / 2009
SOMMAIRE
4 INTRODUCTION
9 Première Partie : ASSISES DE LA NORME
RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
10 CHAPITRE I : PRINCIPES APPLICABLES A LA
BIODIVERSITE
10 Section 1 : Approches fondatrices du droit
international de la biodiversité
18 Section 2 : La structuration du droit de la
biodiversité, les principes généraux
24 CHAPITRE II: UN CADRE NORMATIF HETEROGENE ASSORTI
D'OBLIGATIONS MOLLES, GENERALES ET PEU CONTRAIGNANTES
24 Section 1 : Les Instruments de conservation des
ressources de la biosphère et de protection de la nature
34 Section 2 : La Convention sur la Diversité
Biologique
44 2ème PARTIE : CONSOLIDATION
DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
45 CHAPITRE I : FONDEMENTS DU RENFORCEMENT DE LA
NORME
45 Section 1 : Nécessité d'une norme
régulatrice efficace
53 Section 2 : Les avantages de l'affermissement de la
norme
58 CHAPITRE II : VERS UN REGIME JURIDIQUE,
INSTITUTIONNEL ET FINANCIER EFFICACE
58 Section 1 : Renforcement du régime juridique
et juridictionnel existant
65 Section 2 : Renforcement des mécanismes
institutionnels et financiers
INTRODUCTION
L'érosion de la biodiversité s'inscrit, selon
la doctrine, «dans l'histoire de l'évolution de la
biosphère»1(*). Elle s'explique notamment par les
phénomènes de dégradation des sols, de transformation des
paysages, de fragmentation des habitats, de disparition des espèces, par
l'industrialisation, l'exploitation sans frein des mines et carrières,
les pollutions, le réchauffement climatique et autres processus
affectant l'environnement. Il est rapporté qu'avant la naissance de
l'homo sapiens l'humanité a connu cinq vagues d'extinction
importante des espèces2(*). Aussi, avec l'apparition de celui-ci le sort de la
diversité biologique s'est-il aggravé puisque les
activités du fait de l'homme coïncidant avec l'essor de la
science, de la technologie et du commerce, ont censé compromettre
le droit des générations futures à un environnement de
qualité.
La prise en compte de l'environnement dans les politiques
économiques n'a pas semblé constituer une
préoccupation pour l'humanité. Traitant de l'époque
préindustrielle, J. DORST a relaté que poursuivant la
satisfaction de leurs besoins primaires les sociétés ont
profondément bouleversé les milieux naturels entrainant
l'assèchement des zones humides, le déboisement massif, la
raréfaction de nombreuses espèces d'animaux sauvages3(*). En revanche, ces dommages
ont un tant soit peu suscité une prise de conscience puisque se sont
éclos les premiers rayons du droit de la nature avec la parution des
premières conventions. Néanmoins, ce droit, pris dans l'engrenage
d'un anthropocentrisme attenant au droit et à la liberté de
détruire, a prôné le dogme cartésien de
l'homme maitre et possesseur de la nature4(*).
L'ère industrielle aura été encore moins
indulgente envers la biodiversité. Car, si l'essor de la science a
favorisé l'intensification de la production, ces progrès ont
pourtant occasionné une transformation non rationnelle de la nature.
Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité,
écrit Sadeleer, les rapports entre les sociétés
humaines et le monde naturel allaient connaitre une rupture
complète5(*).
Les déprédations commises au nom du progrès furent telles
que les Etats durent se doter de normes de protection. Ainsi, des règles
vinrent à organiser la pêche, à protéger les phoques
à fourrure6(*), les
oiseaux utiles7(*), à
réglementer la chasse à baleine8(*). Mais, ces normes n'ont pas su assurer une protection
efficace des espèces de la faune sauvage.
Elles ne sauraient aucunement constituer un cadre de
protection efficace des espèces puisqu'elles recèlent une
finalité plus économique qu'écologique et sont
coulées dans une approche utilitariste. Elles n'ont visé à
protéger les espèces que dans la mesure où ces
dernières ont pu faire le bien-être de l'homme. La nature n'a
eu tout au plus qu'une valeur instrumentale ou utilitaire au service de
l'homme9(*),
écrit un doctrinaire. Entretemps, la civilisation causa de graves
dommages à la biodiversité tandis que, pour sa part,
l'humanité édicta des normes en dehors de toutes éthiques
environnementales. Quel devrait-être donc le degré
d'efficacité de la norme avec l'anthropocentrisme et l'utilitarisme
à la base de l'instrument conventionnel ?
On a connu dans le temps une norme de protection très
faible. Face à ce problème d'importance un mouvement d'opinion,
sous l'impulsion de l'UICN, s'est développé en faveur
d'une nouvelle politique de conservation de la nature. Celle-ci aura
cessé d'être ce réservoir de ressources pour l'individu et
ce cadre incontrôlé de la croissance économique. On aura
connu le passage d'une philosophie ``utilitariste'' à une approche
``conservationniste'' et ``d'une conception anthropocentrique de la
protection des ressources biologiques à une approche plus
écocentrique''10(*). Cette approche, reposant sur une éthique
bio-centrique, promeut la conservation des espèces en tant
qu'obligation de l'Etat. On aura assisté à l'adoption d'un
ensemble de règles sur la conservation de la biodiversité.
Néanmoins, véhiculant le concept d'une nature
«sanctuaire»11(*), ces normes furent tout aussi
limitées et insusceptibles d'efficacité.
La norme conventionnelle a, pour ainsi dire, souffert d'un
manque d'énergies. Il a fallu attendre 1970 pour voir émerger des
principes capables de l'alimenter. Ces principes ont été cette
fois fondés sur des approches intégrées où
conservation de la nature et développement économique sont
d'importance égale. Ainsi, pour préserver le patrimoine,
prévenir l'irréversible, garantir le droit des
générations futures à un environnement sain, il a
été établi des normes morales de comportement envers la
nature. Autant de principes - prônés par Stockholm, Rio,
Action 21, l'UICN - qui s'inscrivent dans la logique du
développement durable. Cependant, ils relèvent d'actes
concertés non conventionnels12(*) et ne sont que pure expression
de la soft Law. Cet état de fait n'a pour vertu que de rendre
incertain l'avenir de la diversité biologique.
Ce fut logiquement à cause de l'érosion
alarmante de la biodiversité et pour pallier la mollesse des principes
généraux que les Etats ont adopté les conventions
mondiales de protection de la nature, notamment celles de l'Unesco, de
Ramsar, de Bonn, la Cites. Pourtant, ces traités recèlent
une approche sectorielle tandis que le développement durable requiert
une approche plutôt globale. En revanche, ce fut pour combler
l'insuffisance du cadre juridique défini et pour restructurer ce
régime fragmenté en conventions sectorielles que la
société internationale a adopté la Convention sur la
Diversité Biologique. Toutefois, les attentes n'ont pas
été comblées, car tous ces instruments n'ont
constitué qu'un cadre normatif hétérogène, sans
articulation réelle, assorti d'obligations molles,
générales et peu contraignantes. D'où le
problème de l'effectivité du droit international de
l'environnement.
Le droit international de la Biodiversité tel que
conçu semble davantage relever de la prospective. Or, la
société internationale entend poursuivre concrètement les
objectifs de conservation et d'utilisation durable des ressources de la
biosphère. Comment atteindre ces objectifs si s'agissant des obligations
conventionnelles, les Etats ne sont tenus que dans la mesure du possible et
selon qu'il conviendra ? Comment donc enrayer la crise sans bornes de la
biodiversité si le régime juridique y relatif s'inscrit dans un
cadre programmatoire ?
Comment en outre s'assurer de la réalisation des
objectifs de conservation, d'utilisation durable de la biodiversité si,
en cas de conflit normatif, la norme régulatrice est
généralement évincée par des règles
transversales, notamment celles régissant le commerce international et
la propriété intellectuelle ? Comment finalement s'assurer
de la mise en oeuvre de la norme conventionnelle si le réseau
institutionnel tel que conçu est complexe et les mécanismes
financiers lourds et inefficients ?
Ces considérations conduisent au constat d'un cadre
normatif insuffisant, d'un régime institutionnel dense, de
mécanismes financiers déficients, en conséquence, au
constat du faible degré de normativité des principes
régissant le droit international de la biodiversité. Cela
explique la pertinence de notre thème de recherche, son importance
considérable en ce carrefour crucial du droit international
général où nombre de normes se croisent,
s'épaulent, s'affrontent et se broient. Nous allons démontrer en
quoi le fait de l'inefficacité et l'ineffectivité de la norme
conventionnelle pourra causer des dommages graves, voire irréversibles,
à la biodiversité. C'est justement pour démêler
l'écheveau d'une telle problématique que nous avons conçu,
élaboré ce travail. D'où le titre de notre
mémoire : « La norme conventionnelle en Droit
international de l'environnement : l'exemple de la diversité
biologique ».
Nos hypothèses sont les suivantes :
1) La refonte du cadre juridique, le renforcement des
mécanismes institutionnels et la redéfinition de l'assistance
financière aux pays en développement permettront la mise en
oeuvre réelle de la norme relative à la biodiversité.
2) L'effectivité de la norme conventionnelle impliquera
une conservation réelle et une utilisation durable de la
biodiversité et de ses éléments.
Ce mémoire obéit à un plan en deux
parties. Celles-ci comprennent respectivement deux chapitres. Chaque chapitre
est divisé en deux sections et ces dernières subdivisées
en sous-sections.
La première partie s'inscrit dans un cadre à la
fois analytique et critique. Nous traiterons des assises de la norme relative
à la diversité biologique. Dans le premier chapitre, nous
présenterons les approches fondatrices et les principes
généraux qui structurent le droit de la biodiversité. Il
sera question pour nous dans le second chapitre d'analyser les instruments de
conservation des ressources de la biosphère et de protection de la
nature. La Convention sur la Diversité Biologique sera analysée
dans tous ses aspects. Nous présenterons le tableau d'un cadre normatif
hétérogène, postulant des obligations molles,
générales et peu contraignantes, donc, insusceptibles de
permettre la réalisation des objectifs de conservation rationnelle et
d'utilisation durable de la diversité biologique.
La seconde se veut par contre constructive. Il va falloir
chercher à pallier les insuffisances du cadre normatif. Ainsi, nous
opterons pour la consolidation de la norme conventionnelle relative à la
matière. Au premier chapitre, nous évoquerons la
nécessité d'élaborer une norme régulatrice
efficace, un instrument fédérateur, une norme capable
d'harmoniser les règles éparses du droit international de la
biodiversité, une norme ayant valeur obligatoire, au caractère
sanctionnateur. Le second chapitre est celui de la mise en oeuvre de la norme.
Ce cadre repose sur l'adoption d'un régime juridique fort, l'institution
de mécanismes de recours, la restructuration du réseau
institutionnel et la redéfinition des mécanismes financiers.
Cela aura justifié nos hypothèses de
départ. En effet, il est plausible que l'institution d'un régime
juridique, institutionnel et financier efficace aura permis la mise en oeuvre
réelle de la norme. Aussi, l'effectivité de l'instrument
conventionnel aura-t-elle favorisé la conservation et l'utilisation
durable de la biodiversité.
1ère PARTIE : ASSISES DE LA NORME RELATIVE A
LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
La crise de la diversité biologique,
caractérisée entre autres par la surexploitation des ressources
de la biosphère, a suscité une prise de conscience au point que
les Etats ont conçu, élaboré puis adopté des
conventions internationales régissant la protection des espèces,
des écosystèmes, des paysages, en fait, relatives à la
conservation et à l'utilisation durable de la biodiversité. A
donc été créé un droit de la protection de la
nature dont les racines sont notamment ancrées dans le principe du
« développement durable ». Sur ce principe, entre
autres, repose un corpus juridique générateur de normes
susceptibles de freiner la perte de la biodiversité. A cette fin ont
été édictées des règles capables de pallier
la mollesse des prescrits déclaratoires. D'où, les
Conventions de RAMSAR et de l'UNESCO portant respectivement sur la
conservation des zones humides et la protection du patrimoine mondial,
culturel et naturel ; des normes fondées sur l'éthique
écocentrique définissant un régime juridique
articulé autour de la conservation des espèces migratrices de
la vie sauvage (Convention de Bonn), axé sur le commerce international
des espèces de la faune et de la flore sauvages menacées
d'extinction (CITES). Aussi, l'humanité a-t-elle
vu naitre la Convention sur la Diversité Biologique dont l'objet
s'articule autour de la conservation, l'utilisation durable, la gestion, la
restauration de la diversité et de ses éléments13(*). Ces instruments, outre
les Déclarations, les Résolutions, les Agendas et les Principes
qui les complètent, forment les assises du droit international de
la biodiversité.
Cette branche du droit international de l'environnement repose
néanmoins sur des approches et des principes qui lui sont propres
(Chapitre I). Aussi, s'agit-il d'un cadre normatif
hétérogène en ce que les instruments préexistant
présentent des difficultés d'agencement avec la Convention sur la
Diversité Biologique (Chapitre II).
CHAPITRE I : PRINCIPES APPLICABLES A LA
BIODIVERSITE
Le droit international de la biodiversité recèle
certaines approches dont l'appréciation ne parait totale que si l'on
remonte aux processus de négociations ayant entouré la
formulation de la Convention sur la Diversité biologique. Ces
négociations officialisaient un dialogue Nord-Sud autour de la
biodiversité, soit comme « patrimoine commun ou
préoccupation commune de l'humanité » ou comme relevant
exclusivement de la souveraineté des Etats. De la conciliation des
divergences naquit le principe des «responsabilités communes mais
différenciées ». Aussi, constatera-t-on
l'émergence de certaines approches de conservation (section 1) et la
résurgence de certains principes généraux incontournables
du droit international de l'environnement (section 2).
Section 1 : Approches fondatrices du droit
international de la biodiversité
Le concept « approches fondatrices »
diffère des « approches conceptuelles de la conservation
de la biodiversité14(*) ». Celles-ci renvoient aux mesures
adéquates de conservation suivant qu'il s'agit d'espèces,
d'écosystèmes, d'habitats, de paysages tandis que les
premières que nous qualifions de «fondatrices du droit
de la biodiversité» ont été les approches
dominantes à l'origine de la Convention sur la Diversité
Biologique. D'entrée de jeu nous verrons la biodiversité comme
« préoccupation commune de l'humanité ».
Cette approche, le verra-t-on, n'occultera pas celle relative à la
souveraineté des Etats sur leurs ressources mais préconise une
coopération entre Etats et un mode d'exploitation de la diversité
suivant une philosophie écocentrique où conservation de la nature
et développement économique sont d'importance égale.
A. Biodiversité, préoccupation commune
de l'humanité
Aux termes de la Convention sur la Diversité
Biologique, la biodiversité, est « une
préoccupation commune de l'humanité »15(*). Ceci s'inscrit
alors comme un principe applicable au droit international de la
biodiversité en ce sens que loin d'être du domaine exclusif et
réservé de l'Etat la biodiversité intéresse au plus
haut point la société internationale. D'ailleurs, faut-il se
rappeler qu'à l'origine l'esquisse de la Convention
élaborée avait stipulé que la diversité biologique
relevait du «patrimoine commun de
l'humanité»16(*). Ainsi, elle serait accessible à tous, y
compris les communautés scientifiques et industrielles,
indépendamment du lieu de sa situation17(*). Tout compte fait, cette approche dite
conservationniste prônée par les pays
développés se heurtera à l'opposition des pays en
développement qui y voient un obstacle à leur souveraineté
sur leurs ressources naturelles. D'où un enjeu majeur qui divisait
l'humanité en ce qui a trait à la conservation, l'utilisation, la
gestion, la restauration de la diversité et de ses
éléments.
B. Souveraineté étatique sur les
ressources naturelles
C'est au nom de ce principe - découlant d'une
approche utilitariste fondée pratiquement sur le droit
des peuples à disposer librement d'eux-mêmes - que la
communauté internationale, lors des négociations ayant
entouré la formulation de la Convention, a été contrainte
d'abandonner la notion de «Patrimoine commun de
l'humanité». En effet, selon ARBOUR et LAVALLEE,
« les pays du Sud n'ont pas voulu avec raison du concept de
patrimoine commun, lequel aurait garanti aux sociétés
privées un libre accès à leurs ressources pour qu'elles
puissent développer ensuite de nouvelles variétés
végétales qu'elles se seraient empressées de
protéger juridiquement par des brevets... »18(*). J. Rifkin a clairement
démontré les enjeux d'une absence de souveraineté de
l'Etat sur ses ressources naturelles en expliquant que cela permettrait aux
industries agroalimentaires, pharmaceutiques et pétrolières
d'accéder librement au patrimoine biologique d'un Etat donné,
d'isoler un gène et de le breveter19(*). Fort de ces balises, il est plausible que la
souveraineté étatique sur les ressources - expression du
droit à l'autodétermination - est tout à fait
spécifique au droit international de la biodiversité et ne
saurait souffrir de limitation que dans la mesure où l'exercice de ce
droit est susceptible de causer des dommages à la
diversité.
C. L'approche de coopération
Nord-Sud
Si la Convention sur la Diversité Biologique, aux
termes des articles 3 et 15, reconnait aux Etats des droits souverains sur
leurs ressources, il n'en demeure pas moins que les pays du Sud -
riches en ressources - ne disposent pas de moyens technologiques
pour exploiter, conserver et utiliser de manière durable ces ressources.
Ils doivent logiquement solliciter l'intervention du Nord
industrialisé dans ce domaine
«réservé» qui ne rime pas avec la notion de patrimoine
commun. Cet état de fait ouvre la voie à des négociations
entre pays en développement et pays développés autour de
l'utilisation durable de la biodiversité. A ce propos, ARBOUR et
LAVALLEE écrivent « dans la mesure où la
diversité biologique est plus riche dans les pays du Sud que dans les
pays du Nord, l'intérêt bien compris des pays en
développement est de faire financer par les pays riches les
surcoûts liés à la conservation de la biodiversité,
puis de tirer un avantage financier de l'exploitation effective de leurs
ressources génétiques ... »20(*). L'ensemble de ces
considérations nous amène à comprendre qu'il
s'opère en ce domaine, certainement sous un angle
mercantile, une coopération entre le Nord et le Sud autour de
l'organisation d'un marché des ressources génétiques.
Néanmoins, l'accès à ces ressources n'est permis aux pays
développés que dans la mesure où ils financent les
surcoûts que nécessite la conservation et dans la mesure où
ils facilitent le transfert des biotechnologies aux pays en
développement. D'où, le donnant-donnant entre le Nord et
le Sud21(*) que nous
qualifions ici d'approche de coopération pour l'exploitation et la
conservation de la biodiversité.
D. Responsabilités communes mais
différenciées
Le 15ème considérant du
préambule, combiné à l'article 20, établit sans
conteste que le principe de «responsabilités communes mais
différenciées» est l'un des fondements de la Convention sur
la Diversité Biologique. Toujours, cela s'inscrit-il dans le dialogue
Nord Sud en matière de conservation de la biodiversité en ce que
les obligations des pays en développement ne peuvent être celles
des pays développés. Les premiers doivent permettre
l'accès à leurs ressources génétiques. Les seconds
financent et font le transfert des biotechnologies. A ce propos, l'article 20
de la Convention sur la Biodiversité édicte « les
pays en développement ne pourront s'acquitter effectivement des
obligations qui leur incombent en vertu de la convention que dans la mesure
où les pays développés s'acquitteront des leurs s'agissant
du financement et de transfert de technologies »22(*)
Si en réalité les Etats ont pu définir
une stratégie de protection globale de la diversité biologique,
la « conservation » de celle-ci, le verrez-vous, aura
impliqué une pluralité d'approches suivant qu'il s'agit
d'espèces, d'écosystèmes et d'habitats, de paysages et
d'activités à risques pour la biodiversité.
E. Les approches de conservation
Du dispositif conventionnel ont émergé des
« approches de conservation ». Celles-ci semblent
justifier la nécessité de conserver la biodiversité dans
ses formes génétique, spécifique et
écosystémique. Néanmoins, malgré son statut
juridique, la conservation de la biodiversité parait s'inscrire dans un
cadre normatif non contraignant, du moins, programmatoire. D'abord, le droit de
la nature dont les prémices remontent à la convention de 1902
sur la protection des oiseaux utiles à l'agriculture s'inscrit
à l'origine dans un cadre économique bien plus
qu'écologique et a semblé dégager un objectif
utilitaire23(*). Ensuite,
les déclarations de Stockholm, de Rio, préconisant la
conservation de la biodiversité sont des instruments
déclaratoires sans force obligatoire. De plus, si la Convention sur la
Diversité Biologique est un instrument ayant valeur normative, il n'en
demeure pas moins que les Etats ne sont tenus que d'une obligation de
moyen. Enfin, le caractère coutumier d'un tel principe de
conservation en droit international de l'environnement est difficile à
prouver24(*). Ainsi,
s'avère-t-il plus sage de parler d'« approches » au
lieu de « principes » de conservation vu leur faible
degré de normativité.
De ces approches découle une pluralité
d'obligations : l'exploitation des ressources biologiques marines sans
compromettre leur viabilité, la lutte contre certains
phénomènes néfastes pour la biodiversité25(*). Ces approches
de conservation26(*), rappelons-le, diffèrent suivant
qu'il s'agit d'espèces, d'écosystèmes, de paysages.
1. L'approche par espèce
L'insertion de cette approche, notamment dans les
conventions relatives à la protection de la nature, aura permis
à la communauté internationale de contrer les politiques
utilitariste et anthropocentrique au nom desquelles l'homme,
exerçant un certain droit de détruire, privait la
planète d'espèces rares, migratrices ou vulnérables. Cette
approche préconise l'édiction de mesures adéquates
portant sur la conservation et la gestion durable des espèces à
partir de listes établies. Elle est d'une importance capitale
en ce qu'elle concourt à la protection de toute espèce
menacée et prévient efficacement son déclin, voire son
extinction définitive. De plus, la protection d'une espèce utile,
tels les animaux pollinisateurs, est susceptible de protéger
nombre d'écosystèmes. Ainsi, s'agit-il d'une approche
intégrée puisqu'elle implique la préservation d'habitats
dans lesquels des populations d'espèces vivent à l'état
naturel. Aussi, constitue-t-elle la toile de fond des stratégies
mondiales de la conservation de l'UICN. Néanmoins, l'approche par
espèce présente certaines limites. Car, outre la
difficulté de s'étendre à certains groupes
d'espèces dans le cadre d'une protection directe, elle semble ignorer
les exigences écologiques de certaines espèces. Elle ne sous-tend
à l'endroit des Etats, débiteurs de responsabilités en
matière de conservation de la biodiversité, qu'une
obligation de comportement : « Chaque partie contractante,
selon qu'il conviendra, adopte des mesures... »27(*) stipule l'article 9
de la Convention sur la Diversité Biologique. En fait, l'approche par
espèce n'a pas su intégrer un large dispositif conventionnel ou
un dispositif contraignant, ce qui peut compromettre l'efficacité de la
norme conventionnelle.
2. L'approche par écosystème et par
habitat
L'approche par écosystème et par habitat va
au-delà des stratégies sectorielles de conservation
privilégiant la création de sanctuaires. Elle
préconise une politique de conservation capable de sauvegarder les
processus écologiques et les écosystèmes, le maintien de
la biodiversité et l'utilisation durable des espèces et des
écosystèmes28(*). Aux termes de cette approche, la conservation et
l'utilisation durable des écosystèmes, telles les forêts,
sous-tend la conservation des espèces et des habitats qui y sont
inféodés. Elle établit avec netteté
l'interdépendance entre les parties d'un écosystème et
souligne avec force que l'affectation d'une composante du système peut
avoir des conséquences sur le système dans son ensemble. C'est
pourquoi le régime juridique qui la soutient inclut à la fois des
normes régissant la protection du patrimoine culturel et naturel, la
protection des zones humides d'importance internationale, la conservation des
habitats, la recherche scientifique et la chasse, le commerce international des
espèces menacées d'extinction, la conservation de la
biodiversité. Bref, coulée dans un moule conventionnel
relativement grand, l'approche par écosystème et par habitat
traduit la portée d'un consensus universel autour d'une approche
intégrée où conservation de la nature et
développement sont d'importance égale et fondamentale. En
revanche, sa valeur obligatoire demeure controversée puisque le
système conventionnel y afférent définit des engagements
plutôt souples.
3. L'approche par paysage
Les caractéristiques écologiques
associées aux formes visuelles du paysage sont susceptibles de jouer un
rôle prépondérant pour la conservation de la
biodiversité. Ainsi, en vertu de leurs richesses, les paysages
consolident-ils l'équilibre écologique de la Terre en demeurant
un patrimoine naturel et culturel à léguer aux
générations futures. Partant, cette approche conceptuelle de
conservation, admettant toute démarche préventive allant
d'études d'impact environnementales aux audits écologiques,
s'inscrit dans un cadre de protection des paysages en ce qu'elle favorise
la gestion des processus écologiques (migrations) et des
activités humaines (réseaux de transports) et en ce que
cette protection s'étend aux régions, aux assemblages
climatiquement homogènes de paysages29(*). L'approche par paysage intègre
respectivement les approches par espèce et par écosystème
dans l'optique d'une conservation et une utilisation durable de la
biodiversité dans tous ses aspects. Elle doit sa
juridicité notamment à la Convention de l'Unesco de 1972.
4. L'approche par processus affectant la
biodiversité
La conservation de la biodiversité serait un leurre si,
en plus de la protection des espèces, des écosystèmes et
des espaces, on ne cherchait pas à lutter contre les pollutions et
nuisances, la désertification, les changements climatiques et tout autre
processus anthropique affectant l'écologie. Cette approche
constitue le socle de la réglementation des phénomènes
affectant la biodiversité. Elle sous-tend le principe
d'intégration des préoccupations environnementales dans les
politiques de l'Etat.
L'intégration des approches de conservation dans une
seule stratégie renvoie au concept de « réseau
écologique ». Cette notion repose sur des théories
explicatives du comportement des espèces en milieu
fragmenté30(*).
Néanmoins, aussi utiles que ces approches puissent être à
la biodiversité, la protection de celle-ci ne peut gagner en
efficacité que par la prise en compte des mesures spécifiques de
conservation.
F. Les mesures spécifiques de conservation
Différentes des approches conceptuelles de
conservation, ces mesures spécifiques sont des obligations en
matière de conservation et d'utilisation durable de la
biodiversité. Elles sont qualifiées de
mesures in situ et ex situ
en ce qu'elles visent la conservation des éléments de la
biodiversité dans et en dehors
de leur milieu naturel.
1. Mesures de conservation in
situ
Il s'agit globalement d'une obligation de conservation des
éléments de la biodiversité dans leur milieu naturel.
Selon l'article 2 de la Convention sur la Diversité Biologique, ces
mesures de conservation s'étendent aux écosystèmes, aux
habitats naturels. Elles visent la reconstitution de populations viables
d'espèces dans leur milieu naturel et, s'agissant des espèces
domestiquées ou cultivées, dans le milieu où se sont
développés leurs caractères distinctifs31(*). Elles incluent la remise en
état d'écosystèmes endommagés et facilitent la
reconstitution des espèces menacées grâce à la mise
en oeuvre de plans de gestion. Elles impliquent certaines stratégies de
conservation.
Les Stratégies de conservation in situ, telles
que définies par la Convention sur la Diversité Biologique,
reposent notamment sur le choix, la création, la gestion d'aires
protégées, d'une part, et sur l'adoption de mesures de
conservation en dehors de ces zones, d'autre part. Ainsi, les Etats sont-ils
conviés à concevoir, élaborer et mettre en oeuvre des
plans directeurs portant sur la création d'aires
protégées, appelées réserve naturelle,
arboretum, zone de protection spéciale, réserve
forestière, jardin zoologique.
De ces mesures de conservation découlent
d'autres obligations à l'égard des Etats. Il leur incombe le
devoir d'utiliser de manière durable les lieux limitrophes aux aires
protégées, de concevoir des normes juridiques appropriées
en vue d'une protection spéciale des espèces menacées. De
plus, ils ont la charge de la réglementation des activités
à risques affectant la biodiversité. En outre, ils sont tenus
d'un devoir de renseignement sur l'impact défavorable des
OGM avant leur éventuelle introduction sur le territoire d'un
Etat32(*). Enfin, ils
sont débiteurs d'une obligation de coopération dans l'optique
d'un support financier aux fins de conservation.
2. Mesures de conservation ex
situ
La conservation des ressources génétiques et des
espèces menacées d'extinction, bref, des éléments
de la biodiversité en dehors de leur milieu naturel, est l'axe
fondamental autour duquel s'articulent les mesures de conservation ex
situ. Elles impliquent, à des fins de reproduction, la
création de banques de gènes, de semences, de sperme, d'ovules.
Elles s'étendent aux assemblages de micro-organismes en culture ainsi
qu'aux espèces végétales et animales. Néanmoins,
selon Nicolas de Sadeleer et Charles-Hubert Born, les mesures de conservation
ex situ souffrent d'une limitation en ce qu'elles ne favorisent pas
la conservation des écosystèmes dans leur ensemble33(*). Dans cette optique, et pour
pallier cette insuffisance, le législateur conventionnel, aux termes de
l'article 9 b, c, d, assigne aux Etats l'obligation de procéder à
des installations ex situ, de prendre des mesures allant de la reconstitution,
de la régénération des espèces à leur
réintroduction dans leur milieu naturel, d'éviter - par faute
de gestion de la collecte des ressources dans les habitats naturels - que
soient exposés les écosystèmes et les groupes
d'espèces in situ34(*). Enfin, les Etats sont tenus de coopérer
pour l'allocation d'une aide financière dans le cadre de la mise en
oeuvre de ces mesures notamment dans les pays en développement.
Si certaines mesures - dont le maintien des populations
d'espèces à des niveaux correspondant à leurs exigences
écologiques - semblent générer des obligations de
résultat écologique, la norme qui les définit ne stipule
pourtant qu'une obligation de moyens. A ce propos, les articles 8 et 9 de la
Convention sur la Diversité Biologique portant sur les mesures in et
ex situ édictent : « Chaque partie contractante,
dans la mesure du possible (...) adopte des mesures... ». Ceci
nous amène à comprendre que la norme conventionnelle qui
sous-tend la conservation de la biodiversité est, depuis sa racine,
dénuée de valeur positive. Paradoxalement, les principes
applicables à la biodiversité sont l'essence de la norme relative
à la matière.
Section 2 : La structuration du droit de la
biodiversité, les Principes généraux
Le terme « principes
généraux » ne renvoie pas ici aux « principes
généraux de droit acceptés par les nations
civilisées » mais à certains « principes
directeurs » du droit international de l'environnement qui,
également, forment le cadre juridique du droit international de la
biodiversité. Ce sont en fait des principes qu'on qualifie de
fondamentaux « sans lesquels le droit international de
l'environnement serait sevré de sa dynamique évolutive
intrinsèque»35(*). Les Etats sont en effet tenus des obligations de
prévention du dommage transfrontière, de précaution pour
éviter l'irréversible lorsqu'à cheval sur l'incertitude et
l'innovation, l'humanité entrevoit les retombées de technologies
mal maitrisées. Ils doivent coopérer en vue d'une utilisation
rationnelle de la diversité, ce, selon une approche axée sur le
développement durable.
A. Le principe de prévention
Le principe de prévention implique la connaissance d'un
risque prévisible et certain et exige de la part des Etats la prise de
mesures capables d'empêcher la survenance d'atteintes graves, voire
irréversibles, à l'environnement. Il anticipe l'occurrence du
dommage à la diversité et se veut complémentaire à
tout dispositif curatif. Mieux vaut prévenir que guérir,
rappelle Agathe Van Lang, en ce que « la possibilité
d'une indemnisation parait bien dérisoire au regard de l'extinction
définitive des espèces, de la contamination des sols pour des
millénaires ou de l'assèchement total des mers intérieures
... »36(*).
Le principe de prévention sous-tend des
considérations particulières. Il traduit une limitation au droit
de l'Etat d'exploiter ses ressources selon sa politique d'environnement.
Celui-ci a le devoir de faire en sorte que les activités
exercées sur son territoire ou sous son contrôle ne causent pas de
dommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans les
régions ne relevant d'aucune juridiction nationale37(*). Ensuite, il rappelle le
concept de Patrimoine commun puisqu'il renvoie
à la préservation du patrimoine biologique en
quelque lieu où il se trouve. Il renforce l'approche faisant de la
biodiversité une préoccupation commune de l'humanité.
Ainsi, la convention, en son préambule, stipule : la
« conservation de la biodiversité est une
préoccupation commune de l'humanité »38(*). Enfin, la prévention
réfère à la théorie de l'équité
intergénérationnelle selon laquelle « chaque
génération est gardienne et usagère des ressources de la
Terre et doit transmettre celle-ci dans un état qui n'est pas
inférieur à celui dans lequel elle l'a
reçue »39(*).
Ce principe doit sa juridicité au droit de Stockholm
et de Rio. Son effectivité a été consacrée par une
sentence arbitrale dans l'affaire de la fonderie de Trail40(*) où le Canada s'est
vu imputé la responsabilité de dommage transfrontière pour
avoir ignoré le principe de prévention et celui de l'utilisation
non dommageable du territoire. Ainsi, le droit international
conditionne-t-il la réalisation d'ouvrage - certes justifié au
plan économique - à des études d'impact préalables
aux vertus anticipatrices, dans l'optique d'une prise en compte réelle
de l'environnement. En fait, par ce principe déjà
consacré par la coutume comme norme obligatoire, la souveraineté
territoriale de l'Etat souffre d'une certaine limitation au profit d'un
intérêt supérieur, celui de l'humanité.
B. Le principe de précaution
Selon Van Lang «la logique de précaution prend
en compte des menaces potentielles, incertaines, hypothétiques, toutes
celles à propos desquelles aucune preuve tangible ne permet d'affirmer
qu'elles se concrétiseront»41(*). Pour ainsi dire, en raison des lacunes que
recèlent les connaissances actuelles en matière de
biodiversité, l'absence de certitude scientifique -
précaution oblige - ne saurait
empêcher la prise de mesures susceptibles de prévenir un dommage
grave et irréversible au patrimoine génétique,
spécifique et écologique de la Terre. L'illustration de ce
principe se fait avec éloquence dans la Directive du Conseil des
Communautés européennes interdisant l'importation de viande
provenant d'animaux auxquels ont été administrées des
hormones de croissance. L'Europe, en effet, dans l'affaire du boeuf aux
hormones, soutenait que « le manque de connaissances
scientifiques sur le risque du cancer n'était pas une raison suffisante
pour ne pas prendre des mesures de précaution42(*).
L'approche de précaution, consacrée par le
principe 15 de Rio, a aujourd'hui rang de norme conventionnelle à
valeur obligatoire puisqu'il figure dans plusieurs conventions internationales,
notamment dans les traités de lutte contre les processus et
activités à risque pour la biodiversité (pollution,
destruction physique, eutrophisation, dissémination d'OGM,
désertification). ARBOUR Jean Maurice, à ce propos,
écrit : « le principe de précaution a
été à l'origine de la négociation de la Convention
sur la Protection de la couche d'ozone, alors qu'on n'avait pas encore la
preuve scientifique irréfutable des liens entre le chlore et la
destruction de l'ozone stratosphérique »43(*). Aussi, figure-t-il
respectivement dans la Convention cadre sur les changements climatiques, la
Convention de Bamako de 1991 interdisant l'importation de déchets
dangereux en Afrique, la Convention sur la Diversité Biologique, le
Protocole de Cartagena. Par ailleurs, aux termes du Protocole de Barcelone sur
la mer Méditerranée, il ne se pose pas de problème quant
à son applicabilité immédiate. Toutefois, le juge
international tarde à lui reconnaitre son statut de règle de
droit international coutumier.
C. Le principe de coopération
Il s'agit surtout d'un « devoir de
coopération » impliquant pour les Etats la double obligation
de coopérer en vue de la protection de l'environnement et de rendre
effectives certaines obligations conventionnelles susceptibles de
prévenir d'éventuels dommages à la diversité
biologique. Ce devoir de coopération est inhérent
à la conservation et à l'utilisation durable de la
diversité biologique et de ses éléments. Il permet la
conservation des ressources partagées : espèces migratrices,
cours d'eaux internationaux. Ce principe s'avère important pour
lutter contre les risques liés aux biotechnologies, à la
fabrication de substances dangereuses, bref, des risques liés à
des activités dangereuses44(*). Ce principe doit sa juridicité au droit de
Stockholm, principe 24. Il a été consacré par la
Convention sur la Diversité Biologique en son article 5. Aussi, cette
obligation de coopération a-t-elle été proclamée
par toute une panoplie de conventions de portée régionale ou
globale, ce qui semble traduire un consensus universel autour de sa
reconnaissance. De plus, le Tribunal International du droit de la mer l'a
expressément consacrée aux termes de son ordonnance du 3
décembre 2001 dans l'affaire de l'usine MOX opposant l'Irlande au
Royaume Uni, ce qui pour plus d'un tend à lui conférer le statut
d'une « coutume instantanée »45(*). Par ailleurs, le devoir de
coopération a su interpeller les Etats dans le cadre d'une utilisation
rationnelle et équitable de leurs ressources, ce, dans l'optique d'un
développement durable.
D. Le principe du développement
durable
L'approche du développement durable est la toile de
fond du droit international de la biodiversité. Elle sous-tend un
développement selon un mode de croissance économique qui respecte
les limites écologiques de la Planète et qui ne met pas en danger
ses ressources biologiques46(*). Partant, c'est avec raison que Sadeleer
écrit : «l'impact potentiel de ce principe pour
le droit de la biodiversité est potentiellement considérable, en
ce qu'il fédère l'ensemble des dispositions préconisant
l'utilisation durable ou rationnelle de la diversité et de ses
éléments »47(*). Consacré par Rio, par l'Agenda 21
et par un ensemble d'instruments conventionnels, le principe du
développement durable justifie la défaillance des approches
anthropocentriques faisant de l'homme le maitre de la nature. Car, comme le
préconise la Convention sur la Diversité Biologique, en son
article 2, il s'avère impérieux pour l'humanité
« d'utiliser les éléments de la diversité
biologique d'une manière et à un rythme qui n'entrainent pas leur
appauvrissement à long terme et sauvegardent ainsi leur potentiel pour
satisfaire les besoins et les aspirations des générations
présentes et futures »48(*). Ainsi, repose-t-il sur les principes
d'utilisation durable et équitable des ressources et
d''équité intergénérationnelle. En fait, Il promeut
l'approche de l'égalité des espèces face à la vie.
E. Le principe du pollueur-payeur et de la
responsabilité pour dommage écologique
Il nous a malheureusement été donné de
constater l'effacement quasi absolu du principe pollueur-payeur et celui de la
responsabilité pour dommage écologique dans le corpus conceptuel
et normatif du droit international de la biodiversité. Le premier,
chargeant le pollueur d'assumer les coûts externes causés par
sa pollution49(*),
n'y intervient que de manière transversale et dans des domaines connexes
à la diversité biologique, tels les systèmes normatifs
portant réglementation des processus affectant la
biodiversité. Ne semble, à cet effet, y faire
référence que la convention OSPAR instituant un régime de
protection pour l'Atlantique du Nord-est contre les activités à
risques pour le milieu marin50(*), pollutions d'origine tellurique, immersions,
incinérations, etc.... Le second, impliquant
généralement l'existence d'un fait internationalement illicite,
n'a aucune consécration normative, encore moins coutumière,
en droit international de la biodiversité. Car, s'il est vrai que le
droit de Stockholm et celui de Rio, assises du droit de la diversité
biologique, s'accordent à reconnaitre le principe de la
responsabilité étatique en droit international, il est tout aussi
sans conteste, d'une part, que ce système déclaratoire
relève de la soft Law, d'autre part, aucune juridiction
internationale ou nationale n'a encore sanctionné la
responsabilité des Etats pour des dommages causés à la
biodiversité51(*). En fait, la Convention sur la
Diversité Biologique n'assigne pratiquement aux Etats aucune obligation
de réparation des dommages causés à la
diversité.
En somme, il nous a été donné d'exposer
dans ce chapitre les approches fondatrices du droit international de la
biodiversité ainsi que les principes généraux structurant
cette branche du droit international de l'environnement. En fait, du choc des
approches utilitariste et conservationniste, liées aux disparités
entre pays en développement et pays développés, a jailli
la nécessité d'un dialogue entre Etats, ce, dans le cadre d'une
politique inhérente à la conservation de la diversité
biologique et de ses éléments. Aussi, a-t-on pu remarquer que
certains principes incontournables du droit international de l'environnement
forment le corpus juridique du droit de la biodiversité. Et si ce droit
doit son originalité et sa spécificité à
l'émergence de l'approche de conservation, pierre d'angle de
tout le système, ladite approche, socle des mesures de
conservation in et ex situ et fondement même de
la norme conventionnelle, ne s'inscrit que dans le cadre d'une obligation de
moyen, ce qui fait présumer l'inefficience du cadre juridique. Qui plus
est, l'absence du principe pollueur-payeur enlève au droit de la
biodiversité tout caractère sanctionnateur. Qu'en est-il en
conséquence de l'effectivité de la norme conventionnelle relative
à la matière ?
CHAPITRE II: UN CADRE NORMATIF HETEROGENE, ASSORTI
D'OBLIGATIONS
MOLLES, GENERALES ET PEU CONTRAIGNANTES
Ce cadre normatif repose essentiellement sur les instruments
de soft Law, les traités de protection de la nature, les
conventions relatives à la conservation de la diversité
biologique. Les premiers - comprenant notamment les instruments
déclaratoires - sont assortis d'obligations molles et forment la
base du droit international de l'environnement. Les seconds - se rapportant
à la vie sauvage - définissent un régime particulier
de conservation des espèces, des habitats, des
écosystèmes. Certains remettent en question l'utilitarisme
où la conservation des ressources a été subordonnée
aux besoins de l'homme. Ils promeuvent pour la plupart des approches
intégrées s'inscrivant dans une dynamique de préservation
de la biodiversité et de la conservation des ressources vivantes dans
l'optique du développement durable. Ils sont assortis d'obligations
générales et peu concrètes. Les derniers - dont la
Convention sur Diversité Biologique - traitent de la conservation
et l'utilisation durable de la biodiversité et de ses
éléments. Ces instruments forment cependant un cadre normatif
hétérogène, sans articulation réelle. Il va
être question dans le cadre de ce chapitre d'une analyse des instruments
de conservation des ressources, de protection de la nature (section 1) et de la
Convention sur la Diversité Biologique (section 2).
Section 1 : Les Instruments de conservation des
ressources de la biosphère et de protection de la nature
Le cadre juridique de la conservation des
ressources repose entre autres sur les instruments de soft Law -
Déclarations, Agendas, Chartes, Stratégies
(A) - et sur les traités de protection de
la nature dont ceux relatifs à la conservation des paysages et des
habitats (Conventions de l'Unesco et de Ramsar), ceux se rapportant
à la conservation des espèces (Convention de Bonn, Système
du Traité sur l'Antarctique) et ceux se rapportant au commerce
international des espèces (CITES) (B).
A. Les instruments de soft Law
La Déclaration de Stockholm, les stratégies
mondiales de la conservation, l'Agenda 21, la Charte mondiale de la nature,
sont des instruments de soft Law, sans portée juridique réelle,
en ce sens que leurs postulats n'ont aucune valeur obligatoire à
l'égard des Etats signataires. Ils sont l'équivalent
d'actes concertés non conventionnels52(*) à la base
d'un double consensus scientifique et politique sur la nécessité
de conserver la biodiversité. Ils jouent un rôle essentiel
dans le processus de création de la norme conventionnelle et
participent de la mise en oeuvre d'une politique efficace au profit de la
diversité biologique.
1. La Déclaration de Stockholm
La Déclaration de Stockholm de 1972 a su alimenter de
valeur la norme conventionnelle en matière de biodiversité. Ses
principes 2, 3 et 21 définissent respectivement l'obligation de
conserver les ressources naturelles, la responsabilité de l'homme dans
la sauvegarde de la nature et une gestion écologiquement viable des
ressources. Le principe 2 postule que « les ressources naturelles
doivent être préservés dans l'intérêt des
générations présentes et futures (...)»53(*). En outre, en raison des
menaces et des processus affectant la biodiversité, la
Déclaration, en son principe 3, assigne à l'homme
« la responsabilité particulière dans la sauvegarde
et la sage gestion du patrimoine constitué par la flore et la faune
sauvages et leur habitat (...) »54(*). Enfin, le principe 21 de ladite déclaration
tout en consacrant la souveraineté des Etats sur leurs ressources
naturelles impute à ceux-ci « le devoir de faire en sorte
que les activités exercées dans les limites de leur juridiction
ou sous leur contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement
dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction
nationale »55(*). En fait, la Déclaration de Stockholm soutient
un tant soit peu la norme conventionnelle relative à la
biodiversité.
2. La Déclaration de Rio de 1992
La Déclaration de Rio consacre l'interdépendance
entre les notions « environnement » et
« développement » et démontre que de leur
juste équilibre il résulte à coup sûr un
modèle de développement capable de
« répondre aux besoins actuels sans compromettre
l'aptitude des générations futures à répondre aux
leurs »56(*). Il préconise le développement
durable. Ainsi, admet-il un modèle de développement fondé
sur un parfait équilibre entre le progrès économique et la
protection de l'environnement, un modèle de développement
insusceptible de compromettre la protection des espèces, des
écosystèmes et des paysages, la conservation, la restauration et
l'utilisation de la biodiversité et de ses éléments. Par
ailleurs, si la Déclaration, au terme de ses vingt sept principes n'a
pas semblé assigner le devoir de conserver la diversité
biologique, il n'en demeure pas moins que les mesures qu'elle prescrit, telles
les études d'impact, sont de taille à prévenir des
dommages graves à la biodiversité et à ses
éléments. Néanmoins, la Déclaration de Rio est
de nature transversale et fortement anthropocentrique57(*). Fallait-il bien la
compléter par Action 21.
.
3. l'Agenda 21
D'aucuns disent de l'Agenda 21 un inventaire complet des
problèmes environnementaux et des stratégies susceptibles de les
solutionner58(*).
D'autres y voient un instrument de lutte contre les processus affectant la
biodiversité (pollutions, changements climatiques, transformation
des terres et des habitats, désertification) et un plan d'action
favorable au développement durable. En fait, outre ces aspects, Action
21 exprime un consensus universel pour la mise en place d'une
stratégie mondiale de conservation de la biodiversité.
Celle-ci s'articule autour de « la conservation des
espèces et des écosystèmes, la lutte contre les causes
d'érosion de la biodiversité, l'application d'approches
intégrées dans la gestion du territoire (...)59(*)». Action 21
préconise entre autres objectifs le développement de
stratégies nationales de conservation de la biodiversité et
l'intégration de celles-ci dans des plans et politiques publiques de
développement. La grande particularité de cet instrument tient au
fait qu'il prescrit la démocratie citoyenne en tant qu'impératif
pour assurer la protection des écosystèmes. Ainsi, par l'exercice
des droits à l'information, à la participation et à la
justice, cet instrument, quoique non contraignant, accorde-t-il à la
norme conventionnelle une intégration certaine en droit interne et une
certaine efficacité.
4. La Charte mondiale pour la nature
Relevant certes du domaine de la soft Law, la Charte mondiale
de la nature, texte fondateur, aura pourtant prescrit l'approche
écocentrique comme celle devant plus tard imprégner la norme
conventionnelle relative à la conservation de la biodiversité.
Elle rejette les conceptions utilitaristes où la raison d'être des
espèces, des écosystèmes et des paysages fut
subordonnée aux besoins de l'être humain. Elle préconise
l'égalité des espèces face à la vie puisqu'elle
postule clairement que « toute forme de vie est unique et
mérite d'être respectée quelle que soit son utilité
pour l'homme (...) ». Aussi, proclame-t-elle :
« la nature sera respectée et ses processus essentiels ne
seront pas altérés ». Elle se veut un code moral
d'action servant à guider l'humanité dans ses équations
scientifiques et dans ses spéculations économiques, ce, selon un
modèle de développement compatible avec un environnement de
qualité et qui ne soit pas un legs empoisonné pour les
générations futures. La Charte édicte la mise en oeuvre de
principes allant de l'intégration des exigences de conservation dans des
plans et programmes nationaux à l'adoption de législations
nationales en matière de diversité biologique. Sa
particularité tient au fait qu'elle aura inspiré le
législateur international dans la conception et l'élaboration de
la norme conventionnelle de protection de la nature et de conservation de la
biodiversité
5. Les Stratégies mondiales de la
conservation
Elles impliquent « la conservation des
ressources vivantes au service du développement durable »
et sont à l'origine l'oeuvre de l'Union Internationale pour la
Conservation de la Nature et de ses Ressources (IUCN). Elles visent notamment
le maintien et la sauvegarde des processus écologiques fondamentaux,
la préservation de la diversité génétique et
l'utilisation durable des espèces et des
écosystèmes60(*). Cet instrument diffère des
Déclarations de Stockholm et de Rio en ce sens qu'il ne s'agit pas une
Déclaration de principes. Néanmoins, elle a permis
d'appréhender et de définir les principes
élémentaires en matière de diversité biologique.
Aussi, ont-elles servi de cadre d'inspiration dans l'élaboration des
conventions se rapportant à la vie sauvage.
B. Les conventions de protection de la
nature
Les rapports entre l'homme et la nature, définis pour
satisfaire les besoins de l'homme et caractérisés par la
surexploitation des ressources, n'ont pas été sans incidences sur
les espèces, les habitats et les écosystèmes. En plein
20ème siècle, les scientifiques parlaient
déjà d'une véritable décimation des espèces
du fait des activités de l'homme. «Les quelques millions
d'espèces qui existent à l'heure actuelle sont les
survivants du demi-milliard d'espèces ayant existé à un
moment ou à un autre »61(*). Toutefois, affectée, la
conscience universelle n'a pas sombré dans un silence qui serait
complice de la destruction du patrimoine écologique de la Terre. Ainsi,
il a été question de protéger la nature en recourant
à des règles susceptibles de pallier l'inefficience des
instruments de soft Law. D'où, les conventions se rapportant à la
conservation des écosystèmes, des habitats et des espèces
1. Les traités internationaux de conservation
des écosystèmes et des habitats
Du nombre des traités internationaux de conservation
des écosystèmes et des habitats figurent la Convention de
l'Unesco pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel
(Convention de l'Unesco) et la Convention
relative aux zones humides d'importance internationale (Convention de
Ramsar). On se bornera à en faire la radiographie en tant que
règle obligatoire tout en démontrant le degré relatif de
leur normativité dans le cadre de la conservation de la diversité
écosystémique.
a) La convention de l'Unesco pour la protection du
patrimoine mondial, culturel et naturel
Cet instrument à vocation universelle a
pourtant une portée limitée puisqu'il ne régit que les
habitats et les écosystèmes et ne vise pas à
établir au sens large les principes fondateurs applicables à la
conservation de la nature. Il tire sa raison d'être du fait que certains
biens du patrimoine culturel et naturel présentaient un
intérêt si grand qu'il s'est imposé à
l'humanité l'urgente nécessité de les préserver
«en tant qu'éléments du patrimoine mondial de
l'humanité»62(*). Partant, on s'incline à croire que la
Convention du 23 Novembre 1972 respire les principes généraux du
droit de l'environnement pour avoir consacré la notion de
«patrimoine commun de l'humanité». Aussi, son origine
s'inscrit-elle dans la prévention des lourdes menaces qui pesaient sur
le patrimoine mondial et qui semblaient capables de provoquer la
dégradation des écosystèmes et des habitats. Ainsi, la
convention devrait-elle permettre à la société
internationale d'oeuvrer, notamment par l'octroi d'assistance collective,
à la conservation de tout patrimoine culturel et naturel revêtant
une valeur universelle rare. De plus, elle définit l'obligation pour
l'Etat partie d'identifier, de protéger, de conserver, de mettre en
valeur le patrimoine culturel et naturel sur son territoire et d'en assurer la
transmission aux générations futures.
En outre, aux termes de l'article 6.3, la partie contractante s'engage
«à ne prendre délibérément aucune
mesure susceptible d'endommager le patrimoine culturel et
naturel». La grande particularité de la convention
est «d'être parvenue à réunir dans un même
instrument juridique les notions de protection de la nature et de
préservation des sites culturels »63(*). Enfin, la Convention de
l'Unesco est un instrument contraignant en ce sens que les règles
qu'elle édicte ont rang d'obligations juridiques. En effet, il y est
plus d'une fois écrit : « les Etats
s'engagent ... ».
En revanche, on y décèle un caractère
«programmatoire» qui atténue sa force
normative. Car si à l'Etat on oppose des obligations, il s'agit pour la
plupart d'obligations de moyen. L'Etat partie s'efforce et s'engage, certes,
mais dans la mesure du possible.
b) la Convention relative aux zones humides
d'importance internationale (RAMSAR)
Le déclin accentué des populations d'oiseaux
d'eau au cours du 20ème siècle a favorisé la
conclusion de la Convention de Ramsar. Celle-ci vise la conservation et
l'utilisation rationnelle des zones humides en tant que ressource d'importance
écologique première, de valeur scientifique capitale, et comme
«régulateurs du régime des eaux et en tant qu'habitats
d'une flore et d'une faune caractéristiques et, particulièrement,
des oiseaux d'eau»64(*). Son objectif principal est «d'enrayer les
empiètements progressifs sur les zones humides et la disparition de ces
zones»65(*).
Tout un régime juridique de conservation des zones humides a
été défini dans le cadre de la convention puisque ces
zones, en raison de leur localisation géographique, de la richesse de
leur végétation, de la particularité de leur
propriété chimique et physique, présentent une
diversité toute spéciale. Ainsi, cette protection s'étend
aux étendues de marais, d'eaux marines d'une profondeur de plus de six
mètres à marée basse, aux zones humides
désignées, zones estuariennes, lacustres, riveraines, palustres,
ainsi qu'aux étendues d'eaux artificielles, lacs de retenue d'eau,
marais salants.
La convention de Ramsar du 2 février 1971 est d'une
haute portée normative puisqu'elle présente un vrai régime
d'obligations. En plus de définir l'obligation de conservation et
d'utilisation rationnelle des zones humides se trouvant sur leurs territoires,
elle oblige les Etats à désigner des zones humides
d'importance aux fins de leur inscription dans la liste de Ramsar. Enfin, elle
promeut la coopération internationale pour une gestion rationnelle de
ces zones. Elle stipule des engagements plutôt souples.
En revanche, si la convention se veut souple, il n'en demeure
pas moins que les articles 2, 3, 4, 5 et 6 semblent concourir aussi
efficacement que possible à la conservation des zones humides, à
la sauvegarde de leur faune et de leur flore, ce, aux termes d'engagements
plutôt fermes. Aussi, définissant une approche
écosystémique, la convention de Ramsar édicte-t-elle des
mécanismes institutionnels et financiers capables d'assurer sa mise en
oeuvre et de justifier son efficacité.
2. Les traités internationaux de conservation
des espèces
Sont rares les traités internationaux de conservation
des espèces à avoir pris le parti de protéger l'ensemble
des espèces d'un milieu donné puisque la grande majorité
visent en priorité à préserver les espèces
réputées rares, en voie d'extinction ou migratrices.
Néanmoins, adoptés sous l'impulsion des communautés
scientifiques, ces traités ont su marquer le passage d'une perception
utilitariste de la nature à une éthique conservationniste, ou
encore, celui d'une approche anthropocentrique de la conservation des
ressources à une approche fortement écocentrique. Alors, on
prendra soin d'examiner les instruments relatifs à la conservation des
espèces migratrices et ceux portant sur le commerce international des
espèces menacées d'extinction.
a) La Convention sur la conservation des
espèces migratrices appartenant à la faune sauvage
(BONN).
La Convention de Bonn du 23 Juin 1979 s'inscrit à ce
jour dans l'ordre des instruments à portée universelle les plus
judicieux en matière de conservation des espèces. Elle campe un
régime particulier de protection des espèces migratrices dont
l'état de conservation est jugé défavorable. Elle
établit des mécanismes susceptibles de prévenir la mise en
danger de ces espèces. Ces mécanismes de protection renvoient aux
approches conceptuelles de conservation, notamment à l'approche par
espèce. Celle-ci préconise l'édiction de mesures
adéquates portant sur la gestion durable des espèces à
partir de listes établies. Cette approche, rappelons-le,
concourt à la protection des espèces menacées et
prévient efficacement leur déclin, voire leur extinction.
Néanmoins, le régime juridique de la protection n'est pas
uniforme puisque les mesures de conservation varient selon qu'il s'agit
d'espèces inscrites à l'annexe I ou à l'annexe II de la
convention. En effet, si aux termes de la convention, les Etats partie doivent
s'efforcer d'accorder une protection immédiate aux espèces
migratrices inscrites à l'annexe I, s'agissant des espèces
migratrices inscrites à l'annexe II, les Etats partie ne sont
conviés qu'à conclure des accords spécifiques en vue de
rétablir ou de maintenir l'espèce en question dans un état
de conservation favorable.
La référence aux accords spécifiques
présente à la fois des avantages et des inconvénients. Si,
dans le premier cas, ces accords complètent la convention et
définissent un régime spécifique à chaque
espèce, dans le second, il s'agit d'une pyramide conventionnelle sans
articulation puisque les instruments qui la composent n'ont pas la même
force normative. Selon Sadeleer, «la technique de conclusion des
accords spécifiques s'éloigne de celle de l'adoption des
protocoles d'application des conventions cadres qui sont légions en
droit international de l'environnement»66(*).
En somme, ce système est efficace en ce que la
convention de Bonn ne peut faire l'objet de réserves, qu'elle n'admet de
réserves que concernant les annexes et les espèces listées
et en ce que de ces accords, conclus sous l'égide de la Convention de
Bonn et prenant en compte les spécificités de chaque groupe
d'espèces, devront découler des plans de gestion, des programmes
d'action, tous, répondant aux approches de la conservation. Toutefois,
les mécanismes financiers du système conventionnel sont
déficients67(*), ce qui risque de compromettre
l'effectivité de la norme.
b) La Convention sur le commerce international des
espèces de faune et de flore menacées d'extinction
(CITES)
La non réglementation du Commerce international des
espèces a présenté une menace tant pour les espèces
que pour les écosystèmes. Ainsi, il a fallu la Convention de
Washington de 1973 pour régir et réglementer le
commerce international et le transport
des espèces sauvages menacées. A ce propos, Arbour
Jean Maurice écrit « La CITES réglemente les
transferts transfrontaliers commerciaux de quelque 30 000 espèces (...)
ainsi que leurs parties et les produits qui en sont issus»68(*). Partant, la CITES garantit
que le commerce international et le transport des espèces de la flore et
de la faune sauvages n'affectent pas la conservation de la biodiversité
et reposent sur une utilisation durable des espèces69(*).
Néanmoins, la CITES ne définit pas un
régime juridique de réglementation du commerce interne des
espèces. Ceci peut être considéré comme une
faiblesse du système conventionnel dans la mesure où le commerce
interne, malheureusement non pris en compte, constitue un facteur de
régression et de raréfaction des espèces, notamment en
Afrique et en Asie. La CITES étend plutôt son régime de
conservation aux espèces inscrites dans ses annexes, espèces
menacées par les échanges commerciaux, et non pas à
l'ensemble des espèces animales et végétales que compte la
biosphère. Elle vise en particulier les spécimens ou populations
d'espèces.
Aussi, la convention de Washington établit-elle un
régime d'autorisations allant du contrôle des exportations
à celui des importations de certaines espèces, ce, selon leur
fragilité. En effet, le mécanisme de contrôle
diffère suivant que l'espèce animale ou végétale
soit gravement menacée, qu'elle soit vulnérable ou qu'elle
nécessite un régime spécifique de protection, ce, suivant
son annexe d'inscription. Il est, en revanche, sans conteste que le permis
d'importation ou d'exportation garantit au mieux le contrôle du commerce
des espèces en ce que qu'il prévient les fraudes et le trafic
illicite.
En somme, la CITES est un instrument à
caractère obligatoire. Elle permet aux Etats d'adopter des mesures
allant jusqu'à l'interdiction du commerce à l'encontre des Etats
contrevenants. Elle contourne le principe de l'effet relatif des traités
en ce qu'elle définit un régime applicable aux Etats non partie.
Elle institue des procédures d'information aux termes desquelles les
Parties sont tenues d'informer le Secrétariat de la Convention du
degré d'application de celle-ci sur leurs territoires. Enfin,
promeut-elle les principes généraux applicables à la
biodiversité, notamment le principe de précaution puisqu'en cas
d'incertitude quant à l'état d'une espèce les parties
doivent agir au mieux dans l'intérêt de la conservation de cette
espèce70(*). La
CITES est donc un outil intéressant pour la conservation des
espèces en droit international de la nature.
Section 2 : La Convention sur la Diversité
Biologique
C'est de l'érosion sans bornes de la
biodiversité malgré l'existence de nombre d'instruments
juridiques, du constat de l'insuffisance des instruments de portée
globale et de l'évidence d'un régime fragmenté entre cette
pléthore de conventions sectorielles, mondiales et régionales que
vient la raison d'être de la Convention sur la Diversité
Biologique. Ce traité-cadre du 5 Juin 1992 n'a certainement pas la vertu
d'un instrument codificateur des principes et des normes
préconisés par les instruments de soft Law, par les
traités relatifs à la biodiversité terrestre et d'eau
douce et par ceux relatifs à la biodiversité en
général. Il s'agit néanmoins d'un traité de
portée mondiale dont le rôle se veut pour le moins
fédérateur dans l'élaboration d'un régime
international cohérent en matière de biodiversité. La
Convention respire les principes du droit international de l'environnement.
Elle exprime les principes généraux du droit de l'environnement
(A) et poursuit des objectifs d'importance (B). Elle définit
à l'égard des Etats des obligations fondamentales - incluant
notamment des stratégies de conservation, des mécanismes
économiques de conservation (C), un régime de transfert des
technologies (D). Enfin, nous passerons en revue le régime de
financement de la Convention (E).
A. Principes fondamentaux
Etant à l'origine le résultat d'un dialogue
entre pays développés et pays en développement dans
l'optique d'un accès pour le Nord aux ressources
génétiques du Sud, ce, en contrepartie et au profit de ceux-ci du
financement des surcoûts que nécessite la conservation et du
transfert des biotechnologies vers le Sud, la Convention sur la
Diversité Biologique semble d'entrée de jeu s'articuler autour
d'un cadre de coopération entre Etats. Il va falloir ne pas heurter les
souverainetés nationales en matière de gestion des ressources
naturelles tout autre qu'il importe de conserver et d'utiliser durablement la
biodiversité. Cette équation en appelle à un cadre
régulateur qu'exprime d'ailleurs la Convention, les principes
fondamentaux sous-tendant celle-ci.
1. La souveraineté des Etats sur leurs
ressources naturelles.
Nous croyons plus haut avoir démontré en quoi
la souveraineté étatique sur les ressources
naturelles se veut un principe fondateur du droit international
de la biodiversité. Point n'est alors besoin d'en faire un plus long
développement. Il importe tout simplement de rappeler que si, en raison
de son importance, la diversité biologique est considérée
comme « une préoccupation commune de
l'humanité », en revanche, la
Société internationale, reconnaissant aux Etats aux termes de
l'article 3 de la Convention leurs droits sur leurs ressources naturelles, a
fait du principe de «Souveraineté des Etats» l'une des assises
fondamentales de la Convention. Fort de cette balise, le Nord ne pourra
nullement considérer les ressources du sud comme « relevant du
patrimoine commun de l'humanité », y accéder et les
exploiter à ses fins.
2. Les responsabilités communes mais
différenciées
Ce principe, rappelons-le, est formellement consacré
par l'article 20 de la Convention. Ceci dénote qu'en tant que
« préoccupation commune de l'humanité », la
conservation de la biodiversité relève de la
responsabilité de tous les Etats. Néanmoins, les obligations des
pays en développement diffèrent de celles des pays
développés en ce sens que le Nord, disposant de capacité
technologique et de moyens financiers adéquats, est censé tenu
d'une obligation de résultat tandis que le Sud, pauvre et
endetté, est tenu d'une obligation de moyen. Ainsi, en ce domaine,
il ne semble pas s'établir au profit des pays développés
une obligation de réciprocité puisque ces derniers sont tenus de
s'exécuter alors que le Sud ne peut s'acquitter de ses obligations que
dans la mesure du possible. Le Nord est donc tenu d'une obligation de
résultat pure et dure tandis que l'obligation de
réciprocité n'a été conçue que dans
l'intérêt des pays du Sud. A ce propos, la CDB postule
«les pays en développement ne pourront s'acquitter des
obligations qui leur incombent que dans la mesure où les pays
développés s'acquitteront effectivement des obligations qui leur
incombent s'agissant des ressources financières et du transfert de
technologie »71(*). De plus, ils sont astreints au financement des
surcoûts liés à la mise en oeuvre de la convention.
3. Les principes de prévention et de
précaution
Pour atteindre les objectifs de
conservation et d'utilisation durable de la biodiversité, la mise en
oeuvre des principes de prévention et de précaution
s'avère primordiale. Ainsi, grâce à un mécanisme
d'évaluation des incidences sur la biodiversité, la CDB
prévient des dommages transfrontières. En outre, cet instrument
se veut anticipateur puisque - précaution oblige - elle
évite l'érosion de la biodiversité même en cas
d'absence de certitudes scientifiques. A ce propos, le 9ème
considérant du préambule stipule « lorsqu'il
existe une menace de perte de la biodiversité, l'absence de certitudes
scientifiques totales ne doit pas être invoquée comme raison pour
différer les mesures qui permettraient d'en éviter le danger ou
d'en atténuer les effets »72(*)
En fait, tous les principes du droit
international de l'environnement n'ont pas intégré la convention.
On en veut pour preuve l'absence du principe pollueur-payeur. A ce propos, De
Sadeleer écrit « concernant la responsabilité
et la réparation des dommages causés à la diversité
biologique, la CDB est particulièrement floue et ne prévoit
aucune obligation même conditionnelle »73(*). Néanmoins, les
principes fondamentaux qu'elle prescrit concourent à la
réalisation des objectifs poursuivis.
B. Les Objectifs
Les objectifs fixés dans la Convention sur la
Diversité Biologique s'inscrivent dans la perspective de la
réduction du rythme très alarmant de la perte de la
biodiversité sur les plans mondial, régional et national. La
radiographie de l'article 1er permet d'identifier trois grands
objectifs : la conservation de la biodiversité, l'utilisation
durable de ses éléments et le partage équitable
découlant de l'exploitation des ressources
génétiques.
1. La conservation de la
biodiversité
La notion de « conservation », telle que
définie dans le 10ème considérant du
préambule de la Convention, renvoie aux mesures de
conservation in et ex situ des
écosystèmes et habitats naturels respectivement dans leur milieu
naturel et en dehors de ce milieu. Aussi, vise-t-elle le maintien et la
reconstitution de populations viables d'espèces dans ce milieu naturel.
Il s'agit, certes, d'obligations fondamentales en matière de
conservation, pourtant, non contraignantes. En effet, écrit Arbour Jean
Maurice, « les obligations de conservation qui sont à la
charge de l'Etat le sont toujours dans la mesure du possible, en
fonction des moyens qui sont propres à chaque Etat et
selon qu'il conviendra »74(*). Les doctrinaires ont
donné deux explications à ce propos. La première tient au
fait que l'un des principes fondamentaux qu'énonce la Convention demeure
le droit souverain de l'Etat d'exploiter ses ressources selon un plan librement
défini. La seconde, exprimant clairement une obligation de moyens, est
plutôt réaliste en ce que l'Etat, quant aux mesures de
conservation à adopter et tenant compte des coûts financiers
importants qu'impliquent l'élaboration et la mise en oeuvre d'une
stratégie de conservation, ne peut aller au-delà de ses moyens.
a. L'utilisation durable des éléments de
la biodiversité
Selon l'article 2 de la Convention, cette notion
réfère à «l'utilisation des
éléments constitutifs de la diversité biologique d'une
manière et à un rythme qui n'entrainent pas leur appauvrissement
à long terme, et sauvegardent ainsi leur potentiel pour satisfaire les
besoins et les aspirations des générations présentes et
futures». Ainsi, le développement durable,
défini comme associant environnement et développement, est le
préalable à l'exploitation des éléments de la
biodiversité.
En outre, les articles 6, 10 et 14 traitant de l'utilisation
durable de la biodiversité renvoient respectivement aux mesures
générales en vue de la conservation et de l'utilisation durable,
à l'utilisation durable des éléments constitutifs de la
diversité biologique, aux études d'impact et réduction des
effets nocifs. S'agissant des mesures générales d'utilisation
durable, elles impliquent l'élaboration de stratégies, de plans,
de programmes nationaux, l'intégration de l'utilisation durable de la
biodiversité dans des politiques sectorielles ou intersectorielles
pertinentes. S'agissant de l'utilisation durable des éléments de
la biodiversité, elle consiste entre autres à
l'intégration des considérations y relatives dans le processus
décisionnel national, en l'application de mesures correctives dans les
zones où on a connu une érosion de la biodiversité.
S'agissant enfin des mesures d'impact et de réduction des effets nocifs,
elles renvoient aux mécanismes d'utilisation et d'évaluation des
incidences. Ainsi, elles préviennent la mise en oeuvre de tout projet
susceptible de causer des dommages à la biodiversité.
Toutefois, s'il s'agit d'autant de mesures favorables à
une utilisation rationnelle de la diversité biologique et de ses
éléments, il n'en demeure pas moins qu'elles s'inscrivent dans un
champ d'obligations générales, donc non contraignantes, puisque,
comme le veut le législateur international, si les Etats s'engagent,
c'est « dans la mesure du possible », « en
fonction de leurs moyens » et « selon qu'il
conviendra »
2. Le partage équitable des
bénéfices découlant de l'exploitation des ressources
génétiques
« Ressources génétiques contre
biotechnologies » : cela traduit un vaste marchandage dans
lequel s'inscrit l'exploitation des éléments de la
biodiversité. C'est le donnant-donnant entre le Nord et le Sud
déterminé par l'accès aux ressources et le partage des
bénéfices découlant de leur exploitation. Cet objectif, en
réalité, reflète une approche foncièrement
utilitariste en ce qu'en plus d'un accès satisfaisant aux ressources il
vise « un partage juste et équitable des avantages
qui en sont issus ». Les conditions de cet
accès, selon l'article 15 de la Convention, supposent le consentement
préalable en connaissance de cause de l'Etat propriétaire. A
cette fin, sont déterminées au niveau des législations
nationales de l'Etat les conditions d'accès aux ressources
génétiques, celles portant sur le transfert des
technologies, sur la participation des nationaux à la recherche
et sur le partage équitable des avantages découlant de
l'utilisation des dites ressources.
En fait, si les objectifs de la convention sont conçus
en des termes souples et sous-tendent un cadre de coopération
mercantile, ce traité-cadre définit des obligations
concrètes en matière de conservation et d'utilisation durable de
la biodiversité.
C. Le régime des obligations
souscrites
La Convention sur la Diversité Biologique circonscrit
les obligations en matière de conservation et d'utilisation durable de
la biodiversité dans un cadre multidimensionnel incluant des
stratégies et plans nationaux de conservation, des mesures de
conservation in et ex situ, l'utilisation durable de la biodiversité et
la mise en oeuvre d'une approche écosystémique. Ce
régime inclut des obligations non molles, moins générales
et plus ou moins concrètes. Néanmoins, ces obligations
revêtent un caractère programmatoire en ce que si les Etats
s'engagent, ils ne le font « qu'en fonction des conditions
et des moyens qui leur sont propres »75(*). Encore une nuance, pour le
moins subtile, capable d'atténuer le degré de force de la norme
conventionnelle relative à la diversité biologique.
1. Stratégies, plans et programmes
nationaux
L'article 6 de la CDB assigne aux parties l'obligation
d'élaborer des stratégies, plans ou programmes nationaux
destinés à la conservation et à l'utilisation durable de
la biodiversité. Ceci dénote une approche nationale
de la conservation clairement définie. Cette approche dite
nationale traduit la haute portée du principe de la souveraineté
des Etats sur leurs ressources naturelles. En outre, selon les
stratégies élaborées, les Etats ont l'obligation
d'identifier, de surveiller les éléments de la
biodiversité et les causes de son érosion. Toujours est-il que
ces stratégies et programmes nationaux de conservation, variant d'un
Etat à un autre en fonction des priorités publiques de chaque
Etat, peuvent receler nombre d'incohérences. Ainsi, celles-ci,
génératrices de disharmonies entre stratégies nationales
de conservation, auront carrément des incidences sur l'obligation
parallèle qu'ont les Etats d'appliquer des politiques de conservation
écologiquement rationnelles.
Cette obligation accuse par ailleurs d'autres faiblesses. En
effet, aucune précision n'a été fournie aux termes de la
Convention quant à la manière pour les Etats d'élaborer
des stratégies et plans de conservation. De plus, s'il est du devoir des
Etats d'intégrer des considérations relatives à la
conservation dans des programmes non spécifiques,
l'élaboration d'une stratégie nationale, selon les
doctrinaires, n'est pas suffisante pour en garantir la
pérennité76(*). Aussi, l'intégration de telles
considérations ne peut-elle se faire que « comme il
convient »77(*) d'autant plus que cela implique des
difficultés majeures, notamment, celles consistant pour l'Etat de
modifier et d'adapter sa politique de développement économique
aux plans de conservation.
Par ailleurs, il convient de rappeler l'obligation des mesures
de conservation in et ex situ, plus haut
définies. Les premières, selon l'article 8 de la
Convention, s'articulent autour de deux axes fondamentaux : la
création d'aires protégées - réserve
forestière, zone de protection spéciale, réserve
naturelle, parc national, etc. - et la prise des mesures de conservation
en dehors de ces zones. Les secondes ne viennent qu'en complément
des mesures de conservation in situ78(*).
2. Mécanismes d'utilisation et
d'évaluation des incidences
Plus d'un s'accorde à reconnaitre que l'une des
conditions essentielles du maintien de la biodiversité consiste en la
« durabilité » des utilisations qui en sont faites.
C'est donc pour éviter des dommages irréversibles à la
biodiversité et dans l'optique d'une utilisation écologiquement
viable que le législateur international assigne aux Etats le devoir
d'adopter des procédures d'évaluation des incidences de tout
projet à risque sur l'environnement. A ce propos, la Convention en son
article 14.1 prescrit aux Etats « l'obligation d'adopter dans
l'ordre interne des mécanismes d'évaluation des impacts de tout
projet sur la biodiversité ». Ceci relève d'une
approche de précaution.
Ce mécanisme recèle toutefois une grande
faiblesse : le peu d'intérêt accordé à
l'implication du public au processus d'évaluation des incidences. En
effet, l'obligation que stipule l'article 14.1 de la Convention est
conditionnelle puisque le public participera « s'il y a
lieu » aux procédures d'évaluation des incidences.
Partant, est un constat d'évidence la faiblesse du dispositif normatif
de la Convention en ce que d'une part la participation du public au processus
décisionnel est un droit procédural favorable à
l'applicabilité directe de la norme conventionnelle en droit interne et
d'autre part l'exercice de ce droit justifie l'existence d'une
démocratie citoyenne, ou pour répéter PRIEUR, d'une
éco-citoyenneté79(*). Donc, ceci est de force à faire admettre
le manque d'efficacité de la norme conventionnelle en droit
international de la biodiversité.
3. Mécanismes économiques de
conservation
La CDB, aux fins de conservation et d'utilisation durable de
la biodiversité, prescrit des mesures d'incitation, dites
mécanismes économiques de conservation. L'article 11
édicte « l'adoption de mesures économiquement et
socialement rationnelles » capables d'inciter à conserver
et utiliser durablement la biodiversité. Ces mécanismes
économiques de conservation comprennent, entre autres, l'assistance
financière en faveur de certaines activités, l'application de
politique fiscale au profit de la biodiversité. Toujours est-il, en
revanche, que les Etats ne sont tenus à s'exécuter que
« dans la mesure du possible », d'où une
obligation de moyen et non de résultat.
4. Approche écosystémique
L'approche écosystémique est d'une importance
capitale puisqu'elle serait «la seule susceptible d'appréhender
les causes profondes de l'érosion de la
biodiversité»80(*). Elle est globale et diffère en
conséquence de l'approche par écosystème. Elle prend en
compte les incidences des activités humaines et promeut la
préservation des processus écologiques. Il s'agit d'une nouvelle
technique de gestion des ressources, laquelle «implique la
définition d'unités d'évaluation et de gestion de nature
écologique et l'adoption de mesures souples et adaptatives visant
à garantir l'intégrité de la structure et des fonctions de
l'écosystème»81(*). Elle vise une gestion intégrée et
requiert pour sa mise en oeuvre la participation du public au processus
décisionnel.
Toutefois, eu égard à la question de la
participation du public, la mise en oeuvre de cette approche parait absolument
hypothétique puisqu'une telle participation, selon la Convention, est de
nature conditionnelle. Partant, contrairement au voeu exprimé par la
Conférence des parties aux termes du principe 12 relatif à cette
approche, comment compter sur l'implication des secteurs pertinents des
sciences humaines dites exactes dans la mise en oeuvre des objectifs
de la Convention ?
D. Le régime du transfert des
technologies
Si les pays du Sud doivent permettre aux pays du Nord un
accès satisfaisant à leurs ressources génétiques,
le Nord, en contrepartie, est tenu de la double obligation de faire
accéder à sa technologie et du transfert de celle-ci vers le Sud.
A ce propos, l'article 16.1 de la Convention édicte :
« Toute partie s'engage à assurer et/ou faciliter à
d'autres parties contractantes d'une part l'accès aux technologies (...)
et d'autre part le transfert desdites technologies ». De plus,
la convention prévoit que l'accès à la technologie et son
transfert se feront « à des conditions justes et les plus
favorables, y compris des conditions de faveur
préférentielles »82(*). La mise en oeuvre de ces dispositions n'est
pas, néanmoins, sans incidences sur la norme conventionnelle tenant
compte des enjeux économiques et commerciaux d'importance.
En effet, si l'accès à la technologie et son
transfert sont des éléments inhérents à la
réalisation des objectifs de la Convention, cette opération peut
pourtant heurter les règles du commerce international et de la
propriété intellectuelle. Or, ordinairement, la technologie fait
l'objet de brevet. A ce propos, la convention en son article 16 précise
que le transfert de la technologie devra être conforme aux normes
régissant la propriété intellectuelle et en
compatibilité avec leur protection adéquate et effective83(*).
En somme, le régime du transfert des technologies
n'est certainement pas sans incidences sur l'équilibre du droit
international général puisqu'aux principes de conservation et
d'utilisation durable de la diversité biologique s'opposent des enjeux
d'ordre économique et commercial, partant, le constat d'une
difficulté d'harmonisation de la Convention avec nombre d'instruments
conventionnels.
E. Le régime de financement
La crise de ressources financières auxquels sont
confrontés les pays en développement est de nature à
compromettre la réalisation des objectifs de conservation et
d'utilisation durable de la biodiversité et de ses
éléments. Comment, en effet, les pays en développement,
pauvres et endettés, pourront-ils mettre en oeuvre leurs
stratégies nationales de conservation sans financement des mesures en
faveur de la biodiversité ? Comment pourront-ils alors s'acquitter
de leurs obligations comme le prévoit la Convention sur la
Diversité Biologique ?
Ces interrogations en appellent aux considérations
suivantes. D'abord, si, aux termes de l'article 20 de la Convention, les
Parties s'engagent à financer les activités nationales tendant
vers la réalisation des objectifs fixés, c'est toutefois
« en fonction des moyens respectifs » des Etats.
Ensuite, le terme « moyens respectifs » illustre
avec éloquence les fondements du principe de
« responsabilités communes mais
différenciées » en droit
international de la biodiversité. Tout compte fait, le régime de
financement se veut inefficient puisque d'une part les normes qui le
constituent sont loin d'être contraignantes tandis que d'autre part on ne
peut absolument compter sur la bonne foi des Etats développés en
termes de ressources financières dans le cadre de la réalisation
des objectifs de conservation et d'utilisation durable de la
biodiversité.
Fort de ce qui précède, ne doit-on pas, au
constat de l'insuffisance du cadre normatif régissant la
biodiversité, opter pour la consolidation de la norme conventionnelle y
relative ? Aussi, pour étayer ce point de vue, ne faudra-t-il pas en
démontrer les avantages ? Aussi, tout cela devra-t-il s'inscrire
dans le cadre d'un régime juridique, institutionnel et financier
efficace.
2ème PARTIE : CONSOLIDATION DE LA NORME
RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
La norme conventionnelle relative à la
biodiversité, rappelons-le, repose sur un ensemble d'approches,
de principes juridiques qui, malheureusement, n'ont pas valeur de règles
coutumières. Aussi, cette norme, martelons-le, est-elle
alimentée par les faibles énergies d'actes concertés non
conventionnels - Déclarations, Stratégies, Programmes
d'action, Conférences diplomatiques, Agenda, Chartes - qui sont des
instruments sans portée juridique réelle. C'est à ce titre
que Valentin Y. AMEGANKPOE a avancé « ces instruments
(...) sont généralement considérés comme de simples
engagements politiques »84(*). De plus, affirmons-le avec force, les
traités de protection de la nature dont RAMASAR, BONN, UNESCO, CITES,
BERNE, qui sont censés être pourvus de valeur positive
obligatoire, ne procèdent généralement que d'une approche
utilitariste et ne sont largement assortis que d'obligations de moyen. Enfin,
la Convention sur la Diversité Biologique, instrument
fédérateur des grandes préoccupations relatives à
la biodiversité, l'a-t-on souligné, s'inscrit
pratiquement dans un cadre programmatoire puisque « les
obligations qui sont à la charge de l'Etat le sont toujours dans
la mesure du possible, en fonction des moyens propres à chaque
Etat et selon qu'il conviendra »85(*). L'ensemble de ces
considérations nous a amené au constat d'un cadre normatif
insuffisant, donc, au constat de l'inefficacité de la norme
conventionnelle en droit international de la biodiversité. Ainsi, nous
est-il donné dans le cadre de la seconde partie, de portée
constructive, de proposer le renforcement de la norme conventionnelle,
d'en démontrer les fondements et les avantages (Chapitre I) et d'opter
pour un régime juridique, institutionnel et financier efficace (Chapitre
II).
CHAPITRE I : FONDEMENTS DU RENFORCEMENT DE LA
NORME
Ce serait trop facile, fort de l'insuffisance du cadre
normatif relatif à la diversité biologique, d'opter en
faveur de la consolidation de la norme conventionnelle sans démontrer
les fondements d'une telle proposition. Nous ferons valoir la
nécessité d'une norme juridique régulatrice, capable
d'harmoniser les règles éparses du droit international de la
biodiversité, une norme libre de tout conflit avec les règles du
commerce international et de la propriété intellectuelle, une
norme capable de s'articuler avec les règles transversales, une norme
soutenant le principe de prévention des risques en matière de
biotechnologies, une norme pourvue de valeur obligatoire constante, une norme
susceptible d'applicabilité directe en droit interne, une norme aux
vertus sanctionnatrices (section 1). En outre, nous démontrerons les
avantages de l'affermissement de la norme, ce, dans l'optique d'une meilleure
politique de conservation et d'utilisation de la biodiversité, dans la
logique d'une lutte contre les pollutions et les changements climatiques et
dans la perspective d'une réparation effective des dommages à la
diversité biologique (section 2).
Section 1 : Nécessité d'une norme
régulatrice efficace
Cette section aura pour vertu de justifier
la nécessité de la norme régulatrice tenant compte du fait
que le diagnostic du régime juridique actuel de la biodiversité
fait état d'un cadre normatif hétérogène où
les règles tant connexes que transversales ont une difficulté
d'harmonisation les unes avec les autres. Ainsi, la norme régulatrice
à venir revitalisera-t-elle le droit international de la
biodiversité.
A. Une norme capable d'harmoniser les règles
éparses du droit international de la biodiversité
La Convention sur la Diversité Biologique,
rappelons-le, n'est pas le premier instrument juridique à avoir
traité de la biodiversité. Les conventions de portée
sectorielle - Ramsar, Unesco, Bonn, Cites - avant l'adoption de la
CDB, représentaient le seul cadre formel des discussions
internationales sur la diversité biologique86(*). C'est, en effet, en
raison de leur portée limitée, du constat de leur insuffisance et
de leur hétérogénéité qu'est venue
l'idée de l'élaboration d'une convention de portée non
sectorielle, plutôt globale : la CDB. Néanmoins,
si le but du dit instrument lors de son élaboration était de
consolider l'ensemble de ces règles éparses, sans
articulation réelle, dans un instrument unique, les résultats
attendus n'ont pas été atteints87(*). En réalité, la Convention sur la
Diversité Biologique n'a pas su constituer ce fil conducteur capable de
regrouper dans un cadre commun les conventions sectorielles sus parlées.
Ainsi, il serait exagéré de dire qu'avec la CDB la
société internationale a trouvé les solutions aux
problèmes de préservation de la diversité biologique.
Face à ce problème juridique d'importance
capitale, il nous est donné de proposer, selon les techniques juridiques
applicables en matière de traités-cadres, le renforcement de la
norme conventionnelle relative à la biodiversité. Ce
renforcement, reposant notamment sur l'harmonisation des
règles éparses relatives à la diversité
biologique, devra laisser place à la norme
à venir de jouer un rôle codificateur des principes et des
règles préconisés par les instruments relatifs à la
biodiversité en général et permettre ainsi d'atteindre les
objectifs de conservation, d'utilisation durable de la biodiversité et
de ses éléments.
B. Une norme pouvant s'articuler avec les instruments
de lutte contre les processus affectant la biodiversité
Les doctrinaires reconnaissent une difficulté
d'agencement de la Convention sur la Diversité Biologique avec les
traités de protection de la nature d'une part et avec les instruments de
lutte contre les processus affectant la biodiversité, ceux portant
notamment sur les pollutions, les changements climatiques, la
désertification, d'autre part. A ce propos, Sadeleer écrit
« ... La CDB ne comprend que peu de dispositions relatives aux
liens institutionnels à établir avec les autres traités en
vigueur en matière de conservation et d'utilisation de la
biodiversité »88(*).
Ce problème d'agencement, disons-le, est l'une des
causes de l'inefficacité de la norme conventionnelle dans l'état
actuel du droit international de la biodiversité. Sans une articulation
réelle de la norme conventionnelle avec les règles de lutte
contre les pollutions, les changements climatiques, la désertification,
l'appauvrissement de la couche d'ozone, il sera difficile, voire impossible, de
réaliser les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la
diversité biologique. En effet, la déforestation a
été, entre autres, l'une des causes génératrices de
l'érosion la plus alarmante de la diversité biologique. Aussi,
l'appauvrissement de la couche d'ozone n'a pas été sans incidence
sur les réchauffements climatiques.
En fait, la présentation de ce problème permet
de mieux asseoir la nécessité de parvenir à la
création d'une norme qui pourra s'articuler avec les instruments de
lutte contre les processus affectant la biodiversité. On ne
saurait procéder d'une approche sectorielle en la matière
étant entendu que les domaines respectifs de la conservation de la
biodiversité, de la lutte contre la désertification, de
l'appauvrissement de la couche d'ozone et des changements climatiques sont
à la fois interdépendants, intimement liés et
indivisibles. Ainsi, en plus de leur interpénétration,
requièrent-ils la conception, l'élaboration et la mise en oeuvre
d'une approche globale. Donc, la norme à venir devra pouvoir s'articuler
avec l'ensemble de ces instruments.
C. Une norme devant être compatible avec les
règles du commerce international et de la propriété
intellectuelle
L'état actuel du droit international
général présente une situation de conflit potentiel entre
normes environnementales et normes commerciales. Ceci est dû au fait que
nombre d'Etats ont priorisé leurs intérêts
économiques sur la protection de l'environnement. La politique
commerciale internationale et la politique internationale de l'environnement ne
vont pas de pair. D'ailleurs, le GATT, en son préambule, parait sans
réserve recommander la pleine utilisation des ressources
naturelles. Ceci dénote le peu de souci accordé à la
conservation de la biodiversité. Aujourd'hui, le constat est on ne peut
plus évident : «les règles de l'OMC se trouvent en
situation de force par rapport aux règles destinées à
garantir la conservation de la biodiversité (...)»89(*).
Il existe en effet divers contentieux entre les
règles environnementales, celles relatives à la prévention
des risques en matière de biotechnologies et les accords de l'OMC. Les
règles édictées par l'OMC auraient interdit aux Etats
parties à des accords environnementaux d'adopter des sanctions
commerciales pour forcer des Etats tiers à appliquer des politiques
écologiquement viables. En revanche, la CDB admet que le transfert de
toute technologie faisant objet de brevet ne peut se faire que dans le respect
des droits de la propriété intellectuelle. D'où, une
situation de conflit potentiel entre différentes règles du droit
international général.
Pourtant, la résolution de ces conflits ne va pas sans
incidences sur la règle environnementale. Car, au nom du principe
``lex posterior derogat'', certains accords environnementaux, pour
être antérieurs à l'accord instituant l'OMC, ne peuvent
aucunement y déroger. D'où la préséance relative
des normes commerciales sur les normes environnementales. On conviendra, alors,
que ce mode de règlement va à l'encontre des principes du
développement durable, de la préservation du patrimoine commun et
du droit des générations futures à un environnement de
qualité.
Ces considérations nous amènent, dans la
perspective du renforcement de la règle environnementale,
à proposer une norme qui soit compatible avec les règles
du commerce international et de la propriété
intellectuelle, du moins, une norme non susceptible d'être
évincée par des règles parallèles. Aussi, face
à ce problème, doit-on soutenir l'application du principe
de précaution, socle de tant de mesures unilatérales
prises par les Etats, lesquelles mesures, en vue de protéger les
espèces et les écosystèmes, vont jusqu'à interdire
certaines importations. L'affaire du boeuf aux hormones90(*) en est l'illustration la
plus éloquente.
D. Une norme pourvue de valeur obligatoire
constante
Les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la
biodiversité sont trop importants pour ne pas y greffer une obligation
de résultat. L'on doit comprendre mal que le droit international de
l'environnement relève de la prospective plutôt que du droit
positif. Il devra cesser d'être le domaine privilégié de la
soft Law tenant surtout compte du fait que les obligations molles ne peuvent
aucunement constituer un frein aux politiques écocides que bien
de sociétés, industrielles et commerciales, guidées
par de pâles intérêts économiques, appliquent
partout dans le monde. Il est effectivement temps que l'on ne subordonne plus
la protection des espèces, des espaces, des écosystèmes
aux intérêts de l'homme. Les philosophies utilitariste et
anthropocentriste n'ont presque plus leur raison de citer face à
l'extinction des espèces, la destruction des terres et des habitats, la
désertification, les pollutions, les changements climatiques, bref, face
à l'érosion alarmante de la biodiversité. La conscience
universelle - on ne peut plus bouleversée et choquée -
parait réclamer à corps et à cri la consécration
par le droit positif du principe de « l'égalité
des espèces face à la vie ».
Toutefois, l'état actuel du droit
international de la biodiversité, en termes d'obligations souscrites par
les Etats et par les acteurs concernés, ne semble pas prescrire des
solutions à moyen terme, encore moins à court terme. La
radiographie du régime juridique relatif à la biodiversité
nous a offert le constat d'un cadre normatif assorti d'obligations molles,
générales et peu contraignantes. Il nous a concrètement
été donné de remarquer que si « les Etats
s'engagent », ils ne le font néanmoins que
« dans la mesure du possible », « en fonction
de leurs moyens respectifs » et « selon qu'il
conviendra ». Il ne s'agit ici que d'une double obligation de
comportement et de moyens et non de résultats, d'où la cause
essentielle de l'inefficacité de la norme conventionnelle relative
à la diversité biologique.
Fort de cela, il nous est impérieux, toujours dans
l'optique du renforcement de la règle environnementale, d'opter pour
une norme conventionnelle pourvue de valeur obligatoire
constante en ce sens que les Etats ne s'efforceront plus mais seront
tenus de la double obligation de résultat d'une part et de
résultat écologique d'autre part.
E. Une norme ayant rang de règle
impérative
Il nous a été donné plus haut de
constater la préséance accordée en droit international
général aux règles commerciales et de la
propriété intellectuelle sur la règle environnementale en
cas de conflit normatif. Si d'un côté la raison de la
primauté de la règle commerciale peut être d'ordre
subjectif, voire pauvre, puisque déterminée par des
intérêts économiques, de l'autre, elle peut être de
nature objective en ce sens que la résolution du conflit de normes
s'opère à la lumière de la Convention de Vienne sur le
droit des traités suivant le principe ``Lex posterior
derogat''. Dans les deux cas la norme environnementale destinée
à protéger la biodiversité est évincée par
la règle commerciale qui ne vise que l'enrichissement des acteurs par
application d'une politique écologiquement non viable. Or, il est
écrit dans la Déclaration de Rio : « la
protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus
de développement et ne peut être considéré
isolément »91(*). Ce fut d'ailleurs en référence
à ce principe que le Canada, dans l'affaire de la fonderie de Trail,
s'est vu imputé la responsabilité de dommage
transfrontière.92(*) Cependant, il ne s'agit que d'un principe et non
d'une obligation. Ainsi, dépendamment du juge appréciateur, il
pourra être écarté.
La valeur relative de ce principe pourtant
consacré par des conventions internationales traduit
l'inefficacité de la norme, par surcroit, l'inefficience du
régime juridique de la biodiversité. Ainsi,
s'avère-t-il nécessaire de renforcer la norme existante
en lui attribuant la valeur d'une règle de droit
impérative. Il s'agira alors d'une norme essentiellement
protectrice de la biodiversité puisque nulle règle
antérieure ou postérieure ne pourra y déroger. Elle
s'imposera alors à tous les Etats puisqu'également elle aura le
rang d'une coutume instantanée, donc, universellement acceptée
comme étant le droit. De plus, il sera utile pour la consolidation du
caractère impératif de la norme qu'elle soit d'application
immédiate et qu'on n'admette de réserve d'aucun Etat s'agissant
du protocole qui la fera naitre. Ainsi, on protègera l'essence de la
norme et par extension le coeur de la diversité biologique.
F. Une norme d'applicabilité directe en droit
interne
L'adoption en tout domaine d'une convention internationale
traduit objectivement la volonté manifeste de la Société
internationale d'appréhender un problème qui va au-delà
des compétences nationales étatiques. En revanche, la
ratification de toute convention, notamment dans le domaine de la
diversité biologique, révèle l'engagement de l'Etat
d'introduire dans son système normatif la norme conventionnelle et
d'instituer des mécanismes de mise en oeuvre de ladite norme. Ces
mécanismes, toutefois, varient d'un espace à un autre
dépendamment des priorités gouvernementales en matière de
politiques publiques ou selon que l'Etat entend lutter efficacement ou non
contre les processus affectant la diversité biologique. Ainsi, la norme,
selon l'ordonnancement juridique de l'Etat en question, s'introduit en droit
interne par une procédure particulière et peut être soit
d'application immédiate ou d'application progressive. D'où,
l'institution d'une machine à deux vitesses susceptible de produire des
effets différents et capable de relativiser les résultats
attendus dans le cadre de l'application de la convention internationale sur le
territoire des Etats partie.
Il se pose alors la question de l'applicabilité
directe ou progressive de la norme conventionnelle introduite en droit interne.
Or, l'application progressive de la norme a des incidences à court,
à moyen et même à long terme sur les objectifs de
conservation et d'utilisation durable de la biodiversité. En effet, si
la norme n'est pas d'application directe en ce sens que le citoyen et les
Organisations de la Société civile pourront en demander
l'application immédiate par devant le juge national on ne peut
absolument conclure à l'efficacité de la convention. Aussi, ne
pourra-t-on parler de démocratie environnementale consistant à la
participation des citoyens au processus décisionnel et en l'exercice
d'un droit de recours efficace pour dommage écologique.
Par ailleurs, si le problème de l'applicabilité
directe de la norme conventionnelle est dû en aval à la nature des
mécanismes institués en droit interne, mécanismes
consistant notamment à l'exigence d'un texte d'application, en
amont, une analyse des obligations prescrites nous a
révélé l'existence d'un problème à la
source. En effet, les conventions de droit de l'environnement ne semblent pas
être auto-exécutoires puisqu'elles comportent des dispositions
programmes, qu'elles édictent des obligations de comportement, de moyens
et des responsabilités certes communes mais
différenciées. Si le principe de
«responsabilités communes mais
différenciées» parait fondé vu que tous les
Etats ne disposent pas de moyens économiques, de capacités
techniques et technologiques similaires, toutefois l'édiction des
obligations de comportement dans les conventions révèle la
volonté expresse du législateur international de circonscrire
l'environnement, la biodiversité en particulier, dans le domaine de la
prospective. Autant de problèmes qui traduisent l'inefficacité,
l'inefficience et l'insuffisance du cadre normatif actuel.
Fort de ces considérations et
analyses, nous estimons nécessaire de repenser en amont,
à l'échelle internationale, le processus de
création de la norme en la faisant assortir d'obligations de
résultat et en aval, en droit interne, de refaire les mécanismes
de mise en oeuvre. Ainsi, en vue de l'application de la convention sur le
territoire des Etats partie, il ne sera question d'aucun texte d'application,
ni d'aucune mesure d'exécution complémentaire. D'où les
fondements de l'applicabilité directe de la norme conventionnelle
à édicter en matière de diversité biologique.
G. Une norme aux vertus sanctionnatrices
Nous avons souligné plus haut, ceci, avec peine,
l'absence du principe pollueur-payeur et de la responsabilité pour
dommage écologique du nombre des principes régissant et
structurant le droit international de la biodiversité. Aussi, en
avons-nous démontré les conséquences fâcheuses d'une
telle omission sur l'effectivité de la norme conventionnelle
puisqu'aucune juridiction internationale ou nationale n'a encore
sanctionné la responsabilité des Etats pour dommages à la
biodiversité93(*).
Ainsi, importe-t-il de remédier à de
telles failles et faiblesses en édictant aux termes d'un
protocole additionnel à la Convention sur la Diversité Biologique
une norme aux vertus sanctionnatrices, donc, susceptibles de faire
réparer par les Etats les graves dommages qu'ils ont causés
à la diversité biologique.
Section 2 : Les avantages de l'affermissement de la
norme
L'affermissement de la norme conventionnelle
relative à la diversité biologique parait se vouloir la condition
essentielle pour la pleine réalisation des objectifs poursuivis par la
Société internationale aux termes de la Convention sur la
Diversité Biologique. Cette solution, sans être la
panacée, sera source de grands avantages en matière de
conservation des ressources de la biosphère, en matière
d'utilisation durable de la biodiversité et dans le cadre d'une vraie
lutte contre les processus affectant la diversité biologique. De plus,
aura-t-elle la vertu de conférer au droit international de la
biodiversité ce qui lui manquait depuis longtemps et qui marquerait son
efficacité, son caractère impérativement
sanctionnateur.
A. Une meilleure conservation des
ressources
Il nous a été donné de constater que les
obligations fondamentales, en matière de conversation des ressources,
prescrites par la Convention sur la Diversité Biologique sont
formulées en des termes éminemment «souples».
D'autant plus que la définition juridique de la notion se fait dans le
préambule, ce qui de plus laisse croire que ces obligations sont
à la fois générales et molles et ne sauraient en
conséquence obliger impérativement les Etats à appliquer
des politiques concrètes, viables et rationnelles, telles celles qui
renvoient aux mesures de conservation in et ex situ des
écosystèmes et habitats naturels respectivement dans leur milieu
naturel et en dehors de ce milieu. Ainsi, l'affermissement de la norme
conventionnelle génèrera de grands avantages.
Cette solution permettra effectivement une meilleure
conservation des ressources. Car, aux termes de la norme à
édicter les obligations de conservation à la charge de l'Etat
ne le seront plus ni « dans la mesure du possible », ni
« selon qu'il conviendra ». Il sera alors question
d'une obligation de résultat en termes de maintien et de reconstitution
de populations viables d'espèces tant dans leur milieu naturel qu'en
dehors de ce milieu. Il est pourtant souhaitable qu'à cette mesure
d'affermissement on adjoigne l'obligation formelle d'assistance
financière en faveur des pays en développement tenant
compte des coûts qu'impliquent la conception, l'élaboration et la
mise en oeuvre de toute stratégie de conservation.
B. Une utilisation durable et concrète de la
biodiversité
C'est par l'affermissement de la norme conventionnelle que
l'on pourra parvenir non seulement à une utilisation
«durable» mais aussi
«concrète» de la diversité biologique
et de ses éléments. On s'accordera certainement à
reconnaitre que la Convention de 1992 conçoit l'utilisation de la
biodiversité d'une manière et à un rythme qui ne soit pas
capable d'entrainer l'appauvrissement des ressources. Nous sommes
aussi d'accord que les mesures générales y relatives, prescrites
par l'article 6, sont viables puisqu'elles impliquent l'intégration de
l'utilisation durable de la biodiversité dans des politiques
sectorielles ou intersectorielles pertinentes. En outre, nous admettrons que
les études d'impacts et de réduction des effets nocifs,
prévus à l'article 14, font la beauté de
l'instrument conventionnel puisque de tels mécanismes sont à
même de prévenir de grands dommages à la
biodiversité. En revanche, dirons-nous sans réserves,
en raison du caractère programmatoire de la
norme, que ces mesures prescrivent certes une
utilisation durable, mais non concrète
de la diversité biologique.
Encore une fois, ces analyses justifient la portée de
notre position en faveur de l'affermissement de la norme relative à la
biodiversité. Il faut en effet se défaire du caractère
général de la norme telle que conçue par la Convention de
1992. Il va falloir, par l'adoption d'un protocole y relatif, accorder un fort
degré de normativité à l'obligation portant sur
l'utilisation durable de la diversité biologique. Ainsi, on parviendra
à une règle concrète qui
aura marqué l'efficacité du cadre juridique relatif
à la matière.
C. Un outil efficace contre les processus affectant la
biodiversité
L'objectif consistant en l'affermissement de la norme
conventionnelle ne pourra être atteint que si l'on tient compte de
l'articulation de ladite norme avec les règles transversales du droit de
l'environnement et surtout du degré de
normativité des instruments de lutte contre les processus affectant la
biodiversité, étant entendu que les règles existantes ont
une valeur non obligatoire. On doit en effet concevoir un cadre normatif qui
soit capable de lutter contre la désertification, la pollution des
écosystèmes, l'extinction des espèces, la destruction de
l'ozone et le réchauffement climatique.
1. La lutte contre la désertification et
l'extinction des espèces
La désertification est, entre autres,
considérée comme l'une des causes génératrices de
l'érosion alarmante de la diversité biologique. Ce
phénomène met directement en cause les espaces
écologiques, constituées notamment en zones forestières.
La désertification est notamment liée au traitement que l'on
impose aux sols dans les régions habitées par des gens de
conditions de vie précaires. Les activités humaines
exercées dans ces zones ne sont pas écologiquement viables -
déboisements sauvages, défrichements anarchiques, incendies
intempestifs. Autant de facteurs révélateurs d'une
destruction sans bornes de la nature, des écosystèmes et des
ressources. Aussi, faut-il noter que ces processus qui affectent la
biodiversité ne sont pas sans conséquences sur la destruction des
habitats, la migration, la raréfaction, voire, l'extinction des
espèces. L'humanité, toutefois, assiste, impuissante, à
cette vaste érosion de la diversité biologique. Impuissante,
disons-nous, en ce que selon Jean Marie BRETON « aucun
des instruments internationaux actuellement disponible n'apparait juridiquement
suffisant pour satisfaire de manière optimale à l'objectif de
contrôle de la dégradation et de conservation des
sols »94(*).
Toujours est-il que le problème de l'insuffisance du
cadre normatif en matière de conservation de la biodiversité se
pose. Ce cadre juridique réfère à des instruments de soft
Law, insusceptibles d'obliger les Etats (Déclarations de Stockholm
& de Rio, l'Agenda 21, la Charte mondiale des Sols, la Stratégie
mondiale de la Conservation, etc.). De plus, le régime commun
du droit international de l'environnement incluant des instruments
à valeur positive - la Convention de lutte contre la
Désertification, la Convention sur les changements climatiques, le
Protocole de Kyoto - est inapte à répondre aux principaux
besoins en matière de législation environnementale envers les
sols95(*). Cela
se doit, poursuit BRETON, à l'insuffisance des instruments à
valeur obligatoire existant puisqu'ils n'édictent nulle disposition
capable d'assurer la protection, la conservation et un usage durable des
sols.
Ces analyses et considérations remettent en question le
cadre juridique afférent à la conservation et à
l'utilisation durable de la biodiversité. Elles justifient
d'ailleurs notre position quant à l'affermissement de la norme
conventionnelle relative à la matière. On ne saurait
procéder d'une approche sectorielle qui ne tiendrait pas compte de
l'articulation de la norme conventionnelle de référence avec les
règles éparses du droit international de la biodiversité
et avec les règles transversales du droit international de
l'environnement en général. On ne saurait pas ne pas envisager la
création d'une norme codificatrice. « Conservation de la
diversité biologique » et « lutte contre la
désertification » sont des domaines interdépendants,
intimement liés et indivisibles. Ainsi,
l'hétérogénéité du cadre juridique est un
problème majeur dont la solution dépend de l'affermissement de la
norme de référence et de l'articulation de celle-ci avec les
autres instruments du droit international de l'environnement.
2. La lutte contre la pollution des
écosystèmes et les changements climatiques
L'analyse de la question des pollutions révèle
des problèmes à deux niveaux : l'atmosphère, le
milieu marin. La pollution atmosphérique, selon ARBOUR,
réfère aux problèmes à l'origine de la
destruction de la couche d'ozone, de l'effet de serre, aux
problèmes liés au smog photochimique et aux pluies
acides96(*).
Pourtant, cette forme de pollution résulte généralement
des activités de l'homme. Par leur portée nocive, celles-ci
mettent en danger la santé humaine et sont susceptibles de
détruire les écosystèmes, de provoquer le
dépérissement des espèces et d'endommager les ressources
de la biosphère. Le milieu marin, d'autre part, est utilisé par
l'homme comme un dépotoir incommensurable capable d'absorber tous les
déchets de quelque provenance que ce soit. A ce propos, il est
rapporté que des millions de tonnes de déchets de toute nature,
constitués de résidus de fumiers et
d'engrais, d'eaux usées, de pesticides, d'herbicides, de fongicides,
drainés par les fleuves et les rivières et provenant
notamment d'activités industrielles et de transports, sont jetés
dans les mers et constituent à ce jour la plus grande source de
pollution du milieu marin97(*).
Rappelons que ces processus affectent non
seulement la diversité écologique terrestre mais aussi la
biodiversité marine. En effet, lit-on dans le préambule du
Protocole d'Helsinki de 1985, « des dommages sévères
sont causés aux ressources naturelles d'importance vitale pour
l'environnement et l'économie comme les forêts, les sols, les
eaux ». Aussi, a-t-il été prouvé que la
combustion du charbon en Europe et en Asie a provoqué des
retombées jusqu'en Arctique et est à l'origine de la brume
arctique »98(*). Les écosystèmes
marins d'un autre côté se trouvent gravement affectés par
l'effet des pollutions dues au trafic de déchets dangereux. Le
désastre de Seveso en est la grande illustration. Ainsi, les
espèces et écosystèmes terrestres et marins risques de
disparaitre par le fait d'une si vaste pollution. Aussi,
la Terre risque-t-elle de connaitre un réchauffement de nature
à faire fondre les glaces des régions polaires. Autant
de dangers et de dommages que, malheureusement, le cadre juridique actuel
ne permet pas de prévenir suffisamment et de réparer
concrètement.
La refonte du régime juridique de la CDB et de toute
règle transversale aura conforté le processus de l'affermissement
de la norme. S'agissant des instruments transversaux, disons à titre
d'exemple que si la Convention de 1979 sur la pollution
atmosphérique transfrontière à longue distance vise
à réduire et à limiter la pollution atmosphérique,
néanmoins, celle-ci n'assigne aux Etats qu'une obligation de
comportement puisqu'il leur est demandé de
« s'efforcer de limiter et autant que
possible » de telles pollutions. Par ailleurs, si la
Convention des Nations Unies sur le droit de la mer prescrit en son article 192
l'obligation générale de protection et de préservation du
milieu marin, un tel principe ne peut toutefois être mis en oeuvre qu'en
recourant à des mesures législatives nationales efficaces. Donc,
autant de facteurs qui montrent que le renforcement de la norme se veut un
instrument efficace de lutte contre les processus affectant la diversité
biologique en général.
CHAPITRE II : VERS UN REGIME JURIDIQUE,
INSTITUTIONNEL ET FINANCIER EFFICACE
La biodiversité est le poumon de l'humanité. A
ce titre, le régime juridique qui la définit et les
mécanismes institutionnels qui la confortent doivent absolument
être efficaces. Ce régime ne peut reposer que sur des approches et
principes juridiques efficients. Les principes généraux qui
l'alimentent doivent être élevés au rang de règles
coutumières internationales. Aussi, la norme conventionnelle y relative
se devra-t-elle être susceptible d'effectivité. Il est
désormais impérieux que l'on n'inscrive plus ladite norme dans un
cadre juridique programmatoire et sans valeur obligatoire réelle. Les
engagements pris par les Etats en ce qui concerne la conservation et
l'utilisation durable de la diversité biologique doivent aller au
delà de simples engagements politiques. Aux approches utilitaristes et
anthropocentriques, on va devoir substituer les approches
intégrées, socle fondamental du développement durable.
Partant de la radiographie de la norme conventionnelle existante et du constat
de son inefficacité, nous optons pour un régime juridique,
institutionnel et financier efficace. Ainsi, nous sera-t-il donné de
définir les conditions du renforcement du cadre juridique (section 1) et
celles du cadre institutionnel et financier (section 2).
Section 1 : Renforcement du régime juridique et
juridictionnel existant
Le Professeur Claude Imperiali pose la
question de l'effectivité des Conventions internationales comme une des
« préoccupations essentielles actuelles de la
doctrine »99(*). Comment s'attendre en effet à ce que les
objectifs de conservation et d'utilisation de la diversité biologique
soient réalisés si la norme conventionnelle ne peut être
appliquée, du moins, n'est pas susceptible d'effectivité ?
Voilà une question cruciale à laquelle nous allons
répondre dans la présente section. A ce propos, nous traiterons
de la nécessité d'un cadre juridique anticipatif et
sanctionnateur (A) et de l'utilité d'un recours international en la
matière (B).
A. Un cadre juridique anticipatif et
sanctionnateur
Le cadre juridique susceptible d'efficacité sera
anticipatif en ce sens qu'il s'articulera inconditionnellement et
fondamentalement autour des principes de prévention et de
précaution. Ainsi, va-t-il falloir redéfinir ces
principes et les mesurer à l'aune du droit de la responsabilité
pour dommage écologique. Ce cadre sera également sanctionnateur
puisque, par la redéfinition du droit de la responsabilité pour
dommage écologique, aucun brevet d'impunité ne sera
accordé aux pollueurs et ces derniers tomberont certainement sous le
coup de l'application de règles obligatoires et contraignantes. Aussi,
le contrôle de la mise en oeuvre de ces règles justifiera-t-il
l'efficacité du cadre juridique à élaborer.
1. Redéfinition des principes de
prévention et de précaution
Les principes de prévention et de
précaution, tels que conçus et
« juridicifiés » en droit international de
l'environnement sont, comme tous les autres principes,
dénués d'effectivité. Ils relèvent en grande partie
d'instruments non conventionnels sans portée juridique réelle.
Rappelons que le doctrinaire AMEGANKPOE les a qualifiés de
« produits d'une morale écologique (...) ayant un rang de
simples engagements politiques »100(*). Rappelons également
que si, en revanche, ces principes ont été consacrés dans
des conventions, il ne s'agit néanmoins que de Conventions à
caractère programmatoire qui ne relèvent que de la
prospective. Ainsi, va-t-il falloir redéfinir l'enveloppe qui contient
les principes de prévention et de précaution, à savoir
le moule conventionnel, élever ces principes au rang de
règles à valeur positive, et oeuvrer finalement à leur
reconnaissance sur le plan international comme normes impératives ayant
au moins rang de règles coutumières internationales, donc,
contraignantes et insusceptibles de dérogations. Ainsi, par la
redéfinition et la mise en oeuvre des principes de prévention et
de précaution on évitera tant de dommages à la
diversité biologique peu importe que le risque encouru soit connu et
certain, d'une part, non encore identifié ou incertain d'autre part.
2. Redéfinition du principe de la
responsabilité pour dommage écologique
La radiographie de la Convention sur la Diversité
Biologique nous a permis de noter l'absence des principes
« pollueur-payeur » et de la « responsabilité
pour dommage écologique » dans cet instrument de
référence universelle et de portée globale. Rappelons
à ce propos qu'un grand doctrinaire a écrit
« concernant la responsabilité et la réparation des
dommages causés à la diversité biologique, la CDB est
particulièrement floue et ne prévoit aucune obligation même
conditionnelle »101(*). L'omission de cette balise dissuasive ne va
pas pourtant sans conséquence sur le système normatif en
général. Il serait illusoire de s'attendre au respect des
obligations souscrites, à la réalisation des objectifs
poursuivis, au rendement d'un système en termes de prévention et
de réparation des dommages à la biodiversité si le
caractère sanctionnateur de la norme fait défaut. L'état
actuel du droit international de la biodiversité en appelle à une
réforme substantielle.
Ainsi, le cadre juridique à
définir devra inclure les principes fondamentaux du droit international
de l'environnement, notamment celui de la responsabilité pour dommage
écologique. Ce principe, par son caractère sanctionnateur,
dissuadera les acteurs à ne pas causer de dommages
transfrontières et préviendra, par la menace qu'il aura brandie,
toute atteinte à la diversité biologique. Sa redéfinition,
non en termes conditionnels, contribuera à rendre efficace le
régime juridique à définir. Ainsi, on sauvegardera la
santé humaine, on préservera les écosystèmes, on
luttera contre les pollutions d'origine diverse. On conservera de
manière durable la biodiversité.
3. Ediction de règles obligatoires et
contraignantes
Ici, nous ne voulons que rappeler la nécessité
d'élaborer une règle impérative, qui ne sera pas pure
expression de la soft Law, ni ne relèvera de conventions à
caractère programmatoire, une règle qui ne sera pas
supplantée par les règles du Commerce international et de la
propriété intellectuelle ou par toute autre règle
transversale en cas de conflit. Une règle dure et favorable au
développement durable.
4. Redéfinition du principe de
coopération
Rappelons que le principe de coopération
semble aujourd'hui acquérir la valeur d'une règle
coutumière puisque « consacrée formellement par
l'ordonnance relative à l'affaire de l'usine Mox »102(*) et figurée dans
nombre d'instruments conventionnels. Ce principe, soulignons-le,
implique une obligation conjointe et solidaire pour les Etats
d'oeuvrer à la réalisation des objectifs de protection globale de
l'environnement. C'est à cet égard que la Convention-cadre des
Nations Unies sur les changements climatiques a souligné
qu' «en raison du caractère planétaire des
changements climatiques les Etats ont le devoir de coopérer et de
participer à une action internationale, efficace et
appropriée»103(*). «Une action
internationale efficace», voilà un but qui parait
pourtant hors d'atteinte à cause de certains enjeux économiques,
à cause de l'inefficience du cadre normatif et surtout du
caractère imperméable de la souveraineté des Etats.
Nous avons plus haut démontré que le cadre
normatif régissant la diversité biologique souffre d'une grande
insuffisance et qu'en raison de l'effacement du principe de la
responsabilité pour dommage écologique un brevet
d'impunité a été accordé aux pollueurs. Pourquoi,
nous avions proposé le renforcement du cadre juridique et juridictionnel
existant, notamment par l'édiction de règles capables de
dissuader les Etats à oeuvrer à la protection de l'environnement.
Toutefois, ces normes ne seront que des lettres mortes et la conservation de la
biodiversité un leurre si on ne fonde pas la coopération
internationale sur l'intérêt supérieur de
l'humanité.
Il est en effet sans conteste que le droit international de
l'environnement relève du consensualisme. Ainsi, vu l'inefficience du
cadre normatif et l'absence d'une juridiction obligatoire, on ne peut rien
attendre des modes de règlement des différends. Or, par crainte
d'être mis sur la sellette, les Etats hésiteront à s'ouvrir
au processus de refonte du régime juridique. On ne peut alors que les
convier à ce sursaut et trouver un consensus autour de
l'effectivité de la norme pour une meilleure conservation de la
biodiversité. A ce titre, la redéfinition du principe de
coopération parait la panacée.
B. Institution de mécanismes de
recours
La question de l'utilité du recours international en
droit de l'environnement a préoccupé plus d'un doctrinaire. A ce
propos, IMPERIALI écrit « Le contentieux international
serait conçu comme un moyen d'obtenir le respect des obligations
conventionnelles, la conformité du comportement des Etats aux
engagements pris »104(*). A notre avis, il s'avère
impérieux d'instituer formellement des voies internationales de recours
tant pour les Etats que pour les acteurs non étatiques. Aussi, va-t-il
falloir définir le recours étatique et celui offert aux autres
acteurs du droit de l'environnement.
1. Les juridictions internationales de droit de
l'environnement
Il importe à ce stade de souligner le rôle
joué par les organes conventionnels - Secrétariats,
Conférences des Parties, Conseils scientifiques - dans la mise en
oeuvre des traités. Ils apprécient les plaintes et prennent des
mesures à l'encontre des Etats contrevenants. A ce titre, ces organes
semblent s'attribuer des fonctions juridictionnelles. Faut-il également
rappeler qu'aux termes de la Convention de Bâle, les parties ont
accepté la compétence de la Cour Internationale de
Justice ou d'une juridiction arbitrale en cas de litige
d'interprétation ou de non-conformité au traité. Aussi, la
Convention de Montego Bay a-t-elle institué le Tribunal
international du droit de la mer dans le cadre du règlement de
différends. Autant d'exemples qui traduisent la tendance actuelle vers
l'institution de juridictions internationales de recours.
En fait, le recours
international parait nécessaire. Il se justifie également par
l'inefficacité des voies nationales de recours. A ce propos, IMPERIALI
écrit « la voie internationale est apparue utile puisqu'en
cas de difficultés d'interprétation et d'application des
Conventions, les voies de recours nationales étaient fort diverses,
inégales et n'assuraient pas une pleine efficacité aux
dispositions en cause105(*). En revanche devra-t-on penser à une
juridiction universelle puisque le foisonnement de juridictions
conventionnelles pourra davantage alourdir le cadre institutionnel
existant ?
2. Le recours étatique
La procédure de non-conformité instituée
par le Protocole de Montréal de 1987 est un exemple typique du recours
interétatique. Il s'agit en fait d'un « suivi du respect des
engagements internationaux » selon lequel « toute
partie qui suspecte un non respect de ses obligations par une autre partie peut
formuler ses griefs auprès du Secrétariat de la Convention qui en
saisit un Comité de mise en oeuvre »106(*). Ce comité
procède à l'examen de l'affaire, envisage tout règlement
amiable, saisit la Conférence des Parties qui décide des mesures
à prendre à l'encontre de l'Etat contrevenant.
A ce propos, la Commission du Développement Durable,
lors de sa 4ème session en 1996, a défini des
modalités pour un suivi efficace du respect des engagements
internationaux. A ce titre, il a
été établi l'obligation pour les Etats de se soumettre
à un contrôle collectif de conformité, le devoir de
communiquer l'information utile, d'admettre la vérification et
l'inspection, de favoriser la mise en oeuvre de procédures de
surveillance multilatérales107(*). Aujourd'hui, la convention sur les changements
climatiques (1992), celle sur les armes chimiques (1992), celle de New-York de
1995 sur la conservation des poissons chevauchants, admettent la
procédure de non-conformité. Voilà, un
contrôle - d'orientation plutôt que de sanction - qu'il
conviendra de renforcer et d'intégrer dans les conventions de
droit de l'environnement.
Si ce contrôle est d'orientation en ce qu'il fait appel
aux méthodes souples de résolution des conflits - discussion,
négociation - des sanctions sont pourtant possibles. Elles peuvent
être juridiques en ce qui a trait à la suppression des droits et
prérogatives de l'Etat défaillant au sein de la communauté
conventionnelle ou matérielles en ce qu'elles entrainent le retrait des
avantages techniques et financiers du traité. Ces mesures sont
dissuasives. Selon IMPERIALI, ces éléments illustrent
comment la procédure de non compliance peut être
un élément pivot d'un contrôle international
renforcé de la mise en oeuvre des conventions sur
l'environnement108(*).
3. Le recours des acteurs non
étatiques
Si la participation des citoyens au choix et aux
décisions est dite consubstantielle au développement
durable109(*), il
s'avère nécessaire, outre l'accès aux tribunaux
nationaux, de leur ouvrir des voies internationales de recours, ce, pour
une meilleure protection de la diversité biologique et de
l'environnement en général. Ainsi, comme en droit international
des droits de l'homme, les grands groupes sociaux - les femmes, les jeunes,
les populations autochtones, les travailleurs, les syndicats, les agriculteurs,
les communautés scientifiques et techniques - pourvu qu'on leur
reconnaisse la personnalité juridique et la capacité d'agir sur
le plan international, pourront saisir les juridictions internationales du
droit de l'environnement. A ce titre, les acteurs non étatiques auront
comme les Etats la qualité de sujets de droit international de
l'environnement et s'en prévaudront contre tous Etats violateurs des
normes et qui, comme de violents prédateurs, causeront de graves
dommages à la biodiversité.
Nous avons pris la précaution de parler de
« groupes sociaux » au lieu de nous référer
à « l'individu » en ce qui concerne la
qualité de sujets de droit international de l'environnement pour des
raisons précises. D'abord, dans le cadre de l'information, la
participation et l'évaluation environnementale, les principaux
instruments juridiques relatifs à la matière - Action 21,
Déclaration de Rio, Convention d'Aarhus - en parlant du
« public », réfère à un ensemble de
citoyens et non à un individu. Ensuite, le droit à un
environnement sain, fondement de la qualité de sujets de droit
international à accorder aux acteurs non étatiques, est un
droit de solidarité en ce qu'il traduirait une conception de la vie en
communauté et ne pourrait à ce titre être
réalisé que par la conjonction des efforts de tous les
partenaires sociaux110(*). Tout compte fait, l'accès des acteurs
non étatiques aux juridictions internationales confortera ce que Prieur
appelle la démocratie environnementale et participera de
l'effectivité de la norme conventionnelle.
Section 2 : Renforcement des mécanismes
institutionnels et financiers
Le renforcement du système
institutionnel et financier aura permis de combler davantage les insuffisances
du cadre juridique et concouru réellement à l'effectivité
de la norme conventionnelle. A cet effet, les Organisations et Institutions
internationales du droit de l'environnement ont multiplié les
mécanismes d'incitation et de contrôle, ce, en vue de pallier la
« mollesse » des principes et des méthodes de
résolutions des différends111(*). A cette fin, l'aura-t-on constaté,
il a même été institué un droit à
l'aide multilatérale pour la mise en oeuvre du traité, lié
au respect des obligations contractées et notamment celles relatives au
contrôle avec les conséquences qui en découlent112(*). En dépit de
tout, ces mécanismes demeurent lourds, inefficients et sans
efficacité. D'où, la nécessité d'une
restructuration en profondeur dans ce domaine.
A. Restructuration du mécanisme
institutionnel
Le réseau institutionnel, tel que conçu en droit
international de l'environnement, est à la fois dense et complexe.
Dense, car ce cadre institutionnel s'opère par de
multiples recours à des mécanismes de
protection, de surveillance, de contrôle,
d'incitation, de négociation continue, de coordination et de suivi.
En effet, en plus des structures préexistantes sur les plans
universel et régional (PNUE, FEM, CDD, ALENA, BERD, etc.), il a
été établi des mécanismes de suivi propres aux
conventions, aux conventions-cadres et aux protocoles y afférents.
Complexe, car chaque avancée normative est
régulièrement conditionnée par la création
d'organismes spécifiques qui ne sont pas à même de pouvoir
contraindre et sanctionner les acteurs « puisque
généralement dépourvus de pouvoirs de commandement ou de
décisions »113(*). Complexe, disons-nous, en ce que
cette nébuleuse, créatrice d'un enroulement
institutionnel, impliquera certainement «un problème de
moyens devant permettre à ces Organes de fonctionner et de remplir leurs
missions respectives»114(*).
Ainsi, à cause de ces structures lourdes dont fait
objet le réseau institutionnel mondial, il se justifie la
solution consistant en la restructuration de tels mécanismes. Il va
falloir à cet effet alléger le fonctionnement du système
sans que ne puissent dans leur essence s'en trouver affectées les
structures préexistantes, tels le Programme des Nations-Unies pour
l'Environnement (PNUE), le Fonds International pour l'Environnement Mondial
(FEM), la Commission du Développement Durable (CDD), la Commission de
Coopération Environnementale/ALENA, le Comité pour
l'Environnement/OCDE. A noter que ces Institutions, gardiennes du
droit international de l'environnement, en dehors du
modèle conventionnel triptyque (Conférence des Parties,
Secrétariat Permanent, Conseil scientifique ou technique), se
voient attribuer des fonctions de contrôle dans le cadre de l'application
des traités qui n'ont pas prévu dans leurs dispositions des
mécanismes de mise en oeuvre. Rappelons notamment que la mission des
Institutions à vocation universelle consiste à
« Assurer la coordination la plus efficace entre les Programmes
des nations Unies en matière d'environnement »115(*). A ce titre,
l'allègement de telles structures doit être sans préjudices
à leurs missions fondamentales, essentielles et premières.
En toute logique, il parait inconcevable, en plus des
Institutions préexistantes sur les plans universel et
régional, en plus des Organes créés par les
traités-cadre, que chaque protocole relatif auxdits traités
institue respectivement une Conférence des parties, ce qui est facteur
d'un éclatement institutionnel. A ce propos, la Convention de Bonn sur
la conservation des espèces migratrices dispose en son article 5
« chaque accord devrait (...) établir si nécessaire
les mécanismes institutionnels appropriés pour aider à la
mise en oeuvre de l'Accord, en surveiller l'efficacité, et
préparer des rapports pour la Conférence des
Parties ». Critiquant ce fait, facteur d'enroulement des
Conférences des Parties établies par la convention-mère
avec celles créées par les protocoles ou accords
spécifiques, Sandrine MALJEAN-DUBOIS écrit «les
Conventions cadres donnent naissance à une pluralité de
Conférences des Parties, sans qu'il y ait forcément de
correspondance entre les Etats qui y sont
représentés»116(*).
Fort de tout cela, nous optons pour une restructuration
intelligible du mécanisme institutionnel. Certes, des raisons pratiques,
fondées notamment sur une logique de spécialisation dans des
domaines distincts, ont été à l'origine de cette
prolifération institutionnelle, néanmoins, celle-ci entraine des
conflits de compétences, ce qui risque de compromettre la
réalisation des objectifs de conservation de la biodiversité. En
fait, ce foisonnement institutionnel révèle l'incohérence
du système conventionnel. Ceci est contraire au principe 25 de la
Déclaration de Stockholm qui assigne aux Etats la mission de
« s'assurer que les Organisations internationales jouent un
rôle coordonné, efficace et dynamique pour la protection de
l'environnement »117(*). C'est en effet à juste titre que
Maljean-Dubois renchérit « la mise en place des
Institutions conventionnelles s'est réalisée au coup par coup, de
manière décentralisée et sans vision d'ensemble, et il est
bien difficile a posteriori de rendre cohérent ce
non-système... »118(*).
En dépit de tout, il faut vraiment, pour
répéter Imperiali, prendre les voies d'une rationalisation
institutionnelle. Celles-ci, exigeant à notre avis non pas une
refonte générale du système mais une restructuration du
mécanisme institutionnel, auront débouché sur une
meilleure coordination entre les Institutions Universelles et régionales
entre elles, sur une meilleure coopération entre les Organes
conventionnels entre eux, donc, sur un meilleur fonctionnement des
systèmes. Tout cela aura concouru à une protection efficace de
l'environnement, de la diversité biologique en particulier.
B. Redéfinition du contrôle de la mise en
oeuvre de la norme conventionnelle
Le chapitre 38 de l'Agenda 21 réfère au
contrôle de l'application de la norme conventionnelle. On ne peut, en
effet, évaluer l'efficacité de la norme, voire son apport au
traitement des problèmes, que par une connaissance des conditions de
mise en oeuvre de l'instrument qui la postule. Ce contrôle requiert aussi
une meilleure connaissance du comportement des Etats à l'égard
des obligations souscrites. On a pu constater que les Etats agissent
« selon qu'il leur convient » et « dans la mesure
du possible », ce qui altère la portée de la
norme et compromet la réalisation des objectifs poursuivis. On a aussi
remarqué que le législateur international, aux termes des
conventions récentes, a institué un contrôle
préventif pour éviter toute violation de la norme, d'en
assurer le respect et la promotion119(*). Il s'agit en fait d'un contrôle
systématique fait par les Organes conventionnels dont les techniques et
procédures s'inscrivent largement dans un système de rapports, un
système insuffisant et insusceptible d'obliger les Etats à
respecter leurs obligations conventionnelles.
En raison de cette insuffisance, nous optons pour la
redéfinition du contrôle, car, malgré l'institution des
Comités scientifiques et techniques notamment dans la Convention sur la
Diversité Biologique et la Convention sur les changements climatiques
les résultats escomptés n'ont pas été atteints. De
plus, en dépit du suivi réactif que peut impliquer ce
contrôle, enquête, inspection, il s'avère difficile
d'en admettre l'efficacité. L'aboutissement des procédures est
facultatif et se heurte au consentement préalable de l'Etat. En outre,
si malgré tout le contrôle s'opère, la mise en oeuvre
des conclusions et recommandations y relatives repose sur le dialogue, la
négociation et la conciliation120(*). Tout compte fait, il faut redéfinir le
contrôle de la mise en oeuvre de la norme. Il faut, certes, un
contrôle d'orientation mais surtout de sanction.
C. Redéfinition du régime de
financement
La complexité des mécanismes institutionnels
n'allait pas sans incidence sur le régime de financement puisque le
foisonnement des Organes conventionnels en appelle logiquement à
l'élargissement des mécanismes de financement. Or, le
régime actuel est insuffisant. A ce propos, DAILIER et PELLET
écrivent «le financement des mécanismes institutionnels
eux-mêmes est très couteux (...). Les contributions, presque
toujours exclusivement volontaires, sont loin de répondre aux attentes
et les maigres ressources du Fonds pour l'Environnement et des fonds
d'affectation spéciale gérés par le PNUE sont d'autant
plus insuffisantes que les programmes adoptés se font de plus en plus
ambitieux et lourds »121(*).
Ces considérations et analyses,
venant notamment de hautes autorités doctrinales, expliquent l'existence
d'une relation d'interdépendance entre mécanismes
institutionnels et mécanismes financiers. Ainsi, l'insuffisance des
mécanismes de financement s'explique également par la
complexité des mécanismes institutionnels. Aussi, peut-elle
être la conséquence des maigres apports volontaires des Etats. En
somme, il faut redéfinir le régime de financement,
aligner celui-ci sur des mécanismes institutionnels
opérationnels, trouver un consensus sur des contributions
étatiques raisonnables et sur l'augmentation de l'aide
multilatérale.
D. Redéfinition de l'assistance
internationale
Les doctrinaires s'accordent sur le fait que les Etats n'ont
pas toujours nourri de façon manifeste la volonté de violer les
obligations qu'ils ont souscrites. La «bonne foi», telle que
prescrite par la convention de Vienne, semble à bien des
égards déterminante mais noyée dans l'incapacité
économique des Etats «défaillants». A ce propos,
IMPERIALI écrit « le non-respect des traités sur
l'environnement ne résulte pas en général (...) d'une
attitude délibérée de violations des obligations; il
découle de causes plus empiriques dont (...) l'incapacité
d'ordre institutionnel ou économique (des Etats)122(*). Ainsi, les
doctrinaires prescrivent l'aide, l'assistance
technique et financière que les autres Parties
pourront apporter à l'Etat défaillant pour améliorer le
respect de l'instrument conventionnel. Mais quelle aide ? Quelle
assistance ?
Nous convenons que les conventions récentes, dont
la CDB, ont institué un droit à l'aide
multilatérale. Toutefois, cette aide est liée au respect des
obligations. Cette conditionnalité, certes incitative, recèle
néanmoins une anomalie. Car, si le non respect des traités est
dû à la défaillance de l'Etat, il faut d'abord octroyer
l'aide et exiger, sous peine du retrait des avantages
financiers, l'application de la Convention. L'inverse parait
illogique puisque les pays en développement sont
présumés défaillants et semblent à ce
titre mériter en tout premier lieu l'aide financière. De plus,
cette aide repose sur les contributions des Etats. D'ailleurs, on ne peut
contraindre ces derniers même en brandissant le principe des
responsabilités communes mais différenciées.
CONCLUSION
La conservation rationnelle et l'utilisation
durable de la biodiversité semble entrer dans l'ordre des défis
majeurs pour l'humanité. Cet objectif ne semble pouvoir être
atteint facilement puisque nombre d'Etats, de Sociétés
industrielles et commerciales, d'acteurs importants, refusent aujourd'hui
encore de reconnaitre à la diversité écologique sa
qualité hautement intrinsèque, laquelle est pour le moins
indissociable de l'existence de l'humanité. Ils ont persisté et
comme de fait ils persistent à ne la mesurer qu'à l'aune d'un
instrument utile pour l'homme, en tant que ressource destinée à
être exploitée. Cette approche utilitariste, l'avons-nous
souligné, va à l'opposé du principe combien cher aux
éthiciens de l'environnement, celui de
«l'égalité des espèces face à la
vie». Elle explique avec éloquence le peu
d'effectivité des mesures prises jusqu'ici en matière de
conservation, de gestion, d'utilisation et de restauration de la
biodiversité et de ses éléments. Aussi, l'approche
utilitariste justifie-t-elle l'arrière-plan qu'occupe la
biodiversité dans la hiérarchie des valeurs notamment face au
progrès économique, aux règles régissant le
commerce et la propriété intellectuelle.
Nous l'avons souligné dans le cadre de cette
recherche, malgré l'adoption depuis 1992 de la Convention sur la
Diversité Biologique, comme instrument fédérateur dans
l'élaboration d'un régime international de portée globale,
le droit de la biodiversité n'est pas encore parvenu à briser le
carcan de l'anthropocentrisme qui ne cesse l'atrophier. Aussi, se veut-il un
droit à double sens, ambigu, étant entendu que ses règles,
celles visant à maintenir les espèces, les
écosystèmes, les paysages, les habitats, peuvent aussi avoir une
connotation écocentrique. A ce propos, certains doctrinaires estiment
que loin de voir en cette ambigüité pour le moins
frappante une irrégularité susceptible de l'affaiblir, le
droit international de la biodiversité se veut régulateur vu
qu'il appréhende la diversité écologique à la fois
comme ressource et comme patrimoine. A ce titre, poursuivent-ils, «il
tente de concilier la conservation des potentialités
génétiques de la planète avec le développement
socio-économique»123(*).
Cependant, eu égard au regard critique que nous avons
porté sur le système de la biodiversité, dans ses
approches conceptuelles, dans son cadre normatif, dans ses aspects
institutionnels et financiers, nous estimons que l'approche anthropocentrique
qui en constitue le socle est ce ver qui ronge le fruit et vide la norme de sa
substance. Nous convenons que le droit international de l'environnement
relève en grande partie de la soft Law, que par voie de
conséquence le droit de la biodiversité est tout aussi
alimenté par les faibles énergies d'instruments
déclaratoires sans valeur obligatoire. Nous convenons également
que les conventions de protection de la nature, pour être de
portée sectorielle, sont loin d'être les instruments
appropriés pour la mise en oeuvre d'une meilleure politique de
conservation. Par contre, c'est de façon délibérée
que les Etats ont inscrit l'instrument fédérateur, la Convention
sur la Diversité Biologique, dans un cadre essentiellement
programmatoire. Car, si aux fins d'enrayer la perte de la biodiversité,
les Etats s'engagent ils ne le font que « dans la mesure du
possible et selon qu'il conviendra ». Fort de l'absence
de toute obligation de résultat, que pouvait-il être alors du
degré d'efficacité de la norme conventionnelle ?
La norme conventionnelle en droit de la biodiversité
accuse une faiblesse que la société internationale va devoir
pallier si on entend juguler la crise de la diversité biologique et
sauver par surcroit la vie sur Terre. Nous l'avons démontré, il
s'agit d'une norme sans valeur obligatoire, une norme qui peut être
supplantée par les règles du commerce international, une norme
insusceptible d'applicabilité directe en droit interne, une norme sans
efficacité réelle. En outre, la norme doit sa faiblesse aux
insuffisances du cadre juridique qui la soutient. Ce cadre juridique, a-t-on
remarqué, ne permet pas un contrôle efficace de mise en oeuvre de
la règle de droit environnementale sur le territoire des Etats parties.
Or, selon la doctrine, dans le cadre de la mise en oeuvre d'une politique de
conservation et d'utilisation de la biodiversité, la fonction du droit
est essentielle en ce qu'il devra attacher une valeur obligatoire aux objectifs
fixés et en ce qu'il devra préconiser les moyens permettant de
les réaliser124(*). En fait, l'impuissance de la norme traduit
le peu d'effectivité du droit de la biodiversité.
Il nous a été, par ailleurs, donné de
souligner dans le cadre de ce travail le caractère non sanctionnateur du
contrôle de mise en oeuvre de la norme en droit international de la
biodiversité. A cette fin, nous avons prescrit l'intégration des
principes ``pollueur-payeur'' et de la ``responsabilité pour dommage
écologique'' dans le régime juridique à élaborer.
De plus, nous avons mis l'emphase sur l'absence d'un cadre juridictionnel
formel en cas de dommages à la biodiversité, en cas de litige
d'interprétation ou de non-conformité au traité. Car, les
Organes conventionnels auxquels il est dévolu une mission de
surveillance et de contrôle n'ont pas, comme le Tribunal International du
droit de la Mer ou la Cour Internationale de Justice, la latitude et le champ
d'action nécessaire pour rendre effective la norme et sanctionner les
prédateurs de la biodiversité. Ainsi, nous avons prescrit
l'institution formelle des juridictions de droit de l'environnement et
l'ouverture des voies de recours tant aux Etats qu'aux acteurs non
étatiques. Enfin, pour y parvenir, devra-t-on pallier la grande
déficience des mécanismes institutionnels et financiers
existant.
En somme, ces critiques auront permis au droit international
de l'environnement de s'ajuster en fonction des exigences que requièrent
les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la
biodiversité. Car, pour être une convention-cadre, donc capable de
faire naitre suivant la volonté des Etats d'éventuels protocoles
aux caractères régulateur, fédérateur,
harmonisateur, impératif et sanctionnateur, la Convention sur la
Diversité Biologique pourra certainement assurer une protection efficace
des écosystèmes, des paysages, des espèces, des habitats,
bref, une conservation rationnelle et une utilisation durable des ressources de
la biosphère. Pourquoi, nous avons fait la radiographie du
régime international de la biodiversité et avons proposé
la refonte du système dans la perspective d'un régime juridique,
institutionnel et financier efficace. Il ne faut à cette fin
qu'un sursaut de la part des Etats pour sacrifier leurs intérêts
personnels, redéfinir la coopération, l'assistance internationale
et agir dans l'intérêt supérieur de l'humanité.
Aviol FLEURANT
BIBLIOGRAPHIE
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22) VAN LANG Agathe, Droit de l'environnement,
PUF, 2002, 502 pages.
INSTRUMENTS DECLARATOIRES
CONVENTIONNELS
1) Action 21
2) Charte mondiale pour la nature
3) Convention de l'Unesco pour la protection du patrimoine
mondial, culturel et naturel
4) Convention relative aux zones humides d'importance
internationale (RAMSAR)
5) Convention sur la conservation des espèces
migratrices appartenant à la faune sauvage (BONN)
6) Convention sur le commerce international des espèces
de faune et de flore menacées d'extinction (CITES)
7) Convention sur la Diversité Biologique
8) Convention-cadre sur les changements climatiques
9) Convention de lutte contre la désertification
(1994)
10) Déclaration de Stockholm de 1972
11) Déclaration de Rio de 1992
12) Stratégies mondiales de la conservation
TABLE DES MATIERES
Pages
4 INTRODUCTION
9 PREMIERE PARTIE : ASSISES DE LA NORME RELATIVE
A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
10 CHAPITRE I : PRINCIPES
APPLICABLES A LA BIODIVERSITE
10 Section 1 : Approches fondatrices du droit
international de la biodiversité
10 A.- Biodiversité, préoccupation commune de
l'humanité
11 B.- Souveraineté étatique sur les
ressources naturelles
12 D.- L'approche de coopération Nord-Sud aux fins
d'exploitation et d'utilisation durable de la biodiversité
12 C.- Responsabilité commune mais
différenciée
13 E.- Les approches de conservation
14 1.- L'approche par espèce
15 2.- L'approche par écosystème et par
habitat
15 3.- L'approche par paysage
16 4.- L'approche par processus affectant la
biodiversité
16 F.- Les mesures spécifiques de conservation
16 1.- Mesures de conservation in situ
17 2.- Mesures de conservation ex situ
18 Section 2 : La structuration du droit de la
biodiversité, les principes généraux
19 A.- Le principe de prévention
20 B.- Le principe de précaution
21 C.- Le principe de coopération
22 D.- Le développement durable
22 E.- Le principe du pollueur-payeur et de la
responsabilité du dommage écologique
24 CHAPITRE II: UN CADRE NORMATIF HETEROGENE ASSORTI
D'OBLIGATIONS MOLLES, GENERALES ET PEU CONTRAIGNANTES
24 Section 1 : Les Instruments
de conservation des ressources de la biosphère et de protection de la
nature
25 A.- Les Instruments de soft Law
25 1.- La Déclaration de Stockholm
26 2.- La Déclaration de Rio
26 3.- L'Agenda 21
27 4.- La Charte mondiale pour la nature
27 5.- Les stratégies mondiales de la
conservation
28 B.- Les conventions de protection de la nature
28 1.- Les traités internationaux de conservation des
écosystèmes et des habitats
29 a.- La convention de l'Unesco pour la protection du
patrimoine mondial, culturel et naturel
30 b.- la Convention relative aux zones humides d'importance
internationale (RAMSAR)
31 2.- Les traités internationaux de conservation
des espèces
31 a.- La Convention sur la conservation des espèces
migratrices appartenant à la faune sauvage (B)
32 b.- La Convention sur le commerce international des
espèces de faune et de flore menacées d'extinction (CITES)
34 Section 2 : La Convention sur la
Diversité Biologique
34 A.- Principes fondamentaux
35 1.- La souveraineté des Etats sur leurs
ressources naturelles
35 2.- Responsabilités communes mais
différenciées
36 3.- Les principes de prévention et de
précaution
36 B.- Objectifs
36 1.- La conservation de la biodiversité
37 2.- L'utilisation durable des éléments de
la biodiversité
38 3.- Le partage équitable des bénéfices
découlant de l'exploitation des ressources génétiques
39 C.- Le régime des obligations souscrites
39 1.- Stratégies, plans et programmes nationaux
40 2.- Mécanismes d'utilisation et
d'évaluation des incidences
41 3.- Les mécanismes économiques de
conservation
41 4.- Approche écosystémique
42 D.- Le régime du transfert des
technologies
43 E.- Le régime de financement
44 DEUXIEME PARTIE : CONSOLIDATION DE LA NORME
RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
45 CHAPITRE I : FONDEMENTS DU RENFORCEMENT DE LA
NORME
45 Section 1 : Nécessité d'une
norme régulatrice efficace
45 A.- Une norme capable
d'harmoniser les règles éparses du droit international de la
biodiversité
46 B.- Une norme pouvant s'articuler avec les instruments de
lutte contre les processus affectant la biodiversité
47 C.- Une norme devant être compatible avec les
règles du commerce international et de la propriété
intellectuelle
49 D.- Une norme pourvue de valeur obligatoire constante
50 E.- Une norme ayant rang de règle
impérative
51 F.- Une norme d'applicabilité directe en droit
interne
52 G.- Une norme aux vertus sanctionnatrices
53 Section 2 : Les avantages de l'affermissement
de la norme
53 A.- Une meilleure conservation des ressources
54 B.- Une utilisation durable et concrète de la
biodiversité
54 C.- Un outil efficace contre les processus affectant la
biodiversité
55 1.- La lutte contre la désertification et
l'extinction des espèces
56 2.- La lutte contre la pollution des
écosystèmes et les changements climatiques.
58 CHAPITRE II : VERS UN REGIME JURIDIQUE,
INSTITUTIONNEL ET FINANCIER EFFICACE
58 Section 1 : Renforcement du régime
juridique et juridictionnel existant
59 A.- Un cadre juridique anticipatif et
sanctionnateur
59 1.- Redéfinition des principes de
prévention et de précaution
60 2.- Redéfinition du principe de la
responsabilité pour dommage écologique
60 3.- Ediction de règles obligatoires et
contraignantes
61 4.- Redéfinition du principe de
coopération
62 B.- Institution de mécanismes de recours
62 1.- Les Juridictions internationales de droit de
l'environnement
63 2.- Le recours étatique
64 3.- Le recours des acteurs non étatiques
65 Section 2 : Renforcement des mécanismes
institutionnels et financiers
65 A.- Restructuration du mécanisme institutionnel
67 B.- Redéfinition du contrôle de mise en
oeuvre
68 C.- Redéfinition du régime de
financement
69 D.- Redéfinition de l'assistance
internationale
70 CONCLUSION
* 1 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
435
* 2 J. FROMAGEAU,
Réflexions relatives à l'histoire du droit et de la
protection de la nature, Protection de la nature : histoire et
idéologie, Paris, l'Harmattan, 1998, p. 208-220
* 3 J. DORST, Avant
que nature ne meure, Paris, Delachaux & Niestlé, 1978, p.
16
* 4 M. Remond-Gouilloud,
Du droit de détruire, Paris, PUF, 1989
* 5 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 32
* 6 Traité de
Washington du 7 juillet 1911 relatif à la préservation et
à la protection des phoques à fourrure
* 7 Convention de 1909 pour
la protection des oiseaux utiles à l'agriculture
* 8 Convention de Washington
du 2 Décembre 1946 pour la réglementation de la chasse à
baleine
* 9 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.443
* 10 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 33
* 11 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 33
* 12 DAILIER Patrick,PELLET
Alain, Droit International Public, 7ème ed.
LGDJ, 2002, p. 385
* 13 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 20
* 14 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p.52
* 15 Préambule de la
Convention de Rio sur la Diversité Biologique
* 16 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.443
* 17 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.446
* 18 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.447
* 19 J. Rifkin, Le
siècle Biotec. Le commerce des gènes dans le meilleur des
mondes, éd. La Découverte, Paris, 1998
* 20 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.450
* 21 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.449
* 22 Article 20 de la
Convention sur la Diversité Biologique
* 23 DAILIER Patrick,PELLET
Alain, Droit International Public, 7ème ed.
LGDJ, 2002, p.1237
* 24 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 75
* 25 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 75
* 26 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 52
* 27 Convention sur la
Diversité Biologique, article 9
* 28 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, pp. 350, 351
* 29 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p.58
* 30 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p.59
* 31 Convention sur la
diversité Biologique, article 2
* 32 Convention sur la
Diversité biologique, article 19.4
* 33 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 108
* 34 Convention sur la
Diversité biologique, article 9
* 35 AMEGANKPOE et AVODE in
La Protection de l'environnement au coeur du système juridique
international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et
Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001,
Université de Liège, BRUYLANT, 2003, p. 342
* 36 VAN LANG Agathe,
Droit de l'environnement, PUF, 2002, pp. 70, 71
* 37 Principe 21 de la
Déclaration de Stockholm de 1972 sur l'environnement.
* 38 Convention sur la
Diversité Biologique, Préambule et article 3
* 39 ARBOUR Jean-Maurice,
LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 29.
* 40 NATIONS UNIES,
Recueil des sentences arbitrales, vol. III, p. 1938; [1949] 3
Reports of international Arbitration Awards 1905.
* 41 VAN LANG Agathe,
Droit de l'environnement, PUF, 2002, p. 95
* 42 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.57
* 43 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p. 48
* 44 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 74
* 45 AMEGANKPOE et AVODE in
La Protection de l'environnement au coeur du système juridique
international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et
Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001,
Université de Liège, BRUYLANT, 2003, p. 340
* 46 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.66
* 47 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 77
* 48 Convention sur la
Diversité Biologique, article 2
* 49 N. DE SADELEER,
Les principes du pollueur-payeur, de prévention et de
précaution : essai sur la genèse et la portée
juridique de quelques concepts du droit l'environnement, Bruxelle,
Bruylant, 1999, p. 51
* 50 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 250
* 51 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Dalloz, 2004, p. 355
* 52 DAILIER Patrick,PELLET
Alain, Droit International Public, 7ème ed.
LGDJ, 2002, p. 385
* 53 Déclaration de
Stockholm de 1972, principe 2
* 54 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 81
* 55 Déclaration de
Stockholm de 1972, principe 21
* 56 Rapport Brundtland
* 57 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 83
* 58 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon
BLAIS, 2006, p.36
* 59 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. pp. 85, 86
* 60 La
stratégie mondiale de la conservation, UICN/PNUE/WWF/UNESCO
* 61 Commission mondiale sur
l'environnement et le développement, Notre avenir à
tous, Montréal, les publications du Québec, Editions du
fleuve, 1988, p.179.
* 62 Convention de
l ;Unesco, Préambule, par. 7
* 63 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 160
* 64 Préambule de la
Convention de Ramsar.
* 65 Préambule de la
Convention de Ramsar.
* 66 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 203
* 67 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 374.
* 68 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 386
* 69 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
386.
* 70 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit.
p.394.
* 71 Article 20.4 de la
Convention sur la Diversité Biologique
* 72 Préambule de la
Convention sur la Diversité Biologique
* 73 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 110
* 74 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
453
* 75 Article 6, a, de la
Convention sur la Diversité Biologique
* 76 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 104
* 77 Article 6, b, de la
Convention sur la Diversité Biologique
* 78 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p.108
* 79 PRIEUR Michel,
L'information, la Participation et l'Evaluation
environnementale, Master DICE, Tronc commun, cours N0 : 6, p.
2.
* 80 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p.64
* 81 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p.64
* 82 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p.123
* 83 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
487
* 84 AMEGANKPOE et AVODE,
in La Protection de l'environnement au coeur du système juridique
international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et
Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001,
Université de Liège, BRUYLANT,.2003, pp. 337, 338.
* 85 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
453
* 86 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
440
* 87 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit.
p.440
* 88 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 129
* 89 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p.390
* 90 ARBOUR J. M. &
LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.
57
* 91 ARBOUR Jean-Maurice,
LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 66.
* 92 NATIONS UNIES,
Recueil des sentences arbitrales, vol. III, p. 1938; [1949] 3
Reports of international Arbitration Awards 1905.
* 93 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. Dalloz, 2004, p. 355
* 94 BRETON Jean Marie,
Les sols et la désertification, cours N0 4, Master Dice,
Option 1, p. 10
* 95 BRETON Jean Marie, op.
cit. p.13
* 96 ARBOUR Jean-Maurice,
LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 279
* 97 ARBOUR Jean-Maurice,
LAVALLEE Sophie, op. cit. p.311
* 98 ARBOUR Jean-Maurice,
LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 283
* 99 IMPERIALI Claude,
L'Effectivité du Droit International de l'Environnement,
Ed. Economica, 1998, p. 7
* 100 AMEGANKPOE et AVODE,
op. cit., 2003, pp. 337, 338.
* 101 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 110
* 102 AMEGANKPOE et AVODE,
op. cit. p. 340
* 103 Arbour Jean Maurice
& Lavallée Sophie, op. cit. p. 45
* 104 IMPERIALI Claude,
op. cit. p. 19
* 105 IMPERIALI Claude,
op. cit. p. 19
* 106 IMPERIALI Claude,
op. cit. p. 14
* 107 Rapport du Groupe
d'experts sur l'identification des principes du droit international pour le
développement durable, Genève, 26-28 Septembre 1996 (division
Nations Unies pour le Développement durable, doc. Travail no : 3,
Avril 1996, paragraphes 155 à 160)
* 108 IMPERIALI Claude,
op. cit. p. 15
* 109 DOUMBE-BILLE
Stéphane, Les Acteurs du droit international de
l'environnement, Master DICE, Tronc commun, cours no : 2, p. 2
* 110 Sudre
Frédéric, Droit européen et international des
droits de l'homme, 6ème édition refondue,
puf, 2003, p. 105
* 111 Patrick Dailier,
Alain Pellet, op.cit., page 1277
* 112 IMPERIALI Claude,
op. cit. p. 17
* 113 Patrick Dailier,
Alain Pellet, Droit international Public,
7ème éd. LGDJ, 2002, pp. 1278, 1279
* 114 Patrick Dailier,
Alain Pellet, Droit international Public,
7ème éd. LGDJ, 2002, pp. 1278, 1279.
* 115 Patrick Dailier,
Alain Pellet, op.cit., page 1277.
* 116 MALJEAN-DUBOIS
Sandrine, Le foisonnement des Institutions Conventionnelles, in
L'effectivité du Droit Int. de l'environnement. p.
30
* 117 Principe 25 de la
Déclaration de Stockholm
* 118 MALJEAN-DUBOIS
Sandrine, Le foisonnement des Institutions Conventionnelles, in
L'effectivité du Droit Int. de l'environnement. p.
49
* 119 IMPERIALI Claude,
L'Effectivité du Droit International de l'Environnement,
Ed. Economica, 1998, p.9
* 120 IMPERIALI Claude,
op. cit. p. 13
* 121 DAILIER
Patrick,PELLET Alain, Droit International Public,
7ème ed. LGDJ, 2002, p. 1279
* 122 IMPERIALI Claude,
L'Effectivité du Droit International de l'Environnement,
Ed. Economica, 1998, p. 16
* 123 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 21
* 124 Nicolas de Sadeleer,
Charles-Hubert Born, op. cit. p. 22
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