C'est la forme du gouvernement représentatif qui,
vraisemblablement, a évolué conformément à
l'idée
13 Francois Mitterrand, « in
séance 8 », Inédit, pp. 2 à 10.
primitive, puisque c'est celle qui a évolué en
Angleterre, son pays d'origine. Forgé au cours du
XVIIIème siècle, par légères
modifications au gouvernement représentatif du XVIIème
siècle, le régime parlementaire est passé en France en
1814 sous la restauration, et, après des vicissitudes, a fini à
s'y acclimater.
Le régime parlementaire que l'on considère
comme «authentique>> est anglais14, et sert de
référence historique et théorique à la plupart des
régimes parlementaires.
Le Régime parlementaire est un régime dans
lequel « les organes de l'Etat collaborent et se
dépendent mutuellement : collaboration fonctionnelle
autant qu'élargie se joint à la
révocabilitémutuelle
>>15.
D'une manière simpliste, « c'est une forme du
gouvernement, à base du régime représentatif et de
séparation souple des pouvoirs, dans laquelle une collaboration
continuelle est établie entre le pouvoir exécutif et le parlement
composé de deux chambres par l'intermédiaire d'un organe
exécutif qui est le cabinet des ministres, lequel partage avec le Chef
de l'Etat la direction du gouvernement, mais ne peut gouverner qu'en s'assurant
la confiance continuelle du
14 Denis Béranger,
Parlementarisme des origines, Paris,
PUF, 1999, page 121.
15 GICQUEL, E et GICQUEL, J.E., cités par
DJOLI ESENG'EKELI, J., Droit
Constitutionnel, Tome 1, Principes Structuraux, EUA,
2010, p. 222.
Parlement, parce qu'il est politiquement responsable devant
lui »16.
On pourrait penser du régime parlementaire qu'il
englobe tous les régimes dans lesquels existe un parlement, ce qui
serait trop facile et surtout inexact puisque tous les régimes
politiques, démocratiques ou autres, possèdent une institution
délibérante représentant le pouvoir législatif,
pourvu ou non de force politique réelle. L'existence d'un parlement
quelle que soit son appellation ne permet donc pas de dire d'un régime
qu'il évolue dans le cadre du parlementarisme.
L'élément fondamental se trouvant à la
base du parlementarisme réside plutôt dans la souveraineté
du Parlement, conception selon laquelle le Parlement constitue l'institution
supreme de l'État (régime parlementaire classique) puisqu'il est
le représentant des intérêts du peuple et le symbole
même des avancées démocratiques. John Locke exprima le
premier, dans son Traité du gouvernement civil, l'idée
que le pouvoir législatif est le pouvoir suprême de
l'État17. Le Parlement, qui détient ce pouvoir, se
voit attribuer une partie de la souveraineté du peuple et dispose du
pouvoir nécessaire pour créer des lois, pouvoir reposant toujours
sur le consentement de la société.
16 Denis Béranger,
Parlementarisme des origines, Paris,
puf, 1999, p.118.
17John LOCKE, Traité du
gouvernement civil, introduction, bibliographie,
chronologie et notes par Simone GOYARD-FABRE, 2e édition, Paris,
GF/Flammarion, 1992 [1984], chapitre XI, pp. 242-250.
La souveraineté du peuple s'en trouve
déléguée et s'incarne dans la souveraineté du
Parlement (ou suprématie du Parlement), ce qui donne aux
décisions prises par celui-ci une légitimité
démocratique. En vertu de cette souveraineté, le parlement
détient un pouvoir législatif absolu. Et, comme il n'existe
aucune institution supérieure au Parlement, son pouvoir de créer
des lois est illimité18.
En fait, « en pure doctrine britannique, la
souveraineté parlementaire peut s'exprimer en deux propositions : le
parlement peut tout faire ; le parlement n'est pas limité par les lois
antérieures19», ce qui signifie qu'un nouveau parlement
peut modifier toutes les lois selon ses volontés.
Il va sans dire que, de nos jours, cette souveraineté
du parlement n'est plus absolue. Si elle demeure encore un principe qui fonde
le régime politique britannique, où n'existe aucune constitution
écrite et formelle, la souveraineté parlementaire est
désormais restreinte par l'obligation dans laquelle se trouvent les
parlements de respecter les documents constitutionnels et les chartes des
droits et libertés que ces documents peuvent inclure.
Au surplus, comme nous l'avons vu, lorsqu'ils exercent leur
pouvoir législatif, les parlements doivent tenir compte des institutions
chargées du contrôle de la constitutionnalité des lois
qu'ils
18Hanspeter KRIESI, op.
cit., p. 161. Voir également Yves
MÉNY, op. cit, p. 207. 19Henri BRUN et Guy TREMBLAY,
op. cit., p. 415.
votent. Au Canada, par exemple, les discussions entourant
l'adoption de la Charte des droits et libertés, en 1982, ont
démontré que certains acteurs politiques craignaient que la
fonction législative de l'État c'est-à-dire le Parlement
devienne trop encadrée et limitée par la nouvelle constitution,
plus rigide, laquelle, selon eux, déplacerait le pouvoir politique vers
la fonction judiciaire des tribunaux, au profit des juges qui la
représentent.