1.1.8 Pratiques
traditionnelles et Jouissance du droit à la santé des peuples
africains
La question de la protection et de la jouissance effective des
droits de l'homme des patients et du droit à la santé en Afrique,
au regard de la pratique médico - sanitaire en milieu hospitalier est
également entachée d'une mentalité socioculturelle de
chaque peuple, malgré l'idée de l'universalité qui en sous
tend. Aussi, la métaphysique négro - africaine avec leur
croyance magico - religieuse, animiste ; qui est fondée sur le
culte mystique des ancêtres par les vivants
« terrestres ». Elle est sans pensée
scientifique, ni conscience réfléchissante et autonome de la
réalité cosmique : plaisir-douleur. Elle est toujours
à la recherche d'une force vitale qui garantit le plaisir.
Dans ce contexte, l'être vivant perd son
autodétermination, son autonomie ; les droits et libertés
sont y subordonnés à la volonté mystique de
l'ancêtre qui détermine le cours de l'histoire et des
phénomènes psychosociaux.
Cependant, l'homme est le seul être
vivant qui, en cas des souffrances psychiques ou physiques, recourt à
autrui pour bénéficier des soins. La mentalité primitive
ou la représentation collective aux croyances magico - religieuses
domine les mentalités professionnelles dans l'art de l'offre et de la
demande des soins de santé et ce, expliquerait le défaitisme et
le recours des patients aux soins traditionnels, au charlatanisme du Chaman,
des guérisseurs et autres tradi-praticiens, avec tout risque
d'aliénation de jouissance des droits humains liés à la
santé de personne. (W.J. Schraml, op. cit,).
C'est pourquoi, le débat autour de métaphysique
négro - africaine, des droits de l'homme et le développement
intégral, ouvre certaines perspectives de recherche pour assurer la
jouissance et l'exercice réels des droits des patients en milieu
hospitalier congolais. Selon Dialembonkembi Diebo (1988), un problème
de l'Afrique noire auquel on ne peut plus se passer comme problématique
rationnelle, c'est celui posé par le droit de l'homme à
l'existence authentique face à la métaphysique négro
africaine, fondée sur la magie, la sorcellerie et le culte des
ancêtres, qui prétendent souvent à légitimer dans
une certaine mesure, la cruauté, l'atrocité, la maltraitance et
le psycho-traumatisme, comme tortures observables à travers toutes les
couches sociales en termes de violations des droits de l'homme sociaux,
économiques et culturels. C'est un frein à la coopération
pour le développement des structures de santé.
En effet, le droit de l' homme aux soins de
santé devrait construire pour le patient et le soignant, un univers
comme structure d' accueil et, lieu de vécu existentiel authentique,
dégagé de préjugés courants comme illusion de
«toute puissance» à la recherche du
«plaisir» humain, soustrait de toute souffrance ou douleur
qui incarne l'idéologie du psychologisme du culte ancestral ; celui
- ci échappe au champ de notre état de conscience
perceptive , en tant qu'un état de vie de relation auquel
dépendent les valeurs universelles des droits humains.
Le droit des patients répond à l'ordre des mots
et non au mot d'ordre de choses dont les conséquences pèsent
fortement sur les droits humains de plus de trois générations
futures. Ces droits sous entendent le moyen d'être homme libre, autonome,
d'être une conscience réfléchissante et un peuple
autodéterminé.
De ce fait, l'Africain est un être humain
débarrassé de toute intelligence, indûment intuitive sur la
compréhension naturelle de la vie selon l'intuition de Bergson(1946).
Ceci suppose une régression intellectuelle au stade intuitif de 4
à 7 ans d'âge du développement de l'intelligence pour H.
Wallon et J. Piaget (1966). De même, Husserl (1964) pense qu'il s'agit
d'une conscience qui est en droit transparente à elle - même et se
réalise au prix infini de clarification. Pour restituer cet état
de conscience de droit de l'homme à la vie et à l'existence
sociale authentique, il doit être vécu en fonction d'une
« conscience » réfléchissante
à travers nos relations avec le monde environnant et en tenant compte de
mutation culturelle qui subit les pressions de l'avenir des droits de l'homme
universel, riches de signification en sens commun et valeurs
supérieures.
Par ailleurs, la métaphysique négro - africaine
dont le fondement est la culture traditionnelle africaine se présente
comme un imposant et légitime « édifice
psychique », construit de mythe magico - religieux dont la
pierre angulaire est le culte des ancêtres dans lequel, toute vie et
existence humaine d'un homme de droit et liberté est terrorisée,
insécurisée, asservie et banalisée. Elle est fixée
dans un cycle infernal, une sorte d'impasse relationnelle. Ce faisant, le
besoin de force vitale et la recherche du plaisir ou l'hédonisme
renforce et nourrit les idées forces pour la survie du culte des
ancêtres à travers les générations.
En revanche, cette dernière pratique traditionnelle
exige le conformisme absolu et le non conformisme est discriminatoire, comme
la conséquence de cette prélogique. Par contre, le culte des
ancêtres représente le socle de sécurité personnelle
et une dynamique de la solidarité traditionnelle africaine selon Pasi N
M., (1976). C' est pourquoi, la croyance à la survie des morts, aux
deux univers des vivants et des morts explique bien des
mentalités : attitudes, actes sociaux, les formations
réactionnelles incompréhensibles que l'on observe et qui oblige
les patients à recourir, non sans risque de violation des droits de
l'homme authentiques, aux prêtres et tradi-thérapeutes sans statut
consultatif légal.
Dans cette étude, notre
étonnement est de constater que ce même droit des patients souffre
de non respect et non protection chez les professionnels de la médecine
occidentale scientifique, appelée médecine moderne de la
prescription médicale codifiée et objective.
Somme toute, le tradi-praticien ou prêtre et le
médecin organiciste établissent des rapports redoutables et
concurrentiels entre la prescription biomédicale et la pratique de
vieilles traditions soignantes au regard du sujet des droits qu'on nomme
«patient».
En effet, la culture et les croyances traditionnelles des
peuples sont des déterminants majeurs de nos pensées
représentatives et nos significations sur les droits fondamentaux
inaliénables en Afrique noire.
Freud S. (1970), dans son ouvrage « Totem et
tabou» démontre que la magie est un « mode
de pensée animiste primitif» et de la sexualisation de la
pensée narcissique au cours du développement individuel et
collectif. Dans ce monde de pensée magique, toute réalité
est susceptible de changer en plaisir spirituel, même la
réalité la plus triviale (fondamentale) car, la vie et
l'existence des hommes terrestres se subordonnent aux ancêtres. Ceci
semble être la fuite de la condition temporelle sensible (dialectique de
la réalité) de l'homme dans la satisfaction de
l'immédiateté du moment, le plaisir ou les jouissances faciles,
de l'imaginaire. C'est l'infantilisme psychologique qui se manifeste par la
recherche du plaisir et l'évitement de la douleur.
De même, cette thèse a été
défendue par les anglais, notamment John Stuart Mill (1946), auteur de
l'utilitarisme et Bentham (1948) qui établissent la formule
suivante : « Le bonheur est la plus grande somme de plaisirs
diminuée de la plus petite somme de douleurs dans une existence
complète ». Ils affirment la pensée de Freud S.
(1962), telle que tout psychisme humain dès l'enfance est explicable par
la recherche de la jouissance (plaisir), comme un principe de plaisir et une
équation Moi - Plaisir et l'évitement de la douleur
(traumatisme). Il reste le principe de réalité cosmique pour
l'Africain.
Nous allons examiner dans la partie suivante, les implications
de traumatisme psychique au regard de droits de l'homme des patients,
toutefois, nous notons que le traumatisme répond au principe de la
réalité (douleur ou souffrance) pour l'être humain,
naturellement voué à la tendance abyssale de rechercher le
plaisir et la force - vitale par les « idées
forces », ou l'illusion de toute puissance, selon les termes de
(Freud S. op. cit.).
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