LES OBSTACLES AUX
EFFORTS DE L'UA DANS
LE REGLEMENT DE LA
CRISE DU DARFOUR.
PREMIERE PARTIE :
Le bouleversement de l'ordre mondial intervenu au lendemain
des attentats du 11 septembre 2001 n'a pas épargné l'Etat du
Soudan. En effet après le 11 septembre, le régime de Khartoum se
sentant menacé accepta d'ouvrir des négociations avec le
mouvement rebelles de l'Armée Populaire de Libération du Soudan
(SPLA)14. Ce mouvement dirigé par le Colonel John Garang
était en conflit larvé avec l'Etat du Soudan depuis 1983. En
juillet 2002 une lueur d'espoir se dessinait à l'horizon avec la
signature du Protocole de Machakos, quand subitement des populations du Darfour
une Région occidentale du Soudan attaquèrent des installations
militaires de la ville de Goulu15. Cette insurrection prit
rapidement des proportions inquiétantes avec la prise de
l'aéroport d'El Fasher le 25 avril 2003 et la perte de quelques 70
militaires16 appartenant à l'armée soudanaise. Le
Gouvernement de Khartoum décida de réagir par la violence.
Débuta alors de ce que l'humanité appelle
aujourd'hui la crise du Darfour. Quelques 200 000 personnes payeront les frais
de cette tragédie qui ne dit pas son nom. De son coté l'Union
Africaine, par le biais de son Conseil de Paix et de Sécurité
(CPS) pour ne pas être le témoin passif de massacres ethniques en
Afrique décida de réagir. Cependant l'ampleur de la crise
était telle que cette réaction de l'U.A allait vite montrer ses
limites. En effet l'intervention de l'U.A au Darfour va confronter à
deux séries d'obstacles majeurs. La première série
d'obstacles est externe à l'U.A (Chapitre I) alors que
la deuxième série est imputable à l'U.A elle même
(Chapitre II).
14 Pour les différents rounds de
négociation cf. Axel de Waal, « une perspective de paix au Soudan
en 2002? », Politique Africaine, no 85, Paris, Karthala, mars 2002
pp93-107
15 Pour plus de détail sur cette attaque, cf. S
Fanel, Darfour : origine et bilan d'un génocide 3ème
partie, Association Sauver le Darfour,
www.sauverledarfour.org
16 Cf. Amesty International, Soudan. « Questions
et réponses »au sujet de la crise du Darfour,
www.amnesty.org
LES OBSTACLES
EXTERNES A L'UA
CHAPTRE I :
En 2004 quand la première mission de l'U.A
débarquait au Soudan elle avait la ferme volonté de régler
le conflit du Darfour. Mais très vite elle fera face aux
réalités sur le terrain. En effet l'U.A se rendit compte que
cette crise est liée en grande partie à deux facteurs essentiels
: d'une part aux origines lointaines de celle-ci (Section I)
et d'autre part à l'enjeu que la crise présente aujourd'hui pour
la sous- région mais aussi pour les grandes puissances (Section
II).
SECTION I UNE CRISE AUX ORIGINES LOINTAINES.
Pour comprendre les difficultés rencontrées par
l'U.A dans sa tentative de règlement de la crise au Darfour, il est
important de faire un décryptage de la situation du soudan dans son
ensemble. En effet ce pays de la Corne de l'Afrique a une situation
géographique extraordinaire. Avec une superficie de 2 505 800
km2 et une population de 42 292 929 (estimation 2007)17
et une mosaïque d'ethnies et de religions, le Soudan constitue aujourd'hui
de ce qu'on pourrait appeler un sous continent dans le Continent noir. Cet
état de fait a engendré une instabilité du pays depuis
1956, date de son accession à la souveraineté internationale
(Paragraphe I) avec notamment des provinces
périphériques qui sont en perpétuel conflit avec le
régime en place à l'image de celle du Darfour (Paragraphe
II).
PARAGRAPHE I : LE SOUDAN : UN PAYS INSTABLE DEPUIS
SON INDEPENDANCE.
L'Union Africaine pouvait-elle faire grande chose face
à la situation qui prévaut au Darfour ? On est tenté se
poser cette question si l'on sait qu'en 1956 quand les britanniques quittaient
le pays le Soudan commençait déjà à sombrer dans la
guerre civile. Et durant toute son existence le pays a connu des troubles. Ces
troubles sont dues à l'instabilité politique du pays
(A), mais aussi à la succession des conflits
(B).
A) l'instabilité politique du pays.
Le Soudan fait parti aujourd'hui l'un des pays les plus
instables politiquement en Afrique. En effet proclamé République
le 1er juillet 1956, le Soudan aura connu trois vagues de
démocratisation et trois vagues de dictature18.
17 Cf. Soudan fiche pays,
www.ca.encarta.msn.com
18 Cf. P P Dika, la crise du Darfour ou la
faillite de l'Etat post-colonial soudanais, Institut de Documentation et
Recherche sur la Paix ; www.institutdrp.og
La première tentative de démocratisation
résulte d'un accord signé avant l'indépendance même
du pays. En effet en 1955 deux grands partis musulmans du Nord du Soudan
exprimaient leur volonté de former un gouvernement de coalition. Il
s'agit de la UMMA et de la NUP. Leur but premier était non seulement
d'écarter le Democratic Unioniste Party (DUP) un parti
réputé être pro- égyptien mais aussi d'isoler la
Province du Sud du pays qui est une province non musulmane. Cependant les
luttes au sein du parti au pouvoir amenèrent le Président Ismail
AZHARI le premier Président du Soudan indépendant à rendre
le tablier après six mois d'exercice. Par ailleurs cet accord sema de
l'incertitude au sein des populations qui la considéraient comme non
unificateur. D'ailleurs l'accord rejetait la partie Sud, Est et Ouest dans la
périphérie.
Cette première tentative de démocratisation sera
suivie par une période de dictature. En effet deux ans seulement
après son indépendance, le Soudan connut son premier coup d'Etat.
Ce dernier orchestré le 17 Novembre 1958 par le Général
ABBOUD va ouvrir la voix à une alternance entre démocratie et
dictature.
La deuxième tentative de démocratisation est
issue des élections organisées en Avril 1965. Cependant les
gouvernements qui vont se succéder seront incapables de se mettre
d'accord sur une constitution permanente, ou de résoudre les
problèmes de la lutte entre factions, de la stagnation économique
et de la dissidente ethnique. Conséquence le pays va connaître une
série de coups d'Etats.
D'abord le 25 Mai 1969 un coup d'Etat fut orchestré et
le Colonel Gaafar Muhammad NIMEIRI devient le Premier Ministre. Ce nouveau
régime supprima le Parlement et interdit les partis politiques.
Ensuite en Juillet 1971 un autre coup d'Etat dirigé par
le Parti Communiste Soudanais est mené. Cependant quelques jours
après, des troupes anti-
communistes restaurèrent le Président NIMEIRI.
Ce dernier instaura un régime militaire jusqu'en 1985.
La troisième vague de démocratisation intervient
par un autre coup d'Etat. En effet à la suite d'une pénurie de
pain et d`essence, le Général Souwar AdDAHAB restaura un
gouvernement civil. Cette troisième vague de démocratisation va
à l'image de ses prédécesseurs s'achever par un autre coup
d'Etat.
La dernière étape débuta par un coup
d'Etat orchestré par les Frères Musulmans pourtant ayant obtenu
seulement 10% des voix lors des élections précédentes. Ce
dernier coup d`Etat qu'a connu le Soudan fut perpétré le 30 juin
1989 et le Général Omar El BEHIR en devient le Président.
Au total avec cinq coups d'Etats opérés et une mutinerie, le
Soudan est devenu l'un des pays les plus instables politiquement en Afrique.
Aujourd'hui près de 20 ans après le dernier coup
d'Etat le pays se cherche toujours. En effet certes des élections sont
organisées au Soudan notamment en 1996 et en 2000 mais celles-ci
à l'image de beaucoup d'autres élections qui sont
déroulées dans le Continent ne rendent pas forcément le
régime en place démocratique. Par ailleurs il est important de
savoir que depuis 2000 des élections ne sont pas organisées au
Soudan et c'est toujours le même régime que certains
n'hésitent pas à qualifier d'islamiste qui gouverne. Ceci a
engendré des conflits à ne plus finir.
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