La gestion du risque de contrepartie dans la relation des banques commerciales avec les PME: cas de la Commercial Bank-Cameroun( Télécharger le fichier original )par Tatiana AZOGANG MU KENGNE Université catholique d'Afrique Centrale - Master comptabilité et finances 2011 |
SIGLES ET ABBREVIATIONSAID : Assurance Invalidité Décès BEAC : Banque des États d'Afrique Centrale CBC : Commercial Bank-Cameroun CCT : Crédit à Court Terme CEL : Compte d'Épargne sur Livret CFH : Capital Financial Holding CLT : Crédit à Long Terme CMT : Crédit à Moyen Terme COBAC : Commission Bancaire d'Afrique Centrale DAT : Dépôt à terme KMV : Kealhofer, McQuown et Vasicek MRC : Méthode de Rating du Crédit OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires PD : Probabilité de Défaut PME : Petites et Moyennes Entreprises PNB : Produit Net bancaire RCCM : Registre du Commerce et du Crédit Mobilier TVA : Taxe Sur la Valeur Ajoutée LISTE DES SCHEMAS ET TABLEAUX
INTRODUCTION GENERALEContexte de l'étude Dans l'environnement actuel caractérisé par la mondialisation des marchés et l'ouverture des économies, de nombreuses entreprises ne disposent pas de suffisamment de capitaux pour atteindre leurs objectifs. Ainsi, leurs résultats comptables et financiers peuvent les conduire à un déficit de liquidités et nécessiter le recours à un financement, intérieur ou extérieur, qui peut se faire sous forme d'augmentation du capital, de prise de participation d'un partenaire extérieur au capital, ou sous forme de crédit auprès d'une banque. Pour répondre aux sollicitations des agents à capacité et à besoin de financement, Les banques procèdent ainsi à la collecte des dépôts et à leur redistribution sous forme de crédit. Cette activité d'intermédiation constitue de ce fait le coeur de leur métier. On s'accorde à reconnaitre à cet effet que leur rôle vient de l'asymétrie d'information qui existe entre d'une part, les agents économiques disposant de fonds et d'autre part, ceux qui en ont besoin. Étymologiquement, le mot « crédit » vient du verbe latin « credere » qui signifie croire, faire confiance. Et effectivement, celui qui octroie le crédit fait confiance à son débiteur, croit en celui qui reçoit la ressource prêtée. De façon générale, le crédit résulte de la combinaison de trois éléments : le temps ou le délai pendant lequel le bénéficiaire dispose de fonds prêtés, la confiance faite par le créancier au débiteur, et la promesse de restitution des fonds prêtés. Le crédit introduit donc la notion de temps, c'est-à-dire d'incertitude. Ainsi, il est possible qu'une société ne présente qu'un risque de défaillance minime au moment de l'octroi du crédit ; mais qu'en est-il à l'avenir ? La deuxième caractéristique du crédit est la confiance entre créancier et débiteur. Cette notion est subjective et n'est pas exempt de risque. Un banquier peut ainsi accorder sa confiance et se tromper. L'octroi de crédit implique pour le banquier la prise en considération de notions subjectives comme la bonne foi du débiteur ou l'exactitude des informations financières produites qui constituent des risques pour la banque. Enfin, la troisième caractéristique du crédit est la promesse de restitution des fonds prêtés. Les risques inhérents à ce point découlent des deux points précédents. Si une évolution défavorable se produit dans le temps ou si le débiteur ne respecte pas l'engagement pris vis-à-vis du créancier, le risque de non remboursement peut se réaliser. Au total, une opération de crédit considérée du point de vue du prêteur est une opération risquée qui suppose que des mesures destinées à éliminer, du moins à réduire le risque encouru soient prises. Qu'il s'agisse du risque de crédit, de liquidité, de change ou de taux, le banquier se doit de trouver des outils pertinents devant permettre de les cerner et de les réduire au strict minimum. S'il est donc avéré que l'intermédiation constitue le coeur du métier du banquier (en ce sens que son rôle vient de l'asymétrie de l'information existant entre les agents à capacité de financement et les agents à besoin de financement), il n'en demeure pas moins vrai que cette activité d'octroi de crédit se caractérise principalement par le risque élevé qu'elle fait courir à celui qui débourse. Dès lors, on peut déduire que l'un des rôles majeurs du banquier sera la gestion des divers risques que lui font courir ses clients dans la relation qu'il entretient avec eux. Dans notre sous-région d'Afrique Centrale, les premières banques installées à l'époque coloniale étaient des filiales des banques occidentales. Il s'agit de la Société camerounaise de banques (SCB) appartenant au Groupe Crédit lyonnais, de la Banque Internationale pour le Commerce et l'Industrie du Cameroun (BICIC) rattachée au groupe PNB, de la Société Générale de Banque au Cameroun (SGBC) et de la Banque Internationale pour l'Afrique Occidentale au Cameroun (BIAO). Dépendantes de leurs maisons-mères, elles étaient rigoureusement gérées, mais ne s'impliquaient pas activement dans le processus de développement des économies de la sous-région. Face à cette situation, une importante reforme a été engagée en 1973 se traduisant par le renforcement de la tutelle de l'État sur les banques, à travers les prises de participation dans leur capital social. De nombreuses banques voient ainsi de jour, à l'instar de la Banque Camerounaise de Développement (spécialisée dans le financement des activités du secteur public et parapublic), du Fonds de Garantie de crédits aux Petites et moyennes entreprises (FOGAPE), du Fonds National de Développement Rural (FONADER) et de la Cameroon Bank (CAMBANK). Les dirigeants de ces établissements de crédit, nommés par les pouvoirs publics (parfois sans qualification adéquate), accordaient des crédits sur la pression des hommes politiques influents, des hauts fonctionnaires ou des membres de la tribu1(*). Il n'y avait donc aucun procédé de gestion du risque. Cette situation a conduit au fait que les banques de la sous-région soient profondément touchées par la grande crise économique qu'ont connue nos États au milieu des années 80. Cette faillite bancaire qualifiée de systémique (par Edward J. Kane and Tara Rice, 1998) était tributaire de causes multiples parmi lesquelles des erreurs de gestion.2(*) Au 31 décembre 1988, le système bancaire de la zone CEMAC a enregistré un déficit de 6,11 milliards de francs CFA. Par ailleurs, la proportion de créances douteuses s'était considérablement accrue. Elle était de 24,65% pour le système bancaire camerounais qui était le plus touché par la crise. Dans cette situation préoccupante, les banques ne pouvaient plus assurer leur rôle d'intermédiaires financiers, compromettant ainsi le processus de croissance et de développement économique. Pour éradiquer cette crise financière, les bailleurs de fonds internationaux (Banque Mondiale (B.M), Fonds Monétaire International (F.M.I)) en collaboration avec la Banque des États de l'Afrique Centrale (B.E.A.C), ont dans le cadre des programmes d'ajustement structurel, enrichi leur thérapie habituelle par des reformes bancaires. Aussi, dans le but de limiter les effets néfastes de la prise démesurée de risques et de soutenir la stabilité et la sécurité du système financier, il a été instauré une réglementation prudentielle internationale. Les premières normes de convergence sur les fonds propres élaborées par le comité de Bâle en 1988, suite aux faillites successives de grandes entreprises survenues dans les décennies 80 et 90, s'inscrivent comme une tentative de réponse à la défiance généralisée du système bancaire et visent la restauration de la solvabilité des entreprises au travers de l'intermédiation financière. Dans notre sous-région, des restrictions ont été imposées par la suite, constituant des limites au financement des entreprises, à savoir les règles prudentielles édictées par la COBAC. En effet, dans le but d'aboutir à un système de surveillance bancaire efficace, les États membres de la BEAC vont signer les conventions du 16 Octobre 1990 portant création de la COBAC et du 17 Janvier 1991 qui harmonisent la réglementation bancaire dans la zone BEAC. La COBAC impose aux établissements de crédit le respect des ratios de liquidité, de couverture des risques et de division des risques dans la distribution de crédits. Il en ressort donc que la gestion du risque est un impératif pour les banques camerounaises, plus particulièrement la gestion du risque de contrepartie, car celui-ci est dans nombre de cas à l'origine du manque de liquidité et peut déboucher sur un risque de défaillance très important. Problématique Les PME représentent une part importante du tissu économique camerounais. Bien que leurs besoins en financement soient relativement de faible montant, il n'en demeure pas moins vrai que les décisions d'octroi de crédit à leur endroit nécessitent une attention particulière de la part des banquiers. Hétérogénéité des activités, difficulté de mesure de certains paramètres, nombreuses sont les contraintes auxquelles le banquier est confronté dans cette activité. Dès lors, la gestion du risque de crédit que les PME présentent est d'un enjeu de taille pour les banques. Elles doivent donc mettre en place des outils pertinents permettant non seulement de mesurer le risque que ces PME présentent, mais aussi permettant de le gérer. Des systèmes de notation des demandes de crédit tels que la méthode du credit scoring ou les systèmes experts existent, mais leur coût élevé emmène à se poser des questions quant à leur réelle efficacité dans l'octroi de crédits aux PME. Dans nombre de cas, le banquier recherchera des sécurités importantes sous forme d'hypothèques ou de cautionnement, limitant ainsi l'exposition aux risques que les banques prennent, et pouvant déboucher sur des décisions de rejet des demandes de crédit des PME. Vu l'importance que les PME ont dans le paysage économique camerounais, la gestion du risque de contrepartie qu'elles présentent est donc d'un enjeu crucial pour les banques. La question de départ est donc la suivante : Les outils utilisés par la Commercial Bank-Cameroun en vue de la décision d'octroi de crédits aux PME camerounaises conduisent t-ils à une prise de décision pertinente de la part des dirigeants? Questions sous-jacentes Le développement de la question principale peut se faire à travers les points suivants : · Quels sont les différents risques auxquels sont confrontées les banques ? · Qu'est ce que le risque de contrepartie ? · Quels sont les outils de mesure du risque de contrepartie ? · Quels sont les outils de notation des PME utilisés à la CBC ? · Quel est le niveau de risque fixé à la Commercial Bank-Cameroun en vue de l'octroi de crédits aux PME ? · Quelles sont les limites du modèle utilisé ? Objectif et intérêt de l'étude L'étude que nous menons a pour objectif principal de déterminer le degré de pertinence des outils de mesure du risque de contrepartie que les PME présentent, étant donné leur importance dans le portefeuille des clients des banques. En effet, en vue de l'octroi de crédits aux entreprises, les banques se servent d'un certain nombre d'outils, qui leur permettent d'apprécier le risque que chaque contrepartie présente. Elles se fixent donc un niveau de risque à partir duquel les entreprises peuvent obtenir d'elles un crédit. Cependant, parmi les projets financés, certains ne génèrent pas suffisamment de ressources pour amortir le crédit. La présente étude se propose donc de déterminer si les outils de gestion du risque utilisés par la Commercial Bank-Cameroun sont pertinents. Ce sujet nous intéresse particulièrement, étant donné la situation actuelle de la Commercial-Bank Cameroun, qui, du fait de la non prise en compte des injonctions de la COBAC sur le respect des ratios prudentiels, se trouve en administration provisoire. Nous pensons par ce travail de recherche répondre aux questions de la communauté scientifique et des usagers des banques en général sur la corrélation entre d'une part, la décision de rejet d'un dossier de crédit et le risque qu'il présente, et d'autre part sur la corrélation entre la prise inconsidérée de risques et la défaillance d'une banque. Propositions Nombre de critères utilisés par les banques s'avèrent inadaptés au cas des PME et conduisent à un taux de non remboursement élevé. Dans l'appréciation du risque de contrepartie que les PME présentent, il convient de prendre en compte d'autres critères. Méthodologie de la recherche La méthodologie que nous adoptons, axée sur une étude de cas, s'articule en trois axes principaux : Dans un premier temps, nous avons procédé à la revue documentaire et à des entretiens : il s'est agi pour nous de collecter et d'exploiter les publications en matière de réglementation et de pratique de la gestion du risque de crédit, dans le but de déterminer le niveau de risque habituellement pris par les banques. Ensuite, nous avons étudié le modèle d'aide à la décision en matière de crédit utilisé par la Commercial Bank-Cameroun. Cette étude s'est faite de manière empirique sur un cas pratique, ce qui nous a permis de relever les forces et limites du modèle. Nous avons complété cette étude par l'analyse du taux d'impayés sur un échantillon de PME financées durant les deux dernières années pour des montants inférieurs à cinquante millions de FCFA. Plan du travail Le travail que nous avons entrepris comporte deux grandes parties développées en quatre chapitres. Nous avons d'une part, une partie théorique dans laquelle nous présentons le cadre conceptuel applicable au risque de crédit (chapitre I) et les techniques d'évaluation et de gestion du risque de contrepartie (chapitre II). Dans une seconde partie pratique, nous présentons les outils utilisés pour gérer le risque de contrepartie à la Commercial Bank-Cameroun (chapitre III) et apprécions l'efficacité des outils de mesure du risque utilisés. * 1 NEMBOT NDEFFO Luc, NINGAYE Paul (2007) : réformes financières et rentabilité du système bancaire dans les États de la CEMAC, African Economic Conference * 2 TCHAKOUNTE NJODA Mathurin, BITA Charles Alain (Octobre 2009) : La réforme du secteur bancaire camerounais, Revue africaine de l'intégration |
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