Section II Les sanctions pénales
Ne pas payer ses dettes n'est pas en soi une infraction. Mais
l'état de cessation des paiements s'accompagne souvent, ou est
précédé, de manoeuvres ou pratiques visant à en
retarder ou à en dissimuler la constatation. Le droit de la faillite a
fait l'objet pendant longtemps d'une forte pénalisation, le failli
étant souvent assimilé à un véritable
délinquant ayant trompé ses créanciers et devant
être sanctionné des peines de banqueroute. Le législateur a
même distingué dans le passé la banqueroute simple
(délit pénal) et la banqueroute frauduleuse qui, jusqu'en 1958, a
constitué un crime passible de la Cour d'assises.
Cette politique répressive s'est
révélée peu efficace, et une aspiration à la
dépénalisation s'est développée avant d'être
reçue dans la loi 1985 et amplifiée dans celle du 26 juillet
2005 : le délit de banqueroute a été unifié et
les anciens cas de banqueroute simple ne sont plus sanctionnés
pénalement. Le délit de banqueroute reste cependant le
délit majeur, le Code de commerce définissant à
côté de lui quelques infractions de moindre portée.
Paragraphe1 Délit de banqueroute
Aux termes de l'article L. 654-2 du Code de commerce :
« en cas d'ouverture d'une procédure de
redressement ou de liquidation judiciaire, sont coupables de banqueroute les
personnes mentionnées à l'article L. 654-1 contre lesquelles a
été relevé l'un des faits ci-après :
1. avoir dans l'intention d'éviter ou de retarder
l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, soit fait des
achats en vue d'une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens
ruineux pour se procurer des fonds ;
2. avoir détourné ou dissimulé tout
ou partie de l'actif du débiteur ;
3. avoir frauduleusement augmenté le passif du
débiteur ;
4. avoir tenu une comptabilité fictive ou fait
disparaître des documents comptables de l'entreprise ou de la personne
morale ou s'être abstenu de tenir toute comptabilité
« lorsque les textes applicables en font
obligation » ;
5. avoir tenu une comptabilité manifestement
incomplète ou irrégulière au regard des dispositions
légales ».
Le délit de banqueroute suppose l'ouverture d'une
procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Le
débiteur personne physique ou le dirigeant d'une personne morale qui
demande l'ouverture d'une procédure de sauvegarde n'encourt donc aucun
risque au titre de cette infraction. Ce délit reste limité au cas
d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation
judiciaire ; il n'a pas été étendu à la
procédure de sauvegarde.
Son étude nous intéresse sur deux points :
les personnes visées (A) et la saisine du tribunal et les sanctions
qu'il prononce (B)
A. Personnes visées
L'article L. 654-1 nouveau reprend la liste de l'ancien
article L. 626-1 (commerçant, agriculteur, personne immatriculée
au répertoire des métiers, dirigeant de personne morale,
représentant permanent d'une personne morale dirigeante) en y ajoutant
les personnes physiques exerçant une activité professionnelle
indépendante, y compris une profession libérale soumise à
un statut législatif ou réglementaire, ou dont le titre est
protégé. Cette extension s'inscrit dans le prolongement des
autres dispositions de la loi qui ont étendu à ces personnes les
procédures collectives ou de conciliation.
A la différence des sanctions personnelles, la loi
n'exclut pas les professions libérales soumises à des
règles disciplinaires propres, en raison du caractère
pénal de la banqueroute. En effet, de telles règles ne sauraient
prévaloir sur les poursuites pénales, qui ne relèvent ni
des ordres professionnels, ni d'une quelconque autorité professionnelle.
Les professionnels libéraux dotés d'une
autorité disciplinaire peuvent donc être condamnés pour
banqueroute mais, selon les travaux parlementaires, ils ne peuvent pas
être mis en faillite personnelle à titre complémentaire.
Une fois les prétendus responsables
énumérés, reste à traiter des questions de la
saisine du tribunal et des sanctions qui en découlent.
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