I - 2. Hypothèses :
Pour tout travail de terrain, on ne peut s'empêcher
d'avoir au départ des réponses anticipées que l'on se doit
de confronter à la réalité du terrain. C'est fort de cela
que des hypothèses suivantes sont formulées :
Ø Le clientélisme politique au Port Autonome de
Cotonou rend difficile la gestion des carrières et crée des
dysfonctionnements de l'appareil portuaire.
Ø Du fait des dysfonctionnements qu'il engendre le
clientélisme politique inhibe la compétitivité du Port
Autonome de Cotonou.
Les hypothèses de travail ainsi formulées
renvoient systématiquement à des objectifs à atteindre.
I - 3. Objectifs de Travail
Ils sont de deux ordres : l'objectif global et les
objectifs spécifiques.
I - 3 - 1. Objectif Global :
Il s'agit de concourir à une meilleure lecture des
implications du clientélisme politique au Port Autonome de Cotonou.
I - 3 - 2. Objectifs spécifiques :
Ø Saisir les niveaux de clientélisme dans la
structure et le fonctionnement de l'administration du Port Autonome de Cotonou.
Ø Identifier les dysfonctionnements dus au
clientélisme politique afin d'analyser leurs impacts sur les rapports
sociaux de travail entre les acteurs du Port Autonome de Cotonou.
I - 4. La notion de clientélisme
Le présent travail ne saurait être poursuivi sans
une clarification de certains concepts. Ces clarifications ne peuvent se faire
sans s'inspirer de certains travaux ayant abordé le présent
sujet. Mais il ne s'agira pas pour autant de les cautionner par une attitude
scolastique. Avant toute chose, « il est possible de s'entendre
sur le fait suivant : le patronage politique met en scène (entre
autres) un patron et un client. Les auteurs sont tous
d'accord là-dessus, tellement d'ailleurs que certains appellent
clientèle ou clientélisme ce que d'autres appellent
patronage » (Lemieux, 1975)
Le patronage ou la clientèle n'a pas le même sens
selon qu'on s'exprime en français ou en anglais (d'Amérique). Le
concept a un sens généralement noble, en français et veut
signifier l'appui bienveillant accordé par un haut personnage ou
une organisation. Par contre, le sens américain est celui des relations
entre un patron et un client. Si le sens américain du concept constitue
la base dudit travail, il se fait qu'il n'est pas bien fixé. C'est ce
qui permet à une certaine tradition de restreindre la clientèle
aux services publics. Comme situation de cette tradition, on peut se
référer à Sorauf, l'un des meilleurs spécialistes
des partis politiques américains, qui déjà en 1964
écrivait : « Le mot signifie les postes
gouvernementaux qui sont accordés ou bien en retour des services
politiques passés, ou bien dans l'expectative de services à
venir. » (Sorauf, 1964 :82). Mais certains politistes
américains trouvent une telle définition trop restrictive. C'est
dans cette optique que s'inscrit Wilson pour qui le patronage renvoie
plutôt à tout bénéfice de nature matérielle,
qu'un homme public peut allouer de façon discrétionnaire :
emploi, contrat, charte ou franchise, et même l'information à
caractère privé (Wilson, 1966 : 200).
Nombre d'auteurs définissent le patronage à
partir de ses caractéristiques. Celles-ci appartiennent à deux
grandes catégories. Les unes sont internes et les autres externes.
Parmi ces auteurs cités par Lemieux (1977), on
a :
Boissevain (1966 :18) pour qui « le patronage
se fonde sur les relations réciproques entre les patrons et les
clients..., le rapport est asymétrique car la nature des services
échangés peut varier considérablement ».
Foster (1963 : 1280) quant à lui n'emploie pas les
termes d'asymétrie et de réciprocité mais il affirme
que : « les contrats entre patron et client lient des gens
de statut socio-économique différent (ou de pouvoir
différent) qui échangent entre eux différentes sortes de
biens et services ».
Silverman (1965 :176) définit le
clientélisme comme étant une relation « entre des
personnes dont le statut et le pouvoir sont inégaux, qui leur impose des
obligations réciproques d'une nature différente ».
Powell (1970 : 412) trouve que le clientélisme est
une relation qui se développe « entre deux parties dont le
statut, la richesse et le pouvoir sont inégaux ». Il poursuit
en disant que pour que cette relation puisse s'établir et se maintenir,
il faut qu'il y ait « réciprocité dans l'échange
des biens et services ».
Pour le politiste Scott (1972 : 92), la relation entre le
patron et le client est comme une relation d'échange réciproque
entre deux individus de statut socio-économique différent.
Dans la même lancée, tout en définissant
les phénomènes de clientèle par leur composante externe,
Llyod (1965 : 91-92) souligne cependant que le client dépend de son
patron et que les deux sont dans une relation d'inférieur à
supérieur, c'est-à-dire asymétrique.
Ainsi, on peut à la suite de Caciagli et Kawata dire
que « le clientélisme décrit
des relations de pouvoir informelles fondées sur l'échange de
ressources entre des individus ou des groupes de statut inégal. Un
personnage qui jouit d'un statut supérieur (le patron) prend avantage de
son autorité et des ressources dont il dispose pour protéger et
dispenser des bénéfices à un inférieur (le client),
qui lui retourne ses faveurs sous forme de soutien et de services »
(Caciagli, Kawata, 2001). Il importe en outre de faire la différence
entre le clientélisme et trois autres pratiques qui lui sont très
proches (parce qu'étant les formes excessives de celui-ci) de par leur
dimension particulariste, mais avec lesquelles il ne peut être
systématiquement confondu :
- « "la corruption est
illégale alors que les rapports clientélaires sont en
règle générale couverts par la loi; l'assise
matérielle diffère: c'est en règle générale
de l'argent qui permet d'obtenir une prestation (corruption marchande) et non
le soutien politique; la relation y est moins verticale car, pour
être en mesure de corrompre, il faut disposer de ressources d'envergure,
notamment monétaires;
- le népotisme, dans lequel
l'élément-clé est le lien familial; dans ce sens, il peut
être vu comme un sous-ensemble du clientélisme, encore que la
dimension échangiste n'y soit pas nécessaire. En son absence, il
se rapproche du:
- favoritisme, dans lequel la
logique de l'échange fait défaut, puisque l'acte de "favoriser"
(par exemple un ami) est gratuit. "
Par pratiques clientélaires nous entendons donc les
pratiques suivantes que l'on peut classer en deux catégories, en
distinguant le clientélisme subalterne du clientélisme de haut
niveau ("power patronage").
Dans le premier type on retrouve : le "gros" du contingent des
pratiques, à savoir l'attribution de postes dans le secteur public ou
para-public; l'octroi d'allocations, de prêts, d'autorisations, de
subventions, d'exonérations à des entreprises ou à des
particuliers.
Dans le deuxième type on peut recenser:
- l'attribution de postes dans la haute fonction publique,
ainsi que des postes de direction dans les entreprises publiques ou
para-publiques. A ce sujet, nous sommes conscients du fait que la politisation
de ces fonctions n'est pas inhérente au clientélisme, dans la
mesure où elle est censée permettre au gouvernement de disposer
d'"hommes de confiance" dans les lieux-clé de la
décision. »(Caciagli, Kawata, 2001).
Enfin, définir le clientélisme politique,
à partir de la littérature existante, n'est pas une tâche
aisée. D'emblée, on se heurte à une dispersion
extrême des hypothèses, des analyses, des enquêtes et de
leurs résultats. Cette confusion apparente n'est la plupart du temps que
la conséquence de la diversité du phénomène et de
ses approches, mais aussi parfois de l'insuffisance de l'observation et des
« défauts » spécifiques de l'empirisme.
Certains chercheurs insistent sur le côté personnel de la relation
patron/client, mais d'autres assurent qu'elle peut être informelle, en
faveur d'un parti par exemple. Cette dépendance est perçue dans
certains cas comme locale et « clanique », dans d'autres
comme délocalisée et hors « clan ». Ainsi
« de nombreux africanistes observent-ils le clientélisme en
dehors de la parenté, alors que la plupart des ethnologues des
sociétés méditerranéennes font le contraire. Les
mêmes protagonistes se contredisent encore à propos de la
concurrence entre clients, réelle pour les uns, inexistante pour les
autres. Si la réciprocité asymétrique semble une
caractéristique admise presque unanimement, elle donne lieu à un
nouveau débat, son contenu variant d'un expert à l'autre, tour
à tour économique, social, politique, symbolique ou rituel. Le
déterminant culturel est souvent prioritaire chez les
spécialistes du monde méditerranéen, mais pour les uns,
l'honneur est décisif, pour d'autres, c'est l'envie. Quelques auteurs
soulignent son caractère d'entrave à une prise de conscience,
d'autres le contestent. Certains voient dans l'avènement du suffrage
universel la possibilité pour le client de marchander son soutien,
d'autres non. Le clientélisme est constamment soupçonné
d'être une survivance « féodale », un stigmate
des sociétés agraires archaïques, un comportement politique
« attardé »; cependant, à partir des
années quatre vingt, on commence à l'envisager autrement :
on le voit en phase avec les sociétés contemporaines;
entre-temps, il a été réévalué comme un
corporatisme, un lobby, ou une corruption (Merton, 1965) ».
Le rôle du patron n'est pas plus certain, médiateur pour l'un en
faveur d'un pouvoir central finalement hors de sa portée,
véritable détenteur du pouvoir pour l'autre. Le
clientélisme aurait pour résultat la promotion sociale des
clients, une proposition qui est également discutée. Certains le
jugent presque universel (Kaufmann, 1974), et si multiforme qu'il semble
partout et donc nulle part en particulier (Rouquié, 1978).
Souvent le phénomène porte une
dénomination purement locale ou est désigné de plusieurs
manières, parfois allusives, ou exprimé à travers
l'appellation d'un ou de plusieurs autres phénomènes avec
lesquels il est en rapport.
Il faut spécifier ici que l'intension n'est pas de
citer ou d'examiner les différents types de clientélisme qui
existe mais plutôt d'élucider les implications ou l'impact (en
terme de conséquences) du phénomène clientélaire en
général sur le Port Autonome de Cotonou. Il importe donc
d'opérationnaliser ce que nous entendons par
développement. Ainsi, le développement
serait « l'ensemble des processus sociaux induits par des
opérations volontaristes de transformation d'un milieu social,
entreprise par le biais d'institutions ou d'acteurs extérieurs à
ce milieu mais cherchant à mobiliser ce milieu, en reposant sur une
tentative de greffe de ressources et/ou techniques et/ou savoirs. »
(Olivier de Sardan, 1995 :7). Définis le mot développement
sous cet aspect, ne permettrait pas d'évoluer dans le travail.
D'ailleurs, l'auteur lui-même dit avoir proposé cette
définition du" « développement » dans une
perspective fondamentalement méthodologique" (Olivier de Sardan,
1995 :7). Ici, le développement est perçu dans le sens de
la reproduction sociale large c'est - à - dire lorsque l'Etat (agent de
développement) et les acteurs sociaux (agents de fonctionnement de la
société) parviennent à une accumulation et que celle-ci
est investie dans les secteurs de reproduction avec une mobilisation sociale
forte et créant de la valeur ajoutée.
La définition provisoire du clientélisme
politique sur laquelle se fondera le présent travail est la
résultante des définitions de Wilson (1966 : 200) et de
Sorauf (1964 :82). Le clientélisme politique signifiera alors tout
bénéfice, de nature matérielle, qu'un homme public (Le
Président de la République, le ministre en charge de
l'économie maritime ou membre de son cabinet, le Directeur
Général du PAC ou les membres de son cabinets, les directeurs
techniques) peut allouer de façon discrétionnaire :
nomination, emploi, contrat, charte ou franchise, et même l'information
à caractère privé en retour des services politiques
passés, ou bien dans l'expectative de services à venir.
I - Les axes de la discussion
Le clientélisme politique intéresse de plus en
plus les chercheurs en sciences sociales et plus particulièrement
les sociologues et anthropologues. Aussi peut-on noter un certain nombre de
travaux qui abordent le sujet chacun dans une approche bien définie, ce
qui ne permet pas d'en appréhender tous les contours. Mais ces travaux
ont le mérite d'apporter une certaine compréhension du sujet.
Ainsi Banégas dans son article
« Marchandisation du vote, citoyenneté et consolidation
démocratique au Bénin » (2000) a traité du
phénomène clientélaire. Même s'il s'agit du
clientélisme électoral, il a le mérite d'avoir mis en
relief la perception populaire et d'avoir montré que "la redistribution
clientélaire" est considérée comme une véritable
«vertu civique ». Par ailleurs, il montre que
l'énonciation clientélaire de la responsabilité politique
s'enchâsse dans une économie morale de la redistribution qui
conditionne fortement les perceptions du pouvoir légitime. Dans la
même lancée dans « La démocratie à pas
de caméléon, Transition et imaginaires politiques au
Bénin » (2003), il montre que l'argent constitue un
déterminant dans le choix des candidats au cours du vote. Si ces
ouvrages permettent de comprendre que l'électorat est beaucoup plus
attiré par les richesses matérielles et financières des
candidats, ils n'éclairent pas sur les moyens d'acquisition de ces
richesses.
Wantchékon en traitant du clientélisme
politique a étudié l'impact de celui - ci sur les comportements
électoraux. Dans son article « Clientélisme
électoral au Bénin : résultat d'une étude
expérimentale de terrain » (2005), l'auteur a
montré que les plates-formes clientélistes ont un effet
significatif sur le comportement électoral suivant la région, et
que l'électorat masculin est plus sensible aux plates-formes
clientélistes que l'électorat féminin. Ce faisant, il a
abordé une partie sensible du présent sujet lorsqu'il affirme
dans un premier temps que : « le clientélisme
entraîne une redistribution privée des ressources publiques au
détriment de l'intérêt général puisque les
politiciens qui y ont recours mobilisent les ressources nationales afin
d'obtenir les faveurs de segments privilégiés de
l'électorat. » et dans un second temps « comme
les procédures budgétaires de nombreux pays où de telles
pratiques sont courantes sont soit peu transparentes, soit
discrétionnaires le clientélisme tend à favoriser ceux qui
contrôle déjà le gouvernement... »
(wantchékon, 2005). Cette position de l'auteur vient conforter le
positionnement dudit travail.
Quant à Tillard dans son
article « L'île de corse face au droit
français, l'opposition culturelle en question »
(2003), elle montre que le malaise qui mine la
société corse ne dépend pas du clientélisme puisque
le clientélisme et la corruption ne pouvaient jamais être
éradiqués de la société corse car ils constituent
des phénomènes culturels. Pour l'auteur, ce ne serait alors plus
le clientélisme qui expliquerait le malaise qui ronge la
société corse depuis plusieurs années mais plutôt le
fait que l'on veuille à tout prix imposer un modèle de
démocratie qui ne s'accorde pas avec les préceptes fondamentaux
de ladite société. Tillard n'a pas mis en exergue le rapport qui
peut exister entre la corruption et le clientélisme politique, elle
s'est plus appesantie sur les bases démocratiques de la
société corse en mesurant combien la culture politique corse est
étrangère à la notion occidentale de gouvernement et en
voyant comment le phénomène clientélaire se
présente comme le fruit d'une relecture du modèle
légal-rationnel par le prisme des valeurs locales. Contrairement
à Tillard, la présente étude essayera de comprendre les
relations qui peuvent exister entre le clientélisme politique et la
corruption.
Par ailleurs, Padapoulos et Vaner dans leur
article «clientélisme de parti» (1989), en
adoptant une approche comparative, ont essayé d'évaluer les
répercussions des mutations dues au choc de la modernité sur le
clientélisme politique considéré comme le mode de
relations politiques dominant dans les pays de l'Europe du sud. Il a le
mérite de souligner que le clientélisme inhibe l'organisation
autonome des classes défavorisées. En plus de cet aspect du
sujet, il a ressorti les formes et niveaux du clientélisme partisan et
le rôle des intermédiaires. Après avoir fait une typologie
des partis politiques en relation avec le clientélisme politique, il en
a souligné quelques conséquences.
Dans son article « Le
clientélisme, nouvel outil de régulation des
territoires ? » (2004), Mattina, montre que les relations
de clientèle et les clientèles politiques sont quelque chose de
consubstantiel au politique et à la démocratie. De même, au
lieu de confiner les phénomènes clientélaires à la
seule analyse microsociologique, l'auteur les insère dans une dynamique
de compréhension générale des formes de gouvernement et de
régulation politique et sociale des sociétés urbaines.
Mattina interroge les liens entre la distribution de l'argent et des biens
publics et la distribution du pouvoir politique dans la ville. En plus,
l'auteur montre que la " régulation clientélaire" est
une modalité essentielle dans un gouvernement urbain. A travers cet
article, l'auteur a le mérite de faire un va- et- vient entre une
analyse microsociologique des relations interpersonnelles de clientèle
et une analyse macrosociologique des influences des politiques
clientélaires sur les gouvernements. Tout en permettant
d'éliminer certaines tendances allant dans le sens de la lutte contre le
clientélisme politique, même si Mattina s'insurge contre
l'approche culturaliste du clientélisme politique de Tillard, son
article ne renseigne pas sur les conséquences du clientélisme
politique.
Par contre, Tafani, dans son article « Du
clientélisme politique en France » (2005), a
souligné que l'analyse des clientèles est susceptible de remettre
en cause bien des certitudes. Il a aussi montré que leur
vitalité persistante contredit l'a priori progressiste selon
lequel elles ne seraient que des survivances en voie de décomposition.
Certains termes le soulignent aisément : « Qu'elles
survivent ainsi conduit en retour à se demander si nous ne vivons pas
dans un système qui, dans le fond, nous serait analytiquement mal connu,
mais que notre ethnocentrisme nous inviterait à accepter comme
étant le meilleur des mondes et auquel nous aurions attribué
arbitrairement un terme de référence : la
démocratie ». A sa suite, le présent travail s'est
efforcé de voir les certitudes des sciences sociales
qu'ébranlent les clientèles. Et enfin, il a montré ce que
leur étude révèle de ce système qu'on
appelle « « démocratie » et qui
dérange tant». Même si, son travail permet de faire un pont
entre les clientèles et les fondements des sciences sociales, il reste
qu'il ne renseigne pas sur les implications des clientèles dans
l'administration publique.
Le phénomène a donné lieu à des
généralisations diverses. Pour Balandier (1969), le
clientélisme africain, désigné sous la dénomination
prudente de « relations de dépendance personnelle »,
se caractérise de trois manières : par des relations duales
entre partenaires inégaux; par le libre choix du patron de la part du
client; enfin par l'absence de liens de parenté entre ces derniers. Ce
« clientélisme » prend la forme d'un réseau,
et non d'une hiérarchie, et il constitue un certain mode de traitement
de l'inégalité. Pour Médard (1976), dans le prolongement
de la littérature anglo-saxonne sur le sujet, la clientèle se
caractérise surtout comme une relation personnelle dualiste avec
réciprocité et dépendance à caractère
hiérarchique. La diffusion universelle du phénomène est
soulignée, et l'auteur invite à un traitement en
conséquence. Mieux, il propose de distinguer les sociétés
dans lesquelles le clientélisme est une donnée incontournable de
celles dans lesquelles il est en position marginale. Pour Weingrod cité
par lemieux, le patronage politique doit être abordé, en termes
généraux, à partir d'un schéma théorique
à caractère universel. Sur la base d'un modèle
cybernétique, Lemieux (1977) suit cette orientation et en vient,
à partir d'un recensement de nombreux comportements - du noble tutsi
à celui du boss nord-américain, en passant par le suzerain
médiéval ou le notable palermitain à redéfinir le
commerce clientélaire par la réciprocité (échange
de biens et de services) et par l'asymétrie (prestations et pouvoirs
inégaux), en soulignant ses conditions politiques (ni dictature ni
démocratie parfaite), administratives (perméabilité de
l'administration, tutelle lointaine) et culturelles (religieuses, parentales,
partisanes). L'apport de ces différents auteurs à ce travail
(Balandier, Médard, Lemieux) c'est d'avoir contribuer à une
meilleure compréhension des clientèles à travers une
caractérisation bien distincte.
Le présent travail s'intéresse à l'aspect
politique du clientélisme. C'est fort de cela qu'il s'inscrit dans la
même optique que Tafani. Néanmoins, sa spécificité
sera de ressortir les implications du phénomène
clientélaire sur le fonctionnement des entreprises publiques. Pour des
raisons de précision et de concision, le Port Autonome de Cotonou est
l'entreprise choisie.
|