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Environnement social précaire, décrochage scolaire et stratégies de réussite : une étude exploratoire du phénomène au quartier New-Bell de Douala

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par Siméon Boris Nguéhan
Université de Douala - Master II 2007
  

sommaire suivant

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REPUBLIC OF CAMEROON

Peace - Work - Fatherland

REPUBLIQUE DU CAMEROUN

Paix - Travail - Patrie

UNIVERSITE DE DOUALA THE UNIVERSITY OF DOUALA

FACULTE DES LETTRES FACULTY OF LETTERS

ET SCIENCES HUMAINES AND SOCIAL SCIENCES

DEPARTEMENT DE PHILOSOPHIE PHILOSOPHY AND

ET PSYCHOLOGIE PSYCHOLOGY DEPARTMENT

LABORATOIRE DES SCIENCES BEHAVIOURAL SCIENCES

DES COMPORTEMENTS ET DE AND APPLIED PSYCHOLOGY

PSYCHOLOGIE APPLIQUEE LABORATORY

UNITE DE RECHERCHE N° 1 : RESEARCH UNIT N°1 :

SCIENCES DESCOMPORTEMENTS BEHAVIOURAL SCIENCES

ENVIRONNEMENT SOCIAL PRECAIRE,

DECROCHAGE SCOLAIRE

ET STRATEGIES DE RÉUSSITE :

UNE ETUDE EXPLORATOIRE DU PHENOMENE AU QUARTIER NEW-BELL DE DOUALA

These présentée en vue de l'obtention du diplôme de Master II en Psychologie.
Spécialité : Psychologie Sociale

Par :
Siméon Boris NGUEHAN

Maître en Psychologie

Sous la Direction de :

Pr. André EMTCHEU
Maître de Conférences

Année académique 2006 - 2007

(( L'échec scolaire (tout comme le décrochage scolaire) n'est pas (et ne doit pas être) une fatalité attachée a une classe sociale, a une situation sociale difficile, a une période de la vie familiale perturbée »

(Marc Barthélémy)

SOMMAIRE

SOMMAIRE

DÉDICACES

REMERCIEMENTS

LISTE DES ABRÉVIATIONS LISTE DES ILLUSTRATIONS

RÉSUMÉABSTRACT

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIÈRE PARTIE : CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL 8

Présentation du cadre de l'étude 9

Chapitre 1 : La problématique 14

1.1. Le contexte de la recherche 14

1.2. Le thème et le but de la recherche 16

1.3. Le problème de la recherche 17

1.4. Les orientations théoriques de la recherche 17

1.5. La question de recherche 17

1.6. L'objectif et le but de l'étude 18

1.7. Les intéréts et la pertinence de l'étude 19

Chapitre 2 : La revue de la littérature et des concepts 21

2.1. La revue de la littérature 21

2.2. La revue des concepts 29

Chapitre 3 : Les modèles théoriques 43

3.1. L'influence sociale comme facteur de décrochage scolaire 43

3.2. Milieu populaire ou déterminisme de l'échec ? 51

3.3. Le modèle de l'influence intégrée de Urie Bronfenbrenner 53

3.4. Les résistances a l'influence sociale comme stratégies de réussite scolaire 59

DEUXIEME PARTIE : MÉTHODOLOGIE 67

Chapitre 4 : Rappel de l'objet d'étude et planification de la démarche de recherche 68

4.1. Rappel de l'objet de l'étude 68

4.2. Planification de la démarche de recherche 69

Chapitre 5 : La construction des hypothèses 73

5.1. Les objectifs de l'étude 73

5.2. Les questions de l'étude 73

5.3. La construction du guide d'entretien 74

Chapitre 6 : La population d'étude et l'échantillonnage 76

6.1. La population 76

6.2. La composition de l'échantillon et le mode d'accès aux interviews 76

6.3. Le plan d'entretien 77

6.4. Le déroulement des entretiens 79

6.5. Les difficultés rencontrées 79

TROISIEME PARTIE : RÉSULTATS 81

Chapitre 7 : Analyse univariée 83

7.1. Analyse descriptive de la variable indépendante 83

7.2. Analyse descriptive de la variable dépendante 85

Chapitre 8 : Analyse comparée des variables 95

8.1. Conditions et qualité de vie de la famille durant l'enfance 95

8.2. Pratiques éducatives parentales et langues de communication 95

8.3. Vie au quartier et sédentarité 96

8.4. Vie scolaire au primaire 96

8.5. Vie scolaire au secondaire 97

8.6. Raisons de l'abandon scolaire ou comment ne pas abandonner 97

8.7. Eléments d'influence conduisant au décrochage scolaire 98

Chapitre 9 : Interprétation des résultats 99

9.1. Discussion 99

9.2. Perspectives 99

CONCLUSION GENERALE 101

BIBLIOGRAPHIE 103

TABLES DES MATIERES 107

ANNEXES i

DEDICACES

A ma grand-mère Noukeu Marie épouse Nyakoua que nous appelons affectueusement << Mamiton >> qui n'a pas fait d'école officielle mais dont l'érudition est sans commune mesure d'avec celle de ceux qui l'ont faite. Elle a toujours su être présente pour m'enseigner que l'école est la porte ouverte sur soi, sur les autres et sur le monde.

A mon Père Youtchou Paul qui, mieux que quiconque et, sans trop bien le savoir, m'a inculqué le culte du dépassement de soi.

A la descendance Mbeu Nyakoua, toutes les générations confondues, afin que tous et chacun puissent comprendre que le décrochage scolaire est plus grave que la pauvreté matérielle.

A tous les membres de la famille Watonsi qui m'ont adopté et qui me soutiennent au quotidien.

Spécialement a tous les enfants de New-Bell, et singuliêrement a ceux de l'espace dit ' Quartier Makéa », qui ont un amour réel pour ce quartier et qui, chaque jour, font reculer les préjugés et les stéréotypes liés a cet environnement qui les a vus naItre et grandir , un quartier auquel ils s'identifient avec fierté malgré un « pincement aux lêvres » par rapport a la situation de ceux, « moins chanceux », qui y croupissent et qui, sans le vouloir, contribuent a, si ce n'est maintenir le statu quo, enfoncer davantage ce quartier emblématique de la ville de Douala et dans l'histoire du Cameroun. « Any man must try ana leck must bin »1

1 Terme du pidgin qui veut dire << Chacun doit se battre et la solidarité doit régner >>

REMERCIEMENTS

Les mots seront-ils suffisamment éloquents pour exprimer toute ma gratitude et la reconnaissance que je témoigne aux enseignants que vous êtes ! Cette étude sur " Environnement social précaire, Décrochage scolaire et Stratégies de réussite", qui se situe dans la droite ligne de la précédente (L'enseignant comme modèle d'acquisition de connaissances et de performances pour l'étudiant) , je vous la dois.

Pr. EMTCHEU : Vous m'avez inculqué, durant toutes ces années d'études, le culte de la rigueur méthodologique et de la simplicité. Par la direction de ce travail, une de plus, une expérience fort enrichissante, vous m'avez permis d'affiner mon esprit et de m'engager résolument dans la voie de la recherche. Puisse cette direction en appeler d'autres.

Dr SAME KOLLE, Dr NKELZOK, Dr NJIENGWE : Par vos enseignements, votre disponibilité et votre écoute attentive, j'ai, peu ou prou, comblé mes lacunes et nourri des ambitions légitimes vers des sommets de plus en plus élevés de la connaissance.

Pr. NSAME MBONGO, vous avez toujours été ouvert et disponible pour moi. Je ne vous remercierai jamais assez.

Ma reconnaissance va également a l'endroit de tous les autres enseignants de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Douala qui ont contribué a édifier le potentiel chercheur que je suis au rez-de-chaussée de la recherche.

Mes remerciements s'adressent, de manière générale, a tous les enseignants qui m'ont tenu jusqu'ici et m'ont servi de modèle pour atteindre ce niveau modeste de connaissances.

Je n'oublierai pas mes amnés académiques Banindjel et Noumbissie pour les conseils et critiques adressés a la présente oeuvre.

Trouveront ici l'expression de mes sincéres remerciements, ceux et celles qui, a travers ce qui est unique en eux et pour le soutien de chaque instant, ont occupé ou occupent une place particuliêre dans mon existence.

Je pense a Bille Nyokon, Wandji, Malam Gray, Fonkeu, Kwepet Nyamsi, Kouganou, Notet, Koubé, Lamago, Mbakop, Mfout Lamage, Essono Zibi, Polla, Njouondo, Ngoka, Yetmo, Atungu, Kwembou, Tchobang, Nkemi, Tchatchoua, Nemadeu, Omang, Sandjo, Kemadjou Njanke,Tchakounté. . .Mme Ndjielo, Tonga,

Je pense singulièrement a tous mes parents avec qui je pratique le sport tous les dimanches : M. & Mme Ngueliani, M. & Mme Signe, M. Tcha'ah, M. Beb, M. Nana Lozenou, M. Mandeng, M. Nzoukoua. Mais également mes parents du quartier << Bon Fils >> : Maman Nguekam, maman Satchie et Papa Djapa.

Je pense ici a mes camarades de promotion qui ont eu le courage moral d'aller au terme de cette recherche. Sans être exhaustif, je pense a Kommegne, Lengue, Mme Baban, Pola, Ndoungué, Douala, Bessiga, Sidjui...

Je pense également a tous mes collègues journalistes du bihebdomadaire d'informations générales " Le Detective " : Mawo, Messouane, Ngompé, Nzomené, Yettoh, Djamen, Njoh Soppo, Sack, Tatémo

Je pense a tous les membres de " Univers-Psycho "

J'en oublie certainement, mais que cette omission n'offusque personne : JE PENSE A

TOUS !!!

LISTES DES ABREVIATIONS

INRP : Institut National de Recherche Pédagogique (France)

INS : Institut National de la Statistique (Cameroun)

OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement

PCS : Profession et Catégorie Sociale

SEP : Sentiment d'efficacité personnel

UNESCO : United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture)

VI : Variable indépendante

VD1 : Variable dépendante n° 1

VD2 : Variable dépendante n° 2

ZEP : Zone d'éducation prioritaire

Figure

Titre

Page

LISTES DES ILLUSTRATIONS

Tableaux

Tableau N° 1

Tableau N° 2

Tableau N° 3

Tableau N° 4

Tableau N° 5

Tableau N° 6

Tableau N° 7

Tableau N° 8

Tableau N° 9

Tableau N° 10

Tableau N° 11

Tableau N° 12

Tableau N° 13

Tableau N° 14

Tableau N° 15

Tableau N° 16

Titres

Stratégie d'analyse des données qualitatives selon la méthode de recherche et d'investigation dite de l'entrevue semi-structurée

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur les conditions et la qualité de vie de la famille durant l'enfance

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur les pratiques éducatives parentales et les langues de communication

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur la vie au quartier et la sédentarité

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur la vie scolaire au primaire

Résumé des réponses des participants en rapport a la thématique portant sur la vie scolaire au secondaire

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur les raisons du décrochage scolaire ou comment ne pas décrocher

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur les éléments d'influence conduisant au décrochage scolaire a New-Bell

Résumé des réponses de chacun des participants en rapport a la thématique portant sur comment faire reculer l'abandon scolaire a New-Bell

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur les conditions et la qualité de vie de la famille durant l'enfance

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur les pratiques éducatives parentales et les langues de communication

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur la vie au quartier et la sédentarité

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur la vie scolaire au primaire

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur la vie scolaire au secondaire

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur les raisons du décrochage scolaire ou comment ne pas décrocher

Synthèse des réponses de l'échantillon en rapport a la thématique portant sur les éléments d'influence conduisant au décrochage scolaire a New-Bell

Figure 1 Influence de la collectivité sur le développement de l'enfant 47

Pages

72

85

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96

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RÉSUMÉ

La société camerounaise, en pleines mutations socioéconomiques, navigue sous le diktat des hautes sphères de finance mondiale. Cette situation impose une plus grande maItrise des technologies (toujours nouvelles) et une compréhension de plus en plus grande faite d'ouverture sur l'autre et du recul de l'ignorance a travers la globalisation, l'école étant le cadre par excellence d'implémentation de cette donne prégnante.

<< Tout le monde doit réussir a l'école >>, joli slogan. Mais qui devient vains mots dès lors qu'on jette un regard sur le quartier New-Bell. Non pas que d'autres quartiers d'autres villes du Cameroun en soient exemptés. Mais davantage parce que c'est un milieu atypique et difficile a qualifier. Quartier a statut particulier parce que se trouvant être le centre de gravité de la capitale économique du Cameroun, New-Bell donne tout son sens a l'étiquette de capitale économique a la ville de Douala. Cette position centrale de ce quartier, du moins en rapport a son potentiel économique, est complètement battue en brèche dès lors qu'il faut s'appesantir sur le potentiel cognitif des enfants issus de cet espace géographique. Non pas qu'ils soient génétiquement programmés a l'échec. La notion de décrochage scolaire devient centrale dans un système sociétal oü la qualification scolaire (le diplôme) devient synonyme de qualification sociale. Ainsi, la réussite scolaire et la possession de diplôme qui en résulte, constituent un << passeport >> de plus en plus nécessaire a la participation sociale tandis que l'échec scolaire représente un risque d'inadaptation psychosociale. Existerait-il un certain << déterminisme >> au décrochage scolaire dans le quartier New-Bell ? Quels sont les éléments de cet environnement qui justifient une telle interrogation ? Cette étude qui porte sur << milieu défavorable, décrochage scolaire et stratégies de réussite >> scrute le phénomène du décrochage scolaire a partir de l'expérience individuelle des enfants ayant vécu au quartier New-Bell. Elle se veut exploratoire et, de ce fait, cherche a identifier et décrire les éléments les plus pertinents a même d'expliquer le décrochage en ce lieu et attirer l'attention des parents, de la communauté éducative et des pouvoirs publics sur la spécificité du quartier New-Bell. En outre, elle part également des expériences ou mieux des stratégies de réussite des enfants de New-Bell pour baliser le chemin menant au succès pour qui vit a New-Bell. L'objectif étant, a terme, d'émettre des hypothèses devant servir de fil conducteur a une recherche a venir. Ainsi, stéréotypes et préjugés reculeront ; les enfants du quartier New-Bell pourront revendiquer haut et fort et partout oü besoin sera leur << new-bellitude >> et être fier de leur << new-bellité >>.

ABSTRACT

The Cameroonian society is in the process of radical socioeconomics transformations imposed by the institutions of Bretton Woods. This involves the absolute mastery of technologies always replaced and a greater understanding made of openness to the world and the fall of ignorance through globalisation. School is the excellent setting to implement this new deal that makes a rule.

<< Everyone should succeed at school! >>, nice catchphrase that becomes an empty word as soon as we look towards the New-Bell area. Not particularly because the other areas are preserved.

Area with a particular status according to the fact it is the centre of gravity of the Douala town, and by the activities that take place there, New-Bell area confirms literally the identity of economical capital given to Douala town. The central position occupied by this area, according to his flourishing economic activities, is given a pounding once one must dwell on the cognitive potential of the pupils living in this area. They are, certainly, not genetically programmed to dropout from school. The notion of dropout from school is becoming more and more central in our social system in which school qualification equals social qualification. Therefore, the success at school and the qualification that results are a << passport >> more and more necessary to one's social participation while dropout from school represents a risk of psychosocial maladjustment. This study about << unfavourable area, dropout from school and success school strategies >> examines dropout from school phenomenon from individual experience of children who have lived in New-Bell area when going to school. It looks for relevant features that can explain and help understand the dropout from school in this particular area, to draw parent's attention and also the educative community and certainly the authorities on the specificity of New-Bell area according to the dropout from school phenomenon. In addition, as an exploratory research, according to the school success experience or the strategies to school qualification of children of New-Bell area in order to mark out the way to a real school qualification to one's living in this unfavourable area named New-Bell. The main goal of this study is to identify and to describe New-Bell environmental characteristics that lead children to dropout from school, and strategies developed by pupils to face their particular unfavourable environment. The result is to put forward the hypothesis that will certainly help build a new and predictably study.

INTRODUCTION

(( L'école, en tant qu'institution, assume cinq fonctions essentielles (ludique, sociale, éducative, psychologique et pédagogique) pour un développement intégré des apprenants. Ce qui revient a dire de l'école qu'elle est la source a laquelle viennent s'abreuver les apprenants pour acquérir savoir et savoir-faire nécessaires a leur insertion dans la société. >

(S.B. Nguéhan, 2007)

L'école est donc le cadre idoine, au même titre que la famille et la communauté, pour la socialisation de l'individu. Pour ce faire, l'école doit permettre a chacun l'accession a l'autonomie en société, le développement de comportements intellectuels et sociaux d'adaptation au monde. Elle procède des échanges, d'un plus grand développement de la communication et de la solidarité. C'est également le lieu d'apprentissage des règles qui régissent un groupe, une institution et la société toute entière.

L'école devrait, de ce fait, accueillir chacun sans exclusive et le former selon ses capacités ; permettant ainsi de lutter de manière efficace contre les clivages générateurs de disparités entre les individus et prôner l'intégration scolaire des enfants et adolescents, leur permettant a long terme une meilleure intégration professionnelle et sociale.

Adoptés par tous les gouvernements des pays du monde, les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ciblent, en autres, la promotion de l'éducation a l'horizon 2015. Car, c'est l'éducation qui permet de choisir la vie que l'on mènera et de s'exprimer avec confiance dans ses relations personnelles, son milieu et son travail. Ceci devant se traduire par une plus grande scolarisation des adolescents et par conséquent la réduction drastique de l'illettrisme et le recul de l'analphabétisme.

Mais il arrive que l'école, dans sa mission, connaisse des défaillances du fait des interactions entre ses différents acteurs. Et ceci se traduit par des problèmes qui touchent principalement les apprenants, et dont les symptômes non exhaustifs se déclinent sous forme de déficience intellectuelle, de déficience de l'attention, de déscolarisation, d'élèves en difficulté ou en grande difficulté, de redoublants, de refus de l'école, d'élèves faibles, peu doués... ; symptômes qui conduisent tous a l'échec scolaire et au décrochage ou l'abandon scolaire.

Le décrochage scolaire, entendu comme la sortie du système éducatif sans qualification aucune ou sans diplôme, devient un problème public. Aujourd'hui, la notion de décrochage scolaire devient centrale dans un système sociétal oü la qualification scolaire (le diplôme) devient synonyme de qualification sociale. Ainsi, la réussite scolaire et la possession de diplôme qui en résulte, constituent un << passeport >> de plus en plus nécessaire a la participation sociale tandis que l'échec scolaire et le décrochage ou l'abandon scolaire représentent un risque d'inadaptation psychosociale.

Si au début du 20ème siècle, l'absence de diplômes ou de formation spécialisée n'étaient pas un frein a l'intégration sociale du décrocheur, l'évolution du contexte social, économique et politique appelle une lecture nouvelle du décrochage scolaire. En effet, le décrochage scolaire se présente désormais comme un problème non plus individuel mais davantage social.

Le rétrécissement de l'offre d'emploi pour les jeunes, le lien de moins en moins étroit entre l'école et l'emploi, l'omniprésence de la technologie dans la vie quotidienne, l'orientation nouvelle de l'économie qui valorise davantage la maItrise du savoir, du savoir-faire et de l'information, le désengagement de l'Etat en matière de soutien social et sanitaire... sont autant de changements historiques qui incitent a concevoir le décrochage scolaire comme une menace sérieuse a la qualité de vie des individus et au potentiel d'adaptation de la société.

L'objectif de faire en sorte qu'aucun élève ne quitte le système scolaire sans qualification va de pair avec celui de garantir a chaque élève les moyens nécessaires a l'acquisition d'un socle commun de connaissances et de compétences.

New-Bell est un quartier dont les habitants héritent, bon gré ou mal gré, des stéréotypes et préjugés par rapport a la société tous a connotations négatives. Et pour qui fréquente cet environnement, il est un constat qui se dégage : une frange importante de la population jeune est présente et oisive aux heures et jours ouverts aux activités scolaires. Tous ne vont plus a l'école. Une autre tendance est celle selon laquelle c'est pendant les vacances que le quartier fait son plein d'oeuf en raison du retour des "natifs" de ce quartier qui ont été << contraints >> de le quitter pour se donner de réelles chances de réussite scolaire. Est-ce que cette orientation d' << exil >> est la solution quand on sait que, dans le même quartier, des élèves réussissent ? Ceci invite

a investiguer le phénomène du décrochage scolaire dans un environnement << défavorable ( ?) >> comme celui du quartier New-Bell.

Cette recherche examinera New-Bell dans un contexte géographique (selon les lignes de démarcation des villes), mais s'appesantira a explorer les relations sociales au sein du quartier qui peuvent influencer le sentiment de communauté des habitants et, partant, le développement de leurs enfants, tout ceci du point de vue de l'expérience scolaire individuelle des uns et des autres.

En tant qu'étude exploratoire, cette recherche a pour intérêt de produire des hypothèses qui serviront de socle a une prochaine étude. En outre, scrutant en cela sa portée socio-économique, elle vise, a partir des expériences de réussite scolaire de personnes résidant au quartier New-Bell, a éviter un surcoüt lié a l'éloignement de l'enfant, une pratique éducative qui y a cours, pour lui donner de réelles chances de réussite. Elle vise également a faire reculer préjugés et stéréotypes liés a New-Bell.

Comme toute recherche, celle dans laquelle nous nous investissons a un but double : comprendre le décrochage scolaire dans un contexte << défavorable >> et comprendre comment la réussite, malgré de nombreuses entraves, prend corps. Nous appuyant en cela sur le vécu et le rendu de ceux qui ont été confrontés a cette situation (échec ou réussite scolaire) tout en résidant a New-Bell.

Une première conception, représentée par les théories de l'influence sociale et de la reproduction sociale, implique que les individus, par conformisme ou par mimétisme, sont influencés par les modèles et attitudes majoritairement présents dans leur environnement immédiat. Une seconde conception théorique, représentée par les théories de la résilience et de l'efficacité personnelle, implique plutôt la résistance et des stratégies pour faire face aux situations défavorables. Toutes ces conceptions trouvant un point fédérateur a travers la théorie écosystémique de Urie Bronfenbrenner qui percoit le développement de l'enfant dans un système d'interaction avec différents milieux dans lesquels il se meut ; et de la qualité de gestion de ces interactions dépendra la qualité du développement de l'enfant.

Dans un monde de plus en plus ouvert, l'éducation est la clé de voüte pour un arrimage réussi a ce << village planétaire > toujours en construction. Le Cameroun, comme la plupart des pays au sud du Sahara, souffre d'une couverture éducative

déficiente criarde. Les problèmes liés a l'éducation sont multiples. Ils sont d'ordre infrastructurel, économique et socioculturel. Les conséquences de ces manquements sont graves pour l'édification d'une population qui aspire a un mieux être. Le marché de l'emploi est de plus en plus sélectif et exigeant en terme de qualification.

Parler du décrochage scolaire et de l'échec scolaire, sans être un pavé jeté dans la mare, c'est s'attaquer a l'un des problèmes épineux a la base du chômage des jeunes. Compte tenu du fait que pour certains pays (Canada et a la France par exemple) le chômage des jeunes a un coüt qui vient grever le budget de l'Etat, au Cameroun, en l'absence de telles exigences, l'Etat promeut les meilleurs ( ?) ou mieux ceux qui réussissent a s'adapter au système mis en place. Les autres, les << rejetés >>, qu'en fait-on ? Est-ce que la recrudescence de la criminalité qu'on impute facilement a la pauvreté ambiante n'est pas en fait la conséquence d'une pauvreté éducative ?

Peu d'études au Cameroun scrutent le problème du décrochage scolaire. Et quand elles s'intéressent au décrochage scolaire (abandon scolaire, déperdition scolaire), ces études ne s'attachent qu'aux de données classiques (PCS, religion, sexe...), elles manquent d'éléments probants permettant de généraliser les résultats obtenus. C'est d'ailleurs les limites que relèvent les auteurs de ces travaux. Ces manquements nous invitent a partir de points nodaux liés a la communauté ou de milieux a difficultés réelles pour cerner et comprendre le décrochage scolaire et en proposer des mesures correctives adaptées.

Ainsi, pour le cas du quartier New-Bell qui nous intéresse, nous nous sommes posé la question de savoir quelle lecture, en rapport avec leur environnement, font les habitants de ce quartier du décrochage scolaire eu égard a leur histoire scolaire ? Cette première interrogation, somme toute générale, appelle de nouvelles. Notamment celles portant sur les éléments du quartier New-Bell, toujours a partir de l'expérience individuelle, qui influencent et expliquent la propension au décrochage scolaire des enfants de cet environnement ; en outre, tenant compte du fait que dans cet environnement quelque peu << hostile >> a la poursuite d'un cursus réussi, certains enfants, tout en demeurant dans ce milieu, connaissent des réussites scolaires, nous nous sommes intéressés aux stratégies que ceux-ci développent pour résister a l'influence de leur environnement, et ainsi juguler les entraves qui y sont endémiques.

Les sorties de l'école sans qualification ou sans avoir atteint le niveau escompté, les abandons en cours de scolarisation deviennent d'autant plus préoccupants qu'ils interviennent dans des types de société qui font du système de formation un passage obligé pour la prise d'emploi et l'insertion sociale. Ils le sont aussi parce que la responsabilité des trajectoires est de plus en plus dévolue aux individus, de moins en moins a des instances qui, de l'extérieur, diraient aux nouveaux membres de la jeune génération ce qui est meilleur pour eux. Ce changement n'est pas spécifique du monde scolaire, mais affecte toute la société, qui ne peut plus aujourd'hui être comprise comme un ensemble relativement homogène réalisant l'intégration de ses membres. Au Cameroun, bien que ne disposant pas de statistiques fiables, la situation est alarmante et mérite qu'on s'y intéresse de plus en plus.

La présente étude utilise le modèle bioécologique comme cadre général pour guider une recherche exploratoire. L'objectif premier ici est d'examiner l'histoire scolaire individuelle des résidants du quartier New-Bell afin d'y relever les facteurs potentiels de décrochage, ensuite scruter le développement des compétences scolaires ou encore de stratégies de réussite scolaire a travers un cursus scolaire sanctionné par l'obtention au moins d'un diplôme du secondaire. Pour ce faire, il est nécessaire de prendre pour points d'appui les caractéristiques individuelles, familiales, scolaires et communautaires rattachées aux participants de la présente étude pendant leurs années au primaire et au secondaire. Et, avoir leur avis sur les conduites a tenir pour faire reculer le décrochage scolaire dans cet environnement pas vraiment favorable pour les études.

La finalité de cette recherche est celle de décrire et d'expliquer le phénomène de décrochage scolaire dans le quartier New-Bell, il s'agit d'explorer le phénomène du décrochage scolaire. Cette recherche portant sur Environnement social précaire, Décrochage scolaire et Stratégies de réussite s'inscrit donc dans une approche dite exploratoire. Et parce que la nature des données a recueillir, les communications verbales notamment, détermine le choix de la méthode de recherche, dans le cadre de cette recherche, il est important de procéder par les entrevues informelles (semidirigées). Le recueil des données se faisant sur un petit échantillon (inférieur a 30

participants) pour être validé, 14 entretiens ont été menés avec des participants appartenant a l'un ou l'autre des deux groupes << décrocheurs >> et << non décrocheurs >>.

Deux concepts majeurs sous-tendent la présente recherche. Dans un premier temps celui de << environnement social précaire >> qui, dans notre perspective, renvoie a un environnement qui offre, de part les activités et les interactions qui s'y déroulent, de nombreuses interférences nuisibles qui, de ce fait, réduisent les chances de réussite scolaire pour celui qui les subit ; on peut dire en bref << milieu défavorable >>. Ensuite vient le concept de décrochage scolaire qui, sans être de l'échec scolaire, est une forme d'abandon scolaire (sortie du système éducatif) particulière a l'enseignement secondaire.

Les difficultés rencontrées tout au long de cette recherche se déclinent en trois catégories. D'abord les difficultés théoriques, en ce sens que peu d'études au Cameroun se sont intéressées au problème du décrochage scolaire. Ensuite les difficultés méthodologiques relatives aux études exploratoires ; notamment la descente sur le terrain qui nous a mobilisé deux mois durant pour recueillir les avis des participants. De nombreuses journées mobilisées sans atteindre les objectifs que nous nous sommes données. Et le temps relativement court pour une recherche bien menée.

Les limites et insuffisances de la présente étude portent essentiellement sur l'approche de recherche retenue. En général les études exploratoires, parce que issues des méthodes qualitatives, manquent de rigueur de l'échantillonnage et de reproductibilité.

Néanmoins, les principaux résultats obtenus, des suites de l'analyse des données, se déclinent en hypothèses principales suivantes :

H1 : Le décrochage scolaire des enfants du quartier New-Bell s'explique par leur sédentarité dans cet environnement.

H2 : L'appât du gain que suscite le caractère commercial de la zone New-Bell détermine le décrochage scolaire des enfants de cet espace.

H3 : La perte de repères identitaire des enfants du quartier New-Bell est en relation avec leur décrochage scolaire.

faire nous allons, dans la première partie relative au cadre théorique et conceptuel, construire une problématique a notre étude dans le premier chapitre. Ensuite, nous passerons en revue la littérature et les concepts se rapportant a notre problématique au deuxième chapitre ; puis nous examinerons les théories qui sous-tendent l'influence de l'environnement et les stratégies de réussite dans le troisième chapitre.

Dans la deuxième partie portant sur la méthodologie, nous procèderons au rappel de l'objet d'étude et a la planification de la démarche de recherche au quatrième chapitre, au rappel des objectifs de l'étude et des questions de recherche au cinquième chapitre ; a la construction de l'instrument de mesure, a l'analyse et a la définition des caractéristiques de la population et de l'échantillon de notre étude au sixième chapitre.

La troisième partie, relative aux résultats, s'intéressera aux caractéristiques des participants au septième chapitre, a l'analyse thématique des réponses au huitième chapitre et a la l'interprétation des résultats croisés au neuvième chapitre.

La conclusion donnera les lecons a retenir de la présente étude et, éventuellement, ouvrira des perspectives pour de prochaines recherches.

PREMIÈRE PARTIE :

CADRE THEORIQUE

ET

CONCEPTUEL

Présentation du cadre de l'étude

De manière générale, on peut définir un quartier en termes géographiques ou en termes sociaux. Des études antérieures prennent en compte ces deux définitions. Chacune a ses avantages et ses inconvénients. La présente étude se situe dans le cadre de la ville de Douala ; spécifiquement dans le quartier de New-Bell.

Dimension historique du cadre de l'étude

Le quartier << Neu Bell >> (écriture allemande), historiquement, est un no man's land imposé jadis au clan Bell par l'occupant allemand, des suites de leur expropriation du plateau Joss en 1913. Expropriation qui s'explique par une tolérance moindre de la proximité des habitations européennes et africaines. Pour ce faire, vers 1910, on s'est mis à découvrir des << inconvénients >> à cette promiscuité. Les cases Duala, à proximité des quartiers européens, construites en matériaux locaux, entourées de petites cultures et comportant puits et trous d'aisance étaient devenus, disait-on, des foyers à moustiques porteurs de paludisme.

En raison du boom démographique qui découlerait de la construction du chemin de fer dans la ville, phénomène déjà observé du côté de Bonabéri lors de la construction du chemin de fer, l'administrateur Rohm (1908-1914) et le Gouverneur Ebermaier (1912) verront la nécessité d'aménager des quartiers fonctionnels et résidentiels, plus viables et plus séparés tant pour les Européens que pour les Duala. En décembre 1913, les travaux de déboisement, de nivellement, de construction des routes, d'édification des puits et de rampes d'échouage de pirogues vont être engagés dans Neu Bell (50 hectares, 11 km de routes et 500 bâtiments et cases). C'est à la suite de sa farouche résistance à cette dépossession que le roi Rudolf Duala Manga Bell sera pendu le 08 aoüt 1914 avec certains de ses acolytes. En 1914, Neu Bell compte 1.000 personnes dont 800 étrangers non Duala.

A la veille du départ des Allemands, l'agglomération Duala se subdivise en six quartiers : Joss, Bali, Akwa, Deido, Bonabéri et Neu Bell. L'occupant allemand s'étant retiré en 1916, et suite aux négociations du clan Bell d'avec le nouvel occupant francais, Bali deviendra le nouveau lieu de fixation des bellois.

En 1925, un plan directeur d'urbanisme portant extension des quartiers européens et réorganisation des quartiers africains exclut New-Bell du périmètre urbain.

Dimension socioculturelle du cadre de l'étude

New-Bell, a la fin de la première guerre mondiale, est donc une terre en friche appartenant toujours aux déguerpis du plateau Joss mais essentiellement occupé par des << étrangers >> : des allogènes camerounais (Haoussas et Bamilékés) venus vers la côte en quête d'un mieux-être dans l'entre-deux guerre et une forte colonie ouest africaine (Nigeria, Gold Coast, Dahomey, Togo). La ville de Douala sera divisée géographiquement en trois pôles : le pôle administratif tenu par les administrateurs coloniaux (Joss) ; le pôle des autochtones, assimilés comme classe intermédiaire (Bali - Bonabéri - Akwa - Deido) ; et le pôle des allogènes (New Bell). New-Bell, en 1925 est exclu du périmètre urbain de la ville de Douala essentiellement en raison du fait que New-Bell était considéré comme un bien collectif du clan Bell. La conséquence de ce bannissement de New-Bell du périmètre urbain, fera que la << ville des étrangers >> se développera sans aide et hors de tout contrôle. Du fait de cette catégorisation en statut inférieur a lui donnée, New-Bell se développera a travers ce brassage ethnique et culturel. Une communauté nouvelle verra le jour a travers une unité linguistique : le pidgin. D'ailleurs, au sein de la plupart des familles du quartier New-Bell, le pidgin a substitué les langues maternelles.

Parce que vivant sur le même territoire, ils vont développer une communauté de vie en faisant abstraction des origines des uns et des autres. Un << esprit de corps >> va ainsi se dégager en ce lieu et, de l'interaction d'avec les résidants d'autres quartiers, le résidant du quartier New-Bell sera étiqueté de << barbare >>, << sauvage >> bref de tous les qualificatifs qui montrent que les habitants de ce ressort territorial n'ont pas encore complètement été << civilisés >>.

A New-Bell se répandirent des slogans politiques révolutionnaires et contestataires les plus dangereux pour le système colonial en place.

Plus récemment, pendant la période des << villes mortes >> (mouvements de désobéissance civile initié au tout début des années 90 en guise de revendication a

davantage de démocratie au Cameroun), New-Bell fut un foyer de tension irrésistible contre le régime en place.

Aujourd'hui, ces qualificatifs n'ont guère changé et, être considéré comme ressortissant des coins comme Makéa, Nfonké, Nganguè. fait << dresser les cheveux sur la tête >> de ceux que l'on a en face, surtout lorsque l'opposition dégénère en bagarre.

Dimension économique du cadre de l'étude

Alors qu'en 1970 Douala devient une ville considérable et que les quartiers en façade du Wouri restent toujours le centre ville, New-Bell devient le véritable centre de gravité de la ville ; il est le coeur de la ville et un immense centre d'attraction pour les activités économiques. Une autre entité se singularise dans le tout New-Bell, c'est le lieu de concentration de la plupart des marchés importants de la ville de Douala. En effet, on y retrouve :

* le << marché central >> qui, de ce fait, place ce quartier au centre de la ville de Douala ;

* le << marché de la gare de New-Bell >> spécialisé dans les vivres frais, vestige d'un glorieux passé du fait de la présence d'une gare de marchandises de la défunte Régifercam ;

* le << marché Congo >> spécialisé dans la transformation du bois en meubles, dans la mercerie, la joaillerie et maintenant des NTIC (téléphones portables en premier) ;

* le << marché Nkololoun >> spécialisé dans la vente de la friperie ;

* le << marché des chèvres >> spécialisé dans la vente des espèces ovines, porcines et de la volaille ;

* le << marché des femmes >> oü on peut s'approvisionner en articles divers en provenance de l'Asie ;

Parce que le << marché central >> est un point de convergence, il donne lieu a des activités informelles a l'exemple du transport par << cargo >> vers les grandes zones de peuplement de la ville de Douala. Mais le brassage humain facilite l'émergence de pratiques viles a l'exemple des voleurs a la tire (pickpocket), mais davantage des subterfuges (<< le fey >>) pour flouer les dames qui se rendent au marché en leur faisant miroiter d'éventuels gains ; il en est de même du << motion >> (lire en anglais) qui consiste a distraire le client afin de substituer un article après accord d'achat d'avec le client pour lui donner un autre détérioré et parfaitement emballé.

Des coups de force pour imposer << la loi de la territorialité >> qui est un code non écrit et qui s'impose a qui veut mener une activité sur ces territoires. Les rackets de commerçants expatriés accompagnés de menaces tous azimuts. En un mot, New-Bell est une << république >> dans la République.

Dimension urbanistique et démographique du cadre de l'étude

Considérer au départ comme une zone de peuplement, New-Bell est considéré comme un quartier populaire ancien. En effet, d'abord banlieue, New-Bell, du fait de l'extension de ville de Douala, est devenu péricentral. Cependant, l'exclusion du quartier New-Bell du périmètre urbain de la ville de Douala aura de graves conséquences.

a ... car accepter de négliger volontairement New-Bell parce qu'il appartenait aux expropriés de Joss, c'était laisser le "quartier" d'abord et la "ville des étrangers" ensuite se développer sans aide et hors de tout contrôle

technique... » (G. Mainet, 1986 : 63)

Durant la décennie 1950-1959, la ville de Douala connaIt une évolution urbanistique considérable. Mais, cette impulsion n'allait pas profiter au quartier New-Bell du fait de sa situation juridique. Pourtant, aux yeux de l'administrateur, New-Bell était préoccupant. Il y avait de fortes densités de population et la zone souffrait d'insalubrité alors que New-Bell devenait géographiquement le centre de la ville de Douala.

« Les pouvoirs publics ne pouvaient entreprendre l'urbanisation de New-Bell que si ses habitants devenus propriétaires pouvaient construire en toute confiance en dur. Nul accord ne put se faire entre les occupants allogénes et les ayants droit autochtones (Duala et Bassa)...Jusqu'en 1960, les Français

ne tranchérent point, ni dans un sens, ni dans l'autre, pour trouver ou imposer une solution juridique. En 1960 encore, les terres de New-Bell ne purent être ni partagées, ni vendues au bénéfice des étrangers, devant le refus réitéré des Duala et aussi celui des Bassa qui entrérent a leur tour en scene a cette occasion. Pour mettre un terme a ce conflit, le Gouvernement camerounais a fini par déclarer d'utilité publique (domanialisation du sol, en 1968), les terrains du périmétre de New-Bell et de ses annexes...Entre-temps, la population avait doublé (150 000 habitants en 1976) » (G. Mainet, 1986 : 71)

Jusqu'au début des années 80 et même de nos jours, la situation n'a guère changé. En effet, le caractère précaire de l'occupation, joint aux très fortes densités constitue un obstacle considérable a tout agencement urbain. Si dans la majeure partie des premiers quartiers de la yille de Douala, un changement réel et urbain y a été opéré,

« Dans leur ensemble, les quartiers des « étrangers > connaissent également une évolution interne. New-Bell demeure toujours New-Bell, c'esta-dire un monde vraiment a part et le probléme n° 1 des urbanistes et de l'administration. Le phénoméne New-Bell ne s'est pas résorbé ; il s'est en quelque sorte banalisé. ,, (G. Mainet, 1986 : 74)

Chapitre 1 : LA PROBLEMATIQUE

1.1. LE CONTEXTE DE LA RECHERCHE

"Tous les élèves doivent réussir a l'école", ceci pourrait être un slogan comme on en aime dans notre pays ou encore une des << grandes résolutions >> d'un séminaire de concertation de hauts cadres des ministères des enseignements secondaires ou de l'éducation de base, et pourtant, en examinant les niveaux scolaires a l'entrée ou a la sortie du collège, le but reste lointain.

Se situant dans le prolongement de l'échec scolaire, le décrochage scolaire est une réalité sociale qui prend des proportions alarmantes dans notre pays. Cette problématique a de graves conséquences tant dans la vie des jeunes que sur le plan socio-économique et politique.

Les jeunes qui décrochent font face a plusieurs préjugés. Ils sont considérés comme des paresseux, comme des jeunes sans persévérance n'ayant aucun but dans la vie. Pourtant, il y a a peine trente ans, les jeunes qui cessaient de fréquenter l'école étaient relativement << bien percus >> puisque c'était << monnaie courante >>. De plus, la société de cette époque n'accordait pas a l'éducation l'importance qu'elle lui accorde aujourd'hui.

Aujourd'hui, lorsqu'on parle du décrochage, on a souvent tendance a vouloir identifier des coupables, des responsables. Les parents et les enseignants sont souvent présentés comme étant responsables du décrochage scolaire. Pour ceux-ci, le décrochage est un problème qui les dépasse. En effet, le décrochage est percu souvent comme un échec. Pour certains jeunes, le décrochage est vu comme une aventure, une solution intéressante pour résoudre bien des tracas. Sans être facile, la décision de décrocher est un choix de vie qu'ils font vers la liberté.

Les structures scolaires et l'inadéquation entre les attentes des jeunes et les contenus des cours sont également des dimensions importantes a considérer dans les causes du décrochage. Beaucoup de jeunes ne voient pas la nécessité de ce qui leur est enseigné et sentent qu'ils ne sont pas a leur place a l'intérieur des structures scolaires.

Les conséquences du décrochage scolaire sont très nombreuses et elles affectent autant les jeunes que la collectivité.

Sur le plan individuel, les conséquences du décrochage fluctuent énormément d'un jeune à l'autre. Pour certains, quitter le milieu scolaire est une libération. Certains se sentent enfin autonomes et croient faire partie "du monde des adultes". Pour d'autres, l'abandon des études est vécu comme un échec personnel. Ces jeunes ne croient plus avoir le potentiel nécessaire pour rencontrer les exigences sociales. Enfin, certains jeunes vivent leur décrochage sous un mode ambivalent, c'est-à-dire qu'ils se sentent "libérés" tout en se percevant comme des " incapables ".

Par ailleurs, les jeunes qui cessent de fréquenter l'école ont peu d'endroits oü aller. Une bonne partie d'entre eux se retrouvent dans la rue. Selon certaines études, l'abandon du milieu scolaire entraIne une hausse des activités délinquantes de même qu'une augmentation de la consommation d'alcool et de drogues. Le décrochage scolaire peut donc parfois mener à la délinquance.

Le décrochage a aussi d'énormes conséquences sur le plan économique, une incapacité de recruter de la main-d'oeuvre qualifiée etc. Par ailleurs, les décrocheurs ont souvent des emplois précaires et sous-payés ou encouragent l'activité du " travail en noir ". Ils sont une main-d'oeuvre à bon marché et plusieurs secteurs d'activités en profitent. Le degré de scolarité a donc une incidence sur le revenu.

En outre sur le plan théorique, l'accent toujours mis sur le rapport de classe pour expliquer les différences constatées par la sélection qu'induit l'école est une manière d'éluder ou encore de ne pas prendre en considération certains postulats tout aussi opératoire. En effet, sous d'autres cieux (France et Canada), le phénomène du décrochage scolaire est pris à bras-le-corps par des politiques obligeant la scolarisation des enfants jusqu'à un certain age et le suivi réel des enfants des familles défavorisées et des milieux dits << difficiles >> à travers une politique de « l'école de proximité > et des ZEP. Dans notre pays, en l'absence de statistiques portant sur le décrochage scolaire, et davantage en raison des politiques éducatives qui n'intègrent pas la prise en charge des << rejetés >> de l'école pour une orientation nouvelle, un certain nombre problèmes se pose eu égard à la qualification de plus en plus grande exigée dans le

monde de l'emploi et une nécessité de commencer la lutte contre le chômage a la base et non a mi-parcours comme c'est le cas chez nous.

1.2. LE THEME ET LE BUT DE LA RECHERCHE 1.2.1. Le theme de la recherche

La présente étude s'insère dans un thème général auxquels se greffent des thèmes spécifiques.

Theme général : Influence sociale

Themes spécifiques :

- Le décrochage scolaire comme facteur d'influence sociale ;

- La réussite scolaire comme stratégie de résistance a l'influence sociale de l'environnement.

1.2.2. Le but de la recherche

Notre recherche se donne un but général et des buts spécifiques.

But général : comprendre le décrochage scolaire dans un contexte défavorable et comment la réussite, malgré de nombreuses entraves, prend corps. Nous appuyant en cela sur le vécu et le rendu de ceux qui ont été confrontés a cette situation (échec ou réussite scolaire) tout en résidant a New-Bell.

Buts spécifiques : expliquer le décrochage scolaire pas simplement comme un phénomène lié a la déficience de l'apprenant, mais davantage aux facteurs de milieu (ensemble des conditions externes, physiques et sociales, contribuant a déterminer les conduites d'un organisme et influencant son développement) a partir du vécu des décrocheurs mais aussi le dépassement de l'influence sociale par les stratégies de réussite développées par ceux qui, vivant dans ce milieu << hostile >>, ont bravé les obstacles et réussi a obtenir un diplôme.

1.3. LE PROBLEME DE RECHERCHE

A partir de l'expérience de réussite ou de décrochage scolaire des élèves issus du ressort territorial de New-Bell, nous nous proposons de déterminer les facteurs qui, le plus, favorisent le décrochage scolaire et aussi les stratégies les plus opératoires pour faire face aux injonctions << nocives >> de l'environnement New-Bell, du moins en ce qui concerne la poursuite d'un cursus réussi.

1.4. ORIENTATIONS THEORIQUES DE LA RECHERCHE

Une première conception, représentée par les théories de l'influence et de la reproduction sociale, implique qu'un environnement défavorable ne favorise pas la poursuite d'un cursus scolaire avec succès. Une seconde conception théorique, représentée par les théories de la résistance met en avant les stratégies que les uns et les autres pourraient développer dans cet environnement hostile pour contrer leur décrochage scolaire << programmé >>.

Les raisons sont multiples et pour saisir toute la dimension des facteurs potentiels de décrochage scolaire en << milieu difficile >>, il est nécessaire d'en faire une lecture systémique qui a le mérite d'être plus englobante. De ce fait, en toile de fond de toutes les théories mises en jeu dans cette recherche, se trouvera la théorie écosystémique de Urie Bronfenbrenner qui servira d'interface explicative a la fois du décrochage scolaire et des stratégies de réussite en conditions défavorables.

1.5. LA QUESTION DE RECHERCHE

Notre question de recherche se décline en deux composantes :

Question générale

Quelle lecture du décrochage scolaire, tenant compte des facteurs environnementaux, font les habitants du quartier New-Bell a partir de leur expérience scolaire ?

Questions spécifiques

Quels sont les éléments de l'environnement New-Bell qui justifient le décrochage scolaire des habitants de New-Bell ?

Comment, malgré cet environnement peu favorable a la poursuite d'un cursus réussi, certains parviennent a la réussite scolaire ?

1.6. L'OBJECTIF ET LE BUT DE L'ETUDE

1.6.1. Le moment scientifique

La notion de << moment scientifique >> fait généralement référence au niveau de développement des connaissances scientifiques dans un domaine particulier de recherche. Dans le cadre de cette étude, nous avons passé en revue de nombreuses études portant sur l'échec scolaire et le décrochage scolaire. Quelques-unes (très peu) se sont intéressées a l'influence de l'environnement social de l'apprenant sur la qualité du rendement scolaire. Pour la plupart des cas, ces études élaborées ailleurs, n'intègrent pas les spécificités et les caractéristiques de nos milieux sociaux.

Sans pour autant négliger la présence de quelques traits communs, on peut cependant émettre certaines réserves quant au caractère transposable, tel quel, des typologies élaborées, notamment au Canada, en contexte africain. A la différence des sociétés occidentales, le lien social est plus fort ici et la sociabilité plus grande quel que soit le milieu de résidence.

En plus, ces pays disposants de moyens probants, les politiques éducatives suffisamment éprouvées accompagnées de cellule de veille pédagogique permettent d'anticiper sur le phénomène du décrochage en y apportant des mesures correctives adéquates pour a la fois juguler l'abandon scolaire par la mise en place de centres spécialisés, et surtout le suivi et la mise a jour des statistiques du phénomène.

Ces insuffisances nous conduisent a aborder cette étude en menant une recherche exploratoire.

1.6.2. Enoncé de l'objectif de l'étude

Dans le cadre de cette recherche, nous nous donnons pour objectifs de :

- Identifier et décrire les caractéristiques du milieu et les éléments pertinents qui expliquent le décrochage scolaire du point de vue des acteurs dans le quartier New-Bell ;

- Identifier et décrire les stratégies développées par les uns et les autres pour faire face a leur environnement défavorable et réussir a l'école ;

- Déterminer comment les élèves de cet environnement arrivent a décrocher ou encore comment les élèves de cet environnement défavorable réussissent a faire abstraction des influences existantes et réussir dans leur parcours scolaire.

1.6.3. Enoncé du but de l'étude Le but de cette recherche est double :

1- Expliquer comment en environnement défavorable, le décrochage scolaire est prégnant et combien les habitants de ce type d'environnement sont susceptibles de ne pas poursuivre un cursus scolaire réussi et tirer la sonnette d'alarme sur la nécessité d'en faire des zones d'éducation prioritaires ;

2- Mettre en relief les stratégies développées par ceux des habitants de ces milieux dits défavorables pour poursuivre un cursus réussi.

1.7. INTERETS ET PERTINENCE DE LA RECHERCHE

En prenant connaissance des rapports statistiques de différents pays [a l'exception des nôtres qui ne sont publiées ni dans l'annuaire de l'Institut National de la Statistique 2006 disponible sur Internet (Cf. Annexe 1), encore moins dans la banque des données de l'Unesco] et portant sur le décrochage scolaire, force est de constater que l'accent est davantage mis sur les conditions économiques qui, ici, se référent au revenu général des familles. Cette démarche, quelque peu restrictive, s'intéresse très peu a une lecture autre du même phénomène en rapport avec l'environnement social qui peut être une entrave significative a la poursuite d'un cursus scolaire avec succès. Même les typologies des décrocheurs (notamment celle de Janosz) ne trouvent pas leurs applications sous d'autres cieux. En effet, si les typologies sont des indicateurs fiables, il reste qu'elles sont élaborées

dans les pays dans lesquels l'éducation est non seulement prioritaire mais obligatoire jusqu'à un certain age. D'ailleurs, dans ces pays (France et Canada notamment), les mécanismes de contrôle sont efficaces et des dispositions locales sont prises pour refréner l'ardeur de ce phénomène. Or en Afrique, et singulièrement au Cameroun, les choses se présentent tout autrement.

Chapitre 2 : LA REVUE DE LA

LITTERATURE ET DES CONCEPTS

2.1. REVUE DE LA LITTERATURE

Le décrochage ou l'abandon scolaire pose d'énormes problèmes aux politiques. En effet, scrutant en cela le rapport annuel qu'adresse le Cameroun à l'Unesco (Gf. Annexe 2), il y a des statistiques manquantes. Cette absence suggère au moins deux pistes de réflexion :

D'abord, que les parties concernées sont suffisamment édifiées sur l'ampleur du phénomène et, par conséquent, se refusent de les rendre public pour entretenir le flou et se soustraire de fait à la coercition des organismes compétents ;

Ensuite, soit on ne s'en préoccupe pas parce qu'on sait pertinemment que le faire consisterait à « marquer les buts dans son propre camp >> parce que les résultats qu'il donnerait à voir viendront un peu comme grever les statistiques rendues publiques à grand renfort de publicité sur le taux de scolarisation ou de couverture scolaire du pays...

Gabriel Siakeu, dans un article portant sur la déperdition scolaire au Cameroun (2000), tirait déjà la sonnette d'alarme sur des chiffres somme toute inquiétants tout en dénoncant le caractère non fiable des statistiques officielles. Issidor Noumba (2006), pour sa part, a traité du profil de l'abandon scolaire au Cameroun. Si les résultats auxquels il aboutit (par exemple que le taux d'abandon scolaire le plus élevé se trouve dans les familles à faible constitution) sont quelque peu surprenants, force est de constater que ce profil, qui correspond à une réalité ponctuelle ou régionale du Cameroun, se saurait être une référence pour un pays aux disparités socioéconomiques et culturelles importantes. Par conséquent, parlant d'un quartier comme New-Bell, il serait imprudent de se fier aux résultats de ces études préalablement citées.

Les théories traitant des influences du quartier sur le développement de l'enfant font valoir que des répercussions communautaires dépendent des interactions de l'enfant avec les adultes qui habitent dans le quartier, les ressources disponibles, les ressources utilisées et les caractéristiques de la collectivité. Les critiques sont d'avis que la

collectivité sert de toile de fond ou de contexte et que par conséquent, elle n'a pas d'influence directe sur le développement. Selon d'autres, la nature de l'environnement physique peut influencer la richesse de l'expérience de l'enfant et avoir des conséquences sur son développement. On serait tout de même intéressé de savoir si certains comportements se produiraient de toute facon, parce qu'ils sont attribuables à des facteurs individuels ou familiaux plutôt qu'à l'influence du quartier.

Or, dans la perspective de Urie Bronfenbrenner, le premier lieu de socialisation de l'enfant est la famille ou mieux les parents. En famille, il faut regarder le style éducatif parental ayant cours. Bien qu'il soit difficile d'établir avec certitude la typologie des styles parentaux en milieu populaire, il est certain que les styles parentaux en milieu populaire tout comme dans d'autres milieux sont un foisonnement d'interactions. Cependant, avec Baumrind (1978), indépendamment du milieu social d'appartenance des styles parentaux existent.

Grolnick et Ryan (1989) définissent le style parental comme étant un support à l'autonomie, une sorte d'engagement parental et de structure d'éducation. Darling et Steinberg (1993) précisent que les styles d'éducation des parents sont des pléiades d'attitudes et d'expressions non verbales qui définissent la relation entre parents et enfants, au gré des différentes situations. Baumrind (1978) a élaboré trois styles parentaux différant sur le plan des valeurs et des comportements : les styles autoritaire, démocratique et permissif. Rumberger et al. (1990), pour ce qui concerne le décrochage scolaire, estiment que les décrocheurs proviennent davantage de foyers caractérisés par un style parental permissif. Doucet (1993) démontre que les élèves identifiés comme étant potentiellement décrocheurs percoivent leurs parents comme étant plus permissifs, ce qui confirme les résultats d'études antérieures à ce sujet (Alpert et Dunham, 1986 ; Rumberger et al., 1990 ; Waddel, 1990). Aussi, ces résultats démontrent que les familles des élèves identifiés comme n'étant pas à risque de décrocher ont plus tendance à être démocratiques. D'autres travaux récents ont également vérifié le lien entre les styles parentaux et l'ajustement ou l'adaptation de l'adolescent (Eccles, Early, Frasier, Belansky et McCarthy, 1997 ; Herman, Dornbusch, Herron et Herting, 1997).

Un dossier spécial intitulé << Pratiques éducatives familiales et scolarisation >> de la Revue francaise de pédagogie, paru en 2005, a été consacré aux manières dont les parents éduquent leur enfant au domicile et a leurs répercussions a l'école. BergonnierDupuy (2005) y présente les grandes orientations de recherche en la matière en précisant l'objet, a savoir l'analyse des styles éducatifs familiaux, l'analyse de l'accompagnement parental a la scolarité et, pour les plus jeunes, l'étude des pratiques éducatives et des interactions parents-enfant liées a l'apprentissage (résolution de problèmes, interactions langagières, pratiques de la lecture). A la question de savoir : qu'est-ce qui, en fonction de l'âge de l'enfant, dans la socialisation et l'éducation familiales, de facon directe ou indirecte, favorise la réussite et l'intégration scolaire ou, au contraire, est susceptible d'entraIner des problèmes d'adaptation ? Les résultats de recherches provenant des différents champs sont relativement cohérents entre eux et mettent en avant les avantages d'une éducation familiale basée sur l'autonomisation et l'épanouissement de l'enfant. La combinaison de la disponibilité affective et de l'encouragement a l'autonomie a toujours un effet favorable sur les comportements de l'enfant et sur ses résultats aux évaluations, notamment a l'école.

M. Millet et D. Thin invoquent le << capital scolaire >> pour chercher a comprendre les parcours de rupture scolaire. Plus le capital scolaire des membres familiaux est élevé, plus << les ressources informationnelles et cognitives mobilisables dans le cadre de la scolarité >> auront des chances d'être en adéquation avec les exigences scolaires et donc, inversement, plus profond sera le sentiment d'abandon, de relégation qui alimentera le processus de rupture (Millet & Thin, 2005). Ceci revient a dire que les variables familiales, outre le style parental, comprennent également la participation parentale au suivi scolaire. Desforges & Abouchaar (2003) relevait qu'il existe de nombreuses et solides recherches sur les relations entre la réussite des élèves et la participation spontanée des parents a l'éducation de leurs enfants. En effet, au vu des recherches, l'implication des parents a l'éducation a un effet significatif sur le comportement et la réussite des enfants, même quand l'influence d'autres facteurs tels que l'origine sociale ou la taille de la famille a été neutralisée. Ceci dit, l'engagement des parents est fortement corrélé a l'origine sociale des parents (la participation croIt avec la position sociale). Les critiques pensent que l'apprentissage social passe par

l'interaction, généralement avec d'autres personnes semblables. Un tel << ancrage >> dans la collectivité est étroitement relié à la situation socio-économique. Les familles à l'aise ont plus de relations à l'extérieur de la collectivité qui peuvent se révéler importantes que les familles dont le revenu est moindre. Tazouti, Flieller & Vrignaud (2005), dans une étude, ont testé l'hypothèse selon laquelle l'influence de l'éducation familiale sur les performances scolaires ne serait non seulement pas indépendante du milieu socioculturel, mais qu'en outre les mêmes styles d'éducation familiale n'auraient pas les mêmes effets ou la même importance selon qu'ils caractérisent l'éducation familiale dans les milieux populaires ou non populaires. uls arrivent à la conclusion suivante : il se pourrait que les performances scolaires des enfants de milieux populaires soient d'abord dépendantes de l'influence spécifique de l'école alors que celles des enfants de milieux favorisés seraient plus influencées par leur éducation familiale.

En milieu populaire, les modèles familiaux se caractérisent beaucoup plus par leur diversité que par leur homogénéité. L'origine sociale des élèves, c'est un fait maintenant établi, constitue le premier facteur influencant le phénomène de la réussite ou de l'échec scolaire. Pourtant, il ne s'agit pas là d'un déterminisme - au sens strict du terme - et certains jeunes, issus de milieux à potentiel socio-économique faible, parviennent à mener à terme leur scolarisation.

Si de nombreuses recherches font constater que les jeunes issus de milieu populaire sont plus susceptibles d'éprouver des difficultés scolaires. Leurs parents sont en général peu scolarisés. Toutefois, le passé scolaire d'un parent, sa situation d'emploi ou encore le fait de vivre dans une famille monoparentale ou recomposée n'auraient pas un impact négatif irrémédiable sur le rendement scolaire des jeunes. Les difficultés des jeunes ne sont pas strictement liées à un milieu social modeste. Ces difficultés existant aussi en milieu aisé.

Comme le rapportent Rumberger (1995) et Franklin et Streeter (1992), il serait réducteur de croire que l'abandon scolaire ne regarde que l'école. Au contraire, la décision d'abandonner l'école résulte d'une longue évolution et d'un cumul de frustrations engendrées par les échecs scolaires et par les difficultés relationnelles avec les pairs (Parker et Asher, 1987), les enseignants et les parents (Potvin et Paradis,

1996). La famille, tout comme l'école et le comportement de l'élève sont les variables les plus souvent associées au décrochage scolaire (Doucet, 1993 ; Garnier, Stein et Jacobs, 1997 ; Janosz, 1995 ; Le Blanc et al., 1993 ; Rumberger, 1995 ; Rumberger, Ghatak, Poulos, Ritter et Dornbusch, 1990). Cette vision de plus en plus globale rejoint la préoccupation de Urie Bronfenbrenner dans sa théorie écosystémique.

Rompant avec une démarche quasi établie qui voudrait que le développement cognitif s'explique a partir d'un certain nombre de ses postulats, Urie Bronfenbrenner s'attarde a comprendre en quoi le contexte global joue un role dans l'initiation de tous les processus de ce développement. Pour lui, en effet, le développement cognitif ne se limite pas a un processus intellectuel isolé, il est une facon d'intégrer conceptuellement le monde qui nous entoure, et ce, grace aux multiples expériences et interactions issues de sa fréquentation.

L'enfant, dans la perspective de Bronfenbrenner, évolue dans un large système oü s'expriment de nombreuses influences qui viennent toutes orienter son développement. Ces influences proviennent aussi bien du milieu proximal que des sphères éloignées liées aux contextes politique, social, culturel, ou historique qui affectent ce milieu proximal. Le modèle de Bronfenbrenner ou modèle de l'écologie sociale part du postulat que le développement résulte d'une interaction entre divers niveaux de systèmes qui régissent l'enfant, soit l'ontosystème (les caractéristiques internes de l'enfant), le microsystème (la famille), l'exosystème (la communauté) et le macrosystème (la culture, le système politique). Ce modèle interprète le contexte global de développement des enfants comme un ensemble de systèmes dynamiques, emboItés et interdépendants, en perpétuelle interaction et se réajustant sans cesse.

Le modèle bioécologique de Bronfenbrenner remet au gout du jour l'importance de l'environnement physique, social et culturel dans lequel a lieu le processus de développement ; il met un accent particulier sur les activités des enfants (qu'elles soient dirigées ou non) de même qu'il souligne la pertinence de leur exposition a divers contextes (durée, fréquence, interruptions, opportunité du moment et intensité des différentes expériences).

En s'appuyant sur les recherches écologiques (Wachs & Purdue : 1979), Bronfenbrenner souligne le fait que certaines caractéristiques du milieu physique

(bruit, jouets plus ou moins stimulants, densité d'occupation des locaux) peuvent affecter le développement cognitif et intellectuel des enfants. Cet accent mis sur l'environnement physique rejoint la préoccupation de Valsiner (1987) dans son modèle développemental. Pour Valsiner, l'enfant évolue dans un environnement physique et social régulé, lui-même dépendant de la culture dans laquelle il s'insère. L'environnement devient porteur d'un sens qui peut orienter l'enfant dans son évolution. Au-delà des apprentissages fondamentaux comme le langage ou la motricité, les enfants intègrent alors une culture. A cet égard, les adultes jouent un role fondamental car << la mise en place d'objectifs par ceux qui décident des relations entre l'enfant et son environnement est assujettie aux antécédents culturels de [ces] individus.>> (Valsiner, cité et traduit par Thomas, 1994).

Dans un article intitulé << Proposal of a Four Dimensional Model of Social Response >> (Cf. Annexe 3), Nail, MacDonald et Levy appellent à une relecture des réponses à l'influence sociale. Aussi passent-ils en revue l'ensemble des auteurs qui en ont fait une étude descriptive et également ceux qui en ont fait une étude explicative. Cette synthèse a le mérite d'être exhaustive et repose essentiellement sur une approche d'exposition (avant et après) à la fois publique et privée. Chacune des expositions étant considérée dans deux cas : l'accord et le désaccord. Ceci débouche sur 16 réponses à l'influence sociale. Dans ces réponses, on trouve matière à explication de l'influence sociale mais également de résistance à l'influence sociale.

Le mérite de cette typologie descriptive tient du fait que : elle permet d'organiser des recherches empiriques ; elle permet de démarquer significativement des phénomènes proches ; elle fournit une base pour l'intégration des niveaux descriptifs et explicatifs de l'influence sociale et enfin elle suggère de nouvelles variantes de l'influence sociale ou encore celles qui, jusqu'ici, n'étaient pas reconnues.

Dans son livre intitulé Echec scolaire : travailler avec les familles, D. Verba (2006) s'est davantage appesanti au collège considéré comme lieu par excellence de focalisation de l'échec scolaire. On lui doit une typologie duelle : les parents << éloignés >> de l'institution scolaire, par fuite ou par désillusion, et les parents << impliqués >>, coopérants ou critiques. Son approche resitue les relations parents-école dans un contexte historique (place de l'école dans la société, contexte idéologique fort,

culture scolaire, role des classes moyennes). Pour lui, la lutte contre l'échec scolaire ne doit pas être un << parcours de combattants >> mais doit passer par des lieux d'échanges constructifs, basés sur une confiance mutuelle, au-delà des stigmatisations et dans un respect mutuel plus constructif.

Si les enfants des diverses classes sociales n'abordent pas la scolarité " à armes égales ", sans nier l'existence de différences de personnalité ou d'inégalités dans les rythmes de développement intellectuel, ce n'est pas, ou pas seulement, parce que les uns seraient " plus doués " que les autres, mais parce que la scolarisation est pour les uns le simple prolongement de la socialisation familiale, alors qu'elle représente pour d'autres la confrontation à une culture partiellement " étrangère " à leur expérience familiale, partiellement dénuée de sens et d'intérêt intrinsèque, mais qu'il faut assimiler si l'on veut s'assurer à terme le meilleur emploi et le meilleur revenu possibles. Ce rapide survol des acquis principaux de la sociologie des inégalités de réussite scolaire ne rend évidemment pas compte de la diversité des cadres théoriques, des contradictions et des incertitudes qui demeurent, des conflits sur la conceptualisation ou la pondération de tel ou tel facteur ou mécanisme. C'est ainsi que les uns peuvent, avec Bourdieu ou Bernstein, mettre l'accent sur l'inégale distance entre la norme scolaire et l'héritage culturel ou linguistique des enfants appartenant à différentes classes sociales. D'autres, avec Boudon, souligneront l'inégalité des niveaux d'aspiration ou, avec Berthelot, l'inégalité des capacités stratégiques des familles.

La sociologie de l'éducation n'en est pas restée à l'analyse des différences culturelles. Elle a montré que toutes sortes de différences et d'inégalités d'ordre extrascolaire ne se transformaient en inégalités d'apprentissage et de réussite d'autant plus sürement que parce que l'école ignore la diversité des enfants qu'elle accueille. Malgré les accents mis, depuis peu, sur l'individualisation ou la différenciation de l'enseignement, l'école reste encore largement " indifférente aux différences " (Bourdieu, 1966) lorsqu'elle enseigne. Dans la mesure oü elle traite les élèves comme " égaux en droits et en devoirs " (ibid. 1966), elle ne peut que transformer rapidement leur inégale distance à la culture scolaire, leurs inégales ressources matérielles et stratégiques en inégalités de réussite. Il faut donc s'interroger sur les conditions de

genèse et surtout de maintien d'une organisation scolaire génératrice d'échecs du simple fait qu'elle méconnaIt les différences personnelles et culturelles, alors que, comme certains pédagogues le disent depuis le début du siècle dernier, une " pédagogie sur mesure ", plus différenciée, pourrait éviter de les convertir de façon systématique et presque irréversible en hiérarchies d'excellence scolaire. Ce qui renvoie au débat sur les politiques de l'éducation et sur les forces sociales qui contrôlent le système d'enseignement, décident de ses structures, de son curriculum et du fonctionnement de la sélection. La reproduction des inégalités est-elle simple mécanisme observable ou résulte-t-elle d'une politique délibérée, sinon avouable, des classes dirigeantes ? C'est là toute la question posée depuis l'ouvrage de Bourdieu et Passeron (1970).

Dans l'analyse du fonctionnement de l'organisation scolaire, on insistera soit sur l'indifférence aux différences, sur le peu d'individualisation de l'enseignement ; soit sur les formes élitaires de l'enseignement et du travail scolaire et de l'évaluation, soit sur les mécanismes amplificateurs de toute inégalité inhérents aux règles de sélection et à la structure " arborescente " du système.

Si l'ennui et l'échec scolaire sont, selon les décrocheurs, les deux premiers motifs d'abandon au secondaire (Hrimech et al., 1993), ces jeunes rapportent par contre, comme facteurs favorisant leur persévérance à l'école, la garantie d'un emploi à la fin des études, une organisation plus individualisée des études et le soutien personnel d'un adulte. Toujours selon les décrocheurs, ce dont ils ont besoin, c'est d'un adulte qui leur parle, les écoute et les soutienne (Violette, 1991 ; Beardon, Spencer & Moracco, 1989), un adulte qu'on pourrait qualifier de mentor naturel ou spontané. Par ailleurs, il a été démontré que l'implication personnelle des adultes de l'école est un facteur de protection contre l'abandon prématuré (Bryk & Thum, 1989).

Le taux de chômage de ces adolescents qui ont décroché est le plus élevé parmi les catégories d'âges de la population active (Langlois, 1992). Dans le même ordre d'idées, Sum et al. (2003) soutiennent que les jeunes adultes qui n'ont pas achevé le cycle secondaire se trouvent en situation de précarité, ce qui compromet leur avenir économique et social. Et ceci pourrait fort bien expliquer la situation dans laquelle se trouvent les jeunes du quartier New-Bell.

2.2. REVUE DES CONCEPTS

2.2.1. New-Bell un milieu difficile a saisir : Esquisse d'une qualification du cadre de l'étude

Faire rentrer un quartier tel New-Bell dans une typologie est une entreprise somme toute périlleuse. En effet, au moins trois expressions entre en compétition sans qu'aucune, a proprement parler, puisse traduire de manière exhaustive la caractéristique du quartier New-Bell.

On peut, dans un premier temps, dire du quartier New-Bell qu'il est << populaire >> ; ce qui consiste a l'exclure du champ administratif du département du Wouri ou encore de l'arrondissement de Douala II qui y a fixé son siège, ou du moins en faire une catégorisation qui le discrimine au même titre que ceux qui y résident.

Attribuer le qualificatif de << milieu defavorable >> au quartier New-Bell ne serait pas juste parce qu'il comporte en son sein la plus grande concentration de marchés de la ville de Douala ; si la pauvreté est bien présente en ces lieux, elle ne saurait se généraliser car elle côtoie également des fortunes. Et que toute étude statistique ne saurait rendre a l'évidence de la modicité des revenus des habitants de ces lieux. En effet le secteur informel est ici prégnant et il est davantage facile pour les habitants de tirer leurs revenus des activités commerciales ayant cours dans leur cadre de vie.

Dire enfin de New-Bell qu'il est un << quartier difficile >> semble plus juste si on considère ce qu'en dit Bourdieu : << Les lieux dits "difficiles" sont [donc] d'abord difficiles a décrire et a penser >> (Bourdieu, 1993). Cependant, pour les auteurs qui se sont penchés sur la terminologie mieux a même de rendre compte de la réalité de ces lieux, aucune dénomination n'est pleinement satisfaisante. Si pour Cyprien Avenel (2007) l'expression << quartier sensible >> semble seoir, il pense néanmoins que les mots << assignent aux situations et aux populations une identité et une signification profondes >>. Dans une analyse portée sur la valeur économique du lieu, Michel Kokoreff (2003) privilégie l'expression << quartiers pauvres >>, parce que, dit-il, << les taux de chômage et la précarisation du travail caractérisent ces territoires en proie a la désaffiliation sociale >>. Dans cette perspective, il rejoint le point de vue de Foucambert

(1997) qui, parce qu'il trouve l'appellation usuelle (<< milieu populaire >> ou << milieu defavorise >>) empreinte d'hypocrisie, propose l'expression << milieu économiquement exploité >> qui a le mérite d'être plus globalisante.

Cependant, de tous les traits mis en relief, seuls trois semblent être des caractéristiques fédératrices de toutes les et peuvent, a notre humble avis, être des éléments clés permettant de singulariser le tout New-Bell. Il s'agit entre autres de la forte densité ce qui entraIne une promiscuité a nulle autre pareille ; une absence d'urbanisation qui implique a la fois des constructions anarchiques et dont la qualité laisse a désirer, une insalubrité prégnante et une difficulté d'accès ; la forte présence de ressortissants d'autres pays africains notamment l'Afrique de l'Ouest qui, parce qu'en aventure et en quête privilégiée de sécurité matérielle, est un contrepoids réel a cette volonté de maintenir les enfants a l'école.

Le quartier New-Bell semble être une sorte de melting-pot de spécificités des banlieues parisiennes, en raison de la présence en son sein d'une forte communauté de migrants ; mais qui s'en différencie parce que ces derniers se fondent plus facilement dans la masse et par la présence de lieux de commerce un peu partout. C'est davantage un environnement social précaire.

2.2.2. De l'échec scolaire au décrochage scolaire

Dans le champ de la psychopédagogie, la confusion est quasi permanente entre l'échec scolaire et le décrochage scolaire. Force est de reconnaItre que les deux concepts participent a l'opposé de la réussite scolaire. Cernons donc le contenu de ces expressions et en délimitons les champs d'application.

2.2.2.1. L'échec scolaire

L'O.M.S., dans sa classification, définit le handicap scolaire dans sa dimension situationnelle, comme la position défavorable de l'enfant quant a l'image qu'il a de lui-même en tant qu'élève mais aussi dans son rapport avec le monde, en relation avec un environnement social et familial le désavantageant par rapport a ceux dont l'influence familiale et socioculturelle les place en accord avec ladite << norme >> de la société dans laquelle ils vivent.

- Evolution historique dans la compréhension de l'échec scolaire

Au début du 20ème siècle, les élèves rencontrant des difficultés dans les apprentissages étaient considérés comme étant << débiles >> et rien n'était mis en place pour eux puisque la fatalité faisait qu'ils ne pouvaient pas apprendre.

Une remise en question de cet ordre de choses a abouti a un changement : ces élèves ne sont plus dits << débiles >> mais << handicapés >>, expression qui prête a confusion. Cependant, avec une nouvelle approche du handicap (Wood, 1982) qui se décline en trois dimensions : lésionnelle (déficience), fonctionnelle (incapacité) et situationnelle (désavantage).

L'échec scolaire n'est pas un phénomène récent, il apparaIt vers 1950. Avant cette date, il n'était question que de << succès >> ou << d'insuccès scolaires >>. On ne parlait pas d'échec scolaire mais << d'inadaptation scolaire >>, << d'anormalité >> ou de << débilité mentale >>. D'après les sociologues Bourdieu et Champagne, l'apparition du phénomène est due a l'ouverture des institutions secondaires aux catégories sociales qui en étaient exclues jusqu'alors. L'échec scolaire rend compte alors d'un phénomène lié a la massification du système éducatif francais (1960).

A travers la dimension psychosociologique du handicap apporté par Philip Wood, les travaux d'Alfred Binet sur l'échelle métrique de l'intelligence et ceux de Stern sur les calculs du quotient intellectuel, qui définissaient le handicap comme un retard mental, une débilité mentale, ont perdu de leur superbe. Désormais, on utilise la notion de grande difficulté pour expliquer le caractère désavantageant du handicap scolaire.

- Définition, caractéristiques de l'échec scolaire et prise de conscience

Le problème de l'échec scolaire suscite un vif intérêt. La notion d'échec scolaire revêt une complexité en partie due a sa position carrefour, au point de rencontre de différentes disciplines qui appellent des lectures différentes, et davantage des enjeux politiques et des poles d'intérêts notamment économique.

* Tentative de définition

L'échec scolaire s'inscrit dans une dynamique historique puisqu'il s'agit d'une notion << évolutive en fonction du contexte social >> nous dit Gérard Chauveau,

chercheur de l'INRP (Institut National de Recherche Pédagogique). Il serait donc réducteur et inadéquat de ne retenir qu'une seule définition.

En effet, l'échec scolaire a d'abord été vu sous l'angle psychologique. Assimilé souvent au déficit scolaire ou a l'inadaptation scolaire, l'échec va reposer sur la théorie des dons. Aussi, pour Viviane Isambert-Jamati, << l'élève qui échoue est celui qui n'a pas acquis, dans les temps impartis par l'école, les nouveaux savoir-faire prévus par les programmes >>. L'échec scolaire était alors percu comme un problème individuel prenant pour responsable l'élève. En réaction a la théorie des dons, les sociologues vont considérer l'échec scolaire autour des années soixante comme un problème social mettant en relation les retards scolaires avec les catégories sociales des familles. Ainsi, pour Bernard Lahire : << l'échec (ou la réussite) est le produit de l'interaction entre des configurations familiales déterminées et des formes de vie scolaires telles qu'elles existent a un moment donné >>. L'échec scolaire tel qu'il est défini ici implique la responsabilité de nouveaux acteurs que ce sont la famille, la communauté et l'école.

* Facteurs explicatifs de l'échec scolaire

Les facteurs explicatifs de l'échec scolaire mis en relief par les chercheurs peuvent être regroupés en quatre grandes catégories.

1. Les facteurs sociodémographiques

Les facteurs sociodémographiques renferment des variables comme le sexe, la langue maternelle, l'origine ethnique, la classe sociale et la nature de la région (rural et urbain). De même, on retrouve autour des élèves en grande difficulté des facteurs socioculturels. Leur inadaptation au système scolaire vient, pour la plupart d'entre eux, du fossé entre la culture dominante et la culture de leur classe d'appartenance. Il s'agit d'un problème d'adaptabilité a la normalisation des enseignements.

2. Les facteurs individuels

Les facteurs individuels comprennent les caractéristiques de l'élève relevant de l'école (les retards scolaires accumulés ; les difficultés d'apprentissage et d'adaptation, le temps consacré au travail scolaire : la participation aux activités parascolaires, l'absentéisme ; etc.) et les caractéristiques et attitudes personnelles des élèves (l'estime

de soi ; la motivation aux études ; les attentes et les aspirations scolaires ; le réseau social ; la toxicomanie ; la délinquance ; la dépression ; l'anxiété ; etc.).

3. Les facteurs familiaux

Les facteurs familiaux renferment des variables telles que la structure familiale (traditionnelle ou transformée), la taille de la famille, la relation parent-enfants, les styles parentaux et les comportements parentaux a l'égard de la tâche scolaire. La famille est le premier lieu de vie de l'enfant, c'est le lieu dans lequel va débuter le développement de sa personnalité. C'est une période primordiale au niveau du développement de l'enfant et le moindre dysfonctionnement peut avoir un impact considérable.

L'équilibre familial est ressenti comme une condition au développement psychomoteur de l'enfant. Le moindre sentiment de rejet est vécu de facon traumatisante sur le plan physique et mental (Dolto, 1989).

4. Les facteurs scolaires

Les facteurs scolaires regroupent les caractéristiques reliées a l'organisation de l'école (les programmes de formation ; la taille de la classe ; etc.) et les caractéristiques relevant des processus scolaires (l'encadrement des élèves, le climat de l'école ; la relation maItre-élèves ; le leadership pédagogique ; etc.)

* La prise de conscience de l'échec

L'échec scolaire est une situation qui provoque une véritable souffrance pour l'enfant et son entourage. Deux conséquences a cette situation peuvent essentiellement être observées :

- Un comportement perturbateur - La passivité

Dans les deux cas, l'enfant se marginalise. C'est inconsciemment la marque de nonadhésion au système se traduisant par la révolte ou le découragement. Pour certains, il arrive même que la situation d'échec soit intériorisée au point de freiner l'ensemble des activités intellectuelles.

Cet inventaire des facteurs explicatifs de l'échec scolaire n'est pas complet et nécessiterait d'être présenté à l'avenir avec précision. Il faut souligner cependant que l'échec scolaire n'est pas le résultat d'un seul facteur. Plusieurs facteurs variés participent à l'explication de l'échec scolaire. Ces facteurs, distincts certes, sont interdépendants. L'échec scolaire est en effet le produit de l'interaction entre des caractéristiques sociodémographiques, individuelles, familiales et scolaires.

Parmi les facteurs tel que classifiés, certaines caractéristiques peuvent être qualifiées de variables proximales c'est-à-dire celles sur lesquelles les acteurs impliqués peuvent agir, tandis que d'autres sont appelées variables distales oü ils ont peu ou pas de contrôle. Pour les décideurs politiques et les administrateurs scolaires, il est plus facile d'intervenir sur les variables scolaires rapprochées que sur les autres facteurs. Les caractéristiques des processus scolaires internes sont souvent désignées comme des variables proximales, dont l'impact sur les échecs scolaires a été établi par de nombreuses études. Il y a donc dans l'école de multiples facteurs variés sur lesquels on peut agir.

Il est nécessaire de cesser de croire que l'échec scolaire est la première cause du décrochage scolaire. Dans la plupart des cas, l'échec scolaire, certes fréquent mais non systématique, est la première manifestation d'un abandon mental, c'est-à-dire d'une perte d'intérêt profonde dont la manifestation remonte dans le temps.

- Lecture de l'échec scolaire sous le prisme de la sociologie de l'éducation

A partir du moment oü le plan de l'éducation est détenu, élaboré et contrôlé par la classe dominante, inéluctablement, sa culture (valeurs, savoirs et rapport au savoir) sera à coup sür dominante. Or les adultes appartenant à cette culture dominante transmettent une image et un héritage culturels à leurs progénitures qui sont en adéquation d'avec les normes d'excellence scolaire. Ceci entraIne d'emblée une inégalité dans l'appropriation de la culture scolaire selon qu'on appartient à la culture dominante ou pas.

Par la même occasion, la scolarisation paraIt, pour les classes privilégiées, l'extension " naturelle " de l'éducation familiale, et la réussite scolaire de leurs enfants le plus sür moyen de garantir la transmission de l'héritage. L'effet de cette proximité et de cette identification sont renforcés par l'ensemble des ressources matérielles et

symboliques que les classes privilégiées peuvent mettre à la disposition de leurs enfants : conditions de travail optimales, moyens matériels (jeux, livres, ordinateurs), aide des parents, recours aux lecons particulières, stages de langues, etc. A quoi il faut ajouter l'inégale capacité stratégique des familles à se dégager du " piège scolaire " (Berthelot, 1983) : choix des maItres, des établissements, du privé ou du public, de telle ou telle filière selon la conjoncture locale et l'évolution des mécanismes de sélection ; capacité de gérer la relation avec les enseignants, de négocier l'évaluation, de guider l'investissement dans le travail scolaire en fonction des branches ou des moments les plus rentables ; connaissance des filières, des diplômes et des débouchés ; capacité de piloter la carrière en fonction d'objectifs à long terme.

La lutte contre le chômage est une forme de lutte contre l'<< échec scolaire >> car la déstabilisation-insécurisation de la cellule familiale qu'engendre une situation de chômage de longue durée est incompatible avec le minimum d'ascétisme que l'on exige scolairement de la part des enfants.

Parce que expression de la culture de la classe dominante, l'école induit une dichotomie réelle. Il importe désormais de scruter l'impact de l'échec scolaire comme critère sélectif.

L'origine sociale

<< (L'échec scolaire) La réussite scolaire est fortement et positivement corrélée à l'origine sociale des élèves >> (Cherkaoui, 1996 : 49) telle est la conclusion fédératrice de toutes les études empiriques menées à ce sujet. Ici, l'origine sociale renvoie en général à la catégorie socioprofessionnelle du père, au diplôme ou au niveau culturel combiné au revenu de la famille.

Variables sociales et variables scolaires

Les variables scolaires et les variables sociales déterminent l'échec ou la réussite scolaire. Il appert que l'opacité des réseaux scolaires, c'est-à-dire que les critères sélectifs sont davantage implicites, désavantage les élèves issus des classes sociales défavorisées. Sans mettre de côté le fait que l'école a un coüt et qu'il faudrait bien être à la hauteur.

L'autosélection

L'autosélection correspond a la conséquence des décisions prises par l'élève ou sa famille, dont les fondements sont a rechercher dans des critères autres que ceux de l'échec scolaire, et qui amènent l'élève a décrocher ou a renoncer a une filière désirable au profit d'une autre qui l'est moins.

Deux constats (Cherkaoui, 1996 : 55) peuvent être faits (Girard, 1970) :

- les enfants issus de classes sociales défavorisées s'engagent moins souvent dans

des filières nobles que les élèves issus de classes sociales favorisées ;

- les enfants des classes sociales défavorisées quittent le système scolaire

beaucoup plus tot que les enfants des classes sociales favorisées.

2.2.2.2. Le décrochage scolaire ou l'abandon scolaire

Le décrochage scolaire et l'abandon scolaire sont deux termes qui désignent l'interruption (temporaire ou définitive) des études avant l'obtention d'une reconnaissance des acquis (diplôme, certificat, attestation d'études, etc.) de la part d'une institution d'enseignement. Le <<décrochage scolaire>> est généralement utilisé dans le contexte d'un abandon a l'ordre d'enseignement secondaire alors que l'<abandon scolaire> est un terme plus global qui est utilisé a la fois pour le secondaire, le collégial et l'universitaire.

- Historique du concept

Le phénomène du décrochage scolaire remonte au début de l'histoire des écoles. Le concept lui ne fit son apparition qu'au début des années 1970 et ce n'est que depuis la fin des années 1980 que ce sujet se retrouve au coeur des préoccupations éducatives. En effet, dans les décennies 60 et 70, beaucoup de jeunes quittaient l'école très tôt, mais cette réalité était "normale" puisque a cette époque, le travail manuel était valorisé et il fallait "gagner sa vie".

- Le décrochage scolaire : un long processus

Les chercheurs s'entendent pour dire que le décrochage scolaire est un phénomène multidimensionnel qui résulte d'une combinaison de facteurs en interaction les uns avec les autres. La décision d'abandonner l'école ne se fait pas sur

un coup de tête. Elle résulte dans la plupart des cas de frustrations accumulées sur une longue période. Ces frustrations sont engendrées par les échecs scolaires et par les difficultés relationnelles avec les pairs, les enseignants et les parents, mais aussi par un environnement social défavorable. Progressivement, les décrocheurs se désengagent et s'éloignent de l'école.

* La trajectoire vers le décrochage

Même si les difficultés scolaires ne peuvent être isolées de leurs causes et effets sociaux et subjectifs, le décrochage scolaire apparaIt comme le fruit d'un processus lent. Le décrochage est comme une démotivation, un désintérêt pour toute forme d'apprentissage. L'absentéisme, la violence et la délinquance sont parfois des conséquences du décrochage. Décrocher, c'est ne plus écouter, ne plus avoir envie, c'est s'ennuyer a l'école ; donc, s'absenter et ne plus fréquenter du tout l'école.

La trajectoire qui conduit a l'inadaptation sociale et scolaire serait la suivante (Downs et Rose, 1991) :

Refus de participer aux activités scolaires individuellement -* Regroupement de ceux qui refusent de participer aux activités scolaires -* Perception négative des autres élèves -* Apparition de troubles de comportement -* Consommation de drogue et d'alcool -* Absentéisme scolaire -* Problèmes disciplinaires, suspension -* Abandon des études

* Caracteristiques

Le sexe

Il semble, confirmé en cela par des études canadienne, que les garcons soient plus nombreux que les filles a quitter les études secondaires avant d'obtenir leur diplôme.

Des stratégies d'adaptation (coping) infructueuses

Les décrocheurs potentiels se distinguent des autres par l'utilisation de stratégies d'adaptation inefficaces, tels l'évitement et le déni (Barton).

Une estime de soi déficiente

Les élèves a risque de décrochage ont une faible estime d'eux-mêmes qui les amène a se dévaloriser, a perdre confiance et a douter de leurs capacités. Cette situation contribue au développement d'un sentiment d'impuissance.

Des relations difficiles avec les adultes

En plus d'éprouver des difficultés dans leurs relations avec le personnel enseignant, les décrocheurs potentiels vivent des conflits familiaux fréquents et ont peu d'échanges sur leur vécu scolaire avec leurs parents.

Une vision négative de l'école associée aux difficultés scolaires

Contrairement aux élèves qui réussissent, les décrocheurs ont une attitude négative face a l'école, aux enseignants et a l'apprentissage. Ils voient plutôt l'école comme une source de mauvaises expériences auxquelles ils attribuent leur abandon avant d'obtenir leur diplôme. Ils se différencient également des autres par leur faible performance scolaire, particulièrement en francais et en mathématiques, et entretiennent peu d'aspiration quant a leur réussite. L'échec scolaire est un facteur très puissant en faveur du décrochage.

Une motivation insuffisante

Les jeunes a risque de décrochage entretiennent une attitude défaitiste face a leurs mauvaises notes qui contribue a alimenter leur faible rendement scolaire. Peu motivés a travailler pour remédier a leur situation d'échec, ils envisagent plus facilement d'abandonner l'école (Violette, 1991).

Des troubles de comportement

Les décrocheurs potentiels ont plus de difficulté a respecter les règles de l'école. Ils éprouvent aussi plus de problèmes de comportement extériorisés et intériorisés que les élèves qui ne présentent pas de risque (Potvin & Papillon, 1993).

Troubles de comportement extériorisés

· Paroles et actes d'agression injustifiée envers les autres

· Intimidation, destruction et refus persistant d'un encadrement justifié

· Manque de maItrise de soi

· Manifestations antisociales et agressives

Troubles de comportement intériorisés

· Problèmes associés a une très grande maItrise de soi

· Cognitions négatives envers soi

· Peurs excessives des personnes ou des situations nouvelles


· Tristesse, anxiété, dépression et dépendance
· Retrait social

Des amis et un réseau social qui leur ressemblent

Les jeunes a risque se lient le plus souvent avec des pairs qui traversent des expériences scolaires négatives similaires. Les adolescents ont en effet tendance a se regrouper dans des réseaux homogènes et leur développement social est fortement influencé par les amis qu'ils fréquentent.

* Définition

Le décrocheur << type >> est un jeune inscrit au niveau secondaire et qui n'est plus inscrit dans un établissement d'enseignement l'année suivante alors qu'il n'a pas obtenu son diplôme d'études secondaires.

Le décrochage scolaire est un processus de rupture d'un jeune d'avec l'ensemble de son environnement ; vivoter << dans la rue >> constitue trop souvent le moyen par lequel il s'identifie. L'enjeu est ici important car si le décrochage est le miroir des difficultés d'adaptation et d'identification, c'est aussi le miroir de l'exclusion. Il est le résultat de souffrances multiples qui passent des revers aux échecs, des échecs a la marginalisation, de la marginalisation au rejet et du rejet a l'exclusion. Car c'est bien ce dont il est question, le décrochage scolaire n'est que le reflet du décrochage social.

* Les facteurs

Le décrochage scolaire est lié a plusieurs facteurs de conscience personnelle. Il est en effet impossible d'étudier ce phénomène sans tenir compte d'autres types de décrochages qui influent les uns sur les autres. Ce sont les décrochages : social, économique, familial ...

Plusieurs facteurs d'ordre personnel peuvent amener un jeune a décrocher. La démotivation est probablement un facteur déterminant dans la décision du jeune d'abandonner ses études. En effet, l'étudiant démotivé qui fait face a plusieurs échecs scolaires, en vient a percevoir le marché du travail comme la solution a ses difficultés. D'autres facteurs personnels peuvent souvent aussi expliquer le décrochage scolaire : les difficultés économiques, l'obtention d'un emploi, la faible estime de soi, les difficultés interpersonnelles, le besoin de liberté et de changement de même que l'abus

de drogues, de médicaments et d'alcool peuvent tous être des motifs de l'abandon des études. Chez les filles, la grossesse peut être la cause du décrochage.

Les conséquences de l'abandon scolaire sont bien connues : sur le plan personnel, plusieurs adolescents présentent des troubles de comportement et de la délinquance ; sur le plan économique, ils éprouvent de grandes difficultés a s'insérer dans le monde du travail.

* Les profils des décrocheurs

- Les jeunes venant des familles "défavorisées et dysfonctionnelles". Ces jeunes vivent ou qui ont vécu de multiples changements dans leur vie et sont dans une situation socio-économique précaire.

- Les jeunes qui sont des "indépendants a esprit créateur". Ces derniers sont issus de familles favorisées sur le plan financier et leurs parents ont un niveau d'études élevé. Toutefois ces jeunes n'aiment pas les structures scolaires, et se dirigent souvent dans le domaine des arts.

- Les jeunes "centrés sur les métiers" qui considèrent que les connaissances transmises par le milieu scolaire sont inutiles. Ils ont souvent des problèmes académiques et des "troubles" de comportement. Ces jeunes sont attirés par le travail manuel ou spécialisé. - Les jeunes "membres des minorités". Ces jeunes ont des difficultés d'intégration dans le milieu scolaire, ils se sentent de trop et sont souvent victimes de discrimination.

- Enfin, la dernière catégorie est celle des "élèves en situation critique". Ils proviennent de familles dont les parents sont peu scolarisés et s'intéressent peu ou pas a leurs études.

- Relation entre décrochage scolaire et délinquance

* L'absentéisme comme précurseur de la délinquance

L'absentéisme, précurseur du décrochage scolaire, est aujourd'hui considéré comme un problème social relevant de l'ordre, voire de la sécurité publique. En effet, sans encadrement, que deviennent les jeunes en dehors de l'école ? Sont-ils sujets a la délinquance, exposés a des trafics divers ? Comment meublent-ils ce temps qu'ils ne consacrent pas a leurs études ?

Les jeunes absentéistes, au même titre que ceux ayant déjà décroché, appartiendraient à une << classe dangereuse >>, nécessitant un contrôle accentué et se trouvant au point de convergence à la fois de la recrudescence de l'insécurité et l'augmentation de la délinquance juvénile.

* Décrochage scolaire et délinquance

L'école, en tant que lieu par excellence de sociabilité de l'enfant, peut, comme l'atteste certains travaux, être le cadre de l'émergence de conduites délinquantes. Plusieurs auteurs analysent l'école comme un possible déclencheur de déviance du fait du décalage constaté par les élèves de milieux populaires entre le discours et les possibilités réelles qui leur sont offertes. Certains élèves ne sont pas spécialement opposés à l'école au début de leur scolarité, mais les difficultés scolaires, l'intériorisation du stigmate de << mauvais élève >>, finissent par les conduire à adopter des pratiques déviantes les éloignant largement des normes scolaires.

Mais tous les jeunes en échec scolaire ou en décrochage scolaire ne sont pas pour autant délinquants. Il convient de considérer ces analyses comme des hypothèses de facteurs déclenchants, combinées à d'autres paramètres. L'arrêt de la scolarité sans qualification ne signe ainsi pas systématiquement l'entrée dans une carrière délinquante, les enfants ou adolescents étant souvent gardés au sein des familles, et peu ou pas du tout exposés à la commission d'actes de délinquance de proximité. Un élément supplémentaire permet de relativiser la relation entre abandon scolaire et délinquance : les raisons qui ont poussé à l'abandon des études. Les jeunes qui ont décroché pour des raisons familiales n'ont pas commis d'actes délinquants par la suite. En revanche, on a pu noter une corrélation positive avec toutes les formes de déviance pour ceux qui ont arrêté leur scolarité car ils n'aimaient pas l'école.

Par ailleurs, les faits de délinquance constatés au sein de l'école ne sont pas systématiquement corrélés avec des absences répétées ou des processus d'arrêt de scolarité. Au collège, des élèves peuvent être présents et commettre des actes délinquants à l'extérieur de l'établissement.

Enfin, certains auteurs affirment que l'abandon scolaire permet de réduire le stress et la frustration vécus à l'école, facteurs favorisant l'apparition des conduites délinquantes. En effet, plusieurs recherches conduites au cours des années 1980

indiquent que les élèves ayant arrêté leur scolarité et trouvé un emploi ont diminué leurs activités délinquantes deux fois plus que ceux qui n'en ont pas trouvé. Encore faut-il que les décrocheurs soient en age de travailler et que le marché du travail leur offre des emplois disponibles, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui au Cameroun et singulièrement dans la ville de Douala.

* L'impact des groupes de pairs dans les activités délinquantes

L'influence des pairs et le regroupement des outsiders du système scolaire sont des éléments a prendre en compte dans la construction d'une sous-culture déviante. La logique de bande offre un refuge et une défense contre le sentiment de dévalorisation qui habite les jeunes, tout en contribuant a activer le processus de déscolarisation.

Au cours d'une recherche menée a Roubaix, Maryse Esterle Hedibel a constaté que les jeunes ayant commencé des activités délinquantes avant l'arrêt de leur scolarité les ont continuées par la suite, au sein d'un groupe de pairs. D'autres, qui n'avaient eu aucune activité délinquante, se sont retrouvés très isolés a la suite de l'arrêt de leur scolarité et la bande permet de contrebalancer cet isolement. Ceci confirme le fait que les << absentéistes >> sont plus liés a une sociabilité fermée, alors que les autres vivent des sociabilités dominées par les changements induits par le monde scolaire.

L'impact du décrochage scolaire sur les conduites déviantes ou délinquantes n'est pas démontré dans tous les cas. Il dépend du contexte socio-économique, des possibilités offertes par le marché de l'emploi, et des expériences vécues antérieurement et /ou au cours de leur scolarité par les intéressés. Si absences répétées et délinquance existent chez les mêmes sujets, la relation de cause a effet entre l'un et l'autre n'est pas généralisable.

Chapitre 3 : LES MODELES THEORIQUES

3.1. DE L'INFLUENCE SOCIALE A L'INFLUENCE SOCIALE COMME FACTEUR DE DECROCHAGE SCOLAIRE

L'influence sociale est un concept fondamental dans le champ de la psychologie sociale qui, elle, pourrait se définir comme l'étude de l'influence sociale (Jones, 1985).

<< Par influence, nous ne disposons que d'un mot : un seul pour désigner un ensemble de réalités différentes, voire contradictoires ; un seul mot pour désigner tant l'action de l'effet, tant l'uniformité que le changement ; un seul mot qui désigne selon les cas, la meilleure et la pire des choses...».

(G. Paicheler, 1985).

L'influence se définit comme l'énergie, la force qui, sous formes de pressions extérieures, agit sur les individus en modifiant leurs comportements.

L'influence sociale, dans la perspective de Allport (1985), détermine toutes les situations dans lesquelles les pensées, sentiments et comportements d'un individu sont affectés par la présence réelle ou imaginaire d'une ou plusieurs personnes.

L'Homme, en tant qu'être social, est régulièrement soumis au phénomène d'influence. A travers les interactions sociales, le phénomène d'influence s'incruste dans toutes les composantes relationnelles des individus qui composent la société, et dans la société tout simplement.

Dans la perspective de la psychologie sociale, le processus d'influence s'observe sous le triptyque : normalisation (influence réciproque des uns sur les autres dans l'optique de déboucher sur une norme commune), innovation (influence d'une minorité) et conformité (influence de la majorité).

Cependant, dans le cadre de cette étude, nous nous en tiendrons a scruter l'influence sociale a travers ses opérateurs. Notamment, l'influence des familles, des pairs et de la collectivité. Tout en gardant a l'esprit que le thème de l'influence sociale s'inscrit a l'intérieur d'une problématique qui révèle d'un côté le caractère influencable de l'individu et de l'autre, le poids du contexte en fonction duquel il définit ses comportements.

3.1.1. Les facteurs des pairs : le conformisme comme un obstacle a la réussite scolaire

Entendu comme l'influence de la majorité, le conformisme ici se présente sous différents visages :

- L'imitation, levier de l'influence dans un contexte social (Tarde). L'imitation modifie la conscience des individus qui se fient aux modèles (Bandura).

- L'apparition de leader, exprimée par le passage d'idées personnelles a des idées suggérées.

- Le phénomène de masse, qui canalise les comportements a travers les émotions et les sentiments qui se propagent dans la foule. Les comportements sont socialement contagieux car basés sur la suggestion.

On peut alors dire que lorsque qu'il y a présence ou contact avec une personne, il y a influence, et ceci est vrai a chaque fois qu'un individu se retrouve dans une situation sociale, on parlera alors de facilitation sociale.

Tarde et Le Bon insistent aussi sur une notion très importante, a savoir la dimension de fascination qui dépasse largement l'individu, qui ne peut que l'accueillir et la transmettre plus loin, mais elle lui échappe.

Le simple contact avec une personne, comme on peut s'en apercevoir, entraIne une certaine influence sur les individus, ce qui est encore plus vrai quand les individus sont en groupe. Il y a alors d'autres facteurs qui interviennent dans les interactions sociales tels que :

- L'environnement

- L'intériorisation (acceptation du milieu fréquenté)

- Désindividualisation : Importance de l'anonymat

- La dynamique de conformité

3.1.2. Facteurs communautaires qui influencent le développement de l'enfant

3.1.2.1. Les facteurs familiaux

En tant que cellule fondamentale de la société, pont entre cette société et l'individu, et matrice intégrative de l'être humain dans cette société, la famille est la matrice organisatrice de la vie sociale de l'enfant et son role traditionnel est celui de l'éducation. Et, de ce fait, elle joue un rOle prépondérant dans la socialisation de l'enfant.

Pour mieux observer les facteurs familiaux, il faut prendre en considération de nombreux éléments :

- Le revenu de la famille

- La structure de la famille

- Le style parental ayant cours

- L'implication des parents

- La qualité des relations familiales

LE STYLE PARENTAL

Le style parental est défini comme une constellation d'attitudes et de pratiques parentales qui sont communiquées à l'adolescent et qui créent un climat émotif à travers lequel les comportements parentaux sont exprimés (Darling et Steinberg, 1993). Quatre styles parentaux ont été postulés par Maccoby et Martin (1983), dans le prolongement des travaux de Baumrind (1971), à partir de la rencontre de deux dimensions (le degré d'affirmation du contrOle et la sensibilité aux besoins de l'adolescent) : autocratique, permissij', désengagé et démocratique.

Le style parental désengagé a été associé à une forte incidence de problèmes intériorisés chez les deux sexes, de même que le style autocratique, ceci chez les filles particulièrement (Baumrind, 1991 ; Friedrich, Reams et Jacob, 1988). Par ailleurs, le style autocratique a également été associé à un risque plus élevé de troubles extériorisés, alors que le type permissif est relié à des problèmes de comportement à l'école et de consommation de drogue, à des problèmes d'impulsivité, d'agressivité, ainsi qu'à un manque d'habiletés à prendre ses responsabilités. Enfin, le style désengagé a aussi été associé à une forte incidence de problèmes extériorisés.

Un deuxième courant d'études s'est ainsi centré sur le style démocratique, ce dernier étant celui qui semble avoir l'effet le plus bénéfique sur le développement de l'adolescent. Deslandes et Royer (1994), dans leur étude portant sur des adolescents de milieu scolaire, rapportent que le style démocratique semble être le plus favorable au développement de l'adolescent, et ce, pour plusieurs aspects : estime de soi, indépendance et compétence dans les domaines social et scolaire. Steinberg, Lamborn, Dornbusch et Darling (1992) scindent le style démocratique en trois facteurs composites de la socialisation, soit l'engagement parental, qui mesure à quel point l'adolescent percoit ses parents comme étant chaleureux, sensibles et impliqués ; l'encadrement parental, qui concerne la supervision et les limites imposées par les parents ; et l'encouragement à l'autonomie, qui mesure jusqu'à quel point les parents utilisent une discipline démocratique et encouragent l'adolescent à exprimer son individualité.

L'ENGAGEMENT DES PARENTS

Parmi les exemples de signes d'engagement ou d'implication des parents, on peut relever :

- un suivi efficace à la maison des enfants en âge pré-scolaire, en terme de sécurité, de stimulation intellectuelle et de prise de confiance en soi ;

- l'entretien d'un modèle familial d'aspirations à l'éducation et de valeurs citoyennes (visites de musées, fréquentation de bibliothèques...) ;

- des rendez-vous avec les enseignants pour comprendre les règles de l'école ainsi que les procédures, les programmes, les devoirs et les évaluations ;

- des participations aux manifestations de l'école ;

- des coups de mains à l'école et aides diverses (encadrement de sorties, etc.) ;

Les valeurs positives des parents envers l'éducation et leur intérêt pour l'école sont intégrés par les enfants et participent à leur motivation, même si la force de cette influence décroIt avec l'âge et le niveau scolaire. L'engagement des parents à la maison est largement plus efficace que leur engagement dans l'école, et les variations de résultats en fonction de l'engagement des parents sont plus importantes que les variations dues aux caractéristiques de l'établissement scolaire.

LA QUALITE DES RELATIONS FAMILIALES

Parmi les facteurs de risque associés a l'étiologie des problématiques adolescentes, les relations familiales ont été identifiées comme cruciales tant pour le développement de la dépression que pour le développement des troubles du comportement. Ceci, bien que plusieurs auteurs s'accordent pour concevoir que la relation entre les variables familiales et ces problématiques reste difficile a cerner plus précisément et peut résulter de plusieurs facteurs dont la psychopathologie parentale, le tempérament de l'enfant ou de faibles habiletés parentales. De plus, cette relation peut et doit être conceptualisée de manière bi-directionnelle. Par exemple, les conflits familiaux peuvent engendrer la dépression chez un membre de la famille, comme a l'inverse, la dépression d'un membre de la famille est un facteur de stress important pour les autres membres (Hammen, 1991). De même, Frick (1998) souligne que le lien causal entre le fonctionnement familial et les troubles du comportement reste a être prouvé par des études empiriques. De faibles habiletés parentales peuvent certainement être a l'origine des difficultés comportementales de l'enfant. A l'inverse, un tempérament difficile de ce dernier peut rendre l'application de pratiques parentales ardue.

3.1.2.2. L'influence de la collectivité

Figure 1 : Cadre pour étudier l'influence de la collectivité sur le développement de l'enfant

Même si les recherches se sont souvent concentrées sur les répercussions que les caractéristiques individuelles de l'enfant, les caractéristiques de sa famille et celles de ses pairs peuvent avoir sur un développement sain, peu d'études ont examiné le role que joue la collectivité dans le processus développemental. Selon les idées reçues, les collectivités exerceraient une influence indépendante sur les enfants, mais les résultats empiriques ne sont pas clairs. Les relations entre la collectivité et le développement de l'enfant sont complexes et multiples. Par conséquent, les théories qui mettent en corrélation les collectivités et le développement de l'enfant se basent sur des hypothèses non vérifiées ou des explications partielles de ces phénomènes sociaux complexes. Aux fins de notre cadre, ces théories peuvent être classées en cinq groupes.

- La collectivité en tant que milieu physique

La collectivité en tant que milieu physique s'intéresse a l'infrastructure et aux caractéristiques physiques d'un quartier qui pourraient favoriser ou entraver le développement de l'enfant. Les aspects physiques et les infrastructures de la collectivité réfèrent a la qualité des maisons, la qualité de l'urbanisation, l'état d'insalubrité,. qui sont considérés comme autant d'éléments qui influencent le développement et le comportement des enfants. Ces variables pourraient être considérées comme des indicateurs d'un malaise plus grand ou de la détérioration de la collectivité, mais elles n'influencent peut-être pas directement les comportements. Certains théoriciens, a travers notamment la théorie de la privation relative, voient une relation entre une estime de soi plus faible et un environnement de moins bonne qualité, et les comportements négatifs qui en résultent.

- La collectivité en tant qu'environnement social

Les caractéristiques sociales de la collectivité comme le revenu moyen et le niveau de scolarité des habitants, la diversité, le nombre de familles monoparentales et le nombre d'enfants par adulte peuvent avoir des répercussions sur les résultats développementaux des enfants qui ont grandi dans le quartier. Le processus par lequel ces caractéristiques influencent le développement n'est pas clair. La théorie de la contagion sociale fait ressortir le rOle de l'imitation, des modèles de comportements et de l'apprentissage social au contact des pairs de l'enfant dans le quartier lorsqu'il s'agit

d'influencer les comportements, tandis que la théorie de la socialisation collective porte sur les répercussions des modèles comportementaux adultes dans la collectivité de l'enfant. Les adeptes de l'apprentissage social font valoir que les enfants s'inspirent de modèles comportementaux au sein de la collectivité et aspirent aux normes collectives. Et par conséquent, dans un environnement social négatif, les enfants peuvent être privés de soutiens sociaux positifs et exposés a des comportements antisociaux et des pressions de la part de leurs pairs.

De plus, la facon dont les parents percoivent le quartier est importante, puisqu'elle influence leurs gestes et le niveau de confort qu'ils éprouvent dans leurs activités quotidiennes. De plus, lorsque l'enfant est jeune et qu'il passe la plus grande partie de son temps avec ses parents, ces perceptions peuvent également influencer la facon dont il voit son monde.

- La collectivité en tant que ressource

Les ressources dans le cadre de la collectivité renvoient prioritairement a six domaines : éducation, sports et loisirs, divertissement et culture, intérêt spécial, santé et bien-être, ainsi que vie en société. Des ressources conviviales, disponibles, abordables et accessibles dans la collectivité sont un élément clé d'un développement sain des enfants.

La présence dans la localité de services comme des bibliothèques, des aires de jeu, des piscines... sont importantes pour le développement de l'enfant. La qualité et la quantité des services disponibles pour les familles qui ont des enfants peuvent avoir diverses répercussions sur le développement, notamment celle de l'utilisation des ressources du voisinage et celle de la concurrence pour les ressources.

De plus, ce n'est pas parce que des ressources de ce genre sont disponibles qu'elles sont nécessairement utilisées et il peut y avoir des variations dans l'utilisation au sein de la population du quartier. Il semble y avoir des variations dans l'utilisation des ressources en fonction de l'âge et du temps passé dans le quartier. On a également remarqué que les personnes qui passent plus de temps dans le quartier, par exemple les adultes qui ne travaillent pas (les jeunes mères), les personnes âgées et les adolescents, peuvent profiter davantage de l'utilisation des ressources. Finalement, lorsque des

obstacles a l'accès surgissent, par exemple l'emplacement, les horaires, les transports et, le plus fréquemment, les coüts, ils peuvent limiter l'exposition des enfants aux programmes et services.

- La collectivité en tant que groupe social

Par << cohésion sociale >>, on entend le sentiment d'appartenance a un quartier qui se manifeste chez les membres de la collectivité, ainsi que la mesure dans laquelle ils se réunissent pour régler des problèmes, sont disposés a s'entraider et a se faire confiance, et ont des buts et des valeurs semblables.

Des variables comme la cohésion sociale et les relations de bon voisinage influencent le processus de l'éducation des enfants. On estime que des caractéristiques homogènes et des valeurs partagées tissent des liens entre les habitants d'une collectivité. L'efficacité collective est plus probable lorsqu'il y a cohésion sociale.

De telles variables peuvent servir de facteurs de développement positif, mais les normes sociales n'empêcheront peut-être pas un développement négatif. En outre, des quartiers diversifiés peuvent être composés de sous-groupes ayant des normes sociales reposant sur d'autres facteurs que le fait de vivre dans le quartier.

- La collectivité en tant que groupe txuvrant pour le bien commun

L'efficacité collective se définit comme la volonté des habitants d'un quartier de collaborer pour atteindre un objectif commun ou pour le bien commun de la collectivité dans son ensemble. Les activités des habitants qui se préoccupent du bien commun ne se limitent pas a donner un coup de main en période de crise; elles consistent aussi a jouer un role dynamique pour assurer le bien-être de toute la collectivité. Dans les collectivités qui se préoccupent beaucoup du bien commun, les habitants participeraient probablement beaucoup a des programmes offrant des services aux enfants du quartier, par exemple les programmes de surveillance de quartier; on retrouverait également des taux de bénévolat plus élevés.

Les habitants d'un quartier participent a la vie communautaire parce qu'ils jugent qu'il est de mise de travailler au bien commun, tout le monde en profitant. Dans de tels cas, les habitants d'un quartier sont disposés a s'investir dans leur collectivité, car ils en

profitent, tant à titre individuel qu'à titre de membres de la société au sens large (Les théories de l'efficacité collective et de la socialisation collective).

De telles interactions sont génératrices de réseaux sociaux et qui sont considérés comme un avantage. Mais les réseaux sociaux peuvent reposer sur des distinctions sociales. De plus, les personnes dont le revenu est moins élevé ne peuvent pas investir le temps que demande le bien commun lorsque leur principale préoccupation est de gagner leur vie.

3.2. MILIEU DEFAVORABLE OU DETERMINISME DE L'ECHEC ?

Le lien social, expression de l'interdépendance des hommes et de leur intégration sociale, est au coeur des apprentissages de l'être humain. Socialisations familiale, scolaire ou médiatique transmettent toutes, directement ou indirectement, des normes et des valeurs concernant les facons d'être ensemble, et concourent toutes à une certaine forme de cohésion sociale : " [...] socialiser, c'est réaliser une certaine manière d'être ensemble et d'être au monde " (Vincent, 1984 : 62).

Certes le processus des inégalités scolaires peut être expliqué par une multitude de facteurs, parmi lesquels : l'origine et le milieu social de l'enfant, les savoirs et pratiques scolaires, le role des enseignants, les effets d'établissement, les pratiques familiales.

Les expressions "familles populaires" et "familles pauvres" renvoient à une réalité sociologique diversifiée : contexte et conditions socio-économiques, histoires scolaire et culturelle, aspirations et attentes à l'égard de l'école...

Les études menées depuis les années 1990 ont confirmé l'ampleur des mobilisations des familles en matière scolaire, toutes les familles, quelle que soit leur origine sociale, vont définir des stratégies éducatives, elles vont s'organiser en conséquence et cela va avoir des répercussions sur la réussite ou l'échec scolaire de leur enfant. La réussite n'est pas réservée aux enfants de milieux favorisés, et l'échec foncièrement déterminé par le milieu populaire. Existe-t-il des << recettes >> de la réussite scolaire en milieu défavorable ?

Dans quelles mesures les pratiques et stratégies familiales exercent-elles une influence sur la réussite ou l'échec scolaire ? Peuvent-elles avoir un poids plus important que celui du milieu social de la famille sur l'avenir de l'enfant ?

Urie Bronfenbrenner, examinant les résultats d'une étude portant sur les enfants de familles monoparentales, montre que les enfants qui grandissent dans des familles oü le père est absent ont un plus grand risque de rencontrer des problèmes éducatifs, par indolence ou hyperactivité, manque d'attention ou mauvaise conduite en classe, mauvais résultats scolaires, absentéisme, abandon de l'école, participation a des groupes de pairs socialement aliénés. Ces enfants expérimentent plus fortement le "syndrome de l'adolescent" - consommation d'alcool, tabagisme, expériences sexuelles précoces et fréquentes, attitude cynique face au travail, grossesses juvéniles, et, dans les cas les plus graves, usage de la drogue, violence, vandalisme, actes criminels, suicide. Ces symptômes sont plus prononcés chez les garcons que chez les filles.

Pierrette Bouchard a fait des constations qui proviennent principalement de deux recherches. La première (de 1997 a 1999) étudiait la relation entre la socialisation familiale et l'échec scolaire. Par une étude exploratoire auprès de parents et d'un groupe d'enfants (de milieu populaire, âgés de 10 a 12 ans, inscrits au deuxième cycle du primaire), on a voulu faire émerger un ensemble de caractéristiques particulières aux enfants qui connaissent du succès a l'école dans un milieu oü, selon les théories de la reproduction sociale, ils seraient davantage susceptibles d'éprouver des difficultés. Les conclusions de cette recherche ont fait ressortir certaines caractéristiques de réussite eu égard :

· aux liens qu'entretiennent les jeunes avec l'école (plaisir d'apprendre, gout de la lecture, représentation positive de l'école) ;

· au climat familial (développement de l'autonomie de l'enfant, climat de confiance, style démocratique des parents, unité de points de vue entre les parents) ;

· a la relation mère-enfant dans le contexte de la réussite scolaire.

3.3. LE MODELE DE L'INFLUENCE INTEGREE DE BRONFENBRENNER

Continuant dans la même lignée que Vygotsky, et s'inspirant des travaux de Lewin (1951), Bronfenbrenner (1979) a proposé une théorie et un modèle pour expliquer le développement cognitif des enfants dans leur contexte global. L'intérêt de ce modèle est que le milieu fréquenté par les enfants devient, dans sa globalité, un élément structurant du développement. Dès lors, et bien que Bronfenbrenner mette l'accent sur le milieu social a travers notamment les relations interpersonnelles, son modèle ouvre des pistes, tout au moins conceptuelles, pour approcher la complexité. Il construit efficacement des liens entre l'univers proche des enfants et des contextes extérieurs qui renvoient a l'échelle sociale. De l'avis de son élaborateur, la théorie écosystémique se définit comme

<< [it is] a conceptual framework for analyzing the developmental environment as a system of nested, interdependent, dynamic structures ranging from the proximal, consisting of immediate face-to-face settings, to the most distal, comprising broader social contexts such as classes and cultures.>>

(Bronfenbrenner, 1993 : 4).

Ce modèle conceptualisé par Bronfenbrenner (1979, 1989) vise a articuler les relations et influences des différents acteurs et instances impliqués dans la socialisation des enfants. Plus récemment (1993), Bronfenbrenner a élargi sa théorie originale et parle maintenant de théorie du système bioécologique, pour aborder le développement des enfants dans des environnements particuliers tout en tenant compte a la fois de facteurs psychologiques et de facteurs biologiques (Bronfenbrenner, 1995).

La démarche consiste ici a placer l'enfant au centre d'un écosystème conçu comme un ensemble d'espaces interactionnels emboItés les uns dans les autres. Cette approche écologique, si elle met l'accent sur le role de l'environnement, elle le voit également comme un système complexe, oü l'ensemble des facteurs qui peuvent influencer le développement d'une personne sont a considérer, de même que les interactions entre ces différents facteurs.

Selon cette optique, l'environnement de l'enfant comporte plusieurs niveaux simultanés dont l'incidence sur le développement de l'enfant peut être soit proximale, soit distale.

3.3.1. Les quatre systèmes du modèle de Bronfenbrenner (Cf. Annexe 4) 3.3.1.1. Le microsystème

Le microsystème est l'unité d'analyse de base du modèle écologique; il désigne les milieux immédiats de l'enfant, y compris les roles, les relations et les activités qui font partie de son existence. Le microsystème des jeunes enfants est principalement composé de la famille. Il devient plus complexe avec le temps lorsque l'enfant va a la garderie, suit un programme préscolaire et joue avec les enfants du voisinage. L'influence bidirectionnelle qu'ont les individus les uns sur les autres font des microsystèmes des contextes de développement dynamiques.

" A microsystem is a pattern of activities, roles, and interpersonal relations experienced by the developing person in a given face-to-face setting with particular physical, social, and symbolic features that invite, permit, or inhibit, engagement in sustained, progressively more complex interaction with, and activity in, the immediate environment " (Bronfenbrenner, 1993 : 15)

La nutrition, le logement, l'hygiène, la stimulation, le soutien, l'attachement et le style parental sont tous des déterminants microsystémiques de la santé influant sur le développement du jeune enfant. La qualité ou la quantité relative de ces facteurs peut avoir des effets positifs ou négatifs sur la santé.

La famille

Selon l'hypothèse du soutien familial, la participation de la famille dans les activités d'apprentissage de l'enfant ainsi qu'un climat familial positif et encourageant constituent des sources cruciales d'éducation et de soutien social qui favorisent le développement de l'enfant au fil du temps (Reynolds, Mavrogenes, Bezruczko et Hafemann, 1996 : 1121). Reynolds et al. estiment en outre que l'enfant est plus susceptible d'obtenir des résultats développementaux positifs lorsqu'il y a convergence des structures de soutien dans ses milieux familial et scolaire et que cette convergence se maintient. En plus de souligner l'importance de la famille en tant que milieu immédiat, cette approche met également l'accent sur la facon dont la famille interagit avec la collectivité et sur le soutien qu'elle obtient de cette dernière, y compris le milieu scolaire.

La famille : processus proximaux

Les processus familiaux proximaux (proximal process), que Bronfenbrenner définit comme suit :

"A proximal process involves a transfer of energy between the developing human being and the persons, objects, and symbols in the immediate environment. The transfer may be in either direction or both; that is, from the developing person to features of the environment, from features of the environment to the developing person, or in both directions, separately or

simultaneously." (Bronfenbrenner & Evans, 2000 : 118)

Les processus familiaux proximaux sont les transactions entre l'enfant et le milieu familial immédiat qui favorisent le développement des compétences de l'enfant. Il a été démontré que les facteurs familiaux proximaux tels que l'alimentation (Dunst, 1993), le logement (Dunst, 1993 ; Bradley et al., 1989), la stimulation (Bernard, 1995 ; Bradley et al., 1989), le soutien (Franz, McClelland et Weinberger, 1991), l'attachement (Cohn, 1990 ; Easterbrooks et Lamb, 1979 ; Main, Kaplan et Cassidy, 1985) et le style parental (Dekovic et Janssens, 1992 ; Pettit, Harrist, Bates et Dodge, 1991) ont tous une corrélation avec les résultats ultérieurs de l'enfant.

Les chercheurs se sont beaucoup intéressés aux styles parentaux et aux méthodes disciplinaires des parents au cours de la dernière décennie. Bon nombre ont conclu que le style parental autoritaire (ferme, mais aimant et reposant sur des règles bien précises) est lié a une socialisation plus positive chez les enfants (Donovan, Leavitt et Walsh, 1990 ; Stormshak, Bierman, McMahon et Lengua, 2000). Les comportements parentaux prosociaux sont liés a des relations prosociales entre frères et soeurs (Volling et Belsky, 1992), des relations matrimoniales de bonne qualité (Belsky, Youngblade, Rovine et Volling, 1991 ; Cummings, 1994) et des relations positives avec ses pairs (Gottman et Katz, 1989 ; Katz, Kramer et Gottman, 1992).

Sur un plan très pratique, l'ampleur de la participation des parents a l'éducation de l'enfant est liée au rendement scolaire de ce dernier (Conseil canadien du développement social, 1997), et les pratiques linguistiques et culturelles particulières de la famille, comme le temps que les parents passent a lire avec leurs enfants (Bus, van IJzendoorn et Pellegrini, 1995), peuvent avoir des effets considérables sur le développement des habiletés individuelles. De la même facon, la structure et la

composition familiales et l'ampleur des contacts avec la famille élargie peuvent influencer le développement de l'enfant selon les genres de possibilités d'interaction offerts par ces structures (Hernandez, 1997).

Enfin, la santé mentale et l'état matrimonial des parents constituent deux des plus importants facteurs du fonctionnement social des enfants. Ces deux facteurs expliquent une grande partie de la variabilité de la compétence sociale et affective des enfants (Goodman, Brogan, Lynch et Fielding, 1993 ; Kershner et Cohen, 1992 ; Kochanska et Kuczynski, 1991; Miller, Cowan, Cowan, Hetherington et Clingempeel, 1993). Un bon nombre de facteurs de risque rattachés aux troubles comportementaux et affectifs chez les enfants sont liés a des variables parentales, telles que la monoparentalité, la séparation, la maternité a un jeune age, de mauvaises relations familiales et les symptômes touchant la santé mentale de la mère (Sameroff et Fiese, 2000 ; Williams, Anderson, McGee et Silva, 1990). La présence de l'un ou plusieurs de ces facteurs accroIt le risque de problèmes de fonctionnement social chez les enfants.

La famille : processus distaux

Les facteurs qui ont un effet sur la capacité de la famille de soutenir l'enfant ainsi que sur l'interaction de la famille avec d'autres environnements dont fait partie l'enfant peuvent être considérés comme des processus distaux et, en général, influencent l'enfant de facon surtout indirecte. Ils comprennent des facteurs tels que le soutien social dont disposent les parents, l'accès aux ressources communautaires (McCubbin, McCubbin et Thompson, 1993), le revenu et l'emploi (Lefebvre et Merrigan, 1998), les relations interpersonnelles (Lindahl, 1998), la santé mentale des parents (Honig, 1986) et la capacité de la famille de composer avec les exigences de la vie et le stress (McCubbin et al., 1993).

L'école et la collectivité.

En age scolaire, les enfants passent une bonne partie de leur journée a l'école. Les activités structurées d'apprentissage et de jeu, ainsi que les relations non structurées que les enfants nouent avec leurs pairs constituent tous des aspects importants du vécu scolaire des enfants. Un premier cycle positif de développement et d'engagement scolaires mène bien souvent a de meilleurs résultats développementaux a l'adolescence et par la suite. Ce profil de développement selon lequel les avantages initiaux se

multiplient avec le temps correspond a ce que l'on appelle << l'hypothèse de l'avantage cognitif >> (Reynolds et al., 1996) ou l'effet << Matthew >> (Stanovich, 1986). Plus précisément, selon certains chercheurs, des expériences positives a un jeune age peuvent favoriser l'estime de soi, offrir des occasions de réussite et permettre aux enfants d'acquérir tant des aptitudes sociales que des aptitudes a résoudre des problèmes (Rutter, 1987). De la même facon, les échecs et les mauvais comportements pendant les premières années d'école sont des facteurs prédicteurs d'échec scolaire ultérieur, de l'employabilité et de la criminalité (Tremblay, Masse, Perron et LeBlanc, 1992), ainsi que de la morbidité psychologique chez les jeunes adultes (Power, Manor et Fox, 1991).

Les facteurs scolaires liés aux possibilités d'apprentissage enrichies comprennent des facteurs tels que les niveaux élevés de participation des parents, les attentes élevées des enseignants a l'égard du rendement des élèves, un programme pertinent mettant l'accent sur des capacités de lecture et d'écriture précises, la collaboration entre les administrateurs, les enseignants et les élèves, un milieu scolaire positif oü les élèves se sentent en sécurité et éprouvent un sentiment d'appartenance, l'intégration des élèves de différents milieux socioéconomiques et niveaux d'habileté et une orientation sur la prévention plutôt que sur la remédiation (Williams, 1999).

3.1.3.2. Le mésosystème

Le mésosystème est l'ensemble des microsystèmes fréquentés par l'enfant. Il n'est pas une collection de microsystèmes isolés, mais il tient compte de leurs interrelations. Un manque de cohérence entre les microsystèmes crée un mésosystème chaotique qui peut avoir des effets négatifs sur le développement (Bronfenbrenner & Evans, 2000). Etudier en profondeur un mésosystème nécessite l'étude de tous les microsystèmes différents fréquentés par un même enfant. Toutefois, l'étude d'un seul des microsystèmes peut offrir des indications sur les efforts qui y sont faits, par exemple en s'appuyant sur le milieu physique et les pratiques spatiales pour soutenir la cohérence du mésosystème.

3.3.1.3. L'exosystème

L'exosystème n'a pas de relation immédiate avec les enfants, mais il a de fortes répercussions sur les milieux qu'ils fréquentent. L'exosystème comprend les cadres de décisions officielles et les médias qu'ils utilisent.

3.3.1.4. Le macrosystème

Le macrosystème est défini par le contexte historique et socioculturel avec ses croyances, ses valeurs, ses lois et ses idéologies structurant l'action et les roles des individus et des groupes (le microsystème).

Le macrosystème donne un sens aux institutions de l'exosystème, aux échanges et réseaux du mésosystème, aux rOles distribués dans les microsystèmes. Le macrosystème n'entretient pas non plus de relations immédiates avec les enfants, mais il a des répercussions a long terme sur les milieux qu'ils fréquentent.

En 1986, Bronfenbrenner a introduit la notion de chronosystème pour référer aux modèles qui examinent le changement développemental et l'influence cumulative des environnements au fil des années. Le modèle propose donc une perspective axée sur le cycle de la vie qui permet de prendre en considération l'histoire, le développement et l'influence réciproque des environnements.

3.3.2. Description du modèle bioécologique de Bronfenbrenner

L'application d'un modèle écologique et transactionnel a contribué a préciser comment diverses expériences peuvent avoir un effet négatif sur le développement des enfants (Cicchetti et Toth, 1997). Comme l'expliquent Cicchetti et Toth, même si tous les niveaux écosystémiques ont des effets importants sur le développement, les caractéristiques rattachées aux environnements microsystémiques, qui sont plus proximaux, ont l'effet le plus immédiat, qu'il soit positif ou négatif, sur le développement des enfants. La plupart des travaux de recherche fondés sur des modèles écologiques ont été menés auprès des populations a risque et portaient plus particulièrement sur le développement des comportements antisociaux (Barnett, Manly et Cicchetti, 1993; Dodge, Petit et Bates, 1994; Howes et Cicchetti, 1993; Sameroff, Seifer, Baldwin et Baldwin, 1993).

Dans le chapitre de leur ouvrage portant sur l'écologie des processus de développement, Bronfenbrenner et Morris (1998) tentent d'expliquer les changements importants qui sont survenus dans la conceptualisation du modèle écologique du développement humain. uls parlent de modèle bioécologique pour désigner ce modèle en évolution. uls lui reconnaissent quatre principaux éléments, à savoir le processus, la personne, le contexte et les variables temps. L'objet de la recherche sur la bioécologie n'est pas d'apporter des confirmations (pas au départ du moins), mais plutôt de formuler, pour commencer, des hypothèses suffisamment solides et exactes pour justifier des vérifications empiriques plus poussées. Selon les auteurs, ce genre de recherche est axé sur la découverte plutôt que sur la confirmation. Compte tenu de la profonde complexité des nombreuses relations qui sous-tendent un développement optimal de l'enfant, bon nombre de chercheurs et de praticiens classent les soussystèmes de facteurs importants en fonction de leur proximité par rapport à l'enfant ciblé. La véritable recherche bioécologique représente une tâche très complexe.

3.4. DES RESISTANCES A L'INFLUENCE SOCIALE COMME STRATEGIES DE REUSSITE SCOLAIRE

<< La vie sociale dans les quartiers "difficiles" ne se résume pas à la délinquance >> (Kokoreff, 2003). On "oublie" trop souvent le fait que beaucoup de jeunes cherchent à sortir de la "galère" tout en se heurtant à de multiples obstacles liés aux préjugés et stéréotypes, au contexte économique, social et urbain, et aux rigidités institutionnelles. Parce qu'on assiste aujourd'hui à une criminalisation de fait des classes populaires et une stigmatisation de certaines aires géographiques, il importe aujourd'hui d'y porter un autre regard, de donner un aperçu des ressources disponibles, du fourmillement d'initiatives, en un mot des stratégies qui y ont cours pour sortir progressivement, audelà de la pauvreté matérielle, de la pauvreté intellectuelle tout court.

3.4.1. Milieu social et réussite scolaire

Les analyses effectuées par Bouchard démontrent que, contrairement à la perception généralement répandue, les parents de jeunes en difficulté scolaire accompagnent leurs enfants et veulent les aider à s'en sortir. Mais plusieurs de ces parents sont à court de

moyens, ne savent pas trop comment s'y prendre ou ont épuisé leurs ressources. Comme l'environnement familial est important dans le processus de la réussite scolaire, il faut que les parents soient conseillés sur les moyens qu'ils peuvent prendre pour aider leurs enfants.

La campagne << Leur réussite, c'est aussi la nôtre >> répond a ce besoin. Par le biais d'un dépliant et d'un site Internet, des moyens sont offerts aux parents pour améliorer les rapports qu'ils entretiennent, eux et leurs enfants, avec l'univers familial et scolaire. Il s'agit de moyens qui ont été observés dans les familles de jeunes en situation de réussite. La communication, l'encadrement, la motivation et l'implication sont des exemples de thèmes qui sont abordés.

3.4.2. Sentiment d'efficacité personnelle et son influence sur le fonctionnement humain

Albert Bandura décrit le sentiment d'efficacité personnelle (SEP) comme un moteur puissant de réussite et d'atteinte de ses objectifs par l'individu qui le possède. A l'origine de ce sentiment, quatre sources prioritaires : l'expérience de maItrise, l'expérience vicariante (le modèle), le soutien verbal (des parents, d'autres adultes, des enseignants, des pairs, des patients,...) et les états émotionnels et physiologiques (le plaisir de la maItrise d'un savoir ou d'un savoir-faire, l'énergie présente). Il relève aussi la motivation a apprendre que le SEP suscite et qui le construit en retour.

Le sentiment d'efficacité personnelle permet l'accomplissement de l'être humain et contribue efficacement a son bien-être de différentes manières.

En bonne place figure l'influence sur les choix que font les individus et le cours des actions qu'ils poursuivent. De manière générale, les individus ont tendance a sélectionner les tâches et activités pour lesquelles ils se sentent compétents et en confiance, et évitent ou mettent a l'écart celles pour lesquelles ils en sont dépourvus. Les individus sont donc moins enclins, par manque de motivation, a prendre part aux tâches et activités pour lesquelles ils ne sont pas qualifiés. Et, quels que soient les facteurs mobilisés par l'individu pour influencer son comportement, ils sont ancrés au coeur même du sentiment qu'a ce dernier de sa capacité a accomplir le comportement désiré.

Le sentiment d'efficacité personnelle permet également de déterminer la dose d'effort a mobiliser sur une activité, la capacité a persévérer face a l'obstacle et le niveau de résistance en rapport avec la complexité de l'activité. En effet, plus le sentiment d'efficacité personnelle est élevé, plus grands sont l'effort, la persévérance et la résistance. Ceci permet de dire que : les individus avec un sens rigide de compétence personnelle abordent les tâches difficiles comme des défis a relever plutôt que comme des menaces a éviter.

Les sentiments d'efficacité personnelle influencent les modèles de pensée de l'individu et ses réactions émotionnelles. Il est évident que des individus avec de hauts sentiments d'efficacité personnelle ont une certaine quiétude a l'abord des tâches et activités difficiles.

A contrario, ceux ayant un sentiment d'efficacité personnelle faible peuvent croire que les tâches sont beaucoup plus difficiles qu'elles ne le sont en réalité. Cette prédiction s'explique par le fait que : ce sentiment bas d'efficacité personnelle intègre des états émotifs tels l'anxiété, le stress, la dépression et une étroitesse de vue quant a la solution a apporter au problème auquel ils sont confrontés.

Il appert donc que la persévérance, associée a un sentiment d'efficacité personnelle élevé, conduit a accroItre la performance qui, en retour, élève le sens d'efficacité et dope le moral. Les recherches réalisées (Bandura, 1988 ; Bong & Skaalvik, 2003 ; Marsh, 1990) dans ce sens montrent que : plus les apprenants rapportent un sentiment d'efficacité élevé ; plus ils choisissent des activités qui présentent pour eux un défi et qui leur donnent l'occasion de développer leurs habiletés plutôt que de s'engager dans des tâches faciles qu'ils sont assurés de maItriser ; plus ils se fixent des objectifs élevés ; mieux ils régulent leurs efforts ; plus ils persévèrent face a des difficultés ; mieux ils gèrent leur stress et leur anxiété ; et meilleures sont leurs performances.

Le relâchement, associé a un sentiment d'efficacité personnelle faible, assure l'échec et, plus tard, la perte de la confiance et de la résistance morale. Bandura pense que : << parce que les sentiments élevés d'efficacité personnelle sont généralement le produit du temps et des expériences, ils sont très résistants et prévisibles >>.

<< Ne sont capables que ceux qui pensent qu'ils le sont >> (Virgile, Poète Latin). De nombreuses études sur le sentiment d'efficacité personnelle sont arrivées a la

conclusion selon laquelle : les sentiments d'efficacité personnelle, les changements comportementaux et les performances sont corrélés et que le sentiment d'efficacité personnelle est un excellent pronostiqueur du comportement.

Clairement, il n'est plus simplement question de savoir si l'on est capable, mais plutôt question du sentiment que l'on a de sa propre capacité.

3.4.3. Estime de soi et relation a l'adulte des décrocheurs

L'estime de soi correspond a la valeur que les individus s'accordent, s'ils s'aiment ou ne s'aiment pas, s'approuvent ou se désapprouvent (Rosenberg, 1979). Les psychologues sociaux s'accordent pour reconnaItre sa grande importance pour le bienêtre psychologique et physique de tout individu.

Les décrocheurs se percoivent comme des personnes qui, en contexte scolaire, sont moins compétentes et moins autodéterminées que les personnes persévérantes (Vallerand et Sénécal, 1992). Or, on part souvent du postulat que, pour qu'un jeune puisse réussir ses apprentissages scolaires et s'adapter a sa vie scolaire, il doit avoir une bonne estime de soi. Cela ne devient possible que grace au partage d'expériences scolaires positives entre un jeune et un adulte qui a de l'importance pour lui dans son milieu, dans ce cas-ci, le mentor. Pour améliorer l'estime de soi, l'adulte doit favoriser le succès, aider le jeune a modifier sa perception de ses habiletés scolaires et l'aider a maximiser ses engagements envers la réalité scolaire. Ces principes sont conformes a la vision humaniste de Scott (1992) qui juge particulièrement important que le mentor manifeste sa confiance au jeune, afin que ce dernier se sente suffisamment en sécurité pour entreprendre les changements nécessaires a sa réussite personnelle.

3.4.4. La résilience comme facteur déterminant de la réussite scolaire en milieu défavorable

Le concept de résilience est d'abord introduit en 1969 par Fritz Redl. Dans les années 80 plusieurs ouvrages consacrés a la résilience ont paru puis des études furent conduites aux Etats-Unis dans les années 90 sous l'influence de Emmy Werner et John Bowlby. En France, son chef de file est Boris Cyrulnik qui pense la résilience en

termes de série d'attitudes de protection et comme potentialité créatrice, développement de certaines facultés qui permettent la transformation psychique de la souffrance humaine.

Le terme de résilience est employé couramment, ses significations s'appliquent a de nombreux domaines. On parle ainsi de résilience morale, résilience physique, résilience sociale, résilience culturelle...

Le concept de résilience représente un changement de paradigme en psychologie développementale ; une conceptualisation qui se situe essentiellement a l'intérieur d'une perspective individualiste. De nombreux auteurs sur la résilience reconnaissent cependant de plus en plus le role de l'environnement et des systèmes avec lesquels l'enfant interagit dans son développement psychologique.

3.4.4.1. Définition

(( La résilience, c'est l'aptitude des individus et des systèmes (les familles, les groupes et les collectivités) a vaincre l'adversité ou une situation de risque. Cette aptitude évolue avec le temps ; elle est renforcée par les facteurs de protection chez l'individu ou dans le système et le milieu ; elle contribue au

maintien d'une bonne santé ou a l'amélioration de celle-ci ,, (Mangham, et al., 1995)

De l'avis d'un des éminents spécialistes, Boris Cyrulnik notamment, << La Résilience définit la capacité a se développer quand même, dans des environnements qui auraient dü être délabrants. >> Guedeney, orientant son regard sur le développement de l'enfant, définit la résilience par le maintien d'un processus normal de développement malgré des conditions difficiles. Pour lui, en effet, il s'agit de quelque chose de dynamique, et non point de la simple résistance au choc.

En somme, la résilience c'est se débrouiller, se tirer d'embarras confronté a n'importe quelle situation problématique ou conflictuelle.

3.4.4.2. Les facteurs de la résilience

La résilience a ses origines dans la théorie du développement psychologique et humain. Ce mot décrit en général la capacité de l'individu de faire face a une difficulté ou a un stress importants, de facon non seulement efficace, mais susceptible d'engendrer une meilleure capacité de réagir plus tard a une difficulté. Diverses études

ont examiné la résilience au sein de groupes exposés a la guerre, a la pauvreté et a la maladie chronique. Ces études et d'autres recherches ont permis de cerner les caractéristiques des personnes qu'on dit << résilientes >>. Selon certains, la résilience se compose d'un équilibre entre, d'une part, le stress et les difficultés et, d'autre part, la capacité de faire face a la situation et la disponibilité d'un soutien. Lorsque les sources de stress excèdent les facteurs de protection de l'individu, même les personnes qui ont fait preuve de résilience antérieurement peuvent être dépassées (Mangham et coll., 1995).

Trois grandes catégories de facteurs favorables a la résilience : facteurs individuels (ressources de la personnalité), familiaux (transactions humaines de qualité), de soutien (capacité de trouver du soutien dans le réseau social).

Facteurs individuels

Les facteurs individuels se déclinent en :

· Sentiment de compétence personnelle ;

· Capacité a planifier ;

· Compétences cognitives ;

· Sentiment de signification ;

· Capacité de résoudre des problèmes ;

· Optimisme ;

· Locus de contrôle interne ;

· Capacité de faire face au stress ;

· Habileté a chercher un soutien.

Facteurs famiiaux

Les facteurs familiaux déterminant la résilience se composent de :

· Rapports parents-enfants propices ;

· Chaleur et affection ;

· Soutien familial solide et cohésion familiale.

Facteurs de soutien

Entendu comme capacité a trouver du soutien dans le réseau social, les facteurs de soutien se reconnaissent par :

· La présence de personnes aidantes comme des enseignants ;

· La présence des membres de la famille étendue ou des personnes se situant a l'extérieur de la famille immédiate ;

· La présence des milieux de soutien qui favorisent l'autonomie, la responsabilité et le contrôle.

3.4.4.3. Indicateurs de résilience et facteurs de protection contre les comportements déviants

On évalue les capacités résilientes a partir de sept facteurs fonctionnant comme indicateurs de résilience :

· Perspicacité

· Indépendance

· Aptitude aux relations

· Initiative

· Créativité

· Humour

· Moralité

Les facteurs de protection contre les comportements déviants sont constitués de :

· L'estime de soi, la confiance, l'optimisme et un sentiment d'espoir ;

· L'autonomie ou un sens d'auto développement ;

· L'endurance ou la capacité a combattre le stress ;

· La sociabilité ;

· La capacité de vivre une gamme d'émotions ;

· Des attitudes positives permettant de faire face a des problèmes et de les résoudre.

Dans cette partie du travail, les principaux aspects de la recherche ont été mis en relief dans les trois chapitres précédents. A la suite de la consultation de la documentation scientifique appropriée, un état de la question portant sur Environnement social précaire, Décrochage scolaire et stratégies de réussite a été préparé, et dans lequel un inventaire des connaissances scientifiques disponibles sur ce theme a été dressé en faisant, a chaque fois une analyse critique et en rendant compte de l'état de ces connaissances. Ce travail de systématisation a permis de reformuler et d'enrichir la problématique de la présente recherche pour en assurer la cohérence et la pertinence et, enfin, mieux orienter la recherche.

Afin de pouvoir appliquer la problématique de cette recherche a la réalité du cadre de recherche, dans les trois chapitres qui suivent, il s'agira de l'opérationnaliser, c'esta-dire déterminer ses dimensions et construire les indicateurs qui permettront d'en faire une étude scientifique dans la partie consacrée au cadre méthodologique.

DEUXIEME PARTIE :

CADRE

METHODOLOGIQUE

Chapitre 4 : LE RAPPEL DE L'OBJET DE

L'ETUDE ET LA PLANIFICATION DE LA

DEMARCHE DE RECHERCHE

Afin de pouvoir appliquer sa problématique à la réalité sociale, le chercheur doit l'opérationnaliser, c'est-à-dire déterminer ses dimensions et construire les indicateurs qui lui permettront d'en faire une étude : c'est l'aspect méthodologique de la recherche. Aussi, dans cette partie, il s'agira de mettre en relief les principaux aspects de la méthodologie liés à l'étude sur : Environnement social précaire, Décrochage scolaire et Stratégies de réussite.

4.1. RAPPEL DE L'OBJET DE L'ETUDE

Les stéréotypes donnent des milieux défavorables, principalement des milieux populaires, une peinture qui reflète une certaine réalité. Cependant si le constat est réel que dans ces milieux il existe un taux de décrochage plus élevé même en l'absence de statistiques fiables, force est de reconnaItre que l'explication qui en est donnée n'est pas toujours celle qui sied. En effet, on a l'impression qu'il existe un déterminisme social pour qui vit en milieu populaire. Or, s'il existe des difficultés, elles ne sont pas l'apanage de ces milieux. En outre tout milieu, quel qu'il soit, a tendance, avec la manière de vivre qui nous est propre, à se populariser. Il n'y a qu'à observer les quartiers dits << résidentiels >> de la ville de Douala par exemple. Au début de leur constitution, il y a une certaine distance entre les habitants. Mais après un certain temps, la distance sociale se distend et les liens sociaux sont de plus en plus étroits.

Le problème du décrochage scolaire est de plus en plus prégnant et se présente davantage comme une gangrène qui n'épargne aucun environnement, quel qu'il soit. Toutefois, si le décrochage scolaire se rencontre sous tous les cieux, il n'est pas généré forcément par les mêmes causes. Il faut reconnaItre que certains environnements sont incitatifs et d'autres inhibitifs.

De la revue de la littérature, une théorie principalement a été identifiée comme possédant une certaine valeur prédictive entre le décrochage scolaire et

l'environnement social. Mais en rapport avec le milieu, d'autres théories se sont greffées a la principale, chacune valorisant soit le lien évident entre le milieu et le décrochage scolaire, soit la réussite en milieu défavorable par des stratégies opératoires. Ces deux approches et les théories associées ne prédisent pas les mêmes occurrences. La différence de prédiction constitue un problème possible dans l'état des connaissances. Et c'est en cela que nous avons choisi de mener une étude exploratoire au quartier New-Bell pour générer des hypothèses qui feront l'objet d'études a venir.

4.2. PLANIFICATION DE LA DEMARCHE DE RECHERCHE

4.2.1. L'approche de recherche

L'approche de recherche correspond a la finalité d'une recherche et est définie par le but scientifique particulier visé par cette recherche. La science a quatre buts principaux : décrire, expliquer, prédire et contrôler. A ces buts principaux, se greffent des buts secondaires comme explorer, mettre en relation et évaluer.

Notre recherche portant sur : Milieu défavorable, décrochage scolaire et stratégies de réussite s'inscrit donc dans une approche exploratoire (explorer).

La nature de l'objet d'étude

La nature des données que l'on souhaite recueillir influence et détermine le choix de la méthode de recherche. Dans le cadre de notre recherche, nous avons opté pour les communications verbales (l'expression d'un point de vue).

Méthodes de recherche et d'investigation

La méthode de recherche et d'investigation est la démarche planifiée, suivie, systématique et rigoureuse et dont le but est de réaliser une recherche empirique en vue de décrire la réalité, mettre en relation des phénomènes, les expliquer, les prédire et les évaluer. Dans le cadre de cette recherche, nous optons pour les entrevues informelles. L'entrevue informelle est une conversation plus ou moins structurée en vue de recueillir d'une personne de l'information, des points de vue, des opinions, etc.

Techniques de collecte de données

La technique de collecte de données correspond a l'instrument de recherche. C'est
l'outil ou le moyen a partir duquel nous avons recueilli les données auprès des

participants. Pour le cas d'espèce, nous avons utilisé les fiches de synthèse d'entretien accompagnées d'un matériel d'enregistrement (magnétophone). La fiche de synthèse d'entretien est employée pour décrire et résumer le contenu d'entretiens informels menés dans le cadre d'une étude de terrain. La fiche de synthèse d'entretiens est autant un outil de gestion de la démarche de recherche qu'un outil de collecte de données.

Techniques d'analyse de données

Le résumé est la technique que nous avons choisie pour le traitement et l'analyse des données permettant de dégager, de notre recherche, les résultats qui conduiront à la réponse aux questions de recherche et à la réalisation des objectifs de recherche que nous nous sommes assignés.

4.2.1.1. Le moment scientifique

La notion de moment scientifique fait généralement référence au niveau de développement des connaissances scientifiques dans un domaine particulier de recherche. On observe ainsi que, dans certains domaines de recherche, les connaissances scientifiques sont très sommaires alors que, dans d'autres domaines, elles sont déjà solidement constituées et regroupées en un ensemble de théories et de modèles scientifiques. C'est ainsi que, lorsqu'il aborde un nouveau domaine ou une nouvelle problématique de recherche, le chercheur a tendance, dans un premier temps, à mener des recherches exploratoires et descriptives.

4.2.1.2. Les données qualitatives selon les techniques de collecte de données

Les données qualitatives peuvent aussi être classées en fonction de l'instrument qui a servi à leur collecte. Les techniques de collecte de données (instrument de recherche) les plus fréquemment utilisées pour la collecte de données qualitatives sont : le protocole de consignation d'un entretien, la fiche de synthèse d'entretiens, les notes d'observation au vol, la grille d'observation ouverte, la fiche d'analyse de contenu, la fiche d'analyse de documents d'archives (documents historiques), la fiche de synthèse de documents, la rédaction de communications (mémorandums), les comptes-rendus de réunions, le résumé intermédiaire par cas...

4.2.1.3. Le gabarit de consignation d'un entretien semi-dirigé

Le gabarit de consignation d'un entretien sera notre outil de base pour la prise en notes des réponses des participants lors de la réalisation de nos entretiens. Il se présente généralement sous la forme d'un document de type traitement de texte oü chaque page comporte un tableau devant recueillir la synthèse des entretiens. En plus des pages comprenant les questions de l'entrevue, le gabarit de consignation d'un entretien doit aussi comprendre une page de garde qui recevra les informations permettant d'identifier l'entretien et ses conditions de réalisation : personne interviewée, caractéristiques de cette personne, date, heure, durée de l'entretien, conditions particulières de l'entretien, intervieweur, etc.

4.2.2. L'analyse des données qualitatives

Une analyse de données, qu'elle soit quantitative ou qualitative, doit tracer un portrait fidèle et, si possible, synthétique des données, identifier et qualifier la nature et la force des relations entre les données et proposer des explications pour les résultats obtenus et ce, en fonction des objectifs. Une analyse de données qualitatives comprend généralement trois étapes qui sont :

1) l'analyse descriptive de la variable indépendante ;

2) l'analyse descriptive de la variable dépendante (ou des variables dépendantes) ;

3) l'analyse comparée de la variable dépendante en fonction des conditions de la variable indépendante.

Les deux premières étapes correspondent généralement a une analyse univariée alors que la dernière étape correspond généralement a une analyse bivariée. Le tableau qui suit décrit cette stratégie d'analyse des données qualitatives selon la méthode de recherche et d'investigation dite de l'entrevue semi-structurée.

Tableau n° 1 : Stratégie d'analvse des données qualitatives selon la méthode de recherche et d'investigation dite de l'entrevue semi-structurée

Etape de l'analyse qualitative des données

Analyse

descriptive de la variable

indépendante

Analyse descriptive de la variable dépendante (ou des variables dépendantes)

Analyse comparée de la variable dépendante (ou des variables dépendantes) en fonction des conditions de la variable indépendante

 
 

Cette deuxième étape

 
 

Cette première

consiste a faire l'analyse

Cette troisième étape

 

étape de l'analyse des

détaillée des réponses a

consiste a faire l'analyse

 

résultats consiste a

l'entrevue suite a un

comparée des réponses à

 

présenter une brève

regroupement des réponses en

l'entrevue a l'aide de tableaux

Entrevue

description des

fonction des questions posées

qualitatifs oü chaque tableau

semi-structurée

personnes interrogées

ou des dimensions de la

présente le résumé des

 

(caractéristiques

variable dépendante. On peut

réponses a une question ou

(ou

personnelles, raison de

faire appel a des tableaux

une dimension de la variable

informelle)

leur participation a la

qualitatifs oü chaque tableau

dépendante en fonction de la

 

recherche, etc. tout en

présente le résumé des

variable indépendante (s'il y a

 

respectant les règles de

réponses portant sur une

lieu). Cette troisième étape

 

l'anonymat si requis)

question ou une dimension spécifique.

peut remplacer la deuxième.

Chapitre 5 : LES OBJECTIFS, LES

QUESTIONS DE L'ETUDE ET LA

CONSTRUCTION DU GUIDE

D'ENTRETIEN

5.1. LES OBJECTIFS DE L'ETUDE

Dans le cadre de cette recherche, nous nous donnons pour objectifs de :

- Identifier et décrire les caractéristiques du milieu et les éléments pertinents qui expliquent le décrochage scolaire du point de vue des acteurs ;

- Identifier et décrire les stratégies développées par les uns et les autres pour faire face a leur environnement défavorable et réussir a l'école ;

- Déterminer comment les élèves de cet environnement arrivent a décrocher ou encore comment les élèves de cet environnement défavorable réussissent a faire abstraction des influences existantes et réussir dans leur parcours scolaire.

5.2. LES QUESTIONS DE L'ETUDE

Parce que notre but est d'expliquer comment en environnement défavorable, le décrochage scolaire est prégnant et combien les habitants de ce type d'environnement sont susceptibles de ne pas poursuivre un cursus scolaire réussi et tirer la sonnette d'alarme sur la nécessité d'en faire des zones d'éducation prioritaires ; et aussi de mettre en relief les stratégies développées par ceux des habitants de ces milieux dits défavorables pour poursuivre un cursus réussi, notre question de recherche se décline en deux composantes :

Question générale

Existe-t-il une lecture du décrochage scolaire, tenant compte des facteurs environnementaux en milieu populaire, différente de celle des habitants du quartier New-Bell ?

Questions spécifiques

Qu'est-ce qui justifie le décrochage scolaire des habitants de New-Bell ?

Comment malgré cet environnement peu favorable a la poursuite d'un cursus réussi, certains parviennent a la réussite scolaire ?

5.3. LA CONSTRUCTION DU GUIDE D'ENTRETIEN 5.3.1. L'identification des variables

Notre étude porte sur le thème : Environnement social précaire, décrochage scolaire et stratégies de réussite.

Nous avons affaire ici a trois variables :

1. Environnement social précaire ;

2. Décrochage scolaire ;

3. Stratégies de réussite.

Ces trois variables n'ont pas la même valeur et rentre chacune dans la typologie des variables. C'est en scrutant cette typologie que nous ferons entrer chacune des variables dans l'une ou l'autre des catégories.

La variable indépendante

La variable indépendante est, dans une recherche, la variable ou le phénomène dont le chercheur souhaite étudier l'influence sur d'autres facteurs. On la définit aussi comme la variable étudiée ou explicative. On reconnaIt généralement deux types de variables indépendantes : la variable indépendante manipulée qui correspond a des facteurs externes a l'individu (ex.: niveau de bruit, nature du matériel a mémoriser...) que le chercheur peut manipuler de facon systématique dans le cadre d'une expérience ; la variable indépendante assignée qui correspond a une caractéristique a priori de l'individu (ex.: sexe, age, intelligence) que le chercheur ne peut manipuler mais qu'il peut assigner a une des conditions de son étude. Toutefois, la plupart des recherches qualitatives, lorsqu'elles définissent des variables indépendantes, font appel a des variables indépendantes assignées.

Partant de cette définition, la variable indépendante de notre étude se décline en : VI : Environnement social précaire

Les variables dépendantes

La variable dépendante est, dans une recherche, la variable qui subit l'effet ou l'influence d'une variable indépendante. On la définit aussi comme la variable mesurée ou expliquée. Elle correspond généralement au comportement d'un individu, a sa compréhension d'un événement ou d'une situation, a son expérience de vie, a un compte-rendu, a un récit, a un témoignage, a une représentation sociale, a des comportements ou a des représentations qui seront affectées ou déterminées par les conditions d'une variable indépendante.

Cette définition nous amène a désigner deux variables dépendantes, sans qu'il y ait un ordre de préséance :

VD1 : Décrochage scolaire ;

VD2 : Stratégies de réussite scolaire.

Toutefois pour des raisons de logique et d'objectifs, nous pensons que le décrochage scolaire doit être dépassé par les stratégies de réussite scolaire. Ce qui justifie la disposition de ces variables dans le titre de la présente étude.

5.3.2. Les themes du guide d'entretien

Les thèmes principaux de notre guide d'entretien auront pour objectif final de nous donner un aperçu global de l'histoire de la vie scolaire de notre participant et les réflexions que celui-ci fait en rapport a son expérience personnelle.

Aussi allons-nous nous intéresser a :

- Les conditions et la qualité de vie de la famille dans l'enfance

- La vie scolaire au primaire

- La vie scolaire au secondaire

- La vie au quartier New-Bell

- Les pratiques éducatives parentales et la sédentarité

- Les langues de communication

- Les clés de ta réussite scolaire

- Les facteurs d'influence du quartier New-Bell qui peuvent mener au décrochage - Comment faire reculer l'abandon scolaire au quartier New-Bell

- Les dispositions a prendre pour qu'on ne subisse pas les effets de l'environnement ? - Avantages et inconvénients de vivre a New-Bell ?

Chapitre 6 : LA POPULATION ET

L'ECHANTILLONNAGE

6.1. LA POPULATION

6.1.1. La définition de la population

La population de notre étude est constituée de toutes les catégories de personnes ayant un point de fixation (domicile) a New-Bell et qui y ont élu domicile pendant qu'ils allaient a l'école. Ou encore ceux ayant quitté New-Bell pour s'assurer un cursus scolaire avec réussite.

6.1.2. La population cible

Cette étude concerne des personnes ayant un socle familial réel a New-Bell, qui y ont vécu entièrement ou en partie pendant leur cursus scolaire.

6.2. LA COMPOSITION DE L'ECHANTILLON ET LE MODE D'ACCES AUX INTERVIEWS

Compte tenu du fait que notre étude explore deux processus antithétique : - Décrochage

- Stratégies de réussite

A ce titre, il convient de constituer deux groupes de participants : Groupe 1 : Ceux ayant décroché ou les << décrocheurs >> Groupe 2 : Ceux ayant réussi ou les << non décrocheurs >>

Il s'agit pour nous, de recueillir les avis des uns et des autres liés a leur expérience scolaire en rapport avec le quartier New-Bell. Qu'ils aient ou non décroché ; qu'ils aient réussi ou non ; qu'ils soient restés entièrement au quartier New-Bell ou partiellement pendant leur cursus scolaire.

6.2.1. La constitution de l'échantillon

A partir du moment oü l'échantillon d'une recherche qualitative et sa création reposent plus sur des principes théoriques que statistiques et sur la représentativité

subjective des éléments constituant l'échantillon, l'échantillon nécessaire a la réalisation d'une enquête par entretien est, de manière générale, de taille plus réduite que celui d'une enquête par questionnaire, dans la mesure oü les informations issues des entretiens sont validées par le contexte et non pas besoin de l'être par leur probabilité d'occurrence.

Pour valider une méthode exploratoire, il faut mener des entretiens dans la fourchette 10-30 individus.

Dans le cadre de cette étude, nous avons mené 14 entretiens.

6.2.2. Le mode d'accès aux interviews

Le mode d'accès aux personnes interviewées, a été principalement celui de la prise de rendez-vous. En effet, pour une grande part, les personnes interviewées sont plus ou moins connues de nous ce qui a l'avantage de nous faciliter la tâche. Cependant, il nous a été plus difficile de convaincre les personnes ayant décroché. D'ailleurs, c'est simplement parce qu'ils se rendaient compte que refuser de participer a ces entrevues était quelque peu contribuer a notre << échec académique >> qu'ils se sont résolus a s'ouvrir a nous.

En outre, avant tout entretien, il leur était proposé de choisir la langue dans laquelle ils souhaitaient être interviewés. Sans hésitation, ils se prononcaient pour le pidgin.

6.3. LE PLAN D'ENTRETIEN

Il comprend a la fois l'ensemble organisé des thèmes que l'on souhaite explorer (le guide d'entretien) et les stratégies d'intervention de l'interviewer visant a maximiser l'information obtenue sur chaque thème. Le plan d'entretien est donc a l'interface du travail de conceptualisation de la recherche et de sa mise en oeuvre concrète.

6.3.1. Le guide d'entretien

Les entretiens menés sont semi-structurés, c'est-à-dire, qu'ils sont constitués d'un guide thématique et d'une planification de stratégies d'écoute et d'intervention.

6.3.2. La collecte des données

Les données sont recueillies à l'aide un appareil enregistreur en même temps qu'une prise de note dans le gabarit d'entretien conçu à cet effet. Il nous permet d'enregistrer les points saillants de l'entretien et, en outre, servira de fil conducteur à la retranscription de l'entrevue.

6.3.3. La technique d'entretien Entrevue semi-structurée

6.3.4. Le choix des participants

Nous avons ciblé un certain nombre de répondants à partir des critères que nous nous sommes préalablement définis. Il s'agissait pour nous d'avoir deux groupes de participants (décrochage et réussite). A chaque groupe correspondaient deux sousgroupes implicites (sédentaire au quartier New-Bell pendant son cursus ; cursus conduit hors de New-Bell en raison du fait que l'environnement a été jugé défavorable aux études). A côté de cette subdivision, nous avons tenu à associer certains parents qui, bien que rentrant dans l'une ou l'autre des catégories, ont d'abord connu une expérience en tant qu'enfant du quartier New-Bell ; puis une autre expérience en tant que parent d'enfants et résidant toujours au quartier New-Bell.

Après nous être entouré de ces préalables, nous avons procédé à une explication du but de notre recherche et éventuellement de la typologie des personnes recherchées.

Les participants ne l'ont été que de leur propre vouloir. Quand bien même nous avons pris sur nous de leur assurer la confidentialité des informations qui nous serons ainsi fournies et bien sür l'anonymat requis.

6.3.5. La purge

La purge a consisté à faire, dans un premier temps, une prospection et une infiltration. Le but étant de cibler rapidement les participants adéquats, notamment ceux qu'ont pourraient qualifiés de << natifs >> du quartier New-Bell avec une assise familiale d'une trentaine d'années.

Il nous a été recommandé des jours et des heures qui conviendraient pour rencontrer les potentiels participants. Ainsi par exemple, les samedis après-midi jusqu'en fin de soirée et les dimanches, nous avons arpenté les rues pour a la fois expliquer le but de notre recherche et les attentes.

Bénéficiant du statut de << natif de New-Bell >> et parlant parfaitement le pidgin, il nous été plus facile d'aborder les potentiels participants. Mais les réactions voulues se sont faites attendre. Quelquefois, nous avons usé, avec le concours des aInés qui étaient favorable a la recherche que nous menions, d'une forme de << pression >> pour que quelques-uns acceptent volontiers de faire partie de notre échantillon.

6.4. LE DEROULEMENT DES ENTRETIENS

Nous arrêtions un certain nombre de rendez-vous avec certains participants. Et avant de procéder a l'entretien proprement dit, nous prenions sur nous d'expliquer amplement aux participants ce que nous attendions d'eux et le but de notre étude. Avant de procéder au recueil des données proprement dit, il leur était proposé de poser toute sorte de question relative a l'entretien avec insistance sur les inquiétudes que pourraient avoir les participants. Autre précision, il faut noter que tous les entretiens que nous avons menés faisaient suite a un entretien préalable avec le participant, entretien a la suite duquel un rendez-vous était pris pour pouvoir procéder au recueil réel des données.

6.5. DIFFICULTES RENCONTREES

L'une des premières difficultés rencontrées a été celle de l'ouverture des participants a notre recherche. S'il a été plus facile pour nous de recueillir les données des participants du groupe des << non décrocheurs >>, la participation du groupe des < décrocheurs > n'a pas été très évidente. Tout portait a croire qu'ils se refusaient, pour la plupart, de réveiller un épisode douloureux de leur développement et probablement une des causes de leur « malheur > actuel. Chez la gente féminine, toutes a l'exception de deux ont décliné « poliment > la demande qui leur était formulée. Même les garanties d'anonymat n'ont pas suffi a les déloger de leur cantonnement. Une autre

difficulté, et non des moindres, a été celle de pouvoir nous entretenir profondément avec les << décrocheurs >>. Pour la plupart, ils étaient laconiques dans leurs interventions ce qui nécessitait de nombreuses relances afin d'épuiser la totalité des informations liées a une thématique.

Le problème crucial aura été celui de la langue. En effet, nous avons passé deux entretiens en pidgin. Mais la traduction de notre guide d'entretien de même que la retranscription des réponses a ces entretiens nous ont posé d'énormes problèmes quant au synonyme francais des mots utilisés en pidgin.

Nous avons, dans le cadre de cette étape de notre recherche, mis au point nos stratégies de recherche a travers la définition de notre population cible, le choix des méthodes et techniques de collecte de données, planification de la démarche de recherche. En accord avec la méthode de recherche que nous avons retenue, celle exploratoire, nous avons procédé a la collecte des données, non sans en avoir organisé rigoureusement au préalable ses différents moments tout en veillant a ce que notre démarche soit conforme a l'éthique de la recherche.

Maintenant que nos données sont recueillies, nous nous engageons dans l'organisation, le traitement et l'analyse des résultats issus de cette collecte. C'est ce qui fera l'objet de la troisième partie de notre recherche.

TROISIEME PARTIE :

RESULTATS

L'analyse des données qualitatives

Une analyse de données trace un portrait fidèle et, si possible, synthétique des données ; elle identifie et qualifie la nature et la force des relations entre les données et propose des explications pour les résultats obtenus et ce, en fonction des objectifs. Une analyse de données qualitatives comprend généralement trois étapes qui sont :

1) l'analyse descriptive de la variable indépendante et de la variable dépendante

Cette première étape de l'analyse des résultats consiste a présenter une brève description des personnes interrogées (caractéristiques personnelles, raison de leur participation a la recherche, etc. tout en respectant les règles de l'anonymat) ;

2) l'analyse descriptive de la variable dépendante

Cette deuxième étape consiste a faire l'analyse détaillée des réponses a l'entrevue suite a un regroupement des réponses en fonction des questions posées ou des dimensions de la variable dépendante. Pour ce faire, nous avons fait appel a des tableaux qualitatifs oü chaque tableau présente le résumé des réponses portant sur une question ou une dimension spécifique ;

3) l'analyse comparée de la variable dépendante en fonction des conditions de la variable indépendante.

Chapitre 7 : ANALYSE UNIVARIEE

7.1. ANALYSE DESCRIPTIVE DE LA VARIABLE INDEPENDANTE

Cette étape de l'analyse des résultats consiste a présenter une brève description des personnes interrogées (caractéristiques personnelles, raison de leur participation a la recherche, etc. tout en respectant les règles de l'anonymat si requis).

Au cours de nos différentes entrevues, 14 personnes se sont ouvertes a nous. Dans un équilibre parfait, nous avons eu autant de << décrocheurs >> que de << non décrocheurs >>.

De toutes les personnes participant a cette étude, deux personnes, quand bien même elles ont des racines au quartier, vivent en dehors du quartier. Il a été plus facile de mettre la main sur les << décrocheurs >> que sur << non décrocheurs >> qui, pour la plupart, vivent en dehors du quartier. Très peu de participantes (genre féminin) ont accepté faire partie de cette étude. Le recueil des données de cette étude n'a été possible que les week-ends et essentiellement le dimanche dans des points de rencontre. Avant de passer a l'entretien proprement dit, nous avons procédé a des entrevues question de faire d'abord la purge et ensuite prendre un rendez-vous qui n'était pas toujours honoré surtout lorsqu'il était convenu pour le courant de la semaine.

7.1.1. Caractéristiques des répondants liées a l'âge

Les participants a notre étude peuvent être répartis en trois groupes. Le groupe des moins de 30 ans qui est constitué de 4 participants ; celui des personnes dont l'âge est compris entre 30 et 40 ans, constitué de 6 participants ; le groupe des plus de 40 ans constitué de 4 participants.

7.1.2. Caractéristiques des répondants liées a la fratrie et au rang dans la fratrie

participants ; fratrie de 4 a 9 individus, 11 participants ; fratrie de plus de 9 individus, un participant.

Pour ce qui concerne la répartition des participants en fonction du rang qu'ils occupent au sein de la fratrie, on a distingué : 7 participants qui occupent les premières positions au sein de la fratrie ; 2 participants qui occupent les positions médianes ; 5 participants qui occupent les dernières positions.

7.1.3. Caractéristiques des répondants liées a la maisonnée et a la promiscuité

Les répondants a cette étude présentent un profil de maisonnée qui se répartit comme suit : un seul participant fait partie d'une maisonnée constituée de deux personnes ; pour le restant, la maisonnée oscille entre 6 et 14 individus. En outre, cette situation induit inéluctablement une promiscuité de plus en plus présente.

7.1.4. Caractéristiques des répondants liées a leur parcours scolaire au primaire

Tous les répondants ont achevé leur cycle primaire avec succès. Mais ils ne l'ont

pas achevé dans la même durée.

7.1.5. Caractéristiques des répondants liées a leur parcours scolaire au secondaire

Partant du fait que le décrochage scolaire est entendu comme la sortie du système

scolaire sans qualification ou diplôme, nous avons 7 répondants qui ont décroché ; 7 autres ont obtenu au moins un diplôme du secondaire.

7.1.6. Caractéristiques des répondants liées a leur statut matrimonial

Les participants a cette étude sont pour la plupart encore célibataire (9) même si

l'autre frange est résolument engagée dans une relation maritale (2) ou marié (3). 7.1.7. Caractéristiques des répondants liées a leur profession

Tous les répondants de moins de 30 ans sont sans emploi parce que sans qualification donc décrocheurs. Ceux de 30 ans et plus, quand bien même leur exercice professionnel n'est pas en rapport direct avec leur formation initiale, ont une occupation réelle qui leur rapporte un certain revenu.

7.1.8. Les durées des entretiens

Les 14 entretiens conduits ont mobilisé 499 minutes d'enregistrement. Soit une durée moyenne de 35 minutes par entretien.

7.1.9. Conditions particulières des entretiens liées a la langue

Au début de chaque entretien, dans les consignes et suggestions, le répondant avait le choix de la langue de l'entretien. Seulement deux répondants ont opté pour le pidgin. Les 12 autres ont préféré la langue française.

7.1.10. Conditions particulières des entretiens liées au cadre

Les répondants a cette étude ont, pour la plupart, été reçu dans le cadre qu'ils choisissaient. En prenant bien sür des précautions pour ne pas être perturbé. C'est ainsi que notre domicile familial a servi de cadre a la plupart des entretiens (7) ; 4 autres se sont déroulés dans le cadre de vie des répondants ; les 3 derniers se sont réalisés dans un point de rencontre des enfants du quartier (un restaurant).

7.1.11. Conditions particulières des entretiens liées au jour

Nous avons réalisé l'essentiel de nos entretiens les dimanches. En effet nous passions ces journées a arpenter les rues, a expliquer ce que nous entendons faire et ce que nous attendions éventuellement des potentiels participants. Si certains entretiens se sont déroulés au courant de la semaine, c'est en raison d'un rendez-vous préalablement arrêté et confirmé.

7.2. ANALYSE DESCRIPTIVE DE LA VARIABLE DEPENDANTE

7.2.1. CONDITIONS ET QUALITE DE VIE DE LA FAMILLE DURANT L'ENFANCE

Tableau n°2 :

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : Famille très pauvre ; Enfance pas facile pour des raisons matérielles avec de la promiscuité ; Un seul repas pris en famille au retour de la mère ; recevait de l'argent des beignets ; participait aux revenus de la famille

PARTICIPANT 5 : Famille a revenu moyen. Trois repas quotidiens pris de manière irrégulière. Recevait de l'argent de beignets. Pas de promiscuité.

PARTICIPANT 7 : Famille pauvre. Elevé par ses grands-parents. Recevait de l'argent de beignets. Promiscuité. Absence d'infrastructures

PARTICIPANT 8 : Famille a revenu moyen qui se disloque. Est élevé chez les grands-parents pas aisés. Deux a trois repas par jour, a des heures irrégulières. Recevais de l'argent de beignet. Promiscuité. Pas de participation

PARTICIPANT 9 : Famille a revenu moyen ; trois repas par jour, a des heures irrégulières et sans protocole ; recevait de l'argent de beignet ; présence d'infrastructures

PARTICIPANT 11 : Famille a revenu moyen de part les géniteurs. A été élevé chez les grandsparents. Trois repas par jour et a des heures irrégulières ; promiscuité. Présence d'infrastructures. Recevait de l'argent de beignets.

PARTICIPANTE 13 : Famille a revenu moyen de part les géniteurs. A été élevé chez les grandsparents. Trois repas par jour et a des heures irrégulières ; promiscuité. Recevait de l'argent de beignets.

PARTICIPANT 1 : Famille a revenu faible ; Enfance pas facile pour des raisons matérielles et promiscuité. Un seul repas quotidien pris en famille ; recevait de l'argent de beignets ; participait a accroItre les revenus de la famille.

PARTICIPANT 3 : Famille a revenu moyen. Bonnes conditions matérielles et infrastructurelles. Pas de promiscuité. Trois repas quotidiens pris en famille. Pas d'argent de beignets. Pas de participation aux revenus de la famille.

PARTICIPANT 4 : Famille a très faible revenu et très nombreuses pour un espace réduit. Un seul repas le soir pris en famille. Recevait de l'argent de beignets. Participait aux revenus de la famille le week-end.

PARTICIPANTE 6 : Famille a revenu moyen. Trois repas par jour, a des heures régulières et en famille. Recevait de l'argent de beignets et ne participait pas aux revenus de la famille.

PARTICIPANT 10 : Famille a revenu très faible ; un seul repas par jour pris en famille ; promiscuité ; sans infrastructures ; recevait de l'argent de beignets.

PARTICIPANT 12 : Famille a revenu moyen, mais élevé par les grands-parents.

Pas de promiscuité. Repas a volonté. Recevait de l'argent de beignet.

PARTICIPANT 14 : Famille a revenu moyen de part les géniteurs. A été élevé chez les grandsparents. Trois repas par jour et a des heures irrégulières ; promiscuité. Recevait de l'argent de beignets. Pas de promiscuité et participait sans contrainte aux revenus de la famille

Les << décrocheurs >>, eu égard aux conditions et a la qualité de la vie en famille durant l'enfance, ne se distinguent pas des << non décrocheurs >>. En effet, on ne peut pas, a partir de l'histoire de vie des répondants, dégager un trait, relevant des conditions économiques, qui différencie les catégories << décrocheurs >> et << non décrocheurs >>.

7.2.2. PRATIQUES EDUCATIVES PARENTALES ET LANGUES DE COMMUNICATION

Tableau n°3 :

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : Education du style laisseraller, laisser-faire ; pidgin en famille (parle bien la langue maternelle) ; pidgin au quartier ; francais à l'école

PARTICIPANT 5 : Mélange de sévérité et de laisser-aller ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 7 : Education rigoureuse ; pidgin en famille (parle bien la langue maternelle) ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 8 : Education faite de sévérité et de laisser-aller ; francais en famille (ne parle pas la langue maternelle) ; francais au quartier (parle moins bien le pidgin) ; francais a l'école.

PARTICIPANT 9 : Rigueur et sévérité ; absence de dialogue et bastonnade ; francais en famille (se débrouille en la langue maternelle) ; francais au quartier (parle moins bien le pidgin) ; francais à l'école.

PARTICIPANT 11 : Laisser-faire et

surprotection des grands-parents ; francais en famille (se débrouille en la langue maternelle) ; francais au quartier (parle moins bien le pidgin) ; francais a l'école.

PARTICIPANTE 13 : Education du type laisser-faire et sévérité avec une forte présence du religieux ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 1 : Education assez rigoureuse à socle religieux ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 3 : Pratique éducative du type laisser-aller ; pidgin en famille (parle bien la langue maternelle) ; pidgin au quartier ; francais a l'école

PARTICIPANT 4 : Education assez rigoureuse à socle religieux ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANTE 6 : Education faite de rigueur et de dialogue reposant sur un socle religieux ; pidgin en famille (méme si se débrouille en langue maternelle) ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 10 : Respect de l'ainé sans sévérité, le tout reposant sur un socle religieux très fort ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 12 : Education autoritaire reposant sur un socle religieux ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais a l'école.

PARTICIPANT 14 : Education faite de sévérité et de dialogue, Priorité accordée a l'école ; langue maternelle en famille ; pidgin au quartier ; francais à l'école.

extremes (permissifs ou autoritaire). Tandis que chez les << non décrocheurs >> le style démocratique semble plus prégnant. En outre, en rapport avec la langue maternelle, et dans une moindre mesure le pidgin, les << décrocheurs >>, notamment ceux de ces dernières années ont perdu de nombreux l'usage de la langue maternelle et pour ce qui concerne le pidgin, ils le parlent de moins en moins dans leurs conversations au quartier.

7.2.3. VIE AU QUARTIER ET SEDENTARITE

Tableau n°4

Les deux catégories de participants ont de bonnes relations avec leur voisinage immédiat

tout comme avec les personnes de la méme tranche d'age dans le quartier. Cependant, on note

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : Liens étroits avec les

PARTICIPANT 1 : Bonnes relations avec le

habitants du quartier ; épanouissement réel au

voisinage et les enfants de la méme génération ; visite et

sein du quartier et nulle part ailleurs. Visite chez des membres de la famille élargie sans y séjourner.

séjours chez des membres de la famille.

PARTICIPANT 3 : Bonnes relations avec le

voisinage et les enfants de la méme génération ; vie en

PARTICIPANT 5 : Bonnes relations avec le

bande ; sédentaire pur. Ni visite ni séjour chez les

voisinage immédiat et lointain. Brève visite chez les membres de la famille sans y séjourner.

membres de la famille.

 

PARTICIPANT 4 : Bonnes relations avec le

PARTICIPANT 7 : Rapport distant avec le

voisinage mais limitées au sport ; Visite et séjour chez

voisinage immédiat et lointain ; sédentaire pur sans visite a la famille élargie.

des membres de la famille élargie.

 

PARTICIPANTE 6 : Bonnes relations avec mon

PARTICIPANT 8 : Bonnes relations avec

voisinage immédiat et lointain ; vie en bande d'amies

mon voisinage immédiat et lointain ; vie en

toutes camarades de classe ; allait quelquefois passer le

bande ; n'allait chez aucun membre de la famille.

week-end chez des membres de la famille et méme certaines vacances.

PARTICIPANT 9 : Bons rapports avec les voisins et égaux au sein du quartier ; vie en

PARTICIPANT 10 : Relations professionnelles en

bande a faire des << commentaires >> ; pas de nuit

raison de ma formation technique ; Pas de vie en bande ;

chez des voisins ; n'allait chez aucun membre de

Pas de nuit chez des voisins. Visite et séjour chez des

la famille élargie.

membres de la famille élargie.

PARTICIPANT 11 : Vie en bande ; Jeux au

PARTICIPANT 12 : Bons rapports avec les voisins

hasard ; Plaisir de faire des << divers >> et

et mes égaux au sein du quartier ; vie en bande a faire des

<< fallah >> (intrigues) ; Pas de nuit chez des

<< commentaires >> et a jouer au football ; pas de nuit chez

voisins.

des voisins. Visite et séjour chez des membres de la famille élargie.

PARTICIPANTE 13 : Pas d'amis ; solitaire.

 

Pas de nuit chez les voisins. Visites et séjours

PARTICIPANT 14 : Bonnes relations avec le

chez des membres de la famille élargie.

voisinage et les égaux du quartier mais limitées à l'école ; Visites et séjours chez des membres de la famille élargie.

chez les << décrocheurs >> une propension pour la vie en bande et dont le lien verbal est autre chose que l'école. En outre, force est de constater une sédentarité marquée chez les << décrocheurs >> qui n'ont que l'espace du quartier New-Bell qui leur sert modèle comportemental.

7.2.4. VIE SCOLAIRE AU PRIMAIRE Tableau n°5

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : Quatre établissements

PARTICIPANT 1 : Deux établissements ; élève

scolaires ; élève moyen et distrait. Cycle achevé en 8 ans.

au-dessus de la moyenne. Cycle achevé en 7 ans.

 

PARTICIPANT 3 : Un seul établissement. Bon

PARTICIPANT 5 : Trois établissements ; élève moyen. Cycle achevé en 8 ans.

élève. Cycle achevé en 6 ans.

 

PARTICIPANT 4 : Deux établissements ; élève

PARTICIPANT 7 : Trois établissements ; élève médiocre, perturbé et délinquant. Achevé en 8 ans.

au-dessus de la moyenne. Cycle achevé en 7 ans.

 

PARTICIPANTE 6 : Famille a revenu moyen.

PARTICIPANT 8 : Un seul établissement. Bon

Trois repas par jour, a des heures régulières et en

élève. Cycle achevé en 6 ans.

famille. Recevait de l'argent de beignets et ne

participait pas aux revenus de la famille.

PARTICIPANT 9 : Un seul établissement. Elève moyen. Cycle achevé en 6 ans.

PARTICIPANT 10 : Quatre établissements pour des raisons de déménagement des tuteurs ; très bon

PARTICIPANT 11 : Cinq établissements

scolaires ; élève médiocre. Cycle achevé en 8 ans.

élève. Cycle achevé en 7 ans.

Indiscipliné.

PARTICIPANT 12 : Deux établissements ; élève très brillant. Cycle achevé en 6 ans.

PARTICIPANTE 13 : Un seul établissement scolaire ; élève moyenne. Cycle achevé en 6 ans.

PARTICIPANT 14 : Un seul établissement ; élève précoce et très brillant. Cycle achevé en 6 ans.

La vie scolaire au primaire de nos participants est somme toute équilibrée. Chacun a achevé son cycle, avec quelques difficultés certes, mais l'a achevé quand même. Nous avons noté cependant des conduites délinquantes chez les << décrocheurs >> en fin de cycle primaire, conduites liées surtout a l'âge avec lequel ils ont atteint la classe du

CM2. Par la même occasion, nous relevons une plus grande mobilité scolaire des décrocheurs que des << non décrocheurs >>.

7.2.5. VIE SCOLAIRE AU SECONDAIRE Tableau n°6

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : N'a pas fait le secondaire juste après le primaire. S'est remis en cours du soir 7 ans plus tard.

PARTICIPANT 5 : N'a pas fait le secondaire pourtant le désirait. En tout cas pas pour des raisons financières.

PARTICIPANT 7 : N'a pas fait le secondaire parce que déjà délinquant et par refus des parents.

PARTICIPANT 8 : Trois établissements ; renvoyé pour indiscipline (nombreuses heures d'absence). Arrêt complet après 7 ans sans succès, sans diplôme.

PARTICIPANT 9 : Cinq établissements scolaires. Travail médiocre. Echec scolaire puis décrochage scolaire après 7 années infructueuses. Sans diplôme.

PARTICIPANT 11 : N'a pas fait le secondaire parce que déjà délinquant et par absence des parents.

PARTICIPANTE 13 : Deux établissements en raison de difficultés relationnelles. Echec scolaire. Arrêt après 8 ans sans diplôme.

PARTICIPANT 1 : trois établissements. Scolarité entrecoupée par manque de moyens. Persévérance. Cycle achevé en 10 ans.

PARTICIPANT 3 : Deux établissements. Scolarité entrecoupée par manque d'assistance financière des parents qui ont divorcé. Arrête après deux tentatives au probatoire. Titulaire d'un BEPC.

PARTICIPANT 4 : Un seul établissement. Cycle achevé en 8 ans.

PARTICIPANTE 6 : Cinq établissements pour cause de changement d'orientation et de grève. Persévérance malgré des échecs. Cycle achevé en 10 ans. BAC G2

PARTICIPANT 10 : Cinq établissements pour déménagement des tuteurs et par manque de moyens. Achevé en 8 ans avec un Bac Technique à la clé.

PARTICIPANT 12 : Un seul établissement. Arrêt pour incompatibilité avec le football qui s'imposait. CAP.

PARTICIPANT 14 : Trois établissements ; élève très brillant. Cycle achevé en 8 ans. Bac D

Les << décrocheurs >> ont connu des fortunes diverses quand à la non possession d'un diplôme du secondaire. Pour la plupart, c'est l'échec scolaire qui appelle au découragement et à l'arrêt complet. Or, chez les << non décrocheurs >>, quand il y a abandon scolaire, c'est davantage pour des raisons économiques.

7.2.6. RAISONS DE L'ABANDON SCOLAIRE OU COMMENT NE PAS ABANDONNER

Tableau n°7

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : Peur de la bastonnade ; manque de moyens matériels ; défaut d'encadrement ; pénétration du secteur informel

PARTICIPANT 5 : Ne sait pas ce qui s'est passé ; contraindre l'enfant et construire un projet de vie pour lui ; l'orienter dans un centre de formation professionnelle

PARTICIPANT 7 : Conduites délinquantes ; l'enfant doit vivre hors du quartier

PARTICIPANT 8 : Découragement et manque de motivation ; absence d'autorité parentale ; mauvaises fréquentations ; le manque de concentration

PARTICIPANT 9 : Situation d'échec scolaire ; absence de projet de vie et inadéquation du projet parental avec la capacité réelle de l'enfant.

PARTICIPANT 11 : L'absence de mon père, l'absence de pressions familiales et la surprotection de ma grand-mère ; Se tranquilliser ; Rompre avec les amitiés nocives ; Quitter le quartier.

PARTICIPANTE 13 : Ennuis de santé ; difficultés relationnelles ; avoir envie de réussir ; avoir la volonté d'être instruite et connaItre une réussite sociale.

PARTICIPANT 1 : Volonté de réussir ; projet de vie ; sens de la responsabilité ; force d'adaptation.

PARTICIPANT 3 : Absence de moyens financiers ; Frustrations subies du fait de la séparation des parents ; Le manque d'encadrement familial ; Pénétration du secteur informel

PARTICIPANT 4 : Forte présence de la sphère religieuse ; Rupture d'avec l'environnement immédiat qui pollue ; Volonté de rompre avec un échec quasi endémique au sein de la famille ; Volonté de réaliser un projet de vie

PARTICIPANTE 6 : Etre endurant ; Avoir de bons modèles ; Vouloir servir d'exemple.

PARTICIPANT 10 : Les parents sont dépassés ; il faut se débrouiller.

PARTICIPANT 12 : Avoir une éducation religieuse prégnante ; Développer l'esprit de curiosité de l'enfant ; Avoir un projet de vie ; Occuper l'enfant a longueur de temps

PARTICIPANT 14 : Avoir un projet de vie ; avoir de bons modèles ; être soutenu par les parents ; avoir une éducation religieuse ; être rigoureux et appliqué.

Les raisons du décrochage scolaire sont multiples et variées. Mais, faisant une lecture différente en terme de comment faire pour ne pas décrocher, on arrive a en faire une lecture, toute proportion gardée, cohérente. Le manque de projet de vie des enfants soutenu par les parents et l'implication de ces derniers accompagnée d'une éducation faite de rigueur et d'un zeste du religieux semble recueillir l'assentiment des participants indifféremment des catégories auxquelles ils appartiennent.

7.2.7. ELEMENTS D'INFLUENCE CONDUISANT AU DECROCHAGE SCOLAIRE Tableau n°8

Réponses des décrocheurs
(7 répondants)

Réponses des non décrocheurs
(7 répondants)

PARTICIPANT 2 : Le caractère âpre de la vie ici du fait de l'abandon des pouvoirs publics ; Les attractions et divertissements omniprésents.

PARTICIPANT 5 : Les divertissements ; la facilité relative a gagner de l'argent et la contagion comportementale

PARTICIPANT 7 : Omniprésence de petites activités génératrices de revenus

PARTICIPANT 8 : Laisser-aller dans

l'éducation ; la contagion comportementale ; l'absence et le manque d'encadrement des parents ; l'appât du gain ; présence marquée de distractions ; la sédentarité

PARTICIPANT 9 : Le système << D >> ; le gain facile d'argent.

PARTICIPANT 11 : Quête facile d'argent ; contagion dans les jeux de hasard (<< Mata >>) ; forte colonie étrangère sans culture scolaire.

PARTICIPANTE 13 : Omniprésence des activités génératrices de revenus

PARTICIPANT 1 : secteur informel et de petites activités génératrices de revenus ; divertissements peu coüteux et ouverts a tous.

PARTICIPANT 3 : L'attrait des activités commerciales qui y ont cours

PARTICIPANT 4 : Présence de nombreux marchés qui offrent de nombreux petits boulots ; La délinquance qui peut être contagieuse

PARTICIPANTE 6 : Des mondanités.

PARTICIPANT 10 : laisser-aller qui y a cours ; la contagion de la quête du gain par la communauté étrangère.

PARTICIPANT 12 : Situation au coeur de la ville ; les petits métiers ; le vol ; forte densité ; partage de l'espace familial par plusieurs générations d'enfants.

PARTICIPANT 14 : Sédentarité et oisiveté ; l'appât du gain ; les divertissements et distractions ; la perte de l'autorité parentale et la démission des parents.

Tous les participants pour la plupart identifient l'appât du gain omniprésent au quartier New-Bell et dü principalement au caractère purement commercial de cet environnement. L'appât du gain appelle des sources de dépenses a travers de nombreuses distractions qui font ramer l'éducation des parents et celle des institutions scolaires a contre-courant. L'oisiveté et la fermeture au monde sont tout aussi déterminantes.

7.2.8. COMMENT FAIRE RECULER L'ABANDON SCOLAIRE A NEW-BELL ? Tableau n°9

REPONSES DES DECROCHEURS
(7 répondants)

REPONSES DES NON DECROCHEURS
(7 répondants)

PARTICIPANT 1 : Réglementer les loisirs ; Mobiliser les parents et les aider à construire un cadre normatif d'ensemble à travers une pratique éducative rigide ; Avoir une maison avec barrière ; faire l'enfant fréquenter loin du domicile ; Subvenir à l'essentiel de ses besoins ; Lui apprendre à se contenter de ce qu'on lui donne.

PARTICIPANT 3 : Délocaliser les centres commerciaux de New-Bell ; faire fréquenter les enfants dans les internats ou en dehors de la ville de Douala.

PARTICIPANT 4 : Asseoir une spiritualité forte dans l'éducation ;

Subvenir aux besoins de la famille ; Occuper les enfants à travers leur projet de vie

PARTICIPANTE 6 : Sensibiliser les enfants ; La motivation et le soutien des parents surtout après un échec ; Soutien spirituel ; présenter des modèles incitatifs.

PARTICIPANT 10 : Créer des écoles professionnelles ou de métiers ; délocaliser les marchés de New-Bell ; implication plus grande des parents dans l'encadrement des enfants.

PARTICIPANT 12 : Faire reculer la pauvreté ; rompre le contact avec le voisinage.

PARTICIPANT 14 : Mettre les enfants au contact des réalités autres que celles qu'ils rencontrent dans leur espace ; mettre l'école au centre des priorités de vie des enfants ; rendre l'école obligatoire jusque l'âge de 16 ans avec un accent sur la professionnalisation.

PARTICIPANT 2 : New-Bell doit cesser d'être un dépotoir ; faire reculer l'insalubrité et la pauvreté.

PARTICIPANT 5 : Eloigner l'enfant du quartier ; le tenir éloigner des divertissements ; définir des normes strictes de vie.

PARTICIPANT 7 : Mettre un terme à

certaines activités qui déroutent les enfants ; rendre l'école obligatoire jusqu'à un certain âge ; faire reculer la pauvreté ; rompre tout contact avec le voisinage ; maintenir les enfants dans un espace contrôlable.

PARTICIPANT 8 : Faire du soutien scolaire ; implication plus grande des parents dans l'éducation des enfants ; orientation de plus en plus professionnelle ; réduction des distractions et des appâts du gain.

PARTICIPANT 9 : Faire de New-Bell une zone d'éducation prioritaire ; Faire du soutien scolaire ; éloigner l'enfant du quartier dès le bas âge ; rompre toute relation avec le voisinage.

PARTICIPANT 11 : Chasser les étrangers parce qu'ils rendent la vie facile ; interdire les vidéos clubs, les jeux au hasard et toutes les autres distractions qui détournent l'attention des enfants.

PARTICIPANTE 13 : Créer des métiers professionnels ; établir des normes strictes à suivre ; inculquer des valeurs morales et subvenir à leur besoin

Si on retient de l'avis des participants que la solution pour faire reculer le décrochage scolaire au quartier New-Bell passe nécessairement par le débouchage des goulots d'étranglements identifiés comme facteurs d'influence et conduisant au

décrochage. En outre, il y a nécessité de rendre l'école obligatoire et gratuite jusque au moins l'âge de 16 ans pour refréner la prolifération des badauds et autres débrouillards qui, en quête d'argent, finissent par compromettre leurs chances de réussite scolaire.

Chapitre 8 : ANALYSE COMPAREE

8.1. CONDITIONS ET QUALITE DE VIE DE LA FAMILLE DURANT L'ENFANCE

Tableau n°10

SYNTHESE
(14 répondants)

Il n'y a pas une différence réelle entre les conditions et la qualité de vie de famille des décrocheurs et des non décrocheurs. Les problèmes sont les mêmes. Et l'argent est prégnant à travers << l'argent de beignets >>.

Cette synthèse nous interpelle sur le fait que : bien que l'argent, en tant qu'instrument, soit présent dans les pratiques éducatives, émettre une hypothèse sur les conditions et la qualité de vie des familles du quartier New-Bell comme déterminant le décrochage des enfants offre un risque d'être dépourvue de pertinence. Toutefois, nous pouvons relever le fait que très tot l'habitude de l'argent est inculquée aux enfants et peut être un des déterminants de l'orientation précoce vers de petites activités génératrices de revenus et, par conséquent, les << obliger >> à décrocher de leur cursus scolaire.

8.2. PRATIQUES EDUCATIVES PARENTALES ET LANGUES DE COMMUNICATION

SYNTHESE
(14 répondants)

Ce qui semble distinguer les décrocheurs et les non décrocheurs tient du fait que l'éducation parentale ne repose pas sur un socle religieux et en plus que les décrocheurs, quand bien même ils parlent leur langue maternelle, ne s'en servent pas en famille. Ce qui peut laisser penser qu'à partir du moment oü la langue maternelle est peu usitée par le décrocheur, un dialogue intime ne s'y déroule pas.

Tableau n°11

La synthèse portant sur les pratiques éducatives et les langues de communication nous interpelle a deux niveaux. Dans un premier temps, les pratiques éducatives sont inefficientes dans le quartier New-Bell si elles ne s'entourent pas d'une gaine religieuse ; en outre, les langues maternelles et le pidgin sont en décrépitude ce qui laisse penser que les enfants de ce quartier sont en perte de repères identitaires tant ethnique que communautaire. Nous pouvons donc émettre l'hypothèse selon laquelle l'absence de communication propre au sein de la famille serait une explication du décrochage scolaire des progénitures.

8.3. VIE AU QUARTIER ET SEDENTARITE Tableau n°12

SYNTHESE
(14 répondants)

Ce qui distingue les << décrocheurs >> et les << non décrocheurs >> est le fait les décrocheurs sont plus enracinés dans le quartier qui devient, par conséquent, le seul cadre qui s'offre a eux pour leur développement.

Partant de la différence apparente entre les << non décrocheurs >> et les << décrocheurs >>, cette synthèse met en relief la << fermeture au monde >> et l'enracinement profond a l'environnement du quartier New-Bell que connaissent les << décrocheurs >>. Ceci nous conduit a émettre l'hypothèse selon laquelle la sédentarité expliquerait mieux le décrochage scolaire a New-Bell

SYNTHESE
(14 répondants)

Il n'y a pas de différence significative entre les << décrocheurs >> et les << non décrocheurs >>. Cependant, on peut constater que les << décrocheurs >> se distinguent des << non décrocheurs >> par un nombre d'établissements fréquentés plus important et le temps mis a achever ce cycle plus long.

8.4. VIE SCOLAIRE AU PRIMAIRE Tableau n°13

Cette synthèse nous amène a émettre l'hypothèse selon laquelle le décrochage scolaire est une conséquence de l'échec scolaire au primaire.

8.5. VIE SCOLAIRE AU SECONDAIRE Tableau n°14

SYNTHESE
(14 répondants)

L'indiscipline et l'échec scolaire semblent caractériser et distinguer les << décrocheurs >> des << non décrocheurs >>.

3

Cette synthèse sur la vie scolaire au secondaire nous amène a émettre l'hypothèse selon laquelle l'indiscipline, conséquence de l'échec scolaire, expliquerait l'abandon de la scolarité des enfants de New-Bell.

8.6. RAISONS DE L'ABANDON SCOLAIRE OU COMMENT NE PAS ABANDONNER

Tableau n°15

SYNTHESE
(14 répondants)

Chez les << décrocheurs >>, on remarque une profusion de raisons ayant conduit au décrochage. Cependant du côté des << non décrocheurs >>, dans les stratégies permettant de ne pas abandonner, on distingue principalement une volonté de réussir et de se distinguer avec un soutien parental réel a travers un projet de vie.

Cette synthèse sur les raisons du décrochage scolaire, nous invite a reconsidérer les stratégies individuelles et familiales comme déterminantes pour la poursuite d'un cursus réussi au quartier New-Bell. Nous émettons donc l'hypothèse selon laquelle, la qualité des stratégies détermine la qualité la réussite scolaire au quartier New-Bell.

8.7. ELEMENTS D'INFLUENCE CONDUISANT AU DECROCHAGE SCOLAIRE Tableau n°16

SYNTHESE
(14 répondants)

De tous éléments jugés comme influençant les enfants et les conduisant au décrochage scolaire reviennent régulièrement << l'appât du gain >> en raison du caractère commercial de cette zone géographique. En outre on y retrouve des divertissements qui représentent un attrait fort pour les enfants.

Cette synthèse suggère d'émettre une hypothèse en rapport avec le caractère hautement commercial de l'environnement du quartier New-Bell. Nous pensons donc que le caractère commercial du quartier New-Bell et l'attrait du gain qu'il génère explique le décrochage scolaire des enfants de cet espace.

Chapitre 9 : INTERPRETATION DES

RESULTATS

9.1. DISCUSSION

Bien que la visée de notre étude soit exploratoire, elle n'en diminue pas la portée et, par la même occasion, ne nous autorise pas à éluder la discussion des résultats ainsi obtenus.

Nous avons émis un certain nombre d'hypothèses qui se situent en prolongement du fait que l'environnement de manière générale, et celui du quartier New-Bell qui fait l'objet de notre étude, secrète des facteurs qui influencent plus ou moins les individus qui y vivent. Ceci correspond bien à la démarche conceptuelle de Urie Bronfenbrenner dans sa théorie écosystémique qui attire l'attention des uns et des autres sur des dysfonctionnements éventuels provenant de l'interaction des différents systèmes qui entourent l'individu et le conduisent tout au long de son développement. La qualité du développement de l'individu sera donc tributaire de la qualité de gestion des influences intégrées aux différents environnements dans lesquels il se meut. Tout ce ci étant apprécié dans le système de développement ultime de Bronfenbrenner : le chronosystème.

9.2. PERSPECTIVES

Cette étude s'est voulu exploratoire parce qu'ayant pour visée de générer des hypothèses pour des recherches à venir. Les hypothèses ont été générées et, il ne reste plus qu'à en vérifier les liens à travers une recherche que nous espérons pouvoir mener.

Toutefois, cette recherche justement parce qu'exploratoire est quelque peu réductionniste en ce sens qu'elle n'aspire pas, à partir du caractère réduit de son échantillon, à une portée générale. Cependant, elle a le mérite de poser le problème du décrochage scolaire à partir de l'expérience scolaire, sociale et environnementale de ceux qu'on pourrait qualifier de << natifs >> du quartier New-Bell. En effet, le quartier

New-Bell porte de nombreuses spécificités qu'aucune étude, si elle ne s'intéresse pas particulièrement a cet environnement, ne saurait être opératoire dans ses conclusions, du moins en ce qui concerne le quartier New-Bell. Dans le champ de la science, cette étude, qui se situe dans le prolongement de nombreuses autres études de part le monde portant sur le décrochage scolaire, apporte des éléments nouveaux sur l'activité économique du quartier New-Bell comme cause principale et potentiel facteur de décrochage scolaire ; mais aussi le fait que tout environnement qui vit de manière recluse et en vase clos secrète en silence des éléments contre l'éducation qui est faite d'ouverture a l'autre et sur l'autre.

CONCLUSION

Cette recherche exploratoire sur << Environnement social précaire, Décrochage scolaire et Stratégies de réussite >> avait pour objectifs de déterminer les facteurs qui conduisent au décrochage scolaire dans un environnement aussi difficile a saisir que le quartier New-Bell et, en outre, les stratégies mises sur pied pour s'assurer une réussite scolaire probante par ceux qui vivent dans cet environnement.

Nous avons, dans la partie théorique, scruté la situation qui faisait problème en relevant le caractère on ne peut plus social du phénomène du décrochage scolaire et aussi son incidence dans la vie sociale en terme de sous-emploi et dans une moindre mesure de conduites délinquantes y découlant. A travers la revue de la littérature scientifique relative a notre thème de recherche, nous avons recensé les travaux menés a travers le monde sur le phénomène du décrochage scolaire et, sans prendre position, avons présenté les orientations théoriques qui sous-tendent les actions entreprises pour faire reculer le décrochage scolaire. La revue les concepts nous a permis de relever les spécificités de l'environnement New-Bell et notamment la difficulté a faire rentrer ce quartier dans une typologie ; ce qui entraIne, ipso facto, la nécessité de reconsidérer les modèles proposés sous d'autres cieux au moment de les mettre en oeuvre chez et singulièrement le quartier New-Bell qui a fait l'objet de notre étude. Nous avons achevé cette partie de notre travail par la présentation des théories principales et auxiliaires qui sous-tendaient notre recherche, toute ayant comme support théorique fondamental la théorie écosystémique de Urie Bronfenbrenner. Dans la partie méthodologique, après avoir fait un bref rappel de l'objet de notre étude et planifié notre démarche de recherche, nous avons construit notre instrument d'enquête et procédé a l'échantillonnage de notre population d'étude. En dernière partie de notre étude, nous avons présenté et analysé les résultats obtenus a partir des données recueillies. Le but final de notre recherche étant de générer des hypothèses, nous avons produit un nombre important d'hypothèses qui pourront éventuellement servir de balise de süreté a de prochaines études dans l'optique d'apporter une lecture du décrochage scolaire a partir des spécificités environnementales du quartier New-Bell.

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Moteurs de recherche : Google, Yahoo, MSN, Altavista...

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