Introduction :
Toute activité de production met en jeu des inputs qui
constituent des ressources productives à transformer ou à
utiliser et des outputs qui sont les résultats de production. La mesure
des performances et l'évaluation des types d'allocation des ressources
à la production se fait grâce à l'étude du lien
entre les inputs et les outputs. Ainsi, les économistes ont recours
à la notion d'efficacité pour tenir compte d'une part du
critère de maximalité du produit et de la possibilité
d'une utilisation minimale des moyens de production d'autre part. Dans cette
mesure, une Exploitation Familiale Agricole est dite efficace si, à
partir du panier d'inputs qu'elle détient, elle produit le maximum
d'outputs possible ou si, pour produire une quantité donnée
d'outputs, elle utilise les plus petites quantités possibles
d'inputs.
Dans ce chapitre, le concept d'efficacité dans la
théorie économique sera présenté, à partir
d'une analyse théorique de l'efficacité et de ses
déterminants potentiels (section 1), et d'une analyse des
méthodes d'estimation de l'efficacité (section 2).
Section 1 : L'efficacité et ses
déterminants
Dans le domaine de l'agriculture, les inefficacités
proviennent de plusieurs raisons parmi lesquelles : le manque de formation du
chef d'exploitation, la taille de l'exploitation, l'accès aux
crédits, l'individualisme des exploitants (Nuama, 2006)... Pour mieux
comprendre les facteurs qui influencent l'efficacité (II), on se propose
d'étudier la notion d'efficacité au préalable (I).
I. La notion d'efficacité
A la notion d'efficacité est rattachée
différents concepts en économie (B), de même elle est une
notion qui repose sur plusieurs fondements théoriques (A).
A. Fondements de l'efficacité
La théorie néo-classique présente
l'économie comme un régime de concurrence, le jeu des
entrées et des sorties du marché porte en lui les
mécanismes de rétablissement de la compétitivité
des entreprises. Condamnées en effet à réussir sur le
champ de bataille de la concurrence au risque de perdre des parts de
marchés ou de sortir entièrement du marché au profit des
autres, les entreprises veillent à une allocation optimale de leurs
ressources et sur une utilisation efficace des facteurs de production
(Nodjitidjé, 2009). Ainsi, les entreprises qui tiennent sur le
marché sont celles qui combinent au mieux les facteurs de production.
Cette philosophie peut trouver ses origines dans la théorie de la «
main invisible » d'Adam Smith (1776). Pour cet auteur, le marché
porte les germes de l'efficacité productive ; donc à priori, il
n'est pas opportun pour une entreprise de surmonter ses défaillances.
Cependant, cette théorie qui se veut universelle a fait l'objet de
nombreuses critiques.
En effet dans la pratique, les marchés sont en
concurrence imparfaite, et les risques d'inefficacité permanente ne
sont pas exclus. Ainsi, Hirshman (1992)27 écrivait
qu'aucun
27 Voir Nodjitidjé (2009).
système économique ne peut garantir que les
entreprises (ou les EFA) agiront toujours de façon à avoir une
conduite efficace et respectueuse des comportements qu'on attend d'elles.
Les études empiriques ont dans cette mesure, jusqu'au
début des années cinquante, écarté de
manière implicite la possibilité que les entreprises puissent
exploiter leurs ressources d'une manière inefficace. Cette omission du
traitement de l'efficacité a caractérisé les travaux de
plusieurs économistes [Carlson (1939), Hicks (1946) et Samuelson
(1947)]28.
L'intérêt des chercheurs pour étudier les
impératifs d'une utilisation efficace des nouvelles technologies de
production à été stimulé par l'engouement pour
l'innovation technologique au cours des années 60. La notion
d'efficacité prenait une place de plus en plus importante dans les
débats et les recherches scientifiques ; et cela dans tous les secteurs
de l'économie. Plusieurs approches et méthodes
d'évaluation et de mesure de l'efficacité ont été
développées et utilisées dans des études
empiriques, et ce pour plusieurs secteurs d'activités (Amara et Romain,
2000).
Koopmans (1951) et Debreu (1951) sont les premiers à
travailler sur le concept d'efficacité. Koopmans proposa une mesure du
concept d'efficacité et Debreu la mesura empiriquement. Debreu (1951)
propose le coefficient d'utilisation des ressources, qui donne une
évaluation numérique de la perte associée à une
situation non optimale.
Une primeur revient également à Farrell (1957),
celle d'avoir défini clairement le concept d'efficacité
économique et distinguer les concepts d'efficacité technique et
d'efficacité allocative. C'est également lui qui proposa une
approche pour l'estimation des frontières d'efficacité, partant
de l'idée que les informations disponibles sur une activité
donnée devaient permettre l'estimation du « best practice envelope
», pour cette activité.
Le terme efficacité englobe certaines notions de la
théorie microéconomique que sont : la fonction de production, les
coûts, le profit et le prix. Ainsi, l'efficacité en agriculture
peut être définie comme le degré auquel les producteurs
obtiennent le meilleur résultat avec les ressources disponibles et les
technologies données. C'est dans ce sens que Piot-Lepetit et Rainelli,
(1996) affirment que les écarts entre le niveau maximum de production
que l'on puisse obtenir en intégrant toutes les contraintes auxquelles
font face les producteurs et la réalité sont sensibles et
montrent l'existence d'importantes marges de manoeuvre.
28 Voir Amara et al (2000)
La notion d'efficacité présente donc trois
composantes que sont : l'efficacité technique, l'efficacité
allocative et l'efficacité économique (Bravo-Ureta et al., 1997 ;
Piot-Lepetit et Rainelli, 1996 ; Coelli et al., 1998).
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