THEME:
LES MISSIONS ASSIGNEES A LA COBAC:
CONTRIBUTION A L'ETUDE DES ASPECTS
JURIDIQUES
RESUME
L'absence ou la faiblesse de la réglementation et de la
régulation figurent parmi les causes de la crise financière
mondiale actuelle. Les banques de la sous région Afrique Centrale semble
être à l'abri des difficultés du système mondial du
fait de l'importance et de la qualité de la surveillance exercée
par la COBAC sur les activités dans et hors bilan des banques. La
naissance de la COBAC marque une nouvelle ère dans la supervision du
système bancaire de la sous région Afrique Centrale. Elle devait
non seulement mettre fin à la crise bancaire qui continuait à
freiner l'économie, mais aussi assurer la stabilité à long
terme du système bancaire de la CEMAC. On peut comprendre pourquoi la
COBAC cumule à elle seule les pouvoirs de réglementer, de
contrôler, d'administrer et de sanctionner les Etablissements de
crédit et assimilés. Sa notoriété et son
efficacité concourent au renforcement permanent de ses pouvoirs,
lesquels ne sont pas absolus et subissent à leur tour des
évaluations techniques de la part des autorités politiques et des
institutions internationales de la finance, et des contrôles judiciaires
de la Cour de Justice Communautaire.
ABSTRACT
The absence or weak rules and regulations figures amongst the
causes of the actual world financial crisis. Banks of the Central African sub
region seem to be free from the difficulties related to the world system due to
the importance and the quality of the control implemented by the Central
African Banking Commission, COBAC. The creation of COBAC marks a new era in the
supervision of the banking system of the sub region. This would have ceased the
bank crisis which continues to slow down the economic system of the CEMAC sub
region. At this juncture, we can understand why COBAC cumulates the power of
regulating, controlling, administrating and sanctioning financial institutions
and related fields. Its high recognized competence and efficiency leads to
permanent reinforcement of its powers which are not absolute and also undergoes
technical evaluations from political authorities, international financial
institutions and high judicial authorities of CEMAC region.
SOMMAIRE
INTRODUCTIONGENERALE
PREMIERE PARTIE : LE CONTENU DES MISSIONS DE LA
COBAC
CHAPITRE I- UNE MISSION INSTITUTIONNELLE
DYNAMIQUE
SECTION I- UN POUVOIR REGLEMENTAIRE SANS CESSE RENFORCE
SECTION II- UN POUVOIR ADMINISTRATIF IMPORTANT
SECTION III- LE POUVOIR DE CONTROLE ET DE MISE GARDE
RENFORCE
CHAPITRE II- UNE MISSION JURIDICTIONNELLE
INSUFFISAMMENT CODIFIEE
SECTION I - LES INTERROGATIONS SUR L'ORGANISATION DE LA
JURIDICTION
SECTION II- LES INTERROGATIONS SUR LA PROCEDURE
CONTENTIEUSE
DEUXIEME PARTIE :
LE CONTROLE DES MISSIONS ASSIGNEES A LA
COBAC
CHAPITRE I :
UN CONTROLE INSTITUTIONNEL
MULTIDIMENTIONNEL
SECTION I- LES ACTEURS DU CONTROLE DES ACTES DE LA COBAC
SECTION II- LA QUESTION DE LA PUISSANCE DE LA COBAC
CHAPITRE II - UN CONTROLE JURIDICTIONNEL
UNIQUE
SECTION I- LA CONTROVERSE A PROPOS DE LA JURIDICTION
COMPETENTE
SECTION II- LES RECOURS CONTRE LES DECISIONS DE LA COBAC
CONCLUSION GENERALE
EPIGRAPHE
« Nous devons instaurer une réforme
complète de la régulation et combler les lacunes existantes en
matière de contrôle. »
Timothy GEITHNER, Secrétaire d'Etat au
Trésor Américain,
Extrait du discours du 24 mars 2009 devant la Chambre
des Représentants
INTRODUCTION GENERALE
Depuis une vingtaine d'années, nous assistons, en
Afrique, à la régulation sectorielle des grands services publics.
Bien que cette régulation marque l'aveu d'impuissance des Etats
africains à contrôler efficacement le service public et à
permettre aux usagers d'en tirer satisfaction, elle confirme l'arrimage
à la tendance mondiale de régulation autonome et
indépendante qui traverse les grands Etats de l'Amérique du Nord
et du Sud, des pays à fort potentiel économique d'Asie et
d'Europe de l'Ouest. La régulation sectorielle permet à l'Etat
d'accomplir, par des moyens souples et performants des politiques publiques
sans avoir recours à une administration classique1(*) particulièrement
affectée par plusieurs maux : corruption, trafic d'influence,
lourdeur chronique dans le traitement des dossiers, incompétence et
démotivation, manque d'idéologie de développement.
L'un des secteurs phares de cette régulation est le
secteur bancaire qui a été ébranlée par une crise
profonde et aiguë. De 1972, année de création de la Banque
des Etats de l'Afrique Centrale, jusqu'à la décennie 1980,
l'activité bancaire était contrôlée par une
structure spéciale créée au sein du Conseil National du
Crédit de chaque pays de la CEMAC. Au Cameroun, a été mise
sur pied la Commission de Contrôle des Banques et des Etablissements
Financiers. Cette structure n'a cependant pas empêché le secteur
bancaire de connaître une crise sans précédent dont le
Cameroun n'est pas à ce jour totalement remis puisque le processus de
liquidation de certaines entreprises bancaires commencé en 1990 n'est
pas encore arrivé à son terme. Ainsi, plusieurs
établissements de crédit vont être soit
restructurés, soit liquidés. Nous assisterons non seulement
à un drame économico financier, mais aussi à une crise
sociale.
Les enjeux importants de la croissance économique, du
développement et de la crédibilité du système
bancaire, moteur indispensable de l'économie, ont
déterminé les leaders politiques, sur insistance des institutions
de Bretton Woods et sous la houlette de la France, à
réfléchir sur les mesures de vigueur, d'efficacité et
surtout de pérennité de l'activité bancaire. Pour sauver
la banque et juguler la crise économique persistante des années
1990, il fallait échapper aux anciennes techniques dirigistes,
unilatérales, centralisées et interventionnistes qui
caractérisent l'Afrique, plus précisément l'Afrique
subsaharienne. Plusieurs réformes seront entamées : les unes
à court terme pour limiter les défaillances (restructuration et
liquidation), les autres à long terme pour solidifier le système
bancaire de la sous région, dont l'une des principales est l'inventaire
et la récriture du dispositif de supervision des banques2(*).
L'inefficacité des techniques de contrôle et la
complaisance vis-à-vis des gestionnaires indélicats et
défaillants des établissements de crédit3(*) avaient largement
contribué à la crise bancaire. Les causes et les
conséquences étant pratiquement identiques d'un pays à
l'autre de la sous région Afrique centrale, les leaders vont opter pour
une institution communautaire de surveillance bancaire. La naissance de la
COBAC connaîtra deux étapes :
- Le 16 octobre 1990, les ministres chargés des
finances de la sous région Afrique centrale se réunissent
à Yaoundé pour créer la Commission Bancaire de l'Afrique
Centrale, en abrégé COBAC. La convention de la Coopération
Monétaire du 22 novembre 1972 signée à l'ère de
l'UDEAC4(*) sera
subséquemment modifiée pour intégrer la COBAC comme l'un
des organes chargés de la mise en oeuvre de la coopération
monétaire des Etats de la sous région (article 3)5(*). Les missions
générales énumérées par la convention de
1990 font de la COBAC, le gendarme de l'activité des
établissements de crédit dans la CEMAC. Les Gouvernements de
l'Afrique Centrale venaient là de réaffirmer le principe de
souveraineté partagée dont le meilleur exemple demeure l'union
monétaire. La convention du 16 octobre 1990 était la convention
institutionnelle qui devait marquer les esprits et constituer un tournant dans
le paysage monétaire et bancaire de l'Afrique Centrale. Elle fût
donc une première étape, c'est-à-dire une réforme
de structure.
- La COBAC, telle qu'instituée le 16 octobre 1990, ne
pouvait prendre ses marques parce que chaque pays membre continuait à
appliquer, voire à édicter des lois bancaires internes. En cas de
concours entre la loi interne et la loi communautaire, la première
prévalait. D'ailleurs, les ministres de finance ont reconnu que la
convention suscitée était « une étape
essentielle du processus »6(*). Il était désormais urgent pour les
leaders de la sous région Afrique Centrale d'engager d'autres
réflexions et d'organiser des concertations pour conforter et rendre
opérationnelle la première convention dans le sens de la
cohésion réglementaire de l'activité bancaire dans tous
les pays de la CEMAC. C'est ainsi qu'une autre convention comportant elle aussi
une annexe sera signée le 17 janvier 1992 à Douala. Cette
deuxième convention consacre la primauté du droit communautaire
sur la loi nationale et organise le fonctionnement des établissements de
crédit.
La COBAC est effectivement mis en place au milieu de
l'année 1992 et ses activités démarrent en 1993. Son
organisation comprend un organe de décision, la Commission Bancaire et
un organe d'exécution, le Secrétaire Général. Lors
de sa création, la question du siège du siège n'avait
été tranchée. Il faudra attendre l'acte additionnel
n°5/99-CEMAC-CEE-01 du 25 juin 1999 pour que Libreville soit
désignée comme lieu d'établissement du siège de la
COBAC.7(*) Néanmoins,
la COBAC reste à ce jour abritée aux treizième et
quatorzième étages des services centraux de la BEAC à
Yaoundé, en attendant probablement 2009 pour le transfert à
Libreville dont la construction de l'immeuble d'accueil est achevée. Le
personnel nécessaire et adéquat est fourni par la BEAC. Mais son
déploiement est de la compétence exclusive de la COBAC. Au vu du
nombre important et sans cesse croissant des établissements
assujettis8(*), cet
effectif, environ une cinquantaine d'agents, est manifestement insuffisant. Il
en est de même du budget de fonctionnement également alloué
par la BEAC mais arrêté annuellement par le collège des
commissaires9(*). Si la
réflexion sur l'autonomie financière de la COBAC aboutit, les
établissements assujettis pourraient être requis pour participer
au fonctionnement de la COBAC au moyen d'une contribution annuelle. Compte tenu
des informations très sensibles que les agents de la COBAC
reçoivent des banques et de leurs clients au cours des enquêtes,
il leur est imposé le secret professionnel. De plus, aucun membre ou
agent de la COBAC ne peut être poursuivi pour les actes commis lors de
ses fonctions.10(*) Le
secret professionnel et l'immunité ainsi consacrés sont à
la fois un devoir et une garantie pour les Etablissements de Crédit et
leur autorité de contrôle. La COBAC est à l'origine de
plusieurs actes spécifiques aux banques. Elle a le monopole des ratios
prudentiels.
La singularité de la COBAC peut être
appréciée à travers son originalité, ses
prérogatives exorbitantes de puissance publique et la plénitude
de la régulation bancaire.
L'originalité de la COBAC
Normalement, l'activité de supervision bancaire est une
mission de service public dévolue à chaque Etat. Elle
répond au souci des pouvoirs publics de conserver la maîtrise de
la création, de la crédibilité et de la circulation de la
monnaie, et au souci d'assurer la sécurité des déposants
et autres créanciers. Elle fait partie de la fonction d'encadrement de
l'épargne et même de police économique.
Avant 1990, le service public de supervision bancaire
était de la compétence de chaque Etat qui l'exerçait
à travers le Conseil National de Crédit.
Après 1990 (en réalité à partir de
1993), ce service public sera transféré à une
entité commune, la COBAC. L'activité de surveillance bancaire est
donc devenue un service public communautaire.
Contrairement aux autres entités
communautaires11(*)où le contrôle demeure exercé par
les autorités ou institutions nationales, la sous région Afrique
Centrale s'est dotée d'une institution supranationale. Il s'agit
là d'un exemple de souveraineté partagée donc le
résultat dans le domaine monétaire et bancaire est plus que
satisfaisant12(*).
On peut aussi ajouter que contrairement aux autres
organisations qui représentent, contrôlent et défendent les
intérêts de leur profession13(*), la COBAC n'est pas une émanation
professionnelle. Elle est totalement indépendante du milieu
professionnel bancaire car elle ne comprend pas en son sein de
représentant ès qualité de la profession. Les
commissaires pris individuellement ou collectivement n'ont pas vocation
à défendre ni la profession, ni les banquiers mais ils ont pour
souci de veiller à la santé du secteur bancaire et les
épargnants. La COBAC est donc une institution originale.
Le bénéfice de prérogatives
de puissance publique
La COBAC bénéficie de prérogatives de
puissance publique. La puissance publique est un terme générique
utilisé pour désigner les moyens utilisés par l'Etat pour
assurer la sécurité de son territoire, la sécurité
de ses citoyens et l'application de ses lois. C'est l'ensemble des moyens dont
dispose l'Etat pour faire prévaloir l'intérêt
général. La COBAC bénéficie de ces
prérogatives pour mener à bien sa mission. Elle a le double
pouvoir d'imposer unilatéralement des obligations aux
établissements de crédit et de recourir via l'autorité
monétaire nationale à toute forme de force légale pour les
faire exécuter. Elle dispose ainsi de larges moyens d'actions pour
arriver à ses fins. Elle peut exiger la communication de tout document,
même confidentiel, étendre ses investigations à toute
personne morale ou physique, institution publique ou privée
domiciliée à l'intérieur comme à l'extérieur
de la zone CEMAC ayant eu une relation avec l'établissement assujetti.
De plus, selon l'alinéa 2 de l'article 7 de l'annexe de
la convention de 1990, l'autorité monétaire peut arrêter
des normes plus sévères que celles édictées par la
COBAC mais sous la condition d'un avis conforme. Ceci traduit
l'indispensabilité de la COBAC dans la réglementation bancaire
car si l'avis conforme est refusé pour une norme élaborée
par l'autorité monétaire, celle-ci ne peut la mettre en
exécution. D'ailleurs, même le décret augmentant ou
réduisant le capital minimum exigé aux établissements de
crédit ne peut plus logiquement se prendre sans que le besoin ne soit
exprimé par la COBAC.
La COBAC, une véritable autorité de
régulation
La COBAC a la plénitude de la surveillance en zone
CEMAC. Elle est le gendarme de la banque. Pour emprunter à Mme CONTAMINE
REYNAUD parlant de la Commission Bancaire française, elle assure la
« magistrature morale de la profession
bancaire »14(*). Contrairement aux autres pays où la tutelle
directe des établissements de crédit est fractionnée entre
plusieurs structures techniques15(*), les autorités politiques de l'Afrique
Centrale ont entendu concentrer entre les mains de la COBAC la
quasi-totalité de la tutelle des établissements de crédit.
Cette mission globale est prévue par l'article 1 alinéa 2 de
intitulé « article 7 bis » de la convention de 1990
qui dispose clairement : « La Commission Bancaire
[COBAC] est chargée, dans les conditions fixée en Annexe, de
veiller au respect par les Etablissements de crédit des dispositions
législatives et réglementaire édictées par les
Autorités [Députés, Président de la
République ou Ministre de la Monnaie de l'Etat membre concerné],
par la Banque [BEAC] ou par elle-même [COBAC] et
qui leur sont applicables, et de sanctionner les manquements
constatés ». Ainsi, la COBAC légifère,
vérifie et châtie ; autrement dit, elle a le pouvoir de
réglementation, le pouvoir de contrôle, le pouvoir de mise en
garde et le pouvoir de sanction. C'est en cela que l'on peut dire que la COBAC
est une véritable autorité de régulation bancaire.
Pourquoi a-t-on doté la COBAC d'une si grande
compétence institutionnelle ? On peut évoquer trois
raisons :
- La situation propre des
banques
D'abord, l'aventurisme des dirigeants dans les prises de
risques inconsidérées, qui s'était traduit par
l'importance croissante du financement des projets mal ficelés et des
engagements compromis, la non maîtrise des outils d'analyse
financière, le recouvrement qui se faisait à la tête du
client avaient ruiné gravement la liquidité et la
solvabilité des banques les exposant à un effondrement certain au
moindre choc extérieur. Ensuite, la faiblesse du système de
contrôle interne. Celle-ci se manifeste par une absence de
comptabilité fiable dans certains établissements, des carences
dans les dispositifs de prise et de surveillance des risques, une organisation
administrative non performante, un personnel faiblement qualifié et
enfin un manque de dispositifs d'alerte tels que le contrôle de gestion.
C'est ainsi que la détection anticipée des futurs clients douteux
n'est pas effectuée, et d'importants suspens comptables, source de
non-valeurs et donc de pertes latentes sont purement et simplement
ignorés. Les dirigeants des banques avaient tendance à violer le
principe de l'adéquation des ressources et des emplois. Il est par
exemples des cas où les ressources à court terme
finançaient péremptoirement les emplois à long terme. Ces
banques qui souffraient des déficiences internes avaient fini par
devenir insolvables. Enfin, les banques par manque de stratégie
commerciale n'ont pas vu venir la crise et n'ont pas pu adapter en
conséquence leur politique en matière de collecte de ressources
ou d'octroi du crédit au nouvel environnement qui se
présentait.
- L'inefficacité du dispositif de
surveillance bancaire
Les faiblesses du dispositif de surveillance bancaire
constituaient également un sérieux handicap pour la survie des
systèmes bancaires de la Zone. Jusqu'en 1992, année de mise en
place de la COBAC, la supervision de nos systèmes bancaires incombait
conjointement à la BEAC pour la conduite des enquêtes sur place et
le contrôle sur pièces, et aux Commissions Nationales de
Contrôle des Banques pour la prise de décisions.
L'efficacité de ce dispositif supposait donc que les constats
dressés par la BEAC donnent lieu à des sanctions
justifiées par la gravité des anomalies et autres infractions
relevées. Mais les carences observées dans le fonctionnement des
Commissions Nationales, qui brillaient par l'absence ou la faiblesse des
actions correctives et coercitives, ont rendu inopérant le
système de supervision bicéphale mis en place.
- Le mauvais rôle de l'Etat
L'Etat occupait une position ambiguë défavorable
aux banques : Il était à la fois actionnaire majoritaire de
la plupart des banques, responsable de la nomination des dirigeants,
régulateur, créancier et débiteur du système
bancaire. Cette position « araignée »
ajoutée à un environnement de crise économique, de
corruption et de favoritisme a malheureusement déterminé l'Etat
à ne pas prendre des mesures subséquentes pour régir et
contrôler efficacement l'activité des établissements de
crédits.
Pourquoi la COBAC a-t-elle été dotée d'un
levier juridictionnel? Cette question est aussi intéressante que celle
de la création même de la COBAC. Nous esquisserons notre
réponse à travers trois points :
- Eviter les tares qui minent les juridictions
nationales
La justice de l'Afrique subsaharienne est
généralement décriée pour de multiples maux dont
elle tarde de nos jours à s'en départir. Nous pouvons
relever entre autre :
* L'absence d'indépendance des
juges
Dans les constitutions des pays de l'Afrique subsaharienne, en
particulier celles des pays de la sous région, il déclaré
que la justice est indépendante de l'exécutif ou du
législatif. Les juges, si l'on en croit le constituant, détient
le pouvoir judiciaire. Mais au quotidien, on constate plutôt une
autorité judiciaire car les juges subissent facilement des pressions,
des trafics d'influence ou la corruption. La crise économique des
années 1985 - 1995 était un facteur aggravant de complaisance des
juges. Leur statut et leur carrière dépendent entièrement
du pouvoir exécutif, toutes choses qui ne peuvent garantir leur
indépendance.
* Les lenteurs judiciaires et l'inertie
législative
Les affaires portées à la connaissance des
juridictions tardent à connaître de verdict du fait du nombre de
litiges à examiner, de l'effectif insuffisant des magistrats qui
manquent souvent de motivation, du dilatoire entretenu par les avocats.
Un autre grief est ce que nous appellerons l'inertie
législative dans la mesure où, en ce qui concerne par exemple le
Cameroun, ce n'est qu'après deux ans que la Convention du 16 octobre
1990 est entrée en vigueur. Il en est de même pour la Convention
du 17 janvier 1992 ratifiée par ordonnance près de quatre ans et
demi après sa signature16(*). Comment les juges auraient-il pu éviter la
polémique et l'embarras juridique du moment que les textes
communautaires n'avaient pas officiellement intégré l'arsenal
législatif interne ?
*L'insuffisance de connaissance de l'activité
bancaire
Pour contrôler efficacement les Etablissements de
crédit et détecter les manquements, il faut une formation
comptable et financière adaptée, une maîtrise de la
réglementation bancaire, ce que les juges nationaux n'ont par encore
reçu17(*).
Pour toutes ces raisons, on ne pouvait confier le pouvoir
disciplinaire de la profession bancaire aux juridictions nationales.
- Corriger les limites des commissions nationales
de contrôles des banques
La supervision bancaire était assurée par la
Commission de Contrôle des Banques logée au sein du Conseil
National du Crédit de chaque pays membre de la CEMAC. Cette structure
connaîtra des carences rendant sa mission presque impossible.
* D'abord l'absence de pouvoir de
sanction
La Commission de contrôle des banques ne pouvait
sanctionner les manquements constatés, elle se limitait à la
proposition des sanctions18(*). Elle n'avait aucun moyen de coercition, ne serait-ce
que provisoire.
* Ensuite la qualité homogène des
membres composant la commission
Tous les membres étaient sous influence étatique
à l'exception du représentant de l'Association Professionnelle
des Banques dont le rôle évident était de protéger
les banques et leurs dirigeants. La commission, présidée par le
ministre des finances ne pouvait être efficace car, autorité
monétaire, tuteur des banques et représentant de l'Etat
actionnaire, à la fois débiteur et créancier des banques
n'augurait pas une application stricte des textes. Les sanctions
prononcées étaient soit tardives ou soit insuffisantes.
* Enfin le statut des membres et enquêteurs
composant la commission
Le statut des membres de la commission, encore moins des
enquêteurs n'était précisé. Les membres ne
maîtrisaient ni la durée de leur mandat, ni les conditions de
révocabilité et de rémunération, leur
indépendance et leur immunité n'étaient manifestement pas
consacrées. Ces carences enlevaient toute sérénité
dans l'exécution optimale des tâches prévues.
- Tenir compte de la spécialité de
l'activité bancaire et rechercher l'efficacité du
contrôle
Si nous observons toutes les institutions
de régulation opérant dans les pays à forte
activité économique, à l'instar des pays de l'Union
Européenne, du Canada et des Etats-Unis, nous remarquerons qu'au pouvoir
de contrôle est adjoint le pouvoir de sanction. L'adéquation
contrôle-sanction vise à garantir l'efficacité et la
rapidité des actions et mesures prises par les autorités de
régulation pour corriger des fautes relevées.
L'activité bancaire est très sensible d'autant
plus que les effets de sa défaillance déteignent sur tous les
autres secteurs de la vie nationale19(*) et peuvent s'étendre à l'international.
Par exemple la crise du crédit immobilier appelée
« Crise des Subprimes » a plombé le bilan
de plusieurs grandes banques américaines, françaises,
britanniques. Il est donc nécessaire d'organiser un contrôle
particulier ainsi qu'une instance spécialisée pour la sanction
appropriée et rapide des manquements.
Bien qu'elle soit, selon l'appellation du Professeur Yvette
KALIEU, « une justice hors du juge »20(*), la COBAC n'offre pas moins
des garanties d'une justice soucieuse et respectueuse de la plupart des grands
principes applicables aux juridictions ordinaires. A lumière des raisons
avancées ci-dessus, une juridiction spécialisée au sein de
la COBAC était et est davantage aujourd'hui d'une
nécessité évidente21(*) pour veiller à la légalité des
actes de police bancaire et aider à la stabilité
économique d'ensemble.
INTERET DE L'ETUDE
La présente étude a un intérêt
certain. L'activité bancaire se déploie en amont comme en aval
des activités économiques. Elle fait l'objet d'une surveillance
et d'un contrôle étroit dans tous les systèmes politiques.
Opérant individuellement ou collectivement, la quasi-totalité des
agents économiques est régulièrement en contact avec la
banque. Ainsi, la santé économique voire politique d'un pays
dépend en grande partie des performances de son système bancaire
et financier.
La sous région de l'Afrique Centrale a
été marquée par une crise bancaire aiguë ayant
conduit soit à des restructurations soit à des liquidations. Les
défaillances ont été criardes telles que la faiblesse des
institutions mises en place et l'absence ou le retard dans la prise des
sanctions. Par la reforme du 16 octobre 1990, les politiques ont entendu doter
la COBAC tant d'un levier institutionnel que d'un levier juridictionnel dont il
est intéressant de s'attarder sur ses aspects juridiques. De plus dans
le contexte actuel marqué par la récession économique
mondiale provoquée par la crise bancaire qui s'est muée en une
crise financière pour aboutir à la crise économique, il
est opportun de s'interroger sur le niveau de
réglementation/déréglementation de l'activité
bancaire de la région.
DEFINITION DE CERTAINS CONCEPTS
Pour la présente étude, nous esquisserons la
signification des mots « missions » et « aspects
juridiques ».
La mission : du Latin
misserer, c'est-à-dire envoyer, la mission peut être
définie dans ce contexte comme un opération
spécifiée ou non par un personne à une autre. C'est aussi
une tâche qui appartient de droit à une autorité morale ou
physique et dont l'accomplissement correspond à un pouvoir, à un
devoir voire à une obligation.
L'aspect juridique : l'aspect
juridique est le regard ou la manière dont la COBAC mène ses
activités sous le prisme du droit et des règles de droit qui la
régit. Ce regard est entrepris à travers l'analyse et
l'évaluation des prérogatives.
APPROCHE METHODOLOGIQUE
La réflexion que nous souhaitons conduire porte sur
l'ensemble des compétences de la COBAC. Pour mener à bien notre
étude, nous nous servirons de la recherche explicative et descriptive.
La méthode juridique ou celle exégétique,
c'est-à-dire de l'interprétation et d'analyse des textes sera
utilisée.
Nous recourrons aux autres institutions de régulation
soeurs des pays d'Afrique, d'Europe et d'Amérique pour une
appréciation critique et constructive des missions de la COBAC.
Une analyse systématique de la jurisprudence
communautaire et internationale relative aux contentieux des institutions de
contrôle des banques sera faite pour dégager les évidences
et relever les insuffisances dans le but de la contribution jurisprudentielle
à la réalisation d'une loi de police bancaire de haute
facture.
Par ailleurs, nous adopterons premièrement l'approche
organique des institutions concernées par le processus disciplinaire et
administratif des banques, deuxièmement l'approche formelle relative au
processus de sanction et troisièmement l'approche matérielle
basée sur la qualité des auteurs et la qualité des
recours.
PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES DE
RECHERCHE
1) Problématique
Notre étude soulève une interrogation
fondamentale : compte tenu de sa particularité et de sa
spécialité, quelle est l'efficacité des missions
confiées à la COBAC ? Autrement dit le cadre juridique
défini permet-il à la COBAC de protéger de façon
efficiente les banques et les épargnants de la CEMAC ?
A cette question principale peuvent se greffer d'autres
interrogations non exhaustives :
- quelle est l'étendue des missions de la COBAC
?
- la COBAC est-elle une autorité trop puissante sans
contre poids conséquent ?
- le cadre juridique garantit -il une activité flexible
et perfectible ?
- la commission est-elle en avant-garde du processus
juridictionnel ?
- quelles perspectives pour la COBAC ?
- quel est le rôle précis des différents
acteurs qui assurent l'autorité sur les banques ?
-Y a t-il enchevêtrement de compétences entre le
Secrétariat Général, le Président de la COBAC et la
COBAC elle-même ?
- quels recours efficace contre les décisions
prises ?
-la Cour de Justice de la CEMAC peut-elle impacter le
fonctionnement de la COBAC ?
2) Hypothèses de recherche
A cet ensemble d'interrogations et particulièrement
à la question fondamentale, nous répondrons que d'une part la
fonction juridictionnelle est organisée selon un régime plus ou
moins codifié et se manifeste à travers plusieurs étapes
processuelles. La mission d'encadrement est profondément
élaborée mais nécessite une relecture permanente.
D'autre part les actes qui en sont issus peuvent être
contestés et soumis à un contrôle assuré par
plusieurs institutions supérieures, communautaires ou internationales
PLAN
Notre travail se déroulera sur deux axes de
réflexion :
D'une part il s'agira de présenter et d'analyser les
différentes obligations et prérogatives de la COBAC dans tous
leurs aspects, de l'élaboration jusqu'à la mise en oeuvre.
D'autre part, compte tenu du fait que ses activités
sont hautement sensibles et susceptibles de contestations et de risques
systémiques, il est prévu un examen à plusieurs
échelles de tous les actes de la COBAC. Ainsi, nous nous pencherons sur
les recours contre les actes de la COBAC et les instances de contrôle
appelées à connaître de ces recours.
Nous proposons d'étudier en première partie
l'exercice des missions de la COBAC ; dans une deuxième partie, il
sera question du contrôle de ces missions.
PREMIERE
PARTIE :
LE CONTENU DES MISSIONS
ASSIGNEES A LA COBAC
INTRODUCTION
La COBAC est une autorité communautaire dotée
d'un pouvoir autonome de décision dans un domaine bien
déterminé, le secteur de la banque.
La notion d'autorité ne doit, toutefois, pas être
prise exclusivement dans son sens juridique. Ce peut être une
autorité morale ou influence déterminante. Elle implique d'une
part que la COBAC ne soit pas confinée dans les seules tâches
d'étude, d'avis et de proposition ou de recommandation mais qu'elle
normalise et instruise.
D'autre part, la COBAC ne doit pas non plus se borner à
des constats, aux enquêtes ; elle aussi avoir la plénitude de
la sanction.
Ainsi, la COBAC n'a pas été créée
pour ses tâches administratives primaires, elle n'a pas non plus (ou pas
encore) la responsabilité de tout un secteur à gérer. Elle
intervient à un niveau élevé dans les activités,
mais n'est chargé que partiellement de l'exécution des
décisions prises.
Nous verrons que si la COBAC a une mission institutionnelle
très dynamique (Chapitre I), telle n'est pas le cas pour la mission
juridictionnelle qui, elle, est insuffisamment codifiée (Chapitre
II).
CHAPITRE I :
UNE MISSION
INSTITUTIONNELLE DYNAMIQUE
INTRODUCTION
La COBAC est chargée de contrôler la gestions des
établissements de crédit et de certaines activités des
prestataires de service d'investissement. C'est ce qu'il est convenu d'appeler
supervision bancaire ou contrôle prudentiel. La COBAC s'assure que les
établissements fonctionnement conformément aux normes
arrêtées, que leur situation financière est saine. Elle
dispose à cet effet d'une marge d'appréciation importante,
c'est-à-dire des missions institutionnelles dynamiques qui se
déclinent en un pouvoir réglementaire sans cesse renforcé
(Section I), un pouvoir administratif important (Secteur II) et un pouvoir de
contrôle et de mise en garde sans limites (Secteur III).
SECTION I- UN POUVOIR REGLEMENTAIRE SANS CESSE
RENFORCE
P.I- LA NATURE JURIDIQUE DES REGLEMENTS COBAC
P.II- LE REGIME JURIDIQUE DES REGLEMENTS COBAC ET
LES CLES DU DYNAMISME REGLEMENTAIRE DE LA
COBAC
SECTION II : UN POUVOIR ADMINISTRATIF
IMPORTANT
P.I- LES COMPETENCES ADMINISTRATIVES DE LA COBAC EN TEMPS
NORMAL
P.II- LES DECISES ADMINISTRATIVES PRISES EN TEMPS DE
CRISE
SECTION III- LE POUVOIR DE CONTROLE ET DE MISE EN
GARDE
RENFORCE
P.I- UN POUVOIR DE CONTROLE DE QUALITE
P.II- LES RAPPELS A L'ORDRE
CONCLUSION
En définitive, la mission institutionnelle de la COBAC
est diverse, multisectorielle, d'évidence plus large qu'on ne le croit
et surtout dynamique. Le dynamisme est la clé de la
notoriété et de la compétence de la COBAC dans un
environnement mondial où la création des produits financiers est
antérieure à la mise en place de leur cadre juridique.
Néanmoins, compte tenu du fait que les banques de la sous région
sont des intervenants actifs tant sur le marché financier camerounais
que sur celui de la communauté, il est impératif de créer
avec les autorités de contrôle de ces institutions, une plateforme
de surveillance conjointe et/ou complémentaire de l'activité de
marché des établissements de crédit. Qu'en est-il de la
mission juridictionnelle de la COBAC ?
CHAPITRE II :
UNE MISSION
JURIDICTIONNELLE INSUFFISAMMENT CODIFIEE
INTRODUCTION
La COBAC joue un rôle préventif à travers
sa mission institutionnelle, en ce qu'elle légifère, administre
contrôle et gère les difficultés. Pour qu'elle devienne une
véritable police des banques, elle est habilitée à jouer
également un rôle répressif, c'est-à-dire constater
les manquements et les sanctionner. La phase administrative se succède
donc à la phase disciplinaire. Il s'agit d'un choix
délibéré des hauts dirigeants de l'espace CEMAC de confier
à une structure supra étatique la pleine compétence sur le
milieu bancaire et financier. Lorsqu'on examine tous les textes relatifs aux
activités de la COBAC, seule la phase préventive est formellement
organisée. Or la fonction disciplinaire suppose que la COBAC prenne des
sanctions es qualité de juridiction disciplinaire. A la lecture
du Règlement Intérieur, les commissaires se réunissent en
session administrative et les travaux se conduisent comme tel. C'est pourquoi
nous nous interrogerons d'une part sur l'organisation juridictionnelle de la
COBAC (Section I) et d'autre part sur la procédure contentieuse qu'elle
est censée assurer (Section II).
SECTION I : LES INTERROGATIONS SUR L'ORGANISATION
DE
LA JURIDICTION
P.I- LES INSUFFISANCES D'ENCADREMENT
JURIDICTIONNEL
P.II- LE DOMAINE DE COMPETENCE DE LA JURIDICTION DE LA
COBAC
SECTION II- LES INTERROGATIONS SUR LA PROCEDURE
CONTENTIEUSE
P.I- LES EXIGENCES PROCEDURALES
P.II- LE DEROULEMENT DU PROCES ET LES
SANCTIONS
CONCLUSION
Le pouvoir juridictionnel de la COBAC permet à celle-ci
d'examiner et de se prononcer sur le bien fondé d'une accusation
pénale ou d'une obligation civile. C'est la raison pour laquelle la
COBAC doit offrir les garanties procédurales inhérentes au
procès équitable. Elle doit définir de nouvelles
règles de procédures les plus exhaustives et les plus
respectueuses des droits de la défense. La bonne fin de ce projet peut
encourager l'extension de ses prérogatives pénales.
CONCLUSION PARTIELLE
Au crépuscule de cette première partie, nous
pouvons dire qu'après seize années de fonctionnement effectif, la
COBAC remplit normalement ses missions institutionnelles et juridictionnelles.
Elle reste une institution en mouvement dans le domaine réglementaire,
au niveau du renforcement qualitatif et quantitatif de son équipe. Il en
va de sa survie car la pratique bancaire et financière est en
perpétuelle évolution. Elle a besoin d'un cadre juridique
permanemment adapté.
Le contrôle des actes de la COBAC participe du mouvement
permanent qui l'anime. Comment s'exerce alors ce contrôle ?
DEUXIEME
PARTIE :
LE CONTROLE DES MISSIONS
ASSIGNEES A LA COBAC
INTRODUCTION
Le rôle de la COBAC dans l'activité bancaire est
désormais indispensable. L'opinion scientifique, visiblement satisfaite,
s'accorde pour dire que « la mise en place de la Commission
Bancaire de l'Afrique Centrale a largement contribué à
l'assainissement du système bancaire dans la
sous-région ».22(*)
Cette reconnaissance était impossible sans l'oeuvre
d'un contrôle du fonctionnement, des actes qu'elle pose au quotidien,
bref de l'évaluation de l'accomplissement efficient des missions
arrêtées essentiellement par les conventions de 1990 et de
1992.
Comment procède t-on au contrôle de la
COBAC ? Qui sont les animateurs de ces contrôles ? Quels sont
le niveau et la qualité de leur influence ?
Nous répondrons à ces questions par les constats
ci-après : le contrôle institutionnel est diversifié
(Chapitre I) alors que le contrôle juridictionnel est unique (chapitre
II).
CHAPITRE I :
UN CONTROLE INSTITUTIONNEL
MULTIDIMENTIONNEL
INTRODUCTION
Les activités de la COBAC sont une partie
intégrante de la politique monétaire au côté de la
BEAC, Banque des Etats de l'Afrique Centrale. Pendant que la BEAC émet
la monnaie, surveille sa masse en circulation et sa crédibilité,
la COBAC contrôle les agents chargés de les mettre effectivement
en circulation et de les fructifier. Mais comme il ne saurait y avoir de
pouvoir sans contre pouvoir, les actes de la COBAC, dotés d'une force
juridique supra nationale, sont soumis à la clairvoyance d'institutions
bien déterminées (section I). Cette surveillance du surveillant
n'altère pourtant pas une puissance dont la problématique
mérite réflexion (section II).
SECTION I- LES ACTEURS DU CONTROLE DES ACTES DE
LA COBAC
P.I- LE CONTROLE PRINCIPAL : L'UMAC
P.II- LE CONTROLE ACCESSOIRE
SECTION II- LA QUESTION DE LA PUISSANCE DE LA
COBAC
P.I- LES ELEMENTS DE LA PUISSANCE DE LA
COBAC
P.II- LES ATTENUATIONS DE LA PUISSANCE DE LA
COBAC
CONCLUSION
L'évaluation administrative ou institutionnelle de la
COBAC est diversifiée les unes plus influentes que les autres, certaines
techniques, d'autres juridiques. Cette évaluation vient à la
fois, paradoxalement, renforcer et atténuer la puissance de
l'institution de supervision. Le contrôle juridictionnel quant à
lui est unique.
CHAPITRE II :
UN CONTROLE JURIDICTIONNEL UNIQUE
INTRODUCTION
Dans le cadre de ses prérogatives, les décisions
prises par la COBAC sont contestables. Contrairement au contrôle
institutionnel où la contestation ne peut être portée que
par des personnes précises au nombre limité sur des sujets
limités, lesquelles personnes ont rarement des intérêts
directs, le contrôle juridictionnel en revanche offre une
multiplicité de saisine et une diversité de litiges. Plusieurs
recours peuvent ainsi être intentés par plusieurs personnes
intéressées de statuts et de catégories différents.
Le contrôle juridictionnel des missions assignées
à la COBAC a connu plusieurs évolutions parsemées à
chaque étape de polémiques. Avant d'examiner les
différents recours possibles (section II), il convient de s'attarder au
préalable sur la controverse déclenchée à propos de
la juridiction compétente (Section I).
SECTION I- LA CONTROVERSE SUR LA JURICTION
COMPETENTE
P.I- A LA RECHERCHE DE LA JURIDICTION
COMPETENTE
P.II- LA JURIDICTION COMPETENTE RETROUVEE
SECTION II- LES RECOURS CONTRE LES DECISIONS DE
LA COBAC
P.I- LES RECOURS ORDINAIRES
P.II- LES RECOURS EXTRAORDINAIRES
CONCLUSION
Le contrôle juridictionnel de la COBAC est
désormais clarifié et fixé. Il est susceptible
d'être riche et dense de jurisprudences. Ceux qui l'animent se doivent
d'être à la hauteur des missions aussi nobles d'autant plus que la
COBAC sera dans les années futures le délégataire entier
et exclusif de la supervision bancaire en Afrique Centrale.
L'efficacité, le dynamisme et le pragmatisme de la Cour
de Justice doit être à la mesure de la toute puissance
annoncée de la COBAC.
CONCLUSION
GENERALE
Au terme de cette modeste étude, la COBAC
apparaît comme une institution dont la crédibilité s'est
faite à la force et à la qualité de la tâche, de la
qualité des ressources humaines, à la capacité
d'adaptation et d'adoption, à la capacité de compréhension
de l'environnement socioéconomique de la sous région Afrique
Centrale. On se rend compte que les missions assignées à la COBAC
étaient écrites et non écrites. Elle joue le rôle de
superviseur et de formateur à travers des séminaires, des
conférences et des concertations avec les assujettis.
Les pouvoirs dont disposent la COBAC sont déjà
importants et seront, selon les perspectives, encore plus importants puisque,
visiblement, les Etats membres continuent de démissionner de leur
service public de surveillance bancaire. Ceci n'est pas forcément une
mauvaise tendance car, comme on peut l'observer, le système bancaire de
la CEMAC est assaini, bien régulé et attire de plus en plus les
investisseurs des horizons plus ou moins lointains.
Parce que seul le contrôle juridictionnel peut
être le véritable contre pouvoir aux prérogatives de la
COBAC, capable d'annihiler toute volonté de dictature
réglementaire et d'égo des autorités politiques, la Cour
de Justice doit s'affirmer par sa jurisprudence, ses textes sans cesse
actualisés et ses membres choisis pour leur expérience
professionnelle et spécialisée. Est-ce le cas
actuellement ?
Par ailleurs, la COBAC peut-elle assurer son
indépendance totale si elle décide en tenant compte des
incidences sociales et des particularités de chaque Etat membre ?
* 1 MOMO (C), La
régulation économique au Cameroun
* 2 Dès 1990, plusieurs
réformes ont été engagées, ce qu'on a appelé
« les réformes monétaires de 1990 » :
- la nouvelle politique des taux d'intérêts
- le lancement du marché monétaire
- l'institution de la programmation monétaire
- la mise en place d'un nouveau dispositif de surveillance
bancaire
* 3 Il faut dire que l'Etat
était pour la plupart soit propriétaire, soit actionnaire
majoritaire des banques en activité
* 4 L'UDEAC, Union
Douanière et Economique de l'Afrique Centrale est l'ancêtre de la
CEMAC
* 5 Les autres organes sont le
Comité Monétaire et la BEAC
* 6 Préambule de la
Convention du 17 janvier 1992 sur l'Harmonisation de la réglementaire
bancaire en zone CEMAC
* 7 Ce siège est
fixé par l'article 1er alinéa 3 (révisé)
de la Convention de 1990.
* 8 A la fin de l'année
2004, la zone CEMAC comptait 52 établissements de crédit et
environ 740 établissements de microfinance, Rapport d'activité de
la COBAC 2004
* 9 Cf. Article 5, convention de
1990
* 10 Article 6, convention de
1990
* 11 C'est le cas notamment de
l'Union Européenne
* 12 Le système bancaire
de la sous région a retrouvé sa stabilité et sa
solidité, le nombre d'entreprise bancaire est croissant.
La circulation et la création du Franc CFA est
maîtrisée, la crédibilité internationale est
assurée par la France
* 13 Nous pouvons citer
à titre d'exemple le Conseil de l'Ordre des Avocats, le conseil de
l'Ordre des Pharmaciens, la Chambre des Huissiers ou des Notaires, la CIMA,
Conférence Interafricaine des Marchés de l'Assurance etc.
* 14 Citée par
LEGUEVAQUES (C), Droit des défaillances bancaires,
édition Economica 2006
* 15- En France par exemple la
tutelle directe est repartie entre de nombreuses institutions :
Le Conseil national du crédit et du titre qui intervient
dans le fonctionnement du système bancaire et financier
Le comité de la Réglementation bancaire et
financière qui définit fixe les prescriptions d'ordre
général
Le comité des établissements de crédit et
des entreprises d'investissement donne des autorisations :
agrément, retrait, fusion, modification importante du capital, prises de
contrôle etc.
La Commission bancaire chargée de la surveillance du
comportement des établissements de crédit
- Aux Etats-Unis aussi, les banques commerciales sont sous la
tutelle directe d'une autorité étatique et de trois
autorités fédérales : l'OCC Office
of the Comptroller of the Currency, la FRB
Fédéral Reserve Board et la FDIC
Fédéral Deposit Insurance Corporation
- Pour le CANADA, les principaux organismes de surveillance du
système bancaire canadien sont :
Le BSIF (« la COBAC canadienne), Bureau du
Surintendant des Institutions Financières
La ACFC, Agence de la Consommation Financière du Canada
La SADC, Société d'Assurance Dépôts
du Canada
* 16 La ratification de la
Convention du 17 janvier 1992 a eu lieu par ordonnance n° 96/02 du 24 juin
1996
* 17 La décision
controversée des juges nationaux dans l'affaire IBAC, James ONOBIONO
& autres c/ COBAC est illustrative de la méconnaissance ou des
réticences vis-à-vis des textes communautaires (décisions
des 28 septembre 1994 et 19 octobre 1994).
* 18 Article 6 (4) du
décret N° 74/ 137 du 18 février 1974 portant composition,
attribution et fonctionnement du Conseil National du Crédit, de la
Commission de Contrôle des Banques et des Etablissements financiers et de
l'association professionnelle des banques. Article 41et 42 de l'Ordonnance
N°85/002 du 31 août 1985 relative à l'exercice de
l'activité des établissements de crédit.
* 19 La crise bancaire au
Cameroun a coûté à l'Etat camerounais la bagatelle somme de
FCFA 513 Milliards, la faillite de plusieurs déposants, des milliers
d'emplois supprimés etc. ; MADJI (A), Point sur la restructuration
bancaire en Afrique Centrale,
www.beac.int
* 20 KALIEU (Y), Le
contrôle bancaire dans la zone de l'union monétaire de l'Afrique
centrale, Penant, oct-nov-dec. 2002, n°841 P. 457
* 21 Après le secteur
bancaire qui connaît un fonctionnement normal, la COBAC s'est
penchée enfin sur le secteur de la Microfinance : En 2008, les
Etablissements de Microfinance COFINEST et FIRST TRUST AND SAVINGS LOAN
opérant au Cameroun ont été mis sous administration
provisoire et leurs dirigeants démis.
* 22 Les économies de
l'Afrique de Centrale 2004, édition Maisonneuve & Larose, Commission
Economique pour l'Afrique, Bureau Afrique Centrale, Page 85