INTRODUCTION
Le ½miracle ivoirien½ est le terme employé,
durant les années soixante dix, pour caractériser les
performances de l'économie ivoirienne au regard des résultats
macroéconomiques remarquables dus aux effets de la politique d'ouverture
et à la réalisation d'investissements conséquents.
Cependant, la Côte d'Ivoire va connaître, au début des
années 80, une crise économique consécutive à
l'endettement et à la chute du cours des matières
premières. Cette crise économique va engendrer une
dégradation des conditions de vie des populations.
Face aux déséquilibres externes et internes
intervenues, les pouvoirs publics ont fait appel aux Institutions de Bretton
Woods afin de bénéficier de leurs aides, il a été
mis en place des Programmes d'Ajustement Structurel (PAS). L'application de
ces programmes va donner des résultats mitigés au niveau de
l'évolution des indicateurs socio-économiques. Au niveau social,
il a été observé une dégradation des conditions de
vie des populations. Suite aux différents constats d'échec de ces
programmes sur le bien-être des populations, des volets sociaux ont
été insérés dans de nouveaux programmes. Une fois
de plus, les résultats recherchés((*)1) n'ont pas été atteints.
Une analyse des indicateurs sociaux((*)2) montre que l'idéal
est d'avoir un Indicateur du Développement Humain (IDH) supérieur
ou égal à 0,5 et un Indicateur de Pauvreté Humaine (IPH)
inférieur à 50%. L'IDH moyen en Côte d'Ivoire, a une valeur
égale à 0,369 (1990-2001) et un IPH de 45% (PNUD, 2001). Ces
conditions ont amené la Côte d'Ivoire à participer au
sommet de COPENHAGUE((*)3)
(Mars 1995) qui a abouti à un accord selon lequel chaque Etat doit
consacrer 20% de ses dépenses au financement des Services Sociaux
Essentiels qui ont comme objectifs de réduire de moitié l'indice
de la pauvreté extrême, réduire des deux tiers, le taux de
mortalité infantile et juvénile, etc.
L'initiative en faveur des Pays Pauvre Très
Endettés (PPTE, 1996) intervenue suite à la tenue du sommet de
COPENHAGUE, a pour but l'annulation de la dette extérieure des pays
concernés en vue de consacrer les ressources dégagées aux
investissements dans les secteurs vitaux.
Le phénomène de pauvreté ne cesse de
susciter une plus grande attention. Pour preuve, nous pouvons citer la tenue du
sommet mondial sur le développement humain durable à Johannesburg
en septembre 2002 et le nouveau partenariat pour le développement
(NEPAD) dont l'objectif principal est la réduction de la pauvreté
sur le continent.
L'un des moyens les mieux indiqués dont dispose les
pouvoirs publics pour une orientation ciblée, efficace et efficiente des
ressources en vue d'éradiquer la pauvreté est la politique
budgétaire. Fort de cela, nos réflexions ont porté sur le
thème : « La politique budgétaire et
la lutte contre la pauvreté en Côte
d'Ivoire»
Il s'agit pour nous d'appréhender les emplois au niveau
de la politique budgétaire et d'identifier les dépenses qui
influent sur le bien-être des populations.
Pour y parvenir notre étude a été
segmentée en trois chapitres :
- dans un premier chapitre, nous aborderons le cadre
conceptuel et méthodologique de l'étude;
- ensuite dans un second chapitre, nous analyserons la
politique budgétaire et les tendances de la pauvreté en
Côte d'Ivoire ;
- enfin, au chapitre trois, nous ferons une analyse
économétrique de la pauvreté et de la politique
budgétaire. Les résultats nous permettront de voir les
implications et les recommandations de politiques économiques à
faire.
Chapitre 1 : CADRE
CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE
De nombreuses études ont été
effectuées sur la pauvreté, en vue de trouver les voies et moyens
pour essayer de la combattre. La plupart des études préconisent
une augmentation et surtout une réorientation des dépenses
publiques vers des domaines bien précis pour l'atteinte des objectifs de
réduction de la pauvreté.
Ce premier chapitre présente les différentes
positions adoptées sur la question dans le but de voir ce qui a
été fait afin de nous orienter et adopter une méthodologie
à suivre. Il traitera le cadre conceptuel, le problème de
recherche des objectifs et hypothèses, la revue de littérature et
l'approche méthodologique.
1.1) CADRE CONCEPTUEL
La pauvreté est un concept relatif que l'on
définit généralement par rapport au bien-être. Elle
fait référence à l'insuffisance ou à l'absence
d'une des principales dimensions du bien-être jugés importants par
la population (alimentation, habillement, logement, santé,
éducation, etc.)((*)4). Le bien-être ou le niveau de vie d'un
individu (ménage) sera appréhendé par rapport à la
consommation des biens offerts.
Trois grands indicateurs, à savoir la santé,
l'éducation et l'emploi ont été retenus pour illustrer le
cadre conceptuel de la présente étude.
Dans le domaine sanitaire, le dispositif actuel comprend
environ un total de 17 186 agents dont 1 763 cadres médicaux, 7 233
infirmiers, 1 980 sages-femmes, 597 aides-soignants, 703 techniciens, 2 331
personnels administratifs et 2 579 travailleurs occasionnels. Le ratio pour le
personnel médical est estimé à 1 pour 9 602 habitants
contre 1 infirmier pour 2 340 habitants et 1 sage-femme pour 8 455 habitants.
D'une manière générale, le personnel
médical est en nombre insuffisant, inégalement reparti et peu
motivé en raison de l'absence de mesures incitatives. On note notamment
des disparités au profit des grandes villes du pays.
Les problèmes sanitaires varient d'un milieu à
un autre et sont récurrents. L'incidence du paludisme croit à un
taux moyen de 6,8% (PNUD, 2000). La mortalité infantile et
infanto-juvenile sont respectivement de 112 et 182 pour 100 000 naissances en
1998 (PNUD, 1999). La mortalité maternelle est passée de 208
décès pour 100 000 naissances vivantes en 1995 à 231 en
1996 et à 245 en 1998. Elle s'est en moyenne aggravée de 5,6%
l'an (PNUD, janvier 2004). Le niveau élevé de la
fécondité exprimée par un ISF (Indice Synthétique
de Fécondité) est de 5,2. La morbidité et la
mortalité ont été accentuées par une
dégradation de l'état sanitaire de la population avec le retour
de maladies telles que la fièvre jaune, la fièvre typhoïde,
le choléra, la forte prévalence de 12% du VIH/SIDA (avec 600 000
orphelins). Ainsi l'espérance de vie a enregistré une baisse,
passant de 56 ans en 1988 à 51 ans en 1998.
Dans le domaine de l'éducation, et selon les
résultats du dernier Recensement Général de la Population
et de l'Habitat 1998 (RGPH 1998), le niveau d'instruction
générale est bas. En 1998, près de 53% des enfants de 6
à 11 ans sont effectivement inscrits à l'école primaire.
Le taux d'alphabétisation est encore faible avec 50%. Chez les pauvres,
ce taux est de 39% et de 55,6% chez les non pauvres.
En matière d'emploi, la situation est
préoccupante avec la crise socio-économique selon l'Enquête
sur le Niveau de Vie des populations en 1998 (ENV 1998). Le taux de
chômage pour la Côte d'Ivoire est de 4,6% avec une pointe pour
Abidjan (16,8%). L'agriculture et le secteur informel emploient près de
90% de la population active occupée. L'auto emploi rencontre
d'énormes difficultés. La situation est encore plus difficile
pour les femmes en raison de leurs niveaux d'instruction et de qualification.
La situation de l'emploi est le résultat de l'inadéquation entre
les besoins du marché et le profil des demandeurs d'emploi, mais aussi,
de la forte pression démographique par rapport à
l'étroitesse du marché.
Ces trois indicateurs succinctement évoqués nous
ont permis après d'amples investigations de dégager aussi bien la
problématique que les objectifs et hypothèses de
l'étude.
1.2) PROBLEMATIQUE, OBJECTIFS
ET HYPOTHESES DE L'ETUDE.
1.2.1) Problématique
A l'instar des pays en voie de développement, les pays
africains au sud du Sahara ont tous connu de graves et profondes crises
économiques. Partout nous avons une similarité des
caractéristiques telles que la détérioration des comptes
extérieurs, les déficits publics élevés, une
croissance économique très faible, voire souvent négative,
bref un grand nombre de déséquilibres économiques.
Ces caractéristiques suscitées s'expliquent
toutes par des conditions internes et externes défavorables. Les sources
importantes de ces déséquilibres sont les chocs
pétroliers((*)5) des
années 1970, la hausse des taux d'intérêt internationaux,
la chute des prix des produits d'exportation, la dépendance
vis-à-vis des prêts extérieurs et la mauvaise gestion des
deniers publics. Ces conditions défavorables combinées à
une instabilité politique et parfois à la guerre, ont
entraîné un effet de réaction en chaîne, des
difficultés pour les Etats à honorer certains de leurs
engagements auprès de la population (mission d'assistance sociale) et
vis-à-vis des partenaires au développement.
En vue d'améliorer ces économies, les
institutions de Bretton Woods, que sont le Fond Monétaire International
(FMI) et la Banque Mondiale (BM), ont mis en place des programmes de
stabilisation et d'ajustement structurel. Ces réformes ont eu des effets
mitigés, tant dans le domaine économique que social. Entre 1980
et 1989, plus de 240 programmes de stabilisation et d'ajustement (PAS) ont
été mis en place en Afrique.
La Côte d'Ivoire, longtemps pays phare de la
sous-région ouest africaine, n'a pas échappé à
cette mode du moment. En effet, le premier PAS du pays remonte en 1981 ;
il fait donc partie des premiers Etats à y avoir adhéré.
Le pays a tenté alors, tout au long des années 80, de
rétablir les équilibres externe et interne essentiellement par la
mise en place de réformes macroéconomiques et structurelles.
Pendant ces années, les autorités se sont
préoccupées principalement des questions de croissance et de
réformes structurelles, considérant les problèmes de
répartition des revenus et de pauvreté comme secondaires((*)3)
L'application des PAS a engendré d'énormes
distorsions sociales((*)4).
On a assisté à une dégradation des conditions de vie des
populations et une aggravation du phénomène de pauvreté.
C'est à travers le débat sur les effets de la dévaluation
et la diffusion des fruits de la croissance qu'a été mis en avant
l'analyse de la pauvreté. Il apparaît dorénavant que la
pauvreté n'est plus considérée comme étant
seulement un phénomène rural, mais de plus en plus un
problème urbain. En effet, durant les dernières années, la
progression de la pauvreté en milieu urbain a été plus
rapide que dans les campagnes. Par exemple, GROOTAERT a mis en évidence
en 1994 une multiplication par 4 de la pauvreté à Abidjan, et par
2 dans les autres villes ivoiriennes entre 1985 et 1994, alors que la
pauvreté au niveau national a seulement augmenté d'un facteur de
1,5.
Après plusieurs années d'ajustement, les
Institutions de Bretton Woods ont adopté de nouvelles stratégies
d'assistance au pays en développement axées sur la croissance et
la réduction de la pauvreté, au vu des limites et faiblesses
constatées au niveau des PAS et des effets de distorsions sur la
pauvreté, malgré l'ajout d'un volet social dénommé
Dimension Social de l'Ajustement (DAS) aux PAS dans les années 90.
Eu égard à l'acuité du problème de
la pauvreté, les autorités ivoiriennes ont adopté un
programme de réduction de la pauvreté traduit par le Document
Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DSRP)
généré par le cadre de l'initiative PPTE, dont la
Côte d'Ivoire est le cinquième pays admis à en
bénéficier. L'initiative PPTE donne lieu à une action
coordonnée de la communauté internationale, y compris les
institutions multilatérales, en vue de ramener à un niveau
soutenable le fardeau de la dette extérieure des pays pauvres lourdement
endettés qui poursuivent des programmes de réforme et
d'ajustement appuyés par le FMI et la Banque Mondiale, mais pour
lesquels les mécanismes d'allègement de la dette habituels ne
suffisent pas. Ayant un objectif de réduction de la pauvreté de
33,6% à 30% en 2005, il est à se demander comment est ce que le
gouvernement ivoirien compte financer sa lutte contre la pauvreté ?
Surtout avec l'arrêt des aides extérieures. La seule alternative
du gouvernement reste sa politique budgétaire à travers ses
dépenses publiques. Mais est ce que les dépenses publiques, dans
leur établissement, et dans le cadre de cette lutte sont-elles
adaptées ?
Depuis l'application de son programme de lutte contre la
pauvreté, la Côte d'Ivoire a initié d'importants projets
(Assurance Mutuelle Universelle, l'école gratuite pour tous, la
libéralisation du secteur café-cacao) qui visent à
améliorer les conditions de vie des populations, à donner une
chance à tous d'être instruits et de redistribuer à la
classe paysanne la richesse qu'elle crée. Tous ces
programmes nécessitent d'énormes crédits
budgétaires pour leur réalisation. Les dépenses sont donc
le point d'appui du gouvernement pour juguler la pauvreté. Il faut se
demander dans quelle mesure les dépenses effectuées
permettent-elles de lutter contre la pauvreté.
De façon générale, il s'agira d'analyser
la politique budgétaire de l'Etat au cours des quatorze dernières
années et voir son influence sur les principales mesures
d'éradication progressive de la pauvreté. La véritable
question est de savoir: « quel est l'impact de la politique
budgétaire sur les conditions de vie des populations
ivoiriennes? »
L'examen de l'impact de chaque compartiment du budget sur les
secteurs sociaux (nutrition, revenu, alphabétisation, scolarisation,
santé, etc.) et les propositions de mesures pour l'amélioration
de cette politique économique comme instrument de lutte contre la
pauvreté, sont les motivations de cette étude.
1.2.2) Objectifs et
hypothèses de l'étude
L'objectif général de l'étude est
d'apprécier l'impact de la politique budgétaire sur la
pauvreté. De façon spécifique, il s'agit :
· d'analyser la tendance observée de la politique
budgétaire dans ses différents compartiments ;
· d'appréhender la contribution de la politique
budgétaire sur le niveau de vie des populations ;
· de dégager des propositions concrètes
pour accroître l'efficacité et l'efficience de la politique
budgétaire en matière de lutte contre la pauvreté.
Trois hypothèses fondent ces objectifs. Ces
hypothèses se formulent comme suit :
- H1 : le budget de l'Etat est un
instrument efficace d'action des pouvoirs publics pour le développement
socio-économique ;
- H2 : la hausse des dépenses
publiques dans le domaine social s'accompagne d'une baisse de la
pauvreté ;
- H3 : la politique budgétaire
doit prendre un caractère dynamique et nécessiter des
réformes pour une prise en compte des besoins des populations à
long et moyen terme.
1.3) REVUE DE LITTERATURE ET
METHOLOGIE
1.3.1) Une revue de
littérature
La lutte contre la pauvreté est l'une des
préoccupations des économistes. Depuis l'application des
Programmes d'Ajustement structurel (PAS) et leurs échecs, lutter contre
la pauvreté est devenu la priorité pour les Institutions de
Bretton Woods. Cette revue de littérature s'attachera à
présenter les concepts de la politique budgétaire et son
rôle dans la réduction de la pauvreté, ensuite montrer la
pauvreté sous toutes ses formes, et les stratégies pour la
combattre.
La politique budgétaire constitue avec la politique
monétaire, les principaux leviers de la politique économique. La
politique budgétaire consiste à utiliser certains instruments
tels que les dépenses publiques, l'endettement public et les
prélèvements fiscaux pour influer sur la conjoncture
économique. Elle s'appuie sur l'élaboration du budget de l'Etat
qui n'est autre que la prévision de l'ensemble des recettes et
dépenses de l'Etat pour l'année. De cette présentation
succincte de la politique budgétaire, il ressort deux notions
principales et importantes, que sont les recettes et les dépenses
publiques. La règle veut que les recettes et les dépenses
s'égalisent afin que le budget soit équilibré, un
excédent ou un déficit selon les courants de pensée est
applaudi ou décrié. Ces différentes conceptions ont
donné naissance à une politique budgétaire qui utilise le
solde budgétaire comme un instrument de politique économique en
ce sens qu'il donne un reflet de l'activité économique. Ces
différentes conceptions ont donné quatre approches de la
politique budgétaire :
- le budget cyclique (G. MYRDAL) : le solde
budgétaire déficitaire est souhaité s'il est
étalé sur plusieurs années afin que les années
excédentaires comblent les années déficitaires ;
- le budget compensatoire (A. LERNER) : le budget doit
compenser un écart (permanent), entre l'épargne et
l'investissement d'une insuffisance chronique de l'investissement
privé ;
- la politique budgétaire anticyclique utilise le
rôle régulateur du budget et se repose sur le jeu des
stabilisateurs automatiques publics en vue d'agir sur l'activité
économique. Cette politique tend à se transformer en une
politique conjoncturelle discrétionnaire ;
- l'approche Keynésienne attribue un rôle au
budget. Le solde budgétaire doit servir à la politique
économique et selon les orientations politiques du moment, le budget
doit relancer l'économie (budget en déficit) et budget
d'austérité pour freiner l'activité économique.
Jusqu'à la crise de 1930, la gestion des finances
publiques a eu pour principal objectif d'assurer le financement des services
publics. Le volume des dépenses de l'Etat n'était
considéré comme une variable susceptible d'influencer le niveau
d'activité de l'économie. L'analyse de l'économiste
britannique J. M. KEYNES a modifié cette conception soulignant l'impact
de la politique budgétaire sur le niveau d'activité
économique d'un pays.
Les recettes publiques proviennent de la politique fiscale. La
fonction de la fiscalité est d'assurer le financement de la production
des services traditionnels. Elle sert également à la
redistribution du revenu. Elle est utilisée pour réduire les
disparités sociales grâce au recours à la
progressivité des taux d'imposition, à divers abattements et
déductions pour les charges personnelles et familiales. Ainsi, l'Etat
doit utiliser son pouvoir de taxation, de dépense et d'endettement pour
réaliser une allocation des ressources.
Les recettes publiques financent les dépenses de
l'Etat, qui sont les dépenses du secteur public engagées en vue
d'un intérêt public. Les dépenses publiques sont les
dépenses effectuées par l'Etat pour son fonctionnement et celles
orientées vers les secteurs prioritaires (sociaux,
sécurité) pour l'amélioration du bien-être des
populations.
De JANVRY et al. (1991), D et L. DEMERY (1992), LIPTON et
RAVALTON (1993) et AHO et al. (1997) ont tous montré l'impact social des
dépenses publiques. Ils ont montré que les dépenses
publiques permettent d'accroître la productivité et les profits
des facteurs et par conséquent d'augmenter les revenus des
ménages. Il ne faut surtout pas omettre de préciser que la
dépense publique dépend de la politique budgétaire. Le
budget devient donc un instrument d'exécution de la politique
gouvernementale, principalement dans le domaine économique et social,
car l'Etat par l'intermédiaire de son budget essaie de réduire
l'inégalité de richesse, mais aussi de régulariser la
croissance économique. La liaison ainsi ressortie permet de voir que la
politique budgétaire a son rôle dans la lutte contre la
pauvreté. Les dépenses publiques jouent un rôle majeur dans
la lutte contre la pauvreté. Les effets de la politique
budgétaire peuvent être appréhendés à travers
ce schéma ci-dessous.
Schéma 1 : Effets de la politique
budgétaire sur les ménages
Politique budgétaire
Niveau
Macroéconomique
Infrastructure économique
Dépenses sociales
Marché des biens et services
Niveau
Mésoéconomique
Marché des facteurs
Capital humain
Revenu des ménages
Niveau
microéconomique
Consommation
Accumulation des actifs produits
Source : D. et L. DEMERY (1992) et AHO et al.
(1997)
En effet, ces dépenses publiques sont, avant tout,
insérées dans une politique budgétaire qui a des effets
sur les conditions de vie des ménages, lesquelles conditions de vie
déterminent la catégorie sociale des ménages et les
classent pour la grande majorité chez les pauvres.
Complexe dans ses déterminants et dans sa mesure, la
pauvreté revêt de multiples facettes (économique,
politique, sociale, culturelle, etc.) d'où les difficultés d'une
définition standard satisfaisante. La pauvreté humaine recouvre
l'idée d'insuffisance ou de manque bien plus divers que l'insuffisance
de revenu.
La pauvreté se définit comme étant une
insuffisance de ressources, matérielles ou immatérielles,
nécessaires à la satisfaction des besoins essentiels d'un
ménage ou d'individu. La plus connue est la pauvreté
monétaire qui est l'absence ou l'insuffisance de revenu monétaire
ou de moyens de communication. Il en découle donc deux notions :
pauvreté absolue et pauvreté relative.
La pauvreté absolue renvoie à un seuil de
pauvreté exprimé en valeur absolue et correspond à la
non-satisfaction des besoins minimaux, alors qu'on parle de pauvreté
relative pour des personnes qui sont bien loties que la majorité des
autres membres de la même communauté. Par rapport au revenu, une
personne se trouve dans la pauvreté absolue si son revenu est en
deçà d'un seuil défini, mais elle est relativement pauvre
si elle appartient à un groupe à faible revenu (AHOYO Adjovi,
2002). Un ménage ou un individu est frappé d'ultra
pauvreté lorsqu'il consacre plus de 80% de ses revenus à l'achat
de produits alimentaires pour sa consommation (PNUD, 1997).
D'un point de vue économique, la pauvreté se
traduit par une faible dotation en capital physique, humain et financier,
l'exclusion d'une frange importante des forces de travail de la nation, une
productivité du travail réduite, une déperdition des
capacités de production. L'inégalité ou l'absence
d'accès aux connaissances technologiques nécessaires à
l'utilisation de ce capital du choix individuel des gens, quant à
l'allocation du temps entre le travail et le loisir, entre la consommation et
l'épargne et enfin l'inégalité des chances de s'en sortir
(Z. MAÏGA, 1999).
Le combat de la pauvreté s'est engagé depuis
longtemps avec d'illustres économistes et des institutions
internationales. Des plans et stratégies de lutte ont été
créés, certains des points convergent tandis d'autres se
contredisent.
Selon R. MALTHUS, secourir les pauvres, c'est multiplier la
pauvreté. En effet, pour lui, la réduction de la pauvreté
est difficile puisque les hommes augmentent de façon
géométrique tandis que la progression des ressources suit un
rythme arithmétique. Par conséquent, les lois sur les pauvres et
l'assistance sont condamnées à un échec car elles
favorisent la multiplication des plus pauvres. Il reconnaîtra plus tard
que le progrès technique s'accompagne de revenus élevés.
Sa stratégie de lutte est la limitation des naissances. Toutefois, il
défend l'idée de l'école gratuite et obligatoire car
les lumières apportées au peuple sont la meilleure façon
de lutter contre la pauvreté.
A. SMITH a fait une importante contribution en expliquant la
relation entre croissance et la pauvreté. Il prétend que celle-ci
pourrait se résorber en adoptant des politiques appropriées et
en favorisant la croissance économique. Il pense que l'économie
moderne a besoin de division de travail, mais qu'elle risque de diminuer les
opportunités d'emploi des travailleurs pauvres et d'aggraver la
pauvreté. Pour éviter cela, il a suggéré à
l'Etat de fournir des moyens permettant d'adapter la main d'oeuvre au
marché du travail (AHO et Al, 1997).
D. RICARDO a pour sa part soutenu que le progrès
technique s'accompagne de salaires élevés et d'un
déplacement de la main d'oeuvre de l'agriculture vers d'autres secteurs
de l'économie, permettant de ce fait l'amélioration des
conditions de vie des populations pauvres.
Pour SAMUELSON, les politiques de lutte contre la
pauvreté s'articulent autour de deux points : l'Etat providence
(pour assurer un niveau de vie minimum) et les programmes de garantie des
revenus.
La plupart des débats sur la lutte contre la
pauvreté mettaient l'accent sur le capital humain. SMITH
considérait que de meilleurs soins permettent d'élever et la
capacité de travail et le niveau des salaires qui améliorait la
condition de vies des travailleurs. Les classiques préconisent des
subventions à l'éducation de base qui permettent une meilleure
formation et qui font croître la productivité et les initiatives
privées.
A partir des années 40, les stratégies de lutte
contre la pauvreté ont pris une nouvelle tournure tout en ayant des
similarités avec les anciennes. Ces politiques
préconisaient nécessaire de faire jouer à l'Etat un
rôle dans la redistribution des richesses entre les agents
économiques. Cette fonction de l'Etat s'est traduite par l'apparition du
concept d'Etat-providence.
Dans les années 60, les actions de lutte contre la
pauvreté portaient entre autres sur les réformes
financières, l'éducation de masse, l'amélioration des
soins de santé. A cette époque, on accordait peu d'attention
à la croissance agricole comme moyen de lutte contre la pauvreté.
Jusqu'au milieu des années 70, les objectifs des programmes de lutte
contre la pauvreté tournaient autour du concept de redistribution des
richesses.
A NAÏROBI en 1973, il a été demandé
de revoir les priorités en matière d'aide au
développement. L'aide au développement doit maintenant se tourner
vers les projets de développement rural pour aider les plus
démunis. Ces interventions doivent cibler l'éducation, la
santé, etc.
Cette orientation stratégique opérée par
les Institutions de Bretton Woods est le fruit d'une réflexion en
profondeur dont l'origine tient à l'aggravation de la pauvreté
dans de nombreux pays en développement dans un contexte marqué
par l'échec des Programme d'Ajustement Structurel remettant en cause la
légitimité de ces institutions. Face aux critiques, un saut
qualitatif a été fait pour mieux lutter contre la
pauvreté. De cette réorientation découle deux courants de
pensée qui ont leurs forces et faiblesses.
La première de ces approches est celle de la Banque
Mondiale, qui est l'approche de la croissance du revenu. Cette approche
suggère de se concentrer sur l'augmentation des revenus et de laisser
les individus choisir librement l'allocation optimale des ressources selon
leurs préférences. Elle est fondée sur le
développement humain (DH), la promotion de la croissance et la mise en
place de filets de sécurité. L'investissement et le filet de
sécurité sont au centre de la lutte car ils permettent
d'atténuer les conséquences les plus graves de la
pauvreté. La croissance est la clé de voûte d'une politique
de lutte contre la pauvreté. La croissance passe par l'accès des
pauvres aux facteurs de production à des conditions simples,
l'accroissement des facteurs de l'agriculture et du secteur informel. La limite
de cette approche est que l'augmentation du revenu des ménages ne se
traduit pas nécessairement par une amélioration des conditions
de vie et par un meilleur accès aux services de base.
La seconde approche, est celle du PNUD, qui est une approche
en terme de besoins essentiels qui privilégient la fourniture des
services sociaux de base. Elle se fonde sur le développement humain qui
est un processus qui conduit à élargir la gamme des
possibilités d'épanouissement qui s'offrent à chacun dans
la société. Trois possibilités revêtent une
importance capitale pour la réalisation de nombreuses autres, à
savoir : vivre longtemps et en bonne santé, acquérir un
savoir et avoir accès aux services nécessaires pour jouir d'un
niveau de vie convenable. L'indicateur du développement humain qui est
l'Indice du Développement Humain (IDH), est meilleur que les autres
indicateurs. Mais, il n'en demeure pas moins qu'il reste déficient et
imparfait puisqu'il ne capte pas la réalité et il ne prend pas en
compte certains éléments d'appréciation tels que le niveau
de démocratisation, la bonne gouvernance, etc. Cette approche a le
mérite de promouvoir l'accès des populations aux services sociaux
de base, mais ne tient pas compte des préférences de celles-ci.
Elle est aussi coûteuse à mettre en place.
Les deux approches précédemment abordées
(celles des Institutions de Bretton Woods) seront celles sur lesquelles notre
étude s'appuiera, les autres analyses développées plus
haut viendront en soutien à notre étude.
1.3.2) L'approche
Méthodologique.
Un certain nombre d'études empiriques ont
été réalisées sur la pauvreté. Celles-ci ont
permis de déterminer le seuil et les indicateurs de la pauvreté,
de classer les ménages en groupes homogènes et de
déterminer la contribution de chaque groupe à la pauvreté
globale (Z. MAÏGA, 1999).
La santé, l'éducation et les infrastructures
sont les principaux facteurs explicatifs de la pauvreté d'après
les études économétriques sur la pauvreté.
L'étude présente cherchera à prouver, de manière
indirecte, si les dépenses publiques totales qui permettent
l'amélioration de la qualité de la santé, de
l'éducation et des infrastructures de base ont réellement permis
de réduire la pauvreté.
Pour atteindre l'objectif cité plus haut, les
dépenses publiques seront subdivisées en plusieurs
catégories. Ainsi, il sera déterminé l'impact des
dépenses (dépenses de fonctionnement et d'investissement)
d'éducation, de santé et d'infrastructures sur la croissance
économique. Ensuite, l'influence de la croissance économique sur
le bien-être des ménages. Nous chercherons également
à voir si les dépenses publiques, en particulier sociales,
influencent la croissance économique, le revenu par tête et par
conséquent la consommation des ménages. Le choix des variables
endogènes s'explique par l'impact direct qu'ils ont sur le mode et le
niveau de vie des populations. Pour notre part, les dépenses publiques,
surtout sociales, améliorent les conditions d'existence des
populations.
L'approche de KOYCK inspirera nos travaux pour
apprécier l'impact des dépenses publiques sur la croissance et
certains indicateurs de bien-être. Le modèle utilise les
indicateurs socio- économiques listés par nous, à savoir
le PIB, le PIB/tête, la consommation des ménages et l'IDH, comme
variables endogènes, les dépenses de fonctionnement et de
l'investissement en dépenses de santé, d'éducation et
d'infrastructure comme variables exogènes. Cette décomposition a
été faite pour isoler la participation de chaque secteur social
à la croissance.
Notre modèle général se présentera
sous la forme :
Yt=á+âxt+öYt-1
où
Yt représente le
niveau attendu de la variable expliquée
xt représente le
niveau de la variable explicative
Yt-1 représente la
variable expliquée retardée
á est une constante du
modèle
â est l'
élasticité de court terme de la variable explicative
ö est le coefficient de la
variable expliquée retardée
â /(1-ö) est
l'élasticité de long terme de la variable explicative.
La représentation des variables sera la
suivante :
Pour les variables expliquées ;
PIB= le PIB
PIBT= le PIB par tête
CONS= la consommation des ménages
IDH= Indicateur de Développement Humain
Pour les variables explicatives ;
DSOC= dépenses sociales
DSOCF= dépenses sociales de fonctionnement
DSOCI= dépenses sociales d'investissement
DECU= dépenses d'éducation
DSANT= dépenses de santé
DINFRA=dépenses d'infrastructures
De manière spécifique, les modèles de
base nous donnerons les modèles suivants :
LPIB= á+ â
xt+LPIBt-1, pour déterminer la
contribution des variables explicatives sur le PIB
LPIBTt= á+ â
xt+LPIBTt-, pour déterminer la
contribution des variables explicatives sur le PIBT
LCONSt= á+ â
xt+LCONSt-1, pour déterminer la
contribution des variables explicatives sur la consommation des
ménages
LIDHt= á+ â
xt+LIDHt-1, pour déterminer la
contribution des variables explicatives sur l'IDH
Tous ces modèles seront estimés par la
méthode des moindres carrés ordinaires. Pour une description
poussée du modèle de KOYCK se référer à
l'annexe.
Chapitre 2 : TENDANCE DE
LA PAUVRETE ET DE LA POLITIQUE
BUDGETAIRE EN CÔTE D'IVOIRE.
La politique budgétaire est un important instrument de
régulation de l'économie, laissée à la guise des
Etats membres (selon les critères de convergence) de l'Union Economique
Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Elle permet de réguler
l'activité économique, entre autres, de cibler les secteurs
sociaux essentiels afin de réduire le niveau de
pauvreté. La redistribution des richesses
créées par la nation est aussi l'une de ses fonctions. Il nous
revient de faire l'étude de la tendance de la pauvreté dans une
première section et de donner la structure et l'évolution de la
politique budgétaire dans une seconde section.
2.1) TENDANCE DE LA PAUVRETE EN COTE D'IVOIRE
L'objet de cette partie est d'étudier
l'évolution de la pauvreté en Côte d'Ivoire depuis les
années 1980. Plusieurs dimensions de la pauvreté seront
appréhendées de manière à sortir les
déterminants des différentes formes de pauvreté. L'analyse
des tendances observées de la pauvreté sera la
préoccupation première de cette deuxième partie. Ensuite
une revue des différents programmes politiques et gouvernementaux pour
contenir la pauvreté et ses effets sera faite.
2.1.1) Analyse des tendances
observées de la pauvreté
Le concept de pauvreté est large et complexe. Ce
paragraphe définira la pauvreté et donnera les causes et les
manifestations de la pauvreté en Côte d'Ivoire. Il permettra de
découvrir les principaux indicateurs de mesures et déterminants
de la pauvreté, ainsi que l'évolution du ratio de la
pauvreté.
1) définition, causes et manifestations de la
pauvreté
a) Définition de la
pauvreté
La pauvreté revêt trois aspects :
monétaires ou financiers, accessibilité et psychosociologique. La
pauvreté peut être également perçue comme un
sentiment d'insécurité, de précarité, d'exclusion,
de vulnérabilité et d'impuissance, tout comme aussi de
mentalité.
Au plan monétaire et financier, la pauvreté est
l'état d'une personne ou d'une collectivité qui ne dispose pas de
ressources suffisantes pour satisfaire ses besoins primaires et vitaux
Au niveau de l'accessibilité, la pauvreté est
une incapacité ou un manque d'accès de l'individu aux biens et
services sociaux de base.
Au niveau psychosociologique, la pauvreté est un
état d'esprit, un sentiment d'exclusion, de frustration par rapport
à la famille, au clan et à la communauté
Au niveau de la mentalité, la pauvreté est un
état de comportement de l'individu qui a du mal à voir l'autre
progresser ou prospérer et, du coup, a tendance à le
rétrograder.
b) Causes de la pauvreté
A travers les différentes enquêtes menées
de 1985 à 1998 (LSMS 85, EP 92/93, ENV 98) et les études pour la
rédaction du DSRP, il ressort que les causes et déterminants de
la pauvreté en Côte d'Ivoire sont multiples et de plusieurs
ordres : économiques, démographiques, culturels et
sociaux.
c) Manifestations de la pauvreté
· Sur le plan
économique
Elles se manifestent à travers des politiques publiques
inadaptées, des difficultés financières de l'Etat,
l'inefficacité de la dépense publique, l'accumulation
d'arriérés intérieurs, la faiblesse de recouvrement de
l'administration.
En milieu rural, la baisse de l'encadrement, de la
distribution des intrants agricoles (semences, engrais ainsi qu'un
relâchement des investissements sociaux ont ainsi provoqué une
chute de la productivité agricole et une paupérisation dans le
milieu rural. La dégradation des infrastructures de base a
accentué l'enclavement des régions et les disparités
locales ont augmenté les coûts d'accès aux services sociaux
de base. En matière de crédit, la politique reste
inadaptée aux besoins de l'économie.
Les difficultés d'accès aux terres, la
destruction du capital forestier, le vieillissement de la population agricole,
l'exode rural, l'insuffisance de l'organisation du monde paysan, sont des
facteurs qui entravent le développement de l'agriculture. A cela,
s'ajoutent les causes naturelles, telles que les inondations, la
sécheresse, l'érosion des berges, les perturbations climatiques,
etc.
La chute drastique des cours mondiaux des produits de rente et
la détérioration des termes de l'échange érodent
les gains de devises et donc de ressources que pourraient procurer le volume
des exportations.
Le niveau d'investissements qui n'excède pas 15% du
PIB ne permet pas une croissance forte et durable, capable de créer
suffisamment de richesses et de réduire sensiblement la pauvreté.
La diminution de l'Aide Publique au Développement
(0,22% du PNB contre 0,7% d'objectif), l'insuffisance des investissements
directs étrangers vers l'Afrique et le problème d'accès
des produits africains aux marchés mondiaux face aux subventions
agricoles des pays du nord.
La faible capacité technologique des industries locales
à transformer les matières premières en produits
semi-finis ou finis font également partie des causes de la
pauvreté.
· Sur le plan
institutionnel
Les difficultés d'accès aux institutions
juridiques pour les populations sont un frein. Le manque de transparence dans
l'appareil judiciaire et dans la gestion de la chose publique donc la mauvaise
gouvernance qui est un facteur limitant
· Sur le plan démographique et
socioculturel
Le fort taux de croissance démographique (3,3%)
généralement supérieur au taux de croissance
économique est une cause très importante. A cela, s'ajoute la non
maîtrise des mouvements migratoires de la population qui crée une
forte pression sur les infrastructures de base. Un condensé de ces
causes, ajouté au poids de la famille élargie, la pression
communautaire, le taux élevé de dépendance, les
traditions défavorables à la scolarisation des filles,
l'exclusion des femmes dans les droits de succession, la superstition, les
dépenses ostentatoires, constituent un frein à
l'épanouissement individuel et communautaire. La dégradation des
moeurs, la dislocation du tissu social et familial et le
phénomène des enfants de la rue ou dans la rue sont des
éléments aggravant la pauvreté sociale. Ces
conséquences dramatiques sont également les causes manifestes de
la pauvreté.
Quant aux manifestations de la pauvreté, elles se
résument à ce qui suit :
- faim, dénutrition et insécurité
alimentaire ;
- manque de moyens financiers dans la tenue du foyer ;
- oisiveté et exploitation ;
- banditisme et enfants de la rue ou dans la rue ;
- manque de soins de santé ;
- absence d'entraide communautaire ;
- absence de marché dans un périmètre
restreint pour les échanges ;
- analphabétisme ;
- déscolarisation ;
- habitation précaire et environnement
malsain ;
- manque de tenue vestimentaire décente ;
- dénuement de biens matériels ;
- inaccessibilité au crédit ;
- inaccessibilité à l'eau potable et à
l'électricité ;
- absence de latrines et de dépotoirs pour les
ordures ;
- etc.
Les manifestations de la pauvreté, qui suivent, sont
dues à la guerre qui a fait de nombreux ravages. Cette situation de ni
paix ni guerre est encore plus pernicieuse puisqu'elle donne de la profondeur
à la pauvreté. Elles se manifestent par :
- un début de famine (absence des paysans des zones
rurales du fait de la guerre) ;
- un élargissement de la prostitution à des
tranches de femmes jusque là épargnées ;
- une augmentation du taux de prévalence du
VIH/SIDA ;
- une insécurité totale des biens et des
personnes.
Cet ensemble ne peut être apprécié
qu'à travers des indicateurs et des déterminants.
2) Principaux indicateurs de mesure et
déterminants de la pauvreté
Les indicateurs de mesure de la pauvreté sont nombreux.
Une présentation exhaustive des indicateurs pertinents dans un premier
temps sera vue et dans un deuxième temps les déterminants de la
pauvreté seront donnés.
a) Principaux indicateurs de mesure de la
pauvreté
Les Indicateurs de mesures les plus usités
sont :
- les indicateurs FGT (Foster J.,
Greer J., Thorbecke E., 1994) de
pauvreté, indices de pauvreté Px ;
- le coefficient de contribution d'une région à
la pauvreté nationale ;
- l'Indicateur de Développement Humain (IDH) ;
- le taux de croissance économique ;
- l'Indicateur de Pauvreté Humaine (IPH), et
particulièrement l'IPH-1 pour les pays en voie de
développement ;
- le niveau et les sources de revenu des
ménages ;
- le niveau et la structure des dépenses de
consommation des ménages.
Le mode de calcul et la formulation de certains de ces
indicateurs sont spécifiés en annexes.
Une analyse de la pauvreté, à partir des
indicateurs cités plus haut, donne : les appréciations qui
vont suivre.
· Le Seuil de
pauvreté
L'évaluation de la pauvreté s'est fait à
partir d'un seuil de pauvreté relatif déterminé par la
distribution des dépenses en fonction d'une proportion arbitraire et
présélectionnée de la population concernée (PNUD,
INS, 2000). Le seuil de pauvreté utilisé évolue
après chaque nouvelle enquête. Ainsi ce seuil passe
successivement, du seuil de pauvreté relatif de 75 000 FCFA en 1986
à 101 340 FCFA en 1993, à 144 800 FCFA en 1995 et à 162
800 FCFA. Un seuil d'extrême pauvreté de 63 375, 86 760 et 95 700
FCFA respectivement pour chacune des périodes.
· L'Ampleur et étendue de la
pauvreté chez les extrêmes pauvres
L'intérêt du seuil d'extrême
pauvreté est qu'il permet de rendre compte des conditions d'existence
particulièrement difficiles de cette catégorie de la population
(10%) ayant de faibles revenus. Leur revenu annuel par tête,
inférieur au seuil de pauvreté de plus de 40%, ne permet pas une
prise en compte correcte de leurs besoins fondamentaux (alimentation, logement,
éducation des enfants, santé, etc.).
Les ménages d'extrêmes pauvres ont un revenu
annuel par tête de 68 204 FCFA en 1995 et de 75 842 FCFA en 1998,
traduisant un niveau de revenu plus élevé chez l'extrême
pauvre.
En milieu rural, l'étendue de la pauvreté montre
une aggravation tendancielle de la situation des extrêmes pauvres. Elle
se présente comme suit : 21% en 1993, 22% en 1995 et 23% en 1998.
En effet, le seuil de pauvreté est déjà trop bas et se
situe autour de 60% du seuil national. Cette proportion signifie que pour
atteindre le seuil de pauvreté, son revenu doit connaître un
accroissement supérieur ou égal à 40% de son revenu pour
passer à la catégorie de pauvre (cf. tableau en annexe 2).
Quant à leur consommation, elle se présente
selon la structure suivante : le ménage extrêmement pauvre
consacre, en moyenne, plus de 90% de son revenu annuel par tête à
la satisfaction des besoins essentiels. Cette structure est
caractérisée par la part qu'occupent les dépenses
alimentaires dans les dépenses totales (plus de 50%). En 1998, on a
noté les taux respectifs de 54,3% et 58,5% de part de dépenses
alimentaires dans les dépenses totales, pour les ménages urbains
et les ménages ruraux.
La dépense d'éducation des enfants s'est accrue
dans le temps et son poids par rapport à la dépense totale est de
1,0%, 2,5% et 3,5% pour les années 1993, 1995 et 1998, au plan national.
Comparativement à la dépense d'éducation, la part des
dépenses de santé est un peu plus élevée avec 6,2%
en milieu urbain (les tendances de la pauvreté en milieu urbain restent
fragiles), 4,2% en zone rurale 1995 et 4,7% sur le territoire national en
1998.
· L'Ampleur et l'étendue de la
pauvreté chez les ménages pauvres
Le ménage pauvre est celui qui a un revenu annuel par
tête inférieur à 162 800 FCFA. Cet ensemble correspond
à 32,3% de la population totale en 1993, 36,8% en 1995 et 33,6% en
1998.
Le revenu annuel moyen par tête du ménage est
approché à partir des indices de pauvreté Px
(Indicateurs FGT, avec x=1, 2, 3), prenant en compte le paramètre
x d'aversion pour la pauvreté. Ainsi, lorsque :
- á= 0 il s'agit du ratio de pauvreté ou le
nombre de pauvres sur la taille de la population totale ;
- á= 1 il s'agit de l'intensité de la
pauvreté. C'est l'écart moyen par rapport au seuil. P1 mesure le
pourcentage moyen du seuil qu'il faut distribuer aux pauvres pour annuler la
pauvreté ;
- á= 2 il s'agit de la sévérité de
la pauvreté. C'est la moyenne du carré de l'écart moyen
par rapport au seuil. C'est une sorte de mesure de pauvreté qui attribue
plus de poids aux plus pauvres des pauvres.
Le constat de la pauvreté chez les ménages
pauvres est que les conditions de dépenses et de consommation sont plus
difficiles en 1993, qu'en 1995 et 1998 (cf. tableau en annexe 2). En effet, le
revenu annuel du citadin pauvre demeure plus éloigné de la ligne
de pauvreté.
L'étendue de la pauvreté est égale
à 47,4% en milieu urbain, à 50,4% en milieu rural et 49,6% au
plan national. En 1995, l'étendue de la pauvreté est de 28,3%
(23, 7% en ville et 30,0% en milieu rural). Ce ratio de pauvreté prend
de la profondeur en 1998 (25,0% en ville et 33,0% en zone rurale). Des tests
montrent que l'incidence de la pauvreté a toujours été
plus forte dans les autres centres urbains qu'à Abidjan quelques soient
les années. Cette situation ne diffère pas de celle de 1995.
La dépense annuelle par tête du ménage
pauvre en Côte d'Ivoire, estimée en 1998 à 128 472 FCFA,
représente moins de 30,0% de la dépense effectuée par les
non pauvres (cf. tableau en annexe 2). Du côté de la
dépense annuelle par tête, il existe un déséquilibre
entre pauvres et non pauvres. La baisse des niveaux de vie a touché
aussi bien les classes moyennes de ménages que les classes de
ménages les plus pauvres. Au moins à Abidjan, ce sont toutes les
classes de ménages qui ont souffert de la crise entre 1993 et 1995.
Les ménages pauvres consacrent plus de la moitié
de leur revenu par tête à l'alimentation tant en milieu urbain
qu'en milieu rural. Une amélioration du niveau de certaines
dépenses importantes en 1998 est constatée par rapport à
1993 (4,2% contre 1,4% pour l'éducation, 5,5% contre 2,0% pour la
santé et 8,4% contre 6,4%).
Une analyse de la structure de la population pauvre permet de
dire que le sexe du chef de ménage est un élément
discriminant par rapport au statut de pauvreté des membres. En effet,
les ménages dont le chef est une femme comportent moins de pauvres que
ceux sous la responsabilité d'un homme. Ces ménages renferment
moins de 10% des pauvres alors que leur poids dans l'effectif total des
ménages du pays est de 15%. Les ménages dont le chef de
ménage a un niveau d'éducation primaire ont eu en moyenne des
dépenses par tête de 19% à 29% supérieures à
celles d'un ménage dont le chef ne dispose d'aucune formation scolaire.
Le fait d'avoir un niveau scolaire secondaire ou supérieur a eu un
impact encore plus élevé, augmentant les dépenses par
tête de 56% à 80%. Une explication de ce caractère pourrait
être la taille du ménage.
La taille moyenne des ménages pauvres avoisine sept (7)
personnes quelle que soit l'année. En 1998, pour les ménages
pauvres, la taille est de 8,1% et de 9,3% pour les ménages
extrêmes pauvres. Les tailles moyennes, des ménages pauvre et
extrêmement pauvre sont respectivement égales à 1,65% et
1,92% et fois celle du ménage non pauvre.
Le ménage pauvre est généralement
composé en majorité d'enfant (0 à 14 ans). Il expose une
très grande proportion d'enfant à la pauvreté. En 1998,
les enfants représentaient 43,5% de la population totale. La proportion
des enfants (0 à 14 ans) touchée par la pauvreté est de
38,5% ; ce taux montre que les enfants sont plus touchés que les
adultes.
L'analyse du groupe socio-économique (secteur informel
et le secteur moderne) du chef de ménage montre que les ménages
dirigés par un opérateur du secteur informel comportent de plus
en plus de pauvres (28,9% en 1998). Le taux de pauvreté chez les
ménages d'opérateurs du secteur formel, est situé à
12,4% en 1998. Il ressort de ces deux taux que la paupérisation n'est
pas ressentie de la même manière chez ces deux catégories
de chef de ménage.
L'analyse en fonction du type de l'opérateur agricole
laisse apparaître que les ménages des agriculteurs de produits
vivriers sont plus frappés par la pauvreté (49,8%) que ceux des
cultures d'exportation (45,1%) en 1998.
Le type de logement dominant au niveau des ménages
pauvres est la case et la maison en banco en milieu rural et la cour commune en
milieu urbain. En 1998, 6 pauvres sur 10 occupent une case ou une maison en
banco, ce qui dénote d'une amélioration par rapport à 1993
et 1995 où 7 personnes sur 10 occupaient une case ou une maison en
banco. Cette amélioration se répercute à Abidjan, au
niveau des cours communes (45,0% en 1998 contre 65,0% en 1995), tandis qu'un
durcissement s'opère pour les bidonvilles (23,0% en 1998 contre 15,0% en
1995).
L'accessibilité à l'eau potable est un
problème fondamental, si l'eau potable s'entend comme l'eau provenant
soit par un robinet privé, soit par un robinet commun ou par une pompe
publique, alors une plus grande majorité des pauvres y a accès.
Jusqu'à 1998, le point de la situation, en milieu rural, donne : 15
465 pompes à motricité humaine (12 105 pompes en fonctionnement)
et une trentaine de système d'hydraulique villageoise
améliorée. Au plan national, pour l'accessibilité à
l'eau potable, le taux évolue de 37,6% en 1995 à 41,9% en 1998.
En milieu urbain l'eau potable est desservie au travers du robinet par la
Société de Distribution d'Eau de Côte d'Ivoire (SODECI).
L'électricité est le mode d'éclairage par
excellence. Il ressort des études menées que
l'électricité est un facteur discriminant entre pauvre et non
pauvre. En 1998, 32% des ménages pauvres ont l'électricité
contre 19,1% en 1995. Leur connexion sur le réseau se fait soit par
l'acquisition d'un compteur propre, soit par un compteur collectif. Ainsi,
11,7% des ménages pauvres sont sur un compteur collectif qui est un taux
en deçà de celui des non pauvres (23,2%) en 1998.
L'éclairage des ménages à partir de compteur ne leur
appartenant pas traduit des conditions de vie précaire.
Dans le domaine de l'éducation, une amélioration
est constatée. Le taux brute de scolarisation passe au plan national de
34,9% en 1993 à 52,6% en 1998, soit un accroissement de 50,7%. Le taux
net de scolarisation au primaire mesure l'accès à
l'éducation des enfants de 6 à 11 ans. Ce taux est égal
à la proportion d'enfants de 6 à 11 ans effectivement inscrits
à l'école primaire. Le détail des chiffres de 1998 permet
de constater une disparité entre garçons et filles plus
marquée chez les pauvres. La proportion des enfants de 6 à 11
ans, issus de ménages pauvres est de 50,9% pour les garçons et de
41,4% pour les filles. Chez les non pauvres, ces taux sont respectivement de
63,0% et 55,7% pour 1998.
Chez les adultes de 15 ans et plus, c'est le taux
d'analphabétisme qui sert de mesure. Le taux d'analphabétisme
reste élevé bien qu'il y ait une amélioration en 1998par
rapport à 1995. En effet, ce taux est de 54,8% en 1995 et de 50,2% en
1998. L'analyse du taux d'analphabétisme par sexe laisse
apparaître une forte proportion de femmes ne sachant pas lire et
écrire. Le taux est de 57, 7% chez les non pauvres et de 73,6% chez les
pauvres. Alors qu'il est de 47,0% chez les adultes pauvres et chez les non
pauvres en 1998. Le niveau d'analphabétisme est l'un des
déterminants le plus explicatif des conditions d'existence de nombreuses
femmes surtout dans le monde agricole.
L'analyse de la pauvreté en Côte d'Ivoire montre
une légère amélioration des conditions d'existence des
ménages en 1998. Le taux de pauvreté est passé de 36,8%
à 33,6% entre 1995 et 1998. La guerre a fait plus d'un million de
personnes déplacées et réfugiées. Elle a accru la
pauvreté. En effet, la perte par les agriculteurs des revenus
tirés de leurs cultures les plonge dans un état de
précarité. En zone urbaine, le chômage s'est
accentué à cause de la perte d'emplois liée à la
fermeture de certaines entreprises et la baisse de l'activité
économique. 6% de la population sont devenues déplacées de
guerre avec plus de 500 milles enfants qui ont dû arrêter
l'école. Un bon nombre de structures de base (écoles, services
médicaux) ont dû arrêter de fonctionner soit par le
départ des fonctionnaires, soit par l'arrêt de fonctionnement de
l'administration. Pour des besoins de sécurité, de grands espaces
d'habitation autour des camps militaires ont été détruits
faisant près de 20 000 sans logement. Suite à ces causes, la
pauvreté a enregistré un score jamais atteint dans le pays. Il
est aujourd'hui de l'ordre de 44%. Après un recul en 1998, le niveau de
pauvreté s'est creusé à partir de 2000 pour évoluer
à 38,5% en 2002 et atteindre le pic de 2003 (44%).
b) Déterminants de la
pauvreté
La compréhension de la pauvreté à travers
ses déterminants peut fournir des informations capitales pour cibler les
actions visant à soulager les conditions d'existence des ménages
pauvres. Les déterminants de la pauvreté sont les
caractéristiques socio-économiques des ménages. On
retiendra que les principaux déterminants sont ceux qui se
répètent fréquemment dans toutes les régions ou
départements du pays. Ce sont
- la catégorie socio-professionnelle des
individus ;
- la taille des ménages ;
- le niveau d'instruction ;
- le groupe d'âge ;
- le statut matrimonial ;
- le sexe.
Les principales corrélations dégagées
dans l'établissement du profil de la pauvreté sont
multiples :
? plus le niveau d'étude du chef de ménage est
élevé plus la probabilité d'être pauvre est faible.
Les pauvres sont identifiés comme étant des opérateurs
agricoles (leur revenu espéré a tendance à se
réduire), des travailleurs et indépendants du secteur informel
n'ayant pas un niveau d'étude poussé ;
? appartenir au secteur formel (public et privé) expose
moins à la pauvreté, contrairement aux ménages des autres
catégories socio-professionnelles (agriculteurs et opérateurs du
secteur informel) qui ont plus de chance d'être pauvres ;
? la taille du ménage joue un rôle très
important dans la probabilité d'appartenir ou non à la classe des
pauvres. Ainsi, une réduction du train de vie de 8,3% est
constatée en 1995 pour les ménages compris entre 5 et 10
personnes par rapport à ceux compris entre 3 et 5 personnes.
2.1.2) Revue de quelques
programmes de lutte contre la pauvreté
En matière de lutte contre la pauvreté, il a
été élaboré plusieurs projets dans le but de
résorber le phénomène de la pauvreté. Une revue de
quelques uns de ces projets est abordée dans cette section. Cette
présentation sera structurée en deux parties : la
première partie a trait aux projets et programmes internationaux de la
communauté internationale et la seconde aux projets nationaux
d'éradication de la pauvreté.
1) Au plan international
Les différentes Institutions de Bretton Woods, avec les
pays développés, ont adopté deux politiques majeures
allant dans le sens du combat contre la pauvreté : l'initiative
PPTE et l'initiative 20/20.
a) L'initiative PPTE
Afin de bénéficier de l'initiative PPTE, qui
devait permettre à la Côte d'Ivoire de bénéficier
d'un allégement de 80% de sa dette, le gouvernement devait respecter le
programme économique et financier sur la période 1998-2000 conclu
avec les Institutions Financières Internationales (IFIs). Le bilan des
actions menées en 1998 dans le secteur de l'éducation fait
apparaître une augmentation des taux nets de scolarisation primaire, une
amélioration de la scolarisation des enfants, particulièrement
des filles, et un accroissement du taux d'alphabétisation de 43% en 1996
à 48% en 2000.
Dans le secteur de la santé, la politique
d'accroissement de l'accès aux centres de santé dans les zones
déshéritées et rurales s'est poursuivie. La couverture, la
qualité et l'utilisation des services de santé ont
été améliorées. Les résultats de
l'enquête de couverture vaccinale indiquent que le taux de couverture
nationale globale est passé de 41% en 1994 à 72% en 1998,
conformément aux objectifs intermédiaires fixés pour
l'atteinte d'un taux de 80% en 2000.
Cependant, pour atteindre ces objectifs, l'Etat a dû
opérer de difficiles arbitrages budgétaires, qui ont conduit
à réduire les dotations allouées aux secteurs autres que
l'éducation et la santé. Le processus engagé pour
l'amélioration des performances en matière de politique sociale,
comporte des limites qui tiennent à la faiblesse des ressources
mobilisées en faveur de la réflexion sur ces politiques,
l'excessive centralisation des décisions en matière de
définition des priorités et la gestion éclatée des
actions spécifiques.
b) L'initiative 20/20
L'initiative 20/20 propose que les pays en voie de
développement consacrent 20% en moyenne des dépenses
budgétaires et 20% de l'aide publique dans le développement des
services sociaux de base (SSB concernés par l'Initiative :
éducation de base, santé de base, eau et assainissement,
nutrition, santé de la reproduction et population). Cette initiative
doit permettre d'utiliser les ressources plus efficacement et plus
équitablement pour combattre les effets physiques de la pauvreté.
Lors de la réunion d'Oslo en 1996 consacrée à l'Initiative
20/20, la Côte d'Ivoire s'est portée volontaire pour tenter
l'expérience pilote, et s'est par la suite très activement
impliquée dans la concrétisation des principes
méthodologiques de l'Initiative.
L'État ivoirien a offert, à travers sa
participation au Sommet social de Copenhague et son adhésion à
l'Initiative 20/20, les signes d'une volonté de corriger les effets
sociaux des ajustements successifs, par le renforcement des mesures sociales
suivant la philosophie de l'Initiative 20/20. Cependant, les engagements en
faveur de la perspective PPTE ont pris le pas sur l'Initiative 20/20 pour finir
par l'éclipser, à tel point que le schéma
méthodologique proposé par les agences des Nations Unies n'a pas
pu s'imposer dans la définition des politiques sociales. L'État
ivoirien s'est trouvé écartelé entre les recommandations
du PNUD et de l'UNICEF, qui lui laissaient une plus grande marge de manoeuvre
dans la gestion du social, et les conditionnalités draconiennes du
concours d'accès aux bénéfices de l'initiative PPTE. En
agitant la perspective d'une réduction du stock de la dette,
l'Initiative PPTE présente l'avantage de contraindre indirectement les
politiques publiques à prendre le social en compte. Cependant, cette
approche, trop rigide et dirigiste, aux effets parfois néfastes, ne
donne guère à l'État la possibilité d'arbitrage
budgétaire comme le suggère l'Initiative 20/20.
En définitive, la mobilisation sociale autour de
l'initiative 20/20 aura été très faible compte tenu de
l'omniprésence de l'État et de la quasi-absence des acteurs non
gouvernementaux. Les recommandations du Sommet social n'ont eu qu'une influence
modeste dans l'internalisation des pressions en faveur d'une politique du
social en Côte d'Ivoire. L'instrument de dialogue politique et de
plaidoyer pour la mobilisation de l'aide publique au développement
qu'est censée être l'Initiative 20/20 aura eu peu d'effet sur les
décisions en matière de développement humain.
2) Au plan national
De nombreuses structures et projets ont été mis
en place dans le cadre de la lutte contre la pauvreté. Certaines de ces
politiques de réduction de la pauvreté sont ici
exposées.
a) Dans la zone rurale
Le gouvernement a mis en place des infrastructures et des
équipements collectifs : 15 000 projets d'équipement
collectifs ont été réalisés de 1974 à 2001
par les FRAR (Fond Régional d'Aménagement Rural), avec en plus un
programme d'ouverture et de reprofilage de pistes rurales.
Depuis 1999, le gouvernement ivoirien a réformé
la filière café-cacao en libéralisant ce secteur. Ainsi,
la Caistab (Caisse de Stabilisation) a été liquidé avec
une mise en place de deux nouvelles structures que sont l'ARCC (Autorité
de Régulation du Café-Cacao) et la BCC (Bourse du
Café-Cacao), une fixation d'un prix minimum aux producteurs. Pour
l'encadrement du monde rural, la mise sur pied de l'ANADER (Agence Nationale de
Développement Rural) et du Centre National de Développement
Agricole (CNRA) pour la recherche et la diffusion des résultats
obtenus.
Vu l'avancée du désert, un plan directeur
forestier a été adopté en 1988 (pour rétablir le
couvert forestier) et actualisé en 1998. Cette même année,
l'Etat s'est doté de lois portant Code foncier rural et minier pour
éviter les conflits et permettre un large accès aux terres
à toutes les couches de la population (jeunes et femmes).
b) Promotion du secteur
privé
Plusieurs réformes économiques ont
été adoptées dans ce domaine dans le but de redynamiser ce
secteur afin de créer des emplois neufs. Il s'agit des programmes
d'appui aux mesures de libéralisation dont le Programme d'Ajustement
Structurel Compétitivité (PASCO), le Programme d'Ajustement
Structurel du Système financier Ivoirien (PASFI), le Crédit
d'Ajustement Structurel pour le Développement du Secteur Privé
(CAS-DSP) et l'Appui au Secteur Privé Ivoirien (ASPI).
c) Emploi et revenus
Plusieurs plans en 1991 et 1995 ont été
adoptés pour la création de nouveaux postes et l'absorption de
nombreuses personnes au chômage. Ce sont entre autres : le Plan
National de l'emploi adopté en 1995, la révision du Code du
travail (l'objectif est de rendre le marché du travail plus flexible),
le renforcement du rôle des nouvelles institutions publiques intervenant
dans le champ formation - emploi. La création d'organes
régulateurs de l'emploi, l'Agence d'Etudes et de promotion de l'emploi
(AGEPE, observation du marché de l'emploi et de placement de la main
d'oeuvre) et l'Agence Nationale de la Formation Professionnelle (AGEFOP qui est
le cabinet d'ingénierie technico-pédagogique de l'Etat), ainsi
que le Projet d'Appui à la Formation de la Population Active (PAFPA). La
mise en place des fonds sociaux nationaux (Fonds national de la jeunesse, Fonds
d'intervention pour l'action culturelle, Fonds national femme et
développement, etc.) pour la promotion de l'auto-emploi.
L'AGEFOP est un organe de prospection, d'élaboration et
de gestion de projets à travers le Programme d'Absorption des Jeunes
Déscolarisés (PAJD). Il y a d'autres programmes comme : le
Programme d'Aide à l'Embauche (PAE), le Programme de Maintien dans
l'Emploi et la Reconversion Professionnelle (PMERP), le Programme
Spécial d'Insertion des Femmes (PSIF), le Programme d'Insertion des
Jeunes Ruraux (PIJR) et le Programme de Création de Micro Entreprises
(PCME).
d) Ressources en eau
Le gouvernement a entrepris depuis 1996, une série de
réformes sur les plans juridique, institutionnel, financier et technique
afin de remédier sinon palier les problèmes (inadaptation du
cadre institutionnel, non application du code de l'eau, faible ressource en
eau, etc.) de ce secteur. Il est à rappeler que bien avant ces mesures,
l'Etat avait déjà privatisé la SODECI pour un début
de résolution des carences du secteur.
Quant à l'hydraulique villageoise, un vaste programme
national d'hydraulique urbaine et villageoise, a permis la création de 5
000 nouveaux points d'eau en zone rurale.
e) Infrastructures et transports
Depuis 1998, un programme d'ajustement du secteur des
transports (CI-PAST) ayant deux volets essentiels (entretien routier et
réforme du secteur des transports) sont en exécution. Une
réforme de l'Office de Sécurité Routière (OSER) est
en cours ainsi que la mise en place d'un observatoire de la fluidité
routière, afin de réduire la mortalité sur nos routes.
Pour le chemin de fer, une privatisation a été
opérée transformant la société nationale de chemin
de fer en SITARAIL avec l'instauration d'un Fonds d'Investissement Ferroviaire
(FIF).
Couplé à ces programmes, le programme de
sécurité et de sûreté de l'aéroport d'Abidjan
qui devait permettre un plan de vol direct USA-Côte d'Ivoire.
f) Urbanisme, logement et
assainissement
La forte pression démographique liée à la
crise d'économique (1980-1993) a entraîné un déficit
important en logements. Pour le mieux être des populations, le
gouvernement a créé une Banque de l'Habitat de Côte
d'Ivoire qui a le devoir de soutenir les ivoiriens dans leur désir de
logement. Des mécanismes de refinancement à l'accession directe
à la propriété par le biais du Compte de Mobilisation pour
l'Habitat (CDMH) et le Fonds de Soutien à l'Habitat (FSH) accompagnent
cette volonté du gouvernement de doter chaque ivoirien d'un logement.
g) Secteur éducation
formation
L'investissement dans ce domaine est une priorité pour
l'Etat de Côte d'Ivoire. Le Plan National Education/Formation (PNDEF) et
d'autres programmes, ont permis au système éducatif de
connaître un essor important. En 2001, le nombre de classes pour le
primaire est égal à 6,5 fois celui de 1963 et pour le secondaire
de 20 fois (587 en 1963 à 11 800 en 2001). La réapparition de la
politique de la gratuité des livres scolaires (2,9 milliards en 2002) et
le libre choix laissé en matière d'uniforme scolaire sont entrain
de contribuer à une amélioration du taux brut de scolarisation.
L'instauration du Fonds National d'Alphabétisation (FNA) par ses
campagnes, formations et la conception de manuel en langues, a permis de
réduire le taux d'analphabétisme.
h) Secteur santé et le
VIH/SIDA
Un Plan National de Développement Sanitaire (PNDS)
adopté en 1996 couvre la période 1996-2005. L'adaptation de
l'offre de soins par le renforcement des Soins de Santé Primaires (SSP),
la délivrance d'un Paquet Minimum d'Activités (PMA) sont les
objectifs secondaires contenus dans le PNDS afin d'aboutir aux objectifs
généraux.
Les programmes prioritaires de santé (programme
élargi de vaccination, santé de la reproduction/planification
familiale (SR/PF), santé infantile, lutte contre le paludisme, etc.)
sont une réponse de la part des gouvernants aux problèmes des
populations. Depuis les huit dernières années, une politique du
médicament est en vigueur. Elle vise la disponibilité effective
de médicaments dans les établissements de santé publique.
Elle se matérialise par la production et la vente de médicaments
génériques accessibles à toutes les couches de la
population surtout aux plus défavorisées, la confection de kits
(d'accouchement, d'épisiotomie, de césarienne, et de traitement
des infections sexuellement transmises). Au cours des dix dernières
années, il a été observé un renforcement
organisationnel et une amélioration du système de santé.
Ainsi, une augmentation des directions régionales (6 à 10) est
constatée et une nouvelle dénomination des Bases de Secteur de
Santé Rurales (BSSR) est intervenue, les transformant en Districts
Sanitaires.
Une politique volontariste du gouvernement a permis la
création de plusieurs structures de formations des cadres de la
santé telles la faculté de médecine (1962), l'école
nationale des sages-femmes et l'école des infirmiers et
infirmières (1964), l'institut national de santé publique (1968),
la faculté de pharmacie (1977). Elle a également permis la
construction d'hôpitaux (centres hospitaliers universitaires de COCODY,
TREICHVILLE et YOPOUGON) et d'instituts spécialisés (institut de
cardiologie d'ABIDJAN) pour la consolidation du système sanitaire.
La santé représente en moyenne 13,5% des
dépenses sociales, 4,9% du budget de l'Etat et 1,3% du PIB.
Aujourd'hui, le SIDA est une priorité du gouvernement
qui a mis en place un Programme National de Lutte contre le Sida (PNLS). Ce
programme vise à réduire le taux de prévalence du
VIH/SIDA, à permettre une accessibilité des malades aux
traitements et à sensibiliser la population. Pour parvenir aux objectifs
fixés, la gratuité du dépistage est offerte, l'ouverture
de plusieurs centres de dépistage a été
réalisée, une extension de la prévention de la
transmission mère-enfant l'est encore. Un ministère a
été spécialement crée pour la lutte contre le SIDA
dans le but de coordonner toutes les actions pouvant stopper l'avancée
de la pandémie.
i) Sécurité sociale et Assurance
Maladie Universelle (AMU)
La sécurité sociale peut se définir comme
étant l'ensemble des mesures ou dispositions collectives et obligatoires
mises en oeuvre par les pouvoirs publics afin de prémunir l'ensemble des
populations contre les risques sociaux. A ce titre, elle garantit à
chaque membre de la société un minimum de revenu et des services
sanitaires sociaux.
Les services techniques en charge de la sécurité
sociale des résidents en Côte d'Ivoire sont : la Caisse
Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), la Caisse Générale
de Retraite des Agents de l'Etat (CGRAE) et la Mutuelle Générale
des Fonctionnaires et agents de l'Etat de Côte d'Ivoire (MUGEF-CI). A
côté des services techniques, il y a les organismes
spécialisés que sont : le Fonds de Prévoyance
Militaire (FPM), le Fonds de prévoyance de la Police Nationale (FPPN) et
les structures privées (compagnies d'assurance).
La CNPS fournit les services de prestations familiales,
d'accidents du travail et maladies professionnelles, de retraite du secteur
privé et d'actions sanitaires et sociales. La CGRAE gère la
retraite du secteur public. La MUGEF-CI assure la couverture partielle des
soins de santé des fonctionnaires, des agents de l'Etat et des
retraités par le biais du remboursement partiel des frais
pharmaceutiques, d'optique, de soins et prothèses dentaires. Le FPM
assure la couverture totale des frais consécutifs à la maladie,
au suivi de la grossesse et à l'accouchement dans les structures
sanitaires publiques, et partielle dans les structures sanitaires
privées. Le FPPN assure la couverture partielle ou totale des frais
liés à la maladie et des accidents de voies publiques des agents
de la police Nationale et assure également le suivi des frais
liés à la maternité.
La faible couverture sociale (10% de la population active) a
amené le gouvernement socialiste à créer l'AMU en Octobre
2001. L'AMU (couvre les consultations, les examens, les actes chirurgicaux,
l'hospitalisation, les médicaments et les soins dentaires) a
été votée par le parlement mais n'est pas encore
entrée dans sa phase active. Elle est composée de trois
caisses :
- la Caisse Sociale Agricole (CSA) couvrira les prestations du
monde rural comme sa dénomination l'indique ;
- la Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM) couvre les
secteurs informel et moderne ;
- le Fonds National d'Assurance Maladie (FNAM) est l'organe
qui financera les deux autres caisses.
L'AMU coûtera pour son démarrage et sa mise en
place 30 milliards de nos francs (réserves techniques). La situation de
guerre retarde sa mise en application.
j) Décentralisation et participation
communautaire
Le processus de décentralisation connaît une
accélération depuis 2002. Il est passé à la phase
active. A ce jour, il existe 19 régions, 58 départements, 2
districts, 196 communes et 253 villes de plus de 4 000 habitants. L'Etat a
transféré certaines de ses compétences et adopté un
régime fiscal et financier des collectivités pour un bon
déroulement de la décentralisation. Ainsi, les populations
elles-mêmes, géreront leurs affaires locales pour une meilleure
efficacité puisqu'elles sont au fait de leurs problèmes
quotidiens.
Concernant la reconstruction du pays, de nombreux programmes
sont en attentes. Ils sont conditionnés par la réalisation d'un
gouvernement d'unité nationale (le commencement du processus DDR).
Ces programmes sont de deux ordres : une restructuration
pour ceux déjà existants et la création de nouveaux
programmes. Ce sont :
- le Projet d'Appui à l'Education et à la
Formation (PASEF) ;
- le Projet de Développement des Services de
Santé Intégrés (PDSSI) ;
- le Projet National de gestion des Territoires et
d'Equipement Rural (PNGTER) ;
- le Projet d'Appui à la Conduite des Opérations
Municipales (PACOM) ;
- le Projet d'Investissement et d'Ajustement (CI-
PAST) ;
- le Projet de Développement du Secteur Privé
(PDSP).
Le coût de création et de restructuration des
projets est de 331 millions US$. La réalisation du DDR, du RRR, VIH/SIDA
coûtera 165 millions US$ en prêts et dons. Les différents
montants sont des estimations approximatives de 10 US$ par habitant et par
an.
Après avoir cerné la pauvreté et son
niveau qui sévit en Côte d'Ivoire, nous développerons
l'évolution et la structuration de la politique budgétaire
2.2) EVOLUTION ET STRUCTURE
DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE
La politique budgétaire et son financement seront
appréhendés dans le paragraphe A. Il sera vu, dans ce paragraphe,
les différentes structures et évolutions des composantes de la
politique budgétaire. Et en son paragraphe B, l'incidence de la
politique budgétaire sur les indicateurs économiques et sociaux
tels que le PIB, le PIB/tête, la consommation des ménages et les
indicateurs de développement. Nous verrons comment les dépenses
sociales (notamment les dépenses d'investissement et de fonctionnement
dans les secteurs sociaux) influent sur ces différents indicateurs de
comparaison.
2.2.1) La politique
budgétaire et son mode de financement
La politique budgétaire est essentiellement
basée sur le budget de l'Etat. Elle est un instrument qui permet au
gouvernement de réaliser son programme, dans le strict respect des
ressources disponibles tout en mettant un accent particulier sur ses
priorités.
La politique budgétaire nationale demeure le principal
instrument pour faire face à des chocs économiques ponctuels, car
les gouvernements nationaux ne peuvent pas recourir à la politique
monétaire pour influencer les variations de la conjoncture
économique dans le cadre de l'UEMOA. La politique budgétaire
comprend deux (2) postes importants : les dépenses publiques et les
recettes publiques. Les dépenses publiques sont financées par des
recettes fiscales, non fiscales, les dons et les prêts. Pour la collecte
des ressources, les autorités compétentes accordent une
importance particulière aux normes fiscales, à une gestion
rigoureuse et rationnelle des dépenses publiques, à une
efficience des investissements publics et à l'apurement des
arriérés de paiements intérieurs et extérieurs.
L'exécution de ces mesures permet de mobiliser des
ressources supplémentaires pour les dépenses sociales et plus
précisément les Services Sociaux Essentiels (SSE). Pour
appréhender l'évolution des finances publiques, nous allons
examiner les recettes et les dépenses d'une part, et d'autre part, le
déficit budgétaire et son mode de financement.
1) Structure et évolution des ressources de
l'Etat
D'une manière générale, les ressources de
l'Etat sont constituées par les ressources intérieures et les
ressources extérieures. Le tableau 1 en annexe retrace la structure et
l'évolution des recettes publiques de l'Etat de 1990 à 2004.
L'évolution des recettes de 1990 à 2003 peut
être découpée en plusieurs phases, 1990-1993, 1994-1998,
1999-2000 et 2001-2002. (cf. annexe 1, tab. 12)
Le recouvrement des ressources totales de l'Etat de 1990
à 1993 va décroissant avec une fluctuation en dent de scie. Une
baisse tendancielle effective de 1990 à 1991 avec des montants allant de
630,8 milliards à 591,9 milliards de nos francs, soit une variation
négative de 6,2% suivie d'une légère hausse en 1992 (609,5
milliards) et un recul en 1993 (532,9 milliards). L'analyse approfondie montre
une inefficacité dans le recouvrement total des impôts et taxes.
Il est à retenir que les baisses enregistrées sur la
première sous-période traduisent les difficultés de l'Etat
à collecter ses impôts et taxes à cause du sous
équipement en hommes (dû à la crise économique) et
en matériel.
La dévaluation intervenue en 1994 dope le recouvrement
les recettes publiques qui augmentent de 64,5%, cette augmentation fait suite
aux mesures d'accompagnement des gouvernants dans le but de relancer
l'activité qui était moribonde.
1994 est le début d'une longue période de
croissance des recettes totales qui s'étendra de 1994 à 1998 avec
un taux de croissance moyen de 23,8%. De 1994 à 1998, les recettes
totales passent de 876,6 milliards à 1 439,2. Cette augmentation brusque
a son explication dans la dévaluation du franc CFA intervenue en janvier
1994 et aussi dans la volonté des gouvernants d'assainir le recouvrement
des ressources étatiques.
L'autre période 1999 à 2000 voit le niveau de
ces recettes baisser -7,1% en 1999 et -4,9% en 2000. Les causes étant la
mauvaise posture de l'économie ivoirienne qui a enregistré une
croissance du PIB de -2,3%, le prolongement des effets de l'instabilité
politique débutée en 1999 et la rupture des relations
financières avec les bailleurs de fonds internationaux liée aux
dérapages des finances publiques.
A partir de 2001, les recettes publiques renouent avec la
croissance, une hausse de 8,3% pour 2001 et de 10,4% en 2002. Avec la
stabilité (+0,1%) de l'économie, le recouvrement des ressources
de l'Etat s'améliore. La situation de crise socio-politique et militaire
a fortement déprimé l'activité. Le gouvernement a pris
différentes mesures pour l'amélioration du recouvrement fiscal,
notamment :
- la rationalisation et le suivi du système
d'exonération fiscale ;
- le renforcement du contrôle fiscal ;
- l'appel au civisme des populations pour le paiement de leurs
impôts à travers des campagnes de publicité ;
- la lutte contre la fraude fiscale.
Les recettes fiscales constituent la principale entrée
des ressources de l'Etat. La Côte d'Ivoire n'échappe pas à
la règle. Sur toute la période d'étude, les recettes
fiscales contribuent en moyenne pour plus de 85% des recettes publiques
totales. Et « la très forte proportion des recettes fiscales dans
les recettes totales confirme l'argument selon lequel le budget de l'Etat est
essentiellement fiscal ». (Jude COMLANVI EGGOH, 2002)
Les services de l'Etat qui participent dans le processus de
recouvrement de ces ressources sont : la Direction Générale
des Douanes (DGD), la Direction Générale des impôts (DGI)
ainsi que l'administration du trésor.
Les deux composantes essentielles des recettes fiscales sont
les impôts et les droits et taxes (recettes douanières) ont connu
des évolutions en dent de scie. Pour l'appréciation de leur poids
réel, le graphique numéro 1 donne une idée
générale.
Graphique 1 : Structure des recettes
fiscales de 1991 à 2000 (%)
Source : calcul sur base de donnée
(TOFE)/MFE
Les recettes fiscales se comportent de la même
manière que les recettes publiques totales, mais toutefois avec une
légère modification dans le découpage. On a, pour les
périodes, 1990 à 1993, 1994-1999 et 2001-2002 les
résultats ci-après :
De 1990 à 1993, les recettes issues du recouvrement des
impôts sont légèrement supérieures aux droits et
taxes perçus. Les impôts (-3,8%, 0,5% et -13,9%) tandis que les
droits et taxes passent de 248,9 à 247,7 milliards de francs CFA, un
recul en 1993 (-11,9%). Une explication du poste de droits et taxes est qu'ils
sont perçus sur des produits importés alors que les impôts
sont généralement perçus sur les activités des
entreprises et les émoluments des travailleurs.
Un renversement de tendance à partir de 1994 à
1996 est observé, les droits et taxes perçus sont
supérieurs aux impôts ; ce qui serait dû aux effets de
la dévaluation. La somme des droits et taxes, qui est de 1 437,3
milliards, est supérieure à la somme des impôts (1079,3
milliards).
De 1997 à 2000, à l'exception de l'année
1999, le poids des impôts est plus élevé que celui des
taxes. Les mesures d'accompagnements suite à la dévaluation ont
permis l'augmentation du taux de recouvrement des recettes fiscales
(augmentation des salaires, regain de compétitivité des
entreprises, etc.).
Il faut noter que le système fiscal demeure fortement
dépendant des taxes extérieures. Sur la période 1994-1997,
celles-ci représentent en moyenne 57,4% des recettes fiscales contre
42,6% pour les impôts. Cette dépendance vis-à-vis du
commerce extérieur rend le système fiscal particulièrement
vulnérable aux chocs extérieurs.
En l'année 2000, la croissance des recettes totales est
négative, elle est de -7,1% après avoir connu une période
de croissance positive. La baisse des recettes totales en général
et des recettes fiscales en particulier, est due à la hausse drastique
de l'activité économique et à l'entrée en vigueur
du Tarif Extérieur Commun (TEC) de l'UEMOA (1998). En effet, le TEC
vient égaliser les différents taux d'imposition des pays membres
de l'union dans leurs relations avec l'extérieur. Les mesures de
défiscalisation relative (élargissement de l'assiette et
réduction du taux moyen) vont contribuer à la réduction de
la pression fiscale qui tend à se stabiliser aujourd'hui entre 14% et
15% du PIB. Cela n'a pas toujours été ainsi puisqu'il eut des
moments de très forte pression fiscale, c'est le cas de l'année
1996 où ce taux plafonnait à 19%. La pression fiscale de
l'année 2000 est de 15,1%. Pour 2001, 2002, 2003, 2004 les pressions
fiscales sont respectivement de 14,8%, 15,5%, 14,1%, 15% confirmant cette
relative stabilité.
Les recettes non fiscales sont le fruit de la contribution des
entreprises publiques et parapubliques, des quotes-parts et dividendes de ces
entreprises, de privatisation de ces sociétés. Il convient de
remarquer que la Côte d'Ivoire, à l'instar des autres pays en voie
de développement, ne fonde pas ses recettes budgétaires sur les
recettes non fiscales. La part moyenne des recettes non fiscales dans le PIB
est de l'ordre de 3,5%. Entre 1999 et 2000, s'opère une véritable
réduction de près de 50,3% des recettes non fiscales, et 2001
voit une augmentation de ce poste de 32,2%.
2) Structure et évolution des dépenses
publiques
Il faut entendre par dépenses publiques, les
dépenses primaires et les intérêts dus sur la dette
publique. Les dépenses primaires, très importantes en poids, se
subdivisent en dépenses courantes et en dépenses
d'investissement. La masse salariale, les prestations sociales, les subventions
et autres transferts, les autres dépenses de fonctionnement et les
dépenses sociales ciblées constituent les dépenses
courantes.
L'évolution des différentes catégories de
dépenses (cf. annexe 1, tab2) sur une période de onze (11) ans,
c'est-à-dire de 1990 à 2001, a été analysée
en trois (3) sous périodes. Ces sous périodes se repartissent
comme suit : 1990 -1993, 1994 - 1998 et 1999 - 2001.
L'analyse de la première période montre qu'il y
a une baisse progressive et continue des dépenses publiques totales qui
passent de 923 milliards en 1990 à 886,8 milliards en 1993, soit une
variation négative de -3,9%. La masse salariale, sur la période,
régresse de 11,9%. Cette baisse est due aux
suppressions des emplois dans la fonction publique. D'une manière
générale, la réduction des dépenses publiques a
été le fait des Programmes d'Ajustement Structurels axés
sur l'assainissement et le contrôle des dépenses publiques.
Aux Programmes d'Ajustement Structurels, il a
été associé des programmes sectoriels destinés
à éliminer les distorsions et les rigidités de
l'économie. Il s'agit entre autres des Programmes d'Ajustement des
Secteurs de l'Agriculture (PASA), de l'Energie (PASE), de l'Eau (PASEA), du
Secteur Financier (PASFI), de la Valorisation des Ressources Humaines (PVRH),
de la COmpétitivité des entreprises (PASCO), etc.
Ainsi pendant que les dépenses totales
régressaient dans leur ensemble, les dépenses d'investissement
quant à elles progressaient en moyenne d'un peu plus de 20%.
La deuxième sous période (1994-1999) est
caractérisée par la reprise du fait des hausses concomitantes des
dépenses courantes, d'investissement et des intérêts dus
sur la dette publique consécutive au changement de parité de la
monnaie intervenu en 1994. A la suite de la dévaluation, il a
été observé quatre réévaluations salariales
1994, 1995, 1996. Pour les plus bas salaires, l'augmentation cumulée a
été de 51,3% contre 11,3% pour les salaires les plus
élevés dans le secteur public. Au niveau du monde paysan, de 1994
à 1998, c'est à une hausse de plus de 50% des prix d`achat aux
producteurs des principaux produits agricoles qui est intervenue depuis la
dévaluation du Franc CFA.
L'affectation de plus en plus de ressources aux
dépenses d'investissement épouse les objectifs du gouvernement,
à savoir la réaffectation des ressources aux services sociaux de
base (santé, éducation) et l'entretien des infrastructures
essentielles. La mise en place dans le même temps de fonds sociaux pour
les jeunes et les femmes crée une augmentation supplémentaire des
dépenses publiques totales.
Il a été mis en place, en 1999, le
Système Intégré de Gestion des Finances Publiques (SIGFIP)
dans le cadre des réformes budgétaires qui vise une gestion et un
suivi efficace des finances publiques. Cependant, face à la
fragilité des finances publiques, aux carences des procédures de
contrôle et à l'importance des dépenses
extrabudgétaires, la mise en place du SIGFIP n'a toutefois pas
empêché le dérapage au niveau des finances qui a
entraîné la rupture des relations avec les institutions
financières internationales avec à la clé l'arrêt
des financements extérieurs.
Cette situation combinée avec le ralentissement de
l'activité économique (+1,6%) ont occasionné une chute de
71,4% des recettes totales induisant un recul des dépenses publiques en
liaison avec le retrait des dépenses d'investissement de plus de 100
milliards. Ainsi la sous période - 1999-2001 - est marquée par la
réduction des dépenses publiques qui ont finalement atteints
1306,9 milliards en 2001 contre 1521,6 milliards en 1999. Ce recul est
principalement dû à une chute des dépenses d'investissement
sur la sous période (-14,1%).
Avec la stabilisation de l'activité économique
respectivement en 2001 et 2002, on assiste à une reprise des
dépenses publiques du fait de la hausse des dépenses
d'investissement. La revalorisation des soldes des forces de défense et
de sécurité ainsi que le recrutement dans les différents
corps d'armée liés à la survenance du conflit armé
le 19 Septembre 2002, ont également entraîné une hausse des
dépenses primaires de plus de 140 milliards.
Quant aux intérêts dus sur la dette publique, ils
évoluent en dent de scie sur la période d'étude. Ils
abondent dans le même sens que les autres postes de dépenses
publiques. La moyenne annuelle des intérêts dus sur la dette
publique est de 283,1 milliards de FCFA. Le paiement du service de la dette, il
faut le souligner, permet aux pouvoirs publics de maintenir les relations avec
les institutions financières internationales.
La structure des dépenses publiques et leur
évolution sont aussi des paramètres clefs pour apprécier
l'effort des pouvoirs publics dans le processus de la lute contre la
pauvreté. Le tableau 1 ci- après illustre le cas de la Côte
d'Ivoire :
Tableau 1: Structure des dépenses
publiques (%)
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
Masse salariale %
|
36,8
|
35,9
|
36,6
|
35,7
|
28,1
|
26,1
|
28,1
|
27,3
|
26,7
|
28,0
|
25,9
|
37,3
|
33,1
|
en mds
|
339,9
|
318
|
320
|
314,6
|
328
|
346,3
|
389,6
|
408,1
|
415
|
425,3
|
454,1
|
484
|
524
|
Autres dépenses de fonctionnement %
|
22,6
|
21,9
|
18,9
|
17,8
|
17,0
|
17,0
|
18,3
|
17,9
|
16,5
|
20,0
|
22,4
|
31,3
|
32,0
|
en mds
|
208,3
|
194
|
165
|
156,6
|
197,8
|
225,8
|
253,9
|
267,9
|
257
|
304,4
|
392,4
|
406
|
506
|
Dépenses en capital %
|
8,1
|
11,6
|
12,0
|
10,3
|
16,7
|
21,1
|
21,9
|
24,9
|
29,3
|
23,2
|
12,5
|
11,3
|
18,1
|
en mds
|
74,7
|
103
|
105
|
90,8
|
195
|
280,1
|
304
|
372,3
|
456
|
352,5
|
219,4
|
147
|
285
|
Autres dépenses % (y compris le service
de la dette)
|
32,5
|
30,5
|
32,6
|
36,2
|
38,2
|
35,8
|
31,6
|
29,9
|
27,6
|
28,9
|
39,2
|
20,0
|
16,8
|
en mds
|
300,1
|
270
|
285
|
319,3
|
445,2
|
475,5
|
437,7
|
446,2
|
430
|
439,4
|
686,7
|
260
|
266
|
Total %
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
100,0
|
Source : calcul sur base de donnée Direction
de la prévision (TOFE)/MFE
Le tableau 1 indique, tout comme le graphique 2 ci-dessous,
que la masse salariale est l'un des postes clés et importants des
dépenses publiques. Une grande partie des dépenses publiques est
aspirée par le paiement des salaires, soldes et traitements des agents
de l'Etat. Le recul de la part de la masse salariale dans les dépenses
totales est dû en grande partie, sur la période 1990 - 1993,
à l'assainissement de la fonction publique, à la suppression des
postes de journaliers. De 1994 à 1999, cette proportion de la masse
salariale passe de 28,1% à 26,7%. Un effort a été fait par
les autorités pour contenir les dépenses du personnel. Il en est
de même pour les deux (2) autres périodes.
Graphique 2 : structure des
dépenses publiques de 1990 à 2002 (%)
Source : calcul sur base de donnée
(TOFE)/MFE
La moyenne du poids de la masse salariale dans les
dépenses publiques totales vacille au alentour de 32%.
La reprise avec la croissance de ces taux se fait en 2000,
avec une hausse de 6,7% de la masse salariale par rapport à 1999. Le
niveau de la masse salariale dépasse les 30% rejoignant ainsi son niveau
des années de 1990-1993 et semble se maintenir dans cette perspective du
fait des efforts de paix et de reconstruction. Il est remarqué une
baisse, en 2000, de la part des investissements dans les dépenses
publiques, avec -10,4% de baisse.
La part allouée aux autres dépenses de
fonctionnement prend le pas sur celle allouée aux salaires en 1993. Avec
le tableau 2 retraçant les variations annuelles, la vision devient plus
claire.
Tableau 2 : taux de variation des
dépenses publiques (%)
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
Masse salariale
|
-
|
-6,5
|
0,7
|
-1,7
|
4,3
|
5,6
|
12,5
|
4,7
|
1,7
|
2,4
|
6,8
|
6,6
|
8,1
|
Autres dépenses de fonctionnement
|
-
|
-7,1
|
-14,6
|
-5,3
|
26,3
|
14,2
|
12,4
|
5,5
|
-4,1
|
18,5
|
28,9
|
3,6
|
24,4
|
Dépenses en capital
|
-
|
37,3
|
1,9
|
-13,1
|
114,7
|
43,6
|
8,5
|
22,5
|
22,9
|
-22,7
|
-37,7
|
-33,1
|
80,2
|
Source : calcul sur base de donnée
(TOFE)/MFE
Il a été observé un grand poids de la
masse salariale en proportion dans les dépenses publiques totales et une
amélioration des dépenses d'investissement depuis 1994. Cet
effort accru en investissement s'estompe progressivement. Les dépenses
d'investissement ont été le deuxième poste juste
après la masse salariale entre 1995 et 1999, aujourd'hui ce poste occupe
la troisième place derrière les autres dépenses de
fonctionnement.
D'une manière générale, depuis 2000 on
assiste à une reprise des dépenses de l'Etat. Le budget 2003
s'élève à 1 518,9 Milliards FCFA, en baisse de 17% par
rapport au budget de 2002. Les dépenses ordinaires
s'élèvent à 901,9 milliards FCFA, et restent stables par
rapport à 2002. Les dépenses de personnel représentent 61%
des dépenses ordinaires et 36% des dépenses globales. Elles
ont augmenté par rapport à 2002 pour prendre en compte les
besoins de renforcement des effectifs des forces de défense et de
sécurité ainsi que les effectifs des ministères
chargés de la santé et de l'éducation. Les autres
dépenses ordinaires sont en baisse en raison de la réduction des
crédits destinés à l'achat de biens et services.
Le budget 2004, en hausse de 30,8% par rapport au
précédent s'élève à 1 987,3 milliards FCFA
il table sur des prévisions de taux de croissance de 2,4% contre -2,2%
en 2003.
Au niveau des finances publiques, les administrateurs du FMI
ont recommandé aux autorités ivoiriennes de mener une politique
budgétaire prudente, en les encourageant à réaliser un
solde primaire positif plus élevé à compter de
2004, « Afin de répondre aux nombreux défis,
notamment le remboursement de la dette, le DDR, le redéploiement de
l'administration et la reprise des services sociaux sur l'ensemble du
pays». C'est la principale recommandation du conseil d'administration du
fond monétaire international (FMI), qui s'est tenu le 30 mars 2004. Le
FMI a surtout insisté sur l'urgence de freiner l'accumulation des
arriérés de paiements aussi bien intérieurs
qu'extérieurs.
Les dépenses totales en 2004 comprennent 1007,9
milliards de dépenses ordinaires. Les dépenses d'investissement
ont enregistré un accroissement de 74,6 milliards FCFA par rapport au
niveau 2003 pour se situer à 268,1 milliards. Le service de la dette
publique s'élève à 709,6 milliards. Il comprend 114,4
milliards au titre de la dette intérieure et 595,2 milliards de dette
extérieure.
Ainsi d'une manière générale, les
variations des dépenses totales globales ont une très forte
proportion en dépenses du personnel. Le graphique 3 montre une
comparaison entre les dépenses publiques totales et les recettes
budgétaires.
Graphique 3 : Evolution des
dépenses et des recettes de 1990 à 2000 en milliards de
FCFA
Source : Direction de la prévision
(TOFE)/MFE
3) Le financement des déficits
budgétaires
Les dépenses et les recettes ne s'égalisent
pratiquement jamais. En règle générale, l'Etat ordonne des
dépenses (emplois) qui sont toujours supérieures aux ressources
dont il dispose. Un pays tel que le nôtre en voie de développement
ne peut se baser sur ses ressources intérieures propres pour financer
ses dépenses, malgré l'assainissement des finances publiques,
surtout celles orientées vers les besoins sociaux vitaux et
essentiels.
En Côte d'Ivoire, les règles pour
l'établissement du budget et la Constitution exigent de présenter
un budget équilibré à l'Assemblée Nationale. Ce
principe qui exige que les recettes soient égales aux dépenses
fait qu'il faut recourir à un financement hors du circuit
étatique pour financer le déficit ainsi créé,
puisque les dépenses sont toujours supérieures aux recettes
(graphique 3). Le financement du déficit peut être
intérieur comme extérieur. Les financements extérieurs
sont les dons et prêts, les allègements de la dette, etc.
D'une manière générale, le financement
des dépenses budgétaires se fait par les recettes publiques, les
emprunts auprès de la BCEAO, l'appel à l'épargne par
émission d'obligations, cession d'actifs et/ou par l'accumulation de
divers arriérés. (cf. tableaux 3 et 4)
L'évolution du solde budgétaire présente
à l'exception des années 2001 et 2002 où l'on a
enregistré des soldes positifs, signifiant que les recettes sont
supérieures aux dépenses, toutes les autres années ont
enregistré des soldes budgétaires négatifs, comme
l'indique le tableau 3 et le graphique 4 ci-après.
Tableau 3 : Evolution du
solde budgétaire (en milliards)
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
solde budgétaire
|
-352
|
-292,1
|
-265,3
|
-354
|
-289,5
|
-209,2
|
-98,6
|
-125,1
|
-245
|
-195,1
|
160,1
|
202,4
|
-548,1
|
Source : calcul à partir de base de
données de la Direction de la prévision (TOFE)/MFE, Rapport
annuel zone Franc (Banque de France)
Graphique 4 : Evolution du
déficit budgétaire de 1990 à 2004
Source : Direction de la prévision
(TOFE)/MFE
Un effort pour la maîtrise du déficit a
été consenti ce qui a conduit à une baisse drastique de ce
solde. Les efforts entrepris ont été couronnés en 2000 et
2001, avec des soldes positifs de 160,1 et 202,4 milliards FCFA (avec le budget
sécurisé). Cependant, l'année 2002 présente un
solde budgétaire négatif de -548,1 milliards FCFA. Le tableau
n°4 suivant retrace le mode de financement du solde du déficit
budgétaire.
Tableau 4 : Mode de financement
du solde budgétaire
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
Fin total
|
352,1
|
292,1
|
265,3
|
354
|
289,5
|
209,2
|
98,6
|
125,1
|
245
|
195,1
|
-160,1
|
-202,4
|
548,1
|
fin. int.
|
14
|
56,1
|
58,8
|
119,7
|
-143,8
|
0,3
|
-66,6
|
63,4
|
76,7
|
213,5
|
-120
|
-83,3
|
14,2
|
Bancaire
|
-30,8
|
-23,2
|
-29,1
|
17,4
|
-66,8
|
57,8
|
-26,3
|
4,2
|
48,9
|
105,7
|
-126,7
|
-101,6
|
26,2
|
non bancaire
|
44,8
|
79,3
|
87,9
|
102,3
|
-77
|
-57,5
|
-40,3
|
59,2
|
27,8
|
107,8
|
6,7
|
18,3
|
-12
|
fin. ext.
|
338,1
|
236
|
206,5
|
234,3
|
433,3
|
208,9
|
165,2
|
61,7
|
168,3
|
-18,4
|
-40,1
|
-119,1
|
533,9
|
Tirage et prêt
Projet
|
224
|
186,2
|
176,9
|
174,9
|
560,3
|
364,3
|
283,4
|
164,8
|
320,6
|
145
|
126,8
|
28,4
|
284,2
|
Autres
|
114
|
49,7
|
29,5
|
59,4
|
-127
|
-130,5
|
-132,4
|
-99,9
|
-152,3
|
-163,4
|
-166,9
|
-147,5
|
249,7
|
ajustement
|
0,1
|
0,1
|
0,1
|
-0,1
|
-0,1
|
-24,9
|
14,2
|
-3,2
|
|
|
0
|
0
|
0
|
Source : Direction de la prévision
(TOFE)/MFE
L'Etat de Côte d'Ivoire essaie tant bien que mal de
financer son budget sur ressources propres. Il peut procéder à
des lancements d'emprunts obligataires dont le tout dernier date de
l'année dernière 2003 émission de bons du trésor
adjudication n° 01/2003. Mais ce financement se fait aussi par mode
bancaire et/ou sur arrière de paiement.
Sur la période d'étude, les déficits
budgétaires ont été en grande partie financés par
l'extérieur. Le financement a été essentiellement des
tirages et prêts projets. Cependant les allègements, les
annulations, les rééchelonnements, les remises de dette
constituent des financements exceptionnels.
Après l'analyse de l'évolution des
différents éléments composants le budget, nous ferons un
état de l'incidence de la politique budgétaire sur certains des
indicateurs économiques et sociaux.
2.2.2) Incidence de la politique
budgétaire sur des indicateurs économiques et sociaux
La politique budgétaire, par le biais des
dépenses, a pour but d'agir sur les indicateurs socio-économiques
(mesurent le bien-être des populations). Pour cette étude, le
Produit Intérieur Brut (PIB), le PIB/tête, la consommation des
ménages, l'Indicateur de Développement Humain (IDH) et
l'Indicateur de la Pauvreté Humaine (IPH) seront les variables retenues.
En matière de développement humain, l'indicateur usuel pour les
structures des Nations Unies, notamment le PNUD depuis 1990, reste l'IDH.
L'IDH privilégie la longévité, le savoir
et le niveau de vie. Conçu au départ comme la moyenne
arithmétique des indicateurs de durée de vie, de niveau
d'éducation et de PIB réel corrigé par la Parité du
Pouvoir d'Achat (PPA), il est actuellement calculé à partir de
quatre variables de base : le revenu, l'espérance de vie,
l'alphabétisation des adultes et le nombre moyen d'années
d'études (en différenciant le primaire, le secondaire et le
supérieur).
Le développement humain pourrait être
considéré comme la manière de mener une vie longue et
saine, d'accéder à la connaissance et à l'information, et
de bénéficier de ressources assurant un niveau de vie
décent.
1) Incidence des dépenses sociales sur les
indicateurs économiques
a) Incidence des dépenses sociales sur le
PIB
Le produit intérieur brut (PIB) est une mesure de la
richesse créée, pendant un temps donné, sur le territoire
national par tous les agents résidents. Le PIB est égale à
la somme des valeurs ajoutées. Il se décompose
en une production marchande de biens et services et une production non
marchande, composée exclusivement de services. La production marchande
mesurée par le PIB marchand est celle qui s'échange sur un
marché à un prix tel qu'il vise au moins à couvrir les
coûts de production. La production non marchande mesurée par le
PIB non marchand regroupe l'ensemble des services rendus à titre gratuit
ou quasi-gratuit (c'est-à-dire à un tarif inférieur au
coût moyen de production).
En Côte d'Ivoire, la production intérieure brute
n'a pas connu une stabilité sur les quinze (15) dernières
années (tableau 5). Depuis l'indépendance jusqu'aujourd'hui, la
production intérieure brute a connu des évolutions
contrastées. Il a été enregistré de forts taux de
croissance économique durant les vingt premières années,
après les indépendances grâce à l'envolé des
cours de matières premières, principalement du café et du
cacao. Cette période a été suivie de taux de croissance
négatifs durant les années 80 jusqu'à 1993, du fait de la
baisse des cours de matières premières, de la
détérioration des termes de l'échange, de l'escalade des
taux d'intérêt internationaux et du renchérissement du
dollar et par la suite de la surévaluation du franc CFA. La reprise
économique a été observée à partir de 1994
(+2,1%). La croissance se présentera à partir de 1995 avec un
taux de croissance moyen supérieur à 5% jusqu'à 1998.
Cette nouvelle dynamique est due aux retombés de la dévaluation,
aux réformes structurelles et au bon comportement des cours des
matières premières. Quant à l'année 1999, elle
marque un début de récession - avec le ralentissement de
l'activité (+1,6%) - approfondie en 2000 avec un taux de -2,3% (le plus
bas taux de croissance économique enregistré en Côte
d'Ivoire). La contraction du niveau d'activité a été en
grande partie causée par l'instabilité politique et au manque de
dynamisme de l'économie ivoirienne. L'année 2001, est
l'année de la stabilisation qui débouchera sur les années
2002 et 2003 avec des taux de croissance négatifs de -1,6% et -1,1%
selon les dernières estimations du Ministère d'Etat,
Ministère de l'Economie et des Finances.
Tableau 5 : Evolution des taux de
croissance du PIB (%)
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003 (est.)
|
2004 (prév.)
|
PIB
|
-1,1
|
0
|
-0,1
|
-0,4
|
2,1
|
7,1
|
6,8
|
5,6
|
5,4
|
1,6
|
-2,3
|
0,1
|
-1,6
|
-0,9
|
2,4
|
Source : MEMEF / DGE / DCPE
Graphique 5 : Évolution des taux de
croissance du PIB (%)
Source : Direction de la prévision / MEMEF
Une analyse descriptive de l'évolution de cet
agrégat et de la proportion des dépenses sociales par rapport au
PIB permettra de juger, à priori, de l'incidence des dépenses
sociales sur le PIB. Le tableau 6 présente les différentes
dépenses effectuées dans les secteurs sociaux.
Tableau 6 : Evolution des dépenses
sociales et du PIB en milliards de FCFA
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
PIB courant
|
2 940,3
|
2 961,4
|
2 951,2
|
2 946,6
|
4 256,2
|
4 988,1
|
5 548,8
|
6 176,2
|
7 541
|
dépenses pub totales
|
923
|
884
|
875
|
887
|
1 166
|
1 328
|
1 385
|
1 495
|
1 557
|
dépenses sociales
|
353,2
|
339,5
|
337,1
|
349,8
|
352,2
|
438,3
|
487,1
|
540,2
|
608,4
|
*Education
|
195,8
|
183,8
|
203,8
|
202,1
|
219,8
|
242,5
|
272,7
|
287,1
|
301,2
|
dépenses de fonctionnement
|
192,8
|
181,3
|
184,5
|
186,2
|
203,9
|
218,1
|
247,7
|
258,1
|
268,3
|
dépenses d'investissement
|
3
|
2,5
|
19,3
|
15,9
|
15,9
|
24,4
|
25
|
29
|
32,9
|
*Santé
|
42,5
|
40,3
|
45,6
|
45,7
|
47,9
|
62,7
|
68,2
|
78,9
|
85,8
|
dépenses de fonctionnement
|
36,3
|
35,6
|
36,7
|
37,1
|
44,5
|
48,6
|
48
|
53,4
|
57
|
dépenses d'investissement
|
6,2
|
4,7
|
8,9
|
8,6
|
3,4
|
14,1
|
20,2
|
25,5
|
28,8
|
*Infrastructure de base
|
114,9
|
115,4
|
87,8
|
101,9
|
84,5
|
133,1
|
146,2
|
174,2
|
221,5
|
dépenses de fonctionnement
|
40,3
|
35,8
|
32,6
|
25,6
|
23
|
22,4
|
24,1
|
23,5
|
11
|
dépenses d'investissement
|
74,6
|
79,6
|
55,2
|
76,3
|
61,5
|
110,7
|
122
|
150,6
|
210,5
|
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD
Ces différentes allocations de l'Etat vers ces secteurs
sensibles sont ramenées sur le PIB dans le tableau 7 suivant :
Tableau 7 : Evolution des ratios
des différentes dépenses sur le PIB en %
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
Dép. sociales/dép. totales
|
38,3
|
38,4
|
38,5
|
39,4
|
30,2
|
33,0
|
35,2
|
36,1
|
39,1
|
édu/PIB
|
6,7
|
6,2
|
6,9
|
6,9
|
5,2
|
4,9
|
4,9
|
4,6
|
4,0
|
santé/PIB
|
1,4
|
1,4
|
1,5
|
1,5
|
1,1
|
1,3
|
1,2
|
1,3
|
1,1
|
infra base/PIB
|
3,9
|
3,9
|
3,0
|
3,5
|
2,0
|
2,8
|
2,6
|
2,8
|
2,9
|
dép. sociales/PIB
|
12,0
|
11,5
|
11,4
|
11,9
|
8,3
|
8,8
|
8,8
|
8,7
|
8,1
|
Variation des dép.sociales
|
-6,0
|
-3,9
|
-0,7
|
3,8
|
0,7
|
24,4
|
11,1
|
10,9
|
12,6
|
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD
La part des dépenses sociales dans les dépenses
totales de 1990 à 1993 a représenté en moyenne 38,6%.
Cette part est tombée en 1994 à 30,2% pour remonter à
partir de 1996, à 35,1% puis à 36,1% en 1997 pour
s'établir en 1998 à 39,1% (légèrement
supérieur au taux de la période 1990 - 1993). De 1990 à
1998, le niveau des dépenses sociales a quasiment doublé en
passant de 353,2 milliards à 608,4 milliards. Dans le même temps,
les dépenses totales ont également connu une évolution
importante de +68,7%. Parallèlement, à la faveur de la
dévaluation du franc CFA en 1994, le PIB nominal a plus que
doublé pour se situer à 7541 milliards en 1998 contre 2940,3
milliards en 1990. L'évolution du PIB a une amplitude plus forte que
celle des dépenses sociales. Bien qu'en nette évolution, la part
des dépenses sociales dans le PIB a ainsi été
réduite passant de 12,0, % en 1990 à 8,1% en 1998.
.
Graphique 6 : Evolution
du PIB et des dépenses sociales
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD
La part des dépenses d'éducation, de
santé et d'infrastructures représente respectivement 56,0%, 13,5%
et 30,5% des dépenses sociales.
Concernant les dépenses d'éducation, trois sous
périodes se dessinent. De 1990 à 1991, le ratio dépenses
d'éducation sur PIB a été en moyenne de 6,4%. Une
légère remontée du ratio en 1992 et 1993 avec un effort de
stabilité (4,7% en moyenne), de la part du gouvernement, sur les deux
années. Contrairement aux dépenses sociales qui ont doublé
de 1990 à 1998, les dépenses effectuées dans le domaine de
l'éducation, ont lentement évolué tandis que le PIB a
pratiquement doublé. Le niveau des dépenses d'éducation
est passé de 195,7 milliards en 1990 à 301,2 milliards en 1998,
soit +53,9%. En valeur nominale, les dépenses d'éducation
croissent régulièrement depuis 1994. Cette croissance est
consécutive à la dévaluation du franc CFA (effets
d'accompagnement). Les dépenses de fonctionnement dans le secteur de
l'éducation ont une proportion importante. Elles représentent en
moyenne plus de 90% des dépenses d'éducation, alors que les
dépenses d'investissement ne représentent en moyenne que 10% du
total des dépenses d'éducation. Toutefois, les dépenses
d'investissement ont pratiquement été multipliées par 11
entre 1990 et 1998, en passant de 3 milliards à 32,9 milliards.
La part des dépenses de santé dans le PIB se
situe entre 1% et 1,5%. Cette proportion a peu varié entre 1990 et 1998
avec des taux respectifs de 1,4% et 1,1%. Cependant, les dépenses de
santé ont tout de même été multipliées par 2
avec un niveau de 85,5 milliards en 1998 contre 42,5 milliards en 1990. Les
dépenses de santé ont donc connu un accroissement continu.
L'action combinée de la hausse des dépenses de
fonctionnement et d'investissement a induit une augmentation des
dépenses de santé. En effet, les deux composantes des
dépenses de santé croissent depuis 1994. Les investissements,
alors qu'ils s'établissaient entre 3 et environ 9 milliards de 1990
à 1994, passent à la faveur de la dévaluation à
deux chiffres en 1995 avec 14,1 milliards de franc CFA. Les taux de croissance
des dépenses d'investissement sont supérieurs à ceux des
dépenses de fonctionnement. Néanmoins, avec près de 23%
ils représentent la composante la plus faible des dépenses de
santé, dominées par les dépenses de fonctionnement (77%).
Les dépenses d'infrastructures représentent en
moyenne 30,5% des dépenses sociales. C'est la deuxième composante
après celle des dépenses d'éducation dans les
dépenses sociales. Le ratio moyen des dépenses d'infrastructures
sur le PIB est de 3,6% (1990-1994). Ce ratio est tombé à 2% en
1994 pour s'établir en moyenne autour de 2,8% sur la période
1995-1998. Comme les deux premières analyses, la baisse des proportions
n'est pas liée au recul des dépenses d'infrastructure qui ont
plutôt accru de près de 93% entre 1990 et 1998. Contraire à
la position qu'occupent les investissements dans l'éducation et la
santé, les dépenses d'investissement dans le domaine des
infrastructures sont plus importantes que celles de fonctionnement. Elles
représentent en moyenne 79,7% sur la période sous revue contre
20,3% pour les dépenses de fonctionnement. Le montant de 74,6 milliards
en 1990 a été presque triplé en 1998 (210,5 milliards),
tandis que les dépenses de fonctionnement régressaient de 30
milliards, soit un recul d'environ 72,7%. Ainsi, au fur et à mesure que
les dépenses d'investissement croissent les dépenses de
fonctionnement diminuent dans les infrastructures de base.
Il ressort de ces analyses descriptives que les
dépenses sociales ont une proportion faible par rapport aux
dépenses publiques. Pis, selon la Banque Mondiale, les dépenses
publiques consacrées à l'éducation et à la
santé ont diminué en 2002 où on assiste plutôt
à un accroissement des dépenses militaires. Pour 50% des
dépenses prioritaires destinées aux secteurs sociaux, il a
seulement été observé un taux d'exécution de 42%,
tandis que les dépenses militaires passaient de 8,7% à 10% des
dépenses prioritaires.
En définitive, l'analyse des dépenses sociales
et du PIB a montré que pour l'éducation et la santé, les
dépenses de fonctionnement sont supérieures aux dépenses
d'investissement ; ce qui n'est pas le cas pour la rubrique des
dépenses d'infrastructures. Au niveau des dépenses sociales, nous
avons presque un doublement de sa valeur entre 1990 et 1998,
phénomène aussi constaté pour le PIB nominal. Au fur et
mesure que le niveau du PIB augmentait, à partir de 1995, le constat est
que les dépenses sociales aussi augmentaient. Il pourrait donc
s'établir une corrélation entre les dépenses sociales et
le PIB. Le graphique 7 résume l'évolution des différents
postes des dépenses sociales.
Graphique 7 : courbes des dépenses
sociales et de ses composantes
Source : Département des
Études Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD
b) Incidence des dépenses sociales sur le PIB par
habitant
Le PIB/tête est un indicateur de mesure de la
redistribution des richesses créées à la population. Cela
dit, il est le rapport du PIB nominal sur le nombre total d'habitant d'un
pays.
Tableau 8 : évolution du PIB par
tête en milliers de FCFA
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
Dépenses sociales
|
en mds
|
353,2
|
339,5
|
337,1
|
349,8
|
352,2
|
438,3
|
487,1
|
540,2
|
608,4
|
(%)
|
-6,01
|
-3,88
|
-0,71
|
3,77
|
0,69
|
24,45
|
11,13
|
10,90
|
12,62
|
PIB par tête
|
en milliers
de FCFA
|
277,8
|
267,19
|
266,53
|
255,88
|
250,41
|
257,28
|
376,4
|
407,7
|
427,2
|
(%)
|
4,95
|
-3,82
|
-0,25
|
-4
|
-2,14
|
2,74
|
39,30
|
8,32
|
4,78
|
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD
L'évolution du PIB/tête se décompose en
deux sous période : 1990-1994 et 1995-1998. Une baisse du niveau de
revenu des populations est constatée sur l'intervalle 1990-1994, suivie
d'une remontée à partir de 1995 jusqu'en 1998. La baisse du
PIB/tête est caractérisée par des taux de croissance
négatifs avec une plus forte régression en 1993 de -4%. Le
même recul est manifeste au niveau des dépenses sociales. En effet
de 1990 à 1992 les variations sont de -6,01%, -3,88% et -0,71%.
L'analyse montre une baisse continuelle des dépenses sociales de 1990
à 1992, ainsi qu'une baisse du PIB/tête de 1990 à 1994. A
priori, il n'existerait pas de lien entre les dépenses sociales et le
PIB/tête. Toutefois, une corrélation positive s'établit
entre ces deux indicateurs à partir de 1995.
L'amorce de la remontée des taux de croissance se fait
pour les dépenses sociales en 1993 et pour le PIB/tête en 1995. La
reprise à la hausse de ces deux postes coïncide avec l'augmentation
du PIB nominal. Le taux de croissance moyen du PIB/tête est 11,7% avec un
maximum de +39,3% en 1996. Le PIB par tête qui est de 250 410 en 1994
passe à 427 200 francs CFA en 1998, un gain de 70,6%. Le doublement
presque du PIB nominal (cf. tableau 6) à partir de 1994 et 1995 a
conduit à un réajustement à la hausse du PIB/tête,
et une amélioration des dépenses sociales. Une illustration des
chiffres est résumée par le graphique 8 ci-dessous.
Graphique 8 : évolution des
dépenses sociales et du PIB / tête
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD
Ce graphique permet de voir que l'accroissement des
dépenses sociales s'est accompagné d'une amélioration du
PIB/tête.
c) Incidence des dépenses sociales sur la
consommation des ménages
La consommation des ménages est un indicateur
économique qui renseigne sur les conditions de vie des ménages.
Les achats et les dépenses en biens et services (nourriture,
santé, éducation, etc.) des ménages forment la
consommation des ménages. Le tableau n°9 ci-après en donne
une idée générale :
Tableau 9 : Evolution des variations de la
consommation des ménages et des dépenses sociales
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
Dépenses sociales
|
353,2
|
339,5
|
337,1
|
349,8
|
352,2
|
438,3
|
487,1
|
540,2
|
608,4
|
-
|
-
|
-
|
Cons. des ménages en mds
|
2 007,6
|
2 067,7
|
2 088
|
2 065
|
1 869
|
2 047
|
2 185
|
2 298
|
2 411
|
2 435
|
2 119
|
2 100
|
Variation dép. sociales
|
-6,01
|
-3,88
|
-0,71
|
3,77
|
0,69
|
24,45
|
11,13
|
10,90
|
12,62
|
-
|
-
|
-
|
Variation cons. Des ménages
|
-1,99
|
2,99
|
0,98
|
-1,10
|
-9,49
|
9,52
|
6,74
|
5,17
|
4,92
|
1,00
|
-12,98
|
-0,90
|
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD, compte de la Nation
(INS)
Une analyse du tableau 9 montre une évolution en dents
de scie des deux agrégats économiques. Quatre phases
caractérisent la consommation des ménages, à savoir deux
phases de recul (1993-1994, 2000-2001) et deux autres phases de remontée
(1990-1992, 1995-1998) de cet indicateur économique. Le graphique 9
permet de voir ces quatre phases.
Graphique 9 : Courbes d'évolution
de la consommation des ménages et des dépenses
sociales
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD, compte de la Nation
(INS)
La première phase allant de 1991 à 1994 indique
une contraction de la consommation des ménages (consommation
privée) entre avec des niveaux respectifs de 2 065 milliards à 1
869 milliards, soit un recul effectif induit de -9,5%. Pendant que la
contraction est observée pour la consommation des ménages, les
dépenses sociales augmentent, passant de 349,8 milliards à 352,2
milliards, soit une croissance moyenne de plus de 2%. En outre, pour le second
recul observé entre 2000 et 2001, la consommation des ménages
régresse de près de 1%. Cette sous période voit la
consommation passer de 2119 milliards à 2100 milliards de francs CFA. Le
plus fort recul de l'activité de consommation des ménages est
celui de 2000 (-12,98%). Le phénomène contraire est
observé sur la période allant de 1994 à 1999 où les
dépenses des ménages ont connu une augmentation
régulière de 4,5% en moyenne par an.
A côté de ces reculs, il a été
noté des sous périodes de croissance de la consommation des
ménages. L'augmentation de la consommation des ménages est faite
sur de plus grands intervalles de temps. En effet, elle s'étale sur 8
ans entrecoupés par les reculs qui durent quatre ans. Sur l'année
1991, une croissance de 2,99% est observée. Le mouvement se poursuit en
1992 avec un taux de croissance de 0,99%. De 1990 à 1992, la
consommation passe, de 2 007,6 milliards à 2 088 milliards de francs
CFA, avec une valeur intermédiaire en 1991 de 2 067,7 milliards francs
CFA. L'évolution des dépenses sociales et celle de la
consommation des ménages sont illustrées dans le graphique 10.
Il n'en est pas de même pour l'évolution des
dépenses sociales sur le même intervalle, où elles varient
négativement de 6,01% en 1990 et 3,9% en 1991. L'augmentation des
dépenses sociales intervient en 1993, coïncide avec la
période de recul de la consommation des ménages avec plus de 3%
de croissance. La croissance de la consommation des ménages est aussi
manifeste sur l'intervalle 1995-1999. Le fort taux est celui de 1995 (9,52%)
qui est aussi l'année où les dépenses sociales connaissent
leur plus forte hausse (24,45%). Avec 2 275,2 milliards, la moyenne de la
consommation des ménages sur les années 1995-1999, est
supérieure à celles des autres périodes (2 054,4 entre
1990 et 1992, 1 907 milliards entre 1993 à 1994 et 2 104,5 milliards
entre 2000 et 2001). La croissance moyenne est de 5,47% entre 1995-1998. Sur
les mêmes périodes respectives, les moyennes sous
périodiques des dépenses sociales donnent 343,3, 351 et 518,5
milliards. La moyenne des dépenses sociales la plus élevée
est observée entre 1995 et 1998 comme pour la consommation des
ménages.
Graphique 10: Evolution de la consommation des
ménages et des dépenses sociales
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD, compte de la Nation
(INS)
La croissance des postes (dépenses sociales,
consommation des ménages) augmentent de façon
régulière depuis 1995, elle suit l'évolution du PIB. Les
différents indicateurs économiques subissent tous des
augmentations depuis 1995, améliorant leur taux de croissance.
L'amélioration des dépenses sociales et des indicateurs
économiques comme l'indique le graphique n°11 démontre de la
portée de cette catégorie de dépenses.
Graphique 11 : courbes des
dépenses sociales et des indicateurs économiques
Source : Département des Études
Économiques et Financières (DEEF)/ BNETD, comptes de la Nation
(INS)
2) Incidence des dépenses sociales sur les
indicateurs sociaux
L'incidence sera démontrée sur les Indicateurs
du Développement Humain, du Sexospécifique du
Développement Humain et de Pauvreté Humaine
a) Incidence des dépenses sociales sur
l'IDH
L'indicateur du développement humain (IDH), comme
évoqué plus haut comprend trois variables: l'espérance de
vie, le niveau d'éducation (mesuré d'une part, par le taux
d'alphabétisation des adultes, et d'autre part, par le taux
combiné de scolarisation dans le primaire, le secondaire et le
supérieur) et le niveau de vie d'après le PIB réel
corrigé par habitant (exprimé en parités de pouvoir
d'achat).
Au total, l'IDH mesure les progrès accomplis par un
pays ou une communauté dans son ensemble. L'IDH varie entre 0 et 1 :
plus il est proche de 1, plus le pays se situe à un niveau de
développement humain élevé. Les pays d'Afrique
subsaharienne ont en moyenne un IDH 2,4 fois inférieur à celui
des pays les plus avancés. Au sein des pays d'Afrique subsaharienne
l'IDH varie lui-même du simple au double (PNUD, 2000). Son
évolution entre 1990 et 2001 en Côte d'Ivoire est donnée
par le tableau 10 ci-après :
Tableau 10 : Evolution de l'indicateur de
développement humain en Côte d'Ivoire
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
IDH
|
0,393
|
0,311
|
0,365
|
0,286
|
0,370
|
0,341
|
0,357
|
0,368
|
0,368
|
0,422
|
0,420
|
0,426
|
Var. dép.
sociales
|
-6,01
|
-3,88
|
-0,71
|
3,77
|
0,69
|
24,45
|
11,13
|
10,90
|
12,62
|
|
|
|
Source: Rapport mondial sur le développement
humain, 1996 à 2001, PNUD
Les données ci-dessus montrent que de 1990 à
2001, l'IDH en Côte d'ivoire n'a pas passé la barre des
0,5 qui aurait permis au pays d'être situé dans
la catégorie des pays à Indice de Développement Humain
moyen.
Une observation de l'évolution de l'IDH montre une
évolution figée dans un intervalle allant de 0,2 à
0,43.
La période 1990-1991 voit une baisse de l'IDH qui passe
de 0,420 à 0,311 avec un retrait des dépenses sociales de
3,88%.
Une amélioration de l'IDH en 1992 est constatée.
Les dépenses de l'année ont connu une légère (par
rapport à l'année) augmentation permettant ainsi une certaine
amélioration de l'accès des populations aux services sociaux de
base (éducation, santé, infrastructures).
Le recul en 1993 de l'IDH est accompagné d'une hausse
des dépenses sociales. Cette baisse est due aux conséquences
découlant de la crise économique et à la
surévaluation du franc CFA, voilant du coup les effets attendus de
l'augmentation des dépenses sociales sur l'IDH. La forte hausse des
dépenses sociales, de l'année 1993 cumulée à celles
de 1994 avec la reprise de la croissance, va faire remonter le niveau de l'IDH,
passant alors de 0,286 à 0,370. Le tableau 13 en donne une illustration
parfaite.
L'IDH régresse en 1995 nonobstant la hausse de plus de
24,4% des dépenses sociales. Cette dégradation du niveau de vie
est sans nul doute le fruit des effets pervers de la dévaluation (les
mesures d'accompagnement n'ayant pas atteint un niveau satisfaisant).
Une forte période de croissance de l'IDH fait suite au
recul de l'indice de 1995. Sur quatre ans (1996-1999), il est observé
une amélioration de cet indice. L'IDH connaît sa plus forte valeur
sur cette période, en 1999 avec un indice de 0,422. Sur la
période, 1996-1998, une augmentation des dépenses sociales est
manifeste avec des taux de variations élevés. En terme nominal,
les dépenses sociales et l'IDH seraient liés.
Les années 2000 et 2001 marquent une rupture par
rapport à la sous période précédente. Ces
années sont celles à partir desquelles, le pays connaît une
instabilité socio-politique qui dégrade les conditions de vie des
populations.
L'IDH, à l'époque était
considéré comme le meilleur indicateur, utilisé pour avoir
le niveau réel de vie des populations fait aujourd'hui l'objet de
nombreuses critiques. Ces critiques ont motivé le développement
de nouveaux indicateurs humains dont l'ISDH et l'IPH-1.
Pourquoi retenir trois dimensions seulement?
- Les variables choisies pour mesurer les dimensions
sont-elles pertinentes ? Et pour chaque dimension, les variables
associées sont-elles trop ou pas assez nombreuses ?
- Les mesures effectuées sont-elles sujettes aux
erreurs d'estimation, et dans l'affirmative ces erreurs faussent-elles les
résultats obtenus ?
- Le choix du minimum et du maximum est-il justifié ou
bien arbitraire ?
- Quelle est la sensibilité des indicateurs à
des choix différents concernant les maxima et les minima?
- Pourquoi retenir une pondération égale pour
chaque élément ?
- Quelle est la sensibilité du résultat aux
variations de pondération ?
De plus, il s'avère que la méthode de calcul de
l'IDH a été plusieurs fois modifiée notamment en ce qui
concerne la prise en compte du revenu. Il faut se poser aussi la question de la
fiabilité des données. Malgré les réserves et les
critiques que l'on peut adresser à l'IDH, il faut reconnaître que
cet indicateur a le mérite d'exister. Il doit être rapporté
à l'Indicateur Sexospécifique du Développement Humain
(ISDH) pour être mieux appréhendé.
b) Incidence des dépenses sociales sur
l'ISDH
L'Indicateur Sexospécifique du Développement
Humain (ISDH) évalue les avancées du développement humain
de base corrigées des inégalités entre hommes et femmes.
L'ISDH part de l'IDH, mais tient compte des inégalités
sociologiques entre les sexes.
Tableau 11: Evolution de l'Indice de
Pauvreté Humain et de l'Indice Sexospécifique du
Développement Humain
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
IPH-1 (%)
|
46,8
|
45,8
|
42,9
|
42,3
|
45
|
ISDH
|
0,404
|
0,401
|
0,409
|
0,411
|
0,376
|
Source : PNUD
Le tableau 11 résume l'évolution de l'Indice de
Pauvreté Humaine et de celle de l'évolution de l'Indice
Sexospécifique du Développement Humain.
Plus les écarts touchant les domaines couverts par
l'IDH sont importants, plus l'ISDH du pays considéré est faible
par rapport à son IDH. En fait, l'ISDH est tout simplement un IDH
corrigé en fonction des inégalités entre les sexes.
Ainsi sur les cinq années représentées
dans le tableau au niveau de l'ISDH, nous avons trois sous périodes. Une
baisse de l'ISDH est constatée entre 1997 et 1998, il passe de 0,404
à 0,401, soit un léger recul de 1%. Sur la même
période, une légère contraction du côté des
dépenses sociales se ressent. Une augmentation s'opère chaque
année jusqu'en 2000, passant de 0,401 à 0,411 entre 1998 et
2000, avec une valeur intermédiaire de 0,409 en 1999.
L'amélioration de cet indice démontrerait de la
qualité des dépenses sociales qui ont été plus ou
moins orientées dans un contexte de crise. Les conséquences de
l'instabilité socio-politique se font ressentir à partir de
l'année 2001 avec un indice de 0,376.
c) Incidence des dépenses sociales sur
l'IPH-1
Par la suite, le Rapport mondial sur le
développement humain 1997 a lancé le concept de
pauvreté humaine, exprimé par une nouvelle mesure à
plusieurs composantes, l'Indicateur de la Pauvreté Humaine (IPH), qui se
concentre sur les déficits et les manques dans ces mêmes
éléments.
« Un indicateur de la pauvreté humaine (IPH)
mesure la misère dans quatre grands aspects de la vie humaine : la
capacité de vivre longtemps et en bonne santé, le savoir, les
moyens économiques et la participation à la vie sociale. Ces
aspects de la misère sont les mêmes pour tous les pays, qu'ils
soient industrialisés ou en développement. Seuls les
critères les mesurant varient, pour tenir compte des différences
dans les réalités de ces pays et en raison des limites que posent
les données» (PNUD, 1997).
Le PNUD a donc conçu deux versions de l'IPH : l'IPH-1
pour les pays en développement et l'IPH-2 pour les pays
industrialisés.
L'analyse des données chiffrées de L'IPH-1
montre une baisse continuelle de cet indice de 1997 à 2000. les chiffres
montrent que les efforts déployés pour endiguer la
pauvreté ont eu un commencement de résultats tangibles, puisque
de 46,8 % en 1993 cet indice a reculé pour atteindre 42,3% en 2000, soit
une baisse de près de 5 points. Cette dynamique acquise dans la lutte
contre la pauvreté est rompue à partir de 2001 avec une hausse de
2,7% du niveau de pauvreté par rapport à 2000. La situation de
guerre, ayant contrarié les projets du gouvernement, va entraîner
un redéploiement des ressources budgétisées pour les
secteurs sociaux au secteur de la défense nationale.
Lorsqu'une augmentation des dépenses sociales
intervient et que cela ne se répercute pas sur les indicateurs
socio-économiques, les chocs exogènes en sont la cause. Les
indicateurs de développement humain sont influencés par les
dépenses sociales. De l'analyse descriptive, il ressort que les
dépenses sociales (investissements dans les secteurs sociaux) influent
positivement sur les indicateurs économiques et sociaux.
d) Incidence des dépenses sociales sur la
pauvreté
L'analyse est faite avec le ratio dépenses sociales/PIB
et l'évolution du niveau de la pauvreté. Les informations sont
résumées dans le tableau ci-dessous :
Tableau 12 : Evolution de la
pauvreté et des dépenses sociales/PIB
|
1985-1988
|
1993
|
1995
|
1998
|
Dépenses sociales/PIB
|
11.0
|
11.9
|
8.8
|
8.1
|
Pauvreté (%)
|
53.0
|
-29.6
|
13.9
|
-8.7
|
Source : DEEF/BNEDT,
INS, GROOTAERT (1996)
Les valeurs de la pauvreté sont des taux de croissance.
Au niveau de la pauvreté, deux variations à la hausse (1985-1988
et 1995) et deux autres variations à la baisse (1993 et 1998) se
manifestent. Concernant la pauvreté, un taux de croissance
négatif signifie une amélioration, soit une relation
négative entre la pauvreté et le bien-être de la
population. Le graphique nous montre que la plus forte croissance a
été enregistrée sur 1985-1988, ce taux de 53% a comme
conséquent une aggravation du niveau de vie des populations dans la
période de crise des années 1980. Le poids des dépenses
sociales dans le PIB est faible sur la période. En revanche, en 1993, on
assiste à une amélioration du ratio qui passe de 11% à
11,9% en 1993. Cette amélioration du ratio fait suite à une
baisse de 29,6% du niveau de pauvreté qui est le niveau le plus bas sur
le graphique. Quand, en 1995, les dépenses sociales/tête chutent
de plus de 26%, une augmentation de la pauvreté est remarquée
(une résurgence). La baisse du ratio est due aux effets de la
dévaluation qui ont accéléré le PIB qui a
pratiquement doublé en 1994 alors que l'augmentation du niveau des
dépenses sociales n'a pas suivi celle du PIB. En 1998, un effort du
gouvernement a été fait pour stabiliser le ratio, entre 1995 et
1998, les dépenses sociales se sont améliorées de 38,8%.
Cette hausse du ratio est remarquée en 1998, année où la
seconde baisse du niveau de la pauvreté a été
constatée, le taux de croissance passe donc de 13,9 à -8,7%.
L'allocation de fortes ressources dans le domaine sociale a
toujours été couplée à une amélioration de
la qualité des populations et donc par conséquent à une
réduction de la pauvreté.
Graphique 12 : Evolution de la
pauvreté et des dépenses sociales/PIB
Source : DEEF/BNEDT, INS, GROOTAERT (1996)
Après avoir fait l'analyse de la politique
budgétaire et vu sommairement l'incidence des dépenses sociales
sur les indicateurs socio-économiques, l'analyse
économétrique de l'impact des dépenses sociales
(éducation, santé et infrastructures) sera menée au
prochain paragraphe.
Chapitre 3 : ANALYSE
ECONOMETRIQUE
Ce chapitre vise, comme annoncé au chapitre 1, à
juger des comportements et de la pertinence des effets des dépenses
sociales sur les indicateurs socio-économiques choisis.
3.1) LES ESTIMATIONS
ECONOMETRIQUES
Plusieurs modèles seront abordés pour cerner les
différents impacts de nos variables exogènes (dépenses
sociales) sur les variables endogènes (PIB, PIB/tête, consommation
des ménages et l'IDH). L'approche ici se fera en général
avec le modèle de KOYCK qui permet de capter les effets de court et long
terme. Nous testerons donc toutes les variables exogènes avec chacune
des variables endogènes prise isolement.
3.1.1) Présentation des
résultats des estimations
1) Le PIB
Les dépenses sociales ont été
estimées avec le PIB. Le modèle (1) donne:
LPIBt=
-1,99+0,183*LDSOCt+0,980*LPIBt-1
(1,26) (0,93) (8,74)
(1)
R2=0,92 DW=1,52 Prob
(F)=0,0000
Le résultat montre qu'il y a une relation positive
entre le PIB et les dépenses sociales. Cependant, la statistique de
student des dépenses sociales n'est pas significative. Ainsi, à
court terme les dépenses sociales ont un impact non significatif sur le
PIB. Toutefois, il existe une relation de long terme entre les dépenses
sociales et le PIB. L'élasticité de long terme des
dépenses sociales est de 1,18 ; ce qui est supérieur
à l'élasticité de court terme qui est de 0,183. Les
dépenses sociales ont donc un impact plus important à long terme
sur le PIB qu'à court terme.
Les modèles suivants consistent à
vérifier l'impact des dépenses d'éducation, de
santé et d'infrastructure sur l'évolution du PIB.
LPIBt=
-1,24+0,24*LEDUt+0,89*LPIBt-1
(-0,91) (1,01) (4,64)
(2)
R2=0,89 DW=1,33 Prob
(F)=0,0000
LPIBt=
0,33+0,27*LSANTt+0,79*LPIBt-1
(0,27) (1,58) (4,35)
(3)
R2=0,93 DW=1,77 Prob
(F)=0,0000
LPIBt=
-0,89+0,002*LINFRAt+1,06*LPIBt-1
(-0,64) (0,30) (15,18)
(4)
R2=0,92 DW=1,52 Prob
(F)=0,0000
Les modèles (2), (3) et (4) montrent les signes
attendus. Les variables exogènes sont toutes liées positivement
au PIB, mais leur impact dans le court terme est insignifiant (exception faite
des dépenses de santé). Le cas particulier du coefficient des
dépenses d'infrastructures est très faible, ce coefficient
ramené au centième près donne 0. En effet à long
terme, l'élasticité des dépenses d'infrastructures est
négatif - 0,03, les dépenses d'infrastructure n'évoluent
plus dans la même direction que le PIB. C'est tout le contraire des
autres dépenses d'éducation et de santé qui à long
terme deviennent plus importantes, avec des élasticités
supérieurs à 1 (PIB/édu=2,18,
PIB/sant=1,29) donnent un impact significatif sur le PIB.
Le modèle (5) quant à lui prend en compte les
dépenses dans les secteurs de l'éducation, de la santé et
des infrastructures. Il donne des coefficients positifs (relations donc
positives entre les variables exogènes et le PIB) et significatifs pour
l'éducation et la santé et non significatif pour les
infrastructures.
LPIBt=
1,23+0,56*LEDUt+0,08*LINFRAt+0,57*LSANTt
(0,58) (2,98) (0,11)
(3,27)
(5)
R2=0,83 DW=1,45
Prob (F)=0,0000
2) Le PIB/tête
L'estimation économétrique du modèle
considérant les dépenses sociales comme facteurs explicatifs du
PIB/tête donne les résultats qui suivent :
LPIBTt=
3,62-0,21*LDSOCt+0,088*LPIBTt-1
(2,65) (-2,14) (6,95)
(6)
R2=0,71 DW=1,19 Prob
(F)=0,0000
Les statistiques de student sont significatives. Mais, le
signe attendu des dépenses sociales n'a pas été obtenu. Le
modèle indique qu'à court et long terme une hausse des
dépenses sociales entraînera une baisse du PIB par tête
d'habitant.
Les modèles suivants prennent en compte la
décomposition des dépenses sociales, afin de cerner les
catégories (prises individuellement) qui donnent cette relation
négative entre les dépenses sociales et le PIBT.
LPIBTt=-1,01+0,17*LDSOCIt+0,1*LSOCF+0,63*LPIBTt-1
(-0,55) (1,98)
(0,80) (2,96)
(7)
R2=0,74 DW=2,04 Prob
(F)=0,0000
LPIBTt=-0,77+0,08*LEDUt+0,96*LPIBTt-1
(-0,79) (1,14) (12,90)
(8)
R2=0,92 DW=2,19 Prob
(F)=0,0000
LPIBTt=-1,09+0,16*LSANTt+0,89*LPIBTt-1
(-1,07) (2,80) (7,63)
(9)
R2=0,75 DW=2,13 Prob
(F)=0,0000
Les modèles (7), (8), et (9) montrent tous des
relations positives avec la variable endogène et les variables
exogènes. Les dépenses sociales de fonctionnement et
d'investissement (modèle (7)) ont un effet positif sur le PIBT.
Cependant, l'effet est plus significatif pour les dépenses sociales
d'investissement et il ne l'est pas pour les dépenses sociales de
fonctionnement.
Les modèles (8), et (9) permettent d'apprécier
une relation positive entre les dépenses d'éducation et le
PIB/tête d'une part, et les dépenses de santé et le
PIB/tête d'autre part. Le coefficient des dépenses
d'éducation n'est pas significatif. Par contre, celui des
dépenses de santé est significatif. Toutefois dans le long terme,
les dépenses d'éducation ont un impact plus important que les
dépenses sociales sur le PIBT. Avec des élasticités de
long terme respectives de 2 et 1,45.
Le modèle (10) combine les dépenses
d'éducation, de santé et d'infrastructures pour
l'appréciation des effets d'ensemble des variables explicatives.
LPIBTt=4,12+0,39*LINFRAt+0,28*LSANTt-0,49*LEDUt
(2,58) (4,52)
(2,14) (-3,47)
(10)
R2=0,69 DW=1,29 Prob
(F)=0,0000
Il montre une relation positive entre les dépenses de
santé, les dépenses d'infrastructures et le PIB par tête
dans le court terme. Le coefficient des dépenses d'éducation est
négatif. L'impact de ces dépenses est significatif pour toutes
les variables.
3) Consommation des ménages
Le modèle (11) donne un coefficient des dépenses
sociales négatif et l'impact n'est pas significatif.
LCONSt=0,47-0,01*LDSOCt+0,99*LCONSt-1
(0,37) (-0,19) (20,77)
(11)
R2=0,96 DW=1,20 Prob
(F)=0,0000
La décomposition des dépenses sociales en ses
composantes essentielles comme précédemment donne, le
modèle (12). Il s'établit une relation positive d'une part entre
les dépenses sociales d'investissement et la consommation, et d'autre
part une relation négative entre les dépenses sociales de
fonctionnement et la consommation. Le court terme donne des résultats
non significatifs
LCONSt=-3,28+1,28*LDSOCFt+0,17*LDSOCIt
(-1,73) (11,23) (1,92)
(12)
R2=0,86 DW=0,46 Prob
(F)=0,0000
LCONSt=-0,23+0,29*LEDUt+0,77*LCONSt-1
(-0,21) (-1,08) (4,20)
(13)
R2=0,94 DW=1,16 Prob
(F)=0,0000
LCONSt=0,23-0,003*LINFRAt+0,99*LCONSt-1
(0,22) (0,05) (20,60)
(14)
R2=0,96 DW=1,18 Prob
(F)=0,0000
LCONSt=0,95+0,28*LSANTt+0,73*LCONSt-1
(1,41) (2,27) (6,13)
(15)
R2=0,97 DW=1,87 Prob
(F)=0,0000
Les modèles (13), (14) et (15) montrent des relations
positives des dépenses d'éducation, et de santé avec la
consommation des ménages. Les coefficients de court terme sont
respectivement 0,29 et 0,28. Le coefficient est négatif pour les
dépenses d'infrastructures. Seules les dépenses de santé
ont un impact significatif à court terme sur la consommation des
ménages. A long terme, les coefficients sont pour la santé 1,04
et pour l'éducation 1,26. A long terme, les dépenses
d'éducation auraient un impact plus important que les dépenses de
santé.
LCONSt=1,01+0,8*LEDUt-0,05*LINFRAt
+0,45*LSANTt
(0,67) (6,02) (-0,99)
(3,65)
(16)
R2= 0,96 DW=1,56
Prob (F)=0,0000
Deux de ces variables (santé et éducation)
montrent des relations positives avec la consommation des ménages tandis
que les dépenses d'infrastructures ne suivent pas la même
évolution que la consommation. Ces résultats tendent à
confirmer les modèles développés plus haut. On peut
néanmoins noter que les dépenses de santé ont un effet
retardé sur la consommation des ménages. Il faut noter un impact
significatif des dépenses sociales de fonctionnement et d'investissement
sur la consommation.
4) IDH
Les modèles (17), (18) et (19) ne présentent pas
de R2 significatif, pour ces trois modèles, les R2
sont inférieurs à 0,60. Ils sont à peine acceptables.
L'effet de court terme des dépenses sociales de
fonctionnement sur l'IDH est positif et significatif, son impact est important,
ce qui est tout le contraire des dépenses sociales d'investissement qui
a un effet négatif.
LIDHt=-17,27+1,62*LDSOCFt-0,35*LDSOCIt
(-3,67) (3,38) (-1,82)
(17)
R2=0,55 DW=2,89
Prob (F)=0,04
Le modèle n'est pas globalement significatif. Les
relations entre dépenses d'éducation, de santé et
d'infrastructures donnent les modèles suivants :
LIDHt=-6,04+0,4*LEDUt-0,55*LIDHt-1
(-2,54) (1,87) (-2,023)
(18)
R2=0,51 DW=2,36
Prob (F)=0,16
LIDHt=-3,83+0,2*LSANTt-0,56*LIDHt-1
(-4,28) (2,60) (-2,49)
(19)
R2=0,57 DW=1,98
Prob (F)=0,049
LIDHt=-4,91+0,24*LINFRAt-0,94*LIDHt-1
(-5,08) (3,51) (-4,20)
(20)
R2=0,71 DW=2,28
Prob (F)=0,019
Tous les coefficients obtenus sont significatifs avec une
significativité plus importante pour les infrastructures et la
santé. Les élasticités de long terme sont de 0,26, 013 et
0,12 respectivement pour l'éducation, la santé et les
infrastructures. L'impact des dépenses d'éducation sera donc plus
important à long terme que pour la santé et les
infrastructures.
3.1.2) Les
interprétations économiques
Les interprétations des modèles
économétriques fonctionnelles, du point de vue économique
seront l'objet de cette partie. Une analyse économique est faite pour
mieux percevoir et comprendre les différentes liaisons existantes entre
nos différentes variables (exogènes et endogènes). De
déterminer les variables significatives qui doivent contribuer à
la réduction de la pauvreté.
1) Le PIB
Il ressort des estimations économétriques que
les dépenses sociales en général ont un effet positif plus
important sur le long terme que sur le court terme. En d'autres termes,
l'amélioration du niveau des dépenses sociales permet une
meilleure valorisation des ressources humaines. L'entretien des ressources
humaines conditionne la qualité de la force de travail qui est l'un des
facteurs capital dans le processus de création de la richesse.
L'éducation et surtout la santé sont donc des secteurs qui
bénéficient de l'allocation de crédits budgétaires.
Les différentes élasticités dans l'éducation et la
santé montrent des effets visibles sur le PIB à long terme. Une
croissance de 1 milliard des variables explicatives entraîne une
augmentation du PIB de 2,18 et 1,29 milliards (modèles (2) et (3)). Par
contre, les dépenses d'infrastructure dans le long terme ont un impact
négatif du fait que toutes les réalisations lourdes ont
été faîtes avant 1978 (deuxième pont, stade
Félix Houphouët Boigny, les immeubles du plateau, etc.).Etant
donné alors que notre base de données commence en 1978, la
faiblesse des réalisations sinon le niveau de plus en plus bas des
dépenses d'infrastructures, induit un effet négatif sur le PIB.
En définitive, l'effet des dépenses sociales est de long terme.
Le secteur prédominant et porteur est l'éducation qui montre un
effet plus important à long terme.
2) PIB/tête
Les estimations économétriques montrent une
relation négative entre les dépenses sociales et le
PIB/tête. Cette relation négative est peut être due soit
à une mauvaise redistribution de la richesse, soit à des
dépenses sociales non productives ou mal orientées.
La décomposition des dépenses sociales en
fonctionnement et en investissement donne un meilleur effet de ces composantes
sur le PIB/tête. Ainsi, les dépenses sociales de fonctionnement et
d'investissement sont positives corrélées au PIB/tête.
Elles deviennent plus importantes sur le long terme ce qui est le contraire des
dépenses sociales prises dans leur ensemble. Les dépenses de
fonctionnement ont un impact beaucoup plus important que les dépenses
d'investissement, d'autant que les dépenses de fonctionnement
comprennent les dépenses de personnel qui accroissent
généralement le revenu des populations.
Isolement, les dépenses de chaque secteur dans les
modèles donnent des impacts plus significatifs positivement. L'impact
des dépenses d'éducation est le plus fort. Elles apportent un
doublement de toute variation des dépenses d'éducation sur le
PIB/tête. Mais, dans la combinaison des variables explicatives, dans une
seule régression (globalement non significative du fait de la faiblesse
de ces données) on a une relation négative dans le court terme
des dépenses d'éducation.
Les résultats du long terme abondent dans le même
sens que ceux sur l'impact du PIB. Les variables exogènes prises
individuellement montrent un impact de long terme plus important sur le
PIB/tête.
3) Consommation des ménages
Les dépenses de fonctionnement de long terme sont
porteuses d'effets significatifs. Elles expliquent la consommation des
ménages. Les dépenses de santé ont un impact plus
important dans le long terme. La santé étant un bien
précieux, on ne peut la repousser ou la négliger comme
l'éducation et les infrastructures. Une grande majorité de la
population bénéficie des prestations sanitaires. Les
dépenses de santé expliquent la consommation des ménages.
L'éducation a une élasticité plus grande que celle de la
santé, mais son modèle n'est pas significatif.
La consommation des ménages est expliquée par
les dépenses d'éducation et de santé ainsi que les
dépenses sociales de fonctionnement. L'éducation et la
santé sont des services auxquels les populations ont accès en
contrepartie, les rémunérations sont comprises dans la
consommation des ménages. Les infrastructures n'expliquent pas la
consommation des ménages car généralement les populations
ne paient pas pour l'accès aux infrastructures (routes, ponts,
hôpitaux, etc.). Même si contribution il y a, elle est
classée dans les calculs dans d'autres secteurs.
4) IDH
L'éducation, la santé, les infrastructures et
les dépenses sociales de fonctionnement sont significatives. Les trois
premières valeurs entrent en ligne de compte pour le calcul de l'IDH.
Ainsi, une amélioration des dépenses dans les trois secteurs
cités a inéluctablement un impact sur l'IDH. Mais à long
terme, les élasticités régressent signifiant sans doute
que ces augmentations ne sont pas correctement dirigées vers les
secteurs cibles.
3.2) RECOMMADATIONS DE
POLITIQUES ECONOMIQUES ET
SOCIALES DE
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE
Le rôle majeur que joue les politiques
économiques et sociales est indéniable. Les politiques
économiques ont pour but de redistribuer la richesse nationale
créée (par ajout de valeur ajoutée) par la création
d'emplois stables et diverses allocations aux populations qui permet une
amélioration de leur bien-être. Les politiques sociales, quant
à elles, proposent la fourniture et l'accès des biens et services
publics (santé, éducation, etc.).
L'absence et/ou l'insuffisance de ces prestations publiques
cause un frein au développement économique et social. Pour mener
un pays au développement, la prise en compte des dépenses
sociales apparaît donc comme une nécessité primordiale dans
le processus d'éradication de la pauvreté. C'est pourquoi nos
recommandations sont axées principalement sur les politiques
économiques et sociales.
3.2.1) Au niveau
économique
Les politiques économiques comprennent les politiques
macroéconomiques et les politiques sectorielles. Les recommandations
visent la réduction des inégalités en dotation de capital
physique et financier. Une intervention particulière doit se faire au
niveau de secteurs cibles qui influencent les conditions de vie des pauvres.
Elle doit permettre aux pauvres de générer des revenus et de
renforcer leur aptitude à l'activité de création de
richesse nationale.
La première politique à mettre en place doit
être celle qui vise la réduction des prix des biens et services
ainsi que les prix de facteurs de production, afin que les plus démunis
puissent plus facilement pourvoir à leurs besoins fondamentaux. Une
réduction des droits et taxes, à l'importation (baisse des prix
de biens et services) et l'exportation (gain de compétitivité),
des facteurs de production permet aux pauvres de participer au processus de
production et d'améliorer la compétitivité de la
production nationale face aux autres économies.
Le déficit de capital financier étant un facteur
limitant pour les pauvres. L'Etat devra mettre en place une politique de
crédits pour les pauvres. Ces crédits permettront aux pauvres de
démarrer des activités lucratives, améliorant ainsi leurs
conditions de vie par de meilleurs revenus. L'octroi de crédit à
des conditions assouplies réduit la pénibilité du travail
manuel. Encourager la création de structures de micro-crédits
pour une réorientation de l'épargne vers les pauvres.
Le secteur agricole est la base de l'économie
ivoirienne, le binôme café-cacao notamment, mais qui renferme une
grande quantité des démunis. Par conséquent, il requiert
une prise en charge particulière. Les recommandations portent sur le
régime fiscal et les contraintes qui entravent le développement
du secteur (vieillissement des plants, manque d'entretien continu, les
barrières à l'accès des terres, etc.). La diversification
des cultures, l'organisation des paysans et l'approfondissement de la
transformation pour une valeur ajoutée plus grande sont des solutions.
La construction et l'entretien des routes et pistes rurales pour
l'écoulement des produits vers les zones déficitaires. Une
subvention des intrants agricoles contribuerait à accroître leur
productivité et réduire la pénibilité du travail.
Toutes ces actions doivent concourir à la formation et à la
création d'emplois.
Les recommandations déjà citées plus haut
ont une orientation sectorielle qui doit être englobées dans un
cadre macroéconomique pour des résultats plus importants. Une
réduction de la fiscalité par exemple, ne doit pas provoquer de
déséquilibres macroéconomiques (inflation, déficit
budgétaire, déficit courant, par exemple). Un suivi du
système de gestion des recouvrements fiscaux est
préconisé.
La prise en compte des besoins des secteurs sociaux dans
l'élaboration du budget doit être effective et beaucoup plus
orientée vers les zones rurales. Une amélioration de la
qualité des dépenses d'infrastructure socio-économiques de
base permet une amélioration des conditions de vie des populations. Un
gros effort de répartition, des dépenses publiques, doit
être fait en fonction des besoins économiques et sociaux.
3.2.2) Au niveau social
Les buts poursuivis par les politiques sociales sont de
permettre un accès et d'améliorer la qualité des services
à une proportion plus grande des populations aux services sociaux de
base.
L'Etat de Côte d'Ivoire essaie de mettre en place un
système social qui devrait permettre à terme la prise en charge
sociale totale des populations (y compris les non pauvres à l'instar de
la France). La recommandation est de procéder à son installation
définitive afin que ses prestations puissent participer à
l'amélioration des conditions de vie des populations. Les filets de
sécurité et les fonds sociaux doivent être
spécialisés pour contenir les effets socio-économiques des
reformes afin de permettre aux démunis de bénéficier des
fruits de la croissance. Le versement d'allocation de chômage
(chômeur qui n'a pas un premier emploi) est préconisé. Une
évaluation de cette catégorie de population doit être faite
pour une efficacité de ces transferts. L'Etat doit revoir à la
hausse le niveau du SMIG.
La construction de plus d'écoles et de centres de
santé est recommandée. La santé est un facteur
déterminant de la qualité de la vie. Aussi les actions suivantes
doivent être menées :
- créer des mécanismes d'orientation de
crédit pour le suivi des actions engagées ;
- réduire les frais de consultation et
d'hospitalisation, redéfinir l'approche du personnel soignant qui
devrait motiver à terme les populations à user des services
offerts ;
- redéployer le personnel soignant dans les zones
assiégées et celles qui sont reculées par la
création et la réouverture de centres de santé ;
- pérenniser la politique du médicament
générique ;
- une prise en charge partielle ou totale des populations dans
la prestation des soins.
Dans le domaine de l'éducation, il faut
améliorer la qualité et l'accès à
l'éducation en :
- replaçant les élèves et
étudiants déplacés de guerre ;
- continuant la politique de l'école gratuite pour tous
et de distribution gratuite des manuels scolaires ;
- construisant des écoles et une autre
université pour le désengorgement des structures existantes.
Un programme de logement doit prendre forme pour doter chaque
ivoirien de logement décent ou mettre en place une politique
d'acquisition de terrain et subventionner les intrants qui participent à
la construction de logements.
L'eau étant source de vie, une politique menée
dans les zones rurales et urbaines permettra de fournir l'eau potable par la
création d'hydrauliques villageoises, par l'acquisition de chaque
ménage d'un compteur d'eau en réduisant les frais liés
à l'abonnement et à l'installation.
Des structures de contrôle doivent être
créées pour contrôler l'exécution effective des
travaux commandés par les autorités. Et de vérifier
l'efficience des dépenses engagées afin d'empêcher qu'une
partie de la population s'approprie les richesses.
CONCLUSION
La présente étude a analysé la politique
budgétaire en la décomposant en plusieurs postes : les
recettes, les dépenses et le déficit budgétaire. Elle a
permis d'appréhender la structuration et l'évolution de ces
postes, l'évolution des allocations aux secteurs sociaux ainsi que leur
incidence sur des indicateurs socio-économiques qui mesurent le niveau
de vie des populations. L'analyse de l'évolution de la pauvreté
à travers les indicateurs socio-économiques met à jour une
hausse de celle-ci. La cause de l'aggravation de la pauvreté est due
à la dégradation du tissu socio-économique.
L'analyse a montré que les dépenses
d'éducation, de santé ont un impact sur les indicateurs de
bien-être et dans une moindre mesure un comportement mitigé
à court et long terme des dépenses d'infrastructures. Et que
généralement, les dépenses sociales de fonctionnement sont
plus porteuses que celles des investissements. Donc une augmentation des
dépenses sociales de base (éducation, santé) permet de
réduire la pauvreté de manière significative. En effet,
une augmentation des dépenses sociales autres que les secteurs
listés, dans cette partie, a un impact léger sur la
pauvreté. L'analyse économétrique montre que les
dépenses sociales ont contribué à la croissance
économique et à améliorer le bien-être des
ménages à travers leur consommation. L'augmentation des
dépenses sociales associée à une dynamique de
l'économie permet d'éradiquer la pauvreté si la
répartition de la richesse est égalitaire.
Pour parvenir à l'objectif d'amélioration des
conditions de vie des populations et de réduction de la pauvreté,
des recommandations de politiques économiques et sociales ont
été suggérées. Des efforts énormes doivent
être consentis pour accroître les dépenses orientées
vers les secteurs sociaux de base. De nouveaux systèmes de gestion du
recouvrement des recettes fiscales ont été mis en place et
doivent être suivis pour une amélioration de leur
efficacité. La mise à disposition de moyens matériels et
immatériels aux populations serait un moyen de circonscrire la
pauvreté et de les associer au processus de production nationale. La
gestion rigoureuse des ressources ne pourrait que maximiser les gains dans la
lutte contre la pauvreté.
Ce présent travail n'a pas la prétention d'avoir
cerné tous les contours de la politique budgétaire dans le cadre
de la lutte contre la pauvreté. Il a été
exécuté dans le but de participer à la grande mobilisation
mondiale contre le nouveau fléau qu'est la pauvreté.
Beaucoup de questions non abordées ici restent ouvertes
telles que la volonté et la stabilité politiques qui font
actuellement défaut au pays. Il s'agit là des facteurs plus ou
moins exogènes à la société et à
l'économie qui ont besoin aujourd'hui d'une plus grande organisation et
d'une gestion plus transparente et plus efficace dans la lutte contre la
pauvreté.
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www.izf.net
www.uemoa.int
www.worldbank.org
* (1) les résultats
escomptés étaient d'atteindre le carré magique de Nicolas
KALDOR, c'est-à-dire les quatre grands objectifs de la politique
à leur niveau idéal : un taux de croissance positif, un taux
d'inflation maîtrisé, un chômage réduire et un
équilibre de la balance des paiements.
* (2) une tentative
d'élaboration de normes standards est en cours. Session
« Expérience de la mise en oeuvre des indicateurs du
développement humain », (German ROJAS IDRAOVO, 2000)
* (3) 118 chefs d'Etat ou de
gouvernement se sont engagés à faire de la lutte contre la
pauvreté, de la réalisation du plein emploi et de l'instauration
d'une société où règneront la stabilité, la
sécurité et la justice, leur suprême objectif.
* (4) Analyse des indicateurs
de santé dans le cadre stratégique de lutte contre la
pauvreté à SAO-TOME e PRINCIPE, Banque Mondiale, 2002.
* (5) un choc
pétrolier est une hausse (baisse) massive et brutale du prix du
pétrole. Les chocs pétroliers résultent de la conjonction
de deux phénomènes, à savoir un déséquilibre
durable et important de l'offre et de la demande ainsi qu'un choc catalyseur.
Les deux principaux chocs ont été enregistrés en 1973 et
1979.
* (3) COGNEAU, MESPLE-SOMPS,
DIAL, 2001
* (4) Sur la base du seuil de
pauvreté respectivement à 75 000 franc par an et par
tête en 1958, 101 340 en 1993, et 144 800 en 1995, le taux de
pauvreté qui était de 10% en 1985 est passé à 32,3%
en 1993 pour s'établir à 36,8% en 1995.
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