WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Du role de la société civile pour une consolidation de la démocratie participative au Sénégal

( Télécharger le fichier original )
par Mamadou Hady DEME
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2008
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

    LISTE DES SIGLES

    AN  Assemblée Nationale

    ANOCI  Agence pour l'organisation de l'OCI

    CESTI  Centre d'Etude des Sciences Techniques de l'Information

    FAL  Font pour l'alternance

    FKA Fondation Konrad Adenauer

    HCA Haut conseil de l'Audiovisuel

    ONEL Observatoire National des Elections

    OSC Organisation de la Société Civile

    PDS Parti Démocratique Sénégalais

    PM Premier Ministre

    PS Parti Socialiste

    RTS Radiodiffusion Télévision Sénégalaise

    SC Société Civile

    INTRODUCTION GENERALE

    Le début des années soixante voyait la plupart des Etats africains accéder à la souveraineté internationale. Cette autonomie est fortement marquée par des bouleversements socio-politiques notamment l'avènement du modèle étatique dans la gestion des sociétés africaines. Ce modèle est un produit importé des sociétés industrielles et une source de violences en Afrique. Fort de ce constat plusieurs conceptions de l'Etat se retrouvent de plus en plus institutionnalisées, et le vocabulaire étatique occupe la sphère sociale. Le concept de démocratie en constitue le plus fréquent dans le discours des nouveaux dirigeants des jeunes Etats. Celui de société civile qui accompagne les transitions démocratiques, occupe aussi une place non négligeable dans ce nouveau vocabulaire politique, à coté d'autre comme la bonne gouvernance ou encore le développement économique et social.

    « Composée de tous les citoyens, et les organisations que ces derniers se sont données librement en marge de l'Etat et de la famille pour conférer d'avantage d'impact social de rationalité, d'efficacité à leurs actions dans la poursuite de leur but personnel »1(*), la société civile occupe une place de plus en plus importante dans l'espace public. Son existence est antérieure aux formes démocratiques modernes. Déjà Hegel la définissait comme le terrain de rencontre d'intérêts contradictoires et de marché c'est-à-dire l'espace sociétal opposé à l'Etat. Là elle renvoie à l'ensemble des citoyens se mouvant en dehors de l'Etat considéré comme société à part. La conception hégélienne retrouve celle de Karl MARX selon qui la société civile serait un ensemble de relations enchâssées dans le marché. Le développement des conceptions de société civile est lié à la tentative de produire une doctrine de l'autogestion en France. La formule devient un emblème la gauche non communiste qui se distingue par son refus d'attribuer un rôle essentiel à la nationalisation des entreprises et par l'attention qu'elle porte aux mouvements sociaux. Cette conception économique élude les autres domaines d'intervention de la société civile. Son champ d'action touche l'espace public et la culture politique.

    Les acteurs qui donnent corps à la société civile se trouvent en dehors de la politique, et sont composés des intellectuels qui figurent en bonne place dans la construction de son hégémonie. Elle est aussi composée de « personnalités ou d'organisations non politiques ou syndicales agissant dans un but non lucratif en matière humanitaire, de droit de l'homme de démocratie et de développement économique, culturel et social. »2(*)

    Les organisations humanitaires comme la Croix Rouge (CR) Caritas, Amnesty International, la RADDHO (Rencontre africaine de défense des droits de l'homme), l'ONDH (membre de la fédération internationale des ligues de droits de l'homme), les ONG, la presse indépendante et les personnalités des professions libérales tels les médecins, les chercheurs, les praticiens du droit constituent une force sociale qui compte de plus en plus au plan national et international. La société civile est caractérisée par l'association volontaire, la base d'une vie autonome au plan organisationnel et expressif. A la fois dépendante et indépendante de l'Etat, la société civile demeure tantôt partenaire du pouvoir politique tantôt source de contre pouvoir en matière de démocratie.

    En Afrique, la conception de la société civile suscite encore de vives polémiques quant à sa position sur le champ politique. Elle est marquée par un problème de conception et de perception parmi les différents acteurs du jeu politique. A cette difficulté de saisir le concept de société civile en Afrique trois grandes questions interpellent le chercheur sur définition de cette notion qui est en vogue dans les démocraties avancées, mais qui connaît un réel problème d'implantation dans les Etats africains aux expériences démocratiques encore faibles. Il s'agit de sa définition, sa réalité et de sa transposition au sud. Sa définition connaît un problème parce que les spécialistes et les chercheurs ne sont toujours pas d'accord sur une définition unique du concept. Les différentes approches renvoient à des considérations particulières selon les spécialistes et leurs expériences, les aires géographiques et réalités politiques. La difficulté de sa réalité et sa transposition est liée à son statut de notion importée, mais aussi symbole d'une démocratie poussée ce qui n'est pas toujours le cas dans le contexte africain.

    Quoique sa définition paraisse problématique, il existe un certain acquis en matière de réflexion sur la société civile, acquis qui s'avère utile dans l'étude des transitions démocratiques et de sa consolidation dans les Etats du Tiers-Monde. Au Sénégal la libéralisation de la vie politique amorcée dans les années 70 puis l'instauration du multipartisme intégral sous Abdou Diouf durant les années 80 apportèrent des changements radicaux dans la vie politique sénégalaise. Ces changements tout comme le développement d'une presse critique et d'associations de défense des droits de l'homme, l'émergence de syndicats et l'institutionnalisation d'élections concurrentielles frayeront la voie à une authentique société civile. Elle a pour fonction :

    De participer pleinement à la promotion d'une citoyenneté active, exigeante et réceptive aux exigences de la modernité politique et ouverte aux conditions de son adoption par des sociétés qui aspirent à y accéder. Elle doit à cet effet, entreprendre des actions résolues de sensibilisation et d'éducation civique favorisant une meilleure gestion du projet démocratique encore captif de la boulimie des politiques3(*).

    Par cette fonction, elle guide les populations à s'approprier les mécanismes de la démocratie participative. Dans ce domaine précis l'engagement de la société civile et son dynamisme sont essentiels. Elle impulse les réformes nécessaires et développe l'expertise indispensable dans la conception des procédures et la conduite des démarches menant à une nouvelle citoyenneté.

    Ce point de vue normatif de la conception d'une société civile authentique et idéale ne se traduit pas toujours dans les pays en voie de développement où les organisations de la société civile sont confrontées à des problèmes de financement. Ne disposant pas toujours des moyens de sa politique, la société civile sénégalaise reste tributaire de la coopération internationale et des conditionnalités des organisations partenaires et de l'Etat. Ici on entend souvent par société civile les ONG et d'autres mouvements sociaux qui leur sont presque connexes et sont pour la plupart des organismes extérieurs au pouvoir politique. Ces structures sont bien souvent impliquées dans la lutte pour la promotion des droits de l'homme, des droits divers et particuliers et de la formation à la culture démocratique.

    Ce n'est pas suffisant pour conclure l'existence à d'une société civile au sens classique du terme. Ces mouvements sont souvent loin de produire une réelle influence dans les sphères du politique et de développer des impacts certains sur la conduite du projet démocratique national. La réalité est que la société civile demeure encore à l'état embryonnaire.

    Nous considéreront dans ce travail que la société civile est composée de l'ensemble des organisations et des réseaux opérant à l'écart des pouvoirs politiques et de l'Etat (exécutif législatif judiciaire), mais collaborent et communiquent avec eux, en vue d'assurer une meilleure gestion du projet démocratique.

    Articuler la problématique de la société civile et démocratie au Sénégal revient à s'interroger si l'existence d'une société civile dynamique est gage d'une démocratie saine ? Existe-t-il de démocratie véritable sans société civile dynamique et engagée ? Étudier la société civile consisterait- il à l'opposer aux politiques, à l'Etat et ses institutions? Souvent remise en question en Afrique il serait souhaite de peindre l'idéale d'une société civile pour les populations africaines, et pour le Sénégal qui a entrepris depuis longtemps l'expérience de la démocratie. La Rencontre africaine de défense des droits de l'homme et le Forum civil seront sans doute les organisations sur lesquelles s'appuiera notre analyse.

    L'articulation société civile et démocratie trouve son importance dans le fait que la démocratie est le régime vers lequel tendent la plupart des peuples. Elle permet une meilleure participation des populations dans la gestion des affaires de la cité. Amorcée par les théoriciens du contrat social que sont Rousseau, Hobbes et Locke, la démocratie se consolidera au courant du VIIIe siècle après les Révolution française et anglaise. Elle est fondée sur la liberté individuelle et l'égalité juridique, elle implique le suffrage universel, le pluralisme et le relativisme politique. Selon Jean Leca elle est « caractéristique des sociétés admettant le libre jeu des idées politiques, économiques et religieuses »4(*). Elle existe donc quand se crée un espace politique qui protége les droits des citoyens de la toute puissance des l'Etat. L'avènement de la société civile consacre alors la fin du monopole des partis politique sur la vie publique, la fin de la dialectique pouvoir-opposition et l'avènement d'une force sociale vive. Cette force porteuse des préoccupations des citoyens s'érige comme une opinion publique mure devant le pouvoir en place.

    Il s'agira alors dans ce travail, d'identifier le rôle de cette société dans le processus démocratique, mais aussi dans quelle mesure constitue-t-elle un contre pouvoir et mieux un frein aux dérives institutionnelles. En permettant l'implication des citoyens, la gestion de la chose publique se retrouve au centre d'un nouvel élan en faveur de la démocratisation des prises de décision. Apres un retour sur la genèse de ce mouvement de la société civile, nous analyserons sa transposition au contexte africain et sénégalais et ses différentes composantes en mettant l'accent sur son état embryonnaire. Nous axerons notre réflexion sur le rôle de cette société dans le processus démocratique actuel, son apport dans l'éveil des consciences citoyennes et sa participation au processus électoral et aux transitions démocratiques.

    PREMIERE PARTIE :

    L'EMERGENCE DE LA SOCIETE CIVILE A L'AUBE DES TRANSISTIONS DEMOCRATIQUES

    CHAPITRE I :

    LA SOCIETE CIVILE : UN ACQUIS DEMOCRATIQUE

    Section 1 : La société civile : une notion transposée

    La modernité politique en Afrique est marquée entre autre par la transposition du modèle occidental de mode de gouvernement et de gestion de l'Etat. Ainsi, à l'aube des transitions démocratiques voit-on apparaître en Afrique des organisations de la société civile fortement inspirées du modèle occidental. La société civile en Afrique est fortement marquée par son état embryonnaire qui fait d'elle une spécificité par rapport aux autres démocraties.

    Paragraphe 1 : De l'état embryonnaire de la société civile

    La société civile nous apparaît comme étant faite d'hommes et de femmes, de toutes conditions organisées ou non qui, librement ou sous forme de publics variés, s'engagent en toute responsabilité, face à l'Etat ou à toute autre autorité reconnue, à prendre en charge la quête de solutions de ce qui à leurs yeux et dans la cité constituent des urgences non ou insuffisamment prises en compte. Il va de soi que la société civile ne pourrait éclore que dans un système démocratique où les citoyens expriment librement leur point de vue face à la gestion du pouvoir. Ce type de gouvernement étant nouveau en Afrique, la société civile qui accompagne ces transitions y est encore jeune.

    Elle apparaît donc, comme un processus général d'appropriation, par les peuples et les citoyens d'un pays, organisés en dehors de l'Etat et des autres cadres politiques traditionnels de la politique, c'est-à-dire du droit à la participation à l'activité publique pour la définition et la détermination de leur condition générale d'existence.

    Le fort taux d'analphabétisme en Afrique constitue un frein à l'émergence d'une société civile dynamique, où elle est souvent confondue à la société politique, et à l'Etat. La démocratie qui est une notion transposée dans nos systèmes politiques après les indépendances est la condition première de l'émergence des organisations de la société civile. Cette dernière étant neuve et peu connue n'a pas fini de structurer en Afrique tous ses contours. C'est pourquoi la société civile y éprouve une difficulté d'émergence. Beaucoup de pays africains ont sombré après les années soixante dans des régimes dictatoriaux du fait de l'absence d'organisations de la société civile, et de partis d'opposition.

    Conçue dans les pays de tradition démocratiques solides, le mouvement et l'idéologie qui structurent la société civile y sont inconnus des populations, contrairement aux pays africains dont les expériences démocratiques sont encore faibles. Ces populations sont censées être les avant-gardes et la composante de la société civile.

    Les membres des organisations de la société civile éprouvent donc cette difficulté d'être aperçus et acceptés comme défenseurs des intérêts des citoyens face à la toute puissance de l'Etat. Donc les organisations de la société civile éprouvent une crise de légitimité au sein de la sphère publique. Point de départ de la participation des citoyens à la vie politique, le mouvement de la société civile constitue le fondement de la démocratie, tandis qu'en Afrique et au Sénégal la gestion du pouvoir politique reste à la seule appréciation des politiques. Les populations à la base sont quant à elles, réduites en simples observatrices de l'activité politique, à la limite passives. Dans ces pays où la société civile est encore embryonnaire, la présence des citoyens sur le champ politique n'est remarquable que durant les périodes électorales.

    Après une quarantaine d'années d'existence de l'hégémonie de la démocratie chrétienne, les hommes politiques italiens de tous les partis, ayant une crédibilité dans l'opinion publique, comprenaient que le personnel dirigeant de l'Etat avait besoin d'un sang nouveau, d'où l'appel à la société civile, à des hommes et à des femmes qui n'étaient des professionnels de la politique et avaient la réputation d'être des citoyens et des citoyennes éclairés et intègres. C'est dans cet ordre d'idées qu'émerge la société civile en Afrique au début des années 90.

    .

    C'est le jeu de la démocratie combiné avec celui de la négociation qui, seul, permet à la fois l'expression plurielle de la société civile et l'ajustement réciproque des prétentions contradictoires des différents acteurs de celle-ci engagés chacun dans une dynamique de défense de ce qu'ils considèrent comme leurs droits, leurs intérêts, leurs idéaux moraux. Or dans les pays où l'expression démocratique est encore faible, les gouvernants sont le plus souvent hostiles aux négociations, au dialogue entre les acteurs.

    Pour ce qui est du Sénégal, sa culture politique est un mélange de valeurs et de croyances, compensé par une propension au débat, au jeu politique et par une conception du pouvoir qui repose davantage sur l'interdépendance des acteurs (même si ces relations sont inégales du fait notamment de manque de maturité des organisations des sociétés civiles).

    L'émergence de la société civile est aussi freinée par le fait que les citoyens se trouvent séparés de la sphère politique. Il existe un écart énorme entre les organisations bureaucratiques de l'Etat et la société civile.

    En Afrique et au Sénégal, la classe sociale ne saisit pas toujours son rôle dans la gestion de l'Etat. Bien que la démocratie représentative exige que le peuple délègue ses pouvoirs à ses représentants, censés défendre ses intérêts, les organisations de la société civile participent à l'émergence d'une gestion participative des affaires publiques.

    Paragraphe 2 : le rôle des intellectuels dans l'émergence de la société civile

    La notion de société civile connaît souvent des erreurs de qualification. La plupart des cas ce sont des sujets isolés ou hâtivement organisés qui, spontanément, s'autoproclament « société civile ». Parfois aussi c'est une certaine presse qui, délibérément, baptise un groupe ou une communauté sous la même appellation. La désignation s'applique à un objet flou, une entité collective à configuration vague, en fonction des circonstances d'alliance, d'opposition ou de distanciation par rapport au jeu politique. C'est ainsi qu'il apparaît malaisé de circonscrire avec précision les vrais acteurs de la société civile.

    Gramsci s'est intéressé de prés au rôle des intellectuels dans la société, il se disait notamment que tous les hommes sont des intellectuels, mais que tous n'ont pas la fonction sociale d'intellectuel. La marque première de l'intellectuel est un fait son engagement. Les intellectuels ne doivent pas se limiter à la production de discours comme cela est encore très fréquent au Sénégal, mais ils doivent s'impliquer dans l'organisation de pratiques sociales, y comprise les pratiques politiques. Ces intellectuels organiques ne décrivent pas simplement en fonction des de règles scientifiques, mais expriment plutôt les expériences et les sentiments que les masses ne pourraient pas exprimer par elles-mêmes. La nécessité de créer une culture propre aux travailleurs est à mettre en relation avec l'appel de Gramsci pour un type d'éducation qui permette l'émergence d'intellectuels qui partagent les passions des masses et formant ainsi l'ossature d'une vraie société civile.

    La théorie de l'hégémonie de Gramsci est inséparable de sa conception de l'État capitaliste, dont il dit qu'il dirige par la force et le consentement. L'État ne doit pas être compris comme le seul gouvernement, Gramsci distingue deux grandes parties : la « société politique », lieu des institutions politiques et du contrôle constitutionnel légal (la police, l'armée, le système légal) ; la « société civile », que l'on désigne habituellement comme la sphère privée ou non étatique, et qui inclut l'économie. La première est régie par la force, la seconde par le consentement. Gramsci précise cependant que cette distinction est avant tout conceptuelle et que les deux sphères se recoupent souvent.

    Les intellectuels conçus comme la frange éclairée de la société, constituent le socle de son existence et de sa vitalité. « En s'inscrivant dans une optique positive d'insertion et d'action sociales sous l'égide des droits de l'homme de la personne, de l'Etat de droit, de la démocratie en général, l'intellectuel africain s'engage aussi à s'assurer une certaine représentativité afin de mieux gérer sa condition et finaliser son action » 5(*).

    L'intellectuel sénégalais et africain devra compter avec le symbolisme mystico politique du pouvoir et en même temps trouver une plus large représentativité_ hormis les partis politiques_ dans les associations, clubs, cercle de réflexion ou courant de pensée. Le débat intellectuel, la réflexion devra être au centre des organisations de la société civile. C'est la somme de ces réflexions et de ces débats qui tendront à ramer à contre-courant, si besoin est, de l'Etat en tant qu'instance de décision instance de décision.

    Les intellectuels entrent alors en convergence avec d'autres pôles d'influences sociaux affirmés dans leurs principes apolitiques et jouant un rôle déterminant dans l'équilibre des jeux et des enjeux publics. C'est ainsi que commerçants, artistes et toutes les autres composantes de la société civile classiques peuvent se voir rallier les intellectuels, ce aux fins d'une mise en commun de leur pouvoir d'influence et de leur capacité d'action.

    Par ailleurs, il n'est pas imaginable de réduire la société civile au microcosme des groupes ou individualités instruits, influents sous quelque rapport ou vivant un milieu urbain, avec la constance de n'être pas impliqués dans le jeu politique, comme cela peut être le cas pour les syndicats.

    L'intelligentsia sénégalaise, appelée dès les débuts de la colonisation groupe des « évolués » a contribué à façonner la société civile, porteuse des doléances des populations. Ella a été à l'origine de tout un courant d'idées qui, pour s'être installées dans la contradiction et le conflit, sont devenues une dimension importante de la société et de la culture sénégalaise.

    L'école a joué aussi un rôle important dans la formation de l'intellectuel. La pérennité de la société civile doit passer par une scolarisation à l'école des futurs héritiers Les intellectuels ne sauront être en marge de la composition des acteurs de la société civile. D'ailleurs, c'est dans les pays développés où l'éducation des citoyens a acquis une certaine performance que les organisations de la société civile connaissent un prestige véritable. Ils se distinguent dès lors par leur implication dans le tissu social.

    Section II : Complémentarité entre la societe civile et l'etat

    La société civile ne saurait être opposée de manière constante à l'Etat en tant qu'incarnation du pouvoir politique. Elle n'est pas composée uniquement d'organisations agissant dans un sens opposé à l'Etat. Etablir une barrière entre société civile et Etat ne participe pas à faire ressortir toute la quintessence de la notion de société civile. Ainsi apparaît-elle est d'une comme part partenaire de l'Etat et d'autre part lien entre l'administration centrale et locale et les citoyens.

    Paragraphe I : La société civile, un partenaire de l'Etat

    Le concept de société civile peut revêtir une caractère politique dans la mesure où d'une façon ou d'une autre elle a été référée au pouvoir politique et à l'Etat, d'une manière générale à la sphère politique. Cette connotation politique lui est restée encore aujourd'hui tant au niveau du sens commun qu'à celui des nouveaux théoriciens, la dimension opposition étant privilégiée dans la plupart des cas. Dans le langage courant et populaire l'expression société civile est utilisée par opposition aux politiques dont on estime généralement qu'ils ont fait faillite. Employée dans ce sens, elle a un caractère informel et global.

    D'une façon générale, tant au plan populaire qu'au plan conceptuel et théorique, on insiste surtout sur ce qu'elle a de formel. Elle désigne des associations, ou des groupes organisés. Ceux-ci peuvent être de plusieurs sortes et avoir des objectifs spécifiques, toutefois ils ont en commun de se situer d'une manière ou d'une autre par rapport à l'Etat et d'une manière générale au politique.

    Ces organisations ne sont pas pour autant opposées à l'Etat. La collaboration, le dialogue et la communication entre représentants légitimes du pouvoir et les instances de la société civile sont institutionnalisés et représentent les modalités pratiques et usuelles de règlement de conflit entre les groupes d'intérêt. L'Etat, en tant qu'institutionnalisation du pouvoir, régule les rapports entre les différentes organisations et les rapports entre lui-même et ces organisations.

    Le fait de considérer la société civile comme opposée à l'Etat risque de la dénaturer. Ainsi, l'Etat à son tour, pour asseoir une légitimité et apaiser l'espace social sollicite la société civile plus proche des citoyens que ce dernier, perçu depuis un centre plus ou moins éloigné des réalités des populations surtout celles rurales. Dans ce partenariat l'Etat laisse de vastes domaines de la vie des gens, de sorte que ceux-ci puissent manifester soit pour soit contre ses institutions, afin de promouvoir ensemble à la faveur de l'économie de marché des chances égale de vie.

    Ainsi Gheorghe FULGA précise que « la collaboration entre l'Etat et les organisations non gouvernementales devient ainsi un principe des sociétés démocratiques actuelles, une garantie que le pouvoir prend en considération les intérêts des citoyens et l'agenda réel de la société. » 6(*)

    Les régimes totalitaires, où la mainmise sur l'ensemble des domaines de la vie sociale et sur la vie des individus, sont définis aussi par le fait qu'ils bloquent ou détruisent les formes de manifestation de la société civile. Par contre dans un régime démocratique les rapports entre les deux sphères prennent d'autres formes. Les institutions de l'Etat et les composantes de la société civile collaborent et s'interpénètrent souvent. Cette interpénétration favorise la mise sur pied des institutions de dialogue social.

    Les ressources de la vie associative active au sien de la civilisation moderne, industrielle, diversifient le potentiel participatif des individus dans un espace de complémentarité par rapport à celui de l'Etat.

    La société civile introduit une normativité alternative qui amplifie les sources de cohésion sociale et augmente le registre des choix individuels, en ce qui concerne les modèles du comportement civique et communautaire. La société civile ne peut être ni le résultat d'une syndicalisation des segments sociaux, ni une généralisation de l'esprit syndicaliste contrairement à une certaine perception globale qui tend à l'opposer systématiquement à l'Etat. En tant qu'effort organisationnel interne et construction du milieu civique et communautaire, la société civile est le segment le plus actif et plus responsable du tissu social qui s'affirme par une présence réflexive et une implication conséquente dans l'innovation structurelle et organisationnel de la société humaine.

    Ce rapprochement entre l'Etat et la société civile la différencie des partis d'opposition plus enclins à s'opposer catégoriquement aux tenants du pouvoir. La société civile apparaît comme des structures plus flexibles que les partis politiques ou les syndicats. Notons à ce niveau que l'Etat peut passer par la société civile pour inviter les partis qui lui sont opposés à des débats à caractère national. La société civile peut être collaborateur de l'Etat dans le cadre de la décentralisation, qui appelle à une gestion participative des populations à la base. Son rôle ici peut être perçu dans des campagnes de sensibilisation par rapport au changement institutionnel. En guise d'exemple la société civile sénégalaise a beaucoup sensibilisé les citoyens dans le cadre de la politique de décentralisation.

    Ce rapprochement ce manifeste en outre aussi par une relation entre l'Etat et la société civile. Cette relation a fait l'objet de débats intenses à l'époque, surtout par les orientations libérales qui ont toujours fait valoir la distinction entre les domaines publics et privés. Dans les pays africains et notamment au Sénégal ce rapprochement n'est pas toujours net du fait que les multiples perceptions accordent un statut totalement contestataire à la société civile. Elle est une sorte de négation du politique et de ses acteurs. Il est fréquent de voir une personne se réclamer de la société civile sous le seul argument qu'elle ne partage pas les visions du pouvoir politique.

    La société civile doit aider l'Etat en étant un moteur de développement, mais aussi constituer un lien entre l'Etat et les citoyens.

    Paragraphe II : La Société Civile comme relais entre l'Etat et les citoyens

    Entre les citoyens et le pouvoir central il existe un très grand écart. Cet état de fait est la marque essentielle de la sacralité du pouvoir politique. De cet écart la société civile, la société civile se place comme un lien naturel. Les citoyens font accéder leurs revendications via les organisations de la société civile. Dans un contexte marqué par la faiblesse des partis de l'opposition, ce rôle de relais reste renforcé. Les citoyens qui se détournent de plus en plus des partis et hommes politiques manifestent la volonté de transférer la prise en compte de leurs problèmes aux organisations qui se meuvent en dehors des cadres des partis politiques.

    C'est le rôle que jouent aujourd'hui de nombreuses ONG, des organisations de défense des droits de l'homme.

    L'Etat en revanche est obligé de passer par cette même société civile pour une mise en oeuvre efficace de ses politiques publiques. Quand la loi, instrument légitime et moyen d'action du pouvoir s'avère insuffisante l'Etat fait appel à la société civile comme secours du fait de sa capacité de sensibilisation. Par exemple au Sénégal avec le vote de la loi sur l'excision, les organisations de la société civile ont joué un rôle important dans la campagne de sensibilisation pour arrêter ce phénomène. Bien que la loi interdisant cette pratique soit votée à l'Assemblée nationale et promulguée, la pratique restait toujours dans les contrées les plus éloignées. Ces populations ont trouvé avec les organisations de la société civile des relais qui ont pu sensibiliser sur la portée de la loi et les dangers de la pratique. Deux logiques ont marqué le champ social avec cette loi. D'un coté les mesures contraignantes de la loi, et de d'autre part la puissance persuasive de la société civile.

    La société civile joue un double rôle de régulation de l'Etat et de la société, les acteurs et les cadres organisationnels qui sont les moteurs de cette dynamique pouvant être très variés, mais aussi changer d'une période à une autre. Dans une société en mouvement où le processus de construction de la nouvelle citoyenneté vient à peine de commencer, la société civile doit s'exprimer constamment, investir tous les domaines, les relier à l'activité et à la vie de l'Etat, et faire valoir ainsi la sensibilité des citoyens dans la définition des lois et règles.

    En analysant le concept, l'avocat Ousmane SEYE précise que :

    La société civile doit avoir une définition positive, c'est-à-dire active ; elle doit pouvoir être le relais de cette société qu'elle prétend représenter auprès des pouvoirs publics afin de satisfaire ses exigences, elle doit prendre en charge les exigences de la citoyenneté de la démocratie, et pourquoi pas du développement social, culturel et économique. 7(*)

    Dans ce rôle de relais la société civile doit être mieux structurée. La spécificité des sociétés civiles africaines c'est la multiplicité de leurs organes. Les pouvoirs trouvent difficilement l'interlocuteur devant servir de relais auprès des citoyens. Cet état de fait participe à affaiblir les organisations de la société civile qui manquent parfois de synergie dans leurs démarches et leurs combats.

    Les deux parties trouvent leur compte dans ce partenariat. D'une part l'Etat en sollicitant l'appui des organisations de la société civile mais preuve d'efficacité dans sa politique, et a plus de crédibilité aux yeux de la communauté internationale. D'autre part, la société civile renforce sa présence sur le terrain politique, ce qui participe à consolider sa crédibilité au niveau national.

    CHAPITRE DEUXIEME :

    LES AMBIGUITES DE POSITIONNEMENT DE LA SOCIETE CIVILE PAR RAPPORT AU POLITIQUE

    SECTION I : LES DOMAINES D'INTERVENTION DE LA SOCIETE CIVILE

    La vague de démocratisation des sociétés africaines, le triomphe sans cesse du libéralisme, a permis aux organisations de la société civile d'agir sur plusieurs secteurs de la vie publique. Dans une démocratie libérale, caractérisée par l'économie de marché, le développement de l'initiative privée est fortement encouragé par les politiques. C'est dans ce contexte que la société civile trouve sa place dans l'espace économique, mais aussi dans l'espace politique poussant ainsi les gouvernants à tenir compte de leurs points de vu dans l'élaboration des politiques publiques infléchir sur certaines politiques publiques.

    Paragraphe I : L'espace socio économique

    L'intervention de la société civile dans l'espace économique est une des caractéristiques des sociétés à démocratie libérale. L'Etat cède une partie importante de son champ d'action pour encourager les citoyens à participer à la construction du pays.

    La dimension économique des organisations de la société civile est marquée au Sénégal par la présence d'associations de femmes, de GIE (groupement d'intérêt économique) de groupements de producteurs, d'exploitants forestiers etc. Ces différentes franges de la société constituent des poids économiques que l'Etat est obligé de prendre en considération dans ses politiques sociales et économiques. Ces forces sociales se substituent d'une part à l'Etat et constituent des avants- garde de la santé économique du pays qui dans une certaine mesure constitue le point de départ d'une stabilité socio politique.

    Depuis le début des années 90 on assiste au Sénégal à l'émergence de conditions favorables à l'intervention de la société civile dans l'espace économique national. En effet, à la faveur du désengagement de l'Etat, de l'accroissement de la pauvreté qui est la résultante de mal gouvernance et des politiques d'ajustements structurels des institutions de Bretton Wood, et qui favorise des initiatives individuelles ou collectives, des individualités des associations des ONG de diverses natures ont proliféré dans le paysage national pour répondre à des besoins spécifiques qui sont non ou mal pris en compte par les structures étatiques.

    Ainsi, le libéralisme politique d'un côté, et le libéralisme économique de l'autre, auxquels sont venus s'ajouter la décentralisation, ont favorisé un boom d'initiatives venant d'acteurs privés.

    Avec le slogan moins d'Etat, mieux d'Etat apparu avec les politiques d'ajustements structurels on a assisté à l'apparition et à la consolidation d'organisations locales de développement. Certains sont nés se dotant du statut de groupement d'intérêt économique (GIE), d'organisation non gouvernementale (ONG) etc. Et d'autres de type informel et traditionnel d'abord et qui par la suite ont évolué vers des formes légales et plus structurées. C'est le cas des organisations paysannes et des coopératives villageoises évoluant dans le monde rural. Tout ceci traduit le besoin des populations de se doter de cadres associatifs les plus appropriés selon le contexte socio-politique du moment afin de mieux participer au changement social et d'occuper de nouveaux espaces d'expression.

    Dans le contexte sénégalais caractérisé par la massification de la pauvreté, de l'analphabétisme les divisions ethniques, les discriminations liées au sexe etc., la société civile en a fait un combat global de relance de l'économie. Les GIE composés le plus souvent d'association de femmes occupent une place importante dans la prise en compte de la dimension genre. Ces organisations agissent dans une perspective de défense des intérêts de la femme souvent reléguée au second plan dans la lutte contre la pauvreté.

    La situation de la femme au Sénégal est peu enviable. Elle est largement défavorisée par le système socio culturel, économique et politique alors qu'elle doit être un acteur économique et un agent incontournable du développement. Cette prise de conscience des femmes qui constituent une frange importante de la société civile est louable au regard de leur intervention dans les PME. Dans ce cas le combat des femmes intellectuelles se mouvant dan la société civile est salutaire et va à l'encontre de l'idéologie dominante chez les sociétés patriarcales rapportées par Christine Zoé NARE :

    Selon l'idéologie propre aux sociétés patriarcales, la subordination de la femme à l'homme ne devait pas être économique, elle devait être juridique, sociale et psychologique car l'image de la femme n'est valorisée que dans ses fonctions de mère et d'épouse. Elle ne doit pas être poussée à la réussite dans les domaines qui sont la chasse gardée des hommes comme le domaine économique, public, les sphères du pouvoir toute chose que la réussite dans le système éducatif contribuerait à rendre possible. 8(*)

    C'est en participant activement au changement de ses conditions d'existence matérielle que la femme modifie le sens du regard que la société a sur elle. A ce titre K. Marx rappelle que :

    Les rapports juridique ainsi que les formes de l'Etat ne peuvent pas eux-mêmes, ni par la prétendue évolution de l'esprit humain, mais qu'ils prennent au contraire leurs racines dans les conditions d'existence matérielles dont Hegel à l'exemple des Anglais et Français du XVIIIe siècle comprend sous le nom de société civile et que l'anatomie de la société civile doit être recherchée à son tour dans l'économie politique. 9(*)

    Le poids économique de la société civile favorise sa crédibilité face à la société politique et renforce sa capacité d'action auprès des politiques d'où la place prépondérante des femmes et des jeunes dans la société civile sénégalaise car constituant la majorité sociale.

    L'économie informelle n'est pas seulement une réaction aux insuffisances de l'économie officielle à l'intérieur d'un pays quelconque. Elle devenue un processus une réaction à ce que l'on appelle aujourd'hui mondialisation et qui est un processus d'unification des marchés. A ce titre l'économie informelle dans laquelle se meut la société civile du pays participe partiellement à la défense des intérêts nationaux battus en brèche par la mondialisation.

    Dans le langage politique actuel la société civile idéale se veut un ensemble harmonieux de citoyens conscients et actifs. Cette conscience politique et cette activité civique s'opposent au conditionnement qui provient inévitablement des institutions et de l'Etat en particulier. La question de l'économie informelle et celle de la société civile sont comparables parce que les deux expressions renvoient à des pratiques de substitution. En effet, les échecs de l'économie officielle se traduisent par un chômage massif et un nombre croissant d'exclus dont les plus inventifs cherchent une solution de substitution qui est aussi une solution de survie dans l'économie informelle.

    Par ailleurs après les échecs de la construction du socialisme et de la marche au communisme occasionnés par la montée en puissance du libéralisme, le recours à la société civile comme une solution de substitution est suggérée par le cours de l'histoire. A cet effet le discours du président François Mitterrand tenue à la Baule en 1990 exhortait les Etats africains à prendre en compte toutes les composantes de la société dans la lutte pour le développement.

    Dans les recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), Adam Smith expose sa théorie d'une distinction fondamentale entre le politique et l'économique, autrement dit l'Etat et la société civile qui est le champ de rapports fondamentaux engendrés entre les individus par les activités du commerce et de l'industrie.

    Selon Marx et Engels   la société civile embrasse l'ensemble des rapports matériels des individus à l'intérieur d'un stade de développement déterminé des forces productives. Elle embrasse l'ensemble de la vie commerciale et industrielle d'une étape et déborde par là même l'Etat et la nation ou société moderne, bien qu'elle doit par ailleurs s'affirmer à l'extérieur comme nationalité et à l'intérieur comme Etat.

    La présence de la société civile dans le terrain économique renvoie à la conception hégélienne, théorisée par Dominique COLAS, de bataille de l'intérêt privé individuel de tous contre tous, de même que le conflit de cet intérêt avec les intérêts particuliers et les dispositions de l'Etat. La société civile serait dans ce cas un champ de bataille des classes sociales et des divers groupes sociaux où ce qui est directement en jeune sont non la politique comme à la fois système social et résultat de celui-ci pour le contrôle du pouvoir que peut conférer le profit, le gain l'argent et la maîtrise des diverses ressources qui les génèrent

    En définitive, malgré les nombreuses décisions prises concernant la promotion économique des organisations de la société civile, il reste beaucoup car leur application n'est pas toujours effective intervient-elle dans le domaine politique pour la promotion démocratique et économique.

    Paragraphe II : L'espace politique

    La société civile en tant que directrice des consciences citoyennes investit, à coté de l'espace économique, l'espace politique. Marqué par une prééminence de l'Etat et des acteurs du jeu politique notamment les partis politiques et les groupes de pressions, l'espace politique donne à la société civile son champ d'action. Ainsi s'explique l'association étroite entre démocratie et liberté d'expression garantie par la présence d'une société civile dynamique. Dans les pays sous-développés, à l'instar du Sénégal, marqués par des expériences démocratiques encore faibles, on a tenté de concevoir la société en dehors de la sphère politique pour garder la toute puissance de l'Etat. Les premiers dirigeants ont cherché d'abord à consolider l'Etat-nation au détriment de l'ouverture démocratique.

    La société civile porte les demandes et les revendications des citoyens et interpelle les décideurs publics. La frontière entre la société civile et la société politique (composée des pouvoirs institutionnels liés à l'Etat les acteurs politique en compétition pour le contrôle de celui-ci) n'est pas étanche ; elle est poreuse et il y a par moments osmose entre les deux réalités surtout quand les acteurs deviennent interchangeables ou présentent le même profil et se référent ou aspirent aux mêmes idéaux de base.

    Cette absence de frontière entre la société civile et la société politique, fait que celle-ci peut apparaître aussi comme un lieu non seulement de refuge de personnalités déçues de la classe politique, mais aussi une stratégie de redéfinition des stratégies de réappropriation par celle-ci du champ social à des fins de renforcement de leur pouvoir de négociation face aux autres acteurs de la classe politique. De ce fait la société civile court le risque d'être le refuge d'hommes politiques ayant fini d'échouer dans la compétition, or cet état fait n'est pas le but de la société civile.

    En investissant l'espace politique, elle cherche à être plus influente auprès des pouvoirs politiques tout en évitant d'être instrumentalisée par les partis d'opposition. Courtisée par la classe politique qui cherche à l'instrumentaliser du fait de la force sociale potentielle qu'elle peut représenter, la société civile par prise de conscience de cela et du fait qu'elle est source réelle de production d'une opinion publique qui peut être forte sur des problèmes et situations revêtant un intérêt pour le citoyen pour la nation, pour l'Etat, va chercher à se réapproprier (elle-même) cette force politiquement.

    L'intervention de la société dans l'espace politique se mesure dans ses prises de position tranchées sur les problèmes sociaux ou d'intérêt national revêtant un caractère politique certain, ce qui va contribuer à la fonder comme un pôle aux yeux de la société politique.

    Le champ social, avec l'avènement d'une société civile forte qui y intervient, et s'y affirme politiquement, devient du point de vue de l'intérêt qu'elle représente dans l'émergence des mentalités, l'équivalent du champ politique considéré jusque là comme le seul pole de proposition et de lutte pour une telle perspective. Ce rapprochement entre la société civile et la société politique du point de vue de leur fonction de canalisation et de représentation des aspirations des populations aux changements s'expliquent par la grande similitude entre les itinéraires politiques et sociaux des leaders de la société civile et ceux des dirigeants politiques. Ces leaders ont en général participé dans le passé aux mêmes luttes sociales, aspiré aux mêmes idéaux pour une société plus juste, subi les même répressions, toutes choses qui peuvent contribuer à forger chez eux le même type de sensibilité.

    La société civile se déploie alors pleinement dans l'espace politique par la nature politique de ses interventions. Il arrive toutefois que ce rapprochement entre les deux réalités constitue un danger quand il facilite des alliances entre partis politiques et organisation de la société civile. Plus la société civile manifeste des apparences qui la rapprochent à la société politique, plus sa neutralité devient douteuse.

    Avec l'avènement de la décentralisation la présence de la société civile dans l'espace reste primordiale. La décentralisation qui un processus par lequel l'Etat central transfère aux collectivités locales des compétences qui lui étaient anciennement dévolues et dont la visée est de permettre une gestion performante des ressources locales, constitue un terrain favorable au développement de la société civile. La société civile et les citoyens ont une plus grande visibilité des centres de décision dans le contexte de la décentralisation, car ces derniers sont plus proches, mais aussi plus nombreux et plus diversifiés.

    Avec la décentralisation notamment le citoyen peut multiplier ses intérêts et son attachement sur la gestion des affaires de la cité, ce qui lui peut motiver davantage son engagement personnel dans les affaires de celle-ci mais aussi il peut en raison de sa proximité même des institutions influer sur les prises de décisions. La société civile a davantage de raison et de motifs de s'engager dans la vie de sa cité et a le sentiment que les institutions locales sont à portée de sa main.

    Ainsi, avec la décentralisation, la société civile, du fait de la forte pression qu'elle constitue, rencontre le plus de chance d'être prise au sérieux par les institutions de l'Etat, les collectivités locales. Ces dernières seront placées devant la double nécessité, pour gouverner, de tenir compte des initiatives à la base et se servir de la société civile comme relais politique ou alliée auprès des populations locales.

    La présence dans l'espace politique de la société civile dans un contexte de décentralisation permet à cette dernière d'amener plus facilement les autorités à répondre aux attentes des populations par une prise en compte de leurs doléances et leur traduction en mesures opératoires. A ce niveau, la société civile se dote d'un cadre stratégique d'échange et de concertation à l'échelle locale. De ce point de vue, la décentralisation en favorisant une prise en compte plus rapide des problèmes des groupes sociaux par l'Etat et ses démembrements, participe à l'émergence des conditions d'une bonne gouvernance qui constitue une des priorités des organisation de la société civile et de leur présence dans l'espace politique.

    En plus du contexte de la décentralisation, les conditionnements des bailleurs de fonds consolident la présence de la société civile dans le terrain politique. Nouvelles conditionnalités des bailleurs de fonds, nouvelles formes de partenariat des politiques publiques, pilier de la bonne gouvernance, interlocutrices de la communauté internationale, les organisations de la société civile sont devenues à tous les niveaux incontournables dans le jeu politique. L'évolution des relations entre l'Union européenne et les pays africains renforce ce positionnement. Conçu par une vitalité idéale, mais encore remise en cause dans les pays du sud, comme facteur de bonne gouvernance, la prise en compte des OSC dans l'élaboration des politiques sociales reste une nécessité. Son renforcement assure une plus grande participation des pauvres aux avantages de la croissance économique et du renforcement du tissu démocratique.

    Pour autant qu'elle intègre l'espace politique, la société civile ne doit en aucun cas se fondre dans des calculs politiciens en vue de mener ses activités. La crédibilité de la société civile doit résider dans son apolitisme et son autonomie de gestion.

    SECTION II : LA SOCIETE CIVILE AUX ANTIPODES DES CALCULS POLITICIENS.

    La société se déploie dans le cadre de l'espace politique. Elle y rencontre l'Etat et les autres acteurs politiques. Au Sénégal face aux multiples crises occasionnées par la pauvreté, cet espace politique perd de sa crédibilité devant les citoyens abandonnés souvent à leur propre sort. Aux yeux des citoyens cet espace est incapable d'apporter des réponses aux différentes demandes sociales, constitue un cadre corrompu, favorable à des calculs politique. La société civile qui s'y meut n'est pour autant épargnée de ce risque.

    Paragraphe I : La dimension apolitique de la société civile

    La société civile se caractérise fondamentalement par son apolitisme. L'apolitisme consiste à une « attitude collective de refus de subordination de la part des organisations ayant une action sociale (syndicats, organisations charitables) aux partis politiques ; cette attitude ne constitue pas un refus d'engagement politique individuel »10(*). Les organisations de la société civile n'ont pas intérêt à s'identifier à un parti ou une idéologie politique, pour assurer plus de légitimité dans leur prise de position afin de veiller à la prise en compte des revendications sociales. En s'alliant aux partis politiques ou à la politique de l'Etat, la société civile s'écarte de son objectif qui consiste à être un contre pouvoir par rapport à l'Etat.

    L'autre danger de la subordination reste la corruption par les agents politiques des leaders de la société civile. Lorsque les acteurs de la société civile sont soumis aux conditionnalités des acteurs politiques, ils perdent leur représentativité et peuvent être ainsi déséquilibrés, basculés du coté de l'Etat et détruire la condition d'existence de la société civile voire de la démocratie.

    Dans les pays du Tiers Monde, force est de reconnaître que les organisations de la société civile, sont de plus en plus tentées, du fait de la faiblesse de leurs moyens, de se rapprocher des politiques. C'est ce qui fait que beaucoup d'observateur relativise l'existence de la société civile, y compris au Sénégal.

    La confusion entre société politique et société civile jette les jalons d'un totalitarisme dans la mesure où, dans ces pays les partis de l'opposition sont réduits au silence du fait de la répression qu'ils subissent de la part de la puissance étatique.

    Dans un régime où les organisations de la société civile ne gardent pas leur apolitisme, vis-à-vis des politiques, le champ d'action des tenant du pouvoir s'agrandit et surgissent avec lui les prémisses d'une toute puissance étatique. La société civile cesse d'être dans ce cas un contre pouvoir.

    Dans un contexte de remise en cause de la société politique eu égard à tous les échecs que cette dernière a connus dans les pays du sud dans la prise en charge des demandes sociales. La société civile apolitique garde une image valorisante. La démocratie doit être représentative, les forces politiques, les partis en particulier doivent être au service d'intérêts sociaux et non pas se servir eux-mêmes. La réalité est tout autre dans les pays africains et au Sénégal. Dans ces pays la société civile du fait de la faiblesse de ses moyens est souvent teintée d'appartenance politique. Il n'est pas rare à cet effet de voir des acteurs de la société civile intégrer la formation gouvernementale au Sénégal. Dès lors, du fait des nombreux avantages qu'ils y tirent, les acteurs tendent à estomper leur lutte pour la sauvegarde de la démocratie.

    A ce constat, la société politique engloutit petit à petit la société civile porteuse des aspirations des populations. Ainsi si le pouvoir politique ne rencontre pas de frontière, il se dilate et affaiblit toutes les forces que la société détenait pour limiter son pouvoir. Quand la société civile se politise, les revendications et les contestations des populations restent reléguées au second plan par un Etat que la passivité des citoyens conforte dans ses positions. Dans ce même ordre d'idées Alain Touraine précise que :

     Le problème le plus urgent est de diriger vers le système politique les revendications et les contestations et les utopies qui rendraient notre société plus consciente à la fois de ses orientations et ses conflits. Nous souffrons presque partout d'un manque de conflit, ce qui crée une ceinture de violence autour d'un système politique qui se croit pacifier parce qu'il a transformé ces revendications internes en menaces extérieures et parce qu'il est plus préoccupé de sécurité que de justice et d'adaptation que d'égalité.11(*)

    En perdant sa dimension apolitique, la société civile se fragilise et fragilise la démocratie quand ses observations ne sont plus liées à l'intérêt général des citoyens mais plutôt à une coloration politique. « Il faut se demander en terme plus directement politique si les idées et les forces politiques qui en appellent au peuple sont toujours démocratiques(...) c'est au nom de la gauche, du peuple, de la classe ouvrière, et de la démocratie elle-même que la démocratie a été détruite. » 12(*)

    La politisation et l'instrumentalisation fréquente en Afrique a fini de jeter les jalons du pouvoir absolu des Etats. Ainsi le pouvoir absolu utilise les individus et les communautés comme des ressources et des instruments et non comme des ensembles possédant autonomie de gestion et personnalité collective. L'appartenance communautaire est la face défensive d'une conscience démocratique si elle contribue à dégager l'individu d'une domination sociale et politique. On parlerait de domination politique quand l'Etat absolutiste ne rencontre pas de forces opposées qui pourraient l'arrêter. Certains appellent « démocratique », la priorité donnée aux réalités sociales sur les réalités politiques ; d'autres, au contraire, affirment que c'est dans l'action politique que se constituent démocratiquement le lien social et donc l'identité collective. En fait, la démocratie serait la complémentarité de ces deux affirmations ; d'où l'importance des organisations de la société civile à se saisir des réalités sociales et les porter aux centres des décisions ; et ceci n'est possible qu'avec une société civile apolitique et dynamique.

    Aucun principe n'a d'importance plus centrale dans l'idée démocratique que celui de la limitation de l'Etat, qui doit respecter les droits humains fondamentaux. De plus, comment oublier que l'adversaire principal de la démocratie dans les pays africains n'est ni la monarchie ou la domination d'une oligarchie de propriétaire fonciers et de féodaux, mais le totalitarisme présent en l'absence d'une société civile dynamique ou en présence d'une société civile politisée. La limitation du pouvoir politique est née de l'alliance de droit naturel et celle de la société civile, conçue au début comme la société économique dont les acteurs revendiquent la liberté d'entreprendre, d'échanger et d'exprimer leurs idées. Sans cette liberté, l'idée des droits fondamentaux serait restée purement critique.

    De ce fait, le combat de la société civile pour la promotion de la démocratie est incompatible avec l'identification de la société civile à un parti politique ou une alliance forte avec l'Etat. Si on confond la société politique avec la société civile, on ne voit plus comment peut être crée un ordre politique qui ne soit pas la simple reproduction des intérêts de la classe dominante : la classe politique. Cette confusion peut amener l'Etat à détenir seul la responsabilité d'assurer l'unité de gestion de la société. Et dans ce cas il reste peut de place à la démocratie.

    La séparation entre l'Etat, le système politique et la société civile oblige à définir l'ordre politique comme une médiation entre l'Etat et la société civile. L'idéal apolitique de la société civile largement contestée au Sénégal doit rester la pierre angulaire sur laquelle doit s'articuler l'ensemble des déploiements de la société civile. En plus de l'apolitisme, elle est doit être fortement marquée par son autonomie de gestion.

    Paragraphe II : L'autonomie de gestion des organisations de la société civile

    Les organisations de la société civile sont caractérisées le pus souvent au Sénégal, par la faiblesse de leurs moyens d'action constituant un handicap réel quant à leur autonomie de gestion. La plupart des associations de type formel, à ressources endogènes et aux capacités d'autofinancement limitées tels les GIE et autres groupements féminins courent dans les pays du sud le risque d'une soumission. Politique. La recherche d'aides et de soutiens auprès des autorités politiques explique d'une certaine manière cette soumission au politique qui à la longue entraîne un silence coupable de la part de ces organisations par rapport à la gestion politique.

    Le manque d'autonomie financière des organisations de la société civile est à l'origine du clientélisme et de la corruption politique fréquente dans les pays du sud. Dans un pays gagné par la corruption des couches censées éclairer l'opinion publique nationale, la démocratie y est sérieusement menacée si elle n'est pas réduite à une conception idéal mais impossible à réaliser.

    Par contre, la plupart des ONG dont la source de financement échappe à la maîtrise de l'Etat, sont potentiellement épargnés de ce risque. Cependant le pouvoir d'entrave de l'Etat sur ces dernières peut être élevé au moment de leur constitution, car c'est l'Etat qui définit le système de réglementation portant sur l'attribution des agréments et des avantages fiscaux dont les ONG peuvent bénéficier.

    Pour échapper aux pièges tendus des politiques, les organisations de la société civile doivent mener des politiques d'autofinancement. A ce titre une visite au niveau du siège de la RADDHO (Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme) sis Villa N° 4024 Amitié II Allées Seydou Nourou Tall à Dakar nous a permis de savoir que cette ONG tire ses ressources des activités d'impression et de photocopillage de document, de vente de carte de membre, d'organisation d'activités lucratives (concerts...). Même si ses activités n'assurent pas la prise en compte de la totalité des activités de l'ONG, elle n'en est pas pour autant dépendante des pouvoirs publics en place.

    Longtemps caractérisé par le modèle du jacobinisme français, le Sénégal connaît un retard dans l'émergence d'une société civile autonome libérée l'assistance étatique. De ce point de vue, les organisations de société civile sénégalaise sont fortement caractérisées par ce recours à l'aide et la subvention étatique. Cette subordination ouvre la brèche pour l'Etat ou le parti au pouvoir de nouer des alliances qui dans une certaines mesure masque la capacité contestataire de la société civile.

    La société civile dans les pays du sud est à l'instar de ces derniers qui attendent tout de l'extérieur, avec parfois des mesures d'accompagnement contraignantes. La société civile court ce même risque au plan interne face à l'Etat qui cherche à toujours éteindre les foyers de contestation susceptible de perturber sa politique.

    En Occident, grâce à une forte position d'autonomie et de contestation vis-à-vis du pouvoir politique, la société civile fut à l'origine de grandes révolutions démocratiques. La chute du Président Serbe Milosevic en 2000, du régime de Géorgie en 2003, la Révolution orange en novembre 2004 sont autant d'évènements qui sont à verser au credo d'une société civile autonome, qui doit s'inspirer les organisations de la société civile africaines.

    Selon Augustin LOADA dans ses « Réflexions sur la société civile en Afrique : le Burkina Faso de l'après Zongo », le régime de Compaoré pour asseoir sa domination politique, s'est attelé à démanteler l'opposition partisane et à neutraliser la société civile. Mais cette stratégie s'est heurtée à la résistance d'un certains nombre d'organisations et de leaders de la société civile. Les ressources qui ont rendu possible cette indépendance proviennent essentiellement de l'autonomie budgétaire ou financière que lui garantissent certains bailleurs de fonds séduits par leur crédibilité. Il est à noter aussi les contributions et les solidarités existantes entre leurs nombreux adhérents, l'existence de moyens d'informations propres et de réseaux d'informateurs constitués de militants et sympathisants issus à la fois de milieux intellectuels ou plus modestes. Fortes de leur indépendance, ces organisations vont s'atteler à conserver les espaces d'autonomie que le régime a bien voulu concéder à la société civile.

    Cette autonomie qui fait la spécificité des sociétés civiles occidentales a été à la faveur des transitions démocratiques comme le cas serbe et géorgien et de leur consolidation. Les organisations de la société civile africaines doivent aller dans le même sens pour promouvoir les valeurs démocratiques en Afrique. Le Sénégal a donné le ton en 2000 en réussissant une alternance pacifique. Les observateurs internationaux, la presse nationale et étrangère, ont reconnu l'élection présidentielle de février mars 2000 a consacré de façon incontestable la démocratie sénégalaise. Une démocratie qui s'est manifestée de manière singulière et originale.

    DEUXIEME PARTIE :

    LA SOCIETE CIVILE ET LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE

    PREMIER CHAPITRE

    LE ROLE DE LA SOCIETE CIVILE DANS LE PROCESSUS ELECTORAL

    SECTION 1 : LA LUTTE POUR LA TRANSPARENCE

    Dans une démocratie l'élection des représentants du peuple constitue un moment majeur dans la vie de la nation et de ses institutions. Elle (l'élection) appelle un choix des représentants du peuple dans les instances de décision et les habille de légitimité pour être les porteurs de voix et les défenseurs des intérêts des populations. L'élection suit un processus souvent long qui doit favoriser sa transparence. Les agents de l'Etat ne doivent plus être les seuls à assurer la préparation de l'élection. La société civile doit être de plus en plus appelée à prendre part au processus électoral. Sa présence sur le terrain se justifie par des soucis de transparences des opérations, mais aussi par une volonté de former et d'encadrer les populations sur les enjeux des élections.

    L'élection dans certains pays d'Afrique est souvent un moment de confrontations entre factions qui finissent par plonger le pays dans le gouffre. De l'inscription aux listes électorales à la proclamation des résultats, en passant par le jour du scrutin, des contestations et des revendications d'opposants battus minent sensiblement l'espace social.

    Paragraphe 1 : La transparence: facteur de stabilité sociopolitique

    L'élection constitue un mode de désignation par les citoyens de leurs représentants ou de leurs délégués soit à l'échelon local, à l'échelon national, soit dans le cadre professionnel. Elle constitue un mode de participation du citoyen à la vie politique de son pays. La transparence dans le processus électoral et dans l'organisation du scrutin, confère une légitimité aux responsables élus. L'importance des mécanismes d'accès aux positions de pouvoir politique se mesure aux conflits qui marquent régulièrement les élections dans les pays africains depuis le début des années 90. La réitération du principe électif dans plusieurs pays consacre la reconnaissance de l'élection comme unique moyen légitime d'accession au pouvoir.

    La survie du principe électif indique que les acteurs politiques sur le continent, par conviction, nécessité ou convenance, semblent accepter d'entrer, même à reculons, dans l'ère démocratique. En organisant des élections pluralistes, à périodicité fixe et à dates convenues, ils acceptent en effet de confronter leurs différences, selon une règle commune, la méthode démocratique.

    Au Sénégal comme dans le reste des pays africains les élections cessent d'être ce que « Max Weber appelait des chances de puissances »13(*), mais l'occasion de conflits internes qui déchirent l'unité nationale au grand dam des populations. Ces dernières sont victimes d'une mise à l'écart dans le déroulement du processus électoral, mais payent les conséquences désastreuses des affrontements dont elles ne sont pas à l'origine.

    Le début des années 1990 voit émerger dans les pays africains des organisations s'impliquant de plus en plus dans l'organisation et la tenue d'élections libres et transparentes. L'action des organisations de la société civile a été marquée par « une intensification des luttes et une contestation de plus en plus violente des systèmes autoritaires (...) ces mouvements ont mis dans la rue des capitales et principales villes africaines de nouvelles procédures de mobilisations et une nouvelle thématique idéologique »14(*)

    La plupart des régimes africains connaissent une crise de légitimité du fait des irrégularités qui ont entaché les élections de certains chefs d'Etat. Avec l'avènement du multipartisme dans les années 80 au Sénégal, l'expérience d'élections pluralistes a souvent été accompagnée de violences post-électorales notamment celles de 1988 et 1993. Les élections de 1993 verront l'assassinat du Vice-président du conseil constitutionnel de l'époque, Me Babacar SEYE. Ces violences sont souvent attribuées aux partis d'oppositions dont le plus représentatif est le PDS créé en 1976 par Me Abdoulaye Wade. Ce parti est soutenu par des mouvements issus de la société. Le plus souvent ses soutiens sont des désespérés issus de milieux défavorisés et prêts en à découdre avec le régime en place. Ces mouvements sont essentiellement des mouvements urbains animés par des jeunes chômeurs, des enseignants des élèves et étudiants, des journalistes...

    Ainsi, à la suites des élections du 28 Février 1988, des émeutes ont éclaté ; ce qui portera un coup dur à la démocratie comme l'indique Alioune Badara DIOP« la vitrine démocratique sénégalaise a été brisée de façon récurrente, sous les coups de boutoirs de la colère, de la frustration du désespoir et sans doute de l'impuissance sociologique des adversaires de Abdou DIOUF à faire basculer la majorité des électeurs à leur profit : l'alternance. » 15(*)

    L'image démocratique du Sénégal, modèle pour l'Afrique a été entachée par ces événements. L'opposition qui dénonçait la fraude a intensifié sa campagne pour une réforme du code électoral. On assiste en 1991 à la restauration du poste de PM que le président avait supprimé après les élections de 1983 pour renforcer son contrôle direct sur le gouvernement. Avec les actions conjuguées de la société civile et de l'opposition la réforme du code électoral a été effective. Cette réforme a porté ses fruits avec les élections de 1993 puisque le PS obtiendra 58,4 pour cent des votes, le score le plus faible enregistré par le parti depuis l'indépendance. Malgré ces modifications l'espace politique sénégalais n'est pas devenu pour autant stable.

     L'excuse absolutoire de l'opposition sénégalaise qui a régulièrement affronté la répression policière et les tribunaux, avec les épisodes tragiques des émeutes post-électorales de 1988 et 1993, est invariable : les résultats officiels ne reflètent pas la réalité des rapports de force réels qui lui serait favorable. La violence électorale est une forme de violence politique suscitée par la conquête du pouvoir. L'Etat est à la fois ambition et cible. Ambition de pouvoir du candidat aux suffrages, il redevient, dès que celui-ci est battu, l'exutoire  cathartique des partisans frustrés.16(*)

    Le rôle de la société civile ne doit pas consister à se rallier derrière un opposant pour combattre un régime donné. Elle doit plutôt être impliquée en amont du processus électoral en encourageant les populations à s'inscrire sur les listes électorales, éclairer les citoyens sur les projets des différents candidats en vue de favoriser des choix rationnels.

    La mise sur pied de l'ONEL en 1998 dont les membres sont issus de la société civile a permis la tenue d'élections transparentes et apaisées en 1998 et 2000. L'ONEL a été impartial, même si l'opposition se montrait sceptique et pensait à une utilisation de cette dernière par le PS pour truquer les élections de 2000.

    La société civile a investi en outre le domaine médiatique. En 1994, une étape importante a été franchie en matière de démocratie et d'un plus large pluralisme institutionnel avec la création des chaînes de radios privées. Ces radios comme sud FM et Walfadjri, ont produit un grand nombre d'émission en langues locales. Ces émissions ont permis à la population analphabète d'avoir accès à l'information et à participer au débat politique. Ces débats longtemps tenus en langue française, dans la chaîne officielle, la RTS, laisse la majorité de la population dans un manque d'informations.

    Le dialogue politique permanent entre les acteurs du jeu politique et les organisations de la société civile, participe de la transparence des élections et par ailleurs la stabilité du champ social. Cette médiation a permis une gestion concertée de l'Etat notamment dans l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques publiques. La mission de la société civile est surtout la recherche de la stabilité politique et de la cohésion nationale d'une démocratie. En amont du processus électoral, les organisations de la société civile, pour le compte de la transparence, des principes de régularité des listes électorales, des règles de convocation des du corps électoral, des formalités des scrutins. La démocratie électorale est encadrée par tout un arsenal de dispositions juridiques, d'où une épineuse question : celle des rapports qui se nouent, au coeur de la concurrence électorale, entre droit et pratique, norme et déviance, loyauté et intérêt.

    La stabilité politique reste largement tributaire du dialogue national, à l'image de l'expérience des conférences nationales qui ont consacré la démocratie béninoise. La société civile doit être au coeur de ce dialogue entre les différentes composantes de la nation.

    Paragraphe 2 : Le maintien du dialogue politique

    L'espace sociopolitique sénégalais est marqué par une hétérogénéité des acteurs : les tenants du pouvoir, les partis d'opposition et les mouvements de la société civile. Cette dernière constitue la pierre angulaire du dialogue politique entre les acteurs. Le dialogue politique doit s'imposer comme instrument privilégié pour résoudre les problèmes sociaux et asseoir une démocratie et un espace politique apaisé. Il doit être permanent durant tout le processus électoral. Il permet d'éviter les crises inutiles par la recherche du consensus et d'éviter les désaccords.

    Au Sénégal la RADDHO a joué un rôle essentiel allant dans le sens du maintien du dialogue politique. Elle a servi de médiatrice lors du différend qui opposa le Président de la République et le Président de l'Assemblée Nationale suite à la convocation des autorités de l'ANOCI par la commission des finances de l'AN. Le maintien de relations consensuelles entre ces deux institutions de la République, est plus que bénéfique pour le bon fonctionnement de la démocratie et le respect du principe de la séparation des pouvoirs, consacré dans la constitution sénégalaise de 2001.

    La RADDHO s'est érigée en rempart contre toutes éventuelles irrégularités pour les élections locales qui devaient avoir lieu au mois de Mai 2008. Face au report des élections locales, décrété de façon unilatérale, le dialogue politique au Sénégal s'est révélé inexistant. A ce report s'ajoute la dissolution de certaines collectivités jadis dirigées par des opposants. Cette dissolution a eu des conséquences au plan social par des manifestations des militants mécontents de la décision qui ne parait pas avoir de justification valable. La démocratie participative en a subi les contrecoups.

    La Rencontre de Défense des Droits de l'Homme s'est par ailleurs réjouie de la tenue du dialogue politique entre le pouvoir et l'opposition, pour y avoir travaillé pendant près d'un an, avec d'autres partenaires dans le cadre du Pacte républicain. Le dialogue politique revêt beaucoup d'aspects positifs. Il contribue à apaiser le climat politique. En Afrique la plupart du temps l'élection a lieu dans un climat politique tendu, avec une absence totale du moindre dialogue entre acteurs. Ce climat est peu propice à la tenue d'élections calmes, transparentes, libres et démocratiques. Il favorise des violences post-électorales qui ont fini de miner la quasi-totalité des pays africains.

    Le manque de dialogue entre les différents acteurs du jeu politique, laisse présager des élections truquées à l'avance. La conséquence qui en découle est les violences notées après les scrutins, qui se terminent par d'importantes pertes en vies humaines, des dégâts matériels incalculables, des violences qui mettent l'économie du pays et ses institutions au chaos. L'apport de la société civile est plus que nécessaire en vue de dégrossir le contentieux préélectoral. Les élections dernières élections présidentielles au Kenya de 2008 en sont une parfaite illustration.

    Le dialogue participe de la restauration de la confiance des acteurs politiques par rapport au processus électoral. Les partis de l'opposition sont toujours suspicieux surtout quand le débat politique et contradictoire manque au sein de l'espace politique. Au Sénégal entre 1998 et 2000 les débats politiques ont connu une montée en puissance avec la supervision du HCA. C'est le résultat de ces dialogues qui ont notamment été à l'origine de la création de l'ONEL.

    Cette structure avait pour mission de superviser le processus électoral dans toutes ses phases et de veiller à ce qu'il se déroule en conformité avec la loi, de manière à garantir aux électeurs et aux candidats en présence le libre exercice de leurs droits. C'est ainsi qu'en cas de non respect des dispositifs législatifs et réglementaires relatifs à une autorité administrative, elle invitera celle-ci à prendre les mesures correctives nécessaires et proposera le cas échéant des sanctions contre le fonctionnaire ou l'agent de l'Etat responsable. Elle pouvait, en cas de besoin, saisir les juridictions compétentes de tel manquement et de ceux qui sont commis par les partis politiques, les candidats ou les électeurs.

    Les membres de l'institution, au nombre de neuf, ont été choisis dans le consensus parmi les Sénégalais connus pour leur indépendance, leur intégrité morale, leur honnêteté intellectuelle, leur neutralité et leur objectivité. La société civile a été sollicitée pour remplir cette fonction hautement républicaine. L'avènement d'une telle structure du dialogue permanent entre société civile, pouvoir et opposition a conduit le Sénégal sur un chemin sûr menant à une alternance apaisée et le triomphe de la démocratie.

    Après l'an 2000, on note une régression du débat et dialogue politique au Sénégal. Ce manque de dialogue a fortement alourdi le climat politique de ces dernières années. Dès lors une gestion unilatérale des appareils idéologiques de l'Etat par les seuls tenants du pouvoir exacerbe les critiques des oppositions et des honnêtes citoyens épris de démocratie.

    On note aussi des prises de décisions unilatérales sur des questions sensibles allant dans le sens de la vie politique de la nation : couplage et découplage des élections, adoption du quart bloquant, prolongation du mandat des députés, report des élections locales de Mai 2008, dissolution de certaines collectivités locales remplacées par des délégations spéciales.

    Dès lors le Sénégal donne l'impression, après quelques années glorieuses en matière de démocratie, d'un Etat fonctionnant beaucoup plus à l'arbitraire, ayant recours plus la force qu'au droit, du fait de la réaction de la justice caractérisée par la déresponsabilisation. Rarement on aura vu autant de décisions de la justice, sur des questions stratégiques et fondamentales, marquées par l'incompétence des tribunaux (prolongation du mandat des députés, affaire Hussein Habré, recours de l'opposition relatif aux membres de la CENA, violences faites sur des leaders politiques ; le cas de Talla Sylla par exemple....).

    A ce titre il urge de restaurer la dignité, l'indépendance et l'impartialité de la justice, seule garante de l'existence d'un Etat de droit. Le dialogue politique vise à promouvoir les bonnes décisions qui permettent de dégrossir les points de contentieux et de consolider la confiance des acteurs. Par ailleurs, il favorise les conditions d'une compétition à armes égales dans tous les domaines, mais aussi un égal accès des partis politiques (pouvoir et opposition) aux médias publics et privés, notamment la télévision et le financement des partis représentés à l'Assemblée Nationale.

    D'autres avantages sont aussi à envisager allant dans le sens de crédibiliser et dépolitiser les institutions judiciaires ; en veillant scrupuleusement au respect de la séparation des pouvoirs. En fin il est nécessaire de retenir de retenir que le dialogue permet de susciter le débat d'idées sur les programmes, les visions du monde et les attentes des Sénégalais en matière de démocratie. C'est la seule manière d'éviter que la fraude ne prenne la pas sur la transparence et que la problématique du processus n'occulte d'autre questions essentielles, parmi lesquelles la refondation de l'Etat et des ses institutions, de manière à éviter les dérives sur lesquelles la société civile semble impuissante et sur lesquelles les citoyens dissertent sans fin. Le dialogue reste l'instrument social de participation des populations au processus électoral et par delà le levier de l'émergence d'une conscience citoyenne, fondement d'une démocratie participative.

    SECTION 2 : LA FORMATION ET L'ENCADREMENT DES POPULATIONS

    « Les élections, qui permettent la compétition entre partis, constituent une pratique nécessaire au bon fonctionnement de la démocratie. Elles donnent au peuple la possibilité de choisir librement ses dirigeants en fonction de leur valeur ».17(*) Cette liberté de choix déclinée par Marie Soleil Frère reste largement tributaire d'une rationalité qui ne sera effective qu'avec la formation et l'encadrement des populations par une forte sensibilisation et un éveil des consciences. Ce rôle jadis dévolu aux partis politiques connaît une insuffisance en Afrique du fait de la faiblesse des partis politiques, plus enclins aux luttes pour la conquête du pouvoir plutôt qu'à la formation des populations à la citoyenneté. Ce vide doit être récupéré par les organisations de la société civile, du fait de leur proximité avec le milieu social.

    Paragraphe 1 : La sensibilisation pour une culture démocratique

    Il est difficile de concevoir une démocratie où toutes les composantes de la société ne seraient pas au même niveau d'informations et d'intériorisation des principes et des pratiques démocratiques. Le principal obstacle à la démocratie en Afrique est la communication politique, qui crée un grand écart entre l'élite dirigeante et le « bas » (Bayart). Constitué en majorité d'analphabètes, ces populations ne sont pas toujours à même de déchiffrer l'actualité politique, qui se vit en langue officielle : le Français.

    C'est là le sens qu'il faut accorder à l'avènement en 1994 de la presse privée. Par le biais de cette presse, la société civile sensibilise au maximum les populations par l'intermédiaire des langues locales. La presse privée constitue une frange de la société civile qui a permis de marquer une étape importante dans la consolidation des acquis démocratiques résultant de l'avènement du multipartisme. On note une multitude d'émissions à la faveur desquelles, les populations sont informées et sensibilisées. Ces dernières en revanche donnent leur impression et leur point de vue sur la gestion des affaires publiques. Ces émissions à l'instar de « wakh sa khalat » (exprimer son point de vue) ou en « avis d'expert » touche une large couche de la société.

    De nombreux citoyens manifestent leur participation à la vie de la nation que lors des consultations électorales. Par delà l'investissement des médias, les organisations de la société civile doivent mener des politiques de proximité, en ayant des comités de quartier et des relayeurs. A ce titre, les ASC (Associations Sportives et Culturelles), les comités de femmes et les Foyers de jeunes restent des forces potentielles avec lesquelles les organisations de la société civile doivent entrer en étroite connexion. A défaut ces structures sont récupérées par les politiciens qui finissent par les détourner de leur mission sociale, au profit de la politique.

    En admettant avec les tenants de l'école que le choix de l'électeur est déterminé par une influence, la sensibilisation en amont des populations est plus que nécessaire pour mitiger les influences reçues durant les campagnes. A ce niveau, les obstacles rencontrés par la société civile sont nombreux dans un espace social où elle est encore mal perçue.

    Les campagnes de sensibilisation des OSC doivent avoir pour effet de faire comprendre aux citoyens, surtout en milieu rural, les différentes phases du processus de vote. Il n'est pas rare, à ce niveau, de voir, dans un bureau de vote, un électeur non averti faire appel à une tierce personne pour se faire guider afin d'accomplir son devoir civique. Cet électeur peut, dans ce cas, recevoir de la part de son guide une influence de dernière minute, ce qui peut porter une atteinte à la démocratie qui veut que le choix soit d'abord libre et indépendant.

    L'éclosion des moyens de communication a permis d'uniformiser les attentes et les aspirations des populations en matière de liberté d'expression. Longtemps confiné dans un monolithisme bloquant, le système d'information en Afrique ressemble à une boîte à échos du parti au pouvoir, souvent unique dans le paysage politique et n'ayant rien de démocratique.

    La libéralisation politique de ces dernières années a conduit à des changements fort heureux. Ainsi les OSC y trouvent un moyen pour instaurer un débat d'idées porteur de message à l'endroit des populations laissées souvent à la périphérie de la vie politique nationale. Avec le développement des émissions interactives, les fonctions d'information, d'éducation et de communication se trouvent renforcées. Le développement des médias a sorti beaucoup d'acteurs potentiels du jeu sociopolitique de leur mutisme. Il s'agit de ces groupes d'individus issus de la société civile, longtemps enfermés dans la réflexion confidentielle. A ce titre les médias constituent des relais et des partenaires au développement de la démocratie, à coté des organisations de la société civile.

    En raison de la complexité du processus démocratique dans les pays africains, caractérisés par un fort taux d'analphabétisme, les OSC se doivent de diffuser des informations régulières, soutenues et accessibles à tous à travers le pays afin de sortir les populations, censées choisir les dirigeants politiques, de l'obscurantisme politique qui a longtemps eu des effets négatifs sur le fonctionnement démocratique.

    La reprise du contenu des émissions, par des associations communautaires de base lors des causeries populaires, ou au cours de session de formation des adultes dans le monde rural ou même en ville, est un excellent moyen de multiplier l'impact de la sensibilisation sur les populations. Les populations alphabétisées pourront aider à la diffusion des idéaux de droit de l'homme et de démocratie, à travers les multiples relations (familiales, syndicales et culturelles) du tissu social.

    Il est clair que le combat pour la démocratie doit nécessairement commencer par la base, les populations locales qui font et défont par la magie de la carte d'électeur, les régimes et leurs gouvernements. C'est ce combat de la sensibilisation que les OSC doivent d'abord remporter. Si les régimes dictatoriaux ont proliféré en Afrique, c'est parce que les dirigeants totalitaires ont d'abord joué sur la conscience des peuples en y instaurant le culte de l'obéissance au tyran pour ensuite dépouiller les populations de toute capacité de remise en question de quoi que se soit. Le rôle des SC sénégalaise doit être le même aujourd'hui, en inculquant aux populations les référentiels nécessaires au culte démocratique.

    D'autres formes de communications sont aussi à la disposition de la SC pour ses campagnes de sensibilisation. Il s'agit entre autres des pétitions, pour recueillir le maximum de signatures et d'adhérents à une action menée. L'organisation de séminaires et d'ateliers rentre aussi dans la volonté de la SC de favoriser la démocratie en s'assurant d'abord de la fiabilité du processus électoral. En outre des séries de rencontres sont organisées notamment avec les populations en milieu rural et les mouvements de femmes et de jeunes en milieu urbain.

    En somme, pour une démocratie viable, le partenariat entre OSC et presse est plus que nécessaire, c'est dans ce sens qu'on perçoit la grande importance de la coopération entre la fondation Konrad Adenauer avec le CESTI lors de l'événement démocratique majeur : l'alternance de 2000. La FKA coopère avec le CESTI à cause du rôle que la presse joue dans tout pays moderne, un rôle d'information, de sensibilisation et de conscientisation citoyenne. Avec son offre d'informations et d'opinions, la presse veut mettre le citoyen en mesure de comprendre et de contrôler l'action des parlements, des gouvernements et des administrations. Un journalisme professionnel et engagé contribue donc de façon très concrète et très efficace à la prise de conscience citoyenne.

    Paragraphe 2 : De l'éveil d'une conscience citoyenne

    La démocratie reste largement tributaire d'une prise de conscience citoyenne des populations. Cette prise de conscience suppose que chaque individu soit conscient de son rôle dans l'élaboration d'une démocratie viable. Elle reflète la participation active de toutes les composantes de la société. Les OSC doivent beaucoup apporter à l'élaboration de cette conscience qui par ailleurs stimule la participation citoyenne.

    Le citoyen est une personne qui a, vis-à-vis de la collectivité dans laquelle il vit, à la fois des devoirs et des droits. Il doit respecter les règles d'utilités communes, mais il participe à l'élaboration de ces règles. Cette combinaison des droits et des devoirs vaut aussi en matière de démocratie. Agir en citoyen pour le respect de la démocratie c'est agir ensemble. La conscience collective peut et doit exiger une bonne gouvernance. En effet, dans un régime de démocratie, les citoyens pour défendre eux-mêmes leurs libertés et leurs vigilances à la gestion publique, disposent de l'auto proclamation, au-delà de la résistance à l'oppression et du droit de pétition. Il y a auto proclamation des libertés lorsqu'une liberté est utilisée pour défendre une autre. Ainsi la liberté d'expression a joué un rôle majeur, plus discret certes mais plus efficace sur le long terme dans la sensibilisation de l'opinion publique et dans l'émergence d'une conscience citoyenne forte.

    Ainsi les gouvernants ne doivent plus être les seuls responsables de la mise sur pied du processus démocratique et de sa pérennisation. Les Etats africains souffrent de ce déficit d'engagement collectif. Le peuple, souverain, tend à observer le plus souvent une attitude passive et spectatrice par rapport à la vie de la nation. On note une forte extension du champ d'action des tenants du pouvoir qui ne rencontrent d'opposition que quelques partis politiques anéantis par la faiblesse de leurs moyens, et sont incapables d'arrêter les dérives.

    La prise de conscience doit pousser le peuple à savoir qu'il est détenteur de la souveraineté, qu'il délègue à ses représentants qui l'exercent à son nom. Par l'entremise de la SC, le peuple doit veiller à la garantie des processus électoraux, point de départ de la démocratie.

    Dans le contexte de système représentatif défaillant où sont plongés les pays africains, le contrôle des populations et leur totale adhésion au processus démocratique est plus que nécessaire. Le parlement qui est censé défendre les intérêts des populations est largement fragilisé par une forte mainmise de l'exécutif. Au Sénégal cette main mise s'explique par l'impressionnant nombre des projets de lois (émanant du gouvernement) comparé aux propositions de lois (venant des parlementaires).

    La détérioration du tissu socio-économique au Sénégal ces vingt dernières années a plongé le pays dans une situation dramatique, qui connaîtra son apogée avec la dévaluation du franc CFA. Elle aura intensément aggravé le sort des populations, en devenant un facteur d'exacerbation des difficultés et des tensions, rendant ainsi la société plus vulnérable à la corruption politique et économique.

    On note de plus en plus avec l'émergence de la société civile un sursaut de prise de conscience citoyenne. Les difficultés de la vie quotidienne ont induit des stratégies de survie, dont la saturation articulée aux multiples dysfonctionnements aura largement contribué à la maturation de certains segments de la population. Cette ont pris conscience des limites objectives des institutions sociales, des pouvoirs politiques et syndicaux et des structures associatives, à prendre convenablement en charge ses aspirations et ses préoccupations.

    Les limites objectives des rapports d'assistance et des liens qu'avait instaurés l'Etat avec les populations ont généré en leur sein un sursaut citoyen à travers une plus grande implication d'une bonne partie d'entre elles dans une mobilisation populaire et dans des initiatives individuelles et collectives. C'est dans ce contexte : 

    Les femmes et les jeunes -des entités sociales qui ont toujours été, bien qu'à des degrés différents, présentes et impliquées dans toutes les luttes au Sénégal -ont fait preuve d'une grande détermination et ont ainsi été, à l'intérieur comme à l'extérieur des partis politique, parmi les principaux acteurs des transformations en cours notamment l'alternance de Mars 2000.  18(*)

    Aujourd'hui cet électorat doit rester serein et vigilant et veiller plus que jamais, avec la même détermination, à ce que les nouvelles autorités respectent la démocratie qu'il a contribué à instaurer dans un pays marqué par 40 ans de règne du PS.

    Les populations ont mis dans cette dynamique des circuits informels et des logiques de survie et ont fini par comprendre avec le temps, qu'elles pouvaient infléchir le cours des choses par une plus grande détermination et par une implication citoyenne. Elles ont décidé grâce à la mobilisation de la société civile, des syndicats, de divers mouvements sociaux et de leaders d'opinion, relayés par les médias.

    Cette prise de conscience collective et républicaine a permis de mettre en 2000 un processus électoral transparent, et une participation massive qui a conduit le Sénégal vers une alternance pacifique et historique. Ainsi, selon Mamadou Mbodj :

     L'alternance politique et le départ du président Abdou Diouf dans des conditions démocratique traduisent le fait que le pays a atteint l'âge de la maturité républicaine et devra faire ses preuves pour asseoir, développer cette maturité. 19(*)

    L'émergence de la conscience citoyenne apparaît aussi dans le rapport entre le citoyen et le pouvoir politique d'une part, et entre ce même citoyen et certains cercles religieux. Dans la période de campagne pour l'élection présidentielle de Février -Mars 2000, une bonne partie du peuple sénégalais semblait avoir rompu avec la vision obscurantiste qui concevait le pouvoir politique comme une affaire des dieux, et dès lors, le pouvoir spirituel n'avait plus à interférer dans ses rapports avec ce même pouvoir politique. Celui-ci est désormais considéré sinon perçu comme comptable de son action et de sa gestion, tandis que le pouvoir religieux est de plus en plus invité à se cantonner à la vie religieuse et à la spiritualité. Les connexions et interaction politico-religieuses sont de plus en plus décriées.

    Cette invitation est perçue au Sénégal, lors des élections de 2000, par le refus des citoyens des consignes de vote qui étaient largement en faveur du candidat Diouf battu au second tour. En outre les velléités d'émancipation des femmes de la tutelle des hommes, et celle des jeunes du carcan du groupe familial sont vécus comme de véritables obstacles à la liberté d'initiatives et d'éveil de conscience.

    La plupart des groupes et associations produits par cette trajectoire, sont négligés dans les grandes constructions épistémologiques et idéologiques sur les transitions démocratiques. On privilégie plutôt (comme dans l'utilisation africaniste du concept de société civile) les acteurs qui affrontent l'État au détriment des groupes et associations qui se cantonnent au niveau local et qui ont un impact considérable sur la vie et la survie des communautés, sans prendre part aux luttes pour le contrôle du pouvoir et des moyens d'enrichissement.

    La nouvelle conjoncture économique a provoqué, selon plusieurs observateurs, l'entrée fracassante sur la scène politique et économique africaine de nouveaux acteurs, exclus du jeu politique pendant au moins trois décennies : les jeunes et surtout les femmes qui réinventent, en marge de la scène politique ou au coeur des dispositifs partisans, des affiliations contraires au sectarisme des organisations ethnico-religieuses des élites politiques, afin de recréer un tissu social solidaire face aux logiques de fragmentation. Les jeunes, tout comme les femmes, du fait même de leur exclusion, durant la période nationaliste élaborent désormais des activités communautaires construites sur des dynamiques d'inclusion, de contrôle et de responsabilités , qui jurent avec les idiomes et du nationalisme et des nouveaux discours sur la gouvernance et la démocratie.

    Chapitre 2 :

    LA SOCIETE CIVILE DANS LES TRANSITIONS DEMOCRATIQUES

    SECTION 1 : LA SOCIETE CIVILE FACE AUX DEFIS DEMOCRATIQUES

    Une réflexion sur les transitions démocratiques nécessite avant tout un minimum de clarification conceptuelle. De nos jours, le mot « démocratisation » est devenu un label presque banal que nous donnons à tout ce qui est bon et souhaitable pour le public. Que l'entrée des facultés soit maintenant ouverte à tout le monde et nous concluons par exemple que les études universitaires se « démocratisent ». Il est pourtant difficile de s'exprimer autrement lorsqu'il s'agit de considérer le passage d'une forme de gouvernement non démocratique à une autre, cette fois-ci démocratique dans un pays donné. Dans ce cas précis, le terme de démocratisation se comprend par exception dans sa signification exacte qui est politique. Elle se rapporte au processus d'établissement d'un régime pluraliste ainsi qu'à son résultat apprécié tant au niveau de son enracinement durable que de son authenticité en matière de respect de la volonté populaire et des droits de l'homme. Ce  passage à la démocratie, perçu sous le vocable de transition démocratique s'est effectué dans la plupart des Etats africains autour de l'année 1990 dans un contexte marqué par la fin de la bipolarisation du monde et surtout du triomphe de la démocratie libérale.

    La démocratie suggère alors à la fois l'idée d'un projet de société, pour plus et mieux de libertés, et d'une dynamique politique dans la construction d'un cadre institutionnel de son éclosion. Les OSC ont un rôle important à jouer dans ce projet qui consiste à enraciner la démocratie, en s'érigeant d'abord en contre pouvoir et ensuite à lutter contre les dérives institutionnelles.

    Paragraphe 1 La société civile comme contre pouvoir

    Depuis le début des années 90, en Afrique noire francophone, la vie politique ainsi entendue, revêt d'une part des traits familiers parce que propres aux systèmes politiques démocratiques et pluralistes comme, par exemple, la reconnaissance de la compétition électorale comme mode de régulation du jeu politique. D'autre part, elle présente des éléments qui participent des processus d'inventions démocratiques propres aux sociétés africaines, traduisant à la fois leur nature de démocraties émergentes et des moments spécifiques de passage de l'autoritarisme à la démocratie, comme, par exemple, le phénomène des conférences nationales, le soudain bourgeonnement des partis politiques. Cette vie politique se caractérise ainsi par des métamorphoses ou des mutations surprenantes, par exemple l'irruption de nouveaux acteurs, comme les médias privés, mais aussi par des pesanteurs d'un autre âge politique, comme la continuelle présence des militaires.

    Comme la démocratie, la transition démocratique est le type même de concept dont le parcours théorique demeure encore ambigu et contradictoire. En effet, ce qu'on qualifie sous le vocable de  transition démocratique  a fait l'objet de plusieurs études théoriques et suscité des espoirs depuis près de trente ans avec la chute de la dictature franquiste en Espagne, la disparition des régimes militaires en Amérique Latine et surtout avec l'effondrement du bloc communiste et les vagues d'ouverture démocratique en Afrique dans les années 1990. Conçu au départ pour rendre compte d'une manière théorique du  passage à la démocratie d'un nombre croissant des pays du sud et de l'est au cours des années 1980 et ceci, dans le sillage des démocratisations ibériques, le concept se présentait alors comme contingent avec des limites spatio-temporelles. Mais avec les vagues de démocratisation des années 1990 dont la plupart se sont vite essoufflées ou ont régressé, les transitologues ont peu à peu étoffé le concept en intégrant une dimension temporelle dans l'analyse du processus. La doctrine actuelle de la  transition démocratique  est orientée vers l'analyse de ses consolidations avec un accent particulier mis sur les facteurs sociaux internes et externes susceptibles d'influencer le processus. La transition démocratique s'analyse donc en une  extension progressive du principe de citoyenneté à un nombre plus vaste de participants et/ou à un champ politique plus vaste dans la perspective d'une prise de décision collective ou par l'intermédiaire des représentants élus. Ce passage s'effectue en différentes phases : élections, consolidation et institutionnalisation.

    Il faut préciser pour lever toute équivoque que la SC en s'érigeant en contre pouvoir n'a pas vocation à s'opposer aux tenants du pouvoir, comme le ferait un parti d'opposition. La SC a ici comme mission de servir de pouvoir social pour mieux contrôler l'action du pouvoir politique.

    L'élection présidentielle de Février - Mars 2000 qui s'est soldée par la victoire du candidat Wade au 2e tour constitue un cas tout à fait exceptionnel. Sous la surveillance de l'Observatoire Nationale des Elections (ONEL), de l'organe de régulation des médias, et des observateurs internationaux, dont la francophonie, des médias privés et publics nationaux et étrangers. Cette élection s'est déroulée dans la concertation entre tous les acteurs du processus électoral, dans le calme et dans la démocratie. Ceci ne signifie pour autant que des améliorations ne sont pas à apporter à la transition démocratique. A ce titre les OSC doivent veiller à l'exercice du pouvoir en se constituant en contre pouvoir afin d'éviter la gestion solitaire du pouvoir et d'assurer pleinement la participation totale des populations.

    Selon le Professeur Assane SECK, la SC a permis l'ouverture démocratique intégrale au Sénégal. Il note que :

    Toute l'agitation qui s'en prenait si violemment aux barons n'était que l'expression de l'ouverture démocratique que connaît le Sénégal. Face à cet acquis capital, on doit reconnaître que si le parti unique donne au gouvernant une dangereuse illusion de quiétude comme celle de la chaudière active fermée (...), la démocratie, elle, fournit à tous les moyens d'une contestation salutaire. 20(*)

    En plus Alain Touraine reprend, dans Qu'est-ce que la démocratie, Ostrogorski en précisant notamment « La fonction des politiques de masses dans une démocratie n'est pas de gouverner, elle n'en sera probablement jamais capable... c'est toujours une petite minorité qui gouvernera, en démocratie aussi bien en autocratie. La propriété naturelle de tout pouvoir est de se concentrer, c'est comme la loi de gravitation de l'ordre social. Mais il faut que la minorité dirigeante soit tenue en échec. La fonction des masses en démocratie n'est pas de gouverner mais d'intimider les gouvernants. » 21(*)

    Les élites, en s'emparant des armes du colonisateur, avaient aussi hérité ou reproduit le modèle constitutionnel de la métropole coloniale, mais privé de son esprit et de son contexte. Cette appropriation malhabile a favorisé l'entrée de l'Afrique dans l'autoritarisme sous ses différentes formes : (monopartisme, coups d'Etat militaires, patrimonialisme, présidence à vie etc.). Cet autoritarisme trouvait sa justification dans la volonté des premiers dirigeants à construire l'Etat nation et du projet développementaliste sacrifiant la démocratie véritable, qui est le pouvoir du peuple, sur l'autel des tyrans et des dictateurs libéraux, socialistes et marxistes de la postcolonie.

    C'est au détour de cet échec postcolonial que les mouvements réellement démocratiques et populaires essaimèrent dans la plupart des pays africains à partir des mouvements sociaux issus de la SC, des revendications. Ces mouvements sont de véritables forces sociales qui servent de contre pouvoir. Ces contestations, dans la formulation politique exigèrent une économie nationale saine et adaptée au système mondial en place, une bonne gouvernance, de nouvelles institutions et le choix libre de leurs représentants. Ils réclament donc la participation de toutes les forces de la nation à la chose publique.

    Les OSC se sont érigées en contre pouvoir en remettant en question les régimes à leur place. Ces mouvements, rejetant le constitutionalisme des « pères de la nation », réclament un Etat de droit et la démocratie depuis le lendemain des indépendances. La vie associative contribue davantage à faire reculer l'autoritaire, l'arbitraire et se traduit par des pressions efficaces en faveur de la démocratie et de la bonne gouvernance.

    Dans ce contexte politique sénégalais marqué par une promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, qui sont devenus non seulement des conditionnalités des institutions financières internationales, mais une exigence sociale, la SC doit s'ériger en quatrième pouvoir pour que se réalise cet idéal de gestion démocratique, et pouvoir par la même occasion lutter contre les dérives institutionnelles émanant des tenants du pouvoir.

    Paragraphe 2 : La société civile face aux dérives institutionnelles

    Le système institutionnel sénégalais laisse entrevoir un régime de type présidentiel, puis présidentialiste. Sur ce point, il n'y a pas de différences marquées entre les deux périodes que nous avons distinguées depuis l'indépendance. Quant à l'Assemblée, après avoir été une chambre d'enregistrement, elle est aujourd'hui, par la présence en sein de quelques députés de l'opposition une tribune politique, mais ses capacités d'initiative en matière législative ou de contrôle du gouvernement sont extrêmement faibles.

    Cette faiblesse de l'institution parlementaire souvent subordonnée au pouvoir exécutif ouvre la brèche aux dérives institutionnelles venant de l'exécutif. Ce chevauchement entre ces deux pouvoirs marque un frein au principe de séparation des pouvoirs et au-delà un frein à la démocratie et à la bonne gouvernance. Au Sénégal, bien que la bonne gouvernance soit érigée en principe constitutionnel, son effectivité reste sujette à caution du fait de la toute puissance de l'exécutif.

    Le parlement qui est censé contrôler l'action du gouvernement reste affaibli par les majorités mécaniques, où beaucoup de députés pensent devoir leur sort beaucoup plus au président de la République qu'au peuple qui les a mandatés. Les parlementaires sont plus prompts à rendre service à ce dernier, histoire de rendre hommage à celui qui a été à l'origine de leur investiture. Les intérêts du peuple étant tout simplement relégués au second plan voire négligés. En l'absence d'un contrôle parlementaire adéquat, le pouvoir exécutif tend alors à devenir autoritaire au grand dam de la démocratie et du peuple.

    On constate après l'avènement de l'alternance une quasi concentration des pouvoirs au niveau de la présidence de la république, le parti au pouvoir et le gouvernement. Il est arrivé au Sénégal après l'alternance que le président de la république s'immisce et prend les devant sur des questions qui relèvent du domaine parlementaire ou judiciaire. La brouille qui a suivi la convocation du président de l'ANOCI par la commission des finances de l'Assemblée Nationale (AN) a témoigné de la limite du principe de séparation des pouvoirs au Sénégal, et des multiples dérives émanant de l'exécutif. Cette brouille témoigne encore de la fragilité du système démocratique et des institutions politiques au Sénégal.

    Quant au pouvoir judiciaire, il apparaît lui aussi soumis aux pouvoir exécutif, même si par rapport à d'autres Etats africains il semble jouir d'une certaine marge de manoeuvre. A ce titre Coulon en citant Sheldon Gellar souligne que « les tribunaux ont rarement statué à l'encontre du gouvernement sur les importants problèmes constitutionnels et lors des procès politiques. » 22(*)

    L'instrumentalisation de la justice s'est accrue d'une manière importante au Sénégal ces dernières années. Le cas de Idrissa Seck, ancien premier ministre avec les « chantiers de Thiès, ville dont il est le maire, en constitue un exemple. Tout laisse à voir une emprise des aspects politiques sur le droit dans cette nébuleuse. La justice sénégalaise en a beaucoup perdu de sa crédibilité du moment où jusqu'à l'heure où nous sommes, le peuple n'est édifier sur ce problème sensible qui est le détournement de déniés publics. Ce problème qui a tenu en haleine le Sénégal et les Sénégalais pendant plusieurs années témoigne de la main mise de l'exécutif sur le judiciaire. Ceci est d'autant plus évident qu'à la veille des élections présidentielles du 27 Février 2007, ont entendait le Chef de l'Etat sur les antennes de la télévision nationale déclarer que son ancien PM est innocent et qu'il accepte de revenir au bercail qu'est le PDS.

    Le président de la république s'est ainsi substitué à la haute cour de justice en donnant le verdict de cette affaire.

    La situation qui prévaut actuellement au Sénégal est selon Mamadou Dia « La matérialisation d'un état de fait qui trouve son origine dans la constitution de 2001, laquelle a engendré un bonapartisme personnaliste, sans équivalent historique».23(*) Sous l'euphorie de l'alternance de 2001, le Sénégal adopte par voie référendaire une nouvelle constitution qui à tous les égards, renforce les pouvoirs du président de la république, mais aussi participe à une concentration excessive de tous les droits entre les mains de l'exécutif. Ceci a conduit à une véritable centralisation du pouvoir, qui par ailleurs, a débouché sur une paralysie dans le fonctionnement normal des institutions républicaines.

    .

    Le rôle de la SC devrait être dans ce cas de figure de sensibiliser les populations en amont sur les dispositions de la nouvelle constitution qu'elles étaient appelées à adopter par référendum. Ainsi quelques années seulement après l'alternance, nous constatons que les nouveaux dirigeants, loin de se préoccuper à rétablir les bases institutionnelles d'une véritable démocratie pour le Sénégal, se sont évertués, au contraire à tenter de renforcer le pouvoir du président, devenu aujourd'hui quasi monopolistique, sur l'ensemble de l'appareil d'Etat. Cette entreprise a commencé par une accélération de la transhumance politique, ouvertement encouragée par d'importants secteurs du parti au pouvoir. Cette dernière n'est rien d'autre que le résultat de manoeuvres politiciennes encouragées pour permettre le repêchage des battus de la dernière élection présidentielle, à condition qu'ils viennent renforcer le clan présidentiel, ce qui a, du reste, contribué à l'assombrissement des horizons de la révolution populaire et démocratique du 19 mars 2000.

    SECTION 2 : La section civile face à la corruption politique

    « Que se passe-t-il lorsque les acteurs politiques ne sont pas soumis aux demandes des acteurs sociaux et ...... leur représentativité ? Ils peuvent, aussi déséquilibrés, basculer du côté de l'Etat et déduire la première condition d'existence de la démocratie, la limitation de son pouvoir »24(*). Ce constat de Alain Touraine s'applique parfaitement aux démocraties africaines où on note une crise de la représentativité mais aussi une insatisfaction des demandes sociales.

    Paragraphe. 1 : La crise de la représentativité

    On note de plus en plus dans l'espace politique sénégalais une crise de la représentativité démocratique. Cette crise est due à la faiblesse des partis politiques d'opposition et de leur manque d'organisation. Force est de souligner que les partis politiques ne remplissent pas le contrat qui les lie avec les citoyens.

    Il apparaît nettement aux yeux de l'observateur de la vie politique sénégalaise que le régime en place est le fruit d'une unité de partis ressemblés en 1999 dans la « coalition pour l'alternance » qui a permis avec un programme commun, une stratégie commune et un candidat commun, le ballottage du premier tour des élections de février 2000 puis cette coalition s'est transformée en Front pour l'alternance (FAL) au second tour du scrutin, pour assurer le triomphe de l'alternance, en faisant bloc le 19 mars autour du candidat Abdoulaye Wade.

    Depuis lors, les masses populaires sont confinées dans un oubli des dirigeants politiques et chefs de partis qui, dans les moments de pré campagne et de campagne électorale, avaient fait la promesse d'une amélioration des conditions de vie sociale des Sénégalais. Ces promesses tournaient autour de la création d'emplois, de subventions aux producteurs dans le monde rural, d'appui aux éleveurs et agriculteurs, de l'accès des femmes au poste de haute responsabilité...

    Aujourd'hui, force est des constater que les conditions de vie de ces populations qui ont conduit ces dirigeants de partis politiques au pouvoir, se dégradent de plus en plus par l'accentuation de la pauvreté surtout en milieu rural. Ces masses sont tentées de porter peu d'égard à la chose politique au Sénégal et on note un désaveu dans la plupart des discours des Sénégalais. Ce désaveu se manifeste par une attitude des populations à mettre tous les dirigeants et leurs partis dans le « même sac ». Les dirigeants sont alors perçus ici comme des « traîtres » qui ne respectent pas leurs promesses. Le manque d'intérêt des citoyens vis-à-vis de la chose politique porte un coup dur à la démocratie participative.

    C'est dans ce contexte de divorce entre le citoyen et les partis politiques censés défendre leurs intérêts que doit se jauger l'action des organisations de la société civile en faveur des populations. N'ayant de moyens économiques suffisants pour faire face aux crises, les organisations de la société civile doivent peser de leur poids pour pousser les gouvernants à revoir leurs politiques sociales. La société civile n'ayant pas pour vocation la conquête du pouvoir à l'image des partis politiques doit chercher à redonner espoir à la population désemparée par cette crise de la représentation. Ce rôle prométhéen peut sembler d'emblée difficile du fait de la faiblesse des moyens dont disposent ces organisations.

    Pour apporter sa partition à ce combat citoyen, la société civile aura ici la vocation d'amener les populations à ne pas placer entièrement leur sort aux dirigeants politiques. Des actions incitant à l'initiative privée doivent être menées pour sortir la population de la paupérisation et consacrer leur indépendance financière vis-à-vis des hommes politiques.

    Par ces actions, la société civile contribuera à freiner le clientélisme, la corruption et le népotisme dans le champ politique sénégalais. Ces attitudes portent un coup dur à la démocratie car ne conférant par la rationalité du choix de l'électeur. Quelques années après l'avènement de l'alternance, les populations ont senti la faiblesse sur laquelle sont bâti les partis politiques qui devaient prendre en charge leurs revendications. Tout d'abord, on assiste à l'éclatement du FAL (front pour l'alternance) composé de plusieurs partis politiques qui avaient contribué à l'avènement de l'alternance.

    Du côté de l'opposition le CPC (cadre permanent de concertation des partis de l'opposition) peine à faire bloc contre les tenants du pouvoir. Finalement les populations se retrouvent dans le dilemme et ont toute la difficulté du monde pour savoir « où donner de la tête ». A cela s'ajoute une société civile qui n'est pas toujours ressentie à la base.

    Dans ce climat politique désordonné, les masses populaires ont besoin de l'unité des dirigeants surtout ceux de l'opposition car à l'heure où nous sommes, les artisans de l'alternance n'ont pas répondu aux attentes portées sur eux en 2000. Les Sénégalais ne veulent plus de politique faite d'irresponsabilité, de gabegie, d'incompétence, de magouilles dans les affaires de l'Etat, de détournement des deniers publics et d'injustice dans toutes les sphères de la vie nationale.

    Le peuple est encore aujourd'hui plus exigeant, aspire à davantage d'actions communes et concrètes, et formule l'espoir de voir ses préoccupations sociales prises en charge par les tenants du pouvoir. La société civile doit être le porte-étendard de ces préoccupations, et, à travers des campagnes médiatiques, des pétitions et d'autres formes de participations politiques, les porter au niveau des décideurs publics.

    Par cette démarche participative la société civile aurait participé à la consolidation de l'image de la démocratie dans ce pays, qui après les euphories du début des années 2000 continue encore d'être citée comme exemple de démocratie en Afrique et dans le monde.

    La crise de la représentativité est accentuée par les nombreuses transhumances notées à la veille de l'alternance. Avec ce phénomène on assiste à la fragilisation de l'opposition. Les transhumants font grossir les rangs du PDS et vont être à l'origine de beaucoup de problèmes internes. « Les nouveaux venus » seront à l'origine des velléités de positionnement à l'intérieur du parti contre les « militants de première heure ». Le parti a connu des déchirures au niveau de toutes les instances et les batailles entre frères libéraux minent le parti.

    Son secrétaire général, par ailleurs président de la république, s'est plus donné la peine de régler les crises internes de son parti que d'apporter des réponses concrètes aux véritables attentes des populations.

    La forte transhumance témoigne de la « fin » où de l'inexistence même des idéologies au sein du parti. Par ailleurs, leur mission de socialisation politique reste faible, voire inexistante d'où la nécessaire implication des acteurs de la société civile, pour un changement des mentalités, pour un culture de la démocratie, pour un éveil des consciences et une volonté commune de participation populaire.

    Paragraphe 2 : Les partis politiques : entre oligarchie et insatisfaction des demandes sociales

    La corruption politique qui affecte lourdement la démocratie prend le plus souvent source au sein des partis politiques. Face à la conjonction sociale actuelle du Sénégal, caractérisée par une forte accentuation de la pauvreté, des attentes aux droits de l'homme et de la mauvaise gouvernance. Les leaders politiques n'inspirent plus confiance aux masses populaires. Leur rôle comme l'entend Philippe Brand, « les représentants parlent et agissent au nom d'autres individus enfermés dès lors dans un statut beaucoup plus passif. Représenter c'est donc au sens le plus large du terme, tenir lieu de ... ; être là à la place de ... c'est aussi exercer au nom d'autrui une fonction de clarification de ses intérêts et aspirations, voie de direction d'un groupe »25(*). Ce rôle s'effrite à mesure qu'ils durent à la tête des partis et que s'accentue leur agissement clientéliste.

    On constate une oligarchie au sein des partis politique en Afrique du fait de la lancinante question du renouvellement des leaders. Cette question du renouvellement des leaders au sein des partis corrobore le problème du renouvellement des élites nationales.

    Les partis politiques sont régis par des séquences chroniques auxquelles correspondent des caractéristiques politiques propres. (Tableau)

    La lecture du tableau nous permet de constater que les partis se construisent, se consolident, vieillissent. La quatrième phase est celle de reconstruction par le renouvellement des instances, ou le parti disparaît.

    Séquence chronique

    Caractéristiques politiques

    Phase 1

    Construction

    _Ferveur militante.

    _Forte inclination au débat d'idée.

    _Cercle dirigeant en équilibre fluide.

    _Jeunesse relative des leaders.

    Phase 2

    Consolidation

    _Succès électoraux.

    _Nouveaux militants préoccupés d'efficacité.

    _Renforcement de l'emprise sur le parti des élus ou le cas échéant des responsables gouvernementaux.

    _Stabilisation des luttes au sein du cercle dirigeant.

    Phase 3

    Vieillissement

    _Stagnation électorale.

    _Dépérissement des débats d'idée interne.

    _Fossilisation des luttes au sein du cercle dirigeant.

    _Vieillissement biologique des leaders.

    Phase 4

    Reconstruction ou échec des tentatives de renouvellement.

    _Déclin électoral.

    _Emergence au sein du parti de courants.

    _Contestation ouverte du leadership institué.

    _Renversement de l'équipe dirigeante ou nécrose du parti.

    Source : Philippe Brand, Sociologie politique, huitième édition, LGDJ 2006.

    La longévité des dirigeants politiques à la tête des partis a fini par ébranler les bases démocratiques qui devaient régir le fonctionnement de ces derniers. Il s'ensuit des déchirures à l'intérieur et des crises qui finiront par reléguer les préoccupations des populations au second plan.

    Dans ce contexte de troubles internes les organisations de la société civile doivent jouer un rôle salvateur pour la protection de la démocratie et la prise en charge des demandes sociales. Au Sénégal, les partis d'opposition affaiblis par ces crises n'ont pas réussi à construire un bloc fiable capable de faire face au pouvoir afin de garantir la démocratie. D'ailleurs, le manque d'organisation, les querelles internes de positionnement qui caractérisent les partis de l'opposition sénégalaise a poussé le chef de l'Etat à les qualifier, souvent dans ses discours, « d'opposition de salle ». Cette formule traduit le léger poids que représentent ceux-ci à ses yeux. En outre, cette formule prouve que le parti au pouvoir avec à sa tête le chef de l'Etat n'est pas inquiété par son opposition. C'est ce qui explique sans doute le néo-patrimonialisme constaté dans la gestion de l'Etat sénégalais au lendemain de l'alternance.

    L'espace politique sénégalais laisse entrevoir alors une insatisfaction des demandes sociales d'une part, mais aussi un retour du néo-patrimonialisme d'autre part dus à la faiblesse des partis d'opposition et des moyens d'action des OSC. La corruption qui connu son paroxysme au lendemain de l'alternance eu égard aux nombreuses transhumances notées, mine la démocratie. La corruption favorise la satisfaction de l'intérêt personnel au détriment de l'intérêt collectif.

    Aussi, le forum civil, qui est membre de Aid-Transparency international s'illustre dans ses combats contre la corruption. Il mène des enquêtes et publie des rapports sur l'état de la corruption au Sénégal. Les études menées par le forum civil se limitent à l'administration publique. Mais d'autres formes de corruption existent à d'autres niveaux de la société.

    Il est impossible de parler de démocratie sans opposition crédible et républicaine. Cette opposition doit être un cadre permanent d'observation et d'évaluation des actions des gouvernants. Il n'est point de démocratie aussi sans une implication totale de toutes les composantes de la nation à la gestion des affaires publiques. La gestion participative est aussi incontournable en matière de démocratie.

    Il est en outre impossible d'envisager la démocratie sans une société civile dynamique comme l'affirme fort élogieusement Tocqueville « il n'y a pas de démocratie sans une société civile dynamique. Mais il n'y pas de société civile dynamique sans l'engagement personnel des citoyens libres et responsables »26(*). Dans ce contexte politique marqué par le pluralisme et l'échec des partis politiques dans la prise en charge des préoccupations des citoyens, nul doute que le dynamisme de la société civile est devenu un donnée avec laquelle doit compter toute stratégie de consolidation de la démocratie.

    L'heure est à la réinvention d'une société civile capable de constituer un véritable contre-pouvoir, vecteur de sensibilisation. La société civile indépendamment des partis politiques instaure des cadres permanents de dialogue afin d'instituer la démocratie véritable.

    La lutte pour le renforcement et la permanence de la liberté d'expression est une donne de la lutte pour la démocratie et des droits de l'homme. A ce niveau l'avènement de la presse privée est salutaire.

    L'alternance est une « expérience cruciale » en politique, où elle accomplit la justice démocratique. Elle seule permettra de mettre fin à la transition en cours en Afrique, c'est-à-dire indiquera clairement que celle-ci a enfin véritablement résolu de prendre place dans le train de la démocratie, constatée depuis le début des années 1990. Elle est donc le grand défi politique à relever, à terme, contre les conservatismes en tous genres qui ont, pour la plupart, leur centre au coeur du puissant dispositif du capitalisme monopolistique international, où ils inspirent, structurent et participent diversement, voire arment nombre de coups d'Etat,dans des Etats sans personnalité souveraine et affaiblis par la mauvaise gouvernance qui a appelé les politiques d'ajustement structurel, dans le dos de la mondialisation positive qui, a contrario, presse les dictatures à lâcher prise, en particulier par la conditionnalité de l'aide au développement - de la démocratie, entendu en un sens global qui comprend tous les aspects sous lesquels les membres d'une société sont appelés à s'épanouir ou tous les droits auxquels ils aspirent.

    N'ayant pour vocation de conquérir le pouvoir, la société civile doit intensifier ses sensibilisations afin d'instaurer le culte et la culture démocratique dans ce pays qui est souvent pris comme exemple en Afrique et dans le monde.

    BIBLIOGRAPHIE

    OUVRAGES GENERAUX

    Alain TOURAINE, Qu'est ce que la démocratie ? , Fayard 1994

    Alexis de TOCQUEVILLE, De la démocratie en Amérique (1835 et 1840) Garnier Flammarion

    Arlette Heymann DOAT, Les régimes politiques, Paris la Découverte 1998

    Assane SECK Sénégal, émergence d'une démocratie moderne 1945-2005 un itinéraire politique, Paris Kartala 2005.

    Bernard BRUNETEAU ; Les totalitarismes, Paris Armand Colin 1999

    Dominique AGUESSY, Pouvoirs et Démocratie à l'épreuve du syndicalisme, Dakar 1994

    Dominique COLAS, sociologie politique, Paris PUF 1994

    Fabien EBOUSSI_BOULAGA, Les conférences nationales en Afrique noire, une affaire à suivre, paris Kartala, 1993

    George BURDEAU ; La démocratie, Paris Seuil 1956

    Jean COPANS, La longue marche de la modernité africaine. Savoirs, intellectuels, démocratie, Paris, Kartala, 1990

    Jean François MEDARD (études réunies par), Etats d'Afrique noire. Formation, mécanismes et crise, Paris Kartala, 2000

    Jean Pascal DALOZ et Patrick QUANTIN, Transitions démocratiques africaines ; Paris Kartala 1997

    Jérôme LAFARGUE, Contestation démocratiques en Afrique, Paris Kartala 1996

    John Clayton THOMAS, Actions publiques et participation des citoyens : pour un gestion démocratique revitalisée.

    Larry Diamond, Juan J Linz, Seymour M Lipset, Les pays en développement et l'expérience de la démocratie, Nouveaux Horizons 1990

    Mamadou DIA, Echec de l'alternance au Sénégal et crise du monde libéral, l'harmattan, 2005

    Momar Coumba DIOP,Le Sénégal contemporain, Paris Kartala, 2002

    Paul LEROY, Les régimes politiques du monde contemporain, Presse universitaire de Grenoble, 2001

    Philippe Brand, Sociologie politique, huitième édition, LGDJ 2006.

    Raymond ARON, Démocratie et totalitarisme, Paris Gallimard, 1965

    Robert DAHL De la démocratie, Nouveaux Horizons 1998.

    Timothée NGAKOUTOU, Femmes africaines et démocratie, Dakar 1995

    Thierry PERRET, Afrique, voyage en démocratie, les années cha_cha

    ARTICLES

    Alioune Badara DIOP, « Espace électoral et violence au Sénégal » in Africa developpement vol XXVI, N0 1-2, 2001

    Augustin LOADA, « Réflexion sue la société civile en Afrique : le Burkina Faso de l'après Zongo », 1999

    Christian COULON « Démocratie sénégalaise » in démocratie sénégalaise, bilan d'une expérience, 1992

    Jean F. BAYART « civil society in Africa »

    Mamadou Mbodj, « Le Sénégal entre ruptures et mutation citoyennes en construction » in

    Diop (MC) Le Sénégal contemporain, Paris Kartala, 2002

    Serigne DIOP « La transition démocratique, l'exemple du Sénégal» in l'Afrique en transition vers le pluralisme politique.

    REVUES

    Madeleine GRAWITZ et Jean LECA Traité de science politique, Tome 2, Les régimes Politique africaine : Sénégal la démocratie à l'épreuve

    Revue sénégalaise de sociologie N° 2/3 Janvier 1998/

    .

    TABLE DES MATIERES

    IN MEMORIUM..........................................................................................I

    DEDICACES...............................................................................................II

    REMERCIEMENTS.....................................................................................III

    LISTE DES ABREVIATIONS...........................................................................1

    INTRODUCTION GENERALE.........................................................................2

    PREMIERE PARTIE

    L'EMERGENCE DE LA SOCIETE CIVILE A L'AUBE DES TRANSITIONS DEMOCRATIQUES......................................................................................8

    CHAPITRE PREMIER

    LA SOCIETE CIVILE : UN ACQUIS DEMEOCRATIQUE.......................................9

    Section 1 LA SOCIETE CIVILE : UNE NOTION TRANSPOSEE ..............................10

    Paragraphe1De l'état embryonnaire de la société civile...............................................10

    Paragraphe 2 le rôle des intellectuels dans l'émergence de la société civile.....................13

    SECTION 2 : COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA SOCIETE CIVILE ET L'ETAT............................16

    Paragraphe 1 : La société civile, un partenaire de l'Etat.............................................16

    Paragraphe 2 : La Société Civile comme relais entre l'Etat et les citoyens......................19

    CHAPITRE DEUXIEME

    LES AMBIGUITES DE POSITIONNEMENT DE LA SOCIETE CIVILE PAR RAPPORT AU POLITIQUE..........................................................................................21

    SECTION I : LES DOMAINES D'INTERVENTION DE LA SOCIETE CIVILE..............22

    Paragraphe I : L'espace socio économique............................................................22

    Paragraphe II : L'espace politique.....................................................................27

    SECTION 2: LA SOCIETE CIVILE AUX ANTIPODES DES CALCULS POLITICIENS...31

    Paragraphe I : La dimension apolitique de la société civile.........................................31

    Paragraphe II : L'autonomie de gestion des organisations de la société civile...................35

    DEUXIEME PARTIE

    LA SOCIETE CIVILE ET LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE..............................38

    CHAPITRE PREMIER

    LE ROLE DE LA SOCIETE CIVILE DANS LE PROCESSUS ELECTORAL................39

    SECTION 1 : LA LUTTE POUR LA TRANSPARENCE.........................................40

    Paragraphe 1 : La transparence: facteur de stabilité sociopolitique................................40

    Paragraphe 2 : Le maintien du dialogue politique ...................................................44

    SECTION 2 : LA FORMATION ET L'ENCADREMENT DES POPULATIONS.............48

    Paragraphe 1 : La sensibilisation pour une culture démocratique..................................48

    Paragraphe 2 : De l'éveil d'une conscience citoyenne...............................................52

    CHAPITRE DEUXIEME

    LA SOCIETE CIVILE DANS LES TRANSITIONS DEMOCRATIQUES.....................56

    SECTION 1 : LA SOCIETE CIVILE FACE AUX DEFIS DEMOCRATIQUES..............57

    Paragraphe 1 La société civile comme contre pouvoir .............................................57

    Paragraphe 2 : La société civile face aux dérives institutionnelles ................................61

    SECTION 2 : LA SECTION CIVILE FACE À LA CORRUPTION POLITIQUE..............................64

    Paragraphe. 1 : La crise de la représentativité.........................................................64

    Paragraphe 2 : Les partis politiques : entre oligarchie et insatisfaction

    des demandes sociales ...................................................................................67

    BIBILOGRAPHIE.......................................................................................71

    TABLE DES MATIERE................................................................................74

    * 1 NIANG (A), « La société civile une réalité sociale en question » in Revue sénégalaise de sociologie N 2-3 ; UGB St Louis dec 2000 P 34

    * 2 SECK (A) Sénégal, émergence d'une démocratie moderne 1945-2005 Paris karthala 2005, P 198

    * 3 Coulibaly A L, Une démocratie prise en otage par ses élites, Dakar Sentinelles 2006 P 225

    * 4 Jean Leca « la démocratie à l'épreuve des pluralismes »in Revue française de science politique, Année 1996, Volume 46, Numéro 2

    * 5 O. Diagne. « L'intellectuel et la société civile » : revue sénégalaise de sociologie

    * 6 G. Fulga. Connaissance sociale et pouvoir politique. Paris : l'Harmattan, 2005. p. 215

    * 7 O. SEYE. « Pour une définition de la société civile » : Sud W.E N° 1164 du 22/02/97. P. 12

    * 8 C Z Nare. «Être femme intellectuelle en Afrique : de la persistance culturelle » : Afrique et développement, vol XXII 1997. p.70. cité par Mamadou el Bachir Kanouté dans Revue sénégalaise de sociologie N° 2-3 janvier 1998. p289

    * 9 (K), Marx. Contribution à la critique de l'économie politique. Paris : Editions sociales. 1957 p.4

    * 10 Lexique de politique 7e édition, Dalloz 2001

    * 11 (A), Touraine. Qu'est- ce que la démocratie ? Paris : Fayard. 1994. p.91

    * 12 Ib. p.93

    * 13 Olivier(I), Le vote, 2e ed Montchrestien 2000, p.23

    * 14 DIOUF (M) libération politiques ou transitions démocratiques : perspectives africaines, CODESRIA, 1998 P. 32

    * 15 DIOP (AB) Espace électoral et violence au Sénégal in Africa developpement vol XXVI, N0 1-2, 2001

    * 16 DIOP (A.B).Opcit.

    * 17 Soleil Frère (M), Presse et démocratique en Afrique francophone. Les mots et les maux de la transition au Bénin et au Niger, Paris Kartala, 2000

    * 18 Mbodj (M), « Le Sénégal entre ruptures et mutation citoyennes en construction » in

    Diop (MC) Le Sénégal contemporain, Paris Kartala, 2002

    * 19 Mbodj (M), op-cit

    * 20 Seck (A), Sénégal, émergence d'une démocratie moderne, paris Kartala, 2005

    * 21 Touraine (A), Qu'est ce que la démocratie ? , Fayard 1994 P. 138

    * 22 Coulon (C), « Le Sénégal : développement et fragilité d'une semi démocratie » in textes réunis par Larry Diamond Juan Linz Lipset, Les pays en développement et l'expérience de la démocratie, Nouveaux Horizons, 1996

    * 23DIA (M) Echec de l'alternance au Sénégal et crise du monde libéral, l'harmattan, 2005, P.79

    * 24 Touraine (A), Qu'est-ce que la démocratie. Paris : Fayard, 1994, p.85

    * 25 Brand (P). sociologie politique ; huitième édition LGDJ, 2006, p.507.

    * 26 Tocqueville (A), De la démocratie en Amérique. (1835 et 1840) Garnier Flammarion






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand