UNIVERSITE DE GOMA
UNI.GOM.
B.P. 204 Goma
Faculté de Droit
La protection légale des aires
protégées face aux pressions des populations riveraines en droit
positif congolais.
Par : Albéric LWANZO VAKE -
VAYIVWIRA
Travail de fin de cycle présenté et
défendu en vue de l'obtention du titre de Gradué en Droit
Option : Droit
économique et social
Directeur : Maître Christophe MAMBOLEO
ZAWADI
Assistant
Année académique :
2005-2006
Epigraphes
« Le droit est droit, sans doute, mais les
hommes le plient en tous sens, le ploient à leurs intérêts,
à leurs fantaisies, voire à leur sagesse. Flexible droit, droit
sans rigueur. Faut-il, d'ailleurs, s'en lamenter ? Il est peut-être
salutaire que le droit ne soit pas cette massue, ce sceptre qu'on voudrait
qu'il fût... »
Jean CARBONNIER
« Le fait que la dimension éthique soit
largement ignorée ne signifie pas qu'elle est sans importance. Les
arguments éthiques peuvent en définitive constituer la base la
plus solide de la conservation de la diversité
biologique. »
Douglas WILLIAMSON
« Nous ne nous étonnerons guère en
affirmant que notre ambition, au Zaïre, est de faire de notre beau pays le
paradis de la nature. Ne vous attendez pas que nous exploitions à tort
et à travers la peau des crocodiles pour fabriquer des sacs à
main, sans avoir étudié le comportement de ces sauriens au cas
où ils venaient à manquer. (...) car nous voulons que, lorsque
les savants auront transformé le monde des vivants en un milieu
artificiel, il existe encore au Zaïre, dernier refuge de l'humain, une
nature « à l'état pur »
MOBUTU SESE SEKO
DEDICACE
A notre très cher père,
Gilbert VAKE-VAYIVWIRA KANDOLI
De qui nous tenons l'amour du vert !
Albéric LWANZO VAKE-VAYIVWIRA
REMERCIEMENTS
Nous adressons nos sincères remerciements à vous
tous qui avez, de près ou de loin, contribué à la
réalisation de ce modeste travail.
De prime abord, à Maître Christophe MAMBOLEO
ZAWADI pour avoir offert sa disponibilité permanente lors de la
direction de ce travail ;
A nos père et mère Gilbert VAKE-VAYIVWIRA
KANDOLI et Honorine KAVIRA KIVERWAVUKUTU KYANOWIRWE, pour ce qu'ils n'ont
jamais cessé d'être à notre égard ;
A notre cher frère Shelo KASEREKA KIBAMBI, pour son
inestimable soutien, son courage et son optimisme au cours de ces dures
années d'études à présent et à
venir ;
A toutes nos soeurs et nièces chéries, dont
LWANZO VAKE Patricia, pour l'intersubjectivité vraiment réussie
que nous ne cessons de partager ;
A Maître Christol PALUKU et toute l'équipe de
AAP-Goma, pour les ouvrages combien précieux mis à notre
disposition
A Emmanuel NZIWA, Jean-Louis MUNAGHA, Nicolas MUSAVULI, Billy
MUKENDI, Faustin TAVUSIVA, Jim Pascal et aux familles MASIRIKA,
Melchisédech KABUYAYA, Henri MAKOMBANI et Albert SAHANI pour notre
amitié ;
A toi Justine KAMBERE pour la lumière de ton
sourire ; à Roz NGOY, Thérèse SAMASUMU, à
toutes les Louise, à Arlette M, Claire, Wivine UMUTONI et tous les noms
de femmes qui nous ont été donnés ;
A nos vaillants compagnons de lutte Gygy, Ridelle,
Elysée, Claudine, Lwanzo, Justin, Pascal, Oscar, J.P., Alain, Janvier
pour l'éclat de leurs rires.
Que chacun de vous trouve ici l'expression de notre profonde
gratitude.
Albéric LWANZO VAKE-VAYIVWIRA
SIGLES ET ABREVIATIONS
Art. : Article
C.D.B. : Convention sur la
Diversité Biologique
C.R.E.F. : Réseau pour la
Conservation et la Réhabilitation des Ecosystèmes Forestiers
CITES : Convention sur le Commerce
International des Espèces de faune et de flore sauvage menacées
d'Extinction
COO.PE.VI.: Coopérative de Pêche de
Vitshumbi
Ed. : Edition(s)
et al : et alii (et d'autres
auteurs)
et ss : et (pages)
suivantes
F.A.O. : Food and Agricultural
Organisation (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et
l'agriculture)
I.C.C.N. : Institut Congolais pour la
Conservation de la Nature
I.Z.C.N. : Institut Zaïrois
pour la Conservation de la Nature
Ibid. : Ibidem (dans le
même ouvrage du même auteur)
L.G.D.J. : Librairie
Générale de Droit et de Jurisprudence
Loc. Cit. : Loco Citato (Article
cité)
n° : Numéro
Op. Cit. : Opere Citato (Ouvrage
cité)
p. : Page
P.N.U.D. : Programme des Nations Unies
pour le Développement
pp. : Pages
R.D.C. : République
Démocratique du Congo.
R.N.I.E : Réseau National
pour l'Information Environnemental
s.d. : Sine die (sans date
d'édition)
s.l : Sine loco (sans lieu
d'édition)
t. : Tome
U.C.B. : Université
Catholique de Bukavu
U.I.C.N. : Union Internationale
pour la Conservation de la nature
U.L.P.G.L. : Université Libre des
Pays des Grands Lacs.
UNESCO : United Nations Educational,
Science and Cultural Organisation (Organisation des nations Unies pour
l'Education, la Science et la Culture)
Vol. : Volume
W.W.F. : World Wildlife Fund (Fonds
Mondial pour la nature)
INTRODUCTION GENERALE
1.
Problématique
Depuis la création du Parc National Albert en 1925, la
République Démocratique du Congo connaît l'existence, sur
son territoire, des terres délimitées dans le but de la
conservation de la nature. Aujourd'hui, ces aires protégées tant
par des textes législatifs nationaux que par des instruments juridiques
internationaux, occupent une surface totale équivalent à 9,1 % du
territoire national pour un idéal de 15%1(*). Ces aires jouissent d'un statut spécial
réglementé par un arsenal juridique important: ordonnance loi
n° 69/041 du 22 août 1969 relative à la conservation de la
nature, loi n° 82-002 portant réglementation et la chasse, loi
n° 011/2002 du 29 août 2002 portant code forestier, etc.
Les écosystèmes protégés au sein
de ces aires le sont en raison de leurs valeurs culturelles, touristiques,
économiques, écologiques et environnementales. Ainsi, il a
été créé un corps de gardes ayant qualité
d'Officiers et agents de Police Judiciaire chargés de la protection de
ces aires. Un régime répressif et des infractions sont
consignés dans les textes légaux relatifs à la
conservation de la nature, à la pêche, à la chasse et au
régime forestier.
Aujourd'hui, la poursuite des objectifs assignés
à ces aires protégées se heurte aux pressions des
populations environnantes cherchant à satisfaire leurs besoins
économiques. Cette action anthropique menace d'extinction la
diversité biologique de certaines de ces aires protégées,
notamment par l'agriculture; l'élevage, le braconnage, la carbonisation,
le feu de brousse incontrôlé et même des constructions
anarchiques. En effet, la conjoncture socio-économique actuelle du pays
oblige ces populations à s'en prendre à la faune, à la
flore et aux terres de ces aires protégées pour survivre, sous
le regard impuissant de l'Etat et de ses organes de surveillance.
C'est à ce niveau que se posent les questions
essentielles : de quels droits peuvent se prévaloir les populations
riveraines sur les ressources naturelles des aires protégées?
Quelles peuvent être les causes de l'inefficacité des lois et du
système de surveillance de ces aires protégées? Quelles
solutions y apporter et quelles responsabilités doivent assumer les
divers partenaires en vue d'une conservation durable?
2.
Hypothèses
Les divers acteurs de la gestion des ressources naturelles
disposent, certes, des droits sur ces ressources: un droit de passage, un droit
de prélèvement, un droit d'exploitation, un droit d'exclusion et
un droit de protection2(*).
La gestion de la biodiversité au sein de ces aires
protégées devrait se repartir entre les divers acteurs en
fonction de leurs droits respectifs et de leurs responsabilités. Il est
important de concilier ces droits et ces responsabilités.
L'inefficacité des efforts de protection de ces aires
protégées serait liée aux diverses responsabilités
de chacun des acteurs de la conservation (Etat, populations, organisations non
gouvernementales, associations). De leur irresponsabilité
découleront plus d'un problème nuisible à la conservation
: caractère obsolète des lois, inapplication et mauvaise
compréhension des lois, mauvaises pratiques culturelles, sociales,
politiques, sociales, économiques, etc.
Les diverses questions qui en découlent nous portent
à re-considérer la conservation de la biodiversité au sein
des aires protégées. Loin de n'être qu'une affaire de
l'Etat, elle devrait être consentie et consensuelle et impliquer ainsi
l'ensemble des acteurs dans une bonne conciliation des droits et des
responsabilités. Sans privilégier un aspect au détriment
d'un autre, conservation des ressources naturelles et besoins
économiques des populations riveraines devraient concourir un objectif
unique: le développement durable.
3.
Intérêt du sujet
La nouvelle génération des droits de l'homme
dits « Droits de la troisième
génération » compte parmi ses composantes le droit
à l'environnement sain que la Constitution de notre pays, notamment en
ses articles 53 et suivants, n'a pas sous-estimé et qu'elle a tenu
à poser sans ambages parmi les droits garantis à tout congolais.
Il est important de chercher à cerner la portée de cette
disposition constitutionnelle sous tous les aspects. C'est ainsi que notre
travail peut constituer un premier pas pour nous familiariser avec cette
nouvelle branche du Droit qu'est le Droit de l'Environnement en abordant en
premier lieu la question en rapport avec les aires protégées et
les liens avec les populations environnantes.
Loin de n'être qu'une question d'intérêt
national, la protection et la conservation de la biodiversité concerne
au plus haut niveau la vie et les institutions internationales. En effet,
plusieurs sites naturels en République Démocratique du Congo,
soit cinq parcs nationaux sur neuf, sont classés sites du patrimoine
commun de l'humanité. La législation nationale sur la question
serait donc ajustée au diapason des instruments juridiques
internationaux.
Au delà de la question en rapport avec le gestionnaire
et le bénéficiaire de ce patrimoine commun de l'humanité,
il est clair que la mise en valeur des aires protégées contribue
aussi sensiblement à l'amélioration des conditions
socio-économiques des populations riveraines, à la promotion du
tourisme et partant, de l'économie nationale.
Bien plus, la conservation de ces écosystèmes
porte un intérêt environnemental mondial. Outre l'existence des
milliers d'espèces animales et végétales endémiques
et d'autres en voie de disparition, les écosystèmes forestiers de
ces aires protégées contribuent au maintien de l'équilibre
des gaz atmosphériques, au recyclage des substances nutritives, à
la régulation du climat, au maintien du cycle de l'eau et à la
formation du sol3(*).
L'intérêt de la protection de ces aires protégées
est donc planétaire, global. Les menaces et pressions qu'elles subissent
sont un danger non seulement pour l'homme congolais mais aussi pour
l'humanité entière et la pérennité de la vie sur
terre.
4. Méthodes d'approche
En vue de confirmer ou d'infirmer les hypothèses ci
haut, nous aborderons la question par une approche juridique et sociologique,
ou mieux anthropologique. Il s'agit d'une relecture de la loi en face de la
réalité qu'elle réglemente et dont elle est censée
naître. L'accès aux diverses informations indispensables à
notre démarche nous sera facilité par la technique documentaire.
C'est à la lumière de divers rapports, lois et ouvrages de
différents doctrinaires et chercheurs que nous tâcherons d'aborder
cette question.
5. Délimitation du travail
La structure bipartite de ce travail nous porte à
aborder la question en deux grandes séquences. D'abord, grâce
à divers concepts et notions, nous essayerons de définir et
circonscrire le problème qui est le notre par la mise en exergue des
éléments nécessaires à cette étude. Ensuite,
après une brève présentation des faits et du droit, nous
essayerons, dans la limite de nos capacités, de proposer une solution
pour une conservation durable, à la lumière, bien sûr, des
avis et considérations de divers chercheurs et doctrinaires.
Chapitre I : LA BIODIVERSITE ET SA CONSERVATION
INTRODUCTION
La Convention sur la Diversité Biologique, ouverte
à la signature depuis le sommet de la terre qui s'est tenu à Rio
de Janeiro en juin 1992 et ratifiée par la République
Démocratique du Congo le 3 décembre 1994 se donne pour objectif
premier « la conservation de la diversité biologique
»4(*). Ces mots
qui, il y a quelques décennies, ne relevaient que d'un vocabulaire
spécifique, deviennent aujourd'hui un centre de gravité pour une
interdisciplinarité sans égale. En République
Démocratique du Congo, ce concept est plus que d'actualité dans
la mesure où ce pays « n'est pas seulement le pays d'Afrique
possédant la plus grande biodiversité : il peut aussi revendiquer
une expérience et un passé d'activités liées
à la conservation et à la recherche initiées dès le
début du vingtième siècle »5(*). Aussi, s'est-il
doté d'un corps de règles juridiques relatives à ce
domaine en vue de le réglementer. En effet, le parc national des
Virunga, créé en 1925, est le premier parc national en Afrique.
Dans les lignes qui suivent, nous essayerons de comprendre la portée des
concepts et les relations entre eux afin de circonscrire la question qui est la
nôtre.
Section I : APPROCHE NOTIONNELLE
§ 1 : De la biodiversité
En son article 2 al. 5, la Convention sur la Diversité
Biologique définit la Diversité biologique ou biodiversité
comme « la variabilité des organismes vivants de toute origine
y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et
autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques
dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des
espèces et entre les espèces ainsi que des
écosystèmes ». A côté de cette
définition technique, il est des auteurs qui proposent des
définitions utilitaires telle « le soutien de la base de
ressources variée qui permet aux économies des ménages de
réagir, ressources dont la gestion (nourriture, abri, énergie,
revenu,...) implique la conservation de leur diversité à divers
niveaux, tout en permettant à leurs processus évolutifs et
écologiques de se perpétuer »6(*).
La diversité biologique désigne ainsi la
diversité des êtres vivants, y compris l'homme qui en est partie
et acteur. Mais cette biodiversité ne s'apprécie qu'en termes de
ressources naturelles, c'est-à-dire non un ensemble de bien (Res
propriae) mais un tout cohérent constituant une base de ressources
faisant réagir l'économie des pays et des ménages. Son
importance se veut donc être largement économique, même si
les motivations de sa protection sont en majorité écologiques. En
termes plus utilitaires encore, la diversité biologique constitue un
« espace ressource », d'après les mots d'Olivier et
Catherine Barrière, chose non appropriable, extra-commercium et
qui s'identifie à une communauté usagère et gestionnaire
sans abusus sur elle ; un patrimoine, certes, mais pas au sens du
droit civil7(*). En effet,
sur la conception traditionnelle du patrimoine s'est greffée une
théorie objective qui ne lie pas le patrimoine à une personne
mais à un but, à une affectation. D'où les notions de
patrimoine naturel et de patrimoine commun sublimé par son sujet,
l'humanité8(*).
La Convention de Montego Bay de 1982 sur le droit de la mer et
le Traité de Washington de 1959 relèvent cinq principes qui
gouvernent les choses et espaces composant le patrimoine commun de
l'humanité : la non appropriation, des objectifs spécifiques, la
liberté de la recherche, scientifique et des résultats
accessibles à tous, l'exploitation des ressources dans
l'intérêt de l'humanité tout entière et la prise en
compte des besoins des pays pauvres9(*). La Convention de l'UNESCO du 23 novembre 1972 sur la
protection du patrimoine commun de l'humanité stipule que le «
patrimoine mondial » vise les « biens »
naturels et culturels, c'est-à-dire des éléments
appropriés au sein des Etats et qui font partie du domaine public de
l'Etat. Les Etats seraient-ils alors propriétaires ou simples
gestionnaires de ce patrimoine ?
C'est là que se pose la question, celle de savoir qui
sont exactement son gestionnaire et son propriétaire. L'humanité
ne se superpose peut-être pas exactement aux Etats. Les Etats
regroupés constituent une entité internationale tandis que
l'humanité est une entité globalisante à l'échelle
d'un globe sans frontières et non interétatique. Cependant,
l'humanité ne correspond à aucune institution de droit
internationale et doit passer nécessairement par le relais des Etats. Le
concept de l'humanité est de nature transpatiale et trans-temporelle,
c'est-à-dire universelle dans le temps et l'espace. L'humanité
constitue ainsi une communauté dont l'avenir semble dépendre de
la gestion de son environnement, particulièrement de la biosphère
dans laquelle elle vit10(*). La biodiversité se rapportant à un
espace-ressource, est donc un patrimoine commun. Et, renchérissent
Olivier et Catherine Barrière, « Les choses communes ne
peuvent supporter qu'un usage qui laisse intact le droit d'usage d'autrui...
L'utilisation des choses communes ne peut être réglementé
que par des mesures de police qui s'imposent souvent devant la concurrence des
intérêts sectoriels entrant en conflit »11(*). D'où la
nécessité d'une utilisation durable des ressources qui le
constituent et plus encore de la conservation de ces ressources pour le bien de
l'humanité actuelle et de celle à venir.
§ 2: De la conservation
a. Essai de définition
Comme la biodiversité, la conservation ne connaît
pas de définition légale en droit positif congolais. Les divers
textes législatifs sur la conservation de la nature en parlent sans en
donner une définition claire. De même, la Convention sur la
Diversité biologique reste muette sur une quelconque définition
dudit concept. Les signataires ont juste convenu d'évaluer, surveiller
et conserver la diversité biologique12(*) et ont fixé les principes directeurs de cette
conservation. Tout de même, la stratégie mondiale de la
Conservation la définit comme « La gestion, par l'homme,
de la biosphère de manière que les générations
actuelles tirent la maximum d'avantages des ressources vivantes tout en
assurant leur pérennité pour pouvoir satisfaire aux besoins et
aux aspirations des générations futures »13(*) Il s'agit d'un système
de protection de la biodiversité en vue de garantir le
développement et la pérennité des
écosystèmes face à l'action anthropique et aux divers
obstacles à la pérennité et au maintien de la
biodiversité. La conservation implique donc la préservation,
l'entretien, l'utilisation durable, la restauration et l'amélioration du
milieu naturel. Elle concerne spécifiquement la flore et la faune, mais
aussi le fonds, l'espace et les éléments non vivants du milieu
dont ils sont tributaires.
b. Espèces de conservation
Il se distingue souvent deux sortes de conservation: la
conservation in situ et la conservation ex situ. L'article 2 de la Convention
sur la Diversité biologique les distingue: la conservation in situ
concerne les écosystèmes et les habitats naturels, le maintien et
la reconstruction des populations viables d'espèces dans leur milieu
naturel et la conservation ex situ concerne le maintien des
éléments constitutifs de la biodiversité en dehors de leur
milieu naturel. Il est clair que chacune d'elles exige un certain niveau de
réglementation propre et des mesures spécifiques.
Malheureusement, le droit positif congolais ne se limite qu'à
réglementer ou mieux à réprimer les actes susceptibles de
ne pas favoriser la conservation in situ. Et c'est pourquoi la conservation qui
nous intéressera ici est bien celle réalisée in situ, le
déplacement ex situ des espèces étant d'ailleurs
interdit14(*).
§3: Les aires protégées et
apparentées
L'article 1er de la loi n° 69/041 du 22 août 1969
relative à la conservation de la nature stipule : « Toute
partie du territoire de la République peut être constituée
par ordonnance en "Réserve naturelle intégrale" lorsque la
conservation de la faune, du sol, des eaux et, en général, d'un
milieu exige de mettre fin à toute intervention susceptible d'en
altérer l'aspect, la composition et l'évolution ».
L'article 1er de la loi n° 75-024 du 22 juillet 1975 relative
à la création des secteurs sauvegardés ajoute:
« Toute partie du territoire national couverte par un plan
d'urbanisme peut être érigée en "secteurs
sauvegardés" lorsqu'elle présente un intérêt de
nature à en justifier la conservation, la restauration ou la mise en
valeur ». L'article 2 de la même loi ajoute que ce
secteur peut être soumis à un régime particulier
jusqu'à interdire « toute action susceptible de nuire au
développement naturel de la faune et de la flore, et plus
généralement, d'altérer le caractère du
secteur. » Et l'article 4 de la même loi précise
que les indemnités dues éventuellement aux
intéressés sont à a charge de l'Etat, comme en
matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.
La loi 82-002 du 28 mai 1982 portant réglementation de
la chasse, en son article 1er, cite d'autres types d'aires
protégées. C'est notamment la réserve
totale de faune, aire
mise à part pour la conservation, l'aménagement et la propagation
de la vie animale sauvage ainsi que pour la protection de son habitat dans
laquelle sont interdites toutes les activités humaines contraire
à l'objectif de conservation, sauf aux autorités de la
réserve ou sous leur contrôle. La réserve de
faune y est, quant à elle, définie en ces termes :
« une aire mise à part dans laquelle l'exploitation de la
faune est réglementée et contrôlée de manière
particulière : les limitations peuvent porter sur les périodes et
les modes d'exploitation ainsi que sur les espèces qui pourront
être exploités». Le domaine, sans se confondre à
une aire de chasse, est une aire érigée par un acte administratif
de l'autorité ministérielle compétente pour une fin
cynégétique et dont la gestion et l'aménagement
relèvent de l'Etat. Tout ceci est expression de la conception domaniale
du fonds caractéristique de notre droit foncier essentiellement
fondé sur le régime civiliste du droit des biens et sur le
principe de la domanialité publique.
Bref, « n'importe quelle zone faisant l'objet
d'un contrôle particulier sur le plan juridique et administratif ou pour
des raisons de tradition, ainsi que des mesures d'aménagement visant
à conserver certaines de ses caractéristiques, constitue par
définition une aire protégée »15(*). En définissant l'aire
protégée, la Convention sur la Diversité Biologique
souligne deux aspects: la désignation ou la réglementation et la
gestion de la zone en vue d'atteindre des objectifs spécifiques de
conservation16(*) Ce sont
notamment ces deux aspects qui constituent le point focal de toute la
problématique des aires protégées en République
Démocratique du Congo.
L'on énumère d'habitude cinq catégories
d'aires protégées en République Démocratique du
Congo: les parcs nationaux (7), les réserves mondiales de la
biosphère (3), les réserves forestières (200), les
domaines de chasse (57) et les jardins botaniques et zoologiques (5). Les
quatre premières catégories semblent être les plus
concernés par les problèmes liés aux pressions des
populations riveraines qui les rendent ainsi très vulnérables.
Section II. PROTECTION LEGALE DES AIRES PROTEGEES
§ 1. Protection tirée Instruments juridiques
internationaux
La prise de conscience planétaire sur la valeur
intrinsèque, écologique, économique, scientifique, sociale
et culturelle de la biodiversité a eu d'énormes
conséquences et entraîné la mise en place d'instruments
juridiques visant sa protection. Favorisé par l'éclosion d'un
courant rénovateur, le développement durable, il s'est
constitué un ensemble d'instruments juridiques internationaux sur la
protection de la diversité biologique autour d'une convention cadre, la
Convention sur la Diversité Biologique. Celle-ci est le point culminant
du processus dit de Rio de Janeiro. En effet, d'après le
secrétariat de la Convention sur la Diversité Biologique,
au-delà des diverses initiatives prises sur la question entre 1970 et
1980, il était urgent de « Reconnaître qu'on ne
pourrait sauver le précieux réservoir de la biodiversité
qu'au prix d'un effort international de coopération et de financement,
appuyé par l'adoption d'un instrument juridique adapté et
légalement contraignant »17(*). Ouverte à la signature depuis le sommet de la
Terre qui s'est tenu à Rio de Janeiro en juin 1992 et ratifiée
par la République Démocratique du Congo le 3 décembre
1994, la Convention sur la Diversité Biologique se veut englober tous
les domaines de la conservation et offrir aux pays du Nord et du Sud
« un cadre qui leur permette de travailler en concert à
préserver le patrimoine commun de
l'humanité »18(*). En se fixant pour premier objectif la
conservation de la biodiversité, cette convention est aujourd'hui le
premier instrument juridique international relatif à la protection des
aires protégées.
Plusieurs autres textes juridiques internationaux concourent
soit en amont, soit en aval à la protection des aires
protégées et apparentées. Sans nous atteler à les
commenter, nous en citerons quelques-uns: la convention de Washington du 03
mars 1973 sur le commerce international des espèces de faune et de flore
sauvage menacées d'extinction, la convention de l'UNESCO du 23 novembre
1972 sur la protection du patrimoine mondial culturel et naturel commun de
l'humanité, la Déclaration de Rio sur l'environnement et le
développement de juin 1992, la Convention relative aux zones humides
d'importance internationale, particulièrement comme habitat des oiseaux
d'eau (Convention de Ramsar sur les zones humides), la convention sur le
commerce international des espèces de faune et de flore sauvage
menacées d'extinction (CITES), la convention sur les changements
climatiques, la Convention de Vienne sur la protection de la couche d'ozone, le
protocole de Londres et de Montréal du 22 mars 1985, la Convention
africaine sur la Conservation de la Nature et des Ressources Naturelles (Alger,
15 septembre 1968) aujourd'hui révisée par l'Union Africaine.
§ 2. Instruments juridiques tirés du droit
interne
L'expérience de la République
Démocratique du Congo en matière de conservation ne semble pas
être au diapason de l'ensemble des textes législatifs et
réglementaires sur la conservation de la nature. Loin d'être aussi
diversifiés et riches que le patrimoine naturel du pays, ils se
concentrent en une répression des infractions relatives à la
protection de la faune et de la flore. En effet, la loi a créé
les aires protégées en vue de la conservation des lieux,
notamment en interdisant "toute activité susceptible de nuire au
développement naturel de la faune et de la flore et plus
généralement, d'altérer le caractère naturel du
secteur"19(*)
Plusieurs textes législatifs concourent à la
protection des aires protégées et apparentées en
République Démocratique du Congo. D'abord, l'ordonnance loi
N° 69-041 DU 22 AOÜT 1969 relative à la conservation de la
nature réglemente de manière générale la question.
La loi n° 75-023 du 22 juillet 1975 portant création et statut de
l'ICCN crée et régit l'organe chargé de la gestion, de la
surveillance et de la protection de ces aires protégées. Elle est
appuyée par l'ordonnance n° 75-231 du 2 juillet 1975 fixant les
attributions du département de l'environnement et conservation de la
nature. L'effectivité de la protection légale des aires
protégées et apparentées se manifeste plus
concrètement à travers les divers textes législatifs et
réglementaires créant les parcs nationaux, domaines de chasse,
réserves de chasses et réserves forestières, tel
l'arrêté n° 00024 du 14 février 1974 créant un
domaine de chasse réservée en zone de Rutshuru. Et là
interviennent encore de manière plus répressive, la loi n°
82-002 du 28 mai 1982 portant réglementation de la chasse et le
décret du 21 avril 1937 portant réglementation de la pêche,
accompagnés de la loi n° 11-2002 du 29 août 2002 portant code
forestier. Il a même été créé, par le
décret n° 0022 du 18 mars 1997, un réseau national pour
l'information environnemental (R.N.I.E.).
Nul ne doute que la protection des aires
protégées et apparentées en RDC est une question qui n'a
pas échappé au législateur au cours des temps.
L'observation attentive de ces textes indique une certaine dimension
diachronique en eux, quelque peu témoin de l'intérêt
croissant que le législateur congolais a lui-même porté sur
ces aires. Au départ, les motivations scientifiques ou simplement
culturelles n'ont certes pas disparu; mais elles ont été
soutenues et renforcées par un engouement à leur protection
jusqu'à l'échelon planétaire. Et de cet engouement est
née une dualité de régime juridique dans la gestion et la
protection des aires protégées et apparentées.
§3. Protection institutionnelle des aires
protégées
a. Au niveau national
En vue d'une meilleure protection des aires
protégées et apparentées, le droit congolais s'est
doté des institutions chargées de leur gestion .Le
ministère de l'environnement, conservation de la nature et tourisme,
autorité de tutelle, est chargé de l'élaboration des
projets de lois et règlements, de l'étude des textes de droit
international, de la conception de la politique de conservation au niveau
national. Il se prolonge en Province au sein de la division provinciale de
l'environnement et conservation de la nature et de la division du tourisme.
L'Institut Congolais pour la Conservation de la nature (ICCN), entreprise
publique à caractère scientifique et technique,
créé par l'arrêté royal du 26 novembre 1934 est
aujourd'hui régi par la loi n° 75/023 du 22 juillet 1975 portant
création et statut de l' ICCN. Il a pour objectifs:
ü d'assurer la protection de la faune et flore dans les
aires protégées et apparentées;
ü d'y favoriser la recherche et le tourisme;
ü de gérer les stations de capture et
ü de gérer les domaines et réserves de
chasse.20(*)
b. Quelques institutions partenaires
L'attention portée sur ces aires
protégées au niveau international n'est pas non sans
conséquences. Plusieurs institutions de droit international et des
organisations non gouvernementales participent activement à cette
protection, en entretenant un étroit partenariat avec les institutions
de droit interne dont nous venons de parler plus haut. Citons-en :
Dian Fossey Gorilla Fund Europe (DFGF-EUROPE)
Dian Fossey Gorilla Fund International/Réserve des
Gorilles de Tayna (DFGF-I/RGT)
Frankfurt Zoological Society (FZS)
Gilman International Conservation (G I C)
International Gorilla Veterinary Project (IGVP)
La Société Zoologique de Londres (SZL)
Le projet Parcs pour la Paix (PPP)
Programme des nations unies pour l'environnement (PNUE)
Programme Environnemental autour des Virunga (PEVi)
Programme International de Conservation des Gorilles (PICG)
Projet Garamba-IRF (International rhino-foundation)
United Nations Environnemental Program (UNEP)
Union Internationale pour la Conservation de la Nature
(UICN)
United Nations Educational, Science and Cultural Organisation
(UNESCO)
United Nations Foundation (UNF)
World Conservation Society (WCS)
World Wild Life Fund (WWF)
§ 4: Dualité du régime juridique et son
intérêt.
Comme nous l'avons remarqué plus haut, la protection de
la biodiversité au sein des aires protégées et
apparentées se place sous deux régimes juridiques : un
régime de droit interne et un régime de droit international. Ceci
n'est certes pas sans intérêt et chacun des régimes porte
en lui-même une fonction et une particularité spécifique
qui le rend irremplaçable.
Il a souvent été dit que les principes et textes
de droit international comportent en eux-mêmes une nature supra
constitutionnelle dans la mesure où ils sont supérieurs et
orientent les textes de droit interne, dès qu'ils sont ratifiés
par le pays. En effet, en ratifiant un traité, une convention, l'Etat
s'oblige et intègre dans sa législation nationale le texte ainsi
ratifié. Ce texte de droit international lui sera non seulement
opposable mais aussi devra inspirer ses propres textes de loi ainsi que les
politiques engagées dans les domaines régis par lesdits textes de
droit international.
Emanation de la volonté de l'humanité, la
Convention sur la Diversité Biologique, par exemple, se veut être
un instrument d'une force que d'aucuns disent "coercitive" et qui
définit la ligne de conduite à adopter dans la législation
et les politiques internes sur la conservation de la biodiversité et
l'utilisation durable des ressources naturelles. Parce qu'elle est
ratifiée par la République Démocratique du Congo, il est
insolite que les instruments de droit interne ne soient pas ajustés
à sa vision des choses. Cependant, la grande faiblesse du régime
juridique international apparaît dans l'absence des moyens efficaces de
coercition et de répression.
Sans nous attarder à commenter la question, signalons
que le caractère volontariste du droit international constitue un
handicap qui l'empêche de fournir un instrument vraiment efficace de
protection de la biodiversité. Les Etats n'ont pas d'amis, dit-on
souvent. Ils n'ont que des intérêts. Pourtant fallait-il limiter
la recherche de ces intérêts par des normes plus ou moins
coercitives et applicables à tous. Hélas!
Cependant, c'est là la principale des fonctions de la
législation interne: limiter la recherche de l'intérêt
personnel au profit de l'intérêt de tous par la sanction et la
peine. Loin de n'être qu'incitatif comme le droit international, le droit
interne se caractérisera par la prévision de la peine et de la
sanction des violations de ses diverses propositions. Cette répression
matérialise donc les principes de droit international et
concrétise les objectifs que les textes de droit international se
fixent. La législation interne est le complément indispensable
des instruments juridiques internationaux qui, sans elle, resteraient lettre
morte. Ces derniers, d'ailleurs, ne sont effectivement appliqués que
s'ils sont coulés sous forme de lois et sanctionnés dans le droit
interne. Ils ne prennent vie qu'à travers ce sacré droit interne
et ne survivent que par lui. Les termes de la Convention sur la
Diversité Biologique sont assez clairs :"Les Etats ont des droits
souverains sur leurs ressources". La fonction incitative des uns et la
fonction répressive des autres canalisent chacun et ajustent ainsi toute
action ou inaction de l'homme sur la nature.
Section III. ACTION ANTHROPIQUE SUR LA BIODIVERSITE
§ 1: L'homme au sein de la biodiversité
Comme nous l'avons indiqué plus haut, la
diversité biologique désigne la diversité du monde vivant
duquel l'homme fait partie intégrante. Etre vivant, il est
élément constitutif de la biodiversité et dépend
d'elle. Il existe donc une interaction entre l'homme et la nature, entre
l'homme et les autres vivants, entre l'homme et les autres composantes de la
biodiversité biologique. Plus encore, l'homme est élément
de l'écosystème, « complexe dynamique formé
de communautés de plantes, d'animaux et de microorganismes et de leur
environnement non vivant qui, part leur interaction, forment une unité
fonctionnelle »21(*) Son habitat est un écosystème, un
tout cohérent qui serait perturbé à la moindre
modification quant à ses composantes.
En effet, la notion d'écosystème arrive au bon
moment pour expliquer et fournir une base solide pour la résolution des
problèmes liés à la gestion des ressources naturelles.
Au-delà des interactions donnant naissance à de complexes
réseaux alimentaires, notons que la conservation de la
biodiversité forestière au niveau des écosystèmes
des aires protégées et apparentées aide à assurer
le maintien de l'équilibre des gaz atmosphériques, le recyclage
des substances nutritives, la régulation du climat, le maintien du cycle
de l'eau et la formation du sol, bref assure la vie sur terre, la vie de tous
les vivants y compris l'homme.22(*)
Cependant, l'homme reste un élément particulier
au sein des écosystèmes: il s'en sert avec tendance
d'appropriation, notamment le fonds, substrat même des ressources
naturelles. Ce droit d'usage et d'exploitation que le préambule de la
Convention sur la Biodiversité lui reconnaît sans ambages s'exerce
parfois via la bio prospection, étude de la biodiversité pour en
tirer des ressources génétiques et les produits chimiques
présentant un intérêt commercial : secteur pharmaceutique,
biotechnologie, semences, protection des cultures, horticulture,
médecine, botanique, cosmétique, soins d'hygiène
personnelle, alimentation et boissons23(*). Ainsi donc, loin d'y vivre de manière
passive, l'homme exerce une certaine action sur la biodiversité.
§ 2. Action de l'homme sur la biodiversité
La forte tendance qu'a l'homme de vouloir s'approprier les
ressources naturelles est d'incitation utilitaire. Certes, l'homme, acteur de
la gestion des ressources naturelles, dispose de droits sur elles. Notons ici
que la notion de « ressources naturelles » est
indissociable de celle d'espace-ressource. Les droits exercés sur le sol
déterminent en grande partie ceux exercés sur les ressources
naturelles. Il est donc plus juste de parler d'une action anthropique sur
l'espace-ressource, action se répercutant sur la biodiversité
elle-même. La variabilité et l'exploitation durable de ces
ressources dépendent de cette action, de l'exercice des droits dont
l'homme dispose sur l'espace-ressource.
Olivier et Catherine Barrière ont
énuméré les droits des acteurs de la gestion de
l'espace-ressource24(*).
L'action de l'homme sur la biodiversité peut se résumer en
l'exercice de ces droits, à savoir:
ü Un droit de passage correspondant à la
circulation et au stationnement, c'est-à-dire l'usage d'un espace comme
voie d'accès avec possibilité d'arrêts temporaires;
ü Un droit de prélèvement d'une ressource
naturelle spontanée ou de résidus de récoltes qui consiste
dans une ponction réalisée sur le milieu pour des besoins
viatiques, personnels ou familiaux.
ü Un droit d'exploitation qui correspond à un
faire-valoir de la ressource dont l'objet économique est d'en tirer
profit par le biais d'une production agricole, sylvicole, forestière,
pastorale, halieutique ou cynégétique ;
ü Un droit d'exclusion qui permet le contrôle de
l'espace et conduit à l'exclusion et à l'affectation de
l'accès à la ressource;
ü Enfin, un droit de protection qui organise la
conservation des écosystèmes et de la biodiversité. Ce
droit de protection est certes réglementaire mais il doit être
incitatif et consensuel.
L'action destructrice ou protectrice sur les
écosystèmes et sur la biodiversité dépend donc de
l'exercice que chacun des acteurs fait de ses droits respectifs de passage, de
prélèvement, d'exploitation, d'exclusion et de protection. Nous
serons porté à dire que la protection de la biodiversité
est davantage fondée sur la responsabilité que sur la
réglementation. C'est dans la gestion des aires protégées
et apparentées que les niveaux d'exclusion et de protection sont
stratégiques : les acteurs divers, dont les populations riveraines, y
disposent de droits et des responsabilités ainsi que d'une
capacité d'action qui peut être positive ou nocive.
§ 3. Aires protégées et populations
riveraines
L'ordonnance loi n° 69/041 du 22 août 1969 relative
à la conservation de la nature, la loi n° 82-002 du 22 mai 1982
portant réglementation de la chasse et bien d'autres textes
législatifs et réglementaires en rapport avec la conservation de
la nature regorgent de dispositions pénales. En effet, le
législateur était conscient de la présence humaine dans et
autour des aires protégées et a tenu à la
réglementer. Au travers des dispositions pénales qui
caractérisent ces lois, des exceptions surgissent ça et là
pour adoucir la rigueur du législateur au profit de ces populations
humaines. C'est notamment en l'article 6 de l'ordonnance - Loi n° 69-041
qui dispose: « En vue d'organiser le tourisme ou de permettre le
déplacement indispensable ou le développement économique
des populations, l'institut prévu à l'article 1425(*) peut, par dérogation
aux dispositions de l'article 4, autoriser l'entrée, le séjour et
le campement dans les parties des réserves intégrales qu'il
désigne ». Dette disposition constitue sans conteste la
reconnaissance d'un droit minimal de passage et d'exploitation, ainsi que d'un
droit au développement dont disposent les populations, droit que la loi
semble ignorer dans la suite.
En effet, la coexistence aires protégées et
populations riveraines n'est pas un accident mais plutôt une
nécessité au sens philosophique des termes. Alors que le
modèle de parc national fourni par les Etats-Unis d'Amérique lors
de la création du Yellowstone National Parc est bien
dépassé, l'idée que la gestion des aires
protégées serait fondée sur l'absence totale ou
quasi-totale de l'homme va bien à l'encontre des objectifs
recherchés. « En premier lieu, lors de la création
des aires protégées, nombre d'entre elles étaient
déjà habitées. En outre, la pression toujours plus grande
exercée par l'homme rend tout à fait irréaliste la mise
à l'écart de vastes étendues, qui deviendraient des
habitats naturels sacro-saints. En fait, une telle attitude ne peut
qu'affaiblir davantage le statut déjà précaire des zones
protégées26(*) ».
Le conflit est en outre inhérent en toute relation du
nécessaire, comme en toute relation d'ailleurs. Lorsque le
législateur sanctionne sévèrement les comportements
susceptibles de nuire à la conservation, il n'oublie cependant pas de
recourir aux populations riveraines pour donner aux aires
protégées leur raison d'être. En fait, si le
législateur parle de conservation des ressources naturelles, c'est parce
qu'il veut limiter les droits des populations sur ces mêmes ressources en
usant de son droit d'exclusion sur elles. Autant les populations riveraines
sont capables de détruire la nature des aires protégées,
autant elles peuvent contribuer efficacement et utilement à la
protection et à la gestion durable des ressources naturelles qu'elles
regorgent. C'est le cas, par exemple, de la gestion du feu. Des chercheurs
affirment que « le feu est un élément naturel
écologique qui a contribué et contribue à façonner
la physionomie des différents biomes et à l'éthologie
animale en Afrique ». Si l'homme le manipule bien, il peut
maintenir et accroître la biodiversité, restaurer les milieux
dégradés, accroître la production de la faune sauvage et
domestique. Par contre, une mauvaise utilisation peut provoquer
érosions et pollutions des eaux y consécutives, induire des
inondations avec de nombreuses conséquences, causer des incendies avec
des dégâts matériels ainsi que des pertes
économiques et humaines considérables et, par conséquent,
réduire la biodiversité27(*).
Non seulement les populations riveraines peuvent nuire
à la conservation de la biodiversité au sein des aires
protégées et apparentées, mais aussi et surtout elles sont
indispensables à la réalisation des objectifs assignés
à ces aires, notamment le tourisme et le développement
économique des populations. Les aires protégées ne sont
d'ailleurs délimitées que par rapport aux zones que les
populations habitent. Ainsi, il est prévu des mécanismes
susceptibles de promouvoir une cohabitation pacifique entre les aires
protégées et les populations riveraines: une zone tampon, des
domaines et réserves de chasse et bien d'autres solutions.
§ 4. Zones permissives dévolues aux populations
riveraines
a)
La zone tampon
Bien que les textes de droit interne ne le définissent
pas, ce concept est accepté par la législation internationale. La
zone tampon est une zone intermédiaire entre les aires
protégées et les populations riveraines ayant pour objectif de
réduire les occasions de conflits possibles entre aires
protégées et populations riveraines. Elles connaissent une
réglementation particulière interdisant la chasse et
l'installation des populations à l'intérieur mais qui permet
l'abattage des animaux en surnombre, déboisement et reboisement,
pêche cynégétique sous la surveillance de l'ICCN. En
permettant aux communautés riveraines de continuer à avoir
accès aux diverses ressources ligneuses contenues dans les aires
protégées, la zone tampon diminue sensiblement les affrontements
entre les animaux sauvages prédateurs et les populations
protégeant leurs champs et leurs cultures. La zone tampon joue le
rôle crucial de tamponner les pressions anthropiques multiformes qui
s'exercent sur les aires protégées et est aussi une zone
écologique complémentaire aux aires protégées. Elle
peut être apparentée au rayon de 50 km dont parle la loi n°
75-023 du 22 juillet 1975 et dans lequel s'étend la compétence
territoire des Officiers et agents de police judiciaires affectés
à la protection de ces aires. Il existe une
complémentarité Aires protégées - zone tampon -
populations riveraines qu'il fait protéger par une définition des
statuts juridiques, limites et mandats de chacun de ces trois
éléments.
b)
Les domaines de chasse
Plus vastes et soumis à une réglementation plus
rigoureuse que les zones tampons, les domaines de chasse sont des aires
délimitées dans le but d'y promouvoir l'activité
cynégétique. En fait, c'est un des moyens que le
législateur met à la disposition de populations riveraines en vue
de leur faire accéder tant soit peu aux ressources animales des aires
protégées. Ils sont créés par des textes propres,
le plus souvent réglementaires, tels l'Arrêté n° 00024
du 14 février 1974 créant un domaine de chasse
réservée en zone de Rutshuru. Comme la zone tampon, les domaines
de chasse constituent, à quelque différence près, des
zones intermédiaires pouvant tamponner les conflits aires
protégées - populations riveraines.
c)
Autre concessions
La loi sur la conservation de la nature prévoit
diverses exceptions qui atténuent les pressions anthropiques des
populations riveraines, notamment par la légitime défense en cas
d'agression par les animaux, les tolérances légales, les
rétrocessions et les paysannats autour des aires
protégées, tels qu'en parle le professeur Séverin MUGANGU
MATABARO. Il a été créé, entre 1957et 1959, des
paysannats, espaces fonciers attribués de manière individuelle,
collective ou familiale sans aucun droit de propriété sur la
terre cultivée, mais une sorte de « droit de
préférence » pouvant juste en permettre l'usage.
L'objectif en était d'éloigner les populations des parcs en
formant une organisation d'économie rurale par l'exploitation des terres
fertiles. Malheureusement, le statut juridique de ces terres n'a pas
été clairement défini et l'on ne peut en estimer la
contribution à la protection des aires protégées à
nos jours28(*).
Une série de tolérances a été
aussi accordée à certaines catégories des populations,
notamment les pygmées et les populations enclavées dans les
pêcheries et au milieu des aires protégées. L'article 8 de
la décision 286-48 °8/36 du comité de la Direction des parcs
nationaux et réserves naturelles reconnaît aux
« Bambuti » et « Batwa » le libre
exercice de chasse et de coupe de bois, cueillette et circulation, sauf la
chasse des animaux protégés par la loi. Aujourd'hui encore, des
populations sont tolérées dans les enclaves, comme les
pêcheries, avec plusieurs restrictions: le braconnage sous toutes ses
formes est interdit, les constructions ne sont permises qu'en harmonie avec le
site et aux endroits déterminés par l'ICCN, l'élevage
domestique est interdit, les cultures sont aussi interdites, excepté les
cultures d'agrémentation qui n'utilisent pas des espèces
exotiques29(*).
Enfin, plusieurs actes légaux dont nous n'avons pas
retrouvé mention d'annulation ont accordé des
rétrocessions des terres aux populations expropriées lors de la
création des aires protégées. C'est le cas du Parc
National des Virunga: en 1959, une rétrocession est
préconisée par le conseil de district du Nord Kivu, mais
jusqu'ici, elle n'a jamais été réalisée. En 1973,
le Directeur Général de l'IZCN entrevoit une rétrocession
des terres aux riverains sans en préciser la cause et les
modalités d'exécution. Ceci, disons-le en passant, ne peut
aucunement favoriser une cohabitation pacifique entre aires
protégées et populations qui se sentent plus lésées
que concernées par la conservation des ressources naturelles au sein de
ces aires.
Conclusion
La gestion domaniale des biens publics et
particulièrement du sol, telle que consacrée par la loi n°
73/021 du 20 juillet 1973 portant régime général des
biens, régime foncier et immobilier et régime des
sûretés, la loi n° 75-023 du 22 juillet 1975 portant statuts
de l'ICCN, l'ordonnance loi n° 69/041 du 22 août 1969 relative
à la conservation de la nature, la loi n° 82-002 du 22 mai 1982
portant réglementation de la chasse est la base juridique de la
création des aires protégées et apparentées en
République Démocratique du Congo. Le noble objectif de
conservation des ressources naturelles au sein de ces aires est aujourd'hui
sous la protection du droit interne et international. Cependant, l'interaction
des divers partenaires dans la gestion de ces espaces ressources pose des
questions auxquelles le droit se doit de se pencher de plus près en vue
d'une meilleure protection légale de ces aires. Des impératifs
auxquels, peut-être, il pourrait se plier s'il veut promouvoir une
conservation durable, existent. Aussi, « il est peut-être
salutaire que le droit ne soit pas cette massue, ce sceptre qu'on voudrait
qu'il fut... »30(*)
Chapitre II : PROTECTION LEGALE ET CONSERVATION
INTRODUCTION
Nous avons essayé, dans les lignes qui
précèdent, de définir tant soit peu le cadre
délimitant la question qui est ici notre: la conservation de la
biodiversité face aux pressions des populations riveraines. Le droit
interne congolais, nous l'avons constaté, n'ignore pas l'existence des
populations riveraines des aires protégées et apparentées.
Les pressions que ces populations exercent sur ces aires constitue une menace
dangereuse si la question ne trouve pas solution efficace, comme le soulignent
depuis près de cinq ans divers rapports publiés par l'ICCN, des
institutions privées, organisations non gouvernementales et associations
de protection de l'environnement. S'il est vrai que le caractère
répressif du droit congolais en la matière contribue fort
à la protection de ce patrimoine naturel et à la surveillance des
aires protégées, une question reste cependant en suspens: la
seule surveillance policière peut-elle constituer une garantie pour une
conservation durable? Quelle différence établir entre
surveillance et conservation et comment concilier les deux aspects dans la
protection des aires protégées et apparentées?
Section 1: SITUATION ACTUELLE DES AIRES PROTEGEES
§ 1. Nécessité de la conservation
Point n'est besoin de le redire, la protection de la
biodiversité biologique est d'importance supranationale: elle est
d'intérêt commun à l'humanité présente et
à venir. C'est ce qui ressort des principes directeurs du projet de
stratégie nationale de la biodiversité de 1997: la
biodiversité n'a pas seulement une valeur intrinsèque, mais aussi
et surtout une valeur écologique, économique, scientifique,
sociale et culturelle et la gestion des ressources naturelles doit tenir compte
de l'approche écologique essentielle et fondamentale à la
conservation de la biodiversité et à l'utilisation durable des
ressources biologiques31(*). C'est à travers la conservation de la nature
que se réalise la plénitude de la protection de la
biodiversité.
En effet, l'ensemble des droits des acteurs divers de la
gestion des ressources naturelles (passage, prélèvement,
exploitation, exclusion et protection) ouvre l'issue à un jeu
d'obligations et de solidarités entre les acteurs et aboutit à
une gestion des ressources par les maîtrises foncières
environnementales, selon les mots mêmes d'Olivier et Catherine
Barrière. Ce sont, d'après eux, une maîtrise minimale
à la base correspondant à un simple droit d'usage; une
maîtrise prioritaire sur les ressources disponibles à tous selon
le principe "Prior in tempore, prior in jure"; une maîtrise
spécialisée relative à l'exploitation saisonnière
des ressources avec possession de facto du droit d'exploitation notamment au
sein des réserves et domaines de chasse ; une maîtrise
exclusive spécialisée ou générale en faveur du
possesseur « de jure » de la jouissance et gestionnaire du
patrimoine commun et, enfin, une maîtrise intentionnelle, base de la
conservation du milieu conçu en tant
qu'écosystème.32(*) Si la plupart des acteurs peut se prévaloir
des trois premières maîtrises sur les ressources naturelles, la
maîtrise exclusive pose un problème d'attribution lié
à l'identité du possesseur de jure de la jouissance et du
gestionnaire du patrimoine commun, patrimoine destiné à la
satisfaction de l'intérêt général : serait-ce
l'Etat, l'ensemble des Etats ou l'humanité ? Quant à la
maîtrise intentionnelle, elle paraît être exclusivement
réservée à l'Administration du fait même de la
domanialité du patrimoine commun et du fonds, substrat des ressources
naturelles ; ce qui peut également servir de fondement à la
notion même de conservation des ressources naturelles.
L'exercice de cette maîtrise foncière
environnementale par l'Administration a pour objet d'
« orienter et contenir l'ensemble des actions humaines dans une
gestion viable à long terme de l'environnement, avec des objectifs de
préservation de la biodiversité, de lutte contre la
désertification et la déforestation. »33(*) Cette maîtrise est
essentielle et se superpose aux autres maîtrises dans la mesure
où elle s'étend sur les ressources renouvelables qui ne
constituent que des éléments de l'écosystème. Et
parce qu'elle porte sur l'écosystème, la conservation de ces
ressources se révèle être une nécessité, ne
fût-ce que pour un seul des éléments de
l'écosystème, la disparition d'un seul pouvant entraîner la
disparition de tous les autres et la dégradation de
l'écosystème. Ainsi, « la protection de l'environnement
naturel consiste à préserver les éléments de la
biosphère des effets néfastes des actions et activités
humaines, par un ensemble de techniques, de mesures et d'actions. Elle
intègre ainsi des dispositions de la réglementation
forestière, cynégétique, halieutique et des aires
protégées. La protection de l'environnement, outre la
réservation des biotopes, celle des espèces et
particulièrement de leur diversité. Globalement, elle se traduit
par une conservation de la diversité biologique. »34(*)
§ 2. Pressions anthropiques sur les aires
protégées au Congo
La lecture des divers rapports du Ministère de
l'environnement et conservation de la Nature, de l'ICCN, du PNUD, du WWF, etc.
fait état de conflits entre les aires protégées et les
populations riveraines en République Démocratique du Congo. Ces
conflits sont notamment axés sur l'accès aux ressources
naturelles dont regorgent ces aires protégées et sont liés
à cinq types d'usage des ressources naturelles : pastoral,
agricole, forestier, halieutique et cynégétique. La
présentation de ces conflits n'est pas non plus dissociée de
l'aspect espace-ressource qui caractérise ces aires,
c'est-à-dire des ressources mobilières ayant comme substrat le
sol sur lequel elles sont disponibles. A la base même du conflit aires
protégées et populations riveraines se situe la question
foncière. La réponse d'un braconnier à la question de
savoir pourquoi abattre les animaux du parc en témoigne :
« il nous garde les vaches héritées de nos
ancêtres ». S'il s'estime héritier, c'est moins des
bêtes que de la terre que ces bêtes habitent. Le fonds qu'il
croît relever de son patrimoine lui donne automatiquement accès
aux autres ressources, ligneuses ou non. Cette conception traditionnelle de la
gestion du fonds n'est pas compatible avec la domanialité publique.
En effet, malgré les diverses promesses de
rétrocession et de compensation, la création des aires
protégées et apparentées a exproprié les
populations locales liées à la terre et vivant d'elle. Au
delà de la survivance des aspects de droit coutumier dans notre droit
interne, il reste des conceptions que nos populations ont du mal à
dépasser : le fonds n'est pas un bien au sens du droit civil, une
« res », mais un contenant de droits, un
patrimoine. Il est donc hors commerce. Cette conception antinomique s'oppose
à notre droit étatique reposant sur la propriété
foncière, un droit qui fait abstraction du rapport patrimonial homme -
ressource pour une préférence au rapport économique homme
- bien : la terre n'est pas un patrimoine, mais un bien, une chose
monétarisée et appropriée35(*). L'échec d'une solution quelconque à ce
défi pourrait en plus être lié à un sentiment de
spoliation de la part des expropries qui n'ont jamais été
indemnisés.
Cette incertaine base conceptuelle s'est davantage
fragilisée par trente ans de mauvaise gouvernance, une décennie
de conflits armés qui ont eu des effets néfastes sur le tissus
économique, social, culturel et physique du pays et causé la
dégradation de son environnement notamment dans le Rift Albertin.
« La faillite du réseau routier et la guerre ont
provoqué une importante baisse de production agricole, privant les
producteurs des possibilités d'écoulement de leur production.
Parallèlement, l'exode rural vers les zones urbaines s'est
accéléré avec pour résultat une pression accrue
sur les ressources naturelles en périphérie des grands centres
pour l'approvisionnement en denrées alimentaires et en bois de
chauffe.36(*)»
Les populations seules face à leur propre survie, n'ont
d'autre choix que de se rabattre sur les ressources naturelles des aires
protégées par des exploitations agricoles, pastorales,
forestières, halieutiques et cynégétiques en contravention
avec les lois qui les protègent. C'est ainsi que l'ICCN signale une
recrudescence généralisée du braconnage à laquelle
se greffe l'occupation illégale des terres dans les aires
protégées, la pénétration des bandes armées
et l'exploitation illégale des ressources ligneuses et non
ligneuses37(*).
Séverin MUGANGU regroupe, quant à lui, ces violations sous deux
types :
Ø Des violations structurelles, permanentes et
liées à la croissance démographique, à l'absence du
développement économique et social et à
l'inadéquation fonctionnelle des institutions de mise en oeuvre des
politiques de conservation ;
Ø Des violations conjoncturelles consistant en des
accidents et ayant un caractère passager, telles les crises politiques,
les affrontements interethniques et le déficit de contrôle de
planification.38(*)
Un rapport du PNUD et du réseau CREF les regroupe
autour de cinq axes principaux : les conflits bêtes sauvages -
populations (prédations des cultures), les conflits de gestion des
espaces halieutiques, les conflits Etat - Etat (conflits transfrontaliers) et
les conflits populations - populations découlant des controverses sur
l'accès à l'espace-ressource protégé. Ces
populations riveraines disposent cependant de droits qu'il importe de relever
en vue d'une meilleure saisie de la question ;
§ 3. Des droits acquis par les populations
La reconnaissance des droits des populations sur les aires
protégées relève même de la création de ces
aires. Les diverses tolérances et rétrocessions dont nous avons
parlé plus haut en témoignent suffisamment. .Les
tolérances prévues par la décision n° 286-48
°8/36 du comité de la Direction des parcs et Réserves
naturelles, les tentatives de rétrocessions suite aux revendications de
1959 et en 1973 en sont les premières expressions explicites. En plus,
l'article 6 de la loi relative à la conservation de la nature stipule
qu' « En vue d'organiser le tourisme ou de permettre le
déplacement indispensable au développement économique des
populations, l'institut prévu à l'article 14 peut, par
dérogation aux dispositions de l'article 4, autoriser l'entrée,
la circulation, le séjour et le campement dans les parties des
réserves qu'il désigne ». Le développement
économique des populations paraît être ici lié
à la mission à laquelle les aires protégées doivent
participer. En effet, cela constitue une sorte de rétrocession en
compensation de l'exclusion du droit d'exploitation des ressources naturelles.
Aussi, par la promotion du tourisme, les aires protégées doivent
activement participer au développement social et économique des
populations riveraines comme le soutient Nigel DUDLEY : « les
habitats sauvages protégés sont une énorme ressource pour
le tourisme qui est peut-être la plus grande industrie du
monde »39(*)
La reconnaissance du droit aux indemnités dues aux
intéressés en cas d'expropriation pour cause d'utilité
publique lors de la création des secteurs sauvegardés40(*) légitime les diverses
revendications des populations riveraines en rapport avec les terres
concédées des aires protégées. Ainsi, en même
temps que les riverains renoncent à leurs droits de passage, de
prélèvement et d'exploitation au profit du droit d'exclusion et
de protection dont est titulaire l'Administration, il naît dans le chef
de celle-ci une série de responsabilités auxquelles elle doit
faire face pour remplir sa noble mission de promouvoir l'intérêt
général. Il en découle alors un jeu de droits et de
responsabilités qu'il importe de mener à bon port, sinon la
conservation risque d'aboutir à un échec cuisant :
maintenant que les réserves ne servent plus à l'utilité
publique, que les populations manquent de champs et qu'elles sont
menacées par les famines, incapables de satisfaire leurs besoins
primaires, elles s'acharnent sur les terres, les récupèrent et en
exploitent les ressources naturelles à leur propre compte et au
détriment de l'intérêt général.
A travers les diverses pressions sur les aires
protégées, les populations riveraines essayent de retrouver leurs
droits au développement socio-économique au moyen des ressources
générées par l'écotourisme de ces aires et de
réagir contre la gestion domaniale des terres expropriées sans
aucune indemnisation. L'acuité de ces pressions aggrave
l'inefficacité des lois et règlements relatifs à la
protection de ces aires. Les tolérances accordées aux populations
par l'Administration de ces aires créent, en définitive, des
droits en conflit avec la nécessité de sauvegarde de
l'intégrité de ces aires. Ces tolérances administratives
devraient être prises pour des droits acquis à ces populations et
donner lieu à des indemnités équitables, non pour
expropriation pour cause d'utilité publique - parce qu'elles n'en
étaient pas propriétaires - mais simplement parce qu'elles ont
été privées d'un droit acquis légalement dans le
cas où il leur serait exigé de quitter ces zones
géographiques.
§ 4. Inefficacité des instruments juridiques
Nombreuses analyses ayant trait aux pressions anthropiques
sur les aires protégées concluent à l'inefficacité
des lois qui les protègent. Des rapports du réseau CREF et du
PNUD signalent le non respect des lois et conventions en vigueur, le
caractère contradictoire de ces lois, les exploitations anarchiques et
non durables des ressources, les pratiques caporalistes des acteurs publics et
leur complicité dans la violation des lois, etc.41(*)
Nous l'avons dit plus haut, la législation sur les
aires protégées en République Démocratique du Congo
consiste dans sa quasi-totalité en une protection pénale à
travers des sanctions dites contraventionnelles portant sur les violations de
l'intégrité du domaine public. Cette législation repose
sur le caractère policier et répressif de la conservation et une
politique de conservation peu incitative, corollaires d'une gestion domaniale
du sol. Evidemment, le grand inconvénient de cette gestion domaniale,
souligne le professeur MUGANGU, est qu'elle n'ouvre aucune voie de
négociation entre les différents acteurs. « A la
longue, elle provoque une perception négative des parcs nationaux.
Ceux-ci étant perçus comme une nuisance, un facteur
d'insécurité pour les populations riveraines, exposées aux
tracasseries policières » 42(*)
En dehors des aires protégées, les ressources
naturelles de ce pays s'exploitent « librement »,
considérées comme des biens publics appartenant à la fois
à tout le monde et à personne. Des mesures arrêtées
pour les protéger sont longtemps restées lettre morte, même
la réglementation sur la chasse et la pêche pour diverses
raisons : la complicité des institutions de protection dont les
agents sont restés longtemps impayés, la situation politique,
sociale et économique, soit parce que ces mesures sont simplement
ignorées des populations riveraines, soit faute d'action
médiatique et sensibilisatrice, soit purement et simplement
contournées pour cause d'inadéquation.43(*)
A ce caractère obsolète des lois s'ajoute,
malheureusement, le sentiment que ces aires protégées sont
inutiles pour les riverains. Les retombées de leur existence en terme
d'opportunité d'emplois et occupations sont quasi inexistantes. Ce
sentiment d'être injustement dépossédé doublé
de pressions policières crée entre les aires
protégées et les populations riveraines des relations
développées sur le registre de la répression et des
revendications actives ou pacifiques. Par conséquent, la seule
activité de l'autorité publique se limite à la
surveillance, à la répression du braconnage, de la pêche
illicite, des exploitations illicites des ressources ligneuses et
l'envahissement des terres.
Ayant longtemps sous estimé la part des populations
riveraines dans la conservation, le législateur congolais a
creusé le fossé dans lequel a sombré la protection des
aires protégées aujourd'hui, en concours avec d'autres facteurs.
En effet, « Quand le droit n'accède pas aux consciences et
aux réalités psychologiques, l'homme ne l'accepte pas, ne
s'incline pas devant ses impératifs, ne consent pas aux sacrifices
qu'exige son application44(*) ». Cependant, parce qu'il faut
protéger les aires protégées, le législateur se
doit de renforcer certains mécanismes de protection qui serviront
à limiter l'accès des populations riveraines aux aires
protégées par l'exercice de son droit d'exclusion et de
protection sur les ressources naturelles qu'elles renferment.
Section II. RENFORCEMENT DES MECANISMES DE PROTECTION
§ 1. Gestion patrimoniale des aires
protégées
La conservation de la nature est loin d'être l'affaire
de l'Etat seul : les populations riveraines, acteurs incontournables de la
gestion de ces aires protégées, y ont une part importante. La
question reste cependant de savoir quel droit il faut appliquer pour assurer
une viabilité des systèmes d'exploitations des
écosystèmes protégés. Olivier et Catherine
Barrière proposent des éléments de solution pour une
réponse opérationnelle : une réponse juridique
à une casuistique de situations conflictuelles, une armature
institutionnelle pour une cogestion intégrée dans le cadre de la
décentralisation et une base légale d'une écologie
foncière via la redéfinition des rapports fonciers, une nouvelle
notion d'espace ressource, les maîtrises foncières comme
expression des rapports fonciers, une mise en place des mécanismes
légaux et rouages de décision dépendant des
représentations, logiques et stratégies des acteurs, le tout
fondé sur le concept
« foncier-environnement » comme base juridique de
gestion et de conservation45(*).
Loin d'embrasser la logique de la gestion domaniale des aires
protégées, la notion d'espace-ressource sur la base juridique du
« foncier-environnement » débouche sur la
gestion patrimoniale, prolongement de la gestion traditionnelle du terroir
adouci par un accent particulier sur les obligations relatives au
renouvellement du patrimoine, à son legs aux générations
futures, à la nécessité d'en conserver les ressource
naturelles. Les aires protégées constitueraient donc un
patrimoine à l'instar de la terre en droit coutumier, réceptacles
de droits et d'obligations pour les divers partenaires et acteurs de leur
gestion, l'Etat, les populations et les organisations non gouvernementales.
D'après E. le ROY, cette gestion patrimoniale doit
conjuguer trois définitions relevant de diverses conceptions du
droit : d'abord, elle concerne les « propres » d'un
individu, richesses sous forme de droits différenciés par l'objet
sur lequel ils portent ; ensuite, un ensemble de rapports de droits
appréciables en argent pour un sujet actif ou passif ou une personne
juridique et qui fondent une universalité juridique ; et enfin,
l'idée de patrimoine environnemental qui suppose de supprimer
l'abusus et l'inféoder à une obligation de gestion
conservatrice, d'inscrire le droit sur les biens dans le cadre d'une gestion
à long terme, de se doter d'un cadre contractuel de gestion
conservatrice des biens46(*).
Dans cette démarche, les exigences de l'Etat auront,
d'après le professeur MUGANGU, deux incidences:
Ø Les solutions devront s'inscrire dans un contrat
opposable tant aux contractants qu'aux tiers avec un rituel qui donne ou
renforce le sentiment de légitimité et le caractère
incontestable de ces accords ;
Ø Les conflits, les contentieux feront l'objet de
négociation et de gestion et non devant un tribunal répressif.
Il est plus clair, en effet, quand il le dit en ces
termes : « la gestion patrimoniale est par conséquent
éminemment participative et recourt à la négociation. Elle
requiert d'associer les différents acteurs usagers à l'adoption
des choix et de leur restituer une responsabilité dans la
gestion»47(*) .
Pour en atténuer le coût d'opportunité, des
mécanismes doivent être prévus pour tamponner l'action des
uns et des autres.
§ 2. Zones - tampons, domaines de chasse et
pêcheries enclavées.
Dans la sauvegarde des droits des uns et des autres des
acteurs de la sauvegarde et pour mieux faire assumer la responsabilité,
le renforcement des zones de transition est une garantie. Bien que la loi
précise que les aires protégées doivent être
entourées d'une zone tampon de 50 km de large, les limites en sont
souvent mal connues et les populations en croissance exponentielle, surtout
dans le rift Albertin, l'envahissent. Il est urgent de préciser le
statut légal de ces zones tampons et d'en renforcer la surveillance tout
en assurant l'accès aux ressources naturelles, dans les limites
légales, notamment les ressources ligneuses et agricoles.
L'envahissement des domaines de chasse par les populations en
croissance exponentielle ne garantit pas la réalisation des objectifs
leurs assignés. L'occupation des terres au sein des objectifs leur
assignés. L'occupation des terres au sein des domaines de chasse et la
colonisation des domaines de chasse entraînent le développement du
braconnage et de la déforestation. Or, si l'on peut encore sous-estimer
les effets de la déforestation dans les domaines de chasse, il faut tout
de même craindre le « syndrome de la forêt
vide », d'après les mots de BERNARDO ORTIZ VON HALLE. La
surexploitation de la viande sauvage au sein des domaines de chasse peut avoir
des conséquences écologiques graves, vu le rôle important
des animaux dans la dissémination et la dégradation des graines,
l'herbivorie, la pollinisation et la prédation. « D'autre
études ont révélé que les espèces
chassées par l'homme coïncident avec les principales proies des
prédateurs sauvages comme les félins, les renards et certains
grands rapaces. La diminution de la quantité des proies disponibles pour
ces prédateurs réduit leurs chances de survie. Faute de proies
naturelles, les carnivores s'attaquent aux animaux domestiques, ce qui
multiplie les conflits avec l'homme qui finit par les
exterminer. » 48(*)
Des chercheurs ont reconnu que les effets négatifs de
la chasse sur les populations animales sont nettement plus graves lorsqu'ils
s'ajoutent aux effets de la déforestation et de la fragmentation de
l'habitat : plus grande vulnérabilité des animaux du fait de
leur forte concentration, accessibilité accrue des forets aux chasseurs
et, simultanément, réduction de l'habitat disponible,
d'après MITTERMEIER et COIMBRA-FILIPO49(*). Il est urgent de renforcer la surveillance des
domaines de chasse et de mieux réglementer leur accès et
l'exploitation des ressources y contenues.
La question semble encore plus délicate lorsqu'il
s'agit des populations toujours plus nombreuses à habiter les
pêcheries enclavées dans les aires protégées. Il se
pose ici un problème de sécurité alimentaire. Les
restrictions légales sur l'exploitation des ressources naturelles
auxquelles sont soumises ces populations peuvent avoir de graves
conséquences socio-économiques. Bien que la législation
est fort généreuse quant aux ressources halieutiques en ne
protégeant que les poissons aveugles de Mbanza Ngungu50(*), la
vulnérabilité des populations enclavées dans les
pêcheries naît de la limitation excessive des ressources
compensatoires. Ne pouvant y pratiquer ni agriculture, ni élevage, elles
n'ont d'autre choix que de s'adonner à la pêche illicite et au
braconnage. Face à cette situation, trois réactions sont
possibles de la part des institutions publiques : accorder plus de
tolérance à ces populations face à la rigueur de la loi,
désaffecter les terres occupées et les mettre hors la
réglementation sur les aires protégées, ou encore
règlementer rigoureusement l'occupation humaine de ces pêcheries
afin d'adoucir les pressions qu'elles peuvent exercer sur les aires
protégées. En général, une réglementation
déficitaire et une gestion défectueuse de ces zones tampons pose
un problème de sécurité alimentaire à ces
populations enclavées riveraines, notamment par la
vulnérabilité des cultures et de bétail exposés aux
prédations des animaux protégés. Sinon, la promotion de
l'élevage de bétail et de la pisciculture dans les limites
légales peut renforcer la surveillance légale en vue d'une
conservation durable.
§ 3. Surveillance des aires protégées et
conservation.
Nous pouvons le constater, avec Olivier et Catherine BARRIERE,
que l'Etat, de par la gestion domaniale des terres, est propriétaire des
espaces naturels et en est le gestionnaire et le policier. Seule la jouissance
limitée appartient aux populations. Malheureusement,
« cette situation accable l'Etat d'une lourde fonction de gestion
qu'il n'a jamais pu raisonnablement tenir et qu'il ne peut pas toujours
assumer »51(*). L'inefficacité de la surveillance des aires
protégées n'est pas seulement liée au caractère
obsolète des lois, mais aussi à une impossibilité
technique dans les mécanismes de surveillance, le nombre d'agents de
surveillance et leur mauvaise rémunération. En plus, la
surveillance pure suppose une gestion policière, des moyens
énormes nécessitant des apports extérieurs comme c'est le
cas dans le programme actuel Monitoring Application de la Loi/Law Enforcement
Monitoring (MAL/LEM) financé par des agences Onusiennes pour la
surveillance des aires protégées classées sites du
patrimoine mondial en République Démocratique du Congo. Ici,
surveiller fait référence au suivi de l'application des lois,
à la surveillance de la biodiversité et à la taxonomie.
Douglas SHEIL estime que « les activités de surveillance de la
biodiversité peuvent entraver plutôt que promouvoir la
conservation dans les pays tropicaux. Les institutions nationales de la
conservation dans les pays en voie de développement ne disposent que des
ressources très limitées, ce qui confère aux bailleurs de
fonds et aux organisations plus riches une ample marge d'influence52(*) ». Il se remarque
que ces institutions théoriquement intéressées à
la conservation négligent souvent les aspects pratiques, notamment les
aspects relevant des besoins des populations locales. Pourtant, comme dirait
ANNE LANJOUW, « Long term conservation can only work if
everybody's needs are met and their interests
realised »53(*). Une conservation durable n'est possible que dans la
mesure où elle rencontre les besoins de chacun et réalise ses
intérêts.
On ne peut finalement parler d'une conservation
équilibrée que dans la mesure où tous les partenaires,
Etat, organisations non gouvernementales, associations, populations riveraines
et professionnels y trouvent leur compte en terme de droits et de
responsabilités. « L'enjeu le plus immédiat en
matière de conservation de la biodiversité,
renchérit Douglas SHEIL, consiste moins dans la bonne science que
dans la bonne pratique et l'allocation efficace des ressources »
Souvent, la surveillance des aires protégées fournit peu
d'informations sur la gestion de ces aires au profit d'une simple taxonomie.
Une richesse qui en découlerait de surcroît n'est pas
nécessairement liée à la viabilité du
système ou à sa santé. Mesurer est bien loin de
protéger. Dresser un inventaire n'est pas une priorité. Il est
parfois plus utile d'identifier les menaces et de prendre les mesures de
gestion adéquate54(*). Il est vrai que plusieurs types de surveillance
peuvent se révéler utiles. Cependant, ils ne doivent pas conduire
à l'impossibilité de stopper les menaces insurmontables qui
pèsent aujourd'hui sur les aires de conservation.
Section III : Vers une conservation durable
§ 1. Le principe de participation
Lié à la notion de conservation durable, le
principe de participation est étranger au droit interne congolais sur la
conservation de la nature. Il a été, depuis plus d'une
décennie, consacré par les textes internationaux ainsi que
diverses conférences. La recommandation n° 3 de la
Conférence des Nations Unies sur la désertification de 1977
recommande expressément la participation locale comme « partie
intégrante des mesures de prévention et de lutte contre la
désertification ». La Stratégie Mondiale de la
Conservation de 1980, dans sa section 13, considère que le soutien
à la conservation doit être assuré par la participation des
populations rurales. C'est la Déclaration de Rio sur l'environnement et
le développement du 3 au 14 juin 1992 qui consacre dans toute sa
clarté le principe de participation : « Les
populations et communautés autochtones et les autres
collectivités locales ont un rôle vital à jouer dans la
gestion de l'environnement et le développement du fait de leurs
connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles. Les Etats
devraient reconnaître leur identité, leur culture et leurs
intérêts, leur accorder tout l'appui nécessaire et leur
permettre efficacement à la réalisation d'un développement
durable »55(*).
Dans le préambule de la Convention sur la
Diversité Biologique, la reconnaissance de ce principe s'appuie sur le
fait « qu'un grand nombre de communautés locales et de
populations autochtones dépendent étroitement et
traditionnellement des ressources biologiques sur lesquelles sont
fondées leurs traditions et qu'il est souhaitable d'assurer le partage
équitable des avantages qui découlent de l'utilisation des
connaissances, innovations et pratiques traditionnelles intéressant la
conservation de la diversité biologique et l'utilisation durable de ses
éléments. » La prise en compte des
intérêts économiques des populations est donc intimement
liée à l'intérêt d'une conservation des ressources
naturelles au sein d'une aire protégée.56(*) D'ailleurs, le projet
Biodiversité dans le Développement préparé par la
commission européenne se veut aller au-delà de l'objectif
principal de la Convention sur la Diversité Biologique en mettant
l'accent sur la nécessité d'un partage juste et équitable,
non seulement des avantages, mais aussi des coût au niveau des
espèces et des écosystèmes. Le principe B de ce projet
stipule, à cet effet: « Encourager le partage juste et
équitable des coûts et des avantages issus de la conservation et
de l'utilisation durable de la diversité biologique à tous et
entre tous les niveaux : local, national, régional et
international. »
Ce principe s'appuie sur trois postulats :
ü « Pour que les approches participatives
réussissent et soient durables, il faut que les parties prenantes
perçoivent les avantages relativement tôt dans le processus ;
ü Si les avantages à court terme sont
inaccessibles, il convient de proposer des activités
complémentaires de développement à court terme ;
ü Des politiques d'indemnisation doivent être
élaborées pour couvrir les déprédations
causées par la faune sauvage aux cultures et aux
villages. »57(*)
En fait, il est capital que les avantages profitent
directement aux populations dont les moyens de subsistance sont affectés
par les mesures de conservation et d'utilisation durable des ressources
naturelles.
La combinaison de cet objectif de gestion et l'exigence de
conservation que s'assigne souverainement chaque Etat ne peut se
réaliser qu'à travers une réglementation adéquate.
« Si l'on veut que les questions d'environnement soient
véritablement intégrées à l'action de
développement dans les politiques et dans les pratiques de chaque pays,
il est indispensable d'élaborer et d'appliquer des lois et
règlements intégrées, efficaces, que l'on puisse faire
respecter et qui s'appuient sur de bons principes sociaux, écologiques,
économiques et scientifiques »58(*).
§ 2. Elaboration d'une législation
adéquate
Pour emboîter le pas à la loi n° 11-2002 du
29 août 2002 portant code forestier qui prévoit et organise
déjà une gestion communautaire des forêts en
République Démocratique du Congo, et ce malgré les
insuffisances légales et institutionnelles signalées supra,
des efforts de restructuration institutionnelle dans le domaine de la
conservation de la nature se font déjà remarquer :
création des Comités de Coordination de Sites (CoCoSi)
renforcés par la Coalition pour la Conservation en République
Démocratique du Congo (CoCoCongo). Mais ces efforts doivent être
soutenus par une législation adaptée et mise à jour.
La révision de la question foncière en vue d'une
gestion patrimoniale des espaces ressources protégés et d'une
meilleure réglementation de l'accès de tous aux ressources
naturelles dans le respect des droits et responsabilités de chacun est
primordiale. Cette révision souhaitée par plus d'un s'inscrit,
il faut préciser, dans le cadre limité d'une gestion
adéquate des ressources naturelles et une conservation durable dans les
aires protégées et apparentées. Elle s'accompagne aussi de
la définition claire et précise du statut légal et des
modalités de gestion des zones tampons, des domaines de chasse et des
pêcheries enclavées au sein des aires protégées en
essayant d'appliquer le principe de l'équité dans la distribution
des coûts et des avantages. Plus loin encore, la législation sur
la conservation de la nature devrait aussi englober les versants montagneux
dont la protection doit constituer un important volet de la législation
sur la conservation de la nature. En effet, il ressort de la notion de
« biorégion » que la conservation des
ressources naturelles doit être portée à l'échelon
régional et englober aussi bien les versants montagneux que tout la
bassin hydrographique des aires protégées, les montagnes
étant parmi les « régions biogéographiques
les plus susceptibles de dégradation
environnementale »59(*).
L'adaptation des lois aux exigences de la conservation
rationnelle et durables au Congo doit, en fait, faire face et relever de grands
défis : elle doit chercher à responsabiliser le citoyen face
à la conservation de la nature, légaliser le concept de gestion
participative au diapason des instruments juridiques internationaux, tenir
compte des intérêts des populations riveraines, consolider la
surveillance de la commercialisation de la viande de brousse, donner une place
au secteur privé et le responsabiliser dans la conservation des
ressources naturelles, règlementer les impacts environnementaux tant
agricoles que socio-économiques et promouvoir la collaboration
transfrontalière dans la gestion des ressources naturelles 60(*). Bref, il s'agit de
réviser et d'adapter le droit interne aux exigences de la conservation
durable en la mettant au diapason des instruments juridiques internationaux,
les vulgariser et les appliquer effectivement. C'est à juste titre que
nous pouvons affirmer que l'application effective des lois adéquates est
le principal défi qui, du reste, appelle le concours de chacun des
acteurs de la gestion durable des ressources naturelles.
§3. Du rôle des partenaires
a) L'Etat et ses organes
Les rapports de pouvoir exercé sur l'espace ressource
que constitue l'aire protégée sont d'une telle sensibilité
qu'une erreur dans l'affectation de droits ou de responsabilité peut
nuire à la conservation de la biodiversité au sein de ces aires
protégées. Tous les acteurs doivent y concourir en
équilibrant droits et responsabilités. D'abord, au-delà de
sa seule activité de surveillance, l'Etat doit rendre plus efficace la
protection des aires protégées en essayant de souscrire au
principe universel de l'équité sociale en matière de
jouissance des ressources naturelles.
La prise en compte des différents enjeux
environnementaux s'impose : lutte contre la déforestation par une
politique de renouvellement de ressources ligneuses ; contrôle des
feux de brousses ; sécurisation des aires protégées
et alentours pour prévenir les déplacements des populations, le
respect et l'application des lois, la révision de la question
foncière, la délimitation participative des aires
protégées, la rémunération juste et
équitable des agents de l'Administration, la vulgarisation des lois et
la lutte contre l'impunité61(*). Bref, la mise en place d'une législation
adéquate sur la conservation de la nature, le renforcement des
capacités institutionnelles et l'implication de l'Administration dans la
surveillance et la gestion des conflits entre aires protégées et
populations.
b) Rôle des populations
Si d'un côté l'Etat a de lourdes
responsabilités, les populations ont le devoir de respecter
scrupuleusement les lois et règlements. En effet, l'accomplissement des
devoirs de l'Administration implique la reconnaissance des droits des
populations riveraines. Le devoir principal des populations dépend de la
prise de conscience sur la valeur des aires protégées et de la
conservation des écosystèmes. Elles devront ainsi veiller
à l'utilisation durable des ressources naturelles auxquelles elles ont
accès sans exclusion ni protection. Leur exploitation anarchique ne peut
que nuire à la conservation parce qu'une aire protégée
entourée d'habitats qui limitent la circulation des ressources
naturelles, modifient les cycles de l'eau et des nutriments et entraînent
des changements climatiques est autant vouée à la disparition.
Ceci s'inscrit dans une logique d'aménagement
régional des espaces-ressources par la gestion d'une
« biorégion », de vastes zones terrestres
ou maritimes comprenant des zones protégées et leurs environs, et
englobant de préférence des bassins hydrographiques
entiers62(*). Cette
conservation à l'échelon régional appelle au plus haut
point la prise de conscience et la participation des populations non seulement
riveraines mais aussi celles habitant les bassins hydrographiques des aires
protégées et notamment les versants montagneux.
b) Autres partenaires
La prise de conscience des populations sur la valeur
réelle des aires protégées et la mise en oeuvre des
politiques nationales de conservation durable ne seront effectives qu'avec la
médiation de groupes associatifs et organisations non gouvernementales
tant nationales qu'internationales. Leur rôle principal serait alors de
renforcer le soutien à la conservation de la nature. Les institutions
nationales peuvent être moins efficaces pour faire parvenir le message de
la protection de l'environnement au public et plaider pour un programme
international énergique de soutien des zones protégées.
Cette fonction médiatrice et de soutien partirait de l'association
locale regroupant les populations bénéficiaires directes
jusqu'aux institutions d'appui internationale en passant par des institutions
régionales de soutien à la conservation. Elles doivent aussi
aider à relever le triple défi économique auquel sont
affrontées les aires protégées : l'insuffisance
d'autofinancement, la répartition équitable des avantages et la
gestion des investissements pour un développement durable63(*).
En effet, les bailleurs de fonds et les organisations doivent
s'efforcer de dépasser leurs propres besoins et priorités,
objectifs de projet, indications de réussite et conditionnement
d'activités et financement, aller au-delà de la simple
surveillance de la biodiversité et s'atteler aux aspects pratiques et
aux priorités fondamentales de la gestion64(*). L'existence des enjeux divers
dans la conservation des écosystèmes des aires
protégées renforce la conviction qu'une collaboration plus
étroite est requise entre le gouvernement, les communautés
locales, les propriétaires fonciers, les organisations non
gouvernementales et les institutions nationales pour élaborer, de
concert, de nouvelles formes de collaboration pour l'aménagement des
aires protégées et des ressources naturelles.
Aussi, les forces armées pourraient jouer un rôle
important dans la conservation de l'environnement, tout en veillant à la
gestion de toute relation conflictuelle avec les populations locales qui ont
souvent des expériences de triste mémoire avec les gardes des
parcs d'esprit trop militaire. Leur participation pourrait consister en
« des services dans divers domaines : protection des sites
moyens, régénération des zones déboisées,
recherche scientifique, gestion des terrains utilisés à ders fins
militaires (dont beaucoup sont situés dans des régions
reculées et sont importants du point de vue de la conservation) et
surveillance de la pollution »65(*). La conservation durable des
écosystèmes des aires protégées est, de loin
interdisciplinaire et appelle la participation active de chacun des partenaires
susceptibles d'être concerné par leur importance et la gestion
durable de leurs ressources naturelles.
Conclusion
La législation congolaise a le mérite
d'être pionnier en matière de conservation des ressources
naturelles par la création des secteurs et zones protégées
de diverses catégories. Cette noble oeuvre se heurte aujourd'hui aux
multiples pressions des populations riveraines qui, elles aussi, ne sont pas
dépourvues de droits sur les ressources naturelles. Face à
l'inefficacité flagrante des textes de lois, une restructuration
légale et institutionnelle tenant compte des droits et
responsabilités de chacun des partenaires est plus que nécessaire
avec le noble objectif de garantir une conservation durable et une gestion
équitable des ressources naturelles à tous les échelons
grâce à un partage juste des coût et des avantages.
Conclusion générale
La place de pionnier de la conservation de la nature en
Afrique est sans conteste attribuée à la République
Démocratique du Congo dont l'importance des aires
protégées est l'une des plus mondialement reconnue. Ces zones
faisant l'objet de contrôles particuliers sur le plan juridique et
administratif ainsi que des mesures d'aménagement visant à
conserver certaines de leurs caractéristiques naturelles constituent des
réserves de ressources naturelles dont l'usage est restreinte ou
même interdite par la loi : parcs nationaux, domaines et
réserves de chasses, réserves forestières, jardins
zoologiques et botaniques et réserves de la biosphère. S'ils
bénéficient d'une protection légale spéciale au
niveau interne, leur importance mondiale ne laisse pas indifférent la
vie et les institutions internationales. Ce qui leur confère une double
protection légale qui garde ses avantages et ses insuffisances.
L'on remarque cependant que ces aires protégées
se définissent par rapport aux ressources naturelles qu'elles renferment
et qu'une prise en considération des rapports de gestion et
d'interférence entre elles et les humains ne peut se concevoir que dans
une logique d'espace-ressource, de répartition de droits entre les
acteurs de la gestion des ressources naturelles dans une perspective de
maîtrises foncières environnementales sur une base foncière
environnementale. De cette acception et de ce jeu de concept découle une
nouvelle vision de la gestion des aires protégées qui prend en
compte les droits et responsabilités des partenaires en vue d'une
conservation durable des ressources naturelles. C'est ainsi qu'une
reconsidération des modalités de gestion et des statuts des zones
tampons s'impose, zones susceptibles d'adoucir les pressions exercées
sur ces aires par les populations riveraines et enclavées.
Par rapport aux hypothèses posées au
début de ce travail, nous avons remarqué que les droits des
divers acteurs de la gestion des ressources naturelles disposent se
repartissent en droit de passage, droit de prélèvement, droit
d'exploitation, droit d'exclusion et droit de protection selon les
compétences de chacun et la catégorie d'espace-ressource
concernée. Les maîtrises exercées par ces différents
acteurs se définissent en fonction de leurs droits respectifs et de
leurs responsabilités qu'il est important de concilier pour une
meilleure conservation. Des facteurs complexes se sont adjoints aux
irresponsabilités de chacun des acteurs de la conservation (Etat,
populations, organisations non gouvernementales, associations). Les
problèmes qui en ont surgi ont ainsi créé une situation
telle que l'Etat, dans sa gestion policière et domaniale des aires
protégées, se retrouve aujourd'hui avec plein de
difficultés à résoudre et mener bout portant. C'est
à cette situation critique que se réfèrent plusieurs
rapports produits par divers chercheurs et institutions, rapports que nous
avons eu à parcourir pour circonscrire la question.
En vue de répondre à la situation criante que
connaissent aujourd'hui les aires protégées de la
République Démocratique du Congo caractérisée par
une inefficacité notoire des instruments juridiques un peu
obsolète, un non respect des lois et des violation flagrantes des lois
et règlements sur la conservation de la nature, un regard
rétrospectif mérite d'être tourné vers le
passé pour essayer de retrouver les causes de la crises et ainsi
proposer une gamme de solutions capables d'amoindrir sinon d'éradiquer
le mal. La conservation communautaire fondée sur le principe de la
participation en droit international de l'environnement a longtemps
été clamée par les divers chercheurs qui se sont
penché sur la question tant au niveau national qu'international. Loin de
la considérer dans son état brut, il importe de l'actualiser et
de lui trouver un cadre d'application en reconsidérant les divers
obstacles et défis auxquels doit faire face le législateur
congolais pour l'élaboration d'une législation adéquate et
efficace sur la conservation de la nature.
La protection de la biodiversité biologique ne se situe
certes pas dans un cadre d'agrément ou purement culturel. Elle concourre
à la concrétisation et à la promotion d'un droit de
l'homme protégé par la Constitution : le droit à un
environnement sain. Le garantir au congolais c'est participer à une
croisade humanitaire dans laquelle prennent part la plupart des pays de la
planète et dont le mot d'ordre et les principes directeurs sont contenus
dans la Convention de Rio de Janeiro sur la Diversité biologique et les
divers textes relevant du processus de Rio et de Kyoto. Certes, il est vrai que
la diversité ne doit pas être conservée pour
elle-même ; elle doit concourir au bien être social et
économique de l'homme qui a le devoir d'en utiliser les ressources de
manière rationnelle et durable. Aussi, il autant vari que la richesse de
notre patrimoine naturel doit faire la fierté de notre pays et chacun
des congolais devrait, en âme et conscience, contribuer à la
réalisation du rêve tant clamé par le président
MOBUTU SESE SEKO : « lorsque les savants auront
transformé le monde des vivants en un milieu artificiel, il existe
encore au Zaïre, dernier refuge de l'humain, une nature
« à l'état pur ».
BIBLIOGRAPHIE
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internationales
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créant un domaine de chasse réservée en zone de Rutshuru
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Ed. Larcier et Afrique Editions, Bruxelles, 2003.
b. Décret du 21 avril 1937 portant
réglementation de la pêche in Bulletin Officiel, 1937.
c. Décret n° 0022 du 18 mars 1997 portant
création d'un réseau national pour l'information environnemental
(R.N.I.E.) in MBALANDA KISOKA, P. et al., Recueil des textes juridiques en
matière environnementale en R.D.C, Jusdata Editions, Kinshasa,
2000.
d. Loi n° 11-2002 du 29 août 2002 portant Code
Forestier in Journal Officiel de la République Démocratique
du Congo, 43è année, numéro spécial du 31
août 2002.
e. Loi n° 75-023 du 22 juillet 1975 portant
création et statut de l'ICCN in Les codes Larcier, R.D. Congo, t.
IV, Droit public et administratif, Ed. Larcier et Afrique Editions,
Bruxelles, 2003.
f. Loi n° 75-024 du 22 juillet 1975 relative à la
création des secteurs sauvegardés in Les codes Larcier, R.D.
Congo, t. IV, Droit public et administratif, Ed. Larcier et Afrique
Editions, Bruxelles, 2003.
g. Loi n° 82-002 du 28 mai 1982 portant
réglementation de la chasse in MBALANDA KISOKA, P. et al., Recueil
des textes juridiques en matière environnementale en R.D.C, Jusdata
Editions, Kinshasa, 2000.
h. Ordonnance loi N° 69-041 DU 22 août 1969
relative à la conservation de la nature in Le Moniteur
Congolais, n° 18 du 15 septembre 1969.
i. Ordonnance n° 75-231 du 2 juillet 1975 fixant les
attributions du département de l'environnement et conservation de la
nature in Les codes Larcier, R.D. Congo, t. IV, Droit public et
administratif, Ed. Larcier et Afrique Editions, Bruxelles, 2003.
2) Convention Africaine sur la Conservation de la nature et
des ressources naturelles (Alger, 15 septembre 1968) in PRIEUR, M. et
DOUMBE-BILLE, S., Recueil des traités et textes internationaux en
droit de l'environnement, Bruylant, Bruxelles, 1989.
3) Convention de Rio sur la Diversité Biologique, lue
sur
www.biodiv.org/articles.asp
le 23 mai 2006
4) Convention de Vienne sur la protection de la couche
d'ozone.
5) Convention sur le commerce international des espèces
de faune et de flore sauvage menacées d'extinction (CITES) lue sur
www.cites.org le 23 mai 2006
6) Convention sur les changements climatiques in PRIEUR, M. et
DOUMBE-BILLE, S., Recueil des traités et textes internationaux en
droit de l'environnement, Bruylant, Bruxelles, 1989.
7) Déclaration de Rio sur l'environnement et le
développement de juin 1992 lue sur
www.biodiv.org/articles.asp
8) Convention de l'UNESCO du 23 novembre 1972 sur la
protection du patrimoine mondial culturel et naturel commun de
l'humanité in PRIEUR, M. et DOUMBE-BILLE, S., Recueil des
traités et textes internationaux en droit de l'environnement,
Bruylant, Bruxelles, 1989.
9) Convention de Washington du 03 mars 1973 sur le commerce
international des espèces de faune et de flore sauvage menacées
d'extinction Convention relative aux zones humides d'importance internationale,
particulièrement comme habitat des oiseaux d'eau (Convention de
Ramsar).
II. Ouvrages
1) AVELING, et al, RDC conservation, WCS, sl, sd.
2) HITESH MEHTA and CRISS KATEE, Virunga massif Sustainable
Tourism developpement Plan DR Congo, Rwanda and Uganda, ICCN, ORTPN, UWA,
january 2005.
3) J. CARBONNIER, Flexible droit. Pour une sociologie du
droit sans rigueur, 6è éd, LGDJ, Paris, 1988.
4) M. BEKAERT, Introduction à l'étude du
droit, 2è éd., Emile Bruylant, Bruxelles, 1965.
5) O. et C. BARRIERE, Le foncier -environnement :
Fondements juridico - institutionnels pour une gestion viable des ressources
naturelles au Sahel, Etude législative n° 60, FAO, Rome,
1997.
6) Projet BIODIVERSITE DANS LE DEVELOPPEMENT, Principes
directeurs pour la biodiversité dans le développement :
enseignements des projets de terrains, Commission Européenne, UICN,
Bruxelles, Gland et Cambridge.
7) S. A MAINKA et M. TRIVEDI (Editeurs), Liens entre la
conservation de la diversité biologique, les moyens d'existence et la
sécurité alimentaire. L'utilisation durable des animaux sauvages
dans l'alimentation, UICN, Bruxelles, Gland et Cambridge, 2002.
8) Séverin MUGANGU MATABARO, Conservation et
utilisation durables de la diversité biologique en temps de troubles
armés. Cas du parc national des Virunga, UCB, UICN, Janvier 2001.
9) VILLENEUVE, A. CASTELEIN et M. A. MEKOUAR, Les montagnes
et le droit. Tendances émergentes, Etude législative n°
75, FAO, Rome, 2002.
III. Articles
1) D. SHEIL, « Pourquoi la surveillance de la
biodiversité ne soutient-elle pas les priorités de la
conservation dans les aires protégées » in
UNASYLVA 209, vol. 53, FAO, février 2002, pp. 50-54.
2) JEFFREY A., Mc NEELY, « Des zones
protégées pour le 21è siècle :
améliorer leur utilité pour la
société » in UNASYLVA 175, vol. 45,
janvier 1994, pp. 3-8.
3) JEFFREY A. Mc NEELY, « Biodiversité
forestière au niveau de l'écosystème : quel
rôle pour l'homme ? » in UNASYLVA, vol. 53,
n° 209, février 2002, pp. 10-15.
4) N. DUDLEY, « La protection : ses autres
avantages », in PLANETE CONSERVATION, Bulletin UICN
n° 1/2003, vol 34.
5) W. A. RODGERS, et al, « La conservation
communautaire de la biodiversité des forêts denses en Afrique de
l'Est est-elle viable ? », in UNASYLVA, vol. 53,
n° 209, février 2002, pp. 41-47.
IV. Mémoires, rapports et autres
1. ICCN, Stratégie de la conservation dans les aires
protégées de la République Démocratique du
Congo, Kinshasa, novembre 2004.
2. MINISTERE DE L'ENVIRONNEMENT ET CONSERVATION DE LA NATURE RDC,
Projet de stratégie nationale de la biodiversité: La
biodiversité au service du peuple, novembre 1997, inédit.
3. PALUKU MASTAKI Christol, Effectivité de la
protection de la biodiversité forestière en RDC. Cas du parc
national des Virunga, mémoire, ULPGL, 2001-2002, inédit.
4. Réseau CREF-PNUD/UNOPS, Synthèse des
résultats des enquêtes participatives sur la cohabitation
pacifique entre les aires protégées et les communautés
locales/peuples autochtones au Nord Kivu, République
Démocratique du Congo. Rapport final de l'atelier de
capitalisation, Goma, du vendredi 30 septembre au samedi 1er
octobre 2005, inédit.
5. Secrétariat de la CDB, Pérenniser la vie sur
la terre, dépliant
TABLE DES MATIERES
EPIGRAPHES
I
DEDICACE
II
REMERCIEMENTS
III
SIGLES ET ABREVIATIONS
IV
INTRODUCTION GENERALE
1
1. PROBLÉMATIQUE
1
2. HYPOTHÈSES
2
3. INTÉRÊT DU SUJET
3
4. MÉTHODES D'APPROCHE
4
5. DÉLIMITATION DU TRAVAIL
4
CHAPITRE I : LA BIODIVERSITE ET SA
CONSERVATION
5
INTRODUCTION
5
SECTION I : APPROCHE NOTIONNELLE
6
§ 1 : De la biodiversité
6
§ 2: De la conservation
8
§3: Les aires protégées et
apparentées
9
SECTION II. PROTECTION LEGALE DES AIRES
PROTEGEES
11
§ 1. Protection tirée Instruments
juridiques internationaux
11
§ 2. Instruments juridiques tirés
du droit interne
12
§3. Protection institutionnelle des aires
protégées
13
§ 4: Dualité du régime
juridique et son intérêt.
15
SECTION III. ACTION ANTHROPIQUE SUR LA
BIODIVERSITE
17
§ 1: L'homme au sein de la
biodiversité
17
§ 2. Action de l'homme sur la
biodiversité
18
§ 3. Aires protégées et
populations riveraines
19
§ 4. Zones permissives dévolues aux
populations riveraines
21
a) La zone tampon
21
b) Les domaines de chasse
22
c) Autre concessions
22
Conclusion
24
CHAPITRE II : PROTECTION LEGALE ET
CONSERVATION
25
INTRODUCTION
25
SECTION 1: SITUATION ACTUELLE DES AIRES
PROTEGEES
26
§ 1. Nécessité de la
conservation
26
§ 2. Pressions anthropiques sur les aires
protégées au Congo
28
§ 3. Des droits acquis par les
populations
30
§ 4. Inefficacité des instruments
juridiques
32
SECTION II. RENFORCEMENT DES MECANISMES DE
PROTECTION
34
§ 1. Gestion patrimoniale des aires
protégées
34
§ 2. Zones - tampons, domaines de chasse
et pêcheries enclavées.
35
§ 3. Surveillance des aires
protégées et conservation.
38
SECTION III : VERS UNE CONSERVATION
DURABLE
39
§ 1. Le principe de participation
39
§ 2. Elaboration d'une législation
adéquate
41
§3. Du rôle des partenaires
43
Conclusion
46
CONCLUSION GÉNÉRALE
47
BIBLIOGRAPHIE
50
TABLE DES MATIERES
54
* 1 ICCN, Stratégie
de la conservation dans les aires protégées de la
République Démocratique du Congo, Kinshasa, novembre 2004,
p. 1.
* 2 BARRIERE, O. et C., Le
foncier -environnement : Fondements juridico - institutionnels pour une
gestion viable des ressources naturelles au Sahel, Etude
législative n° 60, FAO, Rome, 1997, pp. 46-47.
* 3 DAILY cité par
JEFFREY A. Mc NEELY, « Biodiversité forestière au
niveau de l'écosystème : quel rôle pour
l'homme ? » in UNASYLVA, vol. 53, n° 209,
février 2002, p. 10.
* 4 Convention sur la
Diversité Biologique, Art. 1.
* 5 AVELING, C. et al, RDC
conservation, WCS, sl, sd, p. 10.
* 6 RODGERS, W. A. et al,
« La conservation communautaire de la biodiversité des
forêts denses en Afrique de l'Est est-elle viable ? », in
UNASYLVA, vol. 53, n° 209, février 2002, p. 41.
* 7 BARRIERE, O. et C., Op.
Cit., p. 21.
* 8 Ibid.
* 9 BARRIERE, O. et C., Op.
Cit., p. 21.
* 10 Ibid.
* 11 Ibid.
* 12CDB, Art 6 et ss.
* 13 Cité par ICCN,
Stratégie de la Conservation dans les aires protégées
de la RDC, Kinshasa, novembre 2004, p. 4.
* 14 Art 3, loi 82-02 du 28 mai
1982 portant réglementation de la chasse
* 15 Editorial, in
UNASYLVA, Vol 45, N° 176, FAO, Rome, Janvier, 1994, p. 2.
* 16 CDB , Art. 2.
* 17 SECRETARIAT DE CDB,
Pérenniser la vie sur la terre, dépliant
* 18Ibid.
* 19 Art 2, loi n° 75-024
du 22 juillet 1975 relative à la création des secteurs
sauvegardés
* 20 Art 1, al. 2, loi n°
75/023 du 22 juillet 1975
* 21 CDB, art 2.
* 22 DAILY, cité par
JEFFREY A. Mc NEELY, « Biodiversité
forestière au niveau de l'écosystème: quel rôle
pour l'homme? » in UNASYLVA, vol. 53, n° 209,
février 2002, p. 10.
* 23 PALUKU MASTAKI Christol,
Effectivité de la protection de la biodiversité
forestière en RDC. Cas du parc national des Virunga,
mémoire, ULPGL, 2001-2002, inédit.
* 24BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit. p. 46.
* 25 Ici, il s'agit bien de
l'Institut Congolais de la Conservation de la Nature.
* 26 Editorial, in
UNASYLVA 176, vol. 45, FAO, janvier 1994, p. 2
* 27 ICCN,
Stratégie de la conservation dans les aires protégées
de la République Démocratique du Congo, Kinshasa, Novembre
2004, p. 16.
* 28 Séverin MUGANGU
MATABARO, Conservation et utilisation durables de la diversité
biologique en temps de troubles armés. Cas du parc national des
Virunga, UCB, UICN, Janvier 2001, p. 73.
* 29 Art 15 de la Convention
ICCN-COOPEVI, cité par Séverin MUGANGU MATABARO, Op.
Cit., p. 108.
* 30 CARBONNIER, J.
Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, 6è
éd, LGDJ, Paris, 1988, p. 379.
* 31 MINISTERE DE
L'ENVIRONNEMENT ET CONSERVATION DE LA NATURE RDC, Projet de
stratégie nationale de la biodiversité: La biodiversité au
service du peuple, novembre 1997, inédit.
* 32 BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit. , pp. 48-49.
* 33 Ibid ..
* 34 Ibid.
* 35 BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit. , p. 24.
* 36 ICCN, Op. Cit.,
p. 15.
* 37 Ibid.
* 38 Séverin MUGANGU
MATABARO, Op. Cit., p. 56.
* 39 DUDLEY, N., « La
protection : ses autres avantages », in Planète
Conservation, Bulletin UICN n° 1/2003, vol. 34, p. 12.
* 40 Art 4, loi n° 75-024
du 22 juillet 1975 relative à la création des secteurs
sauvegardés.
* 41 PALUKU MASTAKI Christol,
Effectivité de la protection de la biodiversité
forestière en RDC. Cas du parc nations des Virunga, mémoire,
ULPGL, 2001-2002, inédit.
* 42 Séverin MUGANGU
MATABARO, Op. Cit., p. 70.
* 43 MINISTERE DE
L'ENVIRONNEMENT ET CONSERVATION DE LA NATURE, Op. Cit., p. 25.
* 44 BEKAERT, M.,
Introduction à l'étude du droit, 2è éd.,
Emile Bruylant, Bruxelles, 1965, p. 102.
* 45 BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit., P ; 4.
* 46 Cité par
Séverin MUGANGU MATABARO, Op. Cit., p. 71.
* 47 Ibid., p. 71.
* 48 ORTIZ VON HALLE, B.,
« Evaluation préliminaire des effets écologiques et
socio-économiques du prélèvement de la viande d'origine
sauvage en Amérique du Sud » in MAINKA S. A. et TRIVEDI, M.
(Editeurs), Liens entre la conservation de la diversité biologique,
les moyens d'existence et la sécurité alimentaire. L'utilisation
durable des animaux sauvages dans l'alimentation, UICN, Bruxelles, Gland
et Cambridge, 2002, p. 73.
* 49 Cités par ORTIZ VON
HALLE, B., Loc. Cit., p. 73.
* 50 Annexe I de la loi portant
régime de chasse.
* 51 BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit., p. 29.
* 52 SHEIL, D.,
« Pourquoi la surveillance des aires protégées ne
soutient-elle pas les priorités de la conservation dans les
tropiques ? » in UNASYLVA, 209, vol. 53, FAO,
février 2002, p. 50.
* 53 LANJOUW, A.,
Préface de HITESH MEHTA et CRISS KATEE, Virunga massif
Sustainable Tourism développement Plan DR Congo, Rwanda and Uganda,
ICCN, ORTPN, UWA, january 2005, p. 3.
* 54 SHEIL, D., Loc.
Cit., p. 50.
* 55 Principe 22 de la
Déclaration de Rio sur l'Environnement et le Développement.
* 56 BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit., p. 110.
* 57 Projet BIODIVERSITE DANS
LE DEVELOPPEMENT, Principes directeurs pour la biodiversité dans le
développement : Enseignements des projets de terrains,
Commission Européenne, UICN, Bruxelles, Gland et Cambridge, p. 17.
* 58 BARRIERE, O. et C.,
Op. Cit., p. 17.
* 59 VILLENEUVE, A., CASTELEIN,
A. et MEKOUAR, M.A., Les montagnes et le droit. Tendances
émergentes, Etude législative n° 75, FAO, Rome, 2002,
p. 25.
* 60 ICCN, Op. Cit.,
p.10.
* 61 ICCN, Op. Cit. ,
p. 15 et ss.
* 62 Mc NEELY, J. A.,
« Des zones protégées pour le 21è
siècle : améliorer leur utilité pour la
société » in UNASYLVA 175, vol. 45,
janvier 1994, p. 4.
* 63 Mc NEELY, J. A., Loc.
Cit., p. 6.
* 64 SHEIL, D.,
« Pourquoi la surveillance de la biodiversité ne
soutient-elle pas les priorités de la conservation dans les aires
protégées » in UNASYLVA 209, vol. 53,
FAO, février 2002, p. 50.
* 65 Mc NEELY, Loc.
Cit., p. 7.
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