4.5 PHYSIOPATHOLOGIE
Tine littérature abondante s'est
intéressée à la physiopathologie de l'ECA depuis des
décennies (132;133). La détailler n'est pas notre propos et nous
nous contenterons de résumer l'état des connaissances en nous
inspirant largement du chapitre d'un livre paru récemment et bien
documenté (132).
4.5.1 Aires cérébrales
De nombreuses études de cas ont rapporté une
association entre des lésions de certaines aires
cérébrales sous-tendant la vigilance et l'attention et
l'apparition d'un ECA (132). Les régions impliquées sont
multiples et comprennent entre autres le cortex préfrontal, le thalamus
antérieur ainsi que le cortex pariétal non-dominant (134).
Plusieurs études montrent par ailleurs que les régions droites du
cortex seraient plus touchées dans l'ECA.
4.5.2 Réponse de stress
L'ECA est le plus souvent associé à des
maladies somatiques graves ou à des opérations, qui constituent
des stress importants pour l'organisme. La réponse physiologique au
stress et les changements métaboliques qui l'accompagnent sont des
éléments importants dans la physiopathologie de l'ECA.
La réponse au stress se caractérise par une
activation du système adrénergique et de l'axe
hypothalamohypophyso-adrénocortical, une hypersécrétion de
prolactine et d'hormone de croissance et une réduction de
l'activité de l'axe thyroïdien (135). Les niveaux de
catécholamines et de cortisol sont ainsi augmentés. Dans les
situations de stress aiguës, cette réaction est
considérée comme bénéfique. Elle permet de
concentrer la consommation d'énergie sur les systèmes importants
(principalement SNC et coeur), de retarder l'anabolisme et d'activer la
réponse immunitaire. Dans les situations chroniques par contre, la
fonction neuro-endocrine est perturbée, la sécrétion des
hormones de l'hypophyse antérieure se réduisant alors que le
cortisol reste à des niveaux élevés. Le stress est
également associé à une production
importante de cytokines (136) (entre autres IL-1, IL-2, IL-6,
et TNF-á), elles-mêmes causes d'une stimulation de l'axe
surrénalien et augmentant les taux de cortisol. Via l'activation
adrénergique et hypohyso-surrénalienne et la production de
cytokines, cette réponse de stress exerce une influence sur
l'activité des systèmes de neurotransmission impliqués
dans l'ECA et pourrait expliquer partiellement son origine.
4.5.3 Voie finale commune dans l'ECA
Tin état de déficience cholinergique et
d'excès dopaminergique absolus ou relatifs l'un à l'autre
constitue la théorie dominante dans le domaine de la neurotransmission
pathologique de l'ECA (134;137;138). Ce déséquilibre
représenterait une composante commune à tous les états
confusionnels, les mécanismes pouvant y aboutir étant
variables.
Plusieurs constatations vont ainsi dans le sens d'une
implication de la diminution de l'Ach dans la physiopathologie de l'ECA (132).
D'abord, un certain nombre d'études ont montré une diminution
dans la neurotransmission corticale cholinergique avec l'âge, qui est un
facteur prédisposant clairement identifié de l'ECA (139). Les
individus âgés en bonne santé sont plus sensibles que les
jeunes aux effets sur la cognition des médicaments anti-cholinergiques
et développent plus de complications cérébrales sur ces
médicaments (140). Par ailleurs, les médicaments
anti-cholinergiques semblent favoriser l'ECA et aggraver sa
sévérité (141-146) et de nombreuses études de cas
ainsi qu'une étude rétrospective ont rapporté une
amélioration importante d'ECA induit par un médicament
anti-cholinergique et traité par un inhibiteur de
l'acétylcholinestérase (147). Finalement, l'activité
anticholinergique sérique est corrélée à la
sévérité de l'ECA (142;143) et l'administration
expérimentale de substance anticholinergique à des animaux de
laboratoire et à des humains induit un ECA avec perturbation du
tracé EEG.
La dopamine, qui jouerait d'ailleurs un rôle dans la
régulation de l'acétylcholine, a également
été passablement étudiée et semble être
impliquée dans la physiopathologie de l'ECA (132). Des études de
cas rapportent des ECA induits par des agonistes dopaminergiques. Inversement,
des antagonistes ont été utilisés pour le traitement de
l'ECA. Tine étude rétrospective constate en outre que la
prescription de dopamine est un facteur de risque pour la prescription
d'antipsychotiques, ce qui suggère la possibilité que la dopamine
soit un facteur de risque pour l'ECA (148).
L'électroconvulsivothérapie (ECT) provoque elle une augmentation
de la dopamine, ce qui pourrait expliquer certains ECA post-ECT. Finalement, le
processus de vieillissement comprend une diminution des récepteurs
dopaminergiques dans différentes zones cérébrales.
La balance entre l'acétylcholine (Ach) et la dopamine
est également modulée par divers éléments (132) ;
d'autres neurotransmetteurs comme la sérotonine, le GABA, les
opioïdes endogènes et le glutamate ont une influence en agissant
par action directe ou rétroaction sur la dopamine et l'Ach; la
quantité d'acides aminés disponibles, diminuée par exemple
en cas de maladie sévère, affecte la neurotransmission ; le
processus de vieillissement est également caractérisé par
une moins bonne régulation de cette balance. Tous ces
éléments peuvent être mis en lien avec le fait que
l'âge avancé est reconnu comme un facteur de risque pour l'ECA.
Tin faisceau d'études concordantes permet donc de
supposer raisonnablement que le déséquilibre entre les taux
d'acétylcholine et de dopamine est au centre du processus
physiopathologique induisant les ECA.
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