DEUXIEME PARTIE
DYNAMIQUE ENTRE LA DESCOLARISATION DES ADOLESCENTES ET
LEUR DEVENIR COMPORTEMENTAL
CHAPITRE 1 : PRESENTATION DES RESULTATS
Notre méthode d'analyse étant tout aussi
qualitative que quantitative, c'est le lieu de présenter les
résultats obtenus à partir de nos investigations.
Notre enquête a porté sur un échantillon
de trente (30) adolescentes déscolarisées dont quinze
prostituées et quinze (15) non prostituées.
Toutes ces filles ont entre 14 et 19 ans et ont pour lieu de
résidence Yao Sehi.
Nous avons interrogé quinze (15) adolescentes
scolarisées pour servir d'élément de comparaison toutes
les fois que cela s'avèrera nécessaire. Toutes ces filles
résident également à Yahoséi et ont un âge
situé entre 14 et 19 ans.
PARAGRAPHE 1 : RELACHEMENT DE LEUR PRISE EN CHARGE
PAR LES PARENTS
Le relâchement de la prise en charge des adolescentes
déscolarisées par leurs parents se traduit d'abord par le fait
que les filles résident aujourd'hui moins chez leurs parents que du
temps de leur scolarisation.
Ensuite ce relâchement consiste aussi pour les parents
à prendre de moins en moins financièrement leurs enfants en
charge lorsque celles-ci deviennent des déscolarisées.
Enfin le fait que la déscolarisation soit
elle-même due au manque de moyens financiers des parents montre
déjà l'affaiblissement de la prise en charge.
Nous avons obtenu les résultats suivants :
- Les adolescentes déscolarisées vivent en
grande majorité en dehors du cadre familial.
En effet, presque toutes les adolescentes
prostituées vivent avec des camarades. L'une de nos
enquêtées, 16 ans et prostituée, explique
« Avant de venir ici, je vivais avec ma soeur. Mais nous
avons eu des histoires et je suis partie de chez elle pour vivre ici avec mes
camarades car mon père ne vit plus et ma mère n'a pas les moyens
de s'occuper de moi. »
Les autres adolescentes non prostituées vivent soit
chez leurs deux parents ou au moins un de leur parent (le père ou la
mère), soit chez leur concubin ou encore un parent autre que le
père ou la mère, c'est -à- dire toujours sous une
tutelle. Mlle X a 18 ans et est déscolarisée :
« Je vis avec mon concubin et c'est lui qui s'occupe de moi.
Moi-même je vends dans un restaurant pour une femme.»
Une autre de 16 ans affirme à son tour :
« je vis avec mon concubin. Il s'occupe de moi et mes parents aussi
quelques fois le font. Moi, je vends des oranges. »
L'une encore de 18 ans raconte : « Ma
mère est séparée d'avec mon père et a
épousé quelqu'un d'autre en ville. Je ne m'entends pas avec ce
dernier. Je vis ici avec mes deux frères et ils s'occupent aussi de
moi »
Tableau 1 : Les personnes avec qui vivent
les adolescentes
Statut
Lieu de
résidence
|
Déscolarisées
|
Scolarisées
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Avec mon père
|
2
|
6,66
|
5
|
33,33
|
Avec ma mère
|
3
|
10
|
4
|
26,66
|
Avec mes deux parents
|
1
|
3,33
|
3
|
20
|
Avec un autre parent
|
5
|
16,66
|
2
|
13,33
|
Avec des camarades
|
13
|
43,33
|
1
|
6,68
|
Avec mon concubin
|
4
|
13,33
|
0
|
0
|
Avec mon tuteur
|
1
|
3,33
|
0
|
0
|
Seule
|
1
|
3,33
|
0
|
0
|
Total
|
30
|
100
|
15
|
100
|
Les filles déscolarisées qui vivent avec leurs
camarades représentent 43,33%. Celles qui vivent avec leurs deux parents
représentent 3,33%. Quand aux scolarisées, seulement 6,68% vivent
avec des camarades tandis que celles qui vivent avec leurs pères
représentent 33,33%, celles qui vivent avec leurs mères, 26,66%
et celles qui vivent avec les deux parents représentent 20%.
- Les adolescentes encore scolarisées vivent plus dans
le cadre de vie familial que les déscolarisées car plus des deux
tiers (2/3) vit chez au moins un de leur parent ou les deux à la
fois.
Tableau 2 : Les personnes avec qui
vivaient les adolescences du temps
de la
scolarité
Statut
Lieu de
résidence
|
Déscolarisées
|
Scolarisées
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Avec mon père
|
4
|
13,33
|
5
|
33,33
|
Avec ma mère
|
9
|
30
|
4
|
26,66
|
Avec mes deux parents
|
12
|
40
|
4
|
26,66
|
Avec un autre parent
|
5
|
16,67
|
2
|
13,35
|
Total
|
30
|
100
|
15
|
100
|
Ce sont 40% des filles déscolarisées qui
vivaient chez leurs deux parents. Le minimum des filles, à savoir 13,33%
vivait chez leurs pères.
On constate que du temps de la scolarité, plus des
trois quarts (3 /4) des adolescentes vivaient chez leurs parents, à
savoir chez les deux parents ou l'un au moins.
Plusieurs déscolarisées se sont aujourd'hui
éloignées du cadre de vie familial.
Tableau 3 : Les personnes qui
prennent en charge les adolescentes
Statut
Prise en charge
|
Déscolarisées
|
Scolarisées
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Mon père
|
2
|
6,66
|
5
|
33,33
|
Ma mère
|
2
|
6,66
|
4
|
26,66
|
Mes deux parents
|
3
|
10
|
3
|
20
|
Autre parent
|
3
|
10
|
2
|
13,33
|
Moi-même
|
17
|
56,68
|
1
|
6,68
|
Mon concubin
|
3
|
10 ,02
|
0
|
0
|
Total
|
30
|
100
|
15
|
100
|
Les déscolarisées, qui, aujourd'hui se prennent
en charge elles-mêmes représentent 56,68%. Celles prise en charge
seulement par le père ou la mère représente chacun pour sa
part6, 66%. Si on veut distinguer la prise en charge parentale (à savoir
par les deux parents ou un au moins) des autres prises en charge, on remarque
qu'elle représente 23,32%%.
Quant aux scolarisées, 33,33% bénéficient
de la prise en charge de leurs pères et 6,68% sont à leur propre
charge. Les filles scolarisées qui bénéficient d'une prise
en charge parentale représentent 79,99%.
Au niveau de la prise en charge financière des
adolescentes par leurs parents, on constate que celle des
déscolarisées est faible. En effet, seulement un cinquième
(1/5) des filles vit aux dépends de leurs parents à savoir l'un
au moins des deux parents. Et moins de 1/5 est pris en charge par un parent de
la famille élargie.
La responsabilité des déscolarisées dans
leur prise en charge, surtout celle des prostituées repose en
majorité sur elles-mêmes car plus de la moitié d'entre les
déscolarisées sont à leur propre charge.
Mlle X, 18 ans et prostituée, affirme à la
question de savoir qui la prend en charge : « c'est
moi-même qui me prend en charge. Je paie ma nourriture moi-même, ma
maison, mes habits, tout, mon père ne me donne
rien. »
Quant à Mlle Y, 19 ans, déscolarisée mais
non prostituée, elle affirme : « je vis à
la maison paternelle avec mes oncles, mes frères et soeurs. Je suis
serveuse dans un maquis où je gagne 20 000frs par mois et je me
prends moi-même en charge. »
Par contre, les parents font plus face à la charge
financière des filles scolarisées car plus des 3/4 dépend
d'eux.
Par ailleurs au temps de la scolarité, le soutien
financier est presque exclusivement familial.
On se rend alors compte que la prise en charge
financière par les parents diminue considérablement du temps de
la déscolarisation.
Tableau 4 : Causes de la
déscolarisation
|
Effectif
|
Pourcentage (%)
|
Manque de moyens financiers
|
10
|
33,33
|
Décès du père
|
4
|
13,33
|
Arrêt volontaire
|
7
|
23,33
|
Exclusion
|
5
|
16,68
|
Maladie /invalidité
|
4
|
13,33
|
Total
|
30
|
100
|
Ce sont 33,33% des adolescentes déscolarisées
qui le sont par manque de moyens financiers, voire même
46,66%, sachant que même le décès du
père sous entend le manque de moyens.
La maladie et l'invalidité contribuent pour 13,33%.
Considérant les causes de la déscolarisation des
adolescentes, on se rend compte que le manque de moyens financiers est à
l'origine de presque la moitié de celles-ci ; toute chose qui
indique un relâchement de la part des parents.
|