UFR Lettres - Sciences Humaines et Sociales Département de
Sociologie - Nancy
M2 PRIS 2022-2023
![](Concilier-sport-de-haut-niveau-et-etudes1.png)
Concilier sport de haut niveau et études
Enquête sur les étudiants sportifs de haut
niveau de l'Université de
Lorraine
Mémoire de Master 2 de Sociologie
Teva FAKATAULAVELUA
Mémoire rédigé sous la direction de Mme.
Elsa MARTIN, Maîtresse de conférences à
l'Université de Lorraine à Nancy et membre du
Laboratoire Lorrain de Sciences Sociales.
2
Remerciements :
Je souhaite remercier, en premier lieu, ma directrice de
mémoire Elsa Martin, qui m'a accompagné tout au long de ce
travail. Merci de l'investissement, de l'enthousiasme et du soutien durant ce
travail de mémoire.
Je tiens également à remercier les autres
professeurs du département pour leurs conseils et leur
dévouement. Grâce à eux, j'ai pu acquérir des
connaissances méthodologiques, théoriques et des
compétences pratiques, je suis reconnaissant pour l'aide qui a
été apporté.
Je souhaite aussi remercier ma famille pour m'avoir aidé
et soutenu tout au long de l'année. Je tiens à les remercier pour
ce soutien inconditionnel.
Je tiens aussi à exprimer ma gratitude à mes
camarades de promotion, en particulier Irsam ABDOURAHAMANE, Lara PARISOT et
Sambarou KANDE. Leur présence à mes côtés fut une
expérience importante et enrichissante.
Je remercie les étudiants sportifs de haut niveau qui
m'ont permis de réaliser cette étude en collaborant à
cette recherche. Sans la collaboration de mes informateurs, ce travail n'aurait
jamais pu voir le jour. Un grand merci à eux.
3
Table des matières :
Remerciements .2
Table des matières 3
INTRODUCTION .4
Chapitre I - Questionnement sociologique et
présentation de l'étude 8
Partie I - Question de départ,
problématisation du sujet 8
12
- Hypothèses de recherche
Partie II - Méthodologie, terrain, explication
14
.14
- 1. La méthodologie et terrain d'enquête
21
- 2. L'explication de la méthodologie d'analyse
Chapitre II - Analyse et résultats
.....24
Partie I - Devenir et être sportif de haut niveau
24
24
- 1. Les vecteurs premiers de la mise en pratique du sport : un
entourage décisif
- 2. Un statut particulier qui permet des ressources et des
financements souvent avantageux...31
.35
- 3. Des opportunités d'encadrement et de soutien
variables entre ESHN
42
- 4. Une planification et une organisation quasi militaire : une
discipline de fer ?
Partie II - Concilier le sport et les études : une
priorité donnée aux études ? ..48
48
- 1. Réussir dans les études pour s'épanouir
dans le sport
- 2. Mais des sports plus fortement rémunérateurs :
entre passion et opportunité financière 54
.56
- 3. Des perspectives professionnelles en lien avec le sport
Partie III - Un soutien inégal des pairs pour les
ESHN 61
61
- 1. Dans le champ sportif, des acteurs multiples qui n'exercent
pas la même influence
.71
- 2. Dans le champ universitaire, des enseignants et des
camarades conciliants ?
Partie IV - La reconnaissance peu valorisée des
ESHN ? 81
.81
- 1. A l'université, des étudiants sportifs de
haut niveau peu valorisés
85
- 2. ... mais source de fierté dans le cercle
familial
88
- 3. La médiatisation de leur pratique : entre
critiques et éloges
Discussion .94
CONCLUSION 97
Bibliographie ..100
Annexe ...107
4
INTRODUCTION
Depuis la fin du 19ème siècle jusqu'à la
seconde guerre mondiale, le sport a évolué dans le contexte
particulier, des valeurs aristocratiques et bourgeoises. Les autorités
ont progressivement commencé à encadrer et à former
l'élite française dans ce domaine (Fleuriel, 2013). C'est
seulement à partir du début 20ème siècle que de
jeunes gens vont volontairement se tourner vers une pratique sportive de haut
niveau au détriment parfois des études (Hébert, 1927).
Georges Hébert critiquait ces « jeunes lycéens prêts
à abandonner complètement leurs études pour la vaine
gloire d'être acceptés dans les compétitions futures,
sacrifiant ainsi leur avenir » (Hébert, 1927). C'est une
préoccupation croissante qui alimente les débats publics
concernant l'incompatibilité entre le temps dédié au sport
et la poursuite des études (Hébert, 1927).
Selon Isabelle Queval (2004), le sport de haut niveau est
caractérisé par le dépassement de soi, une notion
spécifique aux 20ème et 21ème siècle. Très
médiatisé dans certaines disciplines, le sport de haut niveau est
également un important moteur économique, produisant des
athlètes qui se distinguent par leurs performances sportives, il est
guidé par le désir de « faire toujours mieux, en allant au
bout de soi » (Queval, 2004). Le sport de haut niveau soulève des
questions sur la définition de l'excellence physique. Il soulève
également des interrogations sur les capacités et les limites des
athlètes. Comme le note Pascal Duret (2012), la société
attend des sportifs qu'ils battent des records, ce qui suppose une vision d'un
progrès illimité des performances. Pour atteindre ces objectifs,
les athlètes sont prêts à s'entraîner intensivement
pendant des jours, des mois et des années. Ainsi, la plupart des
sportifs de haut niveau sont prêts à endurer la douleur
associée à de tels entraînements intenses. Par ailleurs,
que ce soit à l'école ou dans les publicités par le biais
du sport, les individus sont encouragés à dépasser leurs
limites (Duret, 2012). Le contexte social élargi dans lequel
évoluent les sportifs de haut niveau a également
évolué au cours des dernières décennies.
L'accroissement de la commercialisation et de la médiatisation du sport
a engendré de nouvelles pressions et opportunités pour ces
athlètes d'élite (Andrews, 2001). C'est depuis les années
1970 que la sociologie du sport a pris de plus en plus d'importance, permettant
d'examiner en profondeur l'environnement des sportifs de haut niveau (Dunning,
1999). De plus, des problématiques telles que la santé mentale et
le bien-être général des sportifs sont devenues de plus en
plus prégnantes dans le cadre du sport de haut niveau (Smith, 2019).
5
Bien que le sport de haut niveau soit remis en question par
d'autres formes de pratique sportive, il reste un puissant exemple de la
poursuite du dépassement de soi. Dans une étude
réalisée par Jean-Michel Faure sur le ski de haut niveau, il a
constaté que neuf skieurs sur dix privilégiaient le sport aux
études au milieu des années 1970, et ce, indépendamment
des différentes formes d'éducation proposées par les
autorités fédérales, y compris les cours par
correspondance, le tutorat individuel, et les programmes de ski-études
(cité par Papin, Viaud, 2018).
A la fin du 20ème siècle, l'appareil
administratif français a créé le statut du sportif de haut
niveau. Ce statut pose la problématique de l'inscription de
l'éducation des athlètes dans les priorités politiques
(Fleuriel, 2004). De ce fait, la question de l'équilibre entre le sport
et les études commence à se poser ; En effet, le contexte
sociopolitique peut également influencer l'expérience des
sportifs de haut niveau. Les politiques aux niveaux national et international,
les tensions géopolitiques, ainsi que les questions
d'équité et de justice sociale peuvent toutes avoir un impact sur
la carrière et l'expérience vécue par ces athlètes
(Houlihan, 2005)
L'articulation des pratiques sportives aux
études.
Adapté librement de la contribution de Jean Paul
Callède, « Thème 1 : Le sport des étudiants. Quelques
perspectives concernant la France » dans « Le sport,
l'université, l'Europe », 1993, La Maison des Sciences de
l'Homme d'Aquitaine, Pessac.
L'établissement des campus universitaires et
l'augmentation du nombre d'étudiants ont transformé la vie
étudiante dans les années 1970. Il est important de souligner que
les programmes de sport-études ont commencé à prendre
forme dès 1974, illustrant une volonté de ne pas séparer
l'éducation du sport. Ce problème a été mis sur
l'agenda politique et a été intégré dans la
réglementation à plusieurs reprises. Par exemple, la loi du 16
juillet 1984 définit le cadre général des relations entre
les athlètes de haut niveau et leur environnement dans la charte des
sports. Cette loi stipule que l'objectif est de faciliter l'élaboration
d'un projet de formation pour l'insertion professionnelle des athlètes
et de soutenir leur réussite sportive. Dans la même veine, la
circulaire du 1er août 2006 et les textes législatifs
précisent les conditions pour l'adaptation de la scolarité dans
les établissements secondaires et supérieurs. De plus, la
réforme Pécresse de 2008 a favorisé la promotion du sport
à l'université. Cette réforme a une double ambition :
encourager les étudiants à faire plus de sport et valoriser les
compétitions universitaires.
|
Le sport de haut niveau renvoie à une exigence toute
spécifique, comme l'indique la définition de l'INSEE. « Le
sport de haut niveau est reconnu par le code du sport et par la charte du sport
de haut niveau (fondée sur les principes déontologiques du
sport). Il repose sur des critères bien
6
établis qui sont : la reconnaissance de haut niveau des
disciplines sportives ; les compétitions ; la liste des sportifs de haut
niveau ; les filières d'accès au sport de haut niveau. ».
Ces athlètes doivent avoir au moins 12 ans au moment de l'inscription
sur les listes. Ils doivent figurer dans la liste des athlètes
sélectionnés en équipe de France. Il est donné
l'exemple du joueur qui joue au PSG ou à l'OM, s'il n'est pas en
équipe de France, il n'est pas considéré comme sportif de
haut niveau.
En outre, pour être considéré comme
étudiant sportif de haut niveau à l'Université de
Lorraine, le sportif doit figurer sur des listes ministérielles des
sportifs de haut niveau pour l'année en cours. Il peut soit appartenir
aux Projets de Performance Fédéraux (PPF), soit être dans
un centre de formation d'un club professionnel ou encore satisfaire à
certaine performance sportive, selon le site officiel des ESHN (Etudiants
Sportifs de Haut Niveau), de l'Université de Lorraine. Ces
étudiants ont aussi la possibilité d'avoir des coordonnateurs de
dispositif, qui seront des interlocuteurs privilégiés mise
à leur disposition : ils renseignent sur l'obtention du statut d'ESHN,
ils jouent le rôle de médiateur et sont en mesure de
répondre à toute demande.
Le sport peut être combiné avec d'autres
activités comme le travail ou les études, mais la question est de
savoir comment les pratiquants peuvent gérer ces deux aspects
simultanément. Ce mémoire vise à explorer
l'expérience des sportifs de haut niveau à travers le spectre de
la sociologie, en s'appuyant sur une variété de données
empiriques et en se prêtant à une critique constructive des
théories sociologiques existantes.
Par ailleurs, les conclusions de la Cour des Comptes (2013),
ainsi que celles du rapport Karaquillo (2015), mettent en exergue les
défis rencontrés par les athlètes de haut niveau pour
réussir dans les études supérieures (Papin, Viaud, 2018).
Une enquête menée par Sophie Javerlhiac (2014) confirme la
difficulté à concilier la réussite et sport de haut
niveau, évoquant « l'assujettissement de l'athlète au projet
sportif exclusif » (Papin, Viaud, 2018). Ces constats attestent d'une
apparente fatalité de l'échec scolaire parmi les sportifs de haut
niveau. En effet, ces sportifs consacrent leur vie à l'excellence dans
leur discipline, subissant constamment une pression intense pour atteindre la
perfection tout en faisant face à des défis sociologiques uniques
(Hughes et Coakley, 1991).
D'après Bourdieu, le sport est un
phénomène socioculturel qui reflète et renforce même
les structures et inégalités existantes au sein de la
société (Bourdieu, 1978). Les sportifs de haut niveau
évoluent dans un contexte spécifique, caractérisé
par des exigences de performance extrêmement élevées et des
attentes sociétales considérables. Cet environnement unique
exerce
7
une influence profonde sur la vie de ces athlètes,
leurs expériences et leurs perspectives (Hughes et Coakley, 1991). Cette
perspective prend une importance particulière lorsqu'il s'agit des
sportifs de haut niveau, car leur parcours sportif est intrinsèquement
lié aux plus grandes structures socio-économiques (Houlihan et
Green, 2008). L'analyse sociologique offre une vision alternative et
complémentaire, permettant de comprendre comment les athlètes
interagissent avec leur environnement social et comment cela influence leur
parcours sportif (Giulianotti, 2004).
Au regard de ces éléments, nous proposons de
nous demander si le sport de haut niveau peut se concilier avec les
études : comment les étudiants sportifs de haut niveau à
l'Université de Lorraine arrivent à concilier leur sport et les
études ?
8
Chapitre 1 - Questionnement sociologique et
présentation de l'étude Partie I - Question de départ,
problématisation du sujet
A partir de cette question de départ nous pouvons en
effet nous demander comment les étudiants devenus sportifs de haut
niveau, deviennent dans un même temps des étudiants. Comment ces
deux aspects sont-ils conciliés par les individus concernés par
cette désignation ? En nous intéressant à leur devenir
d'étudiants et de sportifs, cela nous amène à
étudier de plus près la notion de carrière et de
trajectoire. En particulier, les sociologues interactionnistes tels que Howard
Becker ou Ervin Goffman analysent la carrière au sens professionnel, ils
analysent aussi les étudiants, les chômeurs, les déviants
peuvent aussi avoir une carrière d'après leur vision. L'analyse
de la carrière se focalise sur la manière dont les acteurs
anticipent les changements, comment ils affrontent les difficultés, et
comment ils interprètent leurs échecs ou réussites. En
particulier, Ervin Goffman a développé un concept de la
carrière morale : « c'est-à-dire au cycle des modifications
qui interviennent dans la personnalité du fait de cette carrière
et aux modifications du système de représentation par lesquelles
l'individu prend conscience de lui-même et appréhende les autres.
» (Goffman, 1968). La carrière aurait donc une influence sur la
personnalité, mais aussi sur les visions du monde des individus, il
parle ainsi de « cycles de modification ». Il a appliqué son
concept pour les malades mentaux, de notre côté, nous allons
l'appliquer pour les sportifs de haut niveau. En effet, à partir des
deux temps distingués par l'auteur, nous pouvons nous intéresser
d'abord aux « contingences de la carrière » : en d'autres
termes, il s'agit dans notre cas d'analyser les mécanismes qui
conduisent à l'entrée dans le milieu compétitif et aussi
le rôle que peut tenir les parents dans cet engouement. Ensuite, nous
pouvons porter une attention singulière au processus de socialisation de
l'individu et mieux appréhender l'ensemble des acteurs au sein du sport
qui compte pour les étudiants. Il s'agit donc de se demander si les
trajectoires des sportifs de haut niveau sont linéaires ? Quels ont
été les mécanismes qui ont mené ces
étudiants à s'orienter vers une pratique de haut niveau ? Dans
quelle mesure les parents par exemple, sont-ils moteurs ou au contraire freins
de cette carrière sportive ? Comment les étudiants se projettent
dans leurs études ? Comment les étudiants ont construit leur
carrière de haut niveau ?
Le deuxième concept s'attache au processus de
socialisation temporelle, ou autrement dit la gestion du temps. Nous nous
intéressons à leur rythme de vie, c'est-à-dire temps
sportif, temps scolaire ou universitaire, temps professionnel, temps de
récupération, temps de loisir privé et social, etc.
(Mathilde Julla-Marcy et al., 2017). Dans cette optique, il apparaît que
leur temps
9
objectif (l'organisation de leur emploi du temps) et leur
temps subjectif (le vécu de celui-ci) ne rentrent pas toujours en
coïncidence (Mathilde Julla-Marcy et al., 2017). En effet l'autrice
explique : « Nous identifions à la fois une capacité
générale de ces sportifs à gérer une organisation
temporelle particulièrement chargée (dont ils sont souvent
demandeurs), mais aussi de profondes variations d'un profil de sportif à
l'autre, d'où l'idée d'une construction sociale du temps
subjectif. ». A l'image des questions posées par l'auteure, nous
pouvons tenter de « comprendre quels éléments ont tendance
à favoriser un meilleur vécu d'un emploi du temps objectivement
chargé. ». Si l'auteure est attentive à comprendre la
conception des différentes temporalités de la préparation
des sportifs », elle explique que la distinction entre temps de travail et
temps de loisir demeure floue. Nous pouvons donc nous demander comment les
temps sportifs et les temps de loisirs sont perçus ? Elle montre
d'ailleurs que cette préparation s'inscrit elle-même dans un
contexte institutionnel spécifique : la construction du rythme de vie de
ces sportifs est alors la recherche d'un compromis entre temps collectif (et
contraignant) et temps individuel (et maîtrisé). » (Mathilde
Julla-Marcy et al., 2017). Au regard de cette conception du temps, nous pouvons
nous demander comment ces sportifs arrivent à gérer leur temps
d'étude en contrepartie de leur sport ? En effet, sur quels
critères le juste-milieu est établi par ces
étudiants-là ? Est-ce le temps ou les choix qui vont être
prépondérant dans cette conciliation ? L'entraînement,
est-il perçu comme un temps de travail ou comme un temps de loisirs ?
Quels sont les mécanismes qui vont pousser les étudiants à
s'orienter sur leur sport plutôt que les études, ou inversement
?
Désormais, pour le troisième concept, nous
sommes amenés à parler du concept de reconnaissance sociale dans
« La lutte pour la reconnaissance » établit par Axel Honneth,
un philosophe allemand. Ce concept peut être défini comme «
un processus d'identification où chaque membre du groupe pose un regard
sur l'autre membre. Il s'agit d'un système d'interactions,
d'échanges qui impliquent l'intériorisation ou l'assimilation de
normes, de modèles, de valeurs à partir de sa propre histoire, de
son milieu familial et de sa trajectoire personnelle et professionnelle. »
(Honneth, 1992). Il faut comprendre ici que cette théorie implique que
cette reconnaissance sociale dépend de notre socialisation à
savoir notre éducation, nos expériences et tous ces
éléments vont favoriser ou non notre identification à
autrui. En s'aidant de la lecture d'Hegel, Honneth avance que la reconnaissance
s'appuie sur trois espèces d'attitudes interpersonnelles : l'amour (se
sentir aimée), le respect (la justice entre les membres) et l'estime
(image de soi et apport vis-à-vis du groupe) (Honneth, 1992). Sans ces
éléments, l'individu manquera de ressources psychologiques
nécessaires à son épanouissement
10
personnel au sein d'un groupe. Autrement dit, les relations
sociales et les formes institutionnalisées de l'interaction sociale
permettent la reconnaissance dans la construction des relations positives et
maintenir des attitudes tels que la confiance en soi, le respect de soi et
l'estime de soi nécessaire à l'autoréalisation
individuelle. (Honneth, 1992). Dans le contexte de nos ESHN, nous pouvons
avancer l'idée que l'amour correspond peut se traduire par des
encouragements ou bien le soutien de la famille et de l'entourage en
générale. Pour la notion de respect, il sera intéressant
de voir si les ESHN sont tous traités de la même manière.
Et en dernier lieu, pour l'estime, l'étude des performances des ESHN est
intéressante pour avoir un oeil sur leur propre
représentation.
Outre leur engagement dans le sport et les études, on
peut également se poser la question relative à leurs trajectoires
sont-elles susceptibles de varier selon le sport sélectionné ?
Quels sont les éléments prépondérants qui vont
intervenir à cette conciliation et quels sont les arguments qui
participent à privilégier l'un ou l'autre ? Certains auteurs ont
abordé par exemple le caractère plus ou moins
rémunérateur de certains sports comme pouvant contribuer à
un engagement variable dans la carrière sportive (Papin, Viaud,
2018).
Par ailleurs, nous pouvons aussi nous demander quelles sont
les difficultés qu'ils rencontrent dans la pratique des études et
du sport ? L'entourage participe -t-il d'une façon ou une autre au
soutien de la réalisation de cette double activité ? Par
ailleurs, en s'appuyant sur les travaux sociologiques qui mettent en avant les
dispositions sociales des individus dans la réalisation d'une ou
plusieurs activités (culturelles, éducatives, etc) à
l'image des travaux de Bourdieu, est-ce que l'origine sociale va influer sur le
parcours de ces étudiants ? A cet égard, nous pourrions nous
intéresser à d'autres caractéristiques sociales telles
quel le genre : quelles différences pouvons-nous tirer entre les
sportives et les sportifs de haut niveau ? En posant ces questions, il s'agit
de comprendre tant la manière dont les sportifs de haut niveau sont
entrés dans cette catégorisation et nous chercherons aussi
à comprendre la manière dont ils envisagent les perspectives
d'avenir et se projettent dans le futur ?
Ainsi, au regard de ces lectures et de ces réflexions,
nous aboutissons à la problématique suivante : comment la
carrière des étudiants sportifs de haut niveau se met-elle en
place et comment celle-ci est perçue par les étudiants
eux-mêmes ? Il s'agira donc de comprendre comment la conciliation entre
étude et sport se réalise et comment les étudiants se
projettent. Quelles influences exercent les agents sportifs, familiaux,
amicaux, médiatiques sur l'étudiant sportif de haut niveau ? Il
s'agira d'étudier plus en profondeur le rôle de l'entourage sur le
sportif de haut niveau, quels sont leurs apports dans cette conciliation. Quels
sont les facteurs
11
qui incitent les ESHN à prioriser le sport ou les
études dans la conciliation ? Pour cela, nous étudierons de plus
près l'environnement social de l'étudiant sportif.
12
Hypothèses de recherche
Nous sommes désormais en mesure d'énoncer les
hypothèses qui sont en relation avec le sport et les études.
Grâce à nos lectures, l'hypothèse
générale que nous pouvons émettre vis-à-vis de
notre sujet est la suivante : les sportifs de haut niveau sont amenés
à faire des choix pour réaliser au mieux leur sport et leurs
études, c'est l'idée de sacrifier un élément pour
un autre. Lors de leurs cursus scolaires, ils seront amenés à
prioriser plutôt le sport ou plutôt les études ou bien
trouver un équilibre entre les deux : ils ont l'option de prolonger une
année universitaire sur deux ans afin d'atteindre un objectif sportif
immédiat, ou de réduire leurs aspirations sportives sur une
durée déterminée pour privilégier leur projet
éducatif (Papin, Viaud, 2018). En effet, au-delà du temps, ces
étudiants doivent réaliser des choix, mettre en place des
stratégies, des tactiques afin d'accomplir au mieux leurs ambitions.
Néanmoins, nous faisons l'hypothèse que cette
hiérarchisation des tâches (scolaires versus sportives) est
variable selon les moments, l'emploi du temps et les périodes de
l'année.
La première hypothèse consiste à affirmer
que ces étudiants sportifs de haut niveau s'attachent à mettre en
avant le manque de temps et la fatigue dans la conciliation entre le sport et
les études (Stambulova, 2014 ; Piffaretti 2006). En effet, le double
projet représente un défi pour ces individus, ils doivent jongler
avec des horaires chargés et trouver un équilibre adapté.
(Stambulova, 2014 ; Piffaretti 2006). Même confrontés à la
grande difficulté de gérer ces deux responsabilités
simultanément et subissant souvent une fatigue intense, ils persistent
à suivre ce double chemin. (Mathilde Julla-Marcy et al., 2017). La
fatigue et le manque de temps devraient donc constituer les obstacles
principaux auxquels les étudiants doivent s'opposer. En effet, la
panique temporelle est une forme d'angoisse dans la gestion du temps (Mathilde
Julla-Marcy et al., 2017). D'après la publication de Debois et al.
(2015), la difficulté à investir les deux activités et le
manque de temps devrait être intensifié lors de grandes
compétitions.
La deuxième hypothèse établie s'attache
aux imprévus ou aléas sportifs probables chez nos
étudiants sportifs comme par exemple le surentraînement, les
blessures, un déclassement, un changement de club ou encore un
déménagement : la baisse de motivation pourrait être
observée pendant ces périodes dites d'imprévus. « En
outre, cela dégage l'athlète d'une certaine pression : si
celui-ci n'a que son projet sportif à mener, il peut rapidement se
trouver démuni et subir une forte perte d'identité, en cas de
blessure par exemple » (Delalandre et Demeslay, 2015).
13
La troisième hypothèse se concentrera sur les
influences de l'origine sociale ainsi que les pairs et le projet
élaboré. Nous partons du principe que le choix du sport et les
études qui ont été sélectionnés par ces
étudiants sportifs de haut niveau dépendent de l'origine sociale
et de l'influence des pairs, les vocations et la construction du projet de vie
des étudiants sont inséparables de ces influences sociales.
L'entrée et le maintien dans l'univers sportif sont influencés
par l'entourage, c'est-à-dire les parents, les pairs, les
entraîneurs, les attentes culturelles, les établissements et les
médias (Moret, 2017 ; Pifaretti, 2006 ; Debois et al., 2015). Par
exemple, « l'attirance des jeunes hommes issus des fractions populaires
pour le football (Bertrand, 2011 ; Rasera, 2016) ou le cyclisme
(Lefèvre, 2007), deux pratiques sportives qui autorisent des projections
vers des carrières « professionnelles », plaident
également dans le sens d'un ethos populaire propice à
faire du sport un projet exclusif. » (Papin, Viaud, 2018). En outre dans
le milieu de l'athlétisme, les parents issus de classes populaires
préfèrent mettre en avant le sport devant les études par
un effet de méconnaissance et chez les parents de classe
favorisées, la conciliation entre le sport et les études est
perçue comme une concurrence (Papin, Viaud, 2018). En effet, les choix
entre les filières ou les vocations devraient donc être
liés à ces influences.
Enfin, la dernière hypothèse concerne les
étudiants qui privilégient le sport aux études car les
gains potentiels dans le monde professionnel sont importants dans certains
sports. Nous pourrions donc nous attendre à ce que, par exemple, les
étudiants participants issus du football ou du basketball se projettent
davantage dans un futur professionnel sportif alors que les autres
étudiants choisissent ou sont forcés de poursuivre une double
carrière du fait que certains sports sont moins
rémunérateurs (Stambulova, Ryba, 2013). En effet, nous pensons
que dans les sports professionnels les plus rémunérateurs tels
que le football, invitera les étudiants sportifs de haut niveau à
privilégier le sport aux études.
14
Partie 2 - Méthodologie
Tout d'abord, nous allons présenter la
méthodologie d'enquête que nous allons réaliser. Il s'agit
ici de comprendre leurs parcours scolaires secondaires, leurs vécus et
leurs représentations individuelles en analysant les effets des mondes
sportifs. Les participants de notre étude poursuivent un double projet,
c'est-à-dire qu'ils sont insérés dans une formation
d'études supérieures et pratiquent en même temps une
activité sportive.
Nous avons choisi de nous porter sur les étudiants
sportifs de haut niveau de l'Université de Lorraine, en effet, cette
catégorie d'individu n'a pas fait l'objet d'étude approfondi. En
contrepartie de cela, nous avons étudié les étudiants
internationaux qui se donnent à une pratique sportive à
l'Université de Lorraine, le sport comme espace de socialisation, qui a
fait l'objet d'un mémoire l'année dernière. Nous avons
donc établi une base avec cette étude, et ainsi nous sommes en
mesure d'étudier ces étudiants sportifs. De plus, en tant
qu'étudiant sportif, nous pensons avoir un recul nécessaire, mon
intervention amène les enquêtés amène à avoir
une réflexivité sur l'objet d'études.
Nous voulions favoriser l'approche micro et l'immédiat
par une méthodologie qualitative qui me permet davantage de
répondre à ma problématique plutôt que l'approche
quantitative. L'objectif est de faire une analyse précise des
comportements individuels car l'individu est observé dans sa
totalité. En effet, seront principalement mobilisés des
entretiens dans cette étude réalisé avec nos
étudiants, en plus d'un usage de notre journal de terrain : « Le
chercheur produit lui-même ses propres matériaux dans un journal
de terrain élaboré à partir de son expérience et
des relations qu'il a nouées avec ses enquêtés. »
(Bosa, 2011). A cet égard, nous avons fait nos entretiens uniquement sur
les étudiants sportifs de Nancy de l'Université de Lorraine.
1. La méthodologie d'enquête et le
terrain
J'ai fait usage des entretiens semi-directifs, car en effet,
je porte un intérêt au vécu d'un individu à un
instant précis de sa vie. En effet, la méthode qualitative prend
appui sur le discours, elle a l'avantage de nous aider à relever des
informations à partir du discours des individus et du récit
qu'ils font de leur réalité qu'ils vivent au sein dans le milieu
sportif ou dans le milieu des études. Ainsi, cette méthode
permettra de mettre en évidence des aspects de leurs expériences
sportive. L'objectif étant de saisir la subjectivité du discours,
et la signification profonde des mots employés. Nous allons faire
intervenir la sociologie compréhensive, car nous accordons une
importance pour le vécu de nos enquêtés sportifs. Nous
privilégions le point de vue des
15
enquêtés en rapport avec leurs expériences
sportives, l'objectif étant de rendre compte des mécanismes en
cours dans les choix entrepris par nos étudiants.
Cette méthode permet de rendre compte de l'aspect
évolutif et aussi développemental nécessaire à la
compréhension des transitions vécues par les sportifs. A l'aide
de questions ouvertes, les sujets sont poussés à
développer des liens et à développer sur les processus de
décisions d'adaptation. Pour ces raisons, l'entretien semi-directif
semble être plus adapté, l'entretien dirigé risque de se
cantonner à un type questions-réponses trop succinct où
les informations risquent de manquer de précisions et dans le cadre de
l'entretien libre, il se veut être pertinent, mais l'enquêté
n'est plus cadré par un thème précis. Ce type d'entretien
est guidé par une suite logique de questions contenant des
thématiques, l'interviewé est invité à parler
librement sur le sujet en question. Pour Olivier de Sardan « l'entretien
reste un moyen privilégié, souvent le plus économique,
pour produire des données discursives donnant accès aux
représentations émiques (emic), autochtones, indigènes,
locales. ».
De ce fait, nous avons réalisé un guide
d'entretien1. Il est constitué de plusieurs questions
contenant des grands thèmes. Parmi les thèmes retenus, le premier
s'attache aux données générales. Nous cherchons à
retracer le parcours sportif ainsi que retracer également le parcours
scolaire de l'étudiant, pour tenter d'analyser les transitions qui se
sont jouées au cours du parcours de vie : à quel moment la
pratique sportive a commencé, à quel moment la pratique est
devenue intensive, etc. Le deuxième thème s'attache à la
motivation, ici, nous cherchons à comprendre par quels biais ces
étudiants ont commencé à pratiquer et pratique encore.
Comprendre davantage les pratiques qui ont mené ces sportifs à
devenir ESHN à travers l'habitus de Bourdieu. Le troisième
thème parle de la conciliation entre le sport et les études, ce
thème se révèle être important dans la notion
temporelle avec Julla-Marcy, c'est-à-dire, dans l'organisation de
l'emploi du temps des enquêtés. Le quatrième thème
s'attache aux projets de nos enquêtés, ce qu'ils comptent faire
dans le futur. Le cinquième traite des obstacles et ressources, les
enquêtés vont nous indiquer les difficultés et les aides
qu'ils ont pour mener les études et le sport. Nous pourrons à cet
égard mettre en évidence la reconnaissance sociale établi
par Honneth. Et enfin, nous avons, un dernier thème qui concerne la
famille, afin de déceler l'origine sociale de l'individu.
1 Cf annexe
16
Nous avons réalisé un entretien exploratoire
avec un ESHN. Cet étudiant nous a été
suggéré par notre directrice de mémoire. De ce fait, de
nous familiariser avec les ESHN et par ce biais, nous avons revu notre guide
d'entretien En effet, quelques questions n'étaient pas
adaptées.
Par ailleurs, nous avons choisi la ville de Nancy dans le
Grand-Est pour mener à bien notre étude. Pour des questions
matérielles et surtout pratiques, nous privilégierons cette ville
afin d'être au plus proche de nos enquêtés, les contraintes
liées aux déplacements sont alors dépassées. Nous
préférons faire des entretiens en physique plutôt qu'en
appel vidéo ou téléphonique, pour s'assurer d'obtenir des
réponses qualitatives et éviter tous soucis de communication.
Ainsi, nous pouvons, à cet égard établir une relation de
confiance favorisé par notre présence physique.
De plus, selon l'INSEE, la concentration des jeunes dans les
grands pôles urbains du nord-est de la France est particulièrement
marquée dans les villes comme Strasbourg, Nancy et Reims : « plus
d'un habitant sur cinq a entre 18 et 29 ans, contre un sur sept en moyenne
régionale (un sur six dans le pôle de Metz). » C'est alors
que 209 000 jeunes vivent en 2016 dans ces zones, soit 27 % de l'ensemble des
18-29 ans de la région. Les plus jeunes âgés de 18 à
24 ans, sont largement surreprésentés. Ces trois pôles se
définissent par une forte proportion d'élèves et
d'étudiants : « 52 % des 18-29 ans sont inscrits dans un
établissement d'enseignement, soit 20 points de plus qu'en moyenne
régionale. Cette réalité est particulièrement
accentuée à Nancy, où 57 % des jeunes sont des
étudiants. Les deux tiers des jeunes qui n'étudient plus exercent
un emploi, soit une proportion légèrement moindre qu'à
l'échelle régionale (- 2 points). Ces actifs occupés sont
presque deux fois plus souvent cadres qu'en moyenne des jeunes de la
région. » (INSEE, 2020). Pour ces raisons, aborder un sujet
lié aux étudiants pouvait, en partie, être en concordance
avec la surreprésentation d'étudiant au sein de la ville de
Nancy.
Puis, pour accéder à mon terrain, nous avons
rencontré la directrice du SUAPS en début février. Elle
nous a indiqués qu'elle pouvait envoyer un mail à cinquante
étudiants sportifs de haut niveau stipulant que nous voudrions nous
entretenir avec eux. Aucun des ESHN n'a donné réponse à ce
mail général suite à l'envoi. De ce fait, nous avons
décidé de procéder autrement.
Sur le site de l'Université de Lorraine, nous observons
qu'il existe une page dédiée aux étudiants sportifs de
haut niveau (ESHN) de l'année passée (2021/2022). Ainsi,
grâce à cette liste, nous avons ainsi contacter n'importe quel
étudiant par mail grâce aux noms, prénoms et
filières d'études qui sont diffusés par le site de
l'UL.
17
Sur la liste des ESHN de 2021/2022, nous observons un peu plus
de la moitié des ESHN ont sélectionné des études
dans le milieu du sport (STAPS) à 52%, soit 122 étudiants. Le
reste se répartit dans 29 autres filières d'études, ils
sont 111 à ne pas avoir sélectionné la filière
sportive soit 48%. Au total, ils sont 233 étudiants sportifs de haut
niveau lors de l'année 2021/2022 (pourcentage disponible en annexe).
Ces étudiants sont répertoriés sur le
site de l'Université de Lorraine, mais depuis début
février, le nom, le prénom ainsi que la filière
d'études ne sont plus diffusables en public. Il est stipulé que
l'Université de Lorraine a un triple objectif d'excellence :
réussite universitaire, réussite sportive et une recherche de
lien social et de travail sur le développement personnel. Un
comité technique qui confirme les dossiers des étudiants
après étude : « un comité composé de
représentants de l'Université de Lorraine et de ses partenaires
des instances sportives (CREPS, DRJSCS, LGESU) qui examine les dossiers de
demande d'obtention du statut d'ESHN. ».
Ces ESHN peuvent provenir de différentes
filières, c'est alors que notre terrain se constitue principalement sur
les différentes universités et écoles présentes
dans la ville de Nancy. De plus, tous les étudiants sportifs de haut
niveau de l'Université de Lorraine se répartissent dans la ville
de Nancy et dans la ville de Metz pour réaliser leurs études et
aussi pour pratiquer leur sport. Ainsi, pour ces raisons, nous nous sommes
penchés sur notre ville d'étude.
A partir de cette liste, nous avons pris contact avec des
étudiants, directement par mail, sans attendre les
bénéfices du mail envoyé par la directrice du SUAPS. Pour
le premier envoi, une quinzaine de mails ont été adressés,
nous avons sélectionné des profils particuliers,
c'est-à-dire que nous avons choisi de prendre autant de femme que
d'homme ainsi que dans la variété des sports, des sports
collectifs et individuels. En moyenne, trois ou quatre étudiants
étaient disponibles pour réaliser un entretien chaque semaine.
Une fois que l'étudiant à confirmer par mail notre demande, nous
avons défini un RDV dans sa faculté ou ailleurs selon les
disponibilités. Il était important pour nous de bien prendre le
numéro de téléphone et aussi de prendre connaissance du
sport pratiqué par notre enquêté. La plupart des ESHN
possèdent une page qui lui est dédié sur les journaux,
cela nous a été nécessaire afin d'identifier visuellement
notre enquêté pour éviter de téléphoner
à chaque enquêté. Nous avons ainsi mené nos
entretiens et nous avons répété cette opération
jusqu'à l'épuisement des données.
18
Nom
|
Age
|
Sexe
|
Etudes/ Formation
|
Sport pratiqué
|
Métier père/mère
|
Priorité donnée
|
Déd an*
|
Durée
|
Contexte
|
Akim
|
24
|
M
|
L2 STAPS
|
Athlétisme 100m 200m 400m
|
Ouvrier à l'usine/
Mère au foyer
|
1 Travail
2 Sport
3 Etudes
|
Non
|
1 h
|
Salle de cours (STAPS)
|
Nadège
|
21
|
F
|
M1 Histoire
|
Aviron
|
Infirmier/ Assureur
|
1 Sport et études
|
Non
|
1 h 10 min
|
Salle de cours (Faculté de Lettres)
|
Lola
|
26
|
F
|
Master de psycho obtenu (est désormais psychologue)
|
Athlétisme 400m
|
Directeur association/
Prof de sport
|
1 Sport et études
|
Non
|
1 h
|
Salle de travail
(Résidence)
|
Laurie
|
21
|
F
|
IAE School Management 2ème année
|
Athlétisme Saut en hauteur
|
Ouvrier SNCF/ Assureur
|
1 Etudes
2 Sport
|
Non
|
1 h
|
Salle de travail
(Résidence)
|
Abdel
|
19
|
M
|
L1 STAPS
|
Handball
|
Informaticien / Mère au foyer
|
1 Sport
2 Etudes
|
Oui
|
1 h 05 min
|
Salle de cours (STAPS)
|
Paula
|
21
|
F
|
IUT - DUT GEA 2ème année
|
Marche athlétique
|
Ouvrier à l'usine/ Infirmière
|
1 Sport
2 Etudes
|
Oui
|
1 h 05 min
|
Salle de cours (IUT)
|
Noé
|
19
|
M
|
IUT - Technique de commercialisati on 2ème
année
|
Aviron
|
Ancien tennisman professionnel /Commercial
|
1 Sport et études
|
Oui
|
1 h 20 min
|
Salle de cours (IUT)
|
Henri
|
22
|
M
|
Faculté des sciences - L2 Maths
|
Tir à l'arc
|
Assureur/ Assistant familial
|
1 Sport et études
|
Non
|
1h 10 min
|
Couloir (Faculté des Sciences)
|
19
Danilo
|
24
|
M
|
L3 STAPS
|
Basket
|
Ouvrier BTP/ Vendeuse magasin
|
1 Sport
2 Etudes
|
Non
|
50 min
|
Salle de cours (STAPS)
|
Clémentine
|
19
|
F
|
L1 STAPS
|
Natation
|
Infirmier/ aide- soignante
|
1 Etudes
2 Sport et travail
|
Oui
|
1 h
|
Salle de cours (STAPS)
|
Odilon
|
19
|
M
|
IDMC - L3 MIASHS option MIAGE
|
Escrime
|
Gérant station- service/ ERUN
|
1 Etudes
2 Sport
|
Non
|
1 h 05 min
|
Salle de cours (IDMC)
|
Alphonse
|
21
|
M
|
M1 MEEF - STAPS
|
Football
|
Retraité, ancien vendeur magasin/ infirmière
|
1 Sport et études
|
Non
|
50 min
|
Salle de cours (STAPS)
|
Mandy
|
20
|
F
|
L3 STAPS
|
Football
|
Ouvrier/ Masseuse
|
1 Sport et études
|
Non
|
1 h
|
En extérieur (STAPS)
|
*Dédouble son année
Après avoir 13 entretiens, nous avons
considéré qu'il n'était pas nécessaire d'en faire
davantage. Nous avons interrogé des étudiants que nous ne
connaissons pas. En effet, le fait de ne pas connaître la personne,
permet à l'enquêté de se sentir plus libéré.
Cela va ainsi faciliter la parole, il est plus facile de parler à
quelqu'un que l'on ne connaît pas et d'obtenir des informations
confidentielles, car nous n'allons pas forcément revoir
l'enquêté dans le futur. À ce jour, nous nous sommes
familiarisés avec ces ESHN l'Université de Lorraine, certains de
ces étudiants nous précisaient qu'ils pouvaient nous ouvrir la
porte vers d'autres ESHN s'il nous manquait des entretiens à
réaliser.
Les entretiens ont été réalisés au
sein de la faculté de Lettres et dans les facultés environnantes
telles que la faculté de sport, faculté de sciences, l'IDMC,
l'IUT Nancy Charlemagne ou encore dans une résidence proche de la
faculté de Lettres. Aussi, nous avons sélectionner autant de
femmes que d'hommes afin de pouvoir réaliser une analyse genrée,
pouvoir discerner les points communs et les différences entre les sexes
(6 femmes et 7 hommes). De même pour les sports,
20
des sports collectifs et individuels ont été
étudiés pour varier les approches et dégager une analyse
comparative (4 sports collectifs pour 9 sports individuels). Pour les
filières d'études, nous l'avons vu, la moitié d'entre eux
sont en STAPS à l'Université de Loraine à Metz et à
Nancy. Nous avons tenté faire varier au mieux, les filières
d'études pour toucher différents milieux sociaux.
Nous avons mis en place une colonne qui traite de l'âge.
Nous n'avons pas établi dans cette recherche une analyse liée
spécifiquement à l'âge. Nos enquêtés ont entre
26 et 19 ans ce qui est à peu près représentatif de la
population étudiante en général.
La colonne des sexes nous permet d'en tirer une analyse
comparative genrée, établir des inégalités de
traitement que ce soit dans le milieu du sport ou dans le milieu universitaire.
Nous avons fait usage de ce tableau dans l'élaboration des
opportunités A cet égard, notre analyse ne se concentre peu sur
une analyse de genre.
La colonne filière d'étude nous permet de voir
par exemple, si certaines filières sont occupées davantage par
des étudiants d'origine populaire ou de la classe moyenne ou
aisée. C'est alors que 6 étudiants sur 13 sont en STAPS, le reste
occupent différentes filières diverses et variés :
Lettres, IUT, etc. Cette colonne est importante dans l'analyse de la
conciliation.
La colonne « Sport » est l'une des plus importante.
Dans notre échantillon, nous avons une surreprésentation des
athlètes qui pratiquent l'athlétisme (4 étudiants), puis
ceux qui pratiquent le football et l'aviron (2 étudiants) et le reste. A
partir de cette colonne, nous pouvons la comparer, par exemple avec celle des
métiers des parents pour voir si il y a une relation entre ces deux
éléments. Cette colonne nous a été utile dans
l'approche du lien entre les parents et étudiants sportifs dans notre
analyse.
La colonne des métiers des parents a été
construite à partir des données obtenues grâce à une
question dans notre guide d'entretien. Cette colonne a été
très importante dans le cadre de notre analyse de la classe sociale,
l'influence des parents sur l'ESHN mais aussi dans la conciliation du sport et
des études.
Nous avons établi une colonne « Priorité
donnée » à savoir quel ordre prioritaire est établi
par nos ESHN dans la conciliation. En effet, cette conciliation donne lieu
à un ordre de préférence. Il a trois
éléments : le sport, le travail, et les études. Nous
verrons dans la partie analyse que cet ordre est en grande partie défini
par l'environnement social. En contrepartie de la relecture des entretiens,
cette colonne a été construite en partie grâce à la
fonction « recherche » dans nos
21
entretiens, à partir d'une analyse
lexicométrique qui permet d'étudier la redondance des mots dans
un texte. Quand le mot « études » revenait beaucoup plus
souvent que le mot « sport » par exemple, nous avons établi un
ordre de cet manière « 1. Etudes 2. Sport » Cette analyse a
été utile pour nous, dans la partie où nous avons
étudié la conciliation entre le sport et les études.
La colonne « Dédouble son année » a
été conçu pour donner l'information de savoir si
l'étudiant fait usage d'un aménagement spécifique durant
ses études. S'il dédouble, il peut faire son année en 2
ans ou 3 ans. Cette information est importante, généralement les
étudiants qui dédoublent ont beaucoup d'heures
d'entraînement qui se chevauchent avec les heures de cours, ils sont 4
étudiants sur 13 à dédoubler, et sont ceux qui
s'investissent davantage dans le sport. Cette colonne a été
importante dans l'étude de la conciliation.
Les deux dernières colonnes « Durée »
et « Contexte » ont été construites pour donner des
indications quant à l'entretien mais n'ont pas fait l'objet d'une
analyse.
Toutes ces colonnes ont été créée
dans l'optique de fournir un support dans l'analyse de notre mémoire. Il
est important de croiser, de comparer certaines colonnes pour tirer des
similitudes ou des différences.
Une des limites que nous pourrions évoqués est
la suivante : il s'agissait d'une liste des ESHN de l'année 2021/2022.
Dans les mails qui ont été envoyés, certains des ESHN ont
précisé qu'ils n'étaient plus ESHN donc ils ne voulaient
pas faire d'entretiens. Au contraire, une étudiante et la seule
d'ailleurs, âgée de 26 ans (Lola) a fini ses études, nous
l'avons tout de même prise en compte dans l'analyse bien qu'elle n'avait
plus ce statut. Autre limite à noter, certains ESHN ne se sentaient pas
« légitime » à faire un entretien dans le sens
où leurs horaires de cours et les horaires sportives ne se chevauchaient
pas, et allié avec peu d'heures d'entrainement. Il n'a pas besoin d'un
aménagement spécifique. Le seul dans cette situation était
l'étudiant qui s'appelle Odilon. En outre, nous avons eu du mal à
trouver des étudiants par mail qui pratiquent un sport collectif, en
effet, ils sont au nombre de quatre.
2. L'explication de la méthodologie pour
l'analyse
L'induction est une forme de raisonnement qui procède
du spécifique vers le général, nous allons utiliser nos
étudiants athlètes de haut niveau comme point de départ
pour formuler des théories plus larges. Cette approche d'analyse a le
mérite de s'appuyer sur des données empiriques et de valoriser
l'expérience des participants. Ce mode d'analyse est adapté
à notre recherche, puisque les entretiens constituent la source
principale de nos données.
22
La réalisation de l'analyse est faite par une
méthodologie d'analyse thématique. Nous privilégions cette
approche, car elle correspond particulièrement au domaine qualitatif,
elle semble être une des plus efficaces pour l'analyse du discours de
l'enquêté, mais aussi une approche qui s'avère utile pour
confronter les propos de plusieurs enquêtés.
A l'aide de nos données présentes dans nos
entretiens des ESHN, nous pouvons établir trois grands thèmes en
fonction des résultats que nous avons trouvés. Nous avons fait
ressortir les grands thèmes, et sélectionné les bouts
d'entretien qui semblaient pertinents. Nous avons repris les discours, à
l'aide du cadre théorique défini, pour faire émerger des
comportements sociaux, des réponses à mes questions de recherche.
Pour chaque thème, nous allons établir des sous-thèmes. A
partir de ces résultats, nous avons mis en exergue quatre grandes
parties par rapport au discours qui semblait être redondant dans le
discours de nos enquêtés à savoir le statut particulier des
ESHN, le rôle familial, le rôle du personnel sportif et le
rôle du personnel universitaire. A partir de ces éléments,
nous avons pu extraire les extraits d'entretien qui étaient les plus
pertinents pour notre étude, et nous les avons confrontés
à la théorie afin de monter en
généralité.
Dans la première partie, nous verrons comment ces
sportifs deviennent des ESHN, et par quels moyens ils se maintiennent dans la
pratique. Puis, le statut particulier des ESHN et ses avantages, ensuite les
opportunités différentes des ESHN et enfin l'organisation des
ESHN. Et dans la dernière sous partie, le rôle de l'entourage dans
la mise en pratique. Pour analyser cette partie, nous allons faire usage du
concept d'habitus de Bourdieu, ainsi que le concept de socialisation de
Durkheim.
Dans la seconde partie, nous verrons comment les ESHN
concilient le sport et les études, comment procèdent-ils ? Nous
aurons ainsi comme sous-partie, nous verrons quels sont les facteurs qui
poussent à prioriser les études au sport et dans la seconde, nous
verrons l'inverse, comment se fait-il que certains privilégient le
sport. Et dans la dernière sous-partie, nous aurons les perspectives des
ESHN, comment ils se projettent à l'avenir et quels sont les
paramètres qui vont influencer leurs futurs métiers ? Pour
analyser cette partie, nous allons faire usage de Boudon et de sa
théorie sur l'action rationnelle ainsi que de Papin et Viaud pour
analyser et étudier les opportunités des ESHN face au sport et
aux études.
Dans la troisième partie, nous aborderons le soutien
inégal dans le domaine sportif et le domaine institutionnel. Nous
verrons que dans le domaine sportif que le soutien se manifeste de
différentes manières selon les institutions. Dans la
deuxième sous-partie, nous verrons que tous
23
les enseignants et camarades de classe exercent une influence
différente sur nos ESHN. Pour analyser cette partie, nous ferons usage
principalement de Lemieux et Mignon pour étudier le rôle du
personnel sportif et Honneth pour étudier la reconnaissance sociale.
Pour cette dernière partie, nous étudierons de
plus près la reconnaissance des ESHN. Dans une première
sous-partie, nous verrons que nos ESHN ne sont souvent bien reconnus
malgré leur statut. Dans la seconde sous-partie, au contraire, les ESHN
sont une source de fierté pour leur famille. Et dans la dernière
sous-partie, nous verrons comment les ESHN font usage des réseaux
sociaux et comment ils sont perçus ? Nous analyserons le rôle des
représentants scolaire à travers Becker et sa théorie de
l'étiquetage, la famille avec les études de Coakley, puis les
médias au travers les travaux de Rowe.
24
Chapitre II - Analyse et résultats
Partie I - Devenir et être sportif de haut
niveau
Pour débuter, le statut d'Étudiant Sportif de
Haut Niveau (ESHN) est donné aux étudiants qui participent
à des compétitions sportives de haut niveau et qui poursuivent
des études supérieures. En effet, ce statut offre un ensemble de
soutiens pour aider ces étudiants à équilibrer leurs
engagements sportifs et académiques. Comme nous l'avons vu avant, pour
obtenir ce statut, ils doivent généralement remplir des
critères de performance et aussi académique, et participer
à des compétitions et des entraînements. Certains d'entre
eux ont l'accès à des centres de formation souvent
affiliés à des universités ou des écoles, qui
offrent un encadrement sportif et académique adapté à ce
qu'ils désirent. Ces centres permettent de combiner des
entraînements tout en suivant un cursus académique grâce
à des installations sportives de qualité ainsi qu'un suivi
personnalisé auprès d'experts dans le milieu du sport.
Nous nous attacherons dans cette partie à revenir sur
les facteurs premiers de la pratique du sport : reposent-ils sur un entourage
décisif ? Comment se réalise la planification et l'organisation
de leur emploi du temps ? Les opportunités d'encadrement et de soutien
varient-elles entre les sportifs de haut niveau ? Ce statut particulier
offre-t-il des ressources et des financements avantageux ?
1. Les vecteurs premiers de la mise en pratique du sport
: un entourage décisif
La famille est la première source de soutien pour un
athlète. Ainsi, les parents, les frères et soeurs peuvent jouer
un rôle primordial tout comme d'autres membres de la famille dans
l'initiation d'un étudiant au sport. Parfois, il s'agit d'une tradition
familiale ou bien, d'un héritage sportif qui se perpétue de
pères en fils, ce qui peut motiver l'étudiant à suivre les
traces de ses proches.
« Moi à la base, je suis une famille sportive
du coup, j'ai toujours fait du sport quand j'étais petit quand
j'étais plus jeune, j'ai pu commencer à en faire, j'en ai fait,
j'ai fait du foot du basket de la natation, je faisais un peu de tout ».
(Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de commercialisation
2ème année/ Aviron)
« Mon père a toujours été
là à l'époque, quand j'étais petit, il
m'emmène à l'entraînement, il attendait la fin et
maintenant, il y a plus besoin, mais il est toujours là à
regarder quoi. Ma mère, elle essayait d'être présente et
après elle met plus sur le côté tout ce qui va être
médical ou m'accompagner en dehors etc. mais les deux ont
toujours
25
été présents et du coup de temps en
temps, ils venaient voir des matchs. f...] En club non, j'ai pas fait d'autres
sports. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
L'éducation initiale de ces individus illustre
l'apprentissage des valeurs et des normes, avec le sport tenant une place
prépondérante, transmise dès son plus jeune âge par
sa famille. Les rôles des parents sont dans ce cas, intéressants
à étudier. Le père est plutôt associé
à la pratique et à l'aspect physique du sport, tandis que la
mère semble plus impliquée dans le support logistique et
médical. L'engagement répété et diversifié
de cet individu dans le sport peut être analysé à travers
l'habitus, un concept développé par le sociologue Pierre
Bourdieu. L'habitus renvoie à un ensemble de dispositions inconscientes
acquises par l'expérience sociale, qui guident les actions et les
perceptions (Bourdieu, 1979). Dans ce cas précis, l'habitus (Parlebas,
1999) de l'individu s'est constitué grâce à l'encouragement
familial et à son engagement dans différentes activités
sportives. Enfin, la capacité à s'engager dans une
variété de sports révèle un certain niveau de
capital culturel et social. Selon Bourdieu, le capital culturel comme
étant l'accumulation de connaissances, de compétences et d'autres
attributs culturels acquis par l'individu (Bourdieu, 1986). Dans le cas de
Alphonse, ses parents ont joué un rôle actif et soutenu dans sa
participation au football, un sport qui, selon Bourdieu, peut être
associé à un habitus valorisant la résilience, la
tolérance à la douleur et la force physique (Parlebas, 1999).
Cela montre comment les parents peuvent influencer l'habitus de leur enfant, en
l'occurrence en encourageant et en soutenant l'engagement d'Alphonse dans le
football. Ainsi dans le cas de Noé, le fait de pratiquer divers sports
peut être interprété comme une manifestation de ce capital
culturel. Noé, qui semble être originaire d'une classe moyenne ou
aisée, annonce que sa famille est orientée vers le sport et qu'il
a eu l'occasion de s'engager dans diverses activités sportives depuis
qu'il est petit : le football, le basket-ball et la natation. Son niveau
d'éducation et sa position sociale lui ont donner la possibilité
de pratiquer plusieurs sports. En effet, la tendance à combiner les
activités sportives et culturelles est fortement structurée en
fonction du niveau d'éducation, du revenu et du statut social et
professionnel des individus (Coulangeon, Lemel, 2009). A l'opposé,
Alphonse, issue d'un milieu populaire, indique qu'il n'a pas participé
à d'autres sports en dehors en contrepartie du football. Cela
évoque certainement, des restrictions financières ou à un
accès limité à une variété
d'activités liés à sa classe sociale.
Si les déterminismes sociaux contribuent à
façonner la pratique sportive des étudiants sportifs de haut
niveau, au-delà de leur statut similaire, nous pouvons également
nous intéresser à leur devenir de sportif. Pour ce faire, nous
emprunterons la notion de « carrière »
développée par Howard Becker. Pour Becker, le terme «
carrière » ne se limite pas à l'avancement professionnel
26
ou à l'amélioration des compétences dans
un domaine spécifique, comme le sport par exemple (Becker, 1963). Il
élargit cette définition pour inclure un ensemble d'étapes
sociales et culturelles que traverse un individu au cours de son
évolution dans un domaine spécifique (Becker, 1963). Selon lui,
une carrière ne se résume pas à une simple échelle
de progression professionnelle (Becker, 1963). Elle implique également
une intégration progressive dans la culture et les normes du groupe ou
de la communauté qui définissent le domaine dans lequel la
personne évolue (Becker, 1963). De ce fait, la carrière est
perçue non seulement comme un parcours professionnel, mais aussi dans ce
sens, comme un parcours socioculturel (Becker, 1963). Nous concernant, et si
nous reprenons cette conception du terme de carrière, nous pouvons dire
que le stade de l'initiation est le point de départ où une
personne, généralement un enfant ou un adolescent, fait ses
premiers pas dans le domaine du sport (Becker, 1963). À ce
niveau-là, l'individu se familiarise avec les règles du jeu, il
va commencer à affiner ses compétences, il va pouvoir se voir
lui-même en tant que sportif. Par ailleurs, un grand nombre
d'étudiants ont entamé leur parcours sportif en raison de leur
fervente passion des individus pour un sport, animé par la
compétition, etc. Cet amour pour l'activité les a
galvanisés à s'exercer avec ardeur et à peaufiner leurs
aptitudes pour parvenir à un échelon compétitif. Cet
apprentissage du jeu, de la pratique sportive passe aussi par l'engouement que
suscite la compétition. Celle-ci semble contraindre, d'une certaine
manière, les sportifs en devenir à se socialiser plus fortement
encore à la pratique de leur choix :
« Et puis même voilà, j'ai vraiment,
j'adore la compétition de même si je suis très fair-play et
que je m'entends très bien avec toutes mes concurrentes, l'esprit de
compétition
me motive. » (Paula/ F/ 21 ans/ IUT - DUT GEA
2ème année/ Marche athlétique)
« Après quand même ma passion au
départ, c'est vivre de sa passion [...] Et le fait d'aller tous les
jours à l'entraînement faire ce que tu aimes tous les jours c'est
spécial, on est des privilégiés. ». (Alphonse/
M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
Les témoignages de Paula et Alphonse illustrent
également le processus de socialisation secondaire (Durkeim, 1895). En
effet, Alphonse témoigne sa passion pour le football, il se sent
privilégié de pouvoir vivre de sa passion. Son ressenti illustre
une dimension importante de la sociologie du sport : l'idée que le sport
permet aux individus de manifester leur identité et d'y trouver une
signification. Dunning a suggéré que le sport peut être
envisagé comme une forme de « recherche de l'excitation »
(Dunning, 1999). Selon Becker, le stade de la professionnalisation est celui
où l'individu commence à percevoir le sport comme une voie de
carrière potentielle (Becker, 1963). Il s'implique davantage dans
l'entraînement, explore des
27
occasions de concourir à un niveau supérieur et
commence à envisager des options éducatives et de formation qui
lui permettraient de concilier les études et le sport.
La famille de ce devenir sportif joue un rôle vital dans
la vie des athlètes en les encourageant et en soutenant leurs efforts
pour surmonter les obstacles et rester motivés. Dans ce sens, ils
permettent de fournir un soutien qui se base sur les émotions
indispensables pour les aider, en particulier à traverser des moments
difficiles, qu'il s'agisse de blessures, de défaites ou de la pression
des études.
« En fait ils ont toujours été
là, toujours motivé même quand ça va pas du tout
quand je rentre chez eux et que je pleure enfin, ils sont toujours là au
final pour m'aider enfin, je pense que la famille c'est vraiment hyper
important enfin de toute façon dans tous les domaines. Mais enfin,
vraiment, dans le sport parce que enfin moi je sais qu'ils m'ont qui m'ont
toujours épaulé bon ça a été un peu dur pour
ma mère quand j'ai dû aller en internat mais sinon ils sont
là pour te motiver. » (Nadège! F! 21 ans! M1 Histoire!
Aviron)
La famille, agissant comme une principale instance de
socialisation joue donc un rôle déterminant (Durkheim, 1895). Mais
l'expérience en internat de Nadège pourrait être vue comme
une forme de socialisation secondaire, où elle s'est familiarisée
avec de nouvelles normes et valeurs en dehors de son environnement familial.
Nadège note également combien il a été difficile
pour sa mère de la voir partir en internat. Cela pourrait
refléter les normes sociales liées au genre, dans lesquelles les
mères sont souvent considérées comme étant plus
émotionnellement liées à leurs enfants. Le capital social
se réfère aux réseaux de relations qui peuvent être
mobilisés pour obtenir des bénéfices ou du soutien
(Bourdieu, 1986). De plus, dans ce contexte, l'appui familial de Nadège
lui a offert un réseau de soutien émotionnel décisif pour
sa carrière sportive et fait figure de capital social non
négligeable (Bourdieu, 1986). Dans les années de
spécialisation, le soutien parental demeure un élément
significatif. Les parents continuent d'encourager leurs enfants et de fournir
un soutien financier et moral dans la période de maintien de
l'athlète dans le sport (Durand-Bush, Salmela, Thompson, 2004). Comme
nous l'avons vu, cette passion peut être collective ou individuelle. La
famille peut ainsi aider les étudiants sportifs à trouver le
juste équilibre entre le sport et les études, en les aidant
à gérer leur temps et à prioriser leurs objectifs.
« Ils ont toujours été hyper cool
à me laisser faire après par contre quand à la maison, je
ramenais des mauvaises notes vraiment, ils étaient pas content et
ça pouvait me porter
28
préjudice pour le sport, mais j'ai toujours
réussi à être à pas être en confrontation avec
eux là-dessus et ils ont été vraiment cool à chaque
fois. » (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
Cet extrait d'entretien met en évidence l'influence
significative de sa famille sur son parcours sportif et éducatif. Sa
famille a établi une certaine règle qui lie ses activités
sportives à ses performances académiques. Bourdieu
caractériserait cet exercice d'influence comme l'application du capital
culturel, un processus où la famille inculque ses valeurs et attentes
dans l'esprit de l'enfant (Bourdieu, 1986). On peut donc observer l'accent mis
par la famille de Clémentine sur l'importance des études, tout en
continuant à encourager son engagement envers le sport. Cela
suggère que les parents valorisent une éducation solide en
parallèle du développement sportif de leurs enfants (Durand-Bush,
Salmela, Thompson, 2004). En outre, les parents et les frères et soeurs
peuvent servir de modèles pour les étudiants sportifs en montrant
leur propre engagement envers le sport, les études et la réussite
personnelle. En effet, la famille a la possibilité fournir un
réseau social en aidant les étudiants sportifs à
établir des relations avec d'autres sportifs, entraîneurs et
professionnels.
« Et c'est mon frère qui s'est investi en
premier, il a commencé quand il était petit... Moi, je voulais
absolument faire de l'escrime » (Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS
option MIAGE/ Escrime)
Le frère aîné d'Odilon s'étant
impliqué dans le sport en premier, il a peut-être agi comme un
exemple à suivre pour Odilon. Les frères et soeurs jouent souvent
un rôle capital dans le processus de socialisation, car ils peuvent
servir de modèles d'identification (Durkheim, 1895). La décision
d'Odilon de se lancer dans l'escrime peut être perçue comme le
fruit d'une socialisation au sein de sa famille, où les actions de son
frère aîné ont façonné ses propres
préférences et comportements. Les frères et soeurs peuvent
jouer un rôle significatif en fournissant un modèle pour
l'athlète (Durand-Bush, Salmela, Thompson, 2004).
En concordance avec les membres de la famille, les amis de
l'ESHN peuvent également jouer un rôle dans le parcours sportif.
Ainsi, ils ont l'occasion servir de motivation et de soutien en aidant
l'athlète à naviguer dans son parcours sportif.
« En CM2, une amie à moi en faisait et ma
mère voulait que je fasse de l'athlétisme, c'était venu
à l'idée, elle m'a jamais forcé ou quoi, mais un moment,
c'était un peu en
mode tiens si je tentais moi. » (Lola/ F/ 26 ans/
Master de psycho obtenu/ 400m)
29
En ce qui concerne la socialisation au sein de la famille, la
mère de Lola a introduit l'idée de pratiquer l'athlétisme,
sans toutefois imposer cette décision à Lola. Ils respectent
l'autonomie individuelle de Lola lors de la prise de décision. Les
parents encouragent généralement la participation à
diverses activités sportives principalement axée sur le plaisir
de la pratique sportive plutôt que sur la compétition au stade de
l'initiation (Durand-Bush, Salmela, Thompson, 2004). D'un autre
côté, l'influence de l'amie de Lola, déjà
engagée dans l'athlétisme, représente un exemple de
socialisation parmi les pairs, en particulier à cet âge. Le
parcours de Lola démontre comment la socialisation sportive se manifeste
à travers diverses influences, qui peuvent parfois se produire
simultanément et interagir entre elles. Finalement, l'expérience
de Lola peut être analysée à la lumière de la
théorie du développement positif par le sport, selon cette
théorie, le sport est un outil qui peut aider au développement
personnel et social des jeunes. (Côté, 2002). Par exemple, Jean
Côté a mis en avant le rôle de soutien de l'entourage dans
la pratique sportive des enfants (Côté, 2002). Les
coéquipiers et les amis ont une influence secondaire sur la motivation
des étudiants sportifs. Un climat d'équipe sain et solidaire peut
encourager les individus à se surpasser et à poursuivre leurs
objectifs sportifs et académiques.
« On est quand même tous ami quoi enfin, en fait,
il y a un truc qu'il faut retenir surtout, c'est que je trouve que grâce
au sport on se fait vraiment des vraies amitiés. Enfin, je trouve que
ça change des autres amitiés parce que vu qu'on partage quelque
chose de fort enfin, le dépassement de soi avec d'autres personnes, on
crée vraiment des amitiés qui sont fortes et qu'on retrouve pas
forcément ailleurs. » (Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/
Aviron)
L'observation de Nadège met en lumière
l'importance du sport comme un vecteur de socialisation et de création
de relations interpersonnelles significatives. Durkheim a proposé que
des activités communes, comme le sport, peuvent renforcer la
cohésion sociale et créer un sens de solidarité parmi les
participants (Durkheim, 1893). Le partage d'une activité exigeante et la
poursuite conjointe de l'excellence personnelle facilitent
l'établissement de connexions profondes, ce que Nadège qualifie
de « vraies amitiés ».
Pour les athlètes étudiants de haut niveau, leur
identification en tant que sportifs peut jouer un rôle décisif
dans leur perception d'eux-mêmes. Les méthodes d'identification
employées par les athlètes étudiants de haut niveau sont
des moyens d'explorer et d'exprimer leur enthousiasme pour le sport, tout en
construisant leur identité autour de cet intérêt. Ils
peuvent aussi être inspirés par des sportifs connus mondialement
dans leur domaine sportif.
30
« C'était plus avant mais là maintenant
j'ai pas le temps, ce que je préfère reprendre des mouvs des gens
de NBA. Quand on regarde beaucoup les vidéos, ça fait rêver
après tu peux le faire sur le terrain et c'est pas la même chose
et pour faire après c'est toujours bien d'avoir un exemple. »
(Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
« Parce que je voulais faire du sprint de base, j'ai
vu Usain Bolt aux JO, il a tout déchiré, j'ai dit vas-y, je vais
faire comme lui moi aussi. » (Akim/ M/ 24 ans/ L2 STAPS/ 100m 200m
400m)
En effet, les ESHN peuvent reproduire les mouvements des
sportifs les plus connus. Dans ce sens, Albert Bandura avance l'idée
d'une reproduction, en fait, l'apprentissage provient en partie de
l'observation des actions des autres (Bandura, 1977). En d'autres termes, en
observant, en imitant et en modélisant le comportement d'autrui, les
individus peuvent apprendre de manière significative (Bandura, 1977).
Ces sportifs connus mondialement jouent un rôle dans leur socialisation
sportive des ESHN. Dans cette idée, la contribution des médias
à la diffusion des modèles sportifs influencent la pratique
sportive des individus. Mais aussi, ces anecdotes illustrent l'engagement
corporel et sensoriel qui caractérise souvent l'expérience
sportive (Defrance, 2011). Pour Danilo, regarder des vidéos et
recréer les mouvements des joueurs de la NBA sur le terrain
possède une dimension rituelle, quant à Akim, son désir
d'imiter Usain Bolt met en lumière la participation profonde et le
rôle socialisateur du sport (Defrance, 2011). Cela démontre
également que le sport, peut être perçu comme un rituel car
la course devient un rituel symbolique, alimenté par le désir
d'imiter Usain Bolt. (Defrance, 2011). Finalement, on voit comment les figures
sportives peuvent non seulement influencer les techniques et les comportements,
mais également déterminer quant à leur choix des
disciplines sportives. Par ailleurs, les ESHN peuvent être aussi
motivés par des objectifs personnels, tels que l'amélioration de
leur performance ou atteindre le niveau professionnel.
« C'est tout le temps gagner, avoir des bonnes
performances, me dépasser et j'ai besoin de nager en fait pour
être que ce soit personnel ou sur le plan scolaire ou même au
travail ça m'aide à être bien à être
apaisé. » (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/
Natation)
Clémentine souligne l'importance de la
compétition, de l'amélioration des performances et de
l'autodépassement, illustrant la nature compétitive du sport et
le désir d'exceller, qui sont profondément intégrés
à l'identité sportive. Selon Bandura, les individus s'adaptent et
se développent en fonction de leur environnement (Bandura, 1977). Dans
le cas de Clémentine,
31
elle a probablement tiré des enseignements de ses
expériences en natation, associant ainsi la réussite sportive
à son bien-être sur le plan personnel, académique et
professionnel. C'est cette connexion qui la pousse à maintenir son
engagement envers la natation. Dans la même optique, les
entraîneurs et le personnel sportif ont un impact direct sur la
motivation des étudiants sportifs. Leur approche, leurs
compétences et leur capacité à créer un
environnement stimulant sont capitales pour maintenir la motivation de ces
étudiants.
« A l'entraînement, pas vraiment parce que
c'est à toi de te motiver vraiment, mais avant les compètes, les
coachs on a toujours du coup un brief avant courses et un débrief
après la course. » (Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/
Aviron)
La déclaration de Nadège met en évidence
l'importance capitale du coaching dans le domaine sportif, tant pour la
motivation que pour la préparation et l'évaluation des
performances. Bourdieu met en évidence l'importance des « agents de
socialisation » dans le sport avec les entraîneurs (Bourdieu, 1978).
Les entraîneurs exercent une influence significative sur le
développement et les résultats des athlètes, en agissant
à la fois comme des guides, des mentors et parfois même comme des
sources de motivation.
En résumé, l'entourage d'un étudiant
sportif de haut niveau joue un rôle prépondérant dans sa
motivation et sa réussite. Pour ces athlètes étudiants,
les membres de la famille et les amis jouent fréquemment un rôle
crucial dans la sélection de leur sport, et fournissent un soutien
indispensable quand ils choisissent de s'impliquer de manière intense
dans leur discipline. En ce qui concerne les entraîneurs, une fois que
l'étudiant-athlète a déterminé son sport et s'y est
engagé de façon sérieuse, ils se transforment souvent en
des figures d'autorité essentielles pour maintenir cet engagement et
aider l'étudiant à atteindre un niveau de compétition.
Mais au-delà de cet entourage, des figures sportives plus «
éloignées » qui servent de modèles tout au long de
ces étapes à l'image de certaines stars
médiatisées. En général, ces figures sont des
athlètes de renommée mondiale qui ont excellé dans leur
domaine spécifique et sont capables de susciter l'admiration.
2. Un statut particulier qui permet des ressources et des
financements souvent avantageux
Le statut d'Étudiant Sportif de Haut Niveau (ESHN) est
un dispositif mis en place pour aider les étudiants qui pratiquent un
sport à haut niveau à concilier leurs études et leurs
activités sportives. Les étudiants sportifs de haut niveau ont
généralement accès à des infrastructures sportives
de qualité supérieure, y compris des installations
d'entraînement, des services
32
médicaux et de récupération, et des
conseils en matière de nutrition et de préparation mentale. La
plupart des établissements d'enseignement supérieur sont tenus
d'adapter les cursus des étudiants sportifs de haut niveau afin de leur
permettre de concilier sport et études. Cela peut inclure des horaires
aménagés, des dispenses d'assiduité ou des
dérogations aux examens.
« On me demandait juste de rattraper et par rapport
aux examens ça tombe tout le temps sur les périodes de
compétition, donc ce soit en STAPS ou en fac de lettres, on
m'autorisait à les décaler. » (Lola/
F/ 26 ans/ Master de psycho obtenu/ 400m)
Les universités ont instauré des dispositions
spéciales pour soutenir les étudiants-athlètes, comme
Lola, dans la gestion de leurs obligations scolaires et sportives. Lola a, par
exemple, la possibilité de reprogrammer ses examens afin de pouvoir
concourir. Cette mesure institutionnelle témoigne de la reconnaissance
du sport et des études comme deux domaines capitaux, nécessitant
un certain équilibre. Par ailleurs, cette possibilité de
reprogrammer les examens met en exergue l'importance de l'équité.
Weber a proposé une interprétation complexe de la stratification
sociale, mettant l'accent non seulement sur les divisions économiques,
mais également sur des facteurs comme le prestige social et le pouvoir
(Weber, 1922). La stratification sociale désigne la structuration de la
société en diverses strates ou niveaux, basée sur des
éléments tels que le rang économique, l'autorité et
l'estime (Weber, 1922). Dans le domaine du sport, cela pourrait signifier que
la disponibilité des ressources, les chances d'avancement et
l'appréciation peuvent varier grandement en fonction de la discipline
sportive de l'étudiant. Par exemple, dans certaines nations, des
disciplines comme le football, le basketball ou le handball peuvent être
fortement valorisées, bénéficiant d'un fort soutien en
matière d'infrastructures, de financement et d'encadrement. Les sportifs
s'adonnant à ces disciplines pourraient accéder à une
formation de qualité supérieure, à des compétitions
à l'échelle nationale et internationale.
« Ils m'ont donné un appartement un bel
appartement en 4e étage 65 mètres tout équipés,
après, j'avais aussi 450 euros de nourriture. » (Abdel/ M/ 19
ans/ L1 STAPS/ Handball)
Abdel profite d'opportunités économiques
considérables grâce à son rôle d'athlète. Les
privilèges dont il bénéficie, tels que son appartement et
son allocation pour la nourriture, reflètent sa position
socio-économique privilégiée. Être un
athlète, et peut-être un athlète de premier plan, attribue
à Abdel un certain prestige ou une certaine distinction sociale. Les
avantages matériels qu'il reçoit, comme un appartement, peuvent
être interprétés comme une
33
reconnaissance de ce statut. En outre, bien que la citation
n'évoque pas explicitement le pouvoir, Abdel, en tant qu'athlète
accompli, peut détenir une certaine influence ou un certain pouvoir au
sein de sa structure sportive, ce qui pourrait lui permettre de
bénéficier de ces avantages. Au-delà du matériel et
de la nourriture, les étudiants sportifs de haut niveau doivent par
moment participer à des compétitions nationales ou bien
internationales, et les coûts de déplacement peuvent être
parfois importants. Certaines institutions ou organisations sportives offrent
des aides pour couvrir ce genre de dépense.
« Tu vois et j'avais aussi un remboursement de frais,
de rembourser pour les kilomètres que je faisais pour aller aux
entraînements et à l'école. » (Abdel/ M/ 19 ans/
L1 STAPS/ Handball)
Abdel obtient des compensations financières pour
couvrir les frais de déplacement pour ses entraînements et ses
cours, ce qui reflète les avantages économiques liés
à son statut d'athlète. Aussi, les athlètes qui pratiquent
des sports moins populaires ou moins reconnus peuvent avoir moins
d'accès à ces ressources et à ces opportunités. Ils
sont souvent liés à des clubs sportifs professionnels ou à
des fédérations.
En effet, les athlètes de haut niveau peuvent se lier
à des partenariats avec des entreprises ainsi que des marques pour
obtenir un soutien financier et des ressources en échange de la
promotion de ces entreprises et de leurs produits. Malgré le manque de
reconnaissance de certains sports, des étudiants peuvent obtenir des
sponsors.
« J'ai fait une page Facebook athlète qui a
été demandé par mon sponsor, Joma, il m'envoie des
vêtements gratuitement, tu as un contrat avec donc tu es obligé de
faire des publications. » (Lola/ F/ 26 ans/ Master de psycho obtenu/
400m)
Dans l'observation de Lola, nous pouvons appliquer la
théorie de la célébrité de Chris Rojek. Rojek
définit la célébrité comme une dynamique de pouvoir
où des individus, connus par une vaste audience, exercent une influence
significative sur celle-ci (Rojek,2001). Dans le cas de Lola, elle a
établi un partenariat de parrainage avec Joma, qui lui fournit
gratuitement des vêtements. En contrepartie, elle doit poster sur sa page
Facebook d'athlète pour promouvoir la marque. Ceci illustre la
manière dont sa renommée et sa visibilité sont
exploitées à des fins de marketing. Elle devient une sorte de
« célébrité » avec un impact notable sur son
audience, qui est utilisé par la marque pour accroître sa
visibilité et ses ventes de produits. En effet, les étudiants
sportifs de haut niveau privilégiés peuvent
bénéficier d'aides matérielles (des équipements
sportifs, infrastructures, etc.) et financières de la part de leur
fédération, de leur
34
club ou de partenaires privés, ou des fois ils sont
contraints de payer de leur propre poche pour des équipements. Par
exemple, les clubs sportifs et les fédérations sportives peuvent
de temps en temps, fournir un soutien financier et des ressources aux
athlètes de haut niveau, notamment en termes d'entraînement, de
compétitions et d'équipements.
« Il y a une poignée qui est la partie
centrale de l'arc ça en général, c'est l'archer qui le
paye parce que bah, c'est quelque chose qui va durer dans le temps
après, il y a les branches qui faut clipser sur la poignée et
ça les branches, en fait la Fédération quand on est
sportive de niveau elle nous en prête » (Henri/ M/ 22 ans/
Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
« Mais il faut quand même être investi,
je te donne une échelle pour de la très bonne qualité
très banale de qualité, je dirais à 1500. »
(Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/ Escrime)
Dans le cas d'Henri, l'acquisition de l'arc, un objet de
valeur, représente une forme de capital économique. Il
précise que l'archer se charge généralement de l'achat de
la poignée de l'arc, un élément durable et essentiel
à la pratique. Par ailleurs, la Fédération prête les
branches de l'arc aux archers de haut niveau, ce qui témoigne de
l'interaction entre le capital économique individuel (la capacité
financière de l'archer à se procurer la poignée) et le
capital social (l'appartenance à la Fédération qui
facilite le prêt des branches). La théorie de la stratification
sociale de Pierre Bourdieu pourrait offrir une perspective intéressante
pour l'analyse. Cette théorie se concentre sur la distribution des
ressources au sein de la société et comment cela influence le
statut social des individus (Bourdieu, 1979). Quant à Odilon,
l'investissement financier requis pour acquérir un équipement de
haute qualité en escrime (estimé à environ 1500€ par
lui-même) est un indicateur de son capital économique. Cet
investissement a également des répercussions sur son capital
culturel et social, car il peut influencer la façon dont les autres
sportifs et entraîneurs le perçoivent et peut
éventuellement affecter ses opportunités dans le sport.
En somme, être étudiant sportif de haut niveau
offre de nombreux avantages financiers. Toutefois, il convient de noter que
l'opportunité d'obtenir des financements peut être
compliqué et dépend du sport pratiqué et du niveau de
pratique, et que les sportifs doivent souvent gérer la pression et les
exigences liées à leur double vie d'étudiant et
d'athlète de haut niveau. La nature changeante de ces dynamiques est
largement influencée par le contexte culturel et géographique. Un
sport qui peut être moins apprécié ou moins soutenu dans
une certaine région
35
peut, dans un autre contexte, jouir d'une popularité et
d'un soutien considérables. Par conséquent, l'expérience
des étudiants sportifs de haut niveau peut être
profondément affectée par leur localisation et leur environnement
culturel spécifique. Pour conclure, même si être un
étudiant sportif de haut niveau peut présenter de multiples
avantages, ces opportunités ne sont pas distribuées de
manière égale à tous les athlètes.
3. Des opportunités d'encadrement et de soutien
variables entre sportifs de haut niveau
Les ESHN ont accès à de nombreuses
opportunités pour les aider à réussir. Tous nos
étudiants sportifs de haut niveau sont effectivement membres d'un club
sportif. Les clubs sportifs offrent généralement des
infrastructures, des entraîneurs spécialisés, des
programmes d'entraînement et des compétitions qui permettent aux
étudiants de développer leurs compétences sportives
à un niveau élevé.
« Ouais donc, je voulais faire du sprint, je me
renseigne, je vais dans mon club actuel » (Akim/ M/ 24 ans/ L2 STAPS/
100m 200m 400m)
« Depuis tout petit au Luxembourg, j'ai
commencé là et depuis petit que j'ai joué pour le
même club à 7 ans, j'ai intégré l'équipe
senior et l'année passée. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3
STAPS/ Basket)
Ces deux étudiants soulignent l'importance des clubs et
des équipes dans le processus de socialisation sportive. En effet,
Coakley se penche sur les aspects sociaux et culturels du sport et analyse
comment la participation sportive influence la socialisation des individus
(Coakley, 2019). Akim fait référence à son club actuel,
tandis que Danilo mentionne son intégration dans l'équipe senior
de son club. La transmission de normes, de valeurs liées à la
pratique sportive sont en partie assurés par ces structures. Dans ce
sens, les individus apprennent à s'adapter aux attentes et aux
dynamiques de leur club ou de leur équipe, ce qui contribue à
leur socialisation sportive (Coakley, 2019). Les clubs sont souvent
affiliés à des fédérations sportives nationales ou
internationales, ce qui permet aux étudiants de participer à des
compétitions officielles et de représenter leur club lors
d'événements sportifs. En plus de leur club, ils peuvent
être membre d'autres institutions. De nombreuses centres tels que le
CREPS, le pôle espoir et autres centres de formation offrent des options
pour certains étudiants sportifs de haut niveau. Tous les
étudiants sportifs de haut niveau ne sont pas nécessairement au
CREPS. Le CREPS est un établissement en France qui propose des
formations et des infrastructures spécifiquement conçues pour les
sportifs de haut niveau. Les athlètes qui se trouvent au sein des CREPS
sont
36
en général ceux qui ont été
reconnus comme ayant une capacité particulière dans leur sport
respectif. Leur sélection est habituellement déterminée
par leurs performances lors des compétitions et l'évaluation de
leurs capacités futures par les entraîneurs et les responsables de
leur fédération sportive. Il convient de souligner que les
critères de sélection peuvent différer en fonction du
sport ou du CREPS spécifique. Pour ceux qui sont au CREPS, ils ont des
possibilités de voir des kinés, des psychologues, des
préparateurs mentaux. Cela permet aux étudiants de poursuivre
leurs études tout en respectant leurs engagements sportifs et de
maximiser leurs performances dans les deux domaines.
« J'ai un préparateur physique du CREPS et
j'ai une psychologue du sport et après toute l'équipe
médicale du CREPS, tout tourne autour du CREPS parce que moi, j'ai
été interne. » (Paula! F! 21 ans! IUT - DUT GEA
2ème année! Marche athlétique)
Paula s'inscrit dans un système
institutionnalisé du sport grâce à son affiliation au
CREPS, dans le cadre de la théorie de l'institutionnalisation, Cette
situation reflète l'institutionnalisation du CREPS en tant qu'organisme
reconnu dans le domaine du sport, offrant des services et des infrastructures
spécialisés pour soutenir les athlètes. Selon la
théorie de John W. Meyer, l'institutionnalisation se produit lorsque les
normes et les pratiques d'une institution sont largement acceptées et
établies dans la société (Meyer & Rowan, 1977). Ainsi,
l'affiliation de l'équipe médicale de Paula au CREPS
témoigne de la reconnaissance et de la légitimité de cette
institution dans le domaine du sport. Ainsi, le CREPS joue un rôle
prépondérant en offrant des opportunités uniques aux
athlètes. En outre, dans le domaine sportif, le mot « pôle
» fait généralement référence aux Pôles
France et Pôles Espoirs en France. Ces structures sont
spécifiquement conçues pour former et entraîner les
sportifs de haut niveau. Chaque pôle se spécialise souvent dans
une discipline sportive particulière, offrant ainsi un support
ciblé et spécialisé pour les athlètes. Toutefois,
l'entrée dans ces pôles ou bien au CREPS peut s'avérer
restreinte et fortement concurrentielle, étant influencée par une
variété de facteurs. Parmi eux, on compte les compétences
sportives de l'individu, sa localisation géographique, la
spécificité de la discipline sportive, et parfois même les
conditions socio-économiques de l'athlète.
« En fait, en France il y a quatre pôles
France, donc Lyon, l'INSEP, Nantes, et Nancy, moi j'ai intégré
celui de Nancy et depuis, je suis restée en équipe de France et
donc je suis je suis toujours au pôle et je suis toujours
licenciée au club de Nancy. » (Nadège! F! 21 ans! M1
Histoire! Aviron)
37
« On pourrait se dire que je fais passer les
études avant ça, c'est la raison, mais aussi, je me sens mieux de
faire moins d'entraînement. C'est aussi mental voilà, j'ai besoin
de pas en faire beaucoup par exemple ceux au CREPS, ils sont, ils font
énormément d'entraînement et ça, ça me
convient pas parce que il faut, il faut autre chose » (Odilon/ M/ 19
ans/ IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/ Escrime)
Dans le cas de Nadège, sa mention d'être toujours
licenciée au club de Nancy souligne l'importance de sa continuité
d'engagement sportif au niveau local, même en étant membre du
pôle France et de l'équipe nationale. Cette double appartenance
met en évidence la capacité des athlètes à
s'inscrire dans plusieurs niveaux d'institutionnalisation, combinant des
structures à la fois locales et nationales (Meyer & Rowan, 1977).
Pour Odilon, son expression de préférence pour un volume
d'entraînement réduit par rapport à ce qui est
pratiqué au CREPS reflète également la théorie de
l'institutionnalisation. Odilon prend une décision en fonction de ses
préférences et de son bien-être mental. Il ressent le
besoin de s'entraîner de manière moins intensive pour se sentir
à l'aise et trouver un équilibre dans sa pratique sportive.
Certains athlètes peuvent préférer un entraînement
intensif, tandis que d'autres valorisent un équilibre entre
l'entraînement et d'autres aspects de leur vie. La prise en compte des
besoins individuels et des préférences personnelles dans la
planification de l'entraînement est donc essentiel pour leur
santé, le bien-être et l'épanouissement des athlètes
dans leur pratique sportive. En règle générale, les
étudiants sportifs de haut niveau bénéficient souvent d'un
encadrement professionnel expérimenté et d'un soutien de la part
de leurs entraîneurs, de leurs équipes quel que soit
l'institution.
« f...] on a des bons résultats cette
année, on est, on est premier en National 2 donc voilà ça
sort pas de nulle part, on voit qu'on travaille et que ce travail, c'est le
fruit du coach quoi. Alors, il a joué, je sais pas les clubs, mais il a
joué au final quand ils étaient à l'époque en D2 et
donc c'était un bon attaquant. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1
STAPS/ Football)
La citation d'Alphonse sur le succès de son
équipe de football et le rôle de son entraîneur est
analysée à la lumière de la théorie de la structure
sociale et de l'interaction de Durkheim. Selon la théorie de la
structure sociale et de l'interaction, la société est
constituée de divers éléments qui sont
interconnectés et s'appuient les uns sur les autres, créant ainsi
une configuration sociale sophistiquée (Durkheim, 1895). Les
interactions entre ces éléments sont structurées par un
ensemble de standards et de directives que les membres de la
société sont tenus de respecter afin de préserver la
stabilité et la cohésion sociale (Durkheim, 1895). Le
succès de l'équipe
38
reflète la structure sociale en place, ainsi que
l'adhésion de l'équipe aux normes et aux règles du
football. L'importance du rôle de l'entraîneur est
soulignée, ce dernier agissant en tant que leader et garantissant que
l'équipe respecte les règles du jeu, ce qui est essentiel au
maintien de l'ordre social. Enfin, l'expérience préalable de
l'entraîneur comme attaquant renforce sa capacité à guider
efficacement l'équipe, en raison de sa connaissance approfondie des
normes et des attentes de la ligue. La compétence dans le sport ne
dépend pas uniquement des qualifications formelles, mais repose aussi,
et peut-être même principalement, sur l'expérience sportive
personnelle (Lemieux, C., Mignon et al.,2006). Il est quasi certain que la
grande majorité des entraîneurs, sont d'anciens sportifs qui
dirigent maintenant dans le sport qu'ils ont eux-mêmes pratiqué
(Lemieux, C., Mignon et al.,2006). Au-delà des conseils, ils peuvent
interagir, prodiguant des aides en matière de carrière, de
formation et de développement personnel. En tant qu'étudiants
sportifs de haut niveau, ces individus ont souvent l'occasion de nouer des
contacts dans leur domaine sportif et dans le monde universitaire. Cela peut
mener à des opportunités de carrière intéressantes
après l'obtention du diplôme, que ce soit dans le sport
professionnel, le coaching, la gestion sportive ou d'autres domaines
similaires. La théorie de l'échange social, une approche
sociologique, envisage les interactions sociales comme un échange de
coûts et de récompenses entre les participants (Homans, 1961). La
théorie de l'échange social peut servir à examiner les
interactions des étudiants sportifs de haut niveau avec
différents intervenants, comme les entraîneurs, les
équipiers, les sponsors et les supporters. Par exemple, un sportif
pourrait s'engager à fournir des efforts intensifs et à exceller
dans ses performances, en contrepartie du soutien et des ressources que lui
apporte un coach ou un sponsor. Elle peut être utile pour comprendre les
relations entre l'ensemble de l'entourage sportif. Ainsi, le rôle de
l'entraîneur est perçu comme une combinaison entre le rôle
d'outil pour les dirigeants, de porte-voix pour les athlètes entre la
fédération et les clubs, et d'intermédiaire pour
l'application des connaissances scientifiques. (Lemieux, C., Mignon et
al.,2006)
« Cet ancien gardien de but du FC Metz, c'est lui qui
m'a sélectionné en équipe départementale, c'est lui
qui m'a proposé la section sportive, c'est lui qui m'a bien vendu
à Vendenheim, m'a appelé quand je voulais signer là-bas
c'est lui qui m'a dit d'aller à Nancy pour mon stage et ça se
passe super bien et c'est lui maintenant encore qui me propose un BMF.
» (Mandy/ F/ 20/ L3 STAPS/ Football)
« C'est mon entraîneur m'a aidé à
trouver une structure d'accueil pour quand j'avais la Strasbourg donc
ça, ça va beaucoup aider parce que je me voyais pas à
Strasbourg et dire bonjour, j'arrive, je vais m'entraîner enfin, c'est un
peu délicat et du coup, c'est
39
exactement le scénario qui s'est passé donc
c'est mon entraîneur de Strasbourg qui m'a aidé pour trouver mon
entraîneur de Nancy. » (Laurie! F! 21 ans! IAE School of
Management 2ème année !Saut en hauteur)
Les propos de Mandy insistent sur le rôle central et
pivot de son entraineur, à la fois sur le plan sportif mais aussi sur le
plan de la carrière professionnelle. Elle décrit comment un
ancien gardien de but du FC Metz a été déterminant dans
divers moments clés de sa progression en tant que joueuse de football.
C'est un exemple concret de la théorie de l'échange social.
L'entraîneur apporte à Mandy des opportunités et des
conseils précieux, anticipant en retour une gratification, que ce soit
sous forme de performances de Mandy sur le terrain, de la réussite de
l'équipe, ou d'une reconnaissance au niveau professionnel. Dans le
second témoignage, Laurie exprime sa gratitude envers son
entraîneur qui l'a assistée pour trouver un endroit pour
s'entraîner à Strasbourg. En offrant son aide et ses ressources
à Laurie, l'entraîneur s'attend en retour à ce qu'elle
puisse améliorer ses performances en saut en hauteur, ce qui pourrait
renforcer sa propre renommée et celle de l'équipe.
Le genre, la classe sociale, l'origine ou encore la religion
peuvent être des facteurs discriminants, ce qui offre des
opportunités différentes pour chaque individu. Par exemple, la
classe sociale est un facteur décisif qui peut toucher à
l'accès et les opportunités pour les étudiants sportifs de
haut niveau. Les individus issus de milieux défavorisés peuvent
rencontrer des difficultés pour accéder aux mêmes
opportunités et ressources (Marx & Engels, 1848). Pour illustrer les
inégalités en termes sociales, nous pouvons nous appuyer sur
cette citation : « Dans le cas de l'athlétisme, Lucie Forté
et Christine Mennesson (2012) repèrent par exemple la manière
dont les parents issus des classes favorisées perçoivent en
termes de concurrence l'engagement dans des études supérieures et
la poursuite de l'entraînement sportif intensif, au moment de la
dernière étape de la carrière athlétique. À
l'inverse des parents issus des classes populaires qui, par un effet de
méconnaissance du monde scolaire doublé d'une vision
enchantée des perspectives de la carrière sportive, maintiennent
une forte adhésion aux attentes de l'institution sportive et favorisent
ainsi la réalisation du travail athlétique. » (Papin, Viaud,
2018). Les étudiants provenant de milieux aisés peuvent
bénéficier d'entraîneurs privés, d'installations
sportives de haute qualité, d'équipements supérieurs et
d'une alimentation optimale.
« Le matériel que tu emploies bah, c'est toi,
tu fais du coup, c'est quand même coûteux comme matériel, on
peut trouver un équipement abordable, mais il faut quand même
être investi, je te donne une échelle pour de la très bonne
qualité très banale de
40
qualité, je dirais à 1500. »
(Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/ Escrime)
Le commentaire d'Odilon illustre le concept de «
Distinction » de Bourdieu, qui suggère que nos
préférences, y compris nos choix sportifs, sont
influencées par notre position socio-économique (Bourdieu, 1979).
Les sportifs provenant de milieux plus prospères ont une plus de chance
d'accéder à des sports comme l'escrime qui exigent un engagement
financier. Cette réalité contribue à une certaine forme
d'exclusion sociale dans le domaine du sport, où l'accès à
certaines disciplines est principalement réservé à ceux
ayant des moyens financiers supérieurs. Par ailleurs, le point de vue
d'Odilon évoque également la notion de « Carnalité
» dans le sport, une idée de Wacquant (Wacquant, 2002). Cette
notion met l'accent sur le fait que notre corps est simultanément
l'instrument et le produit de notre engagement dans une activité
sportive. (Wacquant, 2002). Comme l'exprime Odilon, « le matériel
que tu emploies, c'est toi », ce qui signifie que l'implication dans le
sport représente non seulement un investissement financier, mais
également un engagement corporel exigeant qui demande du temps, de
l'effort et de l'énergie. La constatation selon laquelle le coût
élevé du matériel sportif peut représenter un
obstacle à la participation soulève des préoccupations en
termes d'égalité et d'accès équitable au sport.
Cette réalité peut contribuer à des disparités dans
la possibilité de participer à des activités sportives.
Ainsi, les individus des classes populaires peuvent se trouver
désavantagées. Cela peut restreindre les opportunités pour
certaines personnes de s'engager pleinement dans le sport et de
développer leur potentiel athlétique. De plus, les
étudiants sportifs de haut niveau issus de milieux
socioéconomiques plus modestes peuvent rencontrer des contraintes
supplémentaires, comme l'obligation de travailler pour subvenir aux
besoins de leur famille. Cela pourrait restreindre le temps et l'énergie
qu'ils sont en mesure de consacrer à leur entraînement.
« C'est compliqué, tu as trois trucs en
même temps-là, le travail, sport, les études, c'est
compliqué. J'avoue que, c'est, faut s'accrocher de ouf. Je donne un peu
plus d'importance à mon taf en ce moment, c'est plus taf, sport et
études, dans mon ordre de préférence. [...] Maintenant, je
me suis marié là récemment, moi j'ai des
responsabilités, elles m'ont amené à avoir une
réflexion tu vois et en fait tout le temps je me donne à mon
sport de base, en fait, je me dis ouais c'est plutôt que je peux pas
ramener de l'oseille parce que j'ai entraînement tu vois ce que je veux
dire. » (Akim/ M/ 24 ans/ L2 STAPS/ 100m 200m 400m)
41
La déclaration d'Akim révèle un conflit
entre différentes responsabilités : le travail, le sport et les
études. L'équilibre entre le sport, les études et le
travail est un défi souvent rencontré par les
étudiants-athlètes. Cette problématique a
été étudiée par des chercheurs tels que Stevenson,
qui a observé que pour concilier ces différentes
responsabilités, les étudiants-athlètes sont souvent
amenés à faire des compromis (Stevenson, 2010). Par ailleurs, la
religion peut également influencer l'accès et les
opportunités pour les étudiants sportifs de haut niveau.
Certaines croyances religieuses peuvent limiter la participation des individus
à certaines disciplines sportives, ou créer des défis
supplémentaires pour concilier sport et études.
[Période de ramadan] « L'année
dernière, j'étais blessé donc ça va, et là,
j'en ai parlé un peu au coach, tu sais t'as des séances de muscu
et qui voit que t'es fatiguée, il va te mettre au repos parce que tu
peux faire nous en muscu pure, des fois, je vais faire un peu juste du gainage
genre forcément et voilà après pour les cours si tu peux
pas manger ça et donc ils vont m'aider à alléger. »
(Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
En ce qui concerne Abdel, l'entraîneur ajuste le cadre
d'entraînement en tenant compte de ses engagements religieux. La notion
d'« identité négociée » suggère que les
sportifs peuvent adapter et ajuster leur identité et leurs rôles
en fonction de divers contextes sociaux, y compris celui de la religion
(Coakley, 1993). Dans le cas spécifique d'Abdel, il est en train de
naviguer entre son identité d'athlète et son identité de
pratiquant musulman pendant le Ramadan, avec le soutien de son coach. Par
conséquent, les adaptations apportées à
l'entraînement reflètent l'évolution des normes et des
ressources qui structurent les activités de l'équipe.
Par ailleurs, dans le cadre de l'analyse genré, nous
avons sept hommes et six femmes. Les disciplines comme le 100m et le 400m,
pratiqués par Akim et Lola et le tir à l'arc ne sont pas
typiquement associées à un genre spécifique, bien que les
courses de sprint soient souvent vues comme plus masculines en raison de
l'importance de la vitesse et de la force. De même, l'aviron
(pratiqué par Nadège et Noé) n'est pas
particulièrement genré, même si l'effort physique requis
peut parfois décourager certaines femmes. L'handball et le basket,
respectivement pratiqués par Abdel et Danilo, sont souvent
considérés comme des sports plus masculins, principalement en
raison de leur nature compétitive et de leur intensité physique.
Le football, pratiqué par Alphonse et Mandy, est traditionnellement
dominé par les hommes, bien que l'implication des femmes y soit en
hausse. Le saut en hauteur (Laurie), la marche athlétique (Paula) et la
natation (Clémentine) peuvent être perçus comme des sports
moins liés à un genre spécifique, avec une participation
significative des femmes. L'escrime, pratiquée par Odilon, a
également une participation féminine notable, bien qu'elle ait
historiquement été dominée par les hommes. La
42
majorité des individus de notre échantillon
pratiquent des sports qui sont soit traditionnellement associés à
leur genre, soit considérés comme neutres. Quelques individus
transgressent ces classifications basées sur le genre : les femmes
haltérophiles, boxeuses et footballeuses s'entraînent dans des
environnements formels et sont reconnues par les institutions officielles
(Louveau, 2006). Cependant, les joueuses de football représentent encore
à peine 2% des licenciés dans ce sport en France, mais ce chiffre
tend à s'accroître (Louveau, 2006). Par exemple la seule exception
que nous avons, Mandy, une femme, joue au football, un sport historiquement
masculin (Louveau, 2006).
En effet, tous ces athlètes ne
bénéficient pas des mêmes ressources. En effet, les
facteurs liés à la classe, le genre, le sexe ou la religion ont
une influence sur nos ESHN. Les ESHN ne sont pas armer de la même
manière lorsqu'ils abordent les études ou le sport. La
théorie du conflit, que nous avons vu, peut aider à identifier et
à comprendre les inégalités qui existent parmi les
étudiants sportifs de haut niveau et comment elles peuvent influencer
leurs expériences et leurs opportunités dans le sport.
4. Une planification et une organisation quasi
militaire : une discipline de fer ?
Les étudiants sportifs de haut niveau doivent
effectivement avoir une planification et une organisation rigoureuses pour
pouvoir concilier leurs études et leur pratique sportive. Cela peut
être comparé à une discipline de fer, similaire à
celle observée dans le milieu militaire.
Premièrement, les étudiants sportifs de haut
niveau doivent gérer leur temps de manière très
précise, car ils doivent jongler entre les entraînements, les
compétitions, les études, les activités sociales et
établir un emploi du temps clair et s'y tenir. Pour cela, ils
n'hésitent pas à optimiser leur temps dans la journée en
anticipant à l'avance. Dans cette optique, Harold Wilensky pourrait
décrire le « temps militaire » comme une manipulation du temps
dans une organisation, où l'on fixe des délais stricts et un
emploi du temps rigide pour engendrer un sentiment d'urgence et de rendement
(Wilensky, 1964). Bien que les travaux de Wilensky ne se concentrent pas
spécifiquement sur la gestion individuelle du temps, ses études
sur la bureaucratie et les organisations nous aident à comprendre
comment les individus structurent leurs activités quotidiennes pour
atteindre leurs objectifs personnels et professionnels (Wilensky, 1964). Pour
équilibrer les exigences de leurs formations académiques et
sportives, les étudiants sportifs de haut niveau doivent souvent
organiser leur temps de façon rigoureuse, à la manière
d'une structure militaire.
43
« Classiquement réveil 8h30, après, je
pars de chez moi vers 9h30, je vais à l'entraînement pour 9h45, du
coup, après entraînement de 10 heures, à midi et
après à 13h, je vais à la fac jusqu'à 15h, du coup,
ça peut aller jusqu'à 17 heures. Après le soir, je rentre,
je me douche, je mange. Après, c'est soit série tout ça et
après dodo. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
« Après 18h30 en général c'est
l'heure de la muscu donc ça comme on fait cinq séances par
semaine du lundi au vendredi, c'est tous les jours, c'est une journée
bien chargée quand même assez des journées où tout
est millimétré. » (Henri/ M/ 22 ans/ Faculté des
sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
Dans les deux cas, on peut observer une planification et une
coordination du temps. Les individus ont des horaires et des routines bien
établis, avec des activités spécifiques allouées
à des moments précis de la journée. Cela suggère
qu'ils organisent leur temps de manière consciente et gèrent
leurs ressources temporelles de manière stratégique. Ces exemples
mettent en évidence comment les individus organisent et gèrent
leur temps en fonction de leurs responsabilités et priorités. En
outre, cet équilibre implique de maintenir une discipline ferme et de
suivre une routine planifiée pour garantir qu'ils disposent du temps
nécessaire à leur entraînement, à leurs
études, à leur repos et à leur
récupération.
« J'essaye d'être la plus efficace pour gagner
du temps dans la journée, je révise dans les transports par
exemple. » (Laurie/ F/ 21 ans/ IAE School of Management
2ème année /Saut en hauteur)
« Quand je rentrais le week-end chez mes parents
avant d'aller à mon match, des choses comme ça j'essaie de me
préparer des repas pour la semaine entière. » (Mandy/
F/ 20/ L3 STAPS/ Football)
Laurie cherche à optimiser son temps en étant
aussi efficace que possible. Elle profite de ses trajets en transport pour
réviser, ce qui témoigne de son utilisation productive de ce
temps de déplacement. Cette approche correspond à la perspective
du « temps militaire », où chaque instant est utilisé
de manière efficace afin de maximiser l'utilisation du temps disponible.
De son côté, Mandy se prépare des repas pour la semaine
entière lorsqu'elle rentre chez ses parents avant ses matchs. Cette
pratique témoigne de sa planification et de son organisation
préalable des repas, dans le but d'économiser du temps et de
l'énergie tout au long de la semaine. Cette approche est
cohérente avec la notion de temps militaire, qui met l'accent sur la
planification et la préparation préalable pour rationaliser les
activités quotidiennes et libérer du temps pour
44
d'autres engagements. La planification aide à
établir des priorités et à éviter les conflits
d'horaires. Dans le cas où les horaires d'entrainements
n'empiètent pas avec les cours, aucun aménagement est
nécessaire. Dans l'autre cas, un aménagement est
nécessaire, l'entraineur a accès à l'emploi du temps de
l'étudiant pour pouvoir mettre en place les heures d'entrainement. Les
athlètes de haut niveau s'entraînent régulièrement
suivant un programme d'entraînement spécifique et adapté
à leur discipline. Maintenir une communication constante avec les
enseignants et les entraîneurs permet de discuter des défis
rencontrés, des objectifs à atteindre et des ajustements
nécessaires dans la planification.
« Du coup l'emploi du temps et donc du coup bah en
fait chaque semaine, j'envoie mon planning de cours à mon coach et en
fait du coup mon coach à ce moment-là lui, il va regarder dans
les trous quand je n'ai pas cours. Il va mettre des entraînements
à ce moment-là et puis bah si par exemple il y a un petit trou de
deux heures par une mettre dans ces deux heures-là ». (Henri/
M/ 22 ans/ Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
« J'ai les cours et après les entrainements
c'est le soir donc ça gêne pas avec les cours que j'ai
déjà, finalement ça dérange pas dans la
journée. Je dois partir après, on a normalement, on a
entraînement mardi et on peut pas toujours avec le basket »
(Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
Henri adopte une approche entreprenante en envoyant son
planning de cours à son coach chaque semaine. Son coach utilise cette
information pour planifier des entraînements pendant les créneaux
horaires où Henri n'a pas de cours. Grâce à son expertise
et à sa connaissance approfondie du sport pratiqué par
l'étudiant, l'entraîneur conçoit un programme
d'entraînement sur mesure, en tenant compte de leurs objectifs et de leur
niveau de compétence. Dans ce cadre, l'entraîneur exerce une
autorité compétente, cela suggère une structure et une
hiérarchie fondées sur les compétences acquises lors
d'épreuves sportives (Lemieux, C., Mignon et al.,2006). Sa
stratégie montre sa volonté d'optimiser son temps en utilisant
chaque instant de manière productive, en comblant les périodes de
disponibilité avec des entraînements. Quant à Danilo, il
souligne que ses entraînements ont lieu le soir, ce qui lui permet de ne
pas interférer avec ses cours déjà programmés. Il
mentionne également qu'il doit partir après les
entraînements, indiquant ainsi une gestion spécifique de son temps
pour concilier ses engagements sportifs et académiques. Sa
capacité à organiser ses activités sans perturber sa
journée met en évidence une planification préalable et une
gestion du temps. Par ailleurs, pour réussir à la fois dans leur
sport et dans leurs études, les étudiants sportifs de haut niveau
doivent établir des priorités et se
45
concentrer sur l'essentiel, faire preuve de discipline pour
maintenir un équilibre sain entre ces deux aspects de leur vie.
« En premier, les études et en second le sport
ou après le travail j'ai toujours réussi à me
débrouiller en faisant le moins possible. »
(Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
On peut observer que Clémentine adopte une approche de
gestion du temps où elle accorde la priorité à ses
études, en leur allouant la majorité de ses ressources
temporelles. Cette priorisation des études reflète la
volonté de structurer son temps en fonction de ses engagements les plus
importants et de s'assurer qu'ils soient réalisés de
manière efficace. Stevenson a mené une analyse
détaillée de cette question, mettant en évidence la
nécessité pour les étudiants-athlètes de
hiérarchiser leurs engagements entre leur vie académique, leur
pratique sportive et leur vie personnelle (Stevenson, 2010). En outre,
Clémentine mentionne qu'elle parvient à se débrouiller en
faisant le moins possible après le travail. Cette remarque
suggère une inclination à minimiser les efforts
supplémentaires et à chercher des moyens d'optimiser son temps et
son énergie.
Deuxièmement, les étudiants sportifs de haut
niveau doivent prendre soin de leur corps en s'assurant de bien
récupérer après les entraînements et en adoptant une
alimentation équilibrée pour soutenir leurs performances. Cela
implique également une discipline pour respecter les horaires de
sommeil, les temps de repos et les recommandations nutritionnelles.
Effectivement, la théorie du corps et de l'incorporation permet
d'analyser comment les athlètes intègrent les pratiques de soins
corporels, telles que le sommeil et la nutrition, dans leur vie.
« Sur les heures de sommeil, c'est d'avoir un peu
près 8h un truc comme ça après, c'est vrai que c'est des
journées qui sont intenses. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/
Football)
« Je vois deux fois par ans des
diététiciens pour m'aider pour les apports nutritionnels pour
faire en sorte que j'ai pas de carence, j'ai fait du surentraînement
l'année dernière parce que tu sais, j'étais au centre de
formation. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
Dans le premier extrait, Alphonse souligne l'importance
d'avoir environ 8 heures de sommeil recommandées et met en
évidence l'intensité de ses journées. Martin explore
comment la culture et les représentations sociales influencent nos
attitudes envers différents aspects corporels tels que le corps
lui-même, la santé, la reproduction, et bien d'autres (Martin,
1991). Dans le
46
contexte sportif, où les athlètes apprennent
à prendre soin de leur corps pour répondre aux normes et aux
exigences de leur discipline sportive. Cela dénote une prise de
conscience de l'importance de prendre soin de son corps en établissant
un équilibre et une régularité dans le sommeil. Cette
sensibilisation peut être influencée par les discours sociaux qui
soulignent l'importance du repos et de la récupération pour la
performance sportive et la santé en général. Dans le
deuxième extrait, Abdel mentionne qu'il consulte des
diététiciens pour s'assurer de ses apports nutritionnels et
éviter les carences. Il fait également référence
à une expérience de surentraînement. Ces
préoccupations liées à la nutrition et à la prise
en compte de l'entraînement excessif témoignent de l'influence des
normes corporelles associées à la performance sportive et
à la culture du corps dans le domaine du sport. Les athlètes sont
souvent encouragés à optimiser leurs performances physiques et
à surveiller leur alimentation pour atteindre leurs objectifs. Ces
exemples illustrent comment les individus intègrent les normes sociales
liées au corps, à la santé et à la performance
sportive. En effet, la pratique d'un sport de haut niveau et la poursuite
d'études peuvent engendrer beaucoup de stress.
Les ESHN doivent donc apprendre à gérer leur
stress. Ils ont l'opportunité de consulter un préparateur mental
ou un psychologue selon leur besoin, au CREPS, ce personnel est disponible
à n'importe quel moment. Selon Wilensky, la manipulation de cette
perception du temps peut favoriser la discipline et la coordination
organisationnelles (Wilensky, 1964). Cependant, cette discipline peut mener
à réaliser des décisions imprudentes avec la pression du
temps (Wilensky, 1964). Ainsi, la gestion du temps est une compétence
pour les ESHN, car ils doivent équilibrer plusieurs engagements en
même temps. Par opposition, une discipline rigide va également
avoir des conséquences négatives, à cet égard, on
peut citer le stress ou le burn-out.
« Je suis arrivé à mes premiers
partiels au niveau sportif tout ça, j'étais stressé pour
les études je passais beaucoup d'heures à réviser. »
(Henri/ M/ 22 ans/ Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à
l'arc)
« Il faut être organisé je pense
peut-être mon mental parce que enfin même si je suis
stressée et tout j'ai quand même toujours un mental de ouf »
(Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Dans le cas d'Henri, il accorde une grande importance à
ses études et ressent du stress lors des examens. Son investissement en
termes d'heures de révision témoigne de sa volonté de
maximiser son temps pour se préparer au mieux aux évaluations.
Quant à Nadège, elle met en avant l'importance de l'organisation
et de la force mentale. Sa capacité à être organisée
lui
47
permet de gérer ses tâches et de maximiser son
efficacité dans la réalisation de ses études et autres
engagements. Dans ce sens, Simons, Van Rheenen et Covington (1999) mettent en
lumière la pression qu'endurent les étudiants-athlètes
dans la conciliation du sport et des études. Ces compétences
permettent aux individus de mieux gérer les pressions et de maintenir
leur bien-être psychologique tout en réalisant leurs objectifs
dans ces domaines exigeants. Pour les étudiants sportifs de haut niveau
de minimiser le stress et de veiller à maintenir une santé
mentale optimale, le rôle d'un préparateur mental ou d'un
psychologue spécialisé dans le sport peut jouer un rôle
important. Ils vont aider ces étudiants à gérer le stress
et à maximiser leurs performances.
« f...] depuis cette année c'est un
psychologue et un préparateur mental tout ce qui est gestion du stress
et prise de recul parce que je ne prends aucun recul dès que je suis
frustrée, je vois que de négatif du coup arriver à prendre
du recul devant le positif et à tirer le bon des mauvaises situations.
» (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
Dans le contexte du « temps militaire » selon Harold
Wilensky, la gestion du stress et la capacité à prendre du recul
sont des éléments capitaux pour maintenir une productivité
et une efficacité constantes. Elles permettent aux individus de faire
face aux obstacles et d'apprendre des situations difficiles. Dans le cas de
Clémentine, elle reconnaît son besoin d'améliorer ces
compétences et choisit de s'entourer de professionnels tels qu'un
psychologue et un préparateur mental.
En résumé, les étudiants sportifs de haut
niveau doivent effectivement adopter une discipline solide pour réussir
à concilier leurs études et leur carrière sportive. Cette
discipline se manifeste notamment par une gestion rigoureuse du temps, la
fixation de priorités, un entraînement sérieux, une
attention portée à la récupération et à
l'alimentation, ainsi que par la gestion du stress. Wilensky a proposé
une analyse critique de la manière dont le temps est géré.
Il a souligné les dangers associés à cette méthode,
l'impact sur le mental des pratiquants.
48
Partie II - Concilier le sport et les études :
une priorité donnée aux études ?
Tout d'abord, les étudiants sportifs de haut niveau
doivent trouver un équilibre entre leurs études et leur sport. De
cette manière, donné une priorité aux études, est
le fruit d'un choix rationnel. Les étudiants sportifs de haut niveau
sont confrontés à de nombreux défis liés à
la gestion du temps, équilibrer la performance sportive et les
études, ainsi qu'à la pression sociale et personnelle. Raymond
Boudon a écrit un livre intitulé « L'inégalité
des chances » en 1972. Dans cet ouvrage, il offre une perspective
théorique pour comprendre pourquoi les disparités en
matière de réussite éducative persistent, malgré
l'élargissement de l'accès à l'éducation (Boudon,
1973).
Est-il possible que l'excellence académique ouvre la
voie à la réalisation personnelle à travers le sport,
notamment dans les disciplines sportives très lucratives qui incitent
les étudiants à y consacrer davantage de leur temps et de leurs
efforts ? Comment équilibrer cette passion et cette opportunité
financière ? Quelles sont les perspectives professionnelles en lien avec
le sport ?
1. Réussir dans les études pour
s'épanouir dans le sport
Les étudiants sportifs de haut niveau peuvent essayer
de maximiser leurs bénéfices en minimisant leurs coûts. Par
exemple, ils ont la possibilité de dédoubler une année
cela donne à l'étudiant la possibilité de se concentrer
sur le développement sportif et d'explorer des opportunités de
carrière dans le sport sans sacrifier l'aspect académique.
« J'ai fait ma première année en un an,
je l'ai validé aussi avec 12 et là, je suis en deuxième
année que je dédouble parce que je suis un temps plein avec des
joueurs pro de Nancy du coup ça, c'est compliqué. »
(Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
« Aujourd'hui, il me reste deux ans que j'ai
séparé en trois années enfin que je vais faire en trois
années pour pouvoir allier la pratique de l'aviron et pouvoir tenter de
valider mon diplôme plus facilement. » (Noé/ M/ 19 ans/
IUT - Technique de commercialisation 2ème année/ Aviron)
Abdel a choisi de scinder sa deuxième année
universitaire pour gérer son engagement comme handballeur professionnel,
pendant que Noé a préféré répartir ses deux
dernières années d'études sur trois ans afin de concilier
sa pratique de l'aviron avec ses obligations académiques. Ces
décisions mettent en lumière le dilemme entre les exigences de la
vie sportive professionnelle et les responsabilités académiques.
Les athlètes de haut niveau sont souvent
49
confrontés à des choix complexes pour maintenir
une harmonie entre ces deux sphères de leur vie.
Par conséquent, les études peuvent leur garantir
un meilleur avenir professionnel en dehors du sport. En effet, les
étudiants athlètes parviennent à concilier leur
dévouement pour le sport et leurs engagements académiques. Cela
leur permettra de profiter des bénéfices d'une carrière
sportive tout en garantissant leur stabilité professionnelle sur le long
terme.
« En priorité, quand même, les
études pour parce que, voilà, c'est ce qui va quand même me
payer plus tard vraiment. » (Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS
option MIAGE/ Escrime)
Cela illustre le conflit entre les ambitions sportives et
l'impératif de faire des études pour garantir une
sécurité financière à long terme. Malgré sa
dévotion pour le sport, Odilon comprend que ses études
académiques ont le potentiel de lui assurer une source de revenus plus
sûre et plus pérenne que son parcours sportif. Cette vision est
probablement modelée par la réalité que la réussite
dans le sport de haut niveau est imprévisible et que la durée de
carrière d'un sportif peut être relativement brève.
L'instabilité et l'instantanéité caractérisent
souvent les carrières sportives, avec des facteurs comme les blessures,
les fluctuations de performance et la compétition pouvant
précipiter leur fin. De ce fait, poursuivre des études peut
représenter une garantie financière et professionnelle pour les
athlètes une fois leur parcours sportif achevé. Par exemple,
Odilon a décidé de privilégier ses études
plutôt que l'escrime, car il a jugé que cela maximiserait ses
revenus futurs.
« C'est super important pour faire des études,
après c'est pas obligatoire, c'est moi qui voulais, mais voilà
donc ça a toujours été comme ça. Une fois que j'en
finis mes études et ben, j'ai encore un travail parce qu'il faut une
rémunération à la fin du mois. » (Laurie/ F/ 21
ans/ IAE School of Management 2ème année /Saut en
hauteur)
« En premier, les études et en second le sport
ou après le travail, j'ai toujours réussi à me
débrouiller en faisant le moins possible. »
(Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
Elles sont conscientes l'importance de trouver un
équilibre entre ces deux facteurs pour préparer leur futur. Cela
pourrait également signaler une prise de conscience accrue du rôle
significatif des études dans la préparation des sportifs à
une carrière professionnelle après leur parcours sportif. En
outre, l'avis des parents dans l'équilibre sport et études prend
une place primordiale.
50
Leurs opinions sont sensiblement les mêmes sur la
conciliation entre le sport et les études. Ils considèrent que
les études sont plus importantes que le sport, tant que tout se passe
pour le mieux dans les études, ils peuvent continuer dans leur sport.
Laurie considère le sport comme un loisir plutôt qu'une
profession, car elle estime que les coûts associés à la
transformation de cette passion en carrière, tels que le temps, les
efforts et le stress, dépasseraient les bénéfices
potentiels.
« Ma mère est concentrée sur
l'école, j'avais les entraînements avec et tout, elle était
d'accord, si j'arrive à gérer elle est d'accord, tu peux
continuer en gros le sport. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/
Basket)
« Je me rappelle que ma mère m'avait dit si tu
intègres le pôle, mais tes résultats à
l'école, ils baissent pas quoi enfin où tu restes aussi focus sur
l'école. Je pense qu'ils ont compris que tout se passait bien que je
m'épanouissais pleinement et que ça a pas dégradé
les résultats scolaires. » (Paula/ F/ 21 ans/ IUT - DUT GEA
2ème année/ Marche athlétique)
Dans ces deux cas, les mères ont un rôle à
jouer au sien de l'équilibre entre le sport et des études. Holt
et al. (2008), mettent en exergue l'importance fondamentale du rôle
parental dans l'établissement d'un équilibre entre les
engagements sportifs et académiques des jeunes sportifs. Cela souligne
l'influence de l'environnement familial dans la gestion des exigences du sport
de haut niveau et de l'éducation. L'accent mis par les parents sur
l'importance de l'éducation peut aider à assurer un certain
degré de sécurité et de stabilité pour l'avenir de
leurs enfants, en tenant compte du caractère souvent incertain et de la
durée limitée des carrières sportives. Les parents peuvent
choisir une stratégie conditionnelle, soutenant l'implication de leur
enfant dans le sport à condition que ses résultats scolaires
à la hauteur. Cela peut contribuer à l'établissement d'un
équilibre entre les obligations sportives et académiques de
l'étudiant. Ce niveau de rémunération influence encore
plus fortement les étudiants à privilégier les
études, et s'inscrivent donc dans un comportement rationnel (Boudon,
1982).
En outre, la rémunération dans le sport
dépend de plusieurs facteurs. Par exemple, si nous nous concentrons sur
l'athlétisme, les sportifs de haut niveau ont la possibilité de
percevoir des rémunérations grâce à des contrats de
parrainage et à des récompenses de compétition.
Néanmoins, la majorité des athlètes dans ce domaine ne
gagnent pas assez pour en vivre selon les dires des enquêtés.
51
« Pour moi l'athlé, c'est un sport comme je
t'ai dit que ça m'a appris la rigueur etc. ok tu perds, c'est bien
l'athlé, ça va t'aider, mais financièrement, il y a rien
du tout. [...] Il y a eu le cas de Michael Zézé tu connais, 9,99
au 100 mètres je sais pas si tu connais, il est rentré dans le
top 3 c'est pour ça, exactement alors, c'est vrai tu vois parce que
9,99, un Français là, il va représenter la France aux JO
24 et au final il se retrouve à faire la manche, il avait aucun sponsor,
pas les moyens. » (Akim/ M/ 24 ans/ L2 STAPS/ 100m 200m 400m)
« On est dans un sport où tu gagnes pas
d'argent en fait, donc tu décides d'être sportif de haut niveau,
même si on gagne rien et ça prend du temps quoi après c'est
plus des fois, la passion qui prend le dessus. » (Lola/ F/ 26 ans/
Master de psycho obtenu/ 400m)
Akim met en avant l'importance des compétences acquises
grâce à l'athlétisme, comme la discipline, et la
fierté potentielle de représenter la France aux Jeux Olympiques.
Ces aspects semblent, pour lui, compenser les éventuels problèmes
financiers associés à son choix. La recherche de Jean Harvey
(2003) explore le problème de l'exclusion sociale dans le domaine du
sport, notamment en mettant en évidence les disparités
financières et le déficit de soutien que rencontrent certains
athlètes. Quant à Lola, elle indique que la passion pour son
sport prime souvent sur le manque de gains financiers qu'il offre. Il
apparaît que sa joie et son contentement tirés de la pratique de
son sport à un niveau élevé surpassent l'importance de
récompenses pécuniaires. Par exemple, l'aviron, comme beaucoup
d'autres sports non professionnels, ne fournit généralement pas
une source de revenus substantielle pour les athlètes qui le pratiquent.
Les revenus peuvent provenir de diverses sources, les sponsors, les
récompenses de compétition, mais ils ne sont
généralement pas suffisants pour garantir vie confortable
à long terme.
« Il y a pas de voies professionnelle en tout cas, il
y a pas de moyens de devenir professionnel en France, du coup, même
aujourd'hui les meilleurs français bah ils ont besoin d'aide
financière [...] Dans le, dans le sport là, personne gagne de
l'argent et personne est médiatisée, donc on sait que tout le
monde est là parce que c'est cool quoi et qu'on aime bien. »
(Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de commercialisation 2ème
année/ Aviron)
L'observation de Noé souligne la difficulté
d'une carrière professionnelle dans certains sports en France, en raison
d'un manque de soutien financier et de visibilité médiatique.
Cela peut limiter les opportunités pour les athlètes de
transformer leur passion et leurs compétences en
52
une carrière rémunérée. En effet,
tous les sports ne sont pas également rémunérateurs et
cela peut avoir un impact sur les choix de nos sportifs. Cet extrait met en
évidence l'importance de prendre en compte l'influence des
marchés du travail sportif sur les aspirations scolaires des individus
(Papin, Viaud, 2018). Il suggère que lorsque les opportunités de
transformer une carrière sportive en emploi augmentent, cela peut
réduire les chances de poursuivre des études supérieures.
(Papin, Viaud, 2018). Ainsi, les différences de
rémunération dans le domaine sportif ont un impact sur
l'engagement dans les études. Le tir à l'arc, par exemple, est un
sport qui ne génère généralement pas autant de
revenus que d'autres sports plus populaires. Henri et Noé soulignent le
manque de rémunération substantielle dans leur sport, ce qui
suggère qu'ils voient peu d'avantages financiers à poursuivre une
carrière sportive à temps plein.
« C'est compliqué vraiment c'est vraiment
très compliqué parce que bah déjà, tu as pas de
rémunération en fait, on va dire en fait ce qui arrive à
vivre du tir à l'arc c'est soit parce qu'il travaille dans un magasin
tiroir à côté donc en fait dans ces cas-là, ils ont
des horaires aménagés tout ça ils ont un contrat
aménagé tout ça soit il y en a beaucoup là le
collectif olympique. » (Henri/ M/ 22 ans/ Faculté des sciences
- L2 Maths/ Tir à l'arc)
Apparemment, selon cet étudiant, le tir à l'arc
n'offre pas de revenu. Il ajoute que certains pratiquants trouvent d'autres
voies pour subvenir à leurs besoins, comme obtenir un emploi lié
à leur sport, par exemple en travaillant dans une boutique de tir
à l'arc. Selon la théorie de l'action rationnelle de Boudon, on
pourrait interpréter le choix d'Henri de continuer à pratiquer le
tir à l'arc, malgré ses difficultés financières,
comme une décision rationnelle (Boudon, 1982). Certains peuvent
également avoir la chance de rejoindre le collectif olympique. En somme,
même si un sport comme l'aviron, l'athlétisme ou le tir à
l'arc peut offrir de nombreux avantages et être une passion pour la
plupart, les études restent pour eux, une priorité. Boltanski et
Chiapello mettent en évidence les logiques et les critères qui
influencent la valorisation des activités et des métiers au sein
du système économique (Boltanski & Chiapello, 1999).
Appliquée à la situation du tir à l'arc, cette perspective
permet d'analyser le sport comme un exemple de la logique capitaliste
contemporaine, où la rémunération et les
opportunités professionnelles sont déterminées par des
critères spécifiques. Cette réalité soulève
des questions sur les inégalités sociales et économiques
dans le monde du sport. En définitive, de nombreux athlètes
choisissent de se concentrer sur leur sport parce qu'ils sont passionnés
et qu'ils trouvent un certain plaisir.
53
« Aussi le sport ça reste un loisir, je sais
c'est pas mon métier, je vais pas en vivre ça doit rester du
plaisir » (Laurie/ F/ 21 ans/ IAE School of Management
2ème année /Saut en hauteur)
Laurie a pris une décision réfléchie en
considérant le sport comme un passe-temps plaisant plutôt que
comme une carrière. Elle reconnait la réalité
économique, comprenant qu'elle ne gagnera pas sa vie grâce au
sport. C'est pourquoi elle privilégie la satisfaction personnelle et
l'épanouissement qu'elle trouve dans la pratique de son sport. Par
ailleurs, la priorisation des études peut être un choix complexe
pour ces athlètes, car cela peut avoir un impact sur leur performance
sportive.
« Oui, c'est ce qui va me donner un travail, c'est ce
qui va me payer plus tard, l'escrime à moins d'être voilà
mais il faut être vraiment l'exception quoi donc non, j'aurais pu aller
au pôle, ils m'ont voilà, j'avais le choix. Mais c'est moi qui
refusé c'est toujours moi qui ai pris la décision pour dire non
mais en priorité quand même les études pour parce que
voilà c'est ce qui va quand même me payer plus tard vraiment, je
me dis. » (Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/
Escrime)
Odilon reconnaît que, sauf exception, l'escrime pourrait
ne pas lui offrir un moyen de subsistance stable, alors que ses études
ont plus de chances de lui assurer une stabilité professionnelle et
financière à long terme. Par conséquent, malgré la
proposition de rejoindre un programme d'entraînement d'élite, il a
décidé de se concentrer principalement sur sa formation
académique. Cette décision démontre une démarche
rationnelle, où Odilon évalue les bénéfices
potentiels et les risques associés à chaque option et choisit
celle qui lui semble la plus bénéfique à long terme
(Boudon, 1982). En outre, à de rares occasions, les entraîneurs
peuvent encouragés les étudiants sportifs à s'investir
dans les études.
« Mon entraineur nous pousse à faire, faire
des études et il a toujours compris quand tu as des examens si tu peux
pas venir ou si tu dois décaler l'entraînement. » (Lola/
F/ 26 ans/ Master de psycho obtenu/ 400m)
Dans le cas de Lola, l'entraîneur joue un rôle
essentiel dans la façon dont sa trajectoire sportive et
académique se structure. Giddens met en évidence l'interaction
entre les actions individuelles et les structures sociales. (Giddens, 1984). En
encourageant et en soutenant la poursuite d'études, l'entraîneur
agit comme un acteur clé qui facilite la conciliation entre la pratique
sportive et les engagements académiques de Lola. Cette
compréhension se manifeste par le soutien de l'entraîneur à
la poursuite d'études par les athlètes.
54
En résumé, chacun de ces athlètes prend
des décisions en évaluant les coûts et les
bénéfices, ce qui démontre l'application de la
théorie du choix rationnel à leurs décisions de
carrière sportive. Ce sont les sports les moins
rémunérateurs qui vont inciter les étudiants sportifs
à s'investir davantage dans les études. Lola affirme que la
décision de poursuivre une carrière sportive de haut niveau est
souvent motivée par la passion plutôt que par les gains
financiers. Cela suggère que les bénéfices qu'elle associe
au sport de haut niveau sont davantage liés à la satisfaction
personnelle et à l'amour du sport qu'à la récompense
financière. Les étudiants-athlètes qui privilégient
leurs études peuvent parfois se sentir en conflit, car ils doivent
souvent faire des compromis entre leurs objectifs académiques et
sportifs. Cependant, avec le bon soutien et les stratégies de gestion,
ils peuvent réussir dans les deux domaines.
2. Mais des sports plus fortement
rémunérateurs : entre passion et opportunité
financière
Au-delà de la passion évoquée par les
étudiants, la capacité de gagner de l'argent grâce au sport
peut également influencer la décision de privilégier le
sport. Si un étudiant est dans un sport où il y a de l'argent
à gagner à un jeune âge, il pourrait être tentant de
prioriser le sport. En effet, les sports fortement rémunérateurs
ont le potentiel d'attirer les étudiants sportifs de haut niveau en
raison des récompenses financières et de la reconnaissance qu'ils
peuvent offrir. On peut retrouver par exemple le football qui est l'un des
sports les mieux rémunérés au monde. Les joueurs de haut
niveau peuvent gagner des millions d'euros par an grâce à leurs
salaires, primes et contrats.
Selon la théorie de l'échange social, les
motivations individuelles pour maintenir ou accroître leur engagement
dans des activités sont souvent basées sur une évaluation
où les avantages perçus surpassent les coûts (Homans,
1961). Cette théorie peut aider à comprendre pourquoi certains
étudiants sportifs de haut niveau sont plus engagés dans le sport
que d'autres. Certains étudiants peuvent être plus
passionnés par leur sport et viser une carrière professionnelle
dans ce domaine. Dans ces cas, la priorisation du sport pourrait être
mise en oeuvre. C'est le cas par exemple de cet étudiant qui joue au
football et qui est motivé par l'opportunité financière
qui est à la clé de la carrière d'un footballeur
professionnel.
« Je vais pas le cacher qu'il y a un aspect
financier, voilà après quand même ma passion au
départ, c'est vivre de sa passion, c'est je pense que c'est une
réflexion moi, je veux pas dire que j'ai envie parce que pour l'instant
je n'en dis pas plus après, c'est franchement, je gagne bien. »
(Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
55
Alphonse exprime son amour pour sa passion et son souhait d'en
faire sa source de revenu. Cela montre qu'il apprécie davantage les
bénéfices internes, tels que le plaisir et la satisfaction, par
rapport aux gains externes, comme l'argent. Cependant, il admet l'importance du
facteur financier, laissant entendre qu'il est au courant des dépenses
impliquées dans le suivi de sa passion et qu'il cherche à
réduire ces coûts en gagnant un salaire adéquat. A cet
effet, Maguire et al. (2002) évoque la dualité de la
carrière sportive, à la fois une passion et un moyen de
subsistance. Dans la même idée, le handball n'est pas le plus
rémunérateur mais offre tout de même quelques avantages.
« Maintenant, bah du coup, c'est être pro,
jouer dans les plus grands clubs du monde, avoir un bon salaire aussi c'est
important. f...] On va dire que j'ai, je suis passé par toutes les
étapes et, on est au niveau de la rémunération, c'est un
peu moins que les footeux après. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1
STAPS/ Handball)
Cet étudiant exprime son désir de progresser
dans sa carrière, avec des ambitions telles que devenir professionnel,
jouer dans les clubs les plus prestigieux et obtenir un salaire
élevé. Ces objectifs représentent les récompenses
qu'il cherche à optimiser. Parallèlement à cela, en
établissant une comparaison de sa rémunération avec celle
des footballeurs, il démontre une certaine prise de conscience des
coûts associés à sa carrière et peut-être un
intérêt à diminuer ces coûts en s'efforçant
d'obtenir le salaire le plus élevé possible. Cependant, Abdel
reconnaît que les gains peuvent être significativement
différents d'un sport à l'autre, un phénomène qui
est étudié par Frick (2007), dans son analyse des structures de
rémunération dans diverses disciplines sportives
professionnelles. Ces ESHN ont souvent des emplois du temps serrés et
subissent de fortes pressions de la part de leurs entraîneurs, de leurs
coéquipiers et de leurs écoles. Leur engagement intense dans leur
sport peut perturber cet équilibre et affecter directement leurs
études, en limitant le temps consacré à leurs
études, que ce soit pour réviser ou pour assister aux cours. En
effet, les coûts associés à un engagement accru dans le
sport peuvent inclure un temps d'étude réduit, un stress physique
et mental, un risque accru de blessures, et un temps limité pour
d'autres activités sociales ou de loisirs.
« J'ai eu des commotions cérébrales du
coup, je peux pas aller à l'école tu peux pas t'entraîner
et ma dernière, c'était il y a deux mois et pendant une semaine,
tu pouvais rien faire, même pas de téléphones ou une
série, juste être dans le noir pendant une semaine le noir, j'ai
pas le droit de sortir après pour les yeux c'est trop, j'ai mal au
crâne. Pas regarder les écrans, pas de, pas de lecture de musique
tout ça. Mais finalement ouais, ça a un impact sur les
études à ce moment
56
enfin pendant une semaine. [...] 3 à 4 heures grand
max à travailler sur mes cours par semaine. » (Abdel/ M/ 19
ans/ L1 STAPS/ Handball)
« Après compliqué parce que avec le
sport les études c'est que après c'est pas forcément
facile de beaucoup travailler mais je dirai 1h ou 2 pour travailler sur mes
cours. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
Abdel et Danilo reconnaissent tous deux que la pratique du
sport a des coûts associés, notamment en termes d'impact sur leurs
études. Abdel mentionne les commotions cérébrales qui
l'ont empêché d'aller à l'école et de
s'entraîner, et Danilo parle des difficultés de concilier le sport
et les études. Malgré ces défis, ils continuent à
pratiquer leur sport, suggérant qu'ils perçoivent les
récompenses (plaisir du sport, opportunités de carrière,
reconnaissance, etc.) comme supérieures aux coûts. Gérer
cet équilibre nécessite une gestion du temps et une programmation
des cours et des séances d'entraînement. Partager les contraintes
et exigences avec les professeurs et les coachs, permet de saisir les
difficultés qu'ils peuvent rencontrer en tant
qu'étudiant-athlète.
En résumé, il faut souligner que même dans
les disciplines sportives les plus lucratives, les opportunités sont
alléchantes, ils sont amenés à privilégier leur
sport mais ils restent lucides, la carrière d'un sportif est
généralement de courte durée et imprévisible. Par
ailleurs, les compétences acquises dans le cadre du sport, telles que
l'esprit d'équipe, la discipline, la gestion du stress et la
compétitivité, peuvent être précieuses dans d'autres
aspects de la vie, y compris les études et la vie professionnelle. Nous
allons explorer dans la section suivante que, finalement, les étudiants
qui s'engagent dans les sports les plus lucratifs sont ceux qui visent le plus
haut dans le domaine sportif.
3. Des perspectives professionnelles en lien avec le
sport ?
Être un étudiant sportif de haut niveau implique
une grande quantité d'entraînement et un investissement important
à son sport. Pour beaucoup d'entre eux, leur sport est leur passion et
ils aspirent souvent à le pratiquer professionnellement. Les
étudiants sportifs de haut niveau ont des perspectives professionnelles
différentes, qui dépendent en grande partie de leur discipline
sportive, de leur niveau de performance et de leurs intérêts
personnels. Pour certains d'entre eux, pour les sports les plus
rémunérateurs, l'objectif principal est de devenir un
athlète professionnel. Cela peut signifier jouer dans une ligue majeure
de football, de basket-ball, ou de participer aux Jeux Olympiques, par exemple.
Bien sûr, les étudiants sportifs de haut niveau ne sont pas
limités à des carrières dans le sport. Les
compétences qu'ils acquièrent en tant
57
qu'athlètes comme la discipline, le travail
d'équipe, la gestion du stress et la résilience peuvent
être très utiles dans de nombreux autres domaines.
La double carrière offre aux ESHN l'opportunité
de développer des compétences qui peuvent être
utilisées pour leur carrière professionnelle. Par exemple, la
pratique du sport de haut niveau peut favoriser le développement de
compétences en leadership, en travail d'équipe et en gestion du
stress. Les étudiants qui ont des ambitions professionnelles sont en
lien avec le sport, réalisent tous leurs études en STAPS. Dans
notre étude, ils représentent 6 étudiants sur 13.
« Je suis en Master 1 pour l'instant ça va moyen
un peu compliqué, on verra le Master MEEF. [...] Jouer toujours au haut
niveau, voilà, c'est ça, c'est encore plus intéressant,
mais ouais c'est mon but. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/
Football)
« J'aimerai faire prof d'EPS après deux
prochaines années, je sais pas où je vais faire mon master et
pour les projets sportifs j'aimerais bien quand même toujours à un
niveau supérieur c'est ça. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3
STAPS/ Basket)
Dans les extraits mentionnés, il est clair que Alphonse
et Danilo ont des objectifs éducatifs définis, tels que
poursuivre un Master MEEF et devenir professeur d'EPS. Selon les travaux de
Demazière et de Samuel, les choix éducatifs et professionnels
sont le résultat d'une interaction complexe entre des facteurs
individuels, sociaux et institutionnels (Demazière & Samuel 2010).
Les individus sont constamment influencés par leur environnement social
et leurs aspirations personnelles, ce qui façonne leurs décisions
et leurs perspectives. Cette décision peut être analysée
comme une stratégie visant à concilier leurs
intérêts personnels et leurs aspirations en combinant leurs
études et leur pratique sportive de haut niveau. Certains finissent par
devenir entraîneurs dans leur sport de prédilection ou dans le
milieu du soin sportif. Ils peuvent travailler à tous les niveaux, du
sport amateur au sport professionnel, en passant par le sport universitaire.
« Je suis en fin de contrat cette année alors
c'est soit, j'arrête ma carrière et STAPS, soit et je continue.
Mais après du coup, je pense au Luxembourg un truc comme ça et
j'aurais fait des études de kinésithérapies »
(Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
En plus de sa carrière sportive, Abdel envisage
d'entreprendre des études en kinésithérapie, probablement
avec l'intention de préparer sa future carrière une fois sa
carrière sportive terminée. Il pense poursuivre cette voie au
Luxembourg, ce qui pourrait lui offrir une occasion d'optimiser les
bénéfices de cette future carrière. Ces étudiants
peuvent commencer à envisager leur futur professionnel tôt, en
acquérant un diplôme universitaire ou une qualification
58
professionnelle qui leur donnera une plus grande
variété d'opportunités de carrière après
leur parcours sportif. Selon une perspective économiste de l'analyse des
mondes du travail sportif, lorsque les opportunités de transformer une
carrière sportive en emploi augmentent, il est possible que les chances
de poursuivre des études supérieures se réduisent (Papin,
Viaud, 2018). Goffman étudie la vie quotidienne est comme une
scène de théâtre, où les individus sont des acteurs
jouant des rôles sociaux (Goffman, 1956). Les interactions sont comme des
performances destinées à créer et à maintenir une
certaine impression devant les autres (Goffman, 1956). Les étudiants
sportifs de haut niveau jouent souvent plusieurs rôles :
l'athlète, l'étudiant, l'ami, etc. Ils doivent naviguer et
équilibrer ces différents rôles.
« Je les connais pas trop ouais, je vais pas aux CM
d'habitude donc euh c'est souvent les mêmes. » (Abdel/ M/ 19
ans/ L1 STAPS/ Handball)
Abdel admet qu'il ne fréquente pas beaucoup ses
camarades de classe et assiste rarement aux cours magistraux. Ceci pourrait
indiquer qu'il a du mal à s'impliquer pleinement dans son rôle
d'étudiant, peut-être à cause des exigences de sa
carrière sportive. Ses propos pourraient également
témoigner d'un certain éloignement ou d'une déconnexion
avec ses camarades de classe.
« J'obtiens ma licence à la fin de
l'année, donc en entraînement sportif spécialité
football à côté de ça, j'ai fait une demande de
supplément au diplôme pour obtenir une carte professionnelle
d'entraîneur. » (Mandy/ F/ 20/ L3 STAPS/ Football)
Cette étudiante évoque son parcours
académique et ses ambitions professionnelles. Elle semble très
concentrée sur ses objectifs et gère apparemment bien ses
rôles d'étudiante et d'athlète. En même temps, elle
illustre parfaitement la notion de Goffman selon laquelle nous jouons
différents rôles dans différents contextes. Dans le cas de
Mandy, elle jongle entre son rôle d'étudiante en licence, son
rôle d'athlète et son futur rôle d'entraîneur. Ils
peuvent utilisés leurs compétences apprises dans le milieu du
sport pour les réinvestir dans le milieu du travail et des
études. De plus, Burke (2016) met en lumière comment l'ajout de
certifications professionnelles à un diplôme universitaire peut
améliorer les perspectives d'emploi dans le domaine sportif. Cela
démontre aussi comment les sportifs peuvent exploiter leurs
compétences et leur enthousiasme pour le sport afin de tracer une voie
professionnelle future. En revanche, pour les étudiants qui pratiquent
des sports peu rémunérateurs, ils n'ont pas les mêmes
ambitions professionnelles, et elles ne sont pas en relation directe avec le
sport, ils sont 7 sur 13 étudiants à vouloir faire un
métier qui n'est pas en lien avec le sport.
59
« Il me faut un master RH dans un premier temps, dans
un poste assistant RH et bah déjà, je peux pas prétendre
être DRH dans quoi de mon diplôme enfin pour être
réaliste, il faut de l'expérience pour ça. »
(Laurie/ F/ 21 ans/ IAE School of Management 2ème année /Saut en
hauteur)
« Un projet professionnel, j'en ai deux. Il y a soit
plus tard du coup faire un master MEEF pour faire prof de maths qui est le plan
le plus probable, on va dire et comme ça je pourrais faire prof dans un
lycée de préférence tout ça et après, il y
en a un autre où c'est faire un master plus accès sur les probas
les stats tout ça et pour faire un truc du style ingénieur
statisticien. » (Henri/ M/ 22 ans/ Faculté des sciences - L2
Maths/ Tir à l'arc)
Henri est prêt à jouer différents
rôles en fonction du chemin de carrière qu'il choisira finalement.
En poursuivant à la fois leurs études et leur carrière
sportive, ces étudiants peuvent acquérir une perspective unique
et une expertise multidimensionnelle qui les distingue des autres candidats et
leur permet de s'adapter plus facilement aux défis professionnels.
« Et puis moi là, j'ai trouvé un emploi,
mais je suis à temps partiel, je suis psychologue en EPAHD,
exprès pour justement continuer à concilier les deux pas du coup
forcément, tu as plus de temps quand tu travailles à temps
partiel donc là les après-midis, tu peux voir les gens que tu
veux si tu travailles pas du coup-là. » (Lola/ F/ 26 ans/
Master de psycho obtenu/ 400m)
Lola fait un choix délibéré de travailler
à mi-temps pour équilibrer ces rôles. Elle est au courant
des attentes de chaque rôle et fait des ajustements pour remplir
adéquatement ces deux rôles. En optant pour un travail à
mi-temps, elle peut répondre à ses obligations professionnelles
tout en ayant du temps pour maintenir ses relations sociales, illustrant ainsi
la flexibilité et l'adaptabilité des rôles sociaux dans la
théorie de Goffman. De ce fait, avoir un diplôme universitaire
peut offrir une sécurité et une flexibilité en plus,
surtout dans les sports qui sont moins bien rémunérés. Les
compétences acquises pendant les études, telles que la gestion du
temps, le travail d'équipe, la résolution de problèmes et
la persévérance, sont toutes transférables dans le monde
du travail. Ces compétences peuvent également être
précieuses pour la progression de carrière dans le sport, par
exemple en obtenant des rôles de leadership. Au bout du compte,
l'essentiel pour les athlètes étudiants de haut niveau dans les
sports moins lucratifs est de parvenir à un équilibre entre leurs
aspirations sportives et leurs objectifs de carrière. Cela pourrait se
traduire par la continuation de leur sport tout en poursuivant leurs
60
études, ou par l'utilisation de leur sport comme un
moyen de propulser vers d'autres carrières liées à ce
domaine. Quel que soit le chemin qu'ils décident de suivre, ils
considèrent leurs priorités et leurs objectifs à long
terme pour faire le choix qui leur convient le mieux.
Pour conclure, l'étudiant sportif a le choix de rester
dans le milieu du sport ou de faire un métier qui est
complètement différent. Leur décision est ainsi
influencée par de nombreux facteurs, comme le souhait d'obtenir une
réussite financière, leur passion pour un sport, l'importance
accordée à une carrière dans le domaine sportif, et encore
d'autres aspects qui peuvent plus personnel. Dans notre échantillon,
nous avons autant de sportifs qu'ils veulent faire un métier en lien
avec le sport que ceux qui font un métier en dehors du sport.
61
Partie III - Un soutien inégal des pairs pour les
ESHN
Les étudiants sportifs de haut niveau sont
confrontés à des défis spécifiques pour
équilibrer leurs engagements sportifs et académiques. Le soutien
de leurs pairs peut jouer un rôle primordial, mais il peut varier
considérablement. Nous cherchons à comprendre les dynamiques du
soutien entre pairs et identifier les défis auxquels sont
confrontés les ESHN. Pour les aider dans cette entreprise, les ESHN ont
souvent besoin d'un soutien adéquat de la part de différents
acteurs, tels que les entraîneurs, les kinésithérapeutes,
les préparateurs physiques et les psychologues sportifs. Aussi, les
établissements d'enseignement ont l'occasion aussi prendre part en
proposant des programmes sur mesure pour répondre aux exigences
particulières des étudiants athlètes d'élite. Nous
aborderons la question du soutien aux étudiants sportifs de haut niveau
en examinant les différentes formes de soutien offertes par les
professeurs et les camarades de classe. Nous nous pencherons également
sur les conséquences de cette disparité de soutien sur
l'expérience globale des ESHN. En mettant en évidence cette
inégalité de soutien, nous pourrons approfondir notre
compréhension des défis auxquels les ESHN sont confrontés
et envisager des mesures potentielles pour améliorer leur situation.
1. Dans le champ sportif, des acteurs multiples qui
n'exercent pas la même influence
Un réseau social fort et cohésif peut apporter
un appui significatif à un étudiant sportif. Les camarades
peuvent offrir du soutien émotionnel, des recommandations et de l'aide
pour gérer l'équilibre délicat entre les obligations
sportives et académiques. Nous avons, dans un premier temps,
identifié les entraineurs ; ce sont eux qui ont la plus grande influence
sur les athlètes de haut niveau. Ils ont la responsabilité de
développer les compétences.
« Il t'apporte ses compétences sur le saut en
hauteur, je pense pas qu'il m'a appris énormément de choses mais
je suis hyper reconnaissante quand même pas parce qu'il a fait, en fait,
finalement ouais, il s'est beaucoup investi. » (Laurie/ F/ 21 ans/
IAE School of Management 2ème année /Saut en
hauteur)
Les individus et les collectifs bénéficient de
la reconnaissance sociale, de l'appréciation et de l'estime de la part
d'autrui (Honneth, 1992). Laurie exprime sa gratitude envers l'engagement et
les efforts de son coach, ce qui en soi est une manifestation de reconnaissance
sociale. Elle valorise l'investissement que son coach a consacré
à son rôle. Par ailleurs, même si Laurie n'a pas
constaté d'amélioration significative dans sa technique de saut
en hauteur, le simple fait d'avoir une personne pour la soutenir et
l'encourager a probablement eu une influence bénéfique sur sa
motivation et son implication dans le sport. Cette forme de soutien
représente un autre
62
aspect de la reconnaissance sociale, qui peut être aussi
important que le perfectionnement des compétences techniques. De plus,
les entraîneurs sont chargés de favoriser plusieurs aspects chez
les sportifs. En effet, « Les compétences sont assez
différentes : d'un côté des qualités sportives
objectivées par un palmarès et les résultats obtenus en
tant qu'athlète, de l'autre des qualités pédagogiques et
des résultats en tant qu'entraîneur de club. Il semble bien qu'il
y a une domination de la filière haut niveau en nombre et en
légitimité. » (Lemieux, C., Mignon et al.,2006), les
entraîneurs sont dotés en compétences pédagogiques
et sportives, ils transmettent ainsi leurs savoirs à leurs
athlètes.
« Donc je m'entraîne avec lui, il a 30 ans donc
c'est vraiment une relation, très très proche de par le partage
de parce qu'il a besoin de connaître aussi pas mal de choses sur moi, vu
que ça a pas mal d'impact après sur la pratique sportive et ouais
vraiment aujourd'hui c'est une personne très essentielle dans ma vie.
» (Laurie! F! 21 ans! IAE School of Management 2ème
année !Saut en hauteur)
La performance ne dépend pas uniquement des
compétences techniques du coach, mais aussi de la relation entre
l'entraîneur et les entraînés. Il est donc important
d'encourager la transmission de ce savoir-faire spécifique, qui n'est
pas purement technique mais est lié à des compétences
relationnelles (Lemieux, C., Mignon et al.,2006). Donc, ils ont l'occasion de
construire une relation étroite et basée sur la confiance pour
optimiser les performances.
« Après mon entraîneur maintenant
ça se passe trop bien, tu vois, c'est une vraie relation, c'est une
vraie relation, ça va pas que dans un sens où il me dit, tu fais
ça, ça se limite pas juste à l'entraînement. C'est
vraiment, tu as un accompagnement sur tous les trucs genre, il est au courant
de tout, tu vois si je commence à travailler, il est obligé
d'être au courant parce qu'il doit adapter aussi par rapport à la
fatigue et tout, enfin, on se parle vraiment ouvertement. » (Lola! F!
26 ans! Master de psycho obtenu! 400m)
La déclaration de Lola met en lumière le fait
qu'une relation d'entraînement fructueuse ne se borne pas à un
simple transfert de connaissances techniques. Elle implique également
une communication transparente et un accompagnement dans divers domaines de la
vie de l'athlète. Lola met en évidence la prise en compte par son
entraîneur de tous les éléments de sa vie, y compris son
travail, et comment ces éléments influencent ses routines
d'entraînement. Ceci souligne une approche globale de
l'entraînement.
63
« C'est un ancien athlète aussi au niveau en
marche participé deux fois aux JO enfin tous les championnats du monde
et tout ça donc voilà déjà. Je vois plus mon coach
que mes propres parents donc à un moment, je pense que c'est primordial
d'avoir une bonne relation saine et de confiance et motivant, mais aussi
comment dire c'est quelqu'un avec qui on construit un projet alors plus.
» (Paula/ F/ 21 ans/ IUT - DUT GEA 2ème
année/ Marche athlétique)
Paula voit en son entraîneur non seulement un mentor et
un support technique, mais également un partenaire dans
l'élaboration de son parcours athlétique. Cette
déclaration renforce les découvertes de Lemieux, C., Mignon et
al. (2006) concernant l'importance vitale d'une relation d'entraînement
solide et constructive. Cela met en lumière les divers rôles qu'un
entraîneur peut endosser, notamment en tant que guide, conseiller, source
de motivation et collaborateur. Elle souligne également que la
réussite en athlétisme ne se résume pas à la
vitesse de course de l'athlète ou à son endurance exceptionnelle.
Elle est aussi déterminée par la qualité de la relation
entretenue avec l'entraîneur. Ce dernier peut aider à optimiser le
potentiel de l'athlète, en prenant en compte ses besoins
spécifiques et en instaurant un environnement d'entraînement
positif et stimulant.
Au contraire, lorsque la relation entre l'entraîneur et
l'athlète est compromise, cela peut se manifester par une
détérioration de l'état mental et une envie de renoncer,
c'est dans ce contexte que l'intervention des psychologues et des
préparateurs mentaux devient primordiale.
« Le deuxième, il a un peu plus de mal
à me comprendre, il est très stricte dans la façon
d'entraîner. En fait, ça passe très, très bien, mais
dès que je suis en dehors de l'eau, si ça passe pas bien, il a
tendance à critiquer, à essayer de me piquer en fait pour faire
réagir et je suis très sensible. Donc du coup si on pique, je
réagis très mal derrière, on comprend pas certains choix
que je fais, c'est compliqué. f...] Le psychologue ou le
préparateur mental maintenant, cette année, ça m'a
beaucoup aidé parce que avec qui ça se passe très bien
cette année. Parce que, je pense que j'aurais pas réussi toute
seule, avec l'entraîneur avec qui ça va pas, ça serait pas
passé, je suis sorti plusieurs fois, je voulais me barrer. »
(Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
L'expérience de Clémentine avance une
idée nouvelle entre un entraîneur et son athlète. Elle
exprime ses difficultés avec un entraîneur rigide qui semble ne
pas comprendre ses principes. D'après Lemieux, C., Mignon et al. (2006),
l'interaction entre un entraîneur et son athlète est un
64
facteur presque indispensable pour la performance. Pour
Clémentine, une relation d'entraînement défavorable a eu
des conséquences sur sa motivation et son engagement. Cela souligne
l'importance pour l'entraîneur de comprendre et de répondre aux
besoins spécifiques de chaque athlète.
En effet, pour permettre un équilibre, les
entraîneurs peuvent saisir les défis de temps et d'énergie
dépensé auxquels son athlète étudiant est
confronté. Cela peut nécessiter de moduler les horaires
d'entraînement, d'octroyer des pauses durant les périodes d'examen
ou de chercher d'autres solutions pour aider l'athlète à jongler
entre le sport et les études.
« Le projet, c'est lui qui me prépare tous mes
plans et je lui fais confiance à 100%, mais je sais qu'il me faut aussi
confiance à 100% donc j'ai mon coach et il fait tous mes plans il me
suit sur les entraînements enfin pas tous mais la plupart »
(Paula/ F/ 21 ans/ IUT - DUT GEA 2ème année/ Marche
athlétique)
« Du coup bah en fait chaque semaine, j'envoie mon
planning de cours à mon coach et en fait du coup mon coach à ce
moment-là lui, il va regarder dans les trous quand je n'ai pas cours. Il
va mettre des entraînements à ce moment-là et puis bah si
par exemple il y a un petit trou de deux heures par une mettre dans ces deux
heures-là, tu vas courir où tu fais une muscu ou tu fais un truc
comme ça et lui, il adapte dans ses fonctions là. »
(Henri/ M/ 22 ans/ Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à
l'arc)
Dans ce contexte, l'entraîneur est perçu comme
une figure de direction qui formule et ajuste les plans d'entraînement en
tenant compte des disponibilités de l'athlète. La théorie
du rôle social postule que les individus endossent différents
rôles en fonction des différents environnements sociaux dans
lesquels ils évoluent, chaque rôle étant associé
à des attentes spécifiques (Merton, 1957). Cela illustre
l'anticipation que l'entraîneur est là pour orienter et organiser
la préparation de l'athlète. Parallèlement, Paula et Henri
jouent le rôle d'athlètes, qui implique de respecter les plans et
les instructions de leur entraîneur. Henri explique comment son
entraîneur module ses sessions d'entraînement en tenant compte de
son emploi du temps académique, ce qui illustre l'importance de la
flexibilité dans le rôle d'un entraîneur. Lemieux, C.,
Mignon et al. (2006) indiquent que l'entraîneur doit appréhender
les besoins individuels mais également être capable d'ajuster les
entraînements selon les contraintes. Pour récapituler, ces
témoignages révèlent qu'un entraîneur pour obtenir
des résultats satisfaisants, doit au-delà de posséder une
expertise technique, être en mesure d'établir une relation de
confiance avec son athlète, de saisir ses besoins particuliers et
d'ajuster l'entraînement en conséquence.
65
Par ailleurs, la tension liée à
l'équilibre entre les études et le sport de haut niveau peut
générer du stress. Un entraîneur peut offrir un
accompagnement à son athlète dans la gestion des émotions
et le maintien de la motivation.
« Et du coup, ça m'aide beaucoup parce que je
suis bien accompagnée et j'ai souvent besoin de me confier. En fait, je
suis une sportive qui a besoin d'être suivi, même en dehors de son
sport en fait. » (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/
Natation)
« Il m'a fait signer mon 1er contrat professionnel,
il me fait confiance tout ça et non, ils m'aident à progresser
sur le plan individuel, mental, physique, parce que ce qui compte c'est surtout
le mental surtout à mon âge. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1
STAPS/ Handball)
Clémentine, par exemple, reconnaît que son
entraîneur l'a aidé dans le sport et aussi dans sa gestion des
émotions. La théorie de l'interactionnisme symbolique propose que
les individus agissent en fonction des significations qu'ils attribuent aux
choses, qui sont façonnées par leurs interactions sociales et
adaptées par leur interprétation personnelle (Mead, 1934).
D'autre part, Abdel met en avant le rôle capital de son entraîneur
dans sa progression sur plusieurs aspects : individuels, physiques et mentaux.
En soulignant particulièrement l'importance du soutien mental, il
indique qu'il valorise cette dimension dans son entraînement.
L'engagement de l'entraîneur dans différents domaines de la vie de
l'athlète peut contribuer à renforcer le lien de confiance entre
eux. C'est une notion soutenue par Lemieux, C., Mignon et al. (2006), qui
insistent sur le rôle central de la confiance dans la dynamique
entraîneur-athlète. Les entraîneurs sont donc amenés
à adopter une approche où ils peuvent prendre part des besoins
émotionnels et psychologiques, afin d'optimiser les performances.
Dans le cadre des sports d'équipe, la fonction d'un
entraîneur adjoint est déterminante pour aider les
athlètes. En effet, l'unité sociale est d'une grande
utilité. Une équipe soudée, dotée d'un fort esprit
de camaraderie, peut améliorer la performance sportive et aider les
membres à surmonter les obstacles personnels.
« Après aussi, on a un entraineur adjoint, il
épaule le coach, à l'entraînement par exemple, il fait les
échauffements, les travails techniques avant, c'est un relais de
situation de jeu, c'est lui qui prend voilà il nous chauffe, il nous
échauffe après la prépa physique. Et c'est un, il a aussi
un rôle de de relais qui est vraiment, il y a un truc qu'on ose pas dire
au coach ou quelque chose en dehors du foot, on peut aller le voir lui. »
(Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
66
« Pour nous pousser pour donner un peu
d'énergie à l'équipe il est là à
l'entraînement pendant les matchs. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3
STAPS/ Basket)
L'importance de l'assistant entraîneur comme l'ont
décrite Alphonse et Danilo s'harmonise avec les recherches menées
par Cushion et Jones (2006). Ces chercheurs ont examiné la
manière dont les adjoints de l'entraîneur servent souvent de lien
entre l'entraîneur principal et les joueurs, aidant à faciliter la
communication et à soutenir le développement des joueurs. De
plus, ils contribuent à la motivation de l'équipe et à
l'amélioration de l'ambiance de groupe durant les entraînements et
les matchs. En effet, cela souligne les attentes associées au rôle
de l'entraîneur adjoint, qui comprend l'encouragement et la motivation de
l'équipe, en plus de ses fonctions d'entraînement technique. En
outre, dans certains sports individuels, ils ont la possibilité d'avoir
plusieurs entraineurs à leur disposition, l'entraineur de club et
l'entraineur du pôle par exemple.
« Au pôle, il y a trois coachs f...] donc,
c'est tous les tous les trois des cadres fédéraux et ils sont du
coup, ce sont eux qui organisent le pôle Sébastien, c'est le
gérant du pôle. Et au niveau du club, c'est Will un
bénévole, qui me suit deux fois par semaine en plus parce que
j'aime bien avoir d'autres retours. » (Nadège/ F/ 21 ans/ M1
Histoire/ Aviron)
Le club sportif de cette étudiante se compose de divers
rôles qui contribuent à réaliser des buts précis.
Les organisations sont composées de différents rôles qui
sont structurés de manière à atteindre des objectifs bien
précis (Durkheim, 1895). Sébastien, en tant que manager du
pôle, a la charge de coordonner l'organisation globale et les autres
entraîneurs. Ces derniers, des cadres fédéraux, se
concentrent sans doute sur le développement technique et sportif des
athlètes. Par ailleurs, Nadège sollicite également un
bénévole du club, Will, pour un entraînement additionnel.
Cette démarche peut être interprétée comme une
façon de varier les sources de retours et d'appuis, une stratégie
habituelle pour optimiser les performances et le développement
individuel. Ainsi, en collaborant étroitement avec leurs athlètes
étudiants, les entraîneurs peuvent les soutenir dans la recherche
d'un équilibre entre leurs obligations sportives et académiques.
Selon Lemieux, C., Mignon et al. (2006), cela souligne l'importance d'avoir une
variété de perspectives et d'approches en matière
d'entraînement. Les différents entraîneurs peuvent offrir
des conseils et des stratégies variés, ce qui peut être
bénéfique pour l'athlète.
Dans la même lignée, les
kinésithérapeutes ont pour objectif la prévention et la
réhabilitation des blessures. Ils peuvent aider les athlètes
à augmenter leur mobilité et leur force, à atténuer
la douleur et à accélérer la guérison après
une blessure. Suite à une blessure, un kiné aidera
67
l'athlète étudiant à retrouver sa force,
sa flexibilité et sa fonction normale. Cela peut comprendre des
exercices de renforcement, d'étirement et de coordination.
« Après il y a pas de bon moment pour se
blesser forcément, mais c'est vrai que c'est un peu chiant puis
c'était l'approche des compétitions juste après la fin de
la période hivernale. Donc il y a des disques dans le dos en gros et il
commençait à, il commençait à être en mauvais
état et du coup, il a fallu faire de la réathlétisation,
un renforcement tout ça pour aller voir le kiné du coup du CREPS.
Ouais, c'était aussi beaucoup de rendez-vous médicaux du coup
ça, ça aide pas non plus à remonter le moral du coup.
» (Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de commercialisation
2ème année/ Aviron)
« Et aussi ce qui vient avec nous c'est que pour la
préparation, un kiné, il a beaucoup de physio, on a même
une salle de cryothérapie. Et du coup, on fait ça souvent, bon,
du coup par la récupération des jambes etc. ça c'est
optimal pour nous et c'est très important, on va aussi les bains froids,
etc. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
Noé perçoit les blessures comme des entraves
à son parcours sportif, ce qui génère chez lui un
sentiment de découragement. Il entreprend un processus de
réhabilitation avec le soutien d'un kinésithérapeute, un
rôle qui, dans ce contexte, revêt une importance
particulière pour lui. D'un autre côté, Abdel
considère les soins physiques, tels que la kinésithérapie
et la cryothérapie, comme des éléments cruciaux pour la
récupération et la performance sportive. Ces pratiques ont acquis
une importance symbolique pour lui, représentant une préparation
et une récupération optimales. En effet, chacun de ces individus
interprète et réagit à son environnement selon les
significations qu'il attribue à ces aspects, ce qui façonne leur
expérience respective (Mead, 1934). En prodiguant les premiers soins, le
kiné peut accélérer le retour du sportif à la
compétition, apportant ainsi une assurance mentale. En se concentrant
sur la flexibilité, la force, l'endurance, la coordination et la
technique, un kiné peut aider un athlète à optimiser ses
performances. Cela peut comprendre des techniques de massage, de
cryothérapie, de thérapie par ultrasons, ou d'autres
méthodes. Tous les athlètes de haut qui font partie du CREPS
bénéficient d'un kiné, alors que ceux qui évoluent
au sein d'un club n'ont pas tous la possibilité d'en avoir un. Certains
athlètes ont la possibilité de bénéficier d'un
kiné personnel ainsi que d'un kiné travaillant au sein d'une
organisation.
« On a une kiné aussi qui est présente
deux fois par semaine sur nos entraînements donc pendant les
séances elles nous prennent alors des fois ça va être la
kiné renforcement musculaire des choses comme ça enfin, on peut
faire chez le kiné les exos un peu chiant
68
voilà. Sinon des fois en fonction des besoins
ça va plus être massage, manipulation et en parallèle. Je
suis un kiné qui est donc dans son cabinet et ça va plus
être du soin et électrodes, ultrasons, massages. »
(Laurie! F! 21 ans! IAE School of Management 2ème année !Saut en
hauteur)
« On a tellement été
dégoûté d'être blessé qu'on reprend encore
mieux donc du coup bah, tu vois des kinés en fait au CREPS, on peut les
voir tous les jours si on veut. » (Nadège! F! 21 ans! M1
Histoire! Aviron)
Dans l'expérience de Laurie, le rôle du
kinésithérapeute est considéré comme étant
double. D'une part, le kiné fournit des soins, mais d'autre part, il
supervise également des exercices de renforcement. Cette perception
donne au rôle du kinésithérapeute une dimension qui va
au-delà du simple soin et s'étend aux aspects plus exigeants de
l'entraînement. Pour Nadège, la blessure a laissé une
empreinte émotionnelle négative qui a ensuite alimenté sa
volonté de se rétablir. Dans cette situation, les
kinésithérapeutes du CREPS acquièrent une importance
particulière. Malcolm et Scott (2011), les professionnels de
santé jouent un rôle clé dans le domaine sportif, leur
conclusion souligne l'importance capitale des soins médicaux,
dispensés par ces professionnels, pour optimiser les performances des
athlètes tout en préservant leur santé et leur
bien-être général. Ils sont vus comme une ressource
essentielle pour le rétablissement et la prévention des
blessures, avec leur disponibilité quotidienne représentant une
source de soutien capital pour son processus de réhabilitation.
En outre, les préparateurs physiques ont pour but
d'améliorer la condition physique des athlètes. Ils sont souvent
responsables de l'échauffement lors des séances
d'entraînement et des compétitions ou bien de séances de
musculation.
« On a aussi un préparateur physique, qui
s'appelle Charles et qui vient deux fois par semaine pour encadrer nos
musculations. En fait eux, ils sont vraiment spécialisés dans
l'aviron, on a un préparateur physique qui est que pour la musculation.
» (Nadège! F! 21 ans! M1 Histoire! Aviron)
La présence de préparateurs physiques
spécialisés dans l'équipe d'aviron suggère une
tendance croissante vers la professionnalisation de ce sport. La
professionnalisation se manifeste par l'émergence de compétences
spécialisées et de normes professionnelles spécifiques
à un domaine donné. Il est possible que l'aviron soit en train de
se professionnaliser en développant des rôles
spécialisés tels que ceux des préparateurs physiques, dont
le but est d'améliorer les performances des athlètes. Cette
évolution témoigne de l'importance accordée à
l'optimisation
69
des capacités physiques et à l'adoption de
pratiques professionnelles dans le domaine de l'aviron.
De plus, les psychologues sportifs aident les athlètes
à gérer le stress et l'anxiété, à augmenter
leur assurance, à maintenir leur concentration, et à surmonter
les obstacles mentaux liés à la compétition de haut
niveau. Ils peuvent également contribuer à résoudre des
problèmes personnels ou académiques susceptibles d'impacter la
performance de l'athlète. Les étudiants athlètes de haut
niveau sont souvent confrontés à un stress intense, qu'il soit
dû aux attentes de performance sportive (compétitions) ou aux
exigences académiques (examens). Les psychologues peuvent leur apprendre
des techniques de gestion du stress et les soutenir face à la
pression.
« Je vois une psychologue, alors pas depuis le
début que je suis au CREPS, mais depuis ça, fait un an et demi et
je la vois en moyenne une fois par mois. On va dire et au début, je la
voyais parce que j'étais pas très bien. [...] C'était
retrouver l'équilibre entre le sport, la vie perso et la vie, enfin les
études quoi, et pas toujours enfin sur une saison sur une année.
Il y a des périodes où le sport va prendre plus de place que
d'autres, enfin après, il y a eu beaucoup de travail sur le lâcher
prise, le savoir, un peu prendre du recul. Et ne pas vouloir tout gérer
trop perfectionniste sur ce qui est propre à tout ce qu'on travaille par
rapport à moi, ça a été surtout ça quoi.
» (Paula! F! 21 ans! IUT - DUT GEA 2ème
année! Marche athlétique)
Paula souligne les difficultés qu'elle rencontre pour
concilier ses responsabilités en tant qu'athlète,
étudiante et individu dans sa vie privée. Cette situation incarne
le principe de la tension entre les rôles dans la théorie du
rôle social, où un individu peut ressentir du stress lorsqu'il a
des difficultés à répondre aux exigences de
différents rôles sociaux simultanément (Merton, 1957). De
plus, Paula mentionne son travail avec une psychologue sur des problèmes
comme le perfectionnisme et le besoin de se détacher, ce qui indique que
ces problèmes peuvent être intensifiés par la tension entre
les rôles qu'elle vit. Grâce à son travail avec la
psychologue, Paula a réussi à élaborer des
stratégies pour gérer efficacement ces défis et pour
maintenir un équilibre plus approprié entre ses divers
rôles. Les psychologues peuvent aussi aider à acquérir des
compétences en résolution de conflits. Avec des partenaires
d'équipe, des entraîneurs, des enseignants ou des collègues
de classe, à certains moments des conflits peuvent émerger. Des
aptitudes comme la concentration, la gestion des émotions, et la
préparation mentale avant, pendant et après la compétition
sont importantes pour les athlètes de haut niveau. Les psychologues
sportifs sont formés pour aider à développer ces
aptitudes.
70
« C'est quand j'ai appris que j'étais
sélectionné en équipe de France du coup, c'était un
peu pour préparer la compétition pour le stage tout ça,
c'était plus dans de la préparation mentale que dans, de la
psychologie pure et du coup c'est la seule fois où j'ai eu recours
à la psy, je suis, j'ai jamais utilisé. Que ce soit avant les
courses avant les entraînements avant des cycles d'entraînement
donc comment bien comment être finalement bien mentalement pour pouvoir
réagir le mieux face aux événements donc après
c'est enfin c'est un c'est propre à chacun, mais du coup ouais
c'était sur des petits conseils sur un peu de la méditation des
trucs comme ça quoi. » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique
de commercialisation 2ème année/ Aviron)
L'expérience de Noé avec une psychologue dans la
perspective d'une compétition et d'un stage peut être
perçue comme une tentative de renforcer sa confiance en lui et sa
capacité à réussir. Les découvertes de Lemieux, C.,
Mignon et al. (2006), insistent sur le fait que la préparation
psychologique joue un rôle clé dans l'entraînement sportif
et peut influencer de manière significative les performances d'un
athlète. Il ne suffit pas d'être prêt sur le plan physique,
il est tout aussi important d'être mentalement armé pour affronter
les défis, ces compétences psychologiques s'acquièrent sur
le long terme comme les compétences physiques. Il comprend l'importance
d'une préparation mentale adéquate pour être capable de
réagir de manière optimale dans différentes situations.
Pour ce faire, il fait appel à des techniques comme la méditation
et suit divers conseils pour améliorer sa confiance en soi et sa
préparation mentale pour les compétitions. Cela démontre
comment les convictions d'auto-efficacité peuvent influencer la
façon dont les individus gèrent des situations qui peuvent
être stressantes ou exigeantes (Bandura, 1977).
Enfin, il y a le préparateur mental. Son rôle est
assez similaire à celui du psychologue. Bien sûr, une grande
partie du travail d'un préparateur mental concerne la performance
sportive elle-même. Ils peuvent aider l'athlète à
élaborer des stratégies pour améliorer la concentration,
à renforcer la confiance en soi, à visualiser des performances
réussies, etc.
« Tout ce qui est gestion du stress et prise de recul
parce que je ne prends aucun recul dès que je suis frustrée, je
vois que de négatif du coup arriver à prendre du recul devant le
positif et à tirer le bon des mauvaises situations. Et j'ai voulu
prendre quelqu'un aussi qui était préparateur mental parce que
les compétitions, c'est vraiment un autre monde en natation, c'est
très, très malsain la concurrence est très malsaine en
fait du coup il faut arriver à gérer à se mettre dans sa
bulle. » (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
71
La capacité à gérer le stress et à
maintenir une perspective détachée est vitale pour que les
sportifs maintiennent des performances élevées tout en veillant
à leur santé mentale. Ainsi, avoir le soutien d'un professionnel
de la préparation mentale peut aider les athlètes à mettre
en place des stratégies efficaces pour contrôler le stress et la
compétition, et à équilibrer l'intensité de la
compétition avec leur bien-être psychologique. D'après le
témoignage de Clémentine et en lien avec les travaux de Besombes,
Joncheray et al. (2016), l'aspect compétitif du sport peut
générer une pression intense et un environnement de
rivalité aiguë. Elle associe la compétition à des
émotions négatives et à une pression excessive. Il est
important de comprendre ici, que l'apport psychologique est avantageux pour les
athlètes qui sont au CREPS, car ils ont la possibilité de
consulter un spécialiste à n'importe quel moment.
En somme, différents acteurs interviennent dans la vie
des étudiants ESHN, tels que les entraîneurs, les
kinésithérapeutes, les préparateurs physiques et les
psychologues. Chacun de ces acteurs a un rôle spécifique pour le
sportif. Les entraîneurs planifient et supervisent l'entraînement
sportif, les kinésithérapeutes se concentrent sur la
rééducation et la prévention des blessures. Les
préparateurs physiques visent à améliorer les
capacités physiques, et les psychologues offrent un soutien sur le plan
mental et émotionnel. Ces acteurs peuvent avoir des influences variables
sur la vie académique des étudiants ESHN, certains étant
davantage impliqués dans les aspects sportifs, tandis que d'autres
fournissent un soutien spécifique sur le plan mental et
émotionnel. L'influence exercée par chaque acteur peut varier
selon le contexte dans lequel évolue l'ESHN. Par exemple, au sein d'un
pôle espoir ou d'un CREPS, les entraîneurs et les
kinésithérapeutes peuvent avoir un rôle
prépondérant dans la vie quotidienne de l'athlète en
raison de leur proximité et de leur engagement direct dans le programme
sportif. En revanche, dans un club sportif, l'influence des entraîneurs
et des autres acteurs peut différer en fonction des ressources
disponibles et de l'organisation du club. Chaque acteur a un rôle
spécifique à jouer dans le développement et la performance
de l'ESHN. Une coordination et une communication efficaces entre ces
différents acteurs sont cruciales pour soutenir au mieux
l'équilibre entre les engagements sportifs et académiques de
l'ESHN, en tenant compte de ses besoins spécifiques.
2. Dans le champ universitaire, des enseignants plus ou
moins conscients du statut d'ESHN et des camarades conciliants
Les ESHN bénéficient d'un statut particulier.
Ils doivent faire savoir au corps enseignant que leur temps est partagé
entre deux paramètres. Généralement, les responsables de
la formation sont les premiers informés de leur statut, puis les
enseignants reçoivent une liste des étudiants
72
ayant des régimes spécifiques. Néanmoins,
il n'est pas rare, comme nous l'explique cette étudiante, que les
individus concernés en informent personnellement chaque responsable de
formation, ou parfois même les enseignants à titre individuel :
« Je préviens le responsable de formation
généralement les deux années, je me suis entretenue avec
eux pour exposer un peu mon projet qui comprennent mes attentes et que moi, je
comprenne les leurs aussi, je pense que c'est important. Et de ce fait en
licence pas trop, mais en master, je sais que tous mes enseignants ont
été prévenus par le directeur de scolarité de mon
statut et voilà en laissant, je sais que c'était pas
forcément le cas, mais quand j'étais allé à manquer
les cours donc je préviens toujours mes enseignants par mail et donc je
précise que je suis sportive de haut niveau. » (Laurie/ F/ 21
ans/ IAE School of Management 2ème année /Saut en
hauteur)
« C'est un gars qui est là que pour ça,
et il s'appelle Paul Legrand et du coup, il s'occupe de, bah, de tous les
athlètes qui sont en CREPS et qui font des études. Et du coup
lui, il est là uniquement pour ça et il est en contact avec, je
pense avec enfin, en tout cas, en contact ici avec la responsable de formation
et lui ouais, il est là que pour ça donc début dès
qu'on a un souci ou une absence à gérer ou une
compétition. On a, on a juste à l'appeler et il s'occupait du
reste, il fait un peu le côté administratif dès qu'on a des
enfin des irrégularités ils s'en occupent. »
(Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de commercialisation 2ème
année/ Aviron)
Lorsque Laurie communique avec les responsables de formation
et les enseignants, ils peuvent garantir l'inclusion en tant que sportive de
haut niveau dans son parcours éducatif. L'inclusion sociale se concentre
sur l'intégration des individus dans la société (Bourdieu,
1993). En établissant une communication ouverte, Laurie cherche à
établir une compréhension mutuelle avec ses enseignants
concernant ses attentes et ses contraintes liées à sa pratique
sportive. Cela est crucial pour elle afin de trouver un équilibre entre
ses obligations sportives et académiques, et ainsi garantir son
inclusion et son épanouissement dans son parcours éducatif.
L'implication de Paul Legrand dans la gestion administrative des
athlètes étudiants, comme dans le cas de Noé, met en
évidence le rôle essentiel des agents du CREPS dans le soutien aux
étudiants sportifs. Cette situation soulève la question centrale
du rôle joué par ces professionnels dans l'accompagnement des
athlètes étudiants et dans la gestion des multiples exigences
auxquelles ils font face (Harvey, 2005).
73
De plus, les enseignants peuvent accorder une certaine
flexibilité en ce qui concerne les délais des devoirs ou les
dates d'examen pour les étudiants absents en raison de
compétitions ou de tournois sportifs. Ils ont également la
possibilité d'organiser des séances de rattrapage pour les cours
manqués. Ils peuvent également faire preuve de flexibilité
en ce qui concerne les dates limites des devoirs, la présence en classe
et les exigences des tests.
« On a des profs qui sont très
compréhensifs du coup, ils nous aident ils nous envoient des cours si on
a des questions, on peut leur poser enfin, c'est vraiment bien. Par exemple, si
jamais il y a des partiels que je peux pas passer sur les dates qui sont
fixées soit ils me les font faire avant ou soit je peux les faire
à distance donc ça, c'est vraiment top. Aussi, pour les rendus,
enfin, j'ai la possibilité d'avoir un peu plus de temps que les autres
quand on a des devoirs à rendre donc ça, c'est bien aussi. »
(Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Le témoignage de Nadège illustre le concept
d'inclusion sociale et de flexibilité, tel que conceptualisé par
Tom Shakespeare, en effet, elle met en lumière la manière dont
les établissements d'enseignement peuvent se montrer flexibles. Cette
approche est en accord avec les idées de Shakespeare, qui défend
l'idée de structures plus adaptatives et inclusives dans tous les
domaines de la société, y compris dans le domaine des
études (Shakespeare, 2013).
« Je dirais qu'ils s'en foutent, mais qui nous
perçoivent comme des élèves plus normaux pas
forcément des fois c'est un peu relou quand les profs, ils veulent pas,
ils veulent pas forcément enfin, c'est pas qu'ils veulent pas nous
aider, mais que en tout cas ils sont un peu moins compréhensifs ouais
voilà » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de
commercialisation 2ème année/ Aviron)
Dans le cas de Noé, il semble exister un
désaccord entre certains professeurs et les étudiants en ce qui
concerne l'assistance et la compréhension. Les professeurs peuvent
être influencés par des intérêts ou des motivations
qui peuvent les rendre moins enclins à aider les étudiants, ce
qui crée un conflit perçu par Noé. Le champ sportif et le
milieu académique sont deux sphères distinctes, chacune avec ses
propres normes, valeurs et anticipations. Pour Noé, on observe une sorte
de « conflit de champ », où les obligations et les standards
du milieu sportif (séances d'entraînement, compétitions,
etc.) se heurtent aux attentes du contexte académique (présence
en cours, travail universitaire, etc.) (Bourdieu, 1977). Ainsi, il existe deux
types de professeurs : ceux qui font preuve de compréhension et ceux qui
le sont moins. Les professeurs les plus compréhensifs sont ceux qui sont
sensibles aux défis auxquels ces étudiants sont confrontés
et
74
qui leur fournissent une assistance supplémentaire pour
leurs études. Ceux qui le sont moins, voire pas du tout, ne proposeront
aucune aide spécifique à ces étudiants et les traiteront
de la même manière que les autres étudiants. Il est
possible que les professeurs de la faculté des sports soient mieux
informés ou plus compréhensifs concernant le statut des
étudiants sportifs de haut niveau que ceux de la faculté des
lettres, par exemple.
« Je suis arrivée en STAPS là,
c'était cool, tu es un peu vu comme une star quand tu es sportive de
haut niveau et les profs sont super compréhensifs donc ça pose
pas trop de problèmes pour les entraînements. [...] je suis parti
à la fac de lettres pour faire de la psycho. Et là,
l'organisation était pas du tout la même parce que ben, c'est pas
que les profs sont moins compréhensifs, mais aussi, je pense qu'ils
voient pas l'importance que ça a pour nous donc là c'était
un peu plus compliqué. Après, on me laisse enfin, on me laissait
faire ce que je voulais, c'est juste que peut-être pas pour
récupérer les cours et tous, c'est vraiment, tu te
débrouilles quoi » (Lola! F! 26 ans! Master de psycho obtenu!
400m)
« En STAPS, ils sont tous super arrangeants et une
fois que c'est comme ça. Et puis même, faire l'année
complète d'un coup ouais, c'est possible, mais je n'aurai pas
validé toutes les matières. » (Clémentine! F! 19
ans! L1 STAPS! Natation)
Les témoignages mettent en évidence les
disparités dans l'accès aux ressources et au soutien entre
différents domaines universitaires. Lola souligne que les professeurs en
STAPS font preuve de compréhension et d'adaptabilité, ce qui
facilite la conciliation entre les entraînements sportifs et les
études. En revanche, dans le domaine de la psycho, Lola remarque un
manque d'organisation adaptée et une moindre prise en compte des
contraintes des étudiants par les professeurs. La réalité
sociale est construite par les interactions symboliques entre les individus, en
accordant une attention particulière aux significations symboliques
attachées aux comportements (Mead, 1934). Les professeurs ont tendance
à ajuster leur comportement en fonction des attentes et des rôles
sociaux qui sont associés à chaque domaine d'études. Ces
observations peuvent être liées aux inégalités de
ressources et d'attention accordées aux différents domaines
d'études. Dans l'ensemble, à la faculté de sport par
exemple, les professeurs sont coopératifs avec les étudiants
sportifs de haut niveau, à quelques exceptions près.
« Alors, il y a des profs, je leur demande de l'aide,
ils ne sont pas réceptifs, ils ne me réexpliquent pas les
consignes, le cours et tous... c'est chiant parce que c'est des parties de
travaux, c'est compliqué, mais ils sont pas tous comme ça donc
c'est des exceptions.
75
Il y en a qui sont très bien, mais les profs comme
ça c'est des exceptions. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/
Handball)
Dans le témoignage d'Abdel, il mentionne des
professeurs qui sont « très bien », ce qui indique qu'ils lui
offrent une reconnaissance et un soutien appropriés. La théorie
de la reconnaissance sociale examine l'importance de la reconnaissance sociale
dans le développement de l'estime de soi et de l'identité des
individus (Honneth, 1992). Cependant, il perçoit ces professeurs comme
des exceptions, suggérant ainsi un manque général de
reconnaissance et de soutien de la part d'autres professeurs. Cette observation
met en évidence le besoin fondamental d'être reconnu et soutenu
dans un contexte académique, et suggère que l'expérience
d'Abdel peut être marquée par un manque de reconnaissance sociale
plus répandu parmi les professeurs. Pour être sûre
d'éviter les malentendus avec les professeurs, les étudiants
sportifs peuvent maintenir une communication ouverte et continue afin
d'identifier et à résoudre les problèmes avant qu'ils ne
deviennent des obstacles majeurs à la réussite académique
ou sportive.
« En fait, c'est une relation assez
particulière en fait parce que déjà il faut leur
expliquer, on va forcément, tu passes beaucoup de temps à
échanger avec par mail leur expliquer pourquoi est-ce que tu es
absenté pour le cours. Mais après en fait c'est une relation
assez privilégiée en fait parce que bah, j'ai certains profs avec
qui j'ai énormément sympathisé du coup ils envoyaient des
messages pour savoir les résultats de ma compet parce que j'étais
en compète forcément. » (Henri/ M/ 22 ans/
Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
Dans le témoignage d'Henri, il décrit une
relation privilégiée qu'il a développée avec
certains professeurs, où ils échangent des messages pour suivre
les résultats de ses compétitions. Cette relation témoigne
des liens forts et des réseaux sociaux qui se forment entre les
individus au sein d'une communauté ou d'une institution. Elle met en
évidence l'importance des interactions sociales et des connexions
personnelles dans la création de relations spéciales et dans
l'établissement de soutien mutuel au sein d'un contexte
académique. En effet, « La distance pédagogique entre
professeurs et étudiants, l'anonymat face à la masse
d'étudiants dans les amphithéâtres, l'absence de cadrage
pour le travail à effectuer, s'opposent, malgré les dispositifs
d'accompagnement mis en place, à la relation de proximité
entretenue avec les enseignants du lycée, aux différentes formes
de soutien et d'aides aux devoirs, et ce d'autant que les sportifs ont dans
certains cas vécu des situations de scolarité exceptionnelles au
bénéfice de leur statut. » (Papin, Viaud, 2018) leur statut
d'ESHN place une distance avec les professeurs, qui peut être
atténuer par certains moyens. En résumé, une collaboration
efficace
76
entre les enseignants et les étudiants sportifs de haut
niveau peut contribuer à concilier le plan sportif académique et
le plan sportif plus facilement. Les étudiants sportifs de haut niveau
ont souvent besoin du soutien et de la coopération de leurs camarades
pour réussir à la fois sur le terrain et en classe. La pratique
sportive de haut niveau demande un investissement considérable en termes
de temps et d'énergie, ce qui peut parfois entrer en conflit avec les
responsabilités académiques.
En outre, les étudiants sportifs de haut niveau peuvent
susciter la curiosité de leurs camarades de classe.
« J'ai du mal avec les gens qui sont dans la classe
et qui pose plein de question. [sur son statut d'ESHN]»
(Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
« On est vu comme des glandeurs. f...] Les
étudiants ils sont plus en mode : « à lui, c'est un sportif
de haut niveau. ! » » (Akim/ M/ 24 ans/ L2 STAPS/ 100m 200m
400m)
Alphonse ressent de l'inconfort vis-à-vis des
étudiants de sa classe qui posent beaucoup de questions, ce qui rend
difficile son intégration dans cet environnement. Cela peut être
lié à son désir de reconnaissance sociale et à son
besoin d'être perçu comme compétent et compétitif,
malgré son statut d'étudiant sportif de haut niveau. Il cherche
peut-être à prouver sa valeur et à être reconnu pour
ses performances sportives, ce qui peut influencer ses interactions avec ses
camarades. De son côté, Akim constate que les autres
étudiants ont une vision stéréotypée des sportifs
de haut niveau, les considérant souvent comme des « glandeurs
» qui ne s'investissent pas suffisamment dans leurs études. Il
souligne ainsi le besoin de reconnaissance sociale ressenti par les sportifs de
haut niveau. Cette perception répandue peut conduire à une
sous-estimation ou à une dévalorisation des efforts et des
réalisations des sportifs de haut niveau, ce qui peut affecter leur
estime de soi et leur identité (Honneth, 1992). En effet, leur statut
d'ESHN ne permet pas aux étudiants sportifs d'avoir accès
à tous les cours, ils n'auront pas l'opportunité d'entretenir une
vie sociale épanouissante au sein de leur promotion. Si ses horaires
d'entrainements ne se chevauchent pas avec les heures de cours,
l'étudiant aura l'occasion de fréquenter davantage ses camarades
de classe et d'entretenir un bon esprit de groupe.
« C'est assez compliqué, parce qu'en fait au
départ c'est je suis un peu le mec au départ tu passes un peu
pour le mec qui vient jamais en cours, parce qu'il va forcément en cours
c'est compliqué. » (Henri/ M/ 22 ans/ Faculté des
sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
77
« En licence, ouais ça se passe bien, mais en
licence ça a été compliqué parce qu'en fait enfin
j'avais je me suis pas fait forcément des amis parce qu'en fait vu que
bah, il y a beaucoup plus de cours en master vraiment, j'allais au cours et je
partais directement m'entraîner. » (Nadège/ F/ 21 ans/
M1 Histoire/ Aviron)
Dans le premier témoignage, Henri exprime les
difficultés auxquelles il est confronté en tant
qu'étudiant pratiquant le tir à l'arc. Il se sent perçu
comme quelqu'un qui manque fréquemment les cours, ce qui peut nuire
à sa réputation et à l'image qu'il renvoie aux autres.
Cette perception peut être liée à son identité en
tant que sportif, et à la tension qui existe entre ses obligations
sportives et académiques. La manière dont il est perçu par
l'entourage peut influencer sa propre perception. Henri et Nadège
fournissent des témoignages qui peuvent être analysés
à travers la théorie de l'identité sociale. Cette
théorie examine l'influence de l'appartenance à des groupes
sociaux sur la construction de l'identité individuelle (Tajfel &
Turner, 1979). Dans le deuxième témoignage, Nadège
évoque ses expériences pendant sa licence et son master. Elle
explique qu'il lui a été difficile de se faire des amis en
licence en raison de son emploi du temps chargé. Elle se sentait
contrainte d'assister aux cours et de partir immédiatement
s'entraîner, ce qui a pu limiter ses opportunités de socialisation
avec ses camarades de classe. L'identité de sportive de haut niveau peut
ainsi avoir un impact sur sa capacité à établir des liens
sociaux dans le contexte universitaire. Ainsi, les étudiants sportifs
peuvent se sentir exclus de leur promotion en raison de leurs engagements
sportifs, mais les camarades peuvent les aider à s'intégrer dans
la vie sociale de l'école. Donc, pour soutenir la réussite des
étudiants sportifs de haut niveau, les camarades jouent un rôle
décisif. Ils peuvent apporter leur aide aux étudiants sportifs
pour combler les lacunes dans leurs cours causées par leurs
compétitions ou leurs entraînements. En effet, cela peut impliquer
le partage de notes, la révision conjointe ou l'assistance dans la
compréhension des concepts difficiles. De la même manière
que les professeurs, certains camarades de classe leur offrent de l'aide pour
rattraper les cours, tandis que d'autres ne le font pas, voire ne sont
même pas conscients de leur statut particulier.
« Les gens de ma classe le savent pas tous, par
exemple, sûrement pas tous mais une bonne partie savent parce que du
moment qu'il y a quelqu'un qui vient que la moitié des cours, ils
comprennent vite f...] mais voilà peut-être que c'est eux ils vont
être au courant, ils vont te le dire, mais c'est pas un sujet principal.
» (Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/ Escrime)
« Du coup, je dirais qu'il y a deux types de
personnes il y a ceux qui comprennent un peu et ceux qui se rendent un peu
moins compte f...] quand je suis amené à pas pouvoir
78
suivre un cours et ils sont là pour le prendre
à ma place pour me dire ce qu'on ce qui a à faire ou ce qu'on a
fait et du coup en vrai, c'est cool, ils arrivent à m'aider quand j'ai
besoin » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de commercialisation
2ème année/ Aviron)
Les témoignages de Noé mettent en lumière
des éléments clés de la théorie de
l'étiquetage. Cette théorie sociologique explore comment les
étiquettes et les stéréotypes sociaux peuvent avoir un
impact sur la façon dont les individus sont perçus et
traités dans la société (Becker, 1963). Dans le premier
témoignage, certaines personnes de la classe ne sont pas au courant du
statut particulier de l'individu, mais ceux qui remarquent ses absences
répétées comprennent rapidement la raison derrière
cela. Cela peut s'expliquer par le processus d'étiquetage, où les
autres étudiants associent un sens à son comportement, des
absences fréquentes, et en déduisent des conclusions sur sa
situation spécifique (Becker, 1963). Dans le deuxième
témoignage, Noé mentionne deux types de personnes
présentes dans son environnement. Certains comprennent sa situation
particulière et l'aident en lui fournissant des informations sur le
contenu des cours manqués, cela suggère que ces personnes
évitent les stéréotypes négatifs associés
à ses absences et l'assistent pour surmonter les conséquences de
celles-ci. Toutefois, Noé mentionne également qu'il y a d'autres
personnes qui ne sont pas conscientes des défis spécifiques
auxquels il fait face et qui peuvent manquer de compréhension ou
d'attention à ses besoins. Par opposition, les camarades peuvent offrir
un soutien émotionnel, en comprenant la pression à laquelle les
étudiants sportifs sont soumis et en les aidant à gérer le
stress. Ils peuvent aussi contribuer à créer un environnement
d'apprentissage positif et inclusif.
« On évite d'en parler en fait, c'est vraiment
de te focaliser sur les cours une fois que tu as aussi de changer un petit peu
là en fait c'est parce que si je suis pas d'esprit si je commence quand
je suis en cours à parler du sport et quand je suis au sport à
parler de sport ça va commencer, ça va commencer, je vais
commencer à péter un câble. » (Henri/ M/ 22 ans/
Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
La théorie de la dissonance cognitive explique comment
les individus réduisent l'inconfort psychologique causé par une
contradiction entre leurs croyances et leurs comportements. (Festinger, 1957).
Dans le cas d'Henri, il évite de parler de sport pendant les cours et de
parler de cours pendant les entraînements. Cette stratégie peut
être considérée comme une tentative de réduire la
dissonance cognitive en évitant tout conflit ou tension entre ses
rôles d'étudiant et de sportif. En maintenant des
frontières claires entre ces deux domaines, il parvient à
réduire le conflit mental et à se sentir plus à l'aise.
Les camarades peuvent faire preuve d'empathie face aux défis
rencontrés par les athlètes, tels que la fatigue physique et la
pression pour équilibrer
79
le sport et les études. Ils peuvent aider en partageant
des notes de cours ou en collaborant sur des projets de groupe lorsque
l'athlète étudiant est absent. La cohésion sociale peut
également renforcer le sentiment d'appartenance à un groupe
(Durkheim, 1895). Pour un étudiant athlète, s'identifier à
un groupe de pairs vivant des expériences similaires peut
améliorer le bien-être psychologique et aider à surmonter
les défis. La cohésion sociale implique souvent le partage de
valeurs communes (Durkheim, 1895).
« En master enfin, du coup vu qu'on est 20 on est
quand même beaucoup moins et que les cours, je peux tous y assister vu
qu'il y en a pas beaucoup enfin, on a quoi à 10 heures par
semaine-là, j'ai enfin pu me faire des amis et tout et du coup il y a
vraiment une bonne ambiance, c'est cool du coup. Je connaissais des gens, je
sais que enfin ils étaient là pour m'envoyer les cours quoi
» (Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Nadège partage son expérience positive en
master, où le groupe est de taille réduite et les heures de cours
sont limitées. Cette situation a favorisé sa participation
à tous les cours et a contribué à la création de
liens sociaux solides et à une ambiance agréable au sein du
groupe. Elle souligne également le soutien reçu de certaines
personnes qui lui ont envoyé les cours, ce qui suggère une
dynamique de solidarité et d'entraide entre les membres du groupe.
« Il y en a, ils me passent les cours, t'en a d'autres,
ils me disent vas chier. Ils me disent
aussi comment tu fais pour faire ça ? »
(Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
Abdel partage une expérience différente en tant
qu'étudiant de première année en STAPS. Il fait remarquer
qu'il a peu de connaissances sur ses camarades de classe et qu'il n'assiste pas
régulièrement aux cours magistraux. Il mentionne également
des réactions diverses de la part de certains de ses camarades, certains
lui fournissant les cours tandis que d'autres adoptent une attitude
négative. Cela correspond aux recherches menées par Gaston-Gayles
(2005), qui examine comment les athlètes étudiants sont souvent
perçus de manière différente par leurs pairs, les
attitudes à leur égard peuvent varier entre admiration, envie et
ressentiment. Cette perception mixte peut créer un environnement social
complexe pour les athlètes étudiants.
En conclusion, les établissements d'enseignement
encouragent une culture de soutien et de respect réciproque parmi tous
les étudiants pour faciliter cette collaboration. Cependant, certaines
facultés sont plus conciliantes que d'autres. En effet, certains
enseignants comprennent que ces étudiants ont des responsabilités
sportives qui peuvent parfois entrer en conflit avec leur emploi du temps
scolaire et d'autres, non. Il existe une disparité dans la
manière dont les professeurs réagissent aux contraintes
liées à la pratique sportive de haut niveau.
80
Certains professeurs font preuve de compréhension et de
souplesse, tandis que d'autres sont moins réceptifs ou
compréhensifs envers ces contraintes. En effet, si l'étudiant ne
le mentionne pas à ses professeurs, il est possible que ces derniers ne
soient pas au courant tout au long de l'année. Du coté des
camarades de classe, certains démontrent de la compréhension et
de l'adaptabilité face aux contraintes et exigences liées
à la pratique sportive de haut niveau des ESHN. En revanche, d'autres
camarades de classe peuvent manquer de sensibilité à leurs
besoins et ne pas prendre en considération les contraintes et
défis auxquels ils sont confrontés. Cette attitude peut se
traduire par un manque d'assistance ou de soutien, voire par des
réactions négatives ou hostiles envers les ESHN.
81
Partie IV - Une reconnaissance peu valorisée des
ESHN ?
Le fait d'être un athlète de haut niveau, voire
« d'élite », on peut le supposer peut conférer un
certain prestige et une notoriété, ce qui peut renforcer
l'admiration de leurs pairs. Nous reviendrons donc sur leurs rôles
d'étudiante t d'athlète et la manière dont ils jonglent
avec ces deux identités.
Ainsi, nous pouvons nous demander si les étudiants qui
sont également des athlètes perçus comme des
étudiants « d'élite » ? Sont-ils respectés par
leurs pairs en général en raison de leur dévouement, leur
discipline et leur habileté dans leur discipline sportive ? Sont-ils
souvent perçus comme des figures inspirantes, en particulier s'ils ont
atteint un degré élevé de succès dans leur
discipline sportive ? Comment les étudiants sportifs de haut niveau sont
perçus dans le milieu scolaire ? La reconnaissance des étudiants
sportifs de haut niveau dans le cercle familial est-elle importante ? Comment
les étudiants sportifs de haut niveau sont reconnus dans les
médias ?
1. A l'université, des étudiants sportifs
de haut niveau peu valorisés ...
La position des étudiants athlètes
d'élite en matière de reconnaissance sociale est assez complexe.
Ils peuvent être sujets à certains stéréotypes
négatifs associés aux sportifs ou être bien vu par
l'ensemble de la communauté étudiante. Cependant, cette
reconnaissance peut avoir ses revers. Le succès sportif peut occulter
d'autres facettes de leur identité et engendrer une pression pour
maintenir leur performance à un niveau élevé. Les
attitudes des professeurs peuvent également varier. Certains peuvent
admirer le dévouement de ces étudiants et faire preuve de
flexibilité pour les aider à gérer leurs
responsabilités académiques et sportives. D'autres peuvent
être plus stricts en ce qui concerne les règles académiques
et ne pas faire de concessions pour les activités sportives.
« Le manque de compréhension des fois le
manque de réponses aussi parce que des fois, tu demandes, tu dis que tu
es pas là, je demande des cours, les documents, c'est sûr que des
fois, c'est compliqué de suivre un cours quand tu as quoi tout court
donc pour réviser c'est compliqué » (Alphonse/ M/ 21
ans/ M1 STAPS/ Football)
Alphonse rencontre des obstacles, indiquant un manque de
flexibilité et de compréhension de la part du système
éducatif. En se référant aux travaux du sociologue Dubet
(2002), qui a exploré comment les systèmes éducatifs
s'adaptent aux besoins individuels des étudiants, on peut analyser le
témoignage d'Alphonse. Dubet démontre que l'école, avec
ses propres normes
82
et règles, peut souvent se déconnecter des
réalités personnelles des étudiants. En d'autres termes,
la reconnaissance sociale ne se limite pas à un aspect individuel, mais
est également influencée par des facteurs sociaux plus larges.
Les étudiants qui pratiquent un sport de haut niveau jouent un
rôle significatif dans la dynamique et l'identité d'une
institution éducative. Cependant, ils peuvent également faire
face à des défis uniques en raison de la pression
académique et sportive qui leur est imposée. La reconnaissance
dont ils bénéficient de la part de leurs pairs et de leurs
enseignants peut varier en fonction de différents éléments
tels que la culture de l'établissement, les performances de
l'athlète et la visibilité du sport en question.
« Mais moi, ils ont toujours été
compréhensifs de temps en temps, il y en a plusieurs qui me demande le
résultat où j'en suis comment ça se passe quand je suis
amené à être absente, c'est très, très rare
que j'ai des remarques négatives c'est plutôt des bons courages
pour les compétitions. » (Laurie/ F/ 21 ans/ IAE School of
Management 2ème année /Saut en hauteur)
« Par exemple, le prof d'anglais là cette
année, il me pose des questions, il s'intéresse à mes
performances, c'est toujours sympa ça. » (Alphonse/ M/ 21 ans/
M1 STAPS/ Football)
L'encouragement et la compréhension que reçoit
Laurie de ses professeurs lorsqu'elle doit s'absenter pour des
compétitions sportives favorisent probablement son implication envers le
sport. De la même manière, Alphonse met en évidence
l'intérêt porté par un de ses enseignants à ses
performances sportives. Ces témoignages reflètent les
résultats de l'étude menée par Holt et al. (2008), qui met
en avant le soutien des camarades et des adultes pour le développement
positif des sportifs. Quant à Alphonse, l'intérêt que porte
son professeur d'anglais à ses performances sportives peut lui apporter
un sentiment d'appartenance et de soutien dans son rôle d'athlète.
Cela renforce également l'idée que ses activités sportives
sont valorisées et reconnues par d'autres, ce qui l'incite à
persévérer. Le soutien et les retours positifs d'autrui peuvent
intensifier l'engagement envers certaines activités et rôles. Par
ailleurs, les ESHN peuvent souvent bénéficier d'une
reconnaissance de la part de leurs camarades de classe. Un étudiant qui
excelle dans son sport peut être reconnu par l'obtention de prix ou de
médailles, ou par sa performance.
« Je crois dans la semaine et du coup quand j'arrive
avec mes 8-9 entraînements quand on pose des questions, on me regarde
avec des grands yeux en me disant, mais elle est folle. »
(Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
83
« Ils me disent aussi comment tu fais pour faire
ça ? » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
« Ils t'encouragent enfin, tu leur dis quand tu as
des compètes, tu leur dis ouais, j'ai une compète tel jour et
sont derrière toi, elles vont te pousser, ouais c'est sympa. »
(Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Ces désignations peuvent influencer leur estime
personnelle, leur conduite et leurs attentes. Dans les situations de
Clémentine et Abdel, l'étonnement et l'interrogation
suscités par leur dévouement sportif peuvent engendrer un
sentiment d'être mis à part ou marginalisé. La
théorie de l'étiquetage propose que les individus soient
impactés par les catégorisations et les perceptions sociales qui
leur sont assignées par autrui (Becker, 1963). Cependant, Nadège
vit une situation distincte où l'étiquetage est plutôt
positif, se manifestant par la motivation et le soutien qu'elle reçoit
de ses enseignants. Il convient de souligner que les expériences
individuelles peuvent diverger et que l'effet de l'étiquetage est
déterminé par les circonstances spécifiques et les
réactions des personnes impliquées (Becker, 1963). Le fait de
jongler entre les études et les exigences rigoureuses de l'entrainement
sportif nécessite une grande organisation et un engagement, ce qui peut
inspirer le respect. Cependant, il est important de noter que le charisme, est
fragile et dépend fortement de la reconnaissance continue du public. Si
un étudiant sportif de haut niveau ne maintient pas son niveau de
performance ou si ses actions contredisent l'image qu'il a construite, il
pourrait perdre cette aura de charisme.
« Il faisait pas de rotation [ne fait de
remplacement] donc et quand j'ai commencé c'était lui le
coach il faisait pas toujours f...] Lundi on a fait la même chose et
mardi aussi, au bout d'un mois et on évolue pas trop. f...] mes
camarades de classes savent que je suis sportif haut niveau et tous
après sans plus quoi, il y a plus à dire là-dessus. »
(Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
Danilo, un joueur de basket universitaire, note que son
entraîneur ne fait pas de rotation dans l'équipe, suggérant
une approche d'entraînement traditionnelle et rigide. Cela pourrait
influencer le perfectionnement des aptitudes des joueurs et l'atmosphère
de l'équipe. Des chercheurs comme Jones et al. (2004) ont examiné
le rôle crucial des méthodes d'entraînement et des
dynamiques d'équipe sur la performance et l'esprit d'une équipe
sportive. Mais aussi, cela reflète la théorie de la reproduction
sociale, qui souligne comment les pratiques existantes sont
perpétuées même si elles ne sont pas optimales (Bourdieu
& Passeron, 1970). Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron partent du
principe que les inégalités sociales sont reproduites d'une
84
génération à l'autre à travers les
institutions sociales, comme l'école ou le sport (Bourdieu &
Passeron, 1970). Il parle aussi de la monotonie des séances
d'entraînement. C'est un autre exemple de reproduction sociale où
les méthodes établies résistent au changement et à
l'innovation. Finalement, Danilo évoque la réaction
indifférente de ses collègues d'étude face à son
statut d'athlète d'élite. Même avec cette distinction, il
ne constate pas de grand intérêt ou de conversations
particulières à ce sujet. Ceci pourrait démontrer comment
la reproduction sociale peut normaliser certaines disparités ou statuts
sociaux. Par ailleurs, pour les étudiants sportifs de haut niveau,
s'engager dans des études académiques peut leur offrir un moyen
de libérer et d'exprimer leurs pensées et émotions de
manière différente. Se plonger dans l'univers des études
leur fournit un équilibre précieux, en leur permettant de
détourner leur attention du sport, du moins temporairement.
« Comme j'essaye d'être quand je suis avec eux,
j'essaie forcément de d'extérioriser et de pas parler de sport
une personne normale quand je suis avec eux après, je sais que des fois
c'est un peu relou pour eux. » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT -
Technique de commercialisation 2ème année/ Aviron)
« Je mange jamais à l'IUT ou enfin ou quoi donc
voilà mais après, ils savent, je communique pas trop
là-dessus donc c'est ça que eux non plus, mais voilà
peut-être que c'est eux ils vont être au courant, ils vont te le
dire, mais c'est pas un sujet principal. » (Paula/ F/ 21 ans/ IUT -
DUT GEA 2ème année/ Marche athlétique)
Le comportement de Noé et Paula varie lorsqu'ils sont
en présence de leurs pairs. Noé évite de parler de sport
pour ne pas gêner ses amis, tandis que Paula est relativement
réservée sur ce sujet. Ces comportements peuvent être
attribués à leur identité sociale et à leur
aspiration à s'intégrer dans leur groupe respectif. Ces deux
étudiants mettent aussi en évidence l'effort pour se conformer
aux normes et attentes du groupe afin de préserver une harmonie sociale
(Tajfel & Turner, 1979).
« Des jaloux, des gens du club à
l'école en fait voilà à l'école. f...] Puis avec
ceux à qui je parlais plus, parce que j'ai pas beaucoup d'attaches, mais
c'était des critiques par rapport au sport. Des remarques comme, ah
c'est celle qui pue le chlore ou encore elle sait faire que des longueurs.
» (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
Si Clémentine prend à coeur ces
étiquettes, elle pourrait commencer à se définir en
fonction de ces clichés négatifs, ce qui pourrait nuire à
son estime de soi, sa passion pour la natation, et même modifier son
identité sociale. La théorie de l'étiquetage
suggère que les étiquettes
85
attribuées à Clémentine pourraient
influencer sa propre perception d'elle-même ainsi que son comportement.
Par ailleurs, Clémentine pourrait aussi réagir à ces
étiquettes en intensifiant son engagement envers la natation, en
utilisant ces critiques pour se motiver à s'améliorer et
démontrer le contraire. Cependant, la réponse des individus face
aux étiquettes s'avère être complexe (Becker, 1963). Cette
réponse est déterminée par de nombreux facteurs : comme le
caractère de la personne, son contexte social, et sa capacité
à gérer les stéréotypes et les tensions sociales
(Becker, 1963).
En définitive, pour les professeurs, d'un
côté, certains professeurs sont arrangeants. Ils sont prêts
à ajuster les exigences des devoirs et les dates limites pour tenir
compte des obligations sportives des étudiants. Les étudiants
sportifs de haut niveau peuvent être perçus comme des
élèves talentueux et dynamiques, renforcés lorsqu'ils
maintiennent une communication avec ces derniers. Néanmoins, tous les
professeurs n'adoptent pas cette approche, certains peuvent être stricts
sur le maintien des normes académiques, insistant sur le fait que tous
les étudiants, y compris ceux qui sont aussi des sportifs de haut
niveau, respectent les mêmes critères. Les camarades de classe
peuvent contribuer à soutenir les étudiants athlètes
d'élite avec des encouragements et sont un moyen
d'extériorisation, mais cela n'efface pas la distance sociale qui existe
avec ces derniers. Les étudiants sportifs de haut niveau peuvent
également se sentir isolés si leurs responsabilités
sportives les empêchent de participer à des activités
sociales ou d'étude de groupe. En tant que camarades de classe, les
autres étudiants peuvent être attirés par le charisme des
étudiants sportifs de haut niveau.
2. ... source de fierté dans le cercle
familial
Le concept d'élite pour les étudiants sportifs
de haut niveau représente des athlètes qui se distinguent par
leur performance extraordinaire dans leur discipline sportive. Le sport
d'élite inclue les athlètes qui se distinguent par leur
performance extraordinaire (Fleuriel, 1997). Fleuriel souligne également
la différence entre le sport amateur et professionnel. L'excellence
académique fait partie intégrante de leur statut d'élite,
malgré les défis que cela peut représenter. Il convient de
souligner que le statut d'élite n'est pas seulement une position
reconnue, mais également une vision d'excellence, une série de
buts et d'ambitions qui incitent les étudiants sportifs à
chercher constamment à se surpasser et à dépasser leurs
propres barrières. Pour les athlètes étudiants
d'élite, leur position peut être perçue comme une
manifestation de charisme. Leur talent sportif, leur résolution, leur
discipline et leurs performances peuvent les différencier de leurs
pairs, leur conférant du respect et de l'admiration, voire un certain
niveau d'influence. En outre, leur capacité à jongler entre leurs
responsabilités académiques et leur carrière sportive
86
pourrait être vue comme une autre démonstration
de leur grandeur. De nombreuses familles éprouvent un sentiment profond
de satisfaction et de reconnaissance lorsque leur enfant se distingue dans un
domaine, y compris le sport. La réalisation de performances sportives de
haut niveau est souvent le fruit de longues années d'effort intense, de
passion et de sacrifices considérables. Lorsqu'un sportif parvient
à un tel sommet de succès, c'est un moment d'extrême
gratification pour sa famille. Les familles ont tendance à être
émerveillées par la force de caractère, le sens de
l'engagement et la capacité de rebondir dont leur enfant fait preuve en
poursuivant une carrière sportive intense tout en poursuivant ses
études. De plus, elles peuvent se sentir appelées à
soutenir leur enfant de diverses manières, par exemple en participant
aux événements sportifs, en contribuant financièrement ou
en offrant un soutien émotionnel et un encouragement constant.
« Comment ils me perçoivent, bah, je suis un
peu le chouchou, mais tu sais en rigolant quoi. Mes grands-parents à
chaque fois, ils font attention à moi et tout ça, ouais, à
peu près entre guillemets même s'ils sont contents pour moi, ils
veulent que je réussisse. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/
Handball)
« Après pour lui, mon père est fier, il
faut que je sois meilleur etc. mais il est fier, il sait à quel point
c'est compliqué de déjà d'arriver au niveau-là, ma
mère, je sais pas trop si elle se rend compte, elle s'en rend compte
quand elle voit des articles dans le journal des trucs comme ça ou sur
Facebook. Mais mon frère, je pense qu'il est fier de moi, même si
on se le dit pas, c'est le grand frère aussi, c'est pour ça que
c'est dans l'ensemble, ils sont fiers de moi et voilà après se
rendre compte, ils savent. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/
Football)
Abdel ressent une pression bienveillante pour réussir
de sa famille qui le valorise en tant qu'athlète, ce qui peut influencer
son auto-perception et ses ambitions sportives. Alphonse est poussé par
la fierté de son père et le respect tacite de son frère.
Sa mère, qui comprend moins bien ses défis, découvre ses
succès par les médias, une forme de socialisation indirecte. Jay
Coakley (2001), souligne l'importance du sport en tant que facteur central dans
l'élaboration de l'identité des jeunes. Les récits
partagés par Abdel et Alphonse indiquent clairement que leur engagement
sportif est un élément fondamental de leur identité
personnelle, et que celui-ci a une grande importance au sein de leurs familles.
Réciproquement, leurs accomplissements et attitudes peuvent avoir un
impact sur les standards et principes de leurs familles et de leur
communauté plus étendue.
87
« Bon pour mes parents, je reste moi, clairement et
pour ma soeur pareil de toute façon, je pense que si je
commençais à prendre des ailes, je pense que mes parents me
redescendront très vite. Au niveau de l'entourage plus extérieur
pour mon papi, je suis une légende, je pense que ça me fait
plaisir parce que à l'inverse de mon père, mon papi est
très expressif sur ce qu'il pense et je pense que ça me fait du
bien aussi d'avoir quelqu'un qui me suit autant. » (Mandy/ F/ 20/ L3
STAPS/ Football)
Dans le cas de Mandy, les réactions diversifiées
de sa famille face à son statut d'athlète sont remarquables. Ses
parents et sa soeur, en la considérant d'abord comme "Mandy" et non
comme une sportive d'élite. D'après Messner (2009), le sport est
un espace où se construisent et se négocient les relations de
genre et les rôles au sein de la famille. L'admiration de son
grand-père peut stimuler la motivation de Mandy et renforcer son
sentiment d'accomplissement. Mandy est perçue comme une «
légende », son statut d'« élite » est donc mis en
avant. Cela pourrait signifier qu'il la considère comme une
réussite exemplaire, quelqu'un d'exceptionnel qui réussit
là où d'autres pourraient échouer. Le cas de Mandy
démontre clairement comment les rôles sociaux peuvent fluctuer
selon le contexte et les relations interpersonnelles. La famille joue un
rôle crucial dans le soutien des athlètes étudiants
d'élite. En retour, la famille peut bénéficier d'une
certaine reconnaissance et d'une augmentation de l'estime de soi grâce
aux accomplissements de l'athlète étudiant.
Dans certaines familles, le soutien est toujours
présent, mais une certaine indifférence peut se dégager.
Certains membres familiales peuvent se retrouver dans une posture
d'indifférence ou dans le non compréhension de l'investissement
de l'athlète dans le domaine du sport.
« Ça a pas changer grand-chose dans le sens
où oui, je fais du sport, mais avant tout, je reste leur fille ou leur
soeur ou leur petite fille même si le sport prend beaucoup de place dans
ma vie aussi dans là leur parce qu'en plus ils me soutiennent à
fond, quand c'est en France, ils viennent quasiment à toutes les
compétitions. » (Paula/ F/ 21 ans/ IUT - DUT GEA
2ème année/ Marche athlétique)
« Ça change rien que je réussisse ou
pas ça change rien en fait, c'est ils sont pas vraiment plus fiers si je
réussis pas, ils sont contents pour moi, mais enfin oui si j'ai
réussi c'est mieux. » (Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS
option MIAGE/ Escrime)
Paula considère que son statut familial en tant que
fille, soeur et petite-fille demeure inaltéré malgré son
implication intense dans le sport. Le soutien solide de sa famille lors des
compétitions en France indique que, bien que son rôle en tant
qu'athlète d'élite soit significatif,
88
sa place au sein de la famille reste centrale. La
théorie du rôle social décrit comment les individus
modifient et ajustent leur comportement en fonction des normes et attentes
sociales liées à leur statut au sein d'un groupe ou d'une
communauté (Merton, 1957). Cela témoigne aussi du fait que sa
famille a réussi à intégrer sa carrière sportive
à son identité sociale préexistante, sans perturber sa
place au sein de la famille. De son côté, Odilon indique que son
succès ou son échec dans le domaine sportif n'altère pas
la façon dont sa famille le perçoit. Cette déclaration
concorde avec l'étude menée par Coakley (2001), qui met l'accent
sur l'importance pour les familles d'accepter l'échec sportif comme un
élément constitutif du développement de l'athlète.
Il semble que sa famille le soutienne et soit fière de lui,
indépendamment du résultat de ses compétitions.
« C'est une famille classique il n'y a pas de relation
particulière parce que je suis sportif de niveau ou pas. Je pense pas
comme si j'étais la star de la famille, je suis rarement à la
maison en fait quand tu quand j'y suis, c'est plus heureux en profite, on passe
du temps ensemble plutôt que juste on parle du sport. » (Henri/
M/ 22 ans/ Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
La famille de cet étudiant n'a pas changé sa
vision depuis qu'il est ESHN. Il est loin d'être considéré
comme une star au sein de sa famille. Son identité familiale est
distincte de son identité d'athlète car leur vision est
sensiblement la même. En d'autres termes, son rôle familial demeure
stable malgré son implication dans le sport de haut niveau.
Finalement, dans certaines familles, les étudiants
sportifs de haut niveau sont perçus comme des individus qui suscitent la
fascination. Leurs succès sportifs sont une source de fierté et
de prestige pour leurs proches. Les étudiants sportifs de haut niveau
peuvent représenter une réussite exemplaire, montrant à
quel point le travail et la détermination peuvent conduire au
succès, ainsi, ils sont vus comme des « élites ».
Cependant, la perception de la famille peut être plus complexe et varier
selon les individus. D'autres membres de la famille, en revanche, peuvent
ressentir des sentiments d'indifférence, dans l'incompréhension
de leur passion. En effet, la réussite dans le sport de haut niveau peut
également conduire à une reconnaissance sociale plus large pour
l'étudiant et sa famille. Cela peut avoir des implications positives,
mais aussi négatives.
3. La médiatisation de leur pratique : entre
critiques et éloges
Les médias jouent un rôle clé dans la
reconnaissance et la mise en valeur des athlètes d'élite. Cela
englobe non seulement la médiatisation de leurs performances sportives,
mais aussi la
89
formation de leur image publique. Les médias peuvent
promouvoir un sportif, mettre en avant ses succès, mais aussi, dans
certains cas, soumettre sa vie privée à un examen minutieux et
une pression excessive. La reconnaissance et les encouragements reçus
sur ces plateformes peuvent avoir un impact significatif sur leur motivation et
leur confiance en soi. En s'appuyant sur l'approche interactionniste, nous
pouvons revenir sur l'idée que leur identité, leur statut social
et leur reconnaissance sont formés et discutés par le biais des
interactions sociales. Pour ESHN, les plateformes de réseaux sociaux
sont souvent un lieu où ils communiquent avec leur entourage. Ils
utilisent ces plateformes pour forger leur image publique et obtenir de la
reconnaissance pour leurs exploits sportifs. Cependant, les athlètes
sont fréquemment confrontés à des tensions entre leurs
identités d'étudiants et d'athlètes, qui peuvent
être en contradiction. L'interactionnisme symbolique nous permet de
comprendre comment ces athlètes concilient ces différentes
identités et comment ils gèrent les attentes et les pressions
liées à chacune. Par exemple, un athlète pourrait utiliser
des symboles ou des signes spécifiques pour signaler son statut
d'athlète d'élite en partageant des vidéos ou des
photos.
« Les victoires, on partage et des trucs comme dans
les vestiaires quand on gagne quoi, ça arrive souvent, oui, c'est vrai.
Alors les critiques cette année, non pas trop parce que c'est une belle
saison, les choix du coach sont bons vraiment et ceux qui viennent aux matchs,
on les connaît au niveau des réseaux, mais ouais, je pense, il y a
beaucoup de positif sur les réseaux sociaux Facebook, par exemple.
» (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
« Des photos des vidéos et des trucs comme
ça, mais après j'ose pas non plus mettre trop de de trucs, mais
ouais enfin si je mets quand même pas mal de trucs mais, mais pas trop
non plus. f...] Ouais sur Instagram, bah c'est souvent que on encourage et tout
ça quand je poste une photo enfin, j'ai des messages privés du
coup tu c'est ça peut être de la jalousie comme tu disais, mais
ouais, tu reçois que des encouragements. » (Nadège/ F/
21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Les déclarations d'Alphonse et Nadège
démontrent une expérience généralement positive des
réseaux sociaux, bien qu'ils soient conscients des potentielles
réactions adverses. En effet, selon Rowe et ses collègues (2010),
les réseaux sociaux peuvent servir de plateforme permettant aux
athlètes de partager leurs expériences et d'interagir avec les
internautes. Les témoignages d'Alphonse et Nadège illustrent
l'usage des réseaux sociaux (Facebook et Instagram) pour communiquer
leurs succès, partager des images et des vidéos, et recevoir des
messages d'encouragement. Hutchins et Rowe (2012) mettent en évidence
que les réseaux sociaux
90
peuvent aussi créer de nouvelles dynamiques de pouvoir
entre les sportifs et leurs supporters, en particulier en ce qui concerne les
retours, positifs ou négatifs, que ces derniers peuvent faire.
En outre, les encouragements qu'elle reçoit sur
Instagram mettent également en évidence la théorie de la
reconnaissance sociale.
« Mais plus, on en a plus, on a des attentes des
autres et tout ça donc voilà mais après, c'est sûr
que ça prend une place importante quand même maintenant dans tous
les domaines, mais aussi dans le sport. J'estime être assez
apprécié après, on ne sait trop rien, mais non oui parce
que par exemple j'ai, c'est plus des encouragements. » (Paula/ F/ 21
ans/ IUT - DUT GEA 2ème année/ Marche
athlétique)
Le fait que Paula estime être assez
appréciée peut être considéré comme une
indication qu'elle perçoit un retour positif de la part de son «
miroir social ». Selon la théorie du miroir social de Cooley, notre
perception de nous-mêmes et notre identité sont grandement
influencées par la façon dont nous pensons être
perçus par les autres (Cooley, 1902). Ce concept est également
reflété dans les propos de Paula lorsqu'elle reconnaît que
l'attention et les attentes des autres ont un impact sur sa perception de soi
et son comportement. Elle mentionne spécifiquement que l'augmentation de
sa visibilité sur les réseaux sociaux entraîne des attentes
accrues de la part des autres. De plus, elle souligne l'importance croissante
des réseaux sociaux dans divers domaines, y compris le sport. Les
encouragements qu'elle reçoit viennent probablement renforcer cette
perception positive. A l'inverse, d'autres athlètes utilisent
très peu voire pas du tout, les réseaux sociaux pour interagir
avec les autres dans des disciplines d'une moins grande couverture
médiatique. La reconnaissance et les encouragements reçus sur ces
plateformes peuvent avoir un impact significatif sur leur motivation et leur
confiance en soi.
« Mais jamais, je communique rarement mes
résultats sur les réseaux où je parle rarement de mon
sport sur les réseaux, j'ai pas de page dédiée à
ça non plus j'ai pas de dire ça. Des fois, je poste une photo sur
Instagram en disant telle compétition et du coup en fait par cette
publication, j'ai des potes qui viennent en DM et qui viennent me demander bah
alors comment ça s'est passé tout ça et de là c'est
comme ça qu'on en discute. » (Henri/ M/ 22 ans/ Faculté
des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
« Franchement, c'est super compliqué parce que
moi, je déteste les réseaux, j'aime pas me mettre en avant, je
sais pas faire et du coup, j'ai ma page athlète plus mon Insta
franchement mon Insta, il y a j'avais pas j'avais pas Insta avant
91
d'avoir Joma, ça m'intéressait pas vraiment.
» (Lola/ F/ 26 ans/ Master de psycho obtenu/ 400m)
« Je poste rien de ma vie, ça
m'intéresse pas de partager le contenu là, parce que je trouve,
c'est pas, c'est vraiment et du coup, c'est pas forcément
intéressant et surtout ça ne sert à rien ça ne sert
à rien que les autres sachent ça. » (Odilon/ M/ 19 ans/
IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/ Escrime)
La théorie de la présentation de soi, Goffman
compare la vie sociale à une pièce de théâtre, nous
jouons différents rôles sociaux et adaptons notre comportement en
fonction de la situation (Goffman, 1956). Sur Instagram, Henri partage parfois
des moments liés à son sport, le tir à l'arc. Il n'a pas
pour but de s'afficher constamment, mais ses publications occasionnelles
créent un espace d'interaction et de discussion avec ses amis autour de
sa passion. Lola exprime son désintérêt pour les
réseaux sociaux et utilise Instagram uniquement par obligation,
probablement en lien avec son statut d'athlète. Ce comportement illustre
comment les attentes sociales et professionnelles peuvent façonner notre
présentation en ligne, malgré nos propres inclinations. Odilon a
choisi de ne pas partager d'éléments de sa vie personnelle en
ligne, jugeant cela inintéressant et inutile pour autrui. Cela met en
lumière une autre stratégie de présentation de soi sur les
réseaux sociaux : l'absence de partage. Odilon semble penser que sa vie
privée ne doit pas être étalée au grand jour. Ces
exemples démontrent une approche différente de la gestion de
l'identité et de la présentation de soi sur les plateformes
numériques. En effet, la reconnaissance via les réseaux sociaux
peut grandement influencer l'expérience d'un athlète
étudiant d'élite. En effet, la reconnaissance varie en fonction
du sport pratiqué. Cette reconnaissance peut comporter des
bénéfices, tels que l'accroissement de la visibilité,
l'augmentation de l'estime de soi et des chances de parrainage. Cependant, elle
peut également engendrer des défis, tels que la pression de
maintenir une image publique irréprochable ou faire face à des
critiques et du harcèlement en ligne. Les médias peuvent
amplifier la pression de performance sur les athlètes étudiants
d'élite. Cela peut également présenter des
côtés négatifs. Les critiques soulignent souvent la
pression accrue que les médias peuvent imposer à ces jeunes
sportifs, en les poussant à toujours réussir et en les observant
constamment. L'image publique, la surveillance incessante, les attentes des
fans, les critiques et le harcèlement peuvent tous affecter le
bien-être mental de ces athlètes
« Après, j'ai eu des critiques sur les
réseaux sociaux après les matchs, quand tu fais un bon match tout
le monde t'aime et inversement. Dans le commentaire du coup en fait ça
peut être tu peux pas, c'est de la lumière à l'ombre, je me
suis déjà fait insulter sur les
92
réseaux et la semaine d'après, j'ai
été le meilleur joueur de ligue 2. » (Abdel/ M/ 19 ans/
L1 STAPS/ Handball)
La perception d'Abdel de lui-même en tant que joueur de
handball est fortement influencée par l'opinion que les autres expriment
sur les réseaux sociaux. Lorsqu'il réalise une performance
exceptionnelle lors d'un match et qu'il reçoit des éloges sur ces
plateformes, il se perçoit et est perçu par les autres comme un
excellent joueur. La réalité sociale est construite
collectivement par les individus à travers les interactions sociales et
la communication (Berger & Luckmann, 1966). Cependant, s'il ne joue pas
bien et fait l'objet de critiques. Sa propre vision se transforme ainsi et il
peut commencer à se considérer comme un joueur moyen ou mauvais.
Il ressort de cette situation qu'Abdel ne vit pas une réalité
fixe. Au contraire, sa réalité est en perpétuelle
évolution, modelée par ses interactions sociales. C'est un
processus ininterrompu où la réalité est constamment
créée, détruite et recréée, selon les
réactions des autres et son auto-évaluation personnelle (Berger
& Luckmann, 1966). En outre, certaines disciplines sportives
bénéficient d'une plus grande couverture médiatique et,
par conséquent, d'une plus grande reconnaissance que d'autres.
« Oui, les matchs sont retransmis sur un site
internet, ça nous permet de voir ce qu'il faut corriger, ce qui est
bien, nos sensations etc. donc ça, c'est utile parce que on regarde
aussi nous ce qu'on a fait sur les matchs précédents des fois, on
revient sur ce qui n'a pas été ou, mais voilà ça
nous sert pour nous. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
« On passe sur la chaîne du Lux et je pense que
c'est toutes les semaines. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
Les témoignages soulignent l'importance pour les
joueurs de revoir leurs matchs précédents et d'analyser leurs
performances. Alphonse met en avant l'importance des retransmissions
numériques de leurs matchs, qui leur offrent l'opportunité
d'analyser leurs performances, d'identifier les aspects à
améliorer et les points forts. Cette pratique s'aligne sur les
recherches de Ray Gamache (2015) qui se penche sur l'utilisation des
médias par les sportifs pour étudier et optimiser leurs
performances. De son côté, Danilo signale que leurs matchs sont
diffusés sur une chaîne de télévision, ce qui peut
être perçu comme un signe de reconnaissance et de
visibilité pour leur équipe. Ce phénomène rejoint
les observations de Rowe (2004) qui étudie comment les médias
peuvent renforcer la visibilité des sportifs et des équipes,
contribuant de la sorte à leur popularité et à leur
renommée publique.
93
En utilisant ces connaissances, les joueurs évaluent
leur propre performance et cherchent à s'améliorer. Par
opposition, d'autres disciplines sportives bénéficient d'une
attention limitée.
« On parle de nous après six mois quand je
fais des quelques résultats dans la région et tout ça ou
même à la télé c'est pas arrivé, tu sais
régional ou départemental qui parle de tes performances si tu
arrives à faire un bon truc et tout hein ouais et après il y a
des gens qui ont encouragé sur les réseaux, il y en a d'autres
qui peuvent critiquer. » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de
commercialisation 2ème année/ Aviron)
Dans le contexte de Noé, sa présence
médiatique est le résultat de ses réussites en aviron.
Cette visibilité lui offre une reconnaissance de ses efforts et de ses
réussites, ce qui peut être extrêmement valorisant. Fraser
indique que la couverture médiatique peut à la fois servir
à valider et renforcer l'identité, l'importance et la
légitimité d'une personne ou d'un sujet, mais peut
également devenir un canal pour les critiques et l'exclusion (Fraser,
2009). Bien que les performances de Noé dans sa région ou son
département ne soient peut-être pas considérées
comme suffisamment remarquables pour susciter l'intérêt des
médias traditionnels, les réseaux sociaux constituent une
plateforme alternative où il peut attirer l'attention des utilisateurs
et recevoir des encouragements, ainsi que des critiques éventuelles.
Pour conclure, l'exposition médiatique des
étudiants athlètes d'élite sur les réseaux sociaux
présentent deux aspects. D'un côté, cela leur offre des
opportunités sans précédent en matière de
visibilité, de reconnaissance et d'avancement professionnel. De l'autre,
cela les expose à un niveau élevé de pression et de
critiques, souvent exacerbé par l'implacabilité inhérente
aux réseaux sociaux. Par exemple, certains sports plus visibles ou
bénéficiant d'un soutien institutionnel accru peuvent engendrer
une plus grande reconnaissance pour les étudiants qui les pratiquent. Le
maintien de l'équilibre entre les éloges et les critiques sur ces
plateformes numériques peut s'avérer complexe et avoir des
conséquences durables sur la santé mentale et émotionnelle
de ces étudiants athlètes. Enfin, les réseaux sociaux
permettent aux étudiants sportifs de haut niveau de développer
une identité en dehors du sport en partageant des aspects de leur vie
quotidienne, de leurs intérêts et de leurs opinions. Ces
interactions en ligne renforcent leur identité sportive,
élargissent leur réseau social et attirent l'attention des
médias.
94
DISCUSSION
1. Réponses aux hypothèses
La première hypothèse que nous avons
soulevée, consistait à affirmer que ces étudiants sportifs
de haut niveau s'attachent à mettre en avant le manque de temps et la
fatigue dans la conciliation entre le sport et les études. D'une part,
le manque de temps n'a pas été explicitement souligné par
les ESHN, mais ils précisent que chaque moment de la journée est
millimétré, comme nous l'avons bien dit avec l'approche de
l'organisation militaire. En effet, ils ont une tendance à anticiper les
échéances à venir, à optimiser leur temps
efficacement. D'autre part, la fatigue était un élément
qui pouvait revenir dans le discours de nos enquêtés, notamment
dans la description d'une journée type qui allie sport et études.
Nous avons pu constater que le stress est le mot qui revenait plus souvent que
la fatigue. Ce stress était lié généralement
à l'accumulation de deux facteurs qui pouvaient se chevaucher comme les
compétitions et les examens.
La deuxième hypothèse établie s'attachait
aux imprévus ou aléas sportifs probables chez nos
étudiants sportifs comme le surentraînement, les blessures, un
déclassement, un changement de club ou encore un
déménagement : la baisse de motivation pourrait être
observée pendant ces périodes dites d'imprévus. D'un
côté, ces aléas pouvaient engendrer une baisse de
motivation, comme la blessure, le manque de pratique sportive sur une
durée prolongée pouvait impacter psychologiquement nos ESHN
négativement. Mais d'un autre côté, certains de nos
enquêtés ont stipulé que la période de blessure
pouvait donner lieu davantage de temps à consacrer pour leurs
études.
La troisième hypothèse se concentrerait sur le
choix du sport et les études sélectionnées par ces
étudiants sportifs de haut niveau qui dépendent de l'origine
sociale et de l'influence des pairs, les vocations et la construction du projet
de vie des étudiants sont inséparables de ces influences
sociales. Nous avons l'avons vu précédemment, le sport
sélectionné par les étudiants dépend en majeure
partie du milieu social dans lequel l'individu évolue. En outre, les
parents ont un avis à donner sur leur enfant quant à la
conciliation entre le sport et les études, ceux des classes populaires
privilégient le sport alors que ceux des classes aisées ont une
méfiance vis-à-vis du sport.
Enfin, la dernière hypothèse concernait les
étudiants qui privilégient le sport aux études car les
gains potentiels dans le monde professionnel sont importants dans certains
sports. En effet, cette hypothèse est étroitement liée
à la précédente, les individus des classes populaires
seront
95
potentiellement investis davantage dans le sport. En
particulier, les sports rémunérateurs sont investis davantage par
ces individus. Bien sûr, il existe des exceptions, tous les sportifs
issus de milieux populaires ne pratiquent pas tous le football ou le
basketball. En définitive, nous avons remarqué que nos ESHN qui
pratiquent des sports très rémunérateurs, la
volonté était toujours d'allier le sport et les études
dans un certain équilibre, alors que certains ESHN des sports moins
rémunérateurs, certains privilégiaient leurs études
sur le sport.
2. Limites
Au début de notre étude, nous nous sommes
focalisés sur la gestion du temps chez nos ESHN, mais au fur et à
mesure de l'étude, nous avons remarqué que cette approche
était réductrice, et non adapté avec nos résultats
: nos entretiens et nos observations. Nous avons alors choisi de nous focaliser
davantage sur plusieurs approches diverses et variées. De plus, cette
étude a été réalisée sur une durée
qui nous ne permettait pas de pouvoir nous étendre davantage, le temps
était limité, en ce sens, nous aurions pu également faire
passer des questionnaires qui nous auraient davantage aidé pour tenter
de mieux représenter la pratique de nos ESHN à travers des
statistiques.
Autre limite que le temps, nous avons également
l'éloignement géographique, nous avons pris en compte uniquement
les ESHN de l'Université de Lorraine, il aurait été
très compliqué de réaliser des entretiens avec des ESHN
d'autres régions ou départements, sans avoir de contact physique
avec eux. Il aurait été possible d'étudier les
lycéens qui sont en sport-études et qui projettent de devenir des
ESHN dans le but de voir l'émergence de leurs pratiques.
Nous aurions pu aussi nous attacher aux devenirs des ESHN, ou
plutôt les anciens ESHN, ont-ils arrêté le sport au profit
du travail ? Est-ce que leur sport leur permet de vivre de leur passion ?
Arrivent-ils à concilier le sport et le travail ? Nous aurions pu
interroger des entraîneurs, professeurs ou même les parents des
ESHN, ils jouent un rôle primordial dans leur pratique, mais nous avons
choisi de nous focaliser sur les ESHN. Cela aurait demandé une certaine
proximité avec nos enquêtés, et en ce sens, nous avons
voulu interroger des responsables des ESHN pour permettre de comprendre le
fonctionnement global du statut des ESHN, mais cela n'a pas été
possible. Nous nous sommes contentés de regarder sur le site
dédié aux ESHN pour en savoir davantage.
Aussi, pendant les entretiens, un enquêté nous a
témoigné qu'il ne pouvait pas s'exprimer correctement en
français, car il était originaire du Luxembourg. Durant deux
entretiens, nous
96
avons été coupés plusieurs fois, car nous
étions positionnés dans des couloirs de campus universitaires
où il y avait trop de bruit.
97
CONCLUSION
En guise de conclusion, ce travail de recherche a permis de
dévoiler la complexité et la multiplicité des
expériences vécues par les étudiants sportifs de haut
niveau (ESHN). Pour évoluer et se maintenir en tant que sportifs
étudiants, ces derniers ont besoin de naviguer à travers une
série d'éléments personnels et externes. Ils
modèlent leur expérience unique dans le monde du sport.
Les divers milieux auxquels l'athlète appartiennent,
incluant la famille, les coachs, les institutions sportives et
éducatives, ont une influence considérable sur sa trajectoire
dans le sport et les études de ces individus. L'importance du soutien de
l'entourage pour nourrir la passion pour le sport, l'effet de la discipline et
de l'organisation pour conserver leur statut d'athlète de haut niveau,
tous ces éléments interagissent et se renforcent mutuellement
dans la construction de ces sportifs d'élite. Il est toutefois important
de noter que chaque ESHN vit ces expériences de manière unique.
Les ressources à leur disposition, les possibilités de
financement et de soutien, et leur statut spécifique varient grandement
en fonction de divers facteurs, y compris leur contexte socioculturel et
géographique. Par conséquent, la diversité des
expériences vécues par les ESHN est une réalité qui
ne peut être ignorée. Enfin, ce travail nous invite à
prendre en considération les besoins spécifiques des ESHN dans
leur parcours sportif et académique. Reconnaître leurs besoins
particuliers, leurs objectifs sportifs et académiques, et les
défis auxquels ils font face leur permet de concilier leurs engagements
sportifs et académiques de manière efficace. La trajectoire de
ces ESHN est un équilibre subtil entre passion, discipline,
opportunités et défis. La compréhension de ces dynamiques
est fondamentale pour soutenir et stimuler ces athlètes dans la
poursuite de leurs objectifs, contribuant ainsi à leur
développement tant au niveau personnel que professionnel.
Il est indéniable que la réussite
académique revêt une importance capitale pour ces
étudiants-athlètes, surtout pour ceux engagés dans des
disciplines sportives moins rémunératrices. Néanmoins,
même dans les sports les plus lucratifs, ces étudiants restent
conscients de la brièveté et de l'incertitude de leur
carrière sportive. Par conséquent, les études demeurent
souvent une priorité, apportant à la fois satisfaction
personnelle et une forme de sécurité pour l'avenir. L'engagement
dans le sport est généralement le fruit d'une passion et d'une
ambition de réussite à un niveau élevé. Cependant,
même dans les cas où le sport est privilégié,
l'importance des études n'est jamais totalement négligée.
Les compétences acquises par l'intermédiaire de leur
dévouement sportif, comme la discipline, la gestion du stress et la
98
compétitivité, sont reconnues pour leur valeur
transférable à leurs études et à leur futur
environnement professionnel. La trajectoire professionnelle des ESHN est
influencée par différents facteurs personnels, comme la passion
pour le sport, les perspectives de réussite financière,
l'importance accordée à une carrière sportive, et les
opportunités professionnelles hors du domaine sportif. Chaque ESHN est
ainsi confronté à l'équilibre délicat entre le
sport et les études, impliquant une réflexion continuelle sur
leurs aspirations à long terme. En somme, cette étude met en
lumière la nécessité de comprendre les motivations
individuelles et les trajectoires de ces athlètes afin de les soutenir
de manière plus efficace dans leur double engagement sportif et
académique.
Il est évident que le trajet des ESHN est
parsemé de multiples interactions tant dans le domaine sportif que dans
le domaine universitaire. Dans le milieu sportif, différents
professionnels tels que les entraîneurs, les
kinésithérapeutes, les préparateurs physiques et les
psychologues contribuent à la pratique des ESHN. Leur impact varie selon
le contexte spécifique, mettant en exergue le besoin d'une coordination
et d'une communication fluide entre ces différents intervenants afin
d'offrir un soutien optimal aux ESHN, en conciliant leurs engagements sportifs
et académiques. Dans le milieu académique, on observe une
variation dans le degré de reconnaissance et d'appui des enseignants et
des pairs envers le statut singulier des ESHN. Alors que certains enseignants
et camarades de classe sont compréhensifs et flexibles, d'autres se
montrent moins attentifs aux défis particuliers auxquels les ESHN sont
confrontés. Cette disparité souligne le besoin d'une
sensibilisation accrue parmi tous les acteurs du système éducatif
à la situation unique des ESHN, afin de promouvoir une prise en charge
plus adaptée de leurs besoins spécifiques. Cette conclusion
souligne l'importance d'une stratégie holistique et
intégrée pour soutenir les ESHN, qui considère tous les
facteurs qui influencent leur parcours, leur permettant ainsi d'accomplir
pleinement leur double objectif sportif et académique.
Dans le milieu universitaire, on observe une distinction
où certains membres du corps enseignant et des étudiants
apprécient et respectent les ESHN pour leur résilience et leur
énergie, tandis que d'autres insistent sur une égalité
stricte des attentes académiques, sans tenir compte de leurs engagements
sportifs. De plus, malgré le respect et l'admiration que peuvent leur
porter certains de leurs pairs, les ESHN peuvent parfois se sentir en
décalage social en raison de leurs responsabilités
athlétiques. Du côté familial, les ESHN sont
généralement considérés comme des sources de
fierté et d'émerveillement. Leur statut d'ESHN peut leur apporter
une certaine fierté, ou bien de l'indifférence dans d'autres
familles. Enfin, l'exposition médiatique de leur carrière
sportive confère aux ESHN une visibilité et une reconnaissance
99
remarquables, tout en les soumettant à une pression
intense et à des critiques, notamment sur les plateformes de
réseaux sociaux. Ce phénomène complexe exige une gestion
soigneuse pour maintenir leur bien-être mental et émotionnel, tout
en tirant parti des opportunités qui découlent de leur statut
public.
En définitive, les parcours des ESHN sont
influencés par une multitude de facteurs, notamment leur environnement
familial et professionnel, leurs milieux sportif et éducatif, et leur
visibilité médiatique. Ces divers éléments
interagissent de façon complexe, impactant simultanément leurs
objectifs sportifs et académiques. Les ESHN évoluent au sein de
ces sphères multiples, s'efforçant de trouver un équilibre
entre leurs ambitions et les défis particuliers de chaque domaine. Le
rôle des acteurs impliqués, issus aussi bien du monde sportif que
de l'université, est prépondérant pour leur
développement. Cependant, l'étendue de ce soutien est variable,
soulignant la nécessité d'une prise en charge plus
informée et adaptée à leur contexte spécifique.
Finalement, l'épanouissement des ESHN repose sur une gestion harmonieuse
de toutes les facettes de leur parcours facilite une conciliation
réussie de leurs engagements sportifs et académiques.
100
Bibliographie :
Andrews, D.L. (2001). Michael Jordan, Inc. : Sport
d'entreprise, culture médiatique et Amérique moderne tardive.
New York, Presse universitaire de New York.
Bandura, A. (1977). « Théorie de l'apprentissage
social. » Falaises d'Englewood, Prentice-Hall.
Becker, H. S. (1963). Les outsiders : Études de
sociologie de la déviance. New York, Free Press.
Berger, P. L., & Luckmann, T. (1966). La construction
sociale de la réalité : Traité de sociologie de la
connaissance. Paris : Armand Colin.
Besombes, N., Joncheray, H., Burlot, F., Dalgalarrondo, S.,
Desenfant, M. (2018). « Enquête sociologique sur les conditions de
préparation des sportifs sélectionnés pour les jeux
olympiques de Rio (2016). » Rapport de recherche. Institut National du
Sport, de l'Expertise et de la Performance (INSEP)
Blais, M. & Martineau, S. (2006). « L'analyse
inductive générale : description d'une démarche visant
à donner un sens à des données brutes. »
Recherches qualitatives, 26, 1- 18.
Boltanski, L., & Chiapello, È. (1999). Le nouvel
esprit du capitalisme. Gallimard.
Bosa, B. (2011). « Des concepts et des faits. La double
contradiction des sciences sociales. » Labyrinthe, 37,
121-147.
Boudon, R. (1973). L'Inégalité des chances.
Paris : Armand Colin.
Boudon, R. (1982). La Place du désordre: Critique
des théories du changement social. Paris: PUF.
Bourdieu, P., & Passeron, J.-C. (1970). La
Reproduction. Éléments pour une théorie du système
d'enseignement. Les Éditions de Minuit.
Bourdieu, P. (1977). Esquisse d'une théorie de la
pratique. Presses universitaires de France. Bourdieu, P. (1978). Sport
et classe sociale. Informations sur les sciences sociales.
Bourdieu, P. (1979). La distinction : critique sociale du
jugement. Minuit.
Bourdieu, P. (1986). « Les formes du capital. » Dans
J. G. Richardson (dir.), Manuel de théorie et de recherche pour la
sociologie de l'éducation (pp. 241-258). Greenwood.
101
Bourdieu, P. (1993). La misère du monde,
Paris, Le Seuil.
Bowlby, J. (1969). Attachement et perte . · Vol.
1. Attachement. Presse d'Hogarth.
Burke, L. A. (2016). Pédagogie du sport . ·
Une introduction à l'enseignement et à l'entraînement.
Paris, Amphora.
Coakley, J. (1993). Le Sport dans la Société
. · Questions et Controverses. Paris : McGraw-Hill.
Coakley, J. (2001). « Le sport des jeunes : Qu'est-ce qui
compte comme développement positif ? » Journal des questions
sportives et sociales.
Coakley, J. J. (2019). Sport dans la société
. · Questions et controverses. New York, NY : Éducation
McGraw Hill.
Cooley, C. H. (1902). « La nature humaine et l'ordre
social. » Fils de Charles Scribner.
Côté, J. (2002). L'influence de
l'entraîneur et des pairs sur le développement des enfants
à travers le sport. Dans J.M. Silva et D. Stevens (dir.), Fondements
psychologiques du sport.
Coulangeon, P., & Lemel, Y. (2009). « Les pratiques
culturelles et sportives des Français : arbitrage, diversité et
cumul. » Economie et statistique, (423), 3-30.
Cushion, C. J., & Jones, R. L. (2006). « Pouvoir,
discours et violence symbolique dans le football professionnel des jeunes : Le
cas du club de football Albion. »
Debois, N., Ledon, A., & Wylleman, P. (2015). « Une
perspective de cycle de vie sur la double carrière des athlètes
masculins d'élite. » Psychology of Sport and Exercise, 21,
15-26.
Defrance, J. (2011). « III. La culture sportive. »
Dans : Jacques Defrance éd., Sociologie du sport (pp. 50-70). Paris: La
Découverte.
Delalandre M. et Demeslay J., 2015. « Prises sur le futur
et articulation des temporalités chez les sportifs de haut niveau
», Temporalités [En ligne], 22.
Demazière, D., & Samuel, O. (2010). « Inscrire
les parcours individuels dans leurs contextes. »
Temporalités: Revue de sciences sociales et humaines
Dubet, F. (2002). Le déclin de l'institution.
Paris : Seuil.
Dunning, E. (1999). Le sport compte . ·
Études sociologiques sur le sport, la violence et la civilisation.
Routledge.
102
Durand-Bush, N., Salmela, J. & Thompson, K. (2004). « Le
rôle joué par les parents dans le développement et le
maintien de la performance athlétique experte. » Staps,
no<(sup> 64), 1538.
https://doi.org/10.3917/sta.064.0015
Duret, P. (2012). « Le sport de haut niveau. » Dans :
Pascal Duret éd., Sociologie du sport (pp. 72-96). Paris cedex
14: Presses Universitaires de France.
Durkheim, É. (1893). De la Division du travail social.
Paris : Félix Alcan. Durkheim, E. (1895). Les règles de
la méthode sociologique. Paris : F. Alcan.
Elliot, A. J. (1999). Motivation d'approche et de fuite et
objectifs de réussite. Psychologue éducateur.
European Commission. (2013). « Lignes directrices de l'UE
concernant la double carrière des athlètes : recommandations pour
des mesures en faveur de la double carrière dans le sport de haut
niveau. » Luxembourg : Office des publications de l'Union
européenne.
Festinger, L. (1957). Une théorie de la dissonance
cognitive. Stanford, CA : Stanford University Press.
Fleuriel, S. (1997). « Sport de haut niveau ou sport
d'élite ? La raison culturelle contre la raison économique :
sociologie des stratégies de contrôle d'État de
l'élite sportive. » Thèse de doctorat, Sociologie,
Université de Nantes, France.
Fleuriel, S. (2013). « 2. L'invention du sport de haut
niveau. » Dans : , S. Fleuriel, Le sport de haut niveau en France:
Sociologie d'une catégorie de pensée (pp. 25-35). FONTAINE:
Presses universitaires de Grenoble.
Fraser, N. (2009). Les échelles de la justice :
Réinventer l'espace politique dans un monde globalisé. New
York, NY : Columbia University Press.
Frick, B. (2007). Le marché du travail des joueurs
de football : Preuves empiriques des grandes ligues européennes.
Paris : L'Harmattan.
Gamache, R. (2015). Une histoire des moments forts du
sport : Des actions rejouées d'Edison à ESPN. McFarland.
Gaston-Gayles, J. L. (2005). L'expérience des
étudiants-athlètes. Nouvelles orientations pour les services
aux étudiants.
103
Giddens, A. (1984). La constitution de la
société : Esquisse d'une théorie de la structuration.
University of California Press.
Giulianotti, R. (2004). Sport : Une sociologie
critique. Polity.
Goffman, & Castel Robert. (1968). Asiles:
études sur la condition sociale des malades mentaux et autres reclus.
Les Éditions de Minuit.
Goffman, E. (1956). La mise en scène de la vie
quotidienne. Édimbourg : Université d'Edimbourg.
Harvey, J. (2003). Sport et exclusion sociale.
Londres. Routledge.
Harvey, J. (2005). Le sport et l'éducation :
Développement, socialisation et apprentissage. Éditions De
Boeck.
Holt, N. L., Kingsley, B. C., Tink, L. N., & Scherer, J.
(2008). Le développement positif des jeunes à travers le
sport. Routledge.
Homans, G. C. (1961). Le comportement social : Ses formes
élémentaires. New York, NY : Harcourt, Brace & World.
Honneth, A. (1992). La lutte pour la reconnaissance.
Paris, France : Cerf.
Houlihan, B. (2005). « Politique sportive du secteur
public : Développement d'un cadre d'analyse ». Revue
internationale de sociologie du sport.
Houlihan, B., et Green, M. (2008). Développement
comparatif du sport d'élite. Elsevier.
Hughes, R., Coakley, J. (1991). « Déviance
positive chez les athlètes : les implications de la surconformité
à l'éthique sportive ». Revue de Sociologie du
Sport.
Hutchins, B., & Rowe, D. (2012). Le sport
au-delà de la télévision : Internet, médias
numériques et l'émergence du sport médiatique en
réseau. Routledge.
Jones, G., Armour, K., & Potrac, P. (2004). Cultures
d'entraînement sportif : De la pratique à la théorie.
Routledge.
Maguire, J., Falcous, M., Liston, K., & Long, J. (2002).
« La relation d'emploi dans le sport professionnel : Une analyse du
processus de travail ». Revue internationale de sociologie du sport,
37(4), 391-408.
104
Malcolm, D., & Scott, A. (2011). « Relations
professionnelles dans les soins de santé sportifs : Réponses en
milieu de travail aux changements organisationnels ». Social Science
& Medicine.
Martin, E. (1992). La femme dans le corps : Une analyse
culturelle de la reproduction. Beacon Press.
Marx, K., & Engels, F. (1848/2002). Le Manifeste du Parti
communiste. London : Penguin Classics.
Mathilde Julla-Marcy, Fabrice Burlot et Fanny Le Mancq, «
Socialisations temporelles dans le sport de haut niveau »,
Temporalités [En ligne], 25 | 2017, mis en ligne le 21
septembre 2017, consulté le 03 janvier 2023. URL :
https://doi.org/10.4000/temporalites.3713
Mead, G. H. (1934). L'esprit, le moi et la
société. Presse de l'Université de Chicago.
Merton, R. K. (1957). Théorie sociale et structure
sociale. Free Press.
Messner, M. (2009). Tout est pour les enfants : Genre,
familles et sports de jeunesse. University
of California Press.
Meyer, J. W., & Rowan, B. (1977). « Les organisations
institutionnalisées : la structure formelle comme mythe et
cérémonie. » Journal Américain de
Sociologie.
Moret, O. (2017). « Carrière et
après-carrières des hockeyeurs suisses dans un contexte de
professionnalisation de la pratique » Thèse de doctorat,
Université de Lausanne.
Lemieux, C., Mignon, P., Burlot, F., Lefevre, B., Donzel, J.,
et al. (2006). « Être entraîneur de haut niveau : Sociologie
d'un groupe professionnel entre marché du travail fermé et
marché du travail concurrentiel. » Institut National du Sport
et de l'Education Physique.
Olivier de Sardan, J-P. (1995). « La politique du
terrain. Sur la production des données en anthropologie. »
Enquête,1,1-25.
Parlebas, P. (1999). « Jeux, sports et
sociétés: Lexique de praxéologie motrice » [en
ligne]. Paris : INSEP-Éditions.
Papin, B. & Viaud, B. (2018). « « Sportif sinon
rien ? ». Les destins scolaires des élites sportives
engagées dans des études supérieures.
» Sociologie, 9, 235-252.
https://doi.org/10.3917/socio.093.0235
Perritaz, A., Brefeil, J., Sell, Y., Lufft, T., Andrusyszyn,
C., Solley, G., ... Callède, J. (1993). « Thème 1 : Le sport
des étudiants : Quelques perspectives concernant la France. In
105
Callède, J. (Ed. ). Le sport, l'université,
l'Europe. Maison des Sciences de l'Homme d'Aquitaine.
Piffaretti, M. (2006). « Abandon du sport de
compétition chez les jeunes : Etude longitudinale dans les Classes
« sport et danse » du canton de Genève » Genève :
Service de la recherche en éducation physique et sportive.
Queval, I. (2004). « Axes de réflexion pour une
lecture philosophique du dépassement de soi dans le sport de haut
niveau. » Mouvement & Sciences Sociales.
Rojek, C. (2001). Célébrité.
Londres : Reaktion Books.
Rowe, D. (2004). Sport, Culture et Médias : La
trinité indisciplinée. Open University Press. Rowe, D., et
al. (2010). Le sport au-delà de la télévision.
Routledge.
Simons, J., Van Rheenen, D., & Covington, M. (1999).
« Motivation académique et l'étudiant-athlète ».
Journal du développement de l'étudiant universitaire.
Shakespeare, T. (2013). Les droits et les erreurs des
personnes en situation de handicap revisités. Routledge
Smith (2019). « Santé mentale chez les
athlètes d'élite : une prise de conscience accrue
nécessite un cadre d'intervention précoce pour répondre
aux besoins des athlètes. » Sports Medicine.
Stambulova, N. B. (2010) « Conseil aux athlètes en
transition de carrière : la stratégie de planification de
carrière en cinq étapes. » Journal de la psychologie du
sport en action, 1(2), 95-105.
Stevenson, B. (2010). « Au-delà de la salle de
classe : Utiliser le Titre IX pour mesurer le retour aux sports au lycée
». La Revue d'économie et de statistique
Tajfel, H., & Turner, J. C. (1979). « Une
théorie intégrative du conflit intergroupe. » In W. G.
Austin & S. Worchel (Eds.), La psychologie sociale des relations
intergroupes.
Wacquant, L. (2002). Corps et âme : Carnets
ethnographiques d'un apprenti boxeur. Éditions Agone.
Weber, M. (1922/1978). Économie et
société : Aperçu de la sociologie interprétative.
University of California Press.
106
Wilensky, H. L. (1964). « La professionnalisation de tout le
monde ? » Journal Américain de Sociologie, 70(2),
137-158.
Wylleman, P., Reints, A., & De Knop, P. (2013). « Une
perspective développementale et holistique sur la carrière
sportive. » In L. Wei (Ed.), Résumés de l'ISSP.
Wylleman, P., Verdet, M.-C., Lévêque, M., De Knop,
P., & Huts, k. (2004). « Athlètes de haut niveau, transitions
scolaires et rôle des parents. » STAPS, 64, 71-81.
Webographie :
INSEE, « Les jeunes du Grand Est : une multitude de profils
et des conditions de logement hétérogènes selon les
territoires ».
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4627180#documentation
INSEE, « Sportifs de haut niveau »
https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1781
Université de Lorraine, « Sportifs de haut niveau
»
https://www.univ-lorraine.fr/la-vie-a-luniversite-de-lorraine/sportifs-de-haut-niveau/
107
ANNEXE
Grille entretien exploratoire
Bonjour, dans le cadre de mon master de sociologie, je travaille
sur les étudiants sportifs, à savoir, la conciliation entre le
sport et leurs études.
Serait-il possible que j'enregistre l'entretien ? Ton anonymat
est garanti, je me servirai de ce que tu me diras mais je transformerai les
noms, les lieux...afin que tout soit anonyme.
Données générales
- Peux-tu me raconter ton parcours sportif ?
- Quel sport pratiques-tu actuellement ? Où t'entraines-tu
?
- As-tu pratiqué d'autres sports que celui-ci ?
- Peux-tu me parler de ton coach ? Relation, motivation,
confiance
- Peux-tu me parler de ton parcours scolaire ?
Motivation sport
- Quels ont été les moments
marquants de ton parcours sportif ?
- Qu'est-ce qui te motive dans ta pratique sportive ?
- Quel rôle ont joué tes parents dans ta pratique
sportive ? Tes amis ?
- Quels sont les autres personnes qui t'ont motivé ?
Entraineurs ? Partenaires entrainement
Conciliation entre le sport et études
- Peux-tu me raconter une de tes journées ?
- Comment est organisé ton emploi du temps ?
- Comment fais-tu pour gérer le sport et les études
en même temps ? Il y a-t-il des aides
particulières ?
- Quelles stratégies mets-tu en place pour gagner du temps
dans la journée ?
- Combien de temps passes-tu pour pratiquer ton sport par semaine
? Assister aux cours ?
- Combien de temps passes-tu pour réviser, travailler sur
tes cours ?
- Combien de temps accordes-tu pour voir tes amis en dehors des
cours ou du sport ?
- Combien d'heures dors-tu par nuit en moyenne ?
- Quel relation entretiens-tu avec les professeurs ?
108
- Quels rapports entretiens-tu avec les autres étudiants
?
- Comment les étudiants sportifs de haut niveau sont
perçus dans tes études ?
- Fais-tu usage des réseaux sociaux ? Comment tu les
utilise ? Comment es-tu perçu ? Qu'est-ce que cela te procure ?
Vos projets
- Peux-tu me parler de tes projets professionnels ?
- Peux-tu me parler de tes projets sportifs ?
- Qu'est ce qui te motive ?
- Comment tu t'y es pris pour choisir ta formation ?
- Qu'est-ce qui t'as aidé à faire ton choix de
formation ?
- Tes choix de formation et tes choix sportifs ont-ils
changé au cours du temps ?
- Quels services t'as aidé dans tes projets sportifs et
professionnels ?
Obstacles et ressources
- Quels ont été les obstacles que tu as
rencontrés ? Quelles difficultés au
quotidien rencontres-tu ? Quelles sont les périodes les
plus difficiles ?
- Comment gères-tu les blessures ? Impact sur
études, motivation, travail ?
- Quels ont été tes qualités
personnelles-t-ont été utiles pour concilier les deux ?
- Quelles ressources t'ont été utile ? La famille,
les entraîneurs, l'école...
- Programmes ou dispositifs ?
Famille
- Quel âge as-tu ?
- Où as-tu grandi ?
- Tes parents, travaillent-ils ?
- As-tu des frères et soeurs ? Ont-ils aussi une pratique
sportive ?
- Comment ta pratique sportive est-elle perçue ? Comment
ils te perçoivent ?
- Est-ce que tu voulais rajouter quelque chose ? Un point, un
sujet que nous n'avons pas abordé, mais que tu aurais envie de partager
?
109
Je te remercie du temps passé pour cet entretien, si tu
as des questions si tu veux revenir sur quelque chose tu peux bien sûr me
contacter.
Merci encore et je te souhaite une bonne journée !
![](Concilier-sport-de-haut-niveau-et-etudes2.png)
110
Répartition des ESHN en fonction de la
filière sélectionnée au sein de l'Université de
Lorraine (2021/2022)
UFR Sciences humaines et...
UFR Sciences Humaines et...
UFR Faculté de Droit, sciences...
UFR de Sciences...
UFR de Mathématiques,...
UFR Arts, lettres et langues - ...
Polytech Nancy
IUT Nancy-Charlemagne
IUT de Nancy-Brabois
IUT de Metz
IUT de Longwy
Institut national supérieur du...
Filière d'études
Institut des sciences du...
ILFMK
IAE Nancy - School of...
Faculté d'Odontologie
Faculté des Sciences et...
Faculté des sciences du sport...
Faculté de Pharmacie
Faculté de Médecine
Faculté de droit, économie,...
École nationale supérieure en...
École nationale supérieure...
École nationale supérieure...
École nationale supérieure...
École nationale d'ingénieurs...
École européenne...
Département STAPS UFR de...
Département de la Première...
Cycle préparatoire...
11
4
6
2
3
2
2
14
10
4
1
6
2
3
5
1
6
87
1
3
4
2
2
3
2
3
2
35
2
5
0 20 40 60 80 100
Effectif
Source : Université de Lorraine. Traitement : Teva
FAKATAULAVELUA
111
Nom
|
Age
|
Sexe
|
Etudes/ Formation
|
Sport pratiqué
|
Métier père/mère
|
Priorité donnée
|
Déd an*
|
Durée
|
Contexte
|
Akim
|
24
|
M
|
L2 STAPS
|
Athlétisme 100m 200m 400m
|
Ouvrier à l'usine/
Mère au foyer
|
1 Travail
2 Sport
3 Etudes
|
Non
|
1 h
|
Salle de cours (STAPS)
|
Nadège
|
21
|
F
|
M1 Histoire
|
Aviron
|
Infirmier/ Assureur
|
1 Sport et études
|
Non
|
1 h 10 min
|
Salle de cours (Faculté de Lettres)
|
Lola
|
26
|
F
|
Master de psycho obtenu
|
Athlétisme 400m
|
Directeur association/
Prof de sport
|
1 Sport et études
|
Non
|
1 h
|
Salle de travail
(Résidence)
|
Laurie
|
21
|
F
|
IAE School Management 2ème année
|
Athlétisme Saut en hauteur
|
Ouvrier SNCF/ Assureur
|
1 Etudes
2 Sport
|
Non
|
1 h
|
Salle de travail
(Résidence)
|
Abdel
|
19
|
M
|
L1 STAPS
|
Handball
|
Informaticien / Mère au foyer
|
1 Sport
2 Etudes
|
Oui
|
1 h 05 min
|
Salle de cours (STAPS)
|
Paula
|
21
|
F
|
IUT - DUT GEA 2ème année
|
Marche athlétique
|
Ouvrier à l'usine/ Infirmière
|
1 Sport
2 Etudes
|
Oui
|
1 h 05 min
|
Salle de cours (IUT)
|
Noé
|
19
|
M
|
IUT - Technique de commercialisati on 2ème
année
|
Aviron
|
Ancien tennisman professionnel /Commercial
|
1 Sport et études
|
Oui
|
1 h 20 min
|
Salle de cours (IUT)
|
Henri
|
22
|
M
|
Faculté des sciences - L2 Maths
|
Tir à l'arc
|
Assureur/ Assistant familial
|
1 Sport et études
|
Non
|
1h 10 min
|
Couloir (Faculté des Sciences)
|
112
Danilo
|
24
|
M
|
L3 STAPS
|
Basket
|
Ouvrier BTP/ Vendeuse magasin
|
1 Sport
2 Etudes
|
Non
|
50 min
|
Salle de cours (STAPS)
|
Clémentine
|
19
|
F
|
L1 STAPS
|
Natation
|
Infirmier/ aide- soignante
|
1 Etudes
2 Sport et travail
|
Oui
|
1 h
|
Salle de cours (STAPS)
|
Odilon
|
19
|
M
|
IDMC - L3 MIASHS option MIAGE
|
Escrime
|
Gérant station- service/ ERUN
|
1 Etudes
2 Sport
|
Non
|
1 h 05 min
|
Salle de cours (IDMC)
|
Alphonse
|
21
|
M
|
M1 MEEF - STAPS
|
Football
|
Retraité, ancien vendeur magasin/ infirmière
|
1 Sport et études
|
Non
|
50 min
|
Salle de cours (STAPS)
|
Mandy
|
20
|
F
|
L3 STAPS
|
Football
|
Ouvrier/ Masseuse
|
1 Sport et études
|
Non
|
1 h
|
En extérieur (STAPS)
|
*Dédouble son année
|
|