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Thèse unique de doctorat criminologie.


par Jean Noel PacàƒÂ´me KANA
Université Félix Houphouet Boigny d'Abidjan - Doctorat en Criminologie 2019
  

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1 Présentation des acteurs

On distingue parmi les entités qui interviennent dans la gestion des conflits fonciers à Sinfra, les acteurs extra-judiciaires (1) des acteurs judiciaires (2).

1.1. Acteurs extra-judiciaires

Ce sont entre autres la chefferie traditionnelle (1), le comité de gestion foncière rurale (2) et les autorités administratives (3).

1.1.1. Chefferie traditionnelle

L'article 31 de la loi n°2014-451 du 05 Août 2014 portant orientation et organisation générale de l'administration territoriale dispose que « le village est l'entité administrative de base qui est dirigé par une chefferie traditionnelle dont les compétences s'apparentent à celles d'un magistrat local ».

Pour mieux appréhender ces compétences, il serait judicieux d'évoquer succinctement le fondement juridique (1), les attributions (2) et l'organisation (3) de cette chefferie traditionnelle.

1.1.1.1. Statut juridique

Selon l'article 2 de la loi n°2014-428 du 14 Juillet 2014 portant statut des rois et chefs traditionnels « ont la qualité de chef traditionnel, les autorités traditionnelles ci-après : les rois, les chefs de province, les chefs de canton, les chefs de tribu et les chefs de village ». Ils sont désignés selon les us et coutumes de leurs différentes localités (art 3) et bénéficient de privilèges portant sur la possession d'une carte identificatoire, la décoration en cas de mérite et un rang protocolaire lors des cérémonies publiques (art 4). A cela, s'ajoute la protection dont ils font l'objet, contre toute forme de menaces, d'outrages, d'injures et de violences dans l'exercice de leurs fonctions (art 5).

Les chefs traditionnels appartiennent à la famille de la Chambre Nationale des Rois et Chefs Traditionnels qui disposent d'un chapelet de missions dont les principales, restent l'élaboration du répertoire des chefs traditionnels ivoiriens, le respect du statut des chefs, la favorisation des échanges culturels, la protection du patrimoine culturel

Dans une dynamique ascendante et descendante, les chefs traditionnels constituent le relais entre l'administration et les administrés. A ce titre, ils doivent conjointement

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ivoirien et la prévention, la médiation et la gestion des crises et conflits inter-ruraux (art 9).

1.1.1.2. Attributions

Les chefs traditionnels, selon la loi n°2014-451 du 05 Août 2014 portant orientation et organisation générale de l'administration territoriale, disposent de compétences plurielles :

? En matière de Police Générale : Ils doivent maintenir l'ordre, empêcher tous les rixes et les disputes ainsi que tout tumulte dans les lieux d'assemblée publique. Ils doivent également rendre compte au sous-préfet de leurs actions et de tout fait tendant à troubler l'ordre public.

? En matière de Police rurale : Les chefs traditionnels doivent veiller à la protection des cultures, des plantations et des récoltes notamment en empêchant qu'elles soient détruites par les feux de brousse et les bétails en transhumance. Ils doivent aussi empêcher la divagation des animaux.

? En matière de voirie : Les chefs traditionnels doivent maintenir le village et ses environs immédiats en état de propriété. Ils doivent en outre veiller à la conservation et au bon entretien des pistes villageoises.

? En matière d'hygiène : Les chefs traditionnels doivent veiller à la santé publique des populations et doivent signaler tous les cas de maladies contagieuses ou d'épidémie.

? En matière de justice : Les chefs traditionnels doivent concilier les parties en cas de litige. Leur mandat n'est assorti d'aucune durée et l'exerce donc à vie. Toutefois, ils pourraient l'objet de destitution pour des prises de décisions arbitraires frisant des abus de pouvoir, empêchement absolu d'exercice du pouvoir pour cause de maladie et délit portant à l'honneur de la communauté et aux bonnes moeurs. A cela s'ajoute la neutralité politique dont ils doivent preuve, l'impartialité dans les décisions et la priorisation des intérêts villageois au détriment de ceux, personnels et partisans.

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faire remonter les préoccupations des administrés auprès des administrateurs et faire appliquer les décisions gouvernementales dans le village dont ils ont la responsabilité. Ils doivent enfin être soutenus dans leurs tâches par les jeunes ruraux, les femmes, les cadres et élus ainsi que toutes les communautés présentes dans le village, dans le respect de la tradition, le rassemblement, l'humilité à l'égard des administrés et la disponibilité dans la collaboration avec l'administration locale.

1.1.1.3. Organisation

Sur le plan organisationnel, le chef T. de Blontifla (61 ans, retraité) affirme que « la chefferie traditionnelle de Sinfra se compose du chef du village et de la notabilité. Cette notabilité prend en compte le 1er notable (suppléant du chef), le secrétariat général, la trésorerie générale, les représentants des différents lignages fondateurs du village (conseillers), les personnes influentes du village qui peuvent être des anciens cadres, fonctionnaires (membres) et le garant des délimitations foncières locales (chef de terre) ».

Ces acteurs agissent tous à différents niveaux de la procédure de gestion des questions villageoises et la décision du chef de village est souvent le fruit d'une concertation avec ce collège de collaborateurs.

L'organigramme ci-dessous spécifie la position hiérarchique et le rôle de ces acteurs dans l'échelonnement hiérarchique villageois.

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Président du tribunal

Chef du village

Premier notable

Secrétariat général

Conseillers

Trésorerie générale

Membres

Chef de terre

Suppléant du chef

Secrétariat chargé de la rédaction des
procès-verbaux

Secrétariat chargé de la collecte des
fonds de la chefferie

Agents du CGFR, griot et les
proches collaborateurs du chef

Représentants des lignages
fondateurs du village

Personne censée connaître l'ensemble

des forêts et leurs propriétaires
respectifs

Figure 6 : Organigramme de la chefferie traditionnelle à Sinfra

Source : Terrain

1.1.2. Comité de gestion foncière rurale (CGFR)

Evoquer le comité de gestion foncière rurale dans notre travail, suppose évoquer succinctement sa composition (1), ses attributions (2) et son fonctionnement (3).

1.1.2.1. Composition

On dénombre selon le décret n°99-593 du 13 Octobre 1999 portant organisation et attributions des comités de gestion foncière rurale (CGFR), plusieurs catégories d'acteurs intervenant au sein de ce comité :

? Les acteurs du Ministère de l'intérieur : Préfet du département et Sous-préfet

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? Les représentants des Ministères liés à la terre (Agriculture, Environnement et forêt, logement et urbanisme, infrastructures économiques.

? Les directeurs régionaux et départementaux de l'agriculture et les commissaires-enquêteurs.

? Les Organes Villageois de Gestion Foncière Rurale (CGFR, CVGFR)

? Les Opérateurs Techniques Agréés (OTA) qui appartiennent au Bureau National d'Etudes Techniques et de Développement et les experts géomètres agréés.

Toutefois, dans cette composition, il faille distinguer ceux qui interviennent promptement (experts géomètres et les OTA du BNETD) de ceux qui siègent permanemment dans ce comité (administrateurs locaux et villageois).

Dans la composition, les OTA et les experts-géomètres qui interviennent promptement (Acteurs débout), sont sollicités en vue de certaines délimitations foncières (individualisation des parcelles) et de la pose de bornes.

A côté de cette catégorie d'acteurs, les membres siégeant (Acteurs assis) en permanence au sein de ce comité, se composent de :

? Ceux qui ont le droit de voter :

- Représentants des Ministères liés à la terre (Agriculture, Environnement et forêt, logement et urbanisme, infrastructures économiques,...).

- Représentant des services du cadastre de la direction départementale de l'agriculture.

- Six représentants des communautés rurales, des villages et des chefs coutumiers désignés sur proposition pour une durée de trois ans renouvelables.

? Ceux qui ont le droit de donner leur avis :

- Gestionnaire du Plan Foncier Rural

- Personnes concernées par les questions qui doivent faire l'objet de vote du comité.

- Représentants des comités villageois.

- Toute personne utile à la bonne fin des travaux du comité

Dans la pratique, le Sous-préfet, président du CGFR mobilise les différentes entités (ministérielles, départementales et villageoises) de ce comité, puis les dote d'outils nécessaires à l'étude, à la prévention et à la gestion de l'ensemble des dossiers fonciers sur son territoire d'exercice.

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La matérialisation de la composition du CGFR, selon les enquêtés, pourrait donner la schématisation suivante :

Sous-préfet

Acteurs débout

Acteurs assis

Experts géomètres

Opérateurs Techniques Agrées

Représentants des Ministères

Chefferie
traditionnelle

Agents
cadastraux

Figure 7 : Organigramme du Comité de Gestion Foncière Rurale de Sinfra

Source : Terrain

1.1.2.2. Attribution

Selon l'article 3 du décret n°99-593 du 13 octobre 1999, « le comité est l'organe de gestion foncière rurale ». A ce titre, il délibère obligatoirement :

? Sous forme d'avis conforme qu'il rend:

- Pour valider les enquêtes officielles de constat des droits fonciers coutumiers.

- Pour se prononcer sur les oppositions ou réclamations qui subviennent au cours des

procédures d'immatriculation des terres du domaine foncier concédé.

- Pour résoudre les conflits les conflits non-gérés au cours des enquêtes foncières.

- Pour implanter des opérations de reboisement.

- Pour implanter les projets d'urbanisation.

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? Sous forme d'avis simples sur les implications foncières des différents projets de développement rural

- Il peut être saisi pour avis simple, par les autorités compétentes de toute question relative au domaine foncier rural.

- Il peut prendre unilatéralement la décision d'étudier toute question relevant de sa compétence aux fins de propositions aux autorités compétentes.

- Il est obligatoirement informé de l'établissement des certificats fonciers et des actes de gestion les concernant.

1.1.2.3. Fonctionnement

Ce comité fonctionne de façon hétérodoxe et ne peut délibérer valablement qu'en présence des 3/4 des membres lors de la première convocation du Sous-préfet. Ce ne

sera qu'après une seconde convocation sur le même ordre du jour que ce comité délibèrera sans condition de quorum.

Les dossiers de délibérations y compris les avis et propositions du comité, sont communiqués au Préfet du département afin que celui-ci donne suite aux propositions formulées, dans un délai de deux semaines.

1.1.3. Autorités administratives

Les autorités collatérales intervenant fréquemment dans la gestion des questions foncières concernent le Préfet (1) et le Sous-préfet (2).

1.1.3.1. Préfet

Par l'ordonnance n° 2011-262 du 28 septembre 2011 portant organisation générale de l'administration territoriale de l'Etat, le Préfet du département de Sinfra est nommé par décret pris en Conseil des Ministres (Art 22). A ce titre, ses responsabilités sont nombreuses et s'étendent aux limites du département. Il doit donc veiller à l'exécution des lois, des règlements et des décisions du pouvoir exécutif, diriger, animer, coordonner et contrôler les activités des services administratifs et techniques du département et, d'une manière générale, de l'ensemble des services administratifs civils de l'Etat intervenant dans le département.

Outre cette responsabilité, le préfet doit assurer la gestion des personnels de l'Etat

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placés sous son autorité pour tous les actes de gestion courante relevant des attributions déléguées aux Ministres.

De plus, responsable de l'ordre, de la sécurité et de la salubrité publics dans le département, il reçoit, centralise et exploite toutes les informations relatives à la sureté de l'Etat, à l'exercice des libertés publiques, aux catastrophes de toute nature ainsi qu'à tout évènement troublant ou susceptible de troubler l'ordre, la sécurité, la tranquillité et la salubrité publics (Art 4).

1.1.3.2. Sous-préfet

Selon l'ordonnance n° 2011-262 du 28 septembre 2011 portant organisation générale de l'administration territoriale de l'Etat, le Sous-Préfet est le représentant de l'Etat dans la Sous-Préfecture et agit sous la subordination hiérarchique du Préfet de département (art 29). A ce titre, il contrôle, coordonne et supervise l'action des chefs de villages du territoire de la Sous-Préfecture et les activités des agents des services administratifs et techniques de sa circonscription.

Le Sous-Préfet est responsable du maintien de l'ordre public sur l'ensemble du territoire de sa circonscription administrative et peut requérir l'aide des Forces de l'ordre de sa localité si nécessaire (Art 33).

A ces tâches, se greffent celles de la convocation, de la présidence de sa sous-préfecture et de la transmission des délibérations au préfet de département (Art 32).

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"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite