2. Au plan extra-départemental
2.1. Exode rural et tares sociales urbaines
« La récurrence des litiges fonciers
observés depuis quelques temps à Sinfra, engendre des vagues de
migrations sans cesse croissantes de populations rurales de la localité
vers les grandes agglomérations telles qu'Abidjan. En effet, les
évictions foncières répétées de certaines
populations locales, les frustrations familiales et communautaires,
l'incertitude foncière, la réduction permanente des espaces de
culture, la savanisation du département, la variation, l'oscillation
permanente de pluviométrie, le déséquilibre du ratio
efforts champêtres / résultats obtenus, la paupérisation
rurale généralisée à Sinfra, la conviction d'une
situation meilleure à Abidjan, sont autant de facteurs
énumérés par les ruraux de Sinfra pour expliquer ces
vagues de migration croissantes sur Abidjan ». Cette affirmation du
Secrétaire Général de la Préfecture (Avril, 2016)
traduit que ce sont essentiellement les
157
difficultés de la vie paysanne (faiblesse de revenus,
l'insuffisance et inadéquation des services Etatiques en milieu rural)
qui expliquent cette ruée de ces populations locales vers Abidjan.
Les ruraux de Sinfra semblent ne plus se contenter de leur
situation de vie morose et restent attirés par le mirage dans cette
agglomération et de ce fait, y accourent en grand nombre,
espérant acquérir un mieux-être, de nouvelles conditions de
vie. Cependant, si l'exode rural à Sinfra est l'une des
conséquences de la saturation foncière et de la présence
exubérante des autorités locales dans l'arène
foncière, force serait de savoir que cette désertion des bras
valides villageois entraine un engorgement des centres urbains.
Pour l'enquêté B. (26 ans, Douafla, Mars, 2016)
« bon nombre de ces aventuriers pensent que l'unique voie prometteuse,
envisageable demeure l'exode rural en vue d'apporter un soutien à la
fois économique et matériel aux parents restés sur place.
Ainsi, chaque année, chaque mois ou même chaque semaine, de
nombreux ruraux désertent les campagnes de Sinfra, se dirigeant, pour la
plupart, vers la capitale économique (Abidjan) et les quelques
agglomérations (Yamoussoukro) ». Ils y nourrissent l'espoir
illusoire d'emplois faciles et parfaitement rémunérés dans
le milieu urbain et plus précisément abidjanais. Mais dans la
pratique, ces aventuriers se heurtent à une insertion professionnelle
quasi-impossible pour ces analphabètes, qui consciemment ou pas,
contribuent à accroître et alimenter les bidonvilles, lieux de
référence de la pauvreté abidjanaise.
La croissance démographique de cette
agglomération s'accompagne de problèmes nouveaux (saturation
urbaine et désurbanisation; en plus de celui de l'aménagement
technique du territoire).
Face à cette ruée des populations de Sinfra vers
cette grande agglomération nationale (Abidjan), il n'est pas rare
d'observer un surpeuplement du milieu abidjanais, des problèmes
d'organisation administrative et technique, l'habitation, l'hygiène, la
communication, l'approvisionnement en eau et en électricité ainsi
qu'en denrées alimentaires, l'évacuation des matières
usées. Bref, une surcharge des lieux et services publics.
Mais au-delà (des risques mentionnés), se
trouvent tares sociales fréquemment observées chez ces migrants
en quête de stabilité socio-financière. Ceux-ci
baguenaudent, maraudent, errent, chôment, cherchant par-ci et là
des petites activités
158
licites ou le cas échéant, illicites afin de
satisfaire les besoins vitaux. De ce fait, on observe le plus souvent une
augmentation importante du taux de criminalité urbaine, l'apparition de
bidonvilles, de quartiers précaires, des lieux de fortune où
pourraient résider ces ruraux de plus en plus enclins au commerce du
sexe (prostitution), à l'homosexualité, à la consommation
des stupéfiants, aux agressions, etc.
Ce faisant, on assiste à une dénudation de cette
jeunesse aventurière du monde rural (Sinfra), un ralentissement des
activités agricoles locales (activité réservée
désormais aux vieillards ou aux femmes) et conséquemment une
baisse de la production agricole locale.
Selon B. (39 ans, Mai, 2016), président de la jeunesse
de Djamandji « les jeunes des différents villages de Sinfra
désertent au quotidien les villages laissant les activités
champêtres à ces êtres vulnérables que sont les vieux
et les femmes. Ils pensent qu'Abidjan, ils peuvent réaliser tous leurs
voeux et y accourent de façon quotidienne. Mais lorsqu'ils n'y trouvent
pas un travail à la mesure de leur espérance, ils errent,
s'adonnent à des actes peu recommandables faute de transport pour
retourner au village ».
|