3.1.2. Travaux centrés sur les conflits fonciers
et leur gestion
3.1.2.1. Travaux centrés sur les conflits fonciers
3.1.2.2 Travaux centrés sur la saturation foncière
Dans ces écrits, les auteurs montrent l'influence de la
rareté des terres, de la croissance démographique rapide
imputée aux vagues migratoires successives et incontrôlées,
de la saturation foncière et de la pression anthropique dans le
déclenchement des conflits fonciers dans zones explorées.
Ainsi, pour Kirat et Melot (2006), dans l'analyse du
phénomène dans les contrées d'Isière,
Lorie-Atlantique et Seine-Martinique en France, les conflits d'usage renvoient
à la confrontation de préférences individuelles et
collectives sur l'allocation des espaces et des actifs naturels
localisés.
Ces conflits fonciers, révèlent des
externalités négatives induites par les changements dans
l'allocation des espaces à usage agricole, industriel,
résidentiel et récréative. Ainsi, leur nombre, leur
proximité géographique et symbolique sur le même
territoire, renforcerait la montée des antagonismes entre usagers
fonciers.
Toujours en France, Dachary, Gaschet, Lyser , Pouyanne et
Virol (2011) montrent dans une approche transversale entre côtes Basque
et Charentaise, que le foncier d'une manière générale,
fait l'objet d'une concurrence énorme entre différents usagers,
notamment dans l'agriculture et le résidentiel. Cela s'est traduit par
la pression considérable sur le littoral du fait de son
attractivité.
Ainsi, les vagues migratoires sur les territoires littoraux,
l'utilisation abusive des territoires pour la construction de logements,
l'invocation des politiques foncières, leurs carences dans la
maîtrise de l'urbanisation littorale et la multiplication des
établissements publics fonciers, sont autant de facteurs qui
expliqueraient la survenance des conflits fonciers dans le littoral
français.
57
Par ailleurs, Alkassoum (2006), dans un regard sociologique
sur les facteurs liés à l'émergence des conflits fonciers
au Burkina Faso, pense que la mauvaise gestion des ressources naturelles est
à la base de nombreux heurts dans les zones d'accueil des transhumants.
Lesquels espaces seraient à la fois disputés par les
agriculteurs, les peulhs et les transhumants.
Dans cette zone du Burkina, l'auteur dénombre 59,1% des
conflits comme ceux survenant entre autochtones agriculteurs et peulhs
sédentaires, 9,1% entre agriculteurs et transhumants, 13,6% entre
agriculteurs eux-mêmes. Cette fréquence assez élevée
des conflits fonciers entre agriculteurs et éleveurs s'explique selon
l'auteur, par le non-respect des limites des champs, la superposition des
droits revendiqués et l'usurpation des titres de
propriété.
Dans la même dynamique, Tallet et Paré (1999)
analysent les conflits fonciers dans une approche géo-statistique,
mettant ainsi en relief la variation pluviométrique et la concentration
spatiale des populations dans les zones fertiles.
Pour ces auteurs, l'évolution des conflits fonciers
sont à rapprocher des conditions écologiques. De ce fait,
l'hétérogénéité des conditions naturelles,
la variabilité des sols et la répartition
déséquilibrée de la pluviométrie (allant de 350mm
à 1250 mm de pluie par an) sont les facteurs qui expliquent
l'évolution spatio-temporelle des conflits fonciers au Burkina Faso.
La concentration des populations dans les zones
dominées par les plateaux se traduit par le fait que certaines zones
Burkinabaises soient plus productives que d'autres et de ce fait, sont plus
enclin à la survenance des conflits fonciers.
Dans les contrées malgaches, Rakotovao (2011)
révèle que le foncier est à l'origine de nombreux conflits
sociaux conduisant d'une part à des clivages et exclusion
foncière de certains groupes, et d'autre part, à un
ralentissement du développement économique national. Aussi, la
récurrence des conflits fonciers dans cette communauté malgache
a-t-elle provoqué une course vers les instances juridiques de
régulation foncière de sorte que 80% des affaires
foncières sont traitées par les tribunaux.
D'un autre point de vue, Kouamékan, Kouadio, Komena et
Ballet (2009) pensent que les inégalités socioéconomiques
observées en côte d'ivoire font désormais l'objet d'analyse
dans leurs relations avec la gestion des ressources naturelles. Cette
inégalité se retranscrit par l'accès inéquitable
des ruraux, aux ressources. Ainsi,
58
l'émergence de nombreux conflits fonciers ces
dernières années serait la résultante de cette
structuration inégalitaire de l'accès au foncier.
De ce fait, ces auteurs font ressortir que la contribution du
milieu rural à la pauvreté nationale en 2008 était de
75,4% contre 24,6% en milieu urbain (INS, 2008), révélant d'une
part que, plus de trois quarts des populations pauvres vivent en milieu rural
et d'autre part, que la pauvreté est donc plus rurale qu'urbaine en
raison de la difficulté des pauvres à accéder aux
ressources non renouvelables.
Dans cette même optique, Traore (2012) soutient que
l'absence de règlementation limitant l'accès de l'acquisition
massive des terres agricoles en Côte d'ivoire, ouvre la voie au
désordre et à l'anarchie. Les hommes politiques se procurent plus
de 200, 300 voire 500 hectares de forêt par personne, réduisant
considérablement l'espace de cultures des petits paysans, qui s'engagent
çà et là, dans de vaines tentatives de
récupération de certains lopins de terre pour subvenir à
leurs besoins.
D'un autre côté, Merabet (2006) impute la
survenance des conflits fonciers en côte d'ivoire, aux flux migratoires
successifs et incontrôlés. Pour lui, la population
étrangère a crû continument en côte d'ivoire, passant
de 1,4 millions à 4 millions en moins d'une décennie. Cette
population majoritairement Africaine provient particulièrement du
Burkina Faso, 56%, du Mali, 19,8% et de la Guinée 5,8%. La croissance
continue des allogènes, se serait faite avec des disparités
spatiales qui se sont corrélées à l'évolution des
cultures de rentes telles, le café et le cacao.
Pour Le Roy et Lasserve (2012), la situation foncière
actuelle de l'Afrique est le résultat d'une évolution. Elle est
caractérisée à la fois par une forte croissance de la
population, l'intégration à l'économie mondiale, une
augmentation significative des surfaces mises en culture, la fragilisation des
milieux naturels, une tendance à l'épuisement des sols et des
ressources en eau et enfin, l'extension des superficies occupées par les
villes. L'accroissement de la demande de terres agricoles se traduit par une
pression générale sur le foncier mettant en présence,
exploitants agricoles (paysannerie locale), investisseurs nationaux et
investisseurs étrangers.
Pour Kouamé (2013), il existe un lien entre l'ampleur
des conflits fonciers et les occupations massives de plantations de cacao et de
café. Ce sont ces occupations de plantations qui déterminent
l'ampleur ou l'extension des conflits fonciers. Cela s'explique par le fait que
les logiques économiques et politiques englobent une
59
juxtaposition d'intérêts contradictoires qui, non
seulement conditionnent les stratégies des acteurs, mais aussi et
surtout complexifient les conflits fonciers.
Selon Kouassi (2017), les conflits fonciers et leurs
rebondissements actuels s'expliquent certes par la croissance
démographique de la population ivoirienne conjuguée aux flux
migratoires élevés, mais davantage par les divergences politiques
qui se sont succédées après la mort du premier
président Félix Houphouët Boigny. Cette impasse
sociétale créée par les élites, a ouvert la voie
à un ralliement des populations en ligne identitaire, constituant de ce
fait, un terrain propice à des contradictions foncières, voir des
rixes entre communautés sédentaires du pays.
Dans un autre regard, Gausset, (2008) affirme que le sud-ouest
du Burkina Faso, relativement fertile et peu peuplé, attire depuis
quelques décennies un grand nombre de migrants internes cherchant
à améliorer leurs conditions de vie. Ce phénomène a
pris une telle ampleur que dans plusieurs localités, les «
migrants » sont aujourd'hui plus nombreux que les «
autochtones ». Un tel flux migratoire en milieu rural ne va pas
sans poser des problèmes de cohabitation entre différents
groupes, particulièrement au niveau de la gestion du pouvoir et des
terroirs. On assiste dès lors à une lutte permanente entre les
autochtones et ces migrants.
Cette idée de pression démographique est
d'autant plus soutenue par Kakule (2010) qui estime que la problématique
foncière en République Démocratique du Congo continue
toujours de susciter des inquiétudes. Les pressions démographique
et commerciale ainsi que les mouvements de retour des déplacés
internes et des réfugiés dans la période post-conflit,
engendrent une compétition très ardue pour l'accès et le
contrôle de la terre. Ces faits occasionnent très souvent des
conflits fonciers qui perturbent la paix sociale.
Pour Zadou, Kone, Kouassi, Adou, Gleanou, Kablan, Coulibaly et
Ibo (2011), la Forêt des Marais Tanoé-Ehy est
sujette à de fortes pressions anthropiques qui se traduisent par le
braconnage, le prélèvement anarchique des ressources naturelles,
l'exploitation forestière et les tentatives de défrichements
agricoles.
Ainsi, de 15 millions d'hectares de forêt au
début du XXème siècle et de douze 12 millions d'hectares
à l'indépendance, la couverture forestière de la
Côte d'Ivoire est estimée aujourd'hui à environ trois
millions d'hectares. Le manque de terres disponibles pour ces auteurs,
pousserait certaines populations à s'engager dans l'exploitation
agricole des forêts classées.
60
La situation serait encore plus alarmante dans le domaine
rural où certaines forêts de propriété commune
restent assujetties au libre accès pour une exploitation anarchique par
certains membres du groupe.
Relativement à ces auteurs, Dévérin
(2005) estime que la Côte-d'Ivoire connaît l'un des plus forts taux
d'immigration au monde: 26 % de sa population. Dans les plantations de cacao,
ce sont les burkinabé et les maliens qui collectent les fèves,
mais aussi des baoulé ou d'autres allogènes (originaires d'autres
zones de la Côte-d'Ivoire). Avec ce nombre croissant de populations
(autochtones, baoulés, burkinabè, maliens,...), le
défrichage de la forêt et l'extension concomitante des surfaces
exploitées se feront dans une opacité juridique totale avec des
empiétements fréquents des normes locales,
caractéristiques de rixes latentes.
Dans cette logique, Chauveau, Colin, Bobo, Kouamé,
Kouassi et Koné (2012) sont d'avis que le conflit ivoirien (2002-2011) a
exacerbé des tensions foncières anciennes engendrées par
d'intenses migrations agraires, notamment dans la zone forestière
ivoirienne. Cette population qui a cru rapidement sous les effets
conjugués de la poussée démographique nationale et des
migrations extérieures a engendré une pression foncière,
des fractures sociales durant l'ultime phase du conflit ivoirien.
Banzhaf et Drabo (2000) mettent en avant l'inégale
répartition pluviométrique et la concentration des populations
vers des zones moyennement alimentées en eau. Pour ces auteurs, le
processus de dégradation dont souffrent les contrées
Burkinabaises est lié à une péjoration climatique
générale à laquelle se sont ajoutés les effets
démographiques et l'immigration des populations venant des zones encore
plus touchées par la désertification. Les rapports entre ces
acteurs aux activités différentes (agriculture et
élevage), deviennent de plus en plus concurrentiels, avec une mainmise
accrue de l'activité agricole sur l'espace foncier et par
conséquent une diminution des superficies pâturables.
Dans la même orientation, Mathieu, Matabaro et Tsongo
(1994) affirment le Nord-Kivu de la République Démocratique du
Congo connait une escalade de violences foncières liées au
rétrécissement de l'espace disponible pour des paysanneries de
plus en plus nombreuses, à la dépossession foncière de ces
mêmes paysanneries, en grande partie organisée par la collusion
entre chefs coutumiers, bourgeoisies, urbaines et administrations corrompues.
Enfin, par l'incertitude et la précarité
61
croissantes des droits fonciers paysans, résultant
à la fois des pratiques foncières clientélistes et
opportunistes des chefs coutumiers autochtones.
Pour Ibo (2012), les acquisitions massives des terres
interviennent dans un contexte de saturation foncière
généralisée. Dans certaines zones comme le Sud-ouest,
notamment dans le département de Méagui, les densités de
peuplement excède 80 hab/km2 contre 48 hab/km2 au niveau national. Quant
à la densité agricole, elle est va au-delà de 100
exploitants au km2. Les agriculteurs sont obligés de replanter certaines
vieilles parcelles, pour ceux qui veulent innover.
Cet aspect de saturation foncière a été
aussi évoqué par Bonnecase (2001) pour qui, la politique
volontariste de mise en valeur de la colonie a favorisé le gonflement
des flux migratoires de populations en quête d'espaces de culture dans
les premières décennies de l'accession à
l'indépendance. Les conflits fonciers apparaissent comme une opposition
récurrente, une indexation mutuelle entre autochtones et
allogènes, ivoiriens ou non ivoiriens, ceux-ci étant
accusés par ceux-là d'occuper une terre qui ne leur appartient
pas.
Selon Chauveau, Colin, Jacob, Lavigne et Le Meur (2006),
depuis une quinzaine d'années, les problèmes fonciers se
multiplient en Afrique de l'Ouest et se caractérisent par une
marchandisation foncière croissante et une compétition accrue
entre acteurs (entre ruraux et urbains investissant dans la terre), dont la
cohabitation foncière est conflictuelle. Par ailleurs, si les
premières décennies après l'accession à
l'indépendance ont été marquées par la
cohésion entre les communautés, il n'en demeure pas moins que de
nos jours, la saturation sociale et foncière soit les signes
révélateurs d'éventuels litiges fonciers.
Pour Diakité et Coulibaly (2004), la gestion durable du
foncier rural s'avère d'autant plus problématique que la
compétition pour l'accès à la terre s'intensifie de jour
en jour sous les effets conjugués de la pression démographique et
pastorale, de la fréquence des déficits pluviométriques et
de l'évolution inquiétante du processus de dégradation de
l'environnement. Par ailleurs, la superposition du droit positif et des droits
coutumiers complique davantage la question foncière en ouvrant la porte
à toute sorte de confusions, spéculations, conflits et
procès judiciaires qui ne cessent de compromettre à la fois la
sécurité foncière et la stabilité sociale des
communautés rurales dans le nord de la Côte d'Ivoire.
62
Selon Tape (2000), les lacunes du système foncier
précédent, les enjeux économiques, la difficile
intégration sociale des populations allogènes, la saturation
sociale et foncière sont des facteurs qui contribuent fortement à
l'émergence des litiges fonciers à Soubré.
Dans cette même logique, Houdeingar (2009) pense que les
conflits fonciers au Tchad seraient favorisés par le changement des
règles d'accès et d'appropriations des terres en raison de la
croissance démographique remarquable (hausse de la valeur de certaines
terres, monétarisation des échanges et individualisation des
rapports sociaux et financiers).
Pour Ghisalberti (2011), la mobilité est la principale
caractéristique des populations sahéliennes qui, depuis des
siècles, se déplacent non seulement car leur espace d'action est
ouvert et peut favoriser les grands mouvements, mais aussi du fait des
modalités traditionnelles d'exploitation des ressources naturelles.
Dès lors, les populations migrantes fuyant des crises environnementales
liées aux sécheresses cycliques, se focalisent dans des
localités supposées propices, bouleversant ainsi l'ordre foncier
qui y est établi, par des négociations officielles et
officieuses, prophylactique à des conflits sectoriels en urbain et
rural.
Pour Mfewou (2013), les paysans migrants et la
société agro-industrielle de la Bénoué (SAIB),
installés en 2000 dans le Nord-Cameroun, à un point
névralgique pour la réalisation de son projet rizicole et
fruitier, n'ont pas valorisé l'aval du barrage hydroélectrique.
En conséquence, cette installation qui a fait déguerpir 36 % des
paysans dans ce périmètre irrigué, a occasionné une
série de conflits fonciers entre différents acteurs (paysan,
SAIB, élites, lamido, nouvelle génération) qui ont
été longtemps négligés par l'État.
Tallet (1998) soutient que l'Ouest du Burkina Faso
connaît depuis trente ans un fort courant migratoire. Il pense que
l'ampleur des défrichements, la rapidité des changements
socio-économiques bouleversent les rapports fonciers traditionnels :
multiplication des conflits fonciers, évolution des contrats
agraires.
Selon Maldidier (2000), les conflits fonciers sont
provoqués par la réorganisation du milieu rural et
l'accroissement des inégalités sociales dans les campagnes qui
ont engendré d'importantes conséquences sur le plan foncier, ont
fait naître une « pénurie » de terres, suite
à l'accentuation des mouvements migratoires au début du
63
siècle. Ainsi, la terre est devenue un enjeu d'une
compétition foncière que ce soit dans les régions
présentant un dynamisme économique marqué, ou dans
d'autres où les bonnes terres sont en faible disponibilité.
Pour Kyaghanda (2008), les conflits fonciers dans le nord Kivu
peuvent se résumer à trois facteurs à savoir la course aux
ressources naturelles, la faiblesse de la réaction de la
communauté internationale face aux crimes graves commis à grande
échelle en RDC, et enfin la prolifération des milices dues au
retrait des armées étrangères autrefois présentes
en République Démocratique du Congo.
Toutefois, Ghisalberti (2011), dans une analyse du rapport
entre migrations et conflits dans les régions sahéliennes,
souhaiterait faire la distinction entre saturation sociale et saturation
foncière. Elle pense de ce fait que ce n'est pas parce qu'il y a
saturation sociale dans l'ensemble des villages sahéliens qu'il y a
nécessairement saturation foncière dans ces village et qu'il
n'existe pas de lien direct entre saturation sociale et conflit foncier.
Dès lors, l'auteur pense les litiges fonciers au Sahel surviendraient
lorsque des migrants négocieraient certes leur installation dans des
villages de préférence mais au-delà, tenteraient de
s'intéresser et s'investir dans les activités
foncières.
Dans cette dynamique, Doevenspeck (2004) pense que l'analyse
de la question foncière au Bénin, a montré que
l'acquisition de biens fonciers par la population allogène peut mener
à une dynamisation des règles institutionnelles du droit foncier
traditionnel ainsi qu'à l'explosion des conflits latents entre les
habitants de différents villages autochtones. De plus, les débats
sur le droit foncier dans la région d'immigration ne sont pas uniquement
influencés par les conflits entre propriétaires fonciers et
immigrés mais également par les conflits entre les
différents groupes de migrants. Dans une « chasse à la
terre », ces derniers développeraient des stratégies
propres d'acquisition de droits fonciers qui engendrent de nouveaux
conflits.
Pour Yonta (2011), si les conflits surviennent et
s'intensifient dans le terroir Camerounais, c'est parce que le cours des prix,
qui allait toujours croissant, a provoqué une augmentation de la valeur
que les paysans accordaient à la propriété
foncière. De ce fait, les vieillards ont cessé d'offrir des
parcelles de grande superficie à leur progéniture. L'auteur
ajoute que non seulement les jeunes étaient surexploités dans les
plantations des cultures d'exportation, mais et surtout la rétribution
n'était pas
64
proportionnelle aux travaux effectués. Cette situation
a généré un conflit entre les jeunes et les vieux au point
où les relations de travail devenaient de plus en plus contractuelles
que communautaires. L'insatisfaction foncière des jeunes et le souci de
devenir autonomes, ont initié les mouvements migratoires des jeunes vers
les villes à la recherche d'un emploi.
Toutefois, bien que ces auteurs s'évertuent à
expliquer les conflits fonciers par la rareté des terres, le rapport
entre croissance démographique et terres disponibles, les vagues
migratoires successives et incontrôlées, la saturation
foncière, l'aspect des revendications intrafamiliales des terres par les
jeunes autochtones semble avoir été omis du discours
saturationniste. Cette faille nous amène à analyser d'autres
écrits qui considèrent les conflits fonciers comme la
résultante des effets d'accaparements claniques et de revendications
foncières par les fonts pionniers au sein de l'institution familiale
(Ibo, 2006).
3.1.2.3. Travaux centrés sur la revendication
foncière des jeunes
Ces travaux se penchent exclusivement sur le positionnement
des jeunes (déscolarisés, aventuriers, citadins,...) dans
l'arène foncière, revendiquant par ci et là des espaces de
culture à leurs ainés ou oncles. Cette revendication ne se fait
pas sans heurts aussi bien au niveau de la famille, du lignage qu'au niveau des
allogènes. C'est cette idée qui est mise en exergue par Kodjo
(2013) pour qui, la société Abouré est traversée
par des tensions autour de la distribution intrafamiliale de la ressource
foncière et surtout autour de l'héritage. Ces conflits opposent
les membres d'une même famille (neveu / neveu ou fils / neveu). Le
développement de la culture de l'ananas ayant favorisé une
monétarisation croissante de l'accès à la terre, à
travers l'ouverture d'un véritable marché locatif, procurant
ainsi aux gestionnaires des terres familiales, une rente locative importante
dont la redistribution intrafamiliale conduit souvent à des conflits
explicites qui opposent majoritairement les jeunes à leurs ainés.
Ce conflit puiserait ses racines dans les ventes occultes de parcelles
familiales, les dissensions intrafamiliales et
intergénérationnelles et dans le discours amer des jeunes tenus
contre les étrangers ayant acheté ces terres.
Pour Kana (2017), les conflits fonciers intrafamiliaux
à Sinfra seraient à la fois liés à une mauvaise
gestion des biens familiaux par l'héritier désigné des
terres et à un effet de vengeance foncière des autres membres de
la famille. Ainsi, l'auteur affirme que
65
les héritiers désignés des terres
familiales dans la tribu Sian (RCI) disposeraient de nombreux pouvoirs
familiaux dont ils abusent au quotidien pour brader les terres familiales aux
allochtones. De ce fait, les autres membres de la famille qui se seraient
sentis frustrés par ces ventes illicites, braderaient à leur tour
les portions restantes ou le cas échéant, tenteraient par des
moyens physiques et mystiques de revendiquer leur part d'héritage
foncier.
En outre, Oumarou (2008), dans une dynamique d'assimilation
des conflits de terre en un jeu de pouvoir et de légitimité,
pense que la multiplication des litiges et des conflits d'autorité
coutumière se ramène à un seul type de problème :
les différents jeux de pouvoirs et de légitimité qui
s'exercent sur le contrôle de l'espace.
Ainsi, tous les peuples disposeraient d'une série de
concepts pour parler et traiter des rapports entre eux ; l'aspect spatial de
leur organisation sociale trouve une expression ouverte en paroles et en actes.
Le manque de ces espaces lignagers d'échanges auxquels s'ajoutent les
inégalités dans la répartition foncière familiale
et les revendications plurielles des jeunes génèrent des conflits
familiaux difficilement maîtrisables.
Dans cette même perspective, Ibo (2012) pense que le
non-respect des clauses des contrats de cession de terre, le poids des
sollicitations des autochtones vis-à-vis des étrangers dans le
cadre du tutorat, la remise en cause des contrats de cession de terres par les
jeunes de retour dans les villages, favorisent les conflits fonciers dans les
contrées ivoiriennes.
Pour Toh (2010), les conflits entre populations occultent
l'existence des conflits à visée revendicative et antagonique au
sein des structures lignagères, des populations autochtones dans des
zones forestières, marquées par d'autres cultures d'exportation.
Ces conflits sont parfois très meurtriers, comparativement à ceux
généralement observés ailleurs dans le monde, mettant en
péril l'équilibre social des communautés rurales.
Outre cet auteur, Bologo (2004), dans un décryptage des
relations intergénérationnelles et intrafamiliales dans l'Ouest
du Burkina Faso montre comment dans un contexte de pression foncière,
d'affaiblissement des institutions foncières traditionnelles, les
transferts intergénérationnels et intrafamiliaux connaissent des
mutations profondes. Ces mutations se matérialisent par la manipulation
des règles d'héritage, l'individualisation des droits d'usage des
terres familiales, etc. La gestion
66
des terres familiales apparaît comme un « lieu
» de tensions, de conflits entre parents et enfants, entre
aînés et cadets et ces conflits intrafamiliaux entraînent
à leur tour assez souvent des conflits intercommunautaires.
Pour Lavigne (2016), les conflits fonciers autour de
l'agriculture se cristallisent souvent autour des transferts de droits, soit
que les évolutions amènent la nouvelle génération
à remettre en cause les accords passés par leurs pères,
soit que des ventes soient contestées par des ayants droit familiaux qui
n'ont pas donné leur accord et s'estiment spoliés. Le contenu de
la cession (vente complète ou cession de droits d'usage) ambiguë et
les réinterprétations d'accords passés ou ventes de terres
familiales sans l'accord des ayants droits, sont sources fréquentes de
conflits au Mali.
Bobo (2012), dans une étude limitée aux familles
Autochtones gbâ (centre-ouest ivoirien), montre que les tensions
intrafamiliales autour de l'héritage peuvent se transformer en conflits
intercommunautaires. L'héritage des terres est devenu objet de
compétition et de disputes qui opposent en général des
frères et éclatent lorsque l'un des héritiers
(l'ainé), disposant du pouvoir de contrôler les terres
héritées, exclut ou dispose de façon jugée
inéquitable du revenu des terres héritées,
procédant ainsi à des cessions clandestines des biens
familiaux.
Parallèlement, Zougouri (2006) estime que les
interactions entre les migrants moose avec les autochtones Nuna du Burkina Faso
se développent dans une relation d'interdépendance entre ces
migrants et leurs tuteurs Nuna. Les uns ont besoin de terres de culture et de
paix, les autres, de soutiens socio-économiques et politiques. Les
litiges qui opposent les propriétaires fonciers cédants aux
exploitants résultent du non-respect ou des interprétations
divergentes des termes des contrats de partage mais aussi et surtout des
revendications de certains ayants droits installés depuis des
décennies en ville et qui retournent définitivement au village en
s'intéressant à l'agriculture et à la gestion des terres
familiales.
Dans même optique, Kouamé (2010) met en
évidence les rapports établis entre les métayeurs et les
tuteurs dans la région des agni-Sanwi à Aboisso. Ainsi, l'auteur
pense que dans un contexte marqué par la substitution progressive de la
culture du caféier et du cacaoyer au profit du palmier à huile et
surtout de l'hévéaculture, les relations entre ces ruraux
deviennent de plus en plus conflictuelles autour du « planter-partager
» définit dans la plupart des contrats.
67
Ces conflits sont d'autant plus perceptibles au sein de la
famille, où apparaissent des dissensions portant sur des contrats de
métayage et cessions clandestins, sur la contestation de la
légitimité du droit des cédants, sur l'héritage et
sur la confiscation des plantations des défunts au détriment de
leurs descendants directs.
Chauveau, Colin, Jacob, Lavigne et Le Meur (2006) s'inscrivent
dans cette même orientation en mettant en avant la perception
transactionnelle qui est source majeure de conflits autour des «
ventes » de terre dans les contrées Burkinabaises,
Maliennes et Ivoiriennes. Ainsi, tandis que les « acheteurs
» allogènes espèrent en une transaction
définitive, les « vendeurs » autochtones,
évoquent l'idée d'une transaction partielle puisque la vente des
terres pour ces autochtones est fonction de l'origine des allogènes, de
leur date d'arrivée et des liens qui existent entre eux et les tuteurs
autochtones.
En outre, selon Bazaré (2013), la vente des terres en
pays Dida n'est pas le fait d'un choix du Dida, mais plutôt une
stratégie d'expropriation conçue et pratiquée par les
allogènes venus et bénéficiant de l'hospitalité de
ce peuple tuteur. On assiste dès lors, à des tentatives de
consolidation ou de maintien des parcelles par les uns ou les autres favorisant
ainsi, un climat conflictuel à Divo.
Kakule (2011) estime que dans les villages en R.D.C, le
processus de retour des déplacés internes et des
réfugiés dans la période post-conflit, favorise une
compétition très ardue sur la terre suivie d'une vague de
revendication des droits primaires ou secondaires entre autochtones et
allogènes. Cet enchainement de facteurs dans un cadre
d'insécurité foncière, génèrent des conflits
fonciers.
Dans cette dynamique des rixes intrafamiliales, Soro et Colin
(2008) proposent un décryptage des relations relatives au contrôle
et à la gestion de la ressource foncière, au sein de groupes
familiaux de migrants Sénoufo installés en Basse-Côte. Pour
ces auteurs, l'individualisation des droits d'usage des terres familiales ne
s'accompagne pas d'une individualisation de leur appropriation, et comment
l'accès aux terres familiales doit être apprécié au
regard des opportunités d'accès à la terre à
travers le marché foncier locatif. Ainsi, cette individualisation
recentrée exclusivement sur l'individualisation des droits d'usage et
non des droits de propriété, regroupent tous les acteurs
familiaux autour d'un héritage foncier qui fait dans la plupart des cas,
l'objet de joutes au sein de le théâtre familial.
68
Pour Ibo (2006), les conflits de terre s'expliquent par
l'apparition des « jeunes» autochtones, des anciens fonts
pionniers de Côte d'Ivoire dans l'arène foncière,
procédant régulièrement à des retraits
systématiques des allogènes, des terres que leurs parents avaient
cédées aux étrangers dans les années 1990.
Ces « jeunes » justifient leurs actions par
le manque de terre qui les contraindrait à remettre en cause les
contrats passés entre leurs parents et les étrangers.
S'inscrivant dans la dynamique de leurs
prédécesseurs, Ouattara et Dakouri (2006) estiment que
l'éveil et l'affirmation de plus en plus prononcés de la fibre
identitaire régionaliste, « autochtoniste » voire
« ethniciste » des jeunes coïncident avec la remise en
cause des contrats fonciers d'antan, ainsi que la multiplication des conflits
fonciers dans la zone forestière, entre populations autochtones,
immigrants nationaux (allochtones) et immigrants non Ivoiriens
(étrangers).
Dans cette orientation, Gnabéli (2008) affirme que la
production de l'identité autochtone réside dans un repli
identitaire des dominants (autochtones), détenteurs des terres par
rapport aux dominés (allogènes), détenteurs de biens
pécuniaires en milieu rural et urbain ivoirien. Ainsi, dans plusieurs
villages du pays, on note le maintien de certains quartiers exclusivement
réservés aux autochtones, des expropriations sans motif explicite
provoquant de ce fait des frustrations de la communauté allogène
qui, manifestées dans le cadre foncier, génèrent des
litiges.
Pour Diop (2007), les problèmes fonciers ne sont
compréhensibles que dans leur analyse en rapport avec l'histoire. Ainsi,
il pense que l'explication de beaucoup de conflits fonciers actuels en
Guinée réside dans l'acharnement des dominants à retrouver
leur domination foncière perdue sous Sékou Touré et
à la maintenir. Les dominants d'aujourd'hui sont les conquérants
d'hier, qui essaient de s'approprier les terres productives (pour la culture de
pommes de terre, culture de rente) qu'ils avaient laissées autrefois
à ceux qu'ils avaient conquis.
Dans cette optique, Maldidier (2000) affirme que les conflits
sont réanimés par le regain de pression des villes sur les
campagnes, l'irruption sur le foncier de nouveaux acteurs économiques
(tourisme ou l'activité minière, ou même certaines
activités industrielles consommatrices d'espace) et des
déscolarisés aux appétits fonciers remarquables à
telle enseigne qu'ils friseraient les abords de certains massifs forestiers
protégés ou sur des sites particuliers sur le littoral au
Madagascar.
69
Selon Mumbere (2012), l'expérience en territoire de
Lubero en République Démocratique du Congo révèle
que la terre soulève toujours de sérieux problèmes
fonciers au sein des familles dus à la succession, au partage et
à la gestion de l'héritage foncier.
Dans une autre perspective, Bobo (2012) pense que les conflits
intrafamiliaux ne naissent pas de l'héritage en soi mais sont
plutôt provoqués par la manière dont les héritiers
gèrent l'héritage et des obligations familiales qui
découlent de la détention du bien collectif.
Pour Koné (2006), il y a une campagne médiatique
autour des conflits entre autochtones et non ivoiriens en Côte d'Ivoire,
mais la réalité quotidienne montre que les litiges ou conflits
sont autant sinon plus importants entre ivoiriens membres d'une même
famille autochtone, entre générations d'une même famille
autochtone et entre générations de familles différentes.
Les conflits intercommunautaires ne sont que le reflet des tensions
intrafamiliales, de la coexistence de générations
différentes dans une même famille avec confrontations
d'intérêts (jeunes/vieux), de la transmission entre
générations (héritage) et de la constitution d'un esprit
différent communiqué par la classe des jeunes.
Outre cet auteur, Coulibaly (2015), dans l'analyse du
système matrilinéaire en rapport avec les conflits fonciers dans
la région de Sanwi, estime que l'institution matrilinéaire,
pierre angulaire de la sociabilité Agni semble se présenter comme
une niche de conflictualité majeure, au coeur de la définition
sociale du droit d'appropriation foncière. Rendue déclinante
devant des impératifs de la pression démographique au sein de la
famille, l'institution matrilinéaire cherche encore l'alchimie qui
garantit à la fois, l'égalité d'accès pour les
descendants en ligne utérine et à la ressource foncière
familiale. Dans la relation des acteurs familiaux à ce système,
on note une propension croissante des héritiers directs à des
attitudes d'évitement ou de contournement au détriment de la
sollicitation du droit positif en tant que référent de
contestation à la conquête des droits fonciers.
Pour Tano (2012), la récession cacaoyère qui a
débuté en 1980, a bouleversé les rapports de travail et de
production des populations agricoles du sud-ouest. Cette évolution qui a
consacré un modèle de subsistance, a mis à mal la
cohésion sociale familiale et inter-ethnique à travers les
conflits intra-lignagers qu'elle a engendrés. Face à cette
situation, l'auteur pense que les producteurs ne se sont pas seulement
70
contentés de trouver des moyens de résolution de
ces conflits fonciers, mais au-delà, ils ont innové des mesures
préventives.
Ces auteurs, bien qu'exposant sur les conflits intrafamiliaux,
négligent l'aspect de la discrimination foncière des femmes au
sein de l'arène familiale ou communautaire. Toute chose qui a
constitué le fondement des travaux de certains auteurs dont Doka et
Monimart (2004), qui estiment que la misogynie foncière s'explique en
amont par le rôle ménager attribué à la femme dans
l'arène familiale et villageoise et en aval par la
nécessité de réajuster ou de rechercher un
équilibre social entre la ressource foncière et les
bénéficiaires potentiels.
Pour Fatiha (2011), au Maroc, les droits fonciers des femmes
se heurtent à deux problématiques majeures : la complexité
du système foncier lui-même et le caractère
inégalitaire de leur accès. Le système foncier marocain
obéit à deux régimes : un régime traditionnel
régi par les principes de droit musulman et les coutumes, et un
régime moderne d'immatriculation foncière introduit par le
protectorat français en 1912. Dans ce contexte, l'accès des
femmes aux droits fonciers, se heurte à leur précarité
financière et au problème du partage des biens acquis pendant le
mariage et lors de sa dissolution. Ce partage n'obéit pas à des
règles précises et laisse au juge, une marge
d'interprétation avec ce que cela suppose comme part de
subjectivité.
Toujours dans cette dynamique d'exclusion foncière de
la femme, quelques auteurs évoquent les stéréotypes dont
sont victimes certaines minorités sociales. Ainsi, selon Tsongo et
Kitakya (2006), les pratiques foncières se diversifient et se
transforment sous l'effet des changements démographiques, sociaux,
politiques et législatifs. Les acteurs du foncier sont en même
temps dans le système coutumier (qui est lui-même mouvant), dans
le système moderne (ensemble des lois foncières) et dans le
changement lui-même. Et c'est cette volonté des acteurs ruraux de
se conformer aux exigences de la coutume au détriment des textes
légaux, qui crée ce stéréotype
matérialisé au moyen d'une exclusion foncière
féministe sur l'échiquier foncier.
Outre cet auteur, Nakabanda (2017) évoque une
présence trop affirmée de la coutume dans le processus
d'attribution et d'acquisition de la terre dans le terroir africain. Ainsi,
l'auteur affirme qu'étant donné que la coutume n'autorise pas la
femme à hériter des biens de son père ou de son mari, elle
acquiert la terre par l'intermédiaire
71
de ces enfants, de l'époux, ou d'une tierce personne,
nonobstant la présence d'une diversité de normes à
caractère international et national au Congo.
Dans ce registre, Faye (2008) pense qu'au
Sénégal, bien que les lois promeuvent un égal accès
à la terre pour tous les citoyens, la question du contrôle de la
terre par les femmes se pose encore avec acuité. En effet, pour
l'auteur, si la Constitution du 22 janvier 2001 stipule que « l'homme
et la femme ont le droit d'accéder à la possession et à la
propriété de la terre dans les conditions
déterminées par la loi », la réalité
parait tout autre et s'explique par le rôle culturel de la femme qui
s'inscrit dans une perspective ménagère. Dès lors,
l'auteur pense qu'en raison de cette misogynie foncière, des
stratégies alternatives sont développées par ces
dernières, le plus souvent avec l'appui des projets et programmes de
développement ou de la société civile pour un accès
plus conséquent au foncier.
Par ailleurs, Berriane (2016) affirme qu'au Maroc,
après des vagues de revendications foncières des femmes, elles
semblent par circulaire ministérielle, avoir été
intégrées dans le processus d'attribution des terres aux
ayants-droits. Mais dans la pratique, l'auteur mentionne que cette
appropriation foncière reste illusoire et les mesures d'accompagnements
de cette décision, paraissent ne pas avoir été en amont,
planifiées.
Outre cet auteur, Ouédraogo (2009) pense que la prise
en compte de femme dans le processus d'attribution des terres en milieu rural,
ne réside ni dans l'application des textes règlementaires, encore
moins de la coutume, mais dans une vision centriste et même politique qui
assemblerait à la fois des éléments du droit et de la
coutume dans une dynamique complémentaire.
Toutefois, bien que ces écrits aient le mérite
de nous introduire dans la sphère familiale pour révéler
les facteurs explicatifs inhérents à la gestion
inégalitaire voir partiale des biens familiaux, force serait de
constater que ces écrits se focalisent sur les conflits fonciers et non
sur leur gestion. D'autres contributeurs en ont fait l'objet de leurs
investigations.
Dans ces travaux, les auteurs portent un regard accusateur sur
l'Etat à travers le rôle, la responsabilité de ses
élus locaux dans la gestion des conflits fonciers. De façon
3.1.2.4. Travaux centrés sur la gestion des
conflits fonciers
72
précise, ils pensent que l'inefficacité des
systèmes étatiques d'administration
foncière, les manquements aux principes de bonne
gouvernance foncière, la partialité des dirigeants, le
désengagement de l'Etat, l'implication négative et
intéressée de certaines autorités administratives et
politiques et la pluralité d'acteurs agissants en matière
foncière, catalysent les conflits fonciers.
Ainsi, selon le Rapport Afrique n°213 du 12
février 2014, le Burundi est confronté à des
problèmes fonciers. Au lieu d'une réforme profonde des
systèmes de gestion foncière, les autorités se sont
penchées sur une simple révision du code foncier. Or, en
l'absence d'un véritable changement dans la gouvernance foncière,
les populations sont cristallisés sur le sentiment de spoliation,
rendant plus probable l'éclatement de conflits. Cette loi
révisée, paraît donc inadaptée aux
réalités rurales burundaises et s'ajoute à la mauvaise
gestion des acteurs de régulation foncière pour
générer des tensions sociales ainsi qu'un taux de malnutrition
proche de 75 pour cent.
Relativement à ce rapport, Babo (2006) estime qu'en
Côte d'Ivoire, les conflits fonciers comme celui de Tabou apparaissent
comme les prolongements de la gestion par l'État des clivages
intercommunautaires autour de la terre. L'instrumentalisation dans la gestion
de ce type de conflit, dans un environnement politique «exclusionniste
» fondé sur l'idéologie de l' «ivoirité
» dans un contexte de crise économique et sociale, a
plongé le pays dans la guerre en 2002.
Pour Bonnecase (2001), la politique volontariste de mise en
valeur des espaces est manipulée par les acteurs ruraux (migrants et
autochtones) qui s'organisent politiquement en tant que groupes porteurs
d'intérêts différents et qui, de fait, constituent des
populations cloisonnées, du point de vue démographique, social et
spatial.
Le développement d'une vie politique posée sur
des bases largement régionalistes amplifie l'antagonisme entre migrants
et autochtones, les uns et les autres ralliant des partis politiques
différents. Cette politisation des antagonismes a accentué les
rivalités entre ces communautés autochtones et allogènes
qui ne se mélangent guère.
Pour Koetschet et Grosclaude (2008),
dans de nombreux Etats africains, la question foncière
contemporaine s'enracine dans les legs de la période coloniale et les
politiques foncières mises en oeuvre après les
indépendances (qui ont souvent vu se pérenniser les
décalages entre la réglementation foncière et les
«pratiques administratives » ou « informelles
» de l'État). Ces pratiques limitent les capacités
73
d'interventions de la puissance publique en matière
foncière, provoquant ainsi une quasi-inaction de celle-ci dans la
gestion, source d'insécurité foncière dans un monde
globalisé.
Dans le contexte social Burkinabé, Ouédraogo
(2006) pense que le droit foncier « moderne »,
hérité de l'administration coloniale n'a jamais été
appliqué dans les pays développés qui l'ont introduit en
Afrique. Ce droit est resté comme « étranger »
aux yeux des populations rurales africaines, et sans lien véritable avec
les perceptions culturelles et rapports sociaux relatifs à la terre. Les
titres de propriété se sont révélés par
ailleurs inaccessibles pour la quasi-totalité des exploitants agricoles.
On assiste par conséquent à un dualisme juridique de fait (droit
coutumier et moderne) au-delà duquel apparaissent l'inefficacité
des systèmes étatiques d'administration foncière et les
manquements des autorités aux principes de bonne gouvernance
foncière, sources de litiges fonciers.
Outre cet auteur, Lavigne (2002) met en évidence les
petits contrats élaborés par les ruraux sous le regard coupable
des autorités administratives. Les urbains qui achètent des
terres veulent sécuriser leur achat et les autochtones en quête
d'argent préfèrent garder un flou sur le contenu effectif des
transactions foncières sous le regard inactif des administrateurs. Pour
lui, l'échec de la gestion des litiges fonciers seraient lié au
jeu double des acteurs administratifs qui ont maintenu et durci la
prétention du monopole étatique sur la terre en créant un
espace d'indétermination sur les règles légitimes, mais
concomitamment en ont fait un espace de jeu et de manipulation, qu'ils
investissent de façon opportuniste. Mais dans ce jeu, tous les acteurs
ruraux (autochtones, allogènes) ne sont pas égaux. Ceux qui
peuvent mobiliser ces réseaux à leur profit et ceux qui peuvent
utiliser à leur avantage une législation complexe et peu
connue.
Dans cette même optique, Dire, Keita et Togo (2008)
pensent que les divergences foncières seraient liées à une
complicité des propriétaires terriens et des autorités
communales de Bancoumana. Ces autorités sembleraient se complaire dans
une expectative, se laissant porter au gré des humeurs des
propriétaires de terre et du conseil de village qui vendent les
parcelles et engagent des procédures d'expropriation foncière des
acheteurs qui sont pour la plupart des allogènes.
74
De plus, dans une analyse conjointe des situations
foncières du Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire et Mali,
Chauveau, Colin, Jacob Lavigne Le Meur (2006) estiment que les problèmes
fonciers émergent ou réapparaissent en raison contexte
socio-foncier marqué par l'ajustement structurel et le
désengagement de l'Etat à faire face aux difficultés.
Cette démission de l'Etat se manifeste par des contradictions des
politiques publiques et des défaillances des systèmes
d'arbitrages sur les conflits.
Relativement, Kana (2014) s'est inscrit dans cette logique
d'indexation des agents de l'Etat comme ayant une responsabilité
évidente dans le rebondissement après gestion des conflits
à Sinfra. Pour lui, la pluralité d'intervenants, la
partialité des autorités, la priorisation des affinités
dans la résolution des questions foncières, se sont
corrélés à une passivité corruptive
généralisée dans le système administratif
constituant de ce fait des combustibles à l'éclatement de
nouveaux conflits fonciers à Sinfra.
Pour Dicko (2007), les conflits liés aux ressources
naturelles au Mali, ne peuvent être compris s'ils sont réduits
à des phénomènes locaux, isolés et ethniques. La
multiplicité des instances de recours en matière de
résolution des conflits, la lenteur et la lourdeur administrative, le
manque de moyens à la disposition des agents de l'Etat, ainsi que la
corruption des agents des relations sociales seraient les causes de
l'exacerbation des conflits et de l'échec en matière de
gestion.
Aussi, dans l'ouest du Burkina Faso, Bologo (2004) pense que
la multiplication des conflits qui est un indicateur de la dégradation
des relations entre acteurs, témoignerait de l'incapacité des
autorités coutumières et de l'administration locale à
réguler les modes d'accès à la terre. Ces conflits
seraient de ce fait, révélateurs d'une crise latente mais
profonde.
Aussi, les nouvelles générations d'autochtones
auraient-elles de plus en plus de mal à accéder aux terres
familiales et lignagères parce qu'elles auraient été
affectées par leurs parents à des migrants selon un processus
d'acquisition politique.
Toujours dans l'ouest du Burkina Faso, Zongo (2009) montre que
les conflits fonciers sont révélateurs des dynamismes sociales en
cours et traduisent également des capacités sociales locales
à s'approprier les éléments d'un environnement
sociopolitique et économique en pleine mutation.
Encore ajoute-t-il que les conflits fonciers expriment une
absence d'instances légitimes et légales qui renvoient
elles-mêmes aux difficultés qu'éprouve l'Etat à
faire
75
accepter ses lois (insatisfaisants et provisoires)
après avoir disqualifié et contribué à fragiliser
celles qui préexistaient.
Outre cet auteur, Keita (2012) révèle que le
marché foncier bamakois est caractérisé par une
opacité totale avec l'intervention d'une multitude d'acteurs agissant
chacun en fonction de ses moyens financiers, de l'efficacité de son
réseau social ou de son statut social. Le retrait de l'Etat comme
instance suprême de régulation à la suite de la
réforme de la décentralisation, réclamé par la
Banque Mondiale et d'autres bailleurs de fonds, a laissé le champ libre
aux logiques marchandes, affairistes et à des formes de
régulation clientélistes, sources de litiges.
Par ailleurs, De Beauvais (1991) affirme que dans la
région de l'Assaba, située dans le sud-est mauritanien, les
conflits surgissent et rebondissent vu que le contrôle de la terre est
subordonné d'une part à l'appartenance tribale et, d'autre part,
à l'insertion statutaire et hiérarchique de chaque individu et de
chaque collectivité socio-politique.
Relativement, All-Yom et Madji (2012) pensent que le Tchad
connait depuis les deux dernières décennies une recrudescence des
conflits agriculteurs et éleveurs, souvent meurtriers. Les
mécanismes mis en place pour le règlement de ces conflits sont
inefficaces, du fait du manque de volonté politique et de l'implication
négative et intéressée de certaines autorités, des
responsables politiques et militaires, laissant libre cours à des
rebondissements momentanés de ces litiges.
Kaboré (2009), dans une analyse des interactions entre
acteurs des villages du Bam et du Yatenga (Burkina Faso) montre que les
aménagements, en tant que marqueurs de contrôle foncier, sont
instrumentalisés par des acteurs détenant une position
privilégiée dans le champ social et politique local à des
fins d'acquisition de droits fonciers. Ainsi, les décisions y sont
fréquemment contestées, favorisant la recrudescence des
conflits.
Toujours, dans la perspective institutionnaliste, Leonard,
Chauveau et Lavigne (2012) révèlent que l'absence d'institutions
fortes capables d'assurer le respect des règles d'exploitation des
ressources naturelles, l'affaiblissement du contrôle de l'accès
ont abouti à des conflits, à un accès libre de fait et
à une surexploitation foncière dommageable à la
durabilité environnementale. Dans cette logique, chaque groupe d'acteurs
cherche à contrôler l'action des autres en créant des
dispositifs institutionnels et organisationnels fictifs à même
d'imposer son pouvoir.
76
Selon Mathieu, Matabaro et Tsongo (1994), les conflits au
Congo s'expliquent par le fait que la gestion foncière a
été à la fois un lieu d'enrichissement pour ceux qui
contrôlaient la terre et une cause d'inquiétude pour ceux qui ne
la contrôlaient pas, c'est-à-dire pour les paysans craignant
d'être exclus ou minorisés dans le jeu du pouvoir politique. De ce
fait, l'Etat n'arbitrait pas réellement la compétition
foncière car il n'avait ni la force, ni la légitimité, ni
la volonté, ni les ressources humaines et techniques pour le faire.
Aussi, le marché foncier était-il officiellement absent, mais en
fait, présent ou émergent sous une forme largement occulte,
imparfaite, opaque et tributaire du politique, à travers les
mécanismes de corruption et les relations clientélistes.
Dans un autre regard, Kakai (2014) impute la survenance des
conflits au Bénin à la corruption foncière des
élites urbaines, des courtiers politiques et des acteurs de
l'arène politico-administrative Béninoise. En effet, il n'y
aurait selon l'auteur, presque pas de régime politique sans scandales de
corruption, sans pillage de l'économie en général et de
l'économie agraire en particulier. Cette corruption foncière
serait bien organisée dans les arcanes du pouvoir aussi bien au niveau
local, intermédiaire que central dans une dynamique
séquentielle.
Pour Lavigne (2002), la plupart des litiges surviendraient de
la confusion des termes « coutumiers » et « moderne
» qui sont déjà très ambigus, et plus encore les
raisonnements en termes d'opposition entre « coutume » et
« modernité ». Les populations africaines en
général et celles du monde rural en particulier, tendent à
qualifier de « droit moderne » tout ce qui relève du
droit étatique écrit, même lorsque les procédures
qu'il contient, sont toutes issues du droit colonial. D'autre part, la
coexistence des normes « coutumières » et «
étatiques » dure depuis plusieurs décennies et
l'interprétation lacunaire des acteurs aussi, créent de ce fait,
des zones de confusion textuelles là où il y en a pas et des
zones de clarté là où la confusion est patente.
Dans cette dynamique, Amalaman (2015) pense que le divorce
entre légalité, légitimité et pratiques, qui
maintient une large part de la population dans une situation
d'extra-légalité s'est conjugué à l'exclusion
foncière des non nationaux réinterprétée en des
termes de xénophobie pour attiser les conflits dans la plupart des
contrées rurales de la Côte d'Ivoire.
77
Pour Desdoigts et Kouassi (2012), en dépit des
nombreuses lois promulguées, depuis l'État colonial en 1935
jusqu'à l'État indépendant en 1998, le droit coutumier ne
bénéficie plus d'aucune protection juridique et sa gestion
collective et informelle du foncier rural, fait de la résistance. En
2009, 98% des transactions foncières s'effectuent toujours dans le cadre
de la coutume et constituent pour beaucoup d'entre elles, des ventes
inachevées et inhibitrices de conflits violents.
Pour Maldidier (2000), l'insécurité
foncière au Madagascar s'explique par l'impossible aménagement de
l'espace rural et urbain, l'intensification agricole, l'aménagement, la
gestion problématique des terroirs, la pénalisation des
ressources naturelles et le manque de garanties foncières pour les
exploitants.
Dans ce même paradigme, Djiré et Dicko (2007)
mentionne que les conflits fonciers dans les contrées maliennes,
s'expliquent en amont par le handicap lié au formalisme et la lourdeur
des procédures administratives, prophylactique à des
rebondissements passagers de conflits latents et en aval, par le
développement des transactions marchandes, préjudiciables aux
groupes vulnérables.
Pour Chouquer (2011), la compréhension de la
responsabilité de l'Etat dans la genèse des litiges fonciers au
Madagascar, prend sa source depuis l'indépendance
et ses lois inadaptées au contexte évolutif
local. Pour l'auteur, depuis les indépendances, les états
n'ont, en général, pas modifié la législation sur
la terre mais ont, en revanche, cherché à maîtriser le
foncier à la fois pour s'assurer une bonne gestion, le contrôle et
la redistribution des pouvoirs dans un contexte social où ces lois se
sont révélées impraticables. Dès lors, depuis les
années 1980, des évolutions radicales se seraient produites au
point de replacer des questions foncières au rang des questions
particulièrement sensibles au Madagascar.
Par ailleurs, Kinanga (2012) révèle que dans les
contrées congolaises et plus précisément dans le
territoire de Lubero, la loi foncière parait comme étrange,
inadaptée aux moeurs et basée sur des règles difficilement
compréhensibles pour ces populations locales. Elles se sentiraient peu
concernées par cette loi et agiraient selon leur coutume sous le regard
passif des instances régaliennes résignées.
Pour Vircoulon et Liégeois (2012), depuis des
décennies, les agents fonciers au Congo sont trop peu nombreux, trop peu
formés, dépourvus de moyens matériels et logistiques et de
surcroît, corrompus. Ces défaillances ont permis à
certaines élites
78
plus aisées et mieux éduquées,
d'enregistrer massivement des terres en leur nom tandis que des groupes plus
démunis, ignorant la loi et dans l'impossibilité de payer les
frais d'enregistrement et les agents corrompus, continuent d'occuper leurs
terres de façon coutumière.
Dans un autre regard, Ferrari et Tshimbalanga (2015) pensent
que la faible représentation de l'Etat, surtout dans l'administration
foncière, l'appât du gain, la faible protection des droits
fonciers, l' attribution des concessions par l'Etat sans enquête
préalable de vacance de terre, la facilité de corrompre
l'administration foncière pour avoir de faux documents (ou de «
vrais documents » obtenus sans respect de la procédure et
avec contrepartie financière), l'usurpation de pouvoir par les
entités et autorités politico-administratives (délivrance
de titres de propriété par les services n'en ayant pas la
compétence) sont les principales causes des conflits fonciers au
Congo.
Pour Chauveau (2000), les conflits fonciers
intercommunautaires observés dans la plupart des contrées rurales
ivoiriennes, prennent leurs sources de la polémique sur l'«
ivoirité » et de l'idéologie incontestablement
xénophobe véhiculée par le pouvoir en place. Outre ce
fait, l'auteur note que la presse d'opposition a établi une nette
distinction entre la manière dont les cas de violences foncières
étaient traités « timidement » lorsque les
violences engageaient des non-Ivoiriens ou des populations originaires du Nord
et avec fermeté lorsqu'elles concernaient des Baoulé originaires
du Centre. C'est donc cette conjugaison de facteurs aux responsabilités
administratives situées, que les nordistes et des non-ivoiriens se sont
engagés dans une campagne de consolidation foncière, fondement de
la plupart des conflits fonciers en Côte d'Ivoire.
Dans cette même dynamique, Koffi (2010) pense que les
cours et tribunaux sont engorgés de dossiers de conflits fonciers,
trahissant la faible efficacité du système judiciaire. À
cela, il faut ajouter une justice inaccessible pour les pauvres, en raison des
coûts élevés des procédures, des lenteurs
administratives et de la faible couverture judiciaire du territoire national.
Le système judiciaire en principe chargé de régler les
conflits fonciers se révèle incapable de trouver des solutions
efficaces dans le contexte caractéristique des pays africains, où
des législations nationales et des coutumes se côtoient.
Dans la première approche explicative (facteurs
internes), les auteurs mettent l'emphase sur l'inefficacité des
systèmes étatiques d'administration foncière, les
79
Dans un schéma géographique différent,
Bourgeois (2009) soutient que le village est le point de départ de la
majorité des conflits qui touchent de près ou de loin la
propriété de la terre. Etant donné que les terres rurales
sont toutes sous la propriété d'un chef coutumier, on peut tout
d'abord affirmer que les conflits sont particuliers et qu'ils ne se
règlent pas toujours selon les lois d'Etat, ainsi que par la justice des
Provinces. L'échelle du village est pour autant un angle d'analyse qui
semble restreint.
Pour Machozi, Borve, Lonzama , Kahigwa et Tobie (2010),
gérer les conflits de terre, c'est réunir certaines
qualités indispensables à cette fonction d'acteur de gestion :
Etre capable de comprendre et d'appliquer les grands principes qui doivent
guider l'action des acteurs dans la résolution des conflits fonciers
(rapidité, disponibilité, justice, acceptation,
durabilité, patience), être capable de stimuler une
réflexion au niveau local sur les possibilités de modes de
résolution des conflits fonciers et explorer des stratégies pour
renforcer le travail des structures de bases dans le monitoring et la gestion
des conflits fonciers.
Dans le terroir ivoirien, Coulibaly (2006) estime que les
procédures de règlement des conflits n'aboutissent pas souvent
sur des solutions définitives malgré la compétence
relative des instances d'arbitrage en présence. Les raisons de cette
situation semblent être liées aux stratégies mises en
oeuvre par les différents acteurs lors des procédures.
Pour Matiru (2001), la gestion des ressources foncières
prend exclusivement en compte la prévention, la négociation, la
médiation, l'arbitrage, le jugement et la coercition. Le rejet ou
l'omission d'une de ses composantes entraine un dysfonctionnement dans le
processus de gestion qui se matérialise par de nouvelles oppositions et
de nouveaux conflits.
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