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MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE
SCIENTIFIQUE
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Année Universitaire :
2018-2019
ECOLE SUPERIEURE PRIVEE D'ASSURANCE ET DE
FINANCE
Mémoire de Master Professionnel
Management du Risque dans les
Assurances et les Institutions
financières
La conformité dans l'activité d'assurance
: une question d'intégrité et/ou de bonne gouvernance
d'entreprise ?
Elaboré par : FRIDHI Lotfi
Sous la direction de
Mr : BEN JEMIA Taoufik
2
Remerciements
3
En tout premier lieu, je remercie le bon Dieu, tout puissant, qui
m'a donné la volonté de réintégrer les bancs de la
faculté après quinze ans d'abandon.
Je tiens à exprimer toute ma gratitude à monsieur
BEN JEMIA Taoufik de m'avoir encadré,
orienté, aidé et conseillé.
En guise de reconnaissance, je tiens à témoigner
mes sincères remerciements à tout le corps professoral et
administratif de l'ESPAF pour les efforts qu'ils ont
déployés pour nous créer, moi et mes collègues, les
conditions les plus favorables pour la relève de ce challenge.
Enfin, un grand merci pour mes collègues pour leurs
chaleureux encouragements, pour les moments émouvants...pour leur
amitié.
4
Liste des figures
Figure 1 : La jonction de la loi et de la morale et
son impact sur le model
managérial de l'entreprise. 15
Figure 2 : Les catégories et les lignes du
contrôle interne 31
Figure 3 : Processus de gestion des risques de
non-conformité 33
Figure 4 : Modèle pour l'organisation et le
déploiement de la fonction de
contrôle de conformité 42
Figure 5 : Matrice d'évaluation des
éléments de maîtrise des risques 57
Figure 6 : Matrice de criticité 58
Figure 7 : Matrice d'évaluation du risque net
59
Liste des tableaux
Tableau 1 : Modèle de référentiel
réglementaire 51
Liste des sigles et acronymes
5
+ CGA : Comité Général des
Assurances.
+ FATCA : Foreign Account Tax Compliance Act.
+ AEAPP : Autorité européenne des
assurances et des pensions professionnelles.
+ GAFI : Groupe d'Actions Financières.
+ CC : conseil de la concurrence.
+ CMF : Conseil du Marché Financier.
+ INPDP : Instance Nationale de Protection des
Données Personnelles. + INLUCC : Instance Nationale de
Lutte Contre la Corruption.
+ BM : Banque Mondiale.
+ FMI : Fonds Monétaire International.
+ OCDE : Organisation de Coopération et
de Développement Économiques.
+ BCT : Banque centrale de Tunisie.
+ RCC : Responsable de contrôle
conformité.
+ LAB/FT : Lutte anti blanchiment d'argent et
financement du terrorisme. + FTUSA : Fédération
tunisienne des sociétés d'assurances.
+ IARDS : Incendie, accidents, risques divers et
spéciaux.
Sommaire
6
Remerciements 3
Liste des figures 4
Liste des sigles et acronymes 5
Introduction générale 7
Chapitre 1 : La dimension substantielle de la
conformité en assurance 9
Section 1 : La conformité, un socle normatif 9
Paragraphe 1 : La conformité un devoir
d'intégrité 10
Paragraphe 2 : La conformité un devoir
règlementaire 12
Section 2 : la non-conformité et les instances de
contrôle 15
Paragraphe 1: les risques encourus 16
Paragraphe 2 : les instances de contrôle 20
Chapitre 2: La dimension organisationnelle de la
conformité en assurance 29
Section 1 : La fonction de conformité, un outil de
gouvernance d'entreprise 30
Paragraphe 1 : la fonction de conformité au Coeur du
contrôle interne 30
Paragraphe 2 : Configuration et déploiement de la
structure de contrôle de conformité 38
Section 2: Les outils de la gestion de la conformité 44
Paragraphe 1 : Le référentiel réglementaire
45
Paragraphe 2 : La cartographie des risques 52
Conclusion générale 61
Bibliographie 62
Table des matières 64
7
Introduction générale
e mérite de la littérature en gestion des
risques qui s'est apparu après les scandales financiers qu'a connu le
début de de ce troisième millénaire est nous
révéler, non seulement l'insuffisance du cadre
réglementaire pour un monde des affaires en mutations
perpétuelles d'une part et la défaillance de quelques approches
managériales classiques et l'apparition d'une approche dite
«gestion par les risques1 », d'autre part, mais encore la
remonté de la réflexion sur l'éthique des affaires et la
déontologie. C'est avec cette littérature que la
compréhension des risques et leur gestion ont considérablement
évolué et il en résulte que « la dimension «
risque » vient enrichir la vision des dirigeants en complément des
axes stratégiques et opérationnels et devient un
élément de management à part entière
».2
Les prémices de cette prise de conscience ont vu le
jour au niveau international dans les réflexions qui ont
été menées au sein du comité de
Bâle II 3 et parmi les
nouveautés qui s'inscrivent dans cette perspective c'est
l'appréhension du risque de non-conformité comme étant un
risque opérationnel dû soit à une inadéquation ou
à une défaillance des dispositifs de contrôle interne de
l'organisation soit aux manquements du personnel.
Faisant écho de cette prise de conscience,
Solvabilité II 4 a modifié
en profondeur le régime existant en imposant des règles
qualitatives de bonne gouvernance et de gestion des risques qui touchent
à l'organisation même de l'entreprises d'assurance et de
réassurances.
Parmi les réformes édictées par ces
règles dites prudentielles l'obligation pour les entreprises d'assurance
et de réassurance de mettre en place un système de gouvernance
incluant la fonction de gestion des risques, la fonction de vérification
de la conformité, la fonction d'audit interne et la fonction
actuarielle5.
Sur le plan national, la Tunisie ne fait nullement exception
de ce que se passe dans le monde et pas trop tard le Comité
Général des Assurances a publié la première
directive pour l'année 20166 relatif à la
définition des règles de bonne gouvernance au sein des
entreprises d'assurances et de réassurance.
Une première lecture de cette directive tunisienne fait
montrer que le contrôle de la conformité est
considéré comme l'un des piliers de la bonne gouvernance et que
les entreprises d'assurance et de réassurance sont tenues de
créer une fonction conformité chargée principalement de
l'identification et l'évaluation du risque de non-conformité.
En définissant ce risque, le comité
de Bâle considère comme risque de
non-conformité le risque de sanction judiciaire, administrative ou
disciplinaire, de perte financière, d'atteinte à la
réputation, du fait de manquement de respect des dispositions
législatives et réglementaires, des normes et usages
professionnels et déontologiques propres à l'activité
bancaire.
1 Recommandation n° 1 du GAFI en
matière de LAB/FT « Évaluation des risques et application
d'une approche fondée sur les risques »
2 IFACI : LES CAHIERS DE LA RECHERCHE. Cartographie
des risques
3 Le comité de Bâle sur le contrôle
bancaire, est un forum où sont traités de manière
régulière (quatre fois par année) les sujets relatifs
à la supervision bancaire. Bâle II pour désigner le second
accord (juin 2004) après avoir jugé insuffisant le premier accord
de 1988.
4 Surnom de la Directive 2009/138/CE du Parlement européen
et du Conseil du 25 novembre 2009.
5 Voir le paragraphe 30 du préambule de la Directive
2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur
l'accès aux activités de l'assurance et de réassurance.
6 Décision n°1/2016 du 13 juillet 2016.
8
Plus pragmatiques, la directive Solvabilité
II et la décision n° 1/2016 du CGA ils se sont
penchés plus sur la définition du rôle et des objectifs de
la conformité. C'est à cette fonction notamment de veiller en
premier lieu au respect des prescriptions légales et
réglementaires et aux bonnes pratiques en matière
d'éthique et de déontologie et en deuxième lieu à
l'identification, l'évaluation et à la maîtrise des risques
que peut encourir l'entreprise du fait de non-conformité aux normes
précitées.
Ainsi définie, comme « caractère de ce qui
respecte les normes7 » ou encore « correspondre exactement
à la norme, à la règle générale, à
l'idéal social dominant.8 » la conformité ne doit
pas être réduite à la fameuse règle disant «
Nul n'est censé ignorer la loi ». Au contraire lorsqu'il s'agit de
la conformité on se trouve au-delà des normes, on est en
présence d'une constellation de valeurs.
La conformité est une dynamique qui ne se limite pas
aux dispositions législatives et réglementaires, elle va
au-delà pour englober en outre et les règles et processus
internes d'une part et tous les engagements unilatéralement
adoptés par l'entreprise dans un but
d'intégrité9 d'une autre part.
C'est avec certitude qu'on peut dire que la conformité
est une fonction10 par laquelle l'entreprise soumettre ses actions
à une démarche de conformité aux règles de toute
nature, externes, internes et d'éthique en vue de se prémunir
contre les risques résultants de la violation de ces règles et de
moraliser les comportements et les pratiques au sein de l'entreprise.
Ainsi, on peut admettre que le contrôle
conformité n'est pas uniquement un contrôle réglementaire
mais encore c'est un contrôle d'intégrité qui vise à
immuniser l'entreprise contre les risques opérationnels dans le cadre
d'une démarche de bonne gouvernance.
Est-il vrai, alors, peut-on de dire que le contrôle
conformité est une démarche pour la déclinaison de la
morale dans l'activité d'assurance en vue d'une bonne gouvernance ?
Bien que la réponse à cette question semble
d'emblée simple et affirmative, elle ne doit pas pour autant
négliger la complexité de cette thématique.
La conformité n'est jamais unidimensionnelle, la
jonction du réglementaire et du moral fait apparaître une
dimension substantielle très riche (Chapitre I) servant
de référentiel de bonne conduite en matière de gestion des
risques opérationnels.
De plus, et étant encore considérée comme
fonction, la conformité présente une dimension organisationnelle
évidente (Chapitre II) constituant ainsi un dispositif
de bonne gouvernance.
7 Reverso Dictionnaire.
8 Larousse.
9 Le Soft-Law, notion qui désigne: les codes de
conduite, chartes éthiques, normes déontologiques, guides de
bonnes pratiques et autres formes d'engagement volontaire des entreprises font
sans conteste partie du périmètre de la conformité
10 « On entend par fonction la capacité
administrative de remplir certaines tâches de gouvernance ».
Paragraphe 31 du préambule de la directive solvabilité II.
Chapitre 1 : La dimension substantielle de la
conformité en assurance
|
Par nature, l'action conformité revête deux
aspects, un aspect objectif qui réside dans le fait pour une entreprise
de se soumettre aux exigences d'une loi, d'un texte réglementaire, ou de
toute norme émanant d'un organisme doté d'un pouvoir de cet
ordre, et dont le non-respect pourrait être sanctionné par une
juridiction ou une autorité de régulation, et un aspect subjectif
qui reflète l'identité de l'entreprise et qui exprime sa
volonté de se doter de sa propre culture en faisant du respect de la
norme une valeur en soi.
|
C'est par référence aux valeurs que se donne
l'entreprise et aux obligations morales et sociales qu'elle s'attache à
respecter et de la nécessité de porter ces valeurs à son
plus haut niveau qu'elle peut se voir intègre.
Dès lors, c'est à la conformité
d'apporter une réponse à la question de « comment doit-on
faire ? », d'inciter les dirigeants, les administrateurs et les
collaborateurs d'une entreprise à observer leur devoir
d'intégrité.
S'agissant de la conformité en assurance, il faut
rappeler que ce secteur est considéré d'ordre public,
l'activité des assureurs est l'une des plus réglementées
et contrôlées par les pouvoirs de tutelle, c'est encore un
métier basé essentiellement sur la bonne foi et la confiance
mutuelle des deux parties, assureur et assuré, ce qui fait qu'en plus
des exigences légales et réglementaires et des prescriptions de
l'autorité de contrôle, les sociétés d'assurances et
de réassurance sont tenues d'une intégrité et d'une
déontologie professionnelle relevant exclusivement de la bonne conduite,
d'où la richesse substantielle de la conformité, qui est donc
règlementaire et morale.
Ainsi, c'est dans l'activité d'assurance que se
convergent la loi et la morale et se complètent pour former un socle
normatif (Section I), que l'entreprise doit observer, afin de
se trouve immuniser contre les répercussions d'un contrôle de mise
en conformité (Section II).
Section 1 : La conformité, un socle normatif
9
Considérée comme la fonction par laquelle
l'entreprise doit soumettre ses actions à une démarche de
conformité aux règles de toute nature, externes, internes et
d'éthique en vue de se prémunir contre les risques
résultants de la violation de ces règles et de moraliser les
comportements et les pratiques au sein de l'entreprise, la démarche de
mise en conformité repose sur un socle normatif très
diversifié, parmi ses traits les plus attrayants c'est ce chevauchement
de l'incitatif et du coercitif. Par ailleurs et au-delà de ses
obligations en tant que sujet de droit (Paragraphe 2),
l'entreprise doit faire preuve d'intégrité (Paragraphe
1).
10
Paragraphe 1 : La conformité un devoir
d'intégrité
Le devoir d'intégrité pour une entreprise doit
se vérifier dans le cadre de l'éthique des affaires qui suscite
l'organisme à traduire les valeurs en un ensemble de concepts
génériques à partager par les parties prenantes et faisant
ainsi son propre référentiel.
La réussite de la déclinaison de ces concepts
dans l'organisation et le management de l'entreprise est tributaire de la
validation et de l'adoption de ce référentiel par la gouvernance
de l'entreprise à son niveau le plus élevé et de son
sincère engagement de faire de ce référentiel un acte de
gouvernance d'entreprise. C'est de cette façon que l'entreprise acquiert
son identité dans son environnement et par le respect de ce
référentiel qu'elle peut se voir intègre. Dès lors
la bonne réputation devient une qualité pour l'entreprise et que
derrière cette qualité il y'a satisfaction d'un devoir
d'intégrité.
Pour plus de détails et pour mieux identifier les
impacts de l'intégrité sur l'image de l'entreprise d'assurance il
importe de définir ce devoir (A) avant d'en
déterminer la portée (B).
A : Définition du devoir
d'intégrité
Donnant une qualification morale ou juridique à des
actions et des relations professionnelles, les termes «
intégrité » et « conformité » dominent
depuis quelques années la terminologie de gouvernance et de management
et bien que sur le plan sémantique chacun de ces deux notions renvoie
à un champ différent, ils non jamais étaient loin l'un de
l'autre, ils se font souvent employés pour désigner le même
devoir.
Renvoyant à la notion de la vertu,
L'intégrité se définit comme une valeur morale qui sert de
référence et guide pour nos choix et nos actions, elle est
synonyme surtout d'honorabilité et de probité.
Étroitement liée à
l'intégrité, l'honorabilité désigne la
qualité d'une personne dont la conduite est conforme à une norme
morale socialement admise et reconnue, c'est le caractère de celui qui
mérite l'estime et la considération d'autrui. Pas loin de cette
définition, à son tour la probité est une qualité
morale de droiture, de bonne foi et d'honnêteté qui se manifeste
par l'observation rigoureuse des règles morales et des principes de la
justice11. C'est sur ces deux piliers, honorabilité et
probité, que la bonne réputation de l'entreprise repose.
Bien évidemment, l'adoption de ces valeurs
d'honorabilité, d'intégrité, de loyauté, de
droiture, de bonne foi et d'honnêteté par l'entreprise d'assurance
doit être traduite par leur transformation en mode opératoire et
par leur absorption dans son organisation pour qu'elles fassent partie
intégrante de son fonctionnement.
La conformité n'est donc pas uniquement le respect de
la règlementation en vigueur et des directives internes, mais aussi la
garantie d'une conduite intègre et responsable de toutes les parties
prenantes de l'entreprise. Pour qu'il soit qualifié efficace un
dispositif de gestion de la
11 La toupie "Toupictionnaire"
11
12
conformité doit faire de l'entreprise une entreprise
citoyenne dont les décisions entrepreneuriales ne soient prises
uniquement sur la base des objectifs économiques, mais en tenant
également compte de la responsabilité de l'entreprise envers la
société,
B : La portée du devoir
d'intégrité
La vérification de ces deux qualités doit se
faire à la fois pour l'entreprise et pour les dirigeants et notamment
ceux qui détiennent le pouvoir d'engager l'entreprise.
Certes que la vérification de l'honorabilité de
l'entreprise passe par la mesure du degré de respect de son
environnement12 et surtout les droits des assurés.
Dans un contrat d'adhésion généralement
non équilibré, l'assuré en tant que partie faible est
digne d'une protection que malheureusement parfois soit elle ne trouve pas
fondement dans la réglementation en vigueur, soit il est difficile de
porter preuve des manquements commis par l'assureur. Dans ce cas, seules
l'intégrité et la déontologie de l'assureur peuvent
garantir à l'assuré son droit à une protection
précontractuelle13.
C'est d'abord14 par devoir
d'intégrité que l'assureur est tenu d'une obligation
d'information et de conseil15 .dont l'objet consiste en l'obligation
faite à l'assureur de donner à l'assuré toutes les
informations (prix, caractéristiques techniques et juridiques du
contrat, droits et obligations...) de nature à lui permettre de
décider librement et en plein conscience, puis en l'obligation de le
conseiller pour l'aider à choisir le service le plus approprié
à son besoin.
Encore, ce devoir d'intégrité exige la mise en
place d'un dispositif de gestion des réclamations doté des
ressources humaines et logistique adéquates, facilement accessible et
avec des procédures claires.
Dans une logique de conformité cette structure est
appelée à jouer un rôle plus efficace qui consiste dans
l'identification des cas récurrents ou les plus graves et mettre en
places les mesures correctives suite aux dysfonctionnements et mauvaises
pratiques identifiées.
En plus de ce devoir d'honorabilité vis à vis
des demandeurs de services, les sociétés d'assurance et de
réassurance sont tenues d'une loyauté traduisant leur
fidélité à tenir leurs engagements, à obéir
aux règles de l'honneur et de la probité et de s'attacher
à la bonne foi en menant leurs relations avec les intervenants du
marché.
S'agissant des dirigeants de l'entreprise, il est certain que
les qualités de ces derniers influencent profondément la
réputation de l'entreprise, il est donc légitime de voir
l'honorabilité comme condition d'accès à la direction
d'une société d'assurance ou de réassurance. Cette
exigence d'honorabilité et de probité pour les dirigeant de
l'entreprise
12 Cette notion désigne les parties prenantes
que ce soit interne ou externe de l'entreprise.
13 Une fois le contrat est signé, les droits de
l'assuré sont présumés protégés par le
contrat et par la loi.
14 C.-à-d. avant qu'il soit un devoir
légal, bien qu'il n'ait pas un fondement juridique explicite
15 L'obligation d'information et de conseil ont
pour fondement le déséquilibre existant entre les connaissances
de chaque contractant lors de la négociation d'un contrat ainsi que lors
de son exécution. Ce déséquilibre est en principe
présumé en raison de l'inégalité qui apparaît
dans les compétences, notamment entre des professionnels et des
consommateurs.
d'assurance n'est plus uniquement d'ordre moral mais encore
d'ordre légale et règlementaire16.
Généralement la portée de ce devoir ne se
limite pas à la protection de la clientèle et le respect de la
déontologie du métier et des pratiques de marché elle
s'étend plus loin en vue d'assurer la sécurité
financière de l'entreprise et garantir la fiabilité de
l'information financière.
L'objet de ce devoir d'intégrité, rend crucial
pour l'entreprise d'assurance et de réassurance, pour des fins de bonne
gouvernance et sous peine d'un risque de mauvaise réputation, d'observer
scrupuleusement un ensemble d'obligations trouvant leurs origines dans les
bonnes moeurs avant qu'ils soient d'ordre juridique.
La bonne gouvernance exige que les objectifs de l'entreprise
d'assurances et de réassurance ne se limitent plus à la
maximisation des profits et la réalisation des bénéfices
mais élargis à d'autres objectifs d'ordre qualitatif qu'il y a
lieu d'adopter et d'en planifier la réalisation. Encore faut-il alors
croire à la moralisation de l'action de l'entreprise pour garantir sa
pérennité, et considérer que le devoir
d'intégrité est étroitement lié au risque d'image.
Dès lors l'intégrité n'est jamais une contrainte il s'agit
réellement d'une opportunité
Paragraphe 2 : La conformité un devoir
règlementaire
Il importe de s'interroger si la vérification de la
conformité pour une entreprise d'assurance ou de réassurance se
limite-t-elle à l'activité d'assurance et de réassurance
c'est-à-dire aux pures opérations d'assurance ou doit-elle
être élargie pour l'ensemble des domaines de la gestion pour en
faire une approche intégrée pour l'entreprise ?
Avant de donner une réponse traçant les contours
de la conformité règlementaire en assurance (B)
il y'a lieu de définir ce devoir (A).
A : Définition du devoir
règlementaire
Comme nous l'avons vu précédemment, la
conformité réglementaire désigne la soumission à
une norme juridique, en principe, de caractère impératif,
associée d'une sanction socialement organisée en cas de
non-respect. Cette norme juridique est élaborée et adoptée
par le législateur ou une autorité dotée du pouvoir
réglementaire, et les exigences imposées doivent avoir une nature
contraignante car ils s'accompagnent d'un système de sanctions pouvant
être prononcées par une juridiction ou par une autorité
désignée par la norme elle-même.
Et c'est grâce à l'inflation législative
qu'a connu le secteur des assurances et de réassurance durant ces
dernières années et la complexité de l'environnement
règlementaire en générale qu'une prise de conscience du
risque de non-conformité règlementaire a eu lieu quant au
management des entreprises. Mais pour être plus fidèle en
décrivant cet environnement règlementaire et pour mettre en avant
cette complexité, il faut noter que les normes auxquelles les
sociétés d'assurances et de réassurance sont tenues de se
soumettre sont de diverses
16 Voir l'article n° 193 du
code des sociétés commerciales, l'article 85 du code des
assurances et les dispositions du titre 8 du projet de révision et
modification du CA
13
sources, au point qu'on a entendu parler de Soft
Law (par opposition à la Hard Law
qui désigne la loi sous sa forme traditionnelle) pour
désigner un ensemble de textes hétérogènes comme
les chartes, les codes de déontologie, les règles de conduites,
les recommandations des autorités administratives et politiques ...etc.
Il est donc évident que la gestion du risque de non-conformité
réglementaire oblige l'entreprise à se doter des outils et des
moyens pour identifier et analyser son cadre réglementaire, mais
également déterminer le niveau de risque qu'elle est prête
à prendre,
Certes la Soft Law joue un
rôle très important dans l'incitation des entreprises à se
plonger dans une démarche de mise en conformité, il faut admettre
que l'observation de la norme juridique par l'entreprise n'est pas automatique
même si cette norme est bien identifiée et parfaitement claire, il
faut encore bien admettre que la rationalité des décisions prises
par les décideurs au sein de l'entreprise se vérifie par le
volume des avantages que pourrait tirer l'entreprise et non pas par la
conformité à telle ou telle norme
B : Les contours du devoir règlementaire
En se référant à la directive
solvabilité II, la conformité constitue pour l'entreprise une
démarche intégrée, elle ne porte pas uniquement sur les
opérations d'assurances proprement dit mais elle les dépasse pour
inclure les règlements communs à toutes les entreprises en leur
qualité du sujet de droit
Contrairement à cette optique le droit français,
en assimilant la non-conformité au « non-respect de dispositions
légales, règlementaires, de normes professionnelles ou
déontologiques applicables aux activités de l'organisme
d'assurance », semble opté pour la limitation du domaine de la
conformité aux activités et opérations d'assurances.
Dans le contexte tunisien, une lecture attentive de l'article
13 du règlement n°1/2016 du comité
général des assurances et des articles 218 et 220 du projet de
révision et modification du code des assurances fait apparaitre que la
conformité est considérée comme l'un des
côtés d'un dispositif quadrilatère de contrôle
interne.
Considérée comme pilier de contrôle
interne, la conformité règlementaire doit manifester une
stratégie intégrée par laquelle l'entreprise soumet ses
actions à une démarche de conformité aux règles de
toute nature, externes, internes et d'éthique en vue de se
prémunir contre les risques résultants de la violation de ces
règles et de moraliser ses comportements et ses pratiques
Ainsi présentée dans la règlementation
tunisienne, la conformité s'étend à un champ très
vaste qui porte sur l'ensemble des activités de l'entreprise d'assurance
et qui est dotée d'un rôle dynamique dans la bonne gouvernance de
l'entreprise.
Toutefois le contenu du dispositif de conformité et le
champ d'intervention de la fonction conformité dépendent
relativement de l'environnement externe de l'entreprise notamment les zones
à risques, de sa taille, de sa sophistication, de sa rigidité
structurelle et de sa stratégie. Une cartographie des risques de non-
conformité préalablement élaborée permettra de
définir le contenu du plan de conformité et mettra en
évidence les sujets sensibles sur lesquels va s'articuler la fonction
conformité.
A notre sens, hormis les facteurs externe et /ou internes de
l'entreprise la conformité règlementaire doit englober les
thématiques charnières suivantes :
14
> La protection de la clientèle. (droits de
consommateurs ...).
> La conformité des contrats/produits.
> Les pratiques commerciales. (concurrence,
publicité...).
> La règlementation relative à l'exercice de
l'activité d'assurance. (comptabilité,
gouvernance, contrôle prudentiel,
solvabilité...).
> La sécurité financière. (la fraude, le
blanchiment de capitaux et le financement du
terrorisme, la conformité fiscale des comptes
étrangers (FATCA)...).
> La protection des données à caractère
personnel et médical.
> La fiabilité de l'information financière.
> L'éthique et la déontologie. (code de
déontologie, chartes...).
Il reste à vérifier pour ce devoir
règlementaire sa nature, autrement dit, au nom de ce devoir, les
entreprises sont-elles tenues d'une obligation de moyen ou d'une obligation de
résultat ? La réponse à cette question semble
d'intérêt justement déclaratif d'une double qualification
pour un même devoir, bien évidemment les entreprises d'assurance
et de réassurance sont tenues parfois de la « due diligence »
et parfois de l'atteinte d'un résultat bien définie.
Pour conclure cette première section destinée
à mettre en évidence la richesse normative de la
conformité, il me semble crucial pour l'entreprise d'une part
«d'allier toujours ce que le droit permet avec ce que
l'intérêt prescrit, afin que la justice et l'utilité ne se
trouvent point divisées» comme il le disait Jean-Jacques Rousseau
et d'autre part d'avoir la conscience et la conviction de « ne pas faire
par les lois ce que l'on peut faire par les moeurs» Comme disait Charles
de Montesquieu. Et pour illustrer l'interaction entre la loi et la morale on
peut attester avec Nicolas Machiavel que «De même que les bonnes
moeurs, pour se conserver, ont besoin des lois, les lois, pour être
observées, ont besoin des bonnes moeurs».
Toutefois, dans un contexte de gouvernance et de gestion de
risques, cette interaction entre la loi et la morale reste insignifiante voir
même futile si elle ne produit pas un modèle managériale
basé sur la notion de la gestion par les risques comme ci-dessous
schématisé.
15
Figure 1 : La jonction de la loi et de la morale et son
impact sur le model managérial de l'entreprise.
Section 2 : la non-conformité et les instances
de contrôle
Dans le cadre du management des entreprises, l'importance de
l'aspect substantiel de la conformité ne doit pas s'arrêter
à l'adoption d'un socle normatif allant de la de
l'incitation (inciter, coopérer et
récompenser) à la coercition (ordonner,
sanctionner, contrôler) il faut donc que ce premier aspect soit
associé et complété par une forte simulation des risques
de non-conformité que peut encourir l'entreprise et donc l'obligation
pour les dirigeants de manager par risque. C'est dans une perspective de bonne
gouvernance que la non-conformité doit être
interprétée comme risque et soit gérée comme
tel.
Et c'est dans cette logique que la règlementation
tunisienne a abordé la question de la conformité au sein des
entreprises d'assurances et de réassurance mais sans donner une
définition explicite du risque de non-conformité, Par contre, et
en revenant au règlement suscité n°1-2016 du CGA, ou
même au projet de révision et modification du code des assurances,
il en ressort que les pouvoirs publics se sont d'avantage penchés sur
les exigences de bonne gouvernance en faisant de la gestion du risque de
non-conformité l'un de ses piliers.
16
Pour définir le risque de non-conformité il est
utile de se rapprocher de la définition donnée par
l'Autorité Européenne des
Assurances et des Pensions
Professionnelles (AEAPP17 ) qui
considère comme risque de non-conformité «Le risque de
sanction judiciaire, administrative ou disciplinaire, d'atteinte à la
réputation et de perte financière qu'engendre le non-respect des
dispositions légales, réglementaires, de normes professionnelles
ou déontologiques applicables aux activités de l'organisme
d'assurance »18.
De l'examine de cette définition donnée par
AEAPP on peut déduire que le risque de
non-conformité est doublent défini, la première
définition met en avant les faits générateurs (violation
des normes et manquement des devoirs, amplement détaillés dans la
première section), la deuxième met en valeur les
conséquences de la non-conformité, à savoir, les sanctions
et les pertes financières (Paragraphe 1) tout en
renvoyant -même implicitement-aux organes dotés des
prérogatives pour contrôler et infliger les sanctions les cas
échéants (Paragraphe 2).
Paragraphe 1: les risques encourus
Inscrit dans un contexte de contrôle interne et de bonne
gouvernance d'entreprise, l'objectif de toute démarche conformité
est principalement d'épargner les risques de pertes financières
(A), de sanctions (B) et de mauvaise
réputation (C) à l'entreprise.
A : Le risque de pertes financières
En entend par perte financière les conséquences
pécuniaires qui résultent automatiquement de la
non-conformité ou de l'absence de la veille règlementaire au sein
de l'entreprise.
Certes, les lacunes organisationnelles au sein de l'entreprise
à l'instar de l'absence d'un manuel de procédures claire, de la
non définition des processus, de la non définition des
responsabilités et des taches, de l'accumulation des pouvoirs et autres
insuffisances qui peuvent affecter négativement la qualité des
services et par conséquent la productivité de l'entreprise qui se
traduit par une perte financière directe.
Pire encore, et si l'entreprise et en plus de la
défaillance organisationnelle ne procède pas à une
démarche d'éthique basée sur la diffusion d'une culture de
prévention de risques notamment celui de non-conformité et
l'adoption d'une politique d'intégrité claire, elle risque de
rendre favorable des abus de diverses natures comme la fraude interne ou
externe, l'abus des bien sociaux, les conflits d'intérêts ...
etc. et tout se traduira bien
évidemment par la baisse de la rentabilité de l'entreprise.
La perte financière ne trouve pas uniquement sources
dans l'inadéquation ou la défaillance des procédures de
l'établissement, des dysfonctionnements des systèmes internes et
des manquements du personnel mais encore dans l'incapacité pour
l'entreprise de bien identifier et interpréter son environnement
règlementaire voir anticiper les éventuels changements
règlementaires pour pouvoir mener les changements nécessaires
avec la due fluidité et le minimum d'incidents dommageables.
17 L'Autorité européenne des
assurances et des pensions professionnelles (AEAPP), en anglais European
Insurance and Occupational Pensions Authority (EIOPA), est la
dénomination qui a remplacé le 24 novembre 2010 le CEIOPS.
18 Document intitulé « CEIOPS' Advice
for Level 2 Implimenting Measures on Solvency II: system of governance
».
17
18
B : Le risque de sanctions
Allant de l'incitation à la
coercition, la conformité doit garder
davantage son caractère contraignant, la notion de la sanction y est
inhérente, toutefois cette sanction est de divers aspects. Elle est
judiciaire, pénale ou civile, (I) administrative et
disciplinaire (II).
I. La sanction judiciaire
La sanction est dite judiciaire lorsqu'elle est
prononcée à l'encontre de l'entreprise ou contre ses dirigeants
par une juridiction compétente, cette sanction peut être
pénale (a) ou civile (b)
a) La sanction pénale
Renvoyant au droit pénal des affaires,19 La
sanction pénale désigne l'ensemble des peines prévues par
le législateur pour réprimer tout acte ou omission interdit par
la loi. Dans ce cadre l'entreprise ou encore les dirigeants peuvent se voir
condamnés à des sanctions pénales,
généralement pécuniaires sous forme d'amendes, hormis des
cas spécifiques d'incarcération des dirigeants. De ce fait
l'entreprise risque théoriquement d'être condamnée à
payer une somme d'argent fixée par la loi au Trésor Public et
prononcée par le tribunal correctionnel à l'occasion de chaque
infraction ait été commise
Bien que la définition des textes applicables à
l'entreprise d'assurance et de réassurance et le recensement des
sanctions prévues ne puissent être parfaits que dans le cadre de
la rédaction du référentiel règlementaire
néanmoins rien n'empêche de faire avancer quelques exemples dans
ce cadre.
> Code des assurances: les dispositions du chapitre (3) du
titre 2 intitulé «le contrôle et les sanctions et notamment
les articles 88, 89 et 90.
> La loi organique n°2015-26 du 7 août 2015
relative à la lutte contre le terrorisme et la répression du
blanchiment d'argent telle que modifiée et complétée par
la loi n°2019-9 du 23 janvier 2019 : les dispositions de la Sous-section 2
de la section 2 du chapitre 2 intitulée « Des mécanismes
d'investigation des opérations et transactions suspectes »
notamment les articles allants du numéro 136 au numéro 140.
> Loi n° 2015-36 du 15 septembre 2015, relative
à la réorganisation de la concurrence et des prix. Des sanctions
sont prévues surtout en matière de concurrence et pratiques
déloyales.
> Loi 92-117 du 07 décembre 1992 relative à
la protection du consommateur. Surtout en cas de manquement au devoir
d'information et la non-conformité des contrats aux
produits/services.
> Loi 98-40 du 02 Juin 1998 relative aux techniques de
vente et à la publicité commerciale. Surtout la répression
de la publicité mensongère.
> Loi organique n° 2004-63 du 27 juillet 2004, portant
sur la protection des données à caractère personnel.
> La loi n° 1994-17 du 14 novembre 1994 portant
réorganisation du marché financier.
19 Le droit pénal des
affaires est l'ensemble des règles de droit concernant les infractions
inhérentes au domaine des affaires, outre des infractions de droit
commun, le droit pénal des affaires comprend des lois spéciales
comme le droit des sociétés commerciales, le droit de la
concurrence, le droit de la consommation, droit boursier...etc.
b) La sanction civile
Ayant un caractère exécutoire, la sanction
civile est considérée comme l'effet d'une résolution prise
par une autorité judiciaire.
Hormis la déclaration en faillite qui désigne la
disparition de l'entreprise, on peut énumérer les sanctions
suivantes dont l'effet est significatif non seulement pécuniairement mai
encore sur l'image et la réputation de l'entreprise.
? La déchéance: La
déchéance d'un droit est le fait de ne plus pouvoir en obtenir la
reconnaissance en justice. C'est l'expression de la nonchalance et le non
diligence de l'entreprise.
? La résiliation : la
résiliation n'est pas uniquement conventionnelle, elle encore judiciaire
et sous forme de sanction pour non-respect des engagements contractuels, une
fois prononcée cette sanction reflète un manquement au devoir
d'intégrité.
? La nullité : La
nullité est la sanction de l'invalidité d'un acte juridique, ou
d'une procédure due à un vice de forme ou de fond. Si un acte est
frappé par la nullité c'est que le management de l'entreprise est
mal conseillé et que la fonction conformité a manqué l'une
de ses missions.
? Les dommages-intérêts
: Les dommages-intérêts constituent la compensation
financière que l'entreprise peut payer à titre de
dédommagement dont le fondement réside soit dans la
responsabilité pénale soit délictuelle ou contractuelle de
l'entreprise.
? Les astreintes et l'indemnité de retard
:L'astreinte est une condamnation judiciaire afin de forcer
l'exécution dans un délai rapide une décision de justice.
Les pénalités de retard sont dues à compter de la mise en
demeure de payer en cas d'inexécution d'une obligation contractuelle.
Mis à part l'impact financier de l'une ou de l'autre
sanction pour l'entreprise, ces deux sanctions une fois prononcées
à l'encontre de l'entreprise dévoilent une défaillance des
procédures internes et un dysfonctionnement au niveau des
mécanismes de contrôle nécessitant une intervention afin de
mettre en oeuvre les régularisations adéquates.
II. La sanction administrative et
disciplinaire
Exerçant une activité d'intérêt
général et relevant donc de l'ordre public, les entreprises
d'assurance et de réassurance se trouvent à l'occasion de cette
activité sous le contrôle et la supervision des organes
administratifs dotés des prérogatives de la puissance
publique.
C'est dans le cadre de leurs attributions que les instances de
contrôle sont habilitées à infliger des sanctions
disciplinaires aux assureurs par la prise de l'une des mesures punitives
prévues sur la base d'un contrôle constatant un manquement
conformément aux articles 84 et 87 du code des assurances pour le
comité général des assurances par exemple.
Il ressort de ces deux articles que des sanctions
disciplinaires proportionnées à la gravité du manquement
commis sont énumérées à titre exhaustif et ils
s'étalent de l'avertissement au retrait définitif de
l'agrément.
19
C'est ainsi que l'article 87 du code des assurances
prévoie « Les entreprises d'assurances
soumises à agrément sont passibles, en cas de
manquement aux obligations mises à leurs
charge en vertu des dispositions du présent Code, des
sanctions ou mesures suivantes20:
« 1) Sanctions ou mesures prises par le comité
général des assurances
- l'avertissement,
- le blâme,
- la mise sous surveillance pour
l'exécution d'un plan de redressement,
Ces sanctions ou mesures sont portées à la
connaissance du conseil d'administration de
l'entreprise concernée.
2) Sanctions et mesures prises par le ministre des finances sur
avis du Comité
- le retrait de l'agrément
conformément aux dispositions de l'article 51 du
présent code.
- le transfert d'office en
exécution des dispositions de l'article 63 du présent code.
Le ministre des finances sur proposition du comité peut
décider le transfert d'office partiel ou
total du portefeuille de contrats de la société
à une autre entreprise agréée».
Allant jusqu'à menacer l'entreprise dans son existence, le
risque de sanction administrative ou
disciplinaire est un risque signifiant surtout en présence
d'une pluralité d'organes de contrôle,
sa prévention constitue donc un enjeu majeur pour la
fonction conformité.
C : Le risque d'image ou de réputation
Définie comme l'opinion ou l'évaluation sociale
du public envers une personne ou une entité, la réputation est
considérée comme un capital intangible, immatériel qui se
construit dans la durée et qui reflète l'ensemble des opinions et
évaluations, favorables ou défavorables, exprimées sur
l'entreprise par le public.
Elle est encore un actif social stratégique pour
l'entreprise, source de création de valeur et un élément
clé qui contribue à la création d'un avantage
compétitif pour l'entreprise.
Une bonne réputation permet la fidélisation de
la clientèle, de favoriser l'accès aux marchés, d'attirer
les compétences et les investisseurs et de conditionner les relations
avec les instances de régulation.
Le risque de réputation et d'image correspond ainsi
à l'impact d'un évènement impliquant l'organisme
d'assurance sur la perception par les consommateurs avérés ou
potentiels, par les investisseurs, les organes de contrôle...etc. de cet
organisme.
Cet évènement peut être la publication
d'une sanction quelle que soit sa nature, d'informations négatives,
médiatisation d'un scandale, intensification des réclamations
clients ...etc.
Difficile à estimer, le risque d'image ou de
réputation doit se trouver au coeur du dispositif de conformité
car les effets à moyen et long terme peuvent être
extrêmement préjudiciables, voire critiques, pour l'entreprise
surtout sous l'influence des nouvelles technologies de l'information et de la
communication. En effet de nos jours, la réputation est devenue
e-réputation et tout se joue sur les réseaux
sociaux d'où la facilité de rendre publique une
20 L'article 87 du code des
assurances.
20
opinion négative et de faire circuler une rumeur
fondée ou non. Il est crucial pour le top management de faire de l'image
de l'entreprise et de sa réputation l'une de ses priorités non
pas seulement au travers la démarche conformité mais encore par
un travail de communication capable de gérer des crises
En conclusion, il ressort que la gestion du risque de
non-conformité constitue une tâche évidente pour les
entreprises d'assurances et de réassurance. Celles dont le bilan de
conformité est insatisfaisant peuvent subir des pertes
financières colossales, voir leur réputation
irrémédiablement entachée et même perdre leur
agrément ou licence d'exploitation. À l'inverse, une gestion
efficace de la conformité peut apporter à une
société des avantages comparatifs et l'aider à mieux
relever des défis entrepreneuriaux. Les entreprises ont par
conséquent un intérêt majeur à pratiquer une
véritable culture de l'intégrité et donc une gestion
poussée et efficace de la conformité.
Paragraphe 2 : les instances de contrôle
Admettre un champ large pour la conformité dans le
secteur des assurances et lui reconnaitre un périmètre
dépassant les contours de l'activité assurantielle c'est
reconnaitre aussi à des instances de divers domaines leur droit de
soumettre les entreprises d'assurances et de réassurance à leur
contrôle.
Toutefois, ces instances administratives dotées des
prérogatives de la puissance publique, ne bénéficient pas
toutes des mêmes outils pour l'exercice de leurs fonctions, certaines ont
le pouvoir d'infliger des sanctions (A) d'autres n'ont que le
pouvoir d'enquêter et de saisine (B).
A : Les instances dotées du pouvoir de
sanction
Il s'agit principalement de deux instances, le
Comité Général des
Assurances (CGA) (I) et le
Conseil de la Concurrence (CC)
(II).
I. Le comité général des assurances
(CGA)
Avant de détailler l'étendue des pouvoirs du
CGA (a), il paraît nécessaire de le
présenté au préalable (b)
a) Présentation du CGA.
Créé par la loi n° 2008-8 du 13
février 200821, modifiant et complétant le code des
assurances, le CGA est doté de la personnalité morale et de
l'autonomie financière. Son organisation interne reflète une
séparation rigoureuse des taches entre les quatre organes qui le
composent, à savoir le président du comité, le
collège, la commission de discipline, et les services techniques et
administratifs.
En sa qualité d'autorité de tutelle et de
contrôle du secteur des assurances, le CGA « veille à la
protection des droits des assurés et des bénéficiaires des
contrats d'assurance et à la solidité de l'assise
financière des entreprises d'assurance et des entreprises de
réassurance et leur
21 Loi n° 2008-8 du 13 février 2008,
modifiant et complétant le code des assurances qui stipule dans son
article premier « Il est inséré au code des assurances
promulgué par la loi n° 92-24 du 9 mars 1992, un sixième
titre intitulé "Le Comité Général des Assurances "
et comportant les articles 177 à 200 suivants »
21
capacité à honorer leurs engagements
»22 et est chargé principalement de missions
suivantes23 :
> Le contrôle des entreprises d'assurances, des
entreprises de réassurance et des professions liées au secteur
des assurances et du suivi de leurs activités,
> L'étude des questions d'ordre législatif,
réglementaire et organisationnel se rapportant aux opérations
d'assurance et de réassurance, aux entreprises d'assurance et aux
entreprises de réassurance que lui soumet le ministre des finances et de
l'élaboration des projets de textes y afférents sur sa
demande,
> L'étude des questions d'ordre technique et
économique se rapportant au développement du secteur des
assurances et à son organisation et la présentation de
propositions à cet effet au ministre des finances,
> Et en général, d'étudier et
d'émettre son avis sur toute autre question relevant de ses
attributions.
b) Les pouvoirs du CGA
En sa qualité d'autorité de tutelle et de
contrôle du secteur des assurances, le CGA est habilité à
prendre des mesures punitives (2) à l'encontre des
organismes d'assurances et de réassurance une fois les investigations et
les enquêtes (1) ont révélé des
manquements de leurs parts.
1. Le pouvoir d'enquêter
Le CGA est habilité techniquement et
juridiquement24 de mener des enquêtes dans le cadre des
prérogatives qui lui sont attribuées par la loi. Il peut
effectuer des contrôles sur pièces ou sur place au sein des
organismes assujettis à son tutelle afin de s'assurer de leur
conformité aux dispositions législatives et règlementaires
en vigueur.
Généralement le contrôle peut porter sur des
questions relevant de :
> la protection des droits des assurés et des
bénéficiaires des contrats d'assurance.
> la solidité de l'assise financière des
entreprises d'assurance et de réassurance et leur capacité
à honorer leurs engagements (la solvabilité).
> Des pratiques commerciales dans le domaine des
assurances.
> Le fonctionnement et la bonne gouvernance surtout en
matière de désignation de l'actuaire et des commissaires aux
comptes et nomination des premiers responsables chargés de l'audit
interne, de la gestion des risques, de l'actuariat et de la conformité
.
Les missions de contrôle sont effectuées par des
contrôleurs d'assurances accrédités ayant au moins le grade
d'inspecteur et munis de cartes professionnelles prouvant leurs
identités. Les infractions constatées doivent faire l'objet d'un
procès-verbal signé de deux contrôleurs au minimum et
comportant le cachet du service dont relèvent les agents verbalisateurs
pour qu'ils soient valides25.
22 L'article n° 178 du code des assurances.
23 L'article n° 179 du code des assurances
24 L'article n° 82 du code des assurances.
25 L'article n° 83 du code des
assurances.
22
2. Le pouvoir de sanction
Ce pouvoir trouve son fondement juridique dans l'article 87 du
code des assurances et témoigne par conséquent des attributions
judiciaires du CGA.
En effet, la commission de discipline du CGA dispose d'un
pouvoir de sanction disciplinaire, gradué en fonction de la
gravité du manquement faisant déjà l'objet d'un
procès-verbal dûment établi par l'organe de contrôle
et de constatations des manquements et elle statue sur les cas encourant l'une
des sanctions exhaustivement énumérées dans l'article 87
du code des assurances. Les décisions doivent être prises à
la majorité des voix et elles sont exécutoires dès leur
émission.
Reste à noter que
l'hétérogénéité des compétences
représentées dans la commission de discipline26 ne
suffit pas à elle seule de garantir la justice de ses décisions
sachant que le code des assurances n'a pas prévue des procédures
pour attaquer les décisions disciplinaires du CGA par n'importe quel
moyen ou voie.
II. Le conseil de la concurrence (CC)
« Protection de la clientèle » et «
pratiques commerciales », constituent deux termes largement
employés par les autorités de contrôle afin de
désigner un ensemble de règles favorables aux clients dans leurs
relations avec les professionnels et régissant la production, la
commercialisation et la consommation des services. Ces règles visent
à mieux informer le client et créent à la charge des
professionnels de nouvelles obligations.
Pour assurer l'efficacité de ces règles on a vu
créer le conseil de la concurrence (a) avec des attributions très
larges (b) afin de faire bénéficier aux clients la protection
nécessaire.
a) Présentation du conseil de la
concurrence
Créé par loi n° 2015-36 du 15 septembre
2015, relative à la réorganisation de la concurrence et des prix
et substituant à la commission de la concurrence créée par
l'ancienne loi n° 199164 du 29 juillet 1991 relative à la
concurrence et aux prix, le Conseil de la concurrence est une autorité
administrative indépendante ayant une double attribution, consultative
et juridictionnelle.
Loin de son rôle consultatif qui paraît sans
intérêt pour notre sujet, on peut confirmer qu'avec une
composition à majorité de magistrats27 que se
dévoile par excellence la fonction contentieuse de ce conseil de la
concurrence.
Quant à ses missions, le conseil de la concurrence est
chargé de surveiller et de sanctionner les pratiques
anticoncurrentielles et de protéger les consommateurs en matière
des prix28 . Et comme tout acteur économique, les organismes
d'assurances et de réassurance se trouvent concernés de
près par l'attribution juridictionnelle du conseil de la concurrence
soit pour
26 Article 191 du code des assurances « La
commission de discipline se compose des membres du collège suivants : -
le juge de troisième degré : président, - le conseiller au
tribunal administratif : membre,
- le représentant du ministère des finances :
membre, - l'un des membres choisis en raison de leur compétence et de
leur expérience en matière d'assurance : membre, et du
délégué général de l'Association
Professionnelle des Entreprises d'Assurance ou de son représentant
légal parmi les employés de ladite association ».
27 Voir l'article n° 13 de la loi n°
2015-36 du 15 septembre 2015, relative à la réorganisation de la
concurrence et des prix.
28 Dans ce cas seules les organismes et groupements
de consommateur légalement établis peuvent saisir le conseil de
la concurrence.
23
demander sa protection contre des pratiques
anticoncurrentielles soit pour se défendre suite à une
requête déposée à leur encontre.
b) L'attribution juridictionnelle du conseil de la
concurrence
Non habilité à accomplir des tâches
d'enquête et d'investigation, le conseil de la concurrence tend à
être une juridiction administrative spécialisée qui peut
être saisi par le ministre du commerce, les entreprises, les
organisations professionnelles ou syndicales, les organisations ou groupements
de consommateurs, la chambre de commerce et d'industrie et les
collectivités locales29, il est habilité à
juger les pratiques anticoncurrentielles, se prononce sur les requêtes
afférentes aux abus de position dominante et aux prix abusivement
bas...etc. Le Conseil peut également s'autosaisir d'office des pratiques
anticoncurrentielles sur un marché, il peut prononcer des amendes
pécuniaires. C'est dans cette perspective que l'article 27 de la loi du
15 septembre 2015 prévoit que « Le conseil de la concurrence peut,
le cas échéant :
- adresser des injonctions aux opérateurs
concernés pour mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un
délai déterminé, ou leur imposer des conditions
particulières dans l'exercice de leur activité,
- prononcer la fermeture provisoire de ou des
établissements incriminés, pour une période
n'excédant pas trois mois,
- transmettre le dossier au parquet en vue d'engager les
poursuites pénales ».
Par ailleurs, l'article 43 reconnait au conseil de la
concurrence le pouvoir d'infliger des sanctions pécuniaires dans les cas
prévus par la loi et ce nonobstant les sanctions prononcées par
les tribunaux.30
B : Les instances non dotées du pouvoir de
sanction
Opérant dans un environnement de plus en plus complexe
et sous l'empire d'un arsenal juridique très diversifié, les
sociétés d'assurances et de réassurance peuvent se trouver
sous la supervision de plusieurs instances de régulation.
Bien qu'elles soient dépourvues du pouvoir de sanction
et ne sont dotées que du pouvoir d'enquête et de la saisine, ces
instances peuvent agir sur le comportement de ces sociétés afin
d'assurer le respect des lois et des bonnes pratiques notamment en
matière de l'information financière pour le
Conseil du Marché
Financier (CMF) (I), en matière de
protection des données personnelles pour l'Instance
Nationale de Protection des
Données Personnelles (INPDP)
(II) en matière de lutte contre la corruption pour
l'Instance Nationale de
Lutte Contre la Corruption
(INLUCC) (III)
I. Le conseil du marché financier
(CMF)
Considérées par la loi comme des
sociétés faisant appel public à l'épargne, les
sociétés d'assurances et de réassurances sont soumises au
contrôle du CMF au sens de la loi n° 94-117 du 14
Novembre 1994 portant réorganisation du marché financier. De ce
fait, il importe de présenter cette autorité de supervision
appelée conseil du marché financier (a) avant de
détailler les attributions dont il est doté
(b).
29 Voir l'article n° 15 de la loi n° 2015-36
du 15 septembre 2015.
30 Voir l'article n° 43 de la loi n° 2015-36
du 15 septembre 2015.
a)
24
Présentation du CMF
Le CMF a été créé par la loi
N° 94-117 du 14 Novembre 1994 portant réorganisation du
marché financier. C'est une autorité publique,
indépendante, qui dispose de la personnalité morale et de
l'autonomie financière. Il a comme missions principalement :
> la protection de l'épargne investie en valeurs
mobilières.
> l'organisation des marchés et leur bon
fonctionnement conformément à la règlementation
applicable.
> Assurer aux investisseurs leur droit à une
information financière fiable.
> Contrôler et statuer sur les manquements à la
réglementation et saisir la juridiction pénale le cas
échéant.
> Emission des règlements régissant les
marchés et les divers intervenants relevant de son autorité
b) Les attributions du CMF
Il est à noter que le pouvoir d'infliger les sanctions
dont il dispose le CMF exclut de son étendue les
émetteurs de titres31, dès lors les entreprises
d'assurances et de réassurance en leurs qualités de
sociétés faisant appel public à l'épargne ne sont
soumises qu'au contrôle relatif à l'information financière.
Mais rien n'empêche cette autorité publique de saisir la
juridiction compétente.
Disposant des départements techniques dans son
organisation, le CMF est habilité à mener des
missions de contrôle et d'investigation relevant juridiquement de ses
attributions, à ce titre, il peut procéder à :
> L'étude et le contrôle des documents d'un
point de vue juridique et financier et détecter les
irrégularités.
> La vérification du bien-fondé des
irrégularités constatées et émettre les
recommandations nécessaires.
> La correction des irrégularités en
demandant aux sociétés concernées de procéder
à des publications rectificatives.
> Contrôler les franchissements des seuils de
participation.
> La vérification de l'exactitude de tout type
d'information financière reliée aux sociétés
faisant appel public à l'épargne.
> A la vérification du respect des délais
réglementaires de communication et de publication de l'information
financière.
Les activités de contrôle et d'enquête du
CMF ne se limitent pas à des tâches
d'extrapolation comme détaillé, en outre, des actions peuvent
être engagées par cette autorité pour prévenir,
constater ou réprimer les infractions. Ainsi le CMF
peut procéder à des contrôles et investigations
sur pièces et sur place auprès de toute personne
concernée32 , engager des plaintes33 , saisir les
pièces et les documents, et convoquer, interroger et auditionner les
personnes concernées34 .
31 L'article n° 41 de la loi n° 1994-117 du
14 novembre 1994 relative à la réorganisation du marché
financier.
32 L'article n° 36 de la loi n° 1994-117 du
14 novembre 1994 relative à la réorganisation du marché
financier.
33 L'article n° 34 de la loi n° 1994-117 du
14 novembre 1994 relative à la réorganisation du marché
financier.
34 L'article n° 37 de la loi n° 1994-117 du
14 novembre 1994 relative à la réorganisation du marché
financier.
25
II. L'instance nationale de protection des données
personnelles (INPDP)
La souscription et la gestion de certains produits
d'assurances nécessitent de recueillir un grand nombre de données
à caractère personnel35, voir même,
sensibles36, de nature financières et patrimoniales pour les
contrats d'épargne, de nature médicales pour les contrats de
prévoyance... etc. De ce fait, les entreprises d'assurances et de
réassurance ne doivent pas sous-estimer le risque de contrôle
(b) de l'INPDP (a).
a) Présentation de l'INPDP
Créée par la loi organique n° 2004-63 du
27 juillet 2004, relative à la protection des données à
caractère personnel, l'Instance
Nationale de Protection des
Données Personnelles jouit de la
personnalité morale et de l'autonomie financière.
Au sens de l'article 76 de ladite loi, l'INPDP
est chargée principalement des missions suivantes:
> Accorder les autorisations et recevoir les
déclarations pour la mise en oeuvre du traitement des données
à caractère personnel.
> Recevoir les plaintes portées dans le cadre de la
compétence qui lui est attribuée par la loi.
> Déterminer les garanties indispensables et les
mesures appropriées pour la protection des données à
caractère personnel.
> Accéder aux données à
caractère personnel faisant l'objet d'un traitement afin de
procéder à leur vérification, et collecter les
renseignements indispensables à l'exécution de ses missions.
> Donner son avis sur tout sujet en relation avec les
données personnelles.
> Elaborer des règles de conduite relatives au
traitement des données à caractère personnel.
> Participer aux activités de recherche, de
formation et d'étude en rapport avec la protection des données
à caractère personnel.
b) Les pouvoirs de l'INPDP
Non dotée du pouvoir d'infliger des sanctions,
l'INPDP est une autorité de contrôle par
excellence et elle est en mesure d'exercer ce contrôle soit au
préalable soit à posteriori.
Le contrôle préalable consiste principalement en
l'octroi des autorisations en matière de L'utilisation des moyens de
vidéo-surveillance37 et la réception des
déclarations en matière de collecte et de traitement des
données à moins que la loi n'exige explicitement l'obtention
d'une autorisation préalable38.
35 On entend par données à
caractère personnel toutes les informations quelle que soit leur origine
ou leur forme et qui permettent directement ou indirectement à
identifier une personne physique ou la rendent identifiable à
l'exception des informations liées à la vie publique ou
considérées comme telles par la loi.
36 Ce sont des informations qui
révèlent la prétendue origine raciale ou ethnique, les
opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou
l'appartenance syndicale, ainsi que les données
génétiques, des données biométriques, des
données concernant la santé ou des données concernant la
vie sexuelle ou l'orientation sexuelle d'une personne physique...
37 Voir l'article 69 de la loi organique
n°2004-63 du 27 juillet 2004.
38 Voir les articles 7 et 8 de la loi organique
n° 2004-63 du 27 juillet 2004.
26
Le contrôle postérieur consiste en le droit
donné à cette instance de mener des enquêtes. Dans ce cadre
et au sens de l'article 77 de la loi n° 2004-63 que « L'instance peut
procéder aux investigations requises en recueillant les
déclarations de toute personne dont l'audition est jugée utile et
en ordonnant de procéder à des constatations dans les locaux et
lieux où a eu lieu le traitement à l'exception des locaux
d'habitation ».
Pour des fins de transparence et d'équité
l'INPDP peut se faire assister, dans le cadre de ses missions,
par les agents assermentés pour effectuer des recherches et des
expertises spécifiques, ou par des experts judiciaires, ou par toute
autre personne jugeant utile sa participation sans pouvoir lui opposer le
secret professionnel.
Les pouvoirs de l'instance ne se limitent pas à
recevoir les déclarations et donner les autorisations ou faire les
investigations qu'elle juge utiles, mais elle peut saisir la justice, voir
même elle est tenue « d'informer le procureur de la
république territorialement compétent de toutes les infractions
dont elle a eu connaissance dans le cadre de son travail
»39.
III. L'Instance Nationale de Lutte Contre la
Corruption (INLUCC) Les entreprises d'assurances et de
réassurance constituent une scène favorable pour les criminels
à col blanc, et un terrain fertile pour la criminalité
financière comme le blanchiment d'argent, les conflits
d'intérêts, les commissions frauduleuses, les cadeaux illicites,
les extorsions ou détournements de fonds, les abus de pouvoir, le
népotisme et le favoritisme, encore le contournement
délibéré des règles internes, contractuelles et des
lois, visant à obtenir un avantage matériel ou moral indu...etc.
Dès lors ils sont concernés par les activités de
l'INLUCC (a) et sont tenus de se soumettre à son
contrôle (b) le cas échéant.
a) Présentation de l'INLUCC
Par son article 12, le décret-loi cadre n°
2011-120 du 14 novembre 2011, relatif à la lutte contre la corruption, a
créé « une instance publique indépendante
dénommée instance nationale de lutte contre la corruption
dotée de la personnalité morale et de l'autonomie administrative
et financière ».Elle se présente comme la garante de la mise
en oeuvre d'une politique nationale de lutte contre la corruption basée
sur les axes suivants40 :
> Développer les efforts fournis pour la
prévention de la corruption et sa détection.
> Garantir la poursuite des auteurs de la corruption et leur
répression.
> Soutenir les efforts internationaux de lutte contre la
corruption.
> limiter l'incidence de la corruption et veiller à la
restitution du produit des
infractions.
C'est dans le cadre de cette politique nationale de lutte
contre la corruption que l'INLUCC est chargée de :
> « Proposer des politiques de lutte contre la
corruption et le suivi de son exécution en collaboration avec les
parties concernées.
> Emettre des directives générales sur la
prévention de la corruption et prévoir les
moyens adéquats de sa détection, en collaboration
avec les parties concernées.
> dévoiler les foyers de la corruption dans les
secteurs public et privé.
39 L'article 77 de la loi organique n°
2004-63.
40 L'article n° 1 du
décret-loi cadre n° 2011-120 du 14 novembre 2011, relatif
à la lutte contre la corruption.
27
? recevoir des plaintes et dénonciations, procéder
à l'instruction et la transmission des
infractions de corruption aux autorités compétentes
y compris la justice »41.
b) Les pouvoirs de l'INLUCC
Selon l'article 18 du décret-loi cadre n°2011-120,
l'INLUCC est composée d'un président, d'un
conseil, d'un organe de prévention et d'investigation et d'un
secrétariat général.
Pour notre sujet, il importe de nous arrêter sur la
facette spécifique de l'organe de prévention et d'investigation
pour mettre la lumière sur son rôle dans le dévoilement du
crime financier.
Au sens de l'article 31 dudit décret-loi, cet organe
est doté du pouvoir « d'enquêtes et d'investigation et il est
habilité à enquêter sur les infractions de corruption. Dans
ce cadre, il est chargé de la collecte des informations, documents et
témoignages permettant l'investigation sur la suspicion de commission
d'infractions de corruption par toute personne physique ou morale, publique ou
privée, organisation, association ou instance qu'elle que soit sa nature
et la vérification des informations et des documents collectés et
de leur authenticité, et ce, avant leur transmission aux pouvoirs
judicaires compétents afin de poursuivre leurs auteurs ».
« L'instance peut procéder à des actes de
perquisitions et de saisie de documents et biens dans tous les locaux
professionnels et privés qu'elle juge nécessaire de
perquisitionner, et ce sans autre procédure. Les procès-verbaux
et les rapports rédigés par l'organe de prévention et
d'investigation lors de l'accomplissement des travaux d'investigation sur les
infractions de corruption font foi jusqu'à inscription de faux
».
Afin de réussir ses missions d'investigations et de
réquisitions, l'article 35 dudit décret-loi stipule que «
toute personne physique ou morale est tenue de fournir au président de
l'instance tous les documents dont il dispose ou déclarations sur tout
ce qui a été porté à sa connaissance ou il a
vécu ou il a pu obtenir comme informations et données entrant
dans le cadre des attributions de la commission ».
A la fin de ce premier chapitre on peut légitimement
confirmer que la conformité, avant d'être une fonction
imposée par la règlementation en vigueur, est par essence une
culture qui consiste pour l'entreprise, d'une part, à adopter des
valeurs propres à elle formulées en concepts
génériques (intégrité, probité, droiture,
incorruptibilité, etc.), d'autre part à une maitrise parfaite de
son environnement juridique pour en servir de base pour le développement
de ses propres politiques ou stratégies et l'élaboration et la
mise en place des règles de conduite pour l'ensemble des
collaborateurs.
C'est en vertu de cette culture que l'entreprise d'assurance
ou de réassurance se trouve à l'abri d'un ensemble de sanctions
de diverses rigueurs, mais plus encore, c'est par cette culture que
l'entreprise peut acquérir le statut de « l'entreprise
citoyenne » et jouer ainsi un rôle déterminant
dans la relève des défis liées à
l'intérêt général comme la lutte contre le
blanchiment d'argent et le financement de terrorisme, la prévention et
la lutte contre la corruption, etc.
41 L'article n°13 du décret-loi cadre
n° 2011-120 du 14 novembre 2011, relatif à la lutte contre la
corruption.
28
L'entreprise d'assurance ou de réassurance est
appelée à adhérer à la démarche
collaborative mise en place par le gouvernement dans de divers domaines. C'est
par cette adhésion et par sa vive collaboration avec des instances ne
disposant pas de pouvoir de contrôle42 sur son activité
que l'entreprise témoigne encore une fois sa conformité.
42 En matière de LAB et FT, les entreprises
d'assurances et de réassurance sont appelées par exemple à
collaborer quotidiennement avec la Commission
Tunisienne des Analyses
Financières (CTAF) sans être
soumise à son contrôle.
29
Chapitre 2: La dimension organisationnelle de la
conformité en assurance
C'est sous l'influence de deux facteurs qu'on a vu s'accroitre
l'intérêt aux questions relatives aux problématiques
liées à la transparence de l'information financière et
à la gouvernance d'entreprise d'une façon générale.
Il s'agit, d'une part, de l'immensité des révélations
faites poste-révolution sur les dossiers de malversations et de
corruption, et d'autre part de l'impulsion des organismes internationaux comme
la Banque Mondiale (BM), le
Fonds Monétaire
International (FMI),
l'Organisation de Coopération et de
Développement Économiques
(OCDE).
Ainsi, s'est renforcée la prise de conscience des
autorités de tutelle quant à la question de gestion et du
contrôle des entreprises d'assurances ou de réassurance, et c'est
dans cette perspective qu'une décision a été rendue
publique par le CGA le 13 juillet 2016 sous le n°1
relative à la définition des règles de bonne gouvernance
des entreprises d'assurances ou de réassurance et que des travaux de
révision du code des assurances sont engagées, marquées
spécialement par l'insertion d'un titre huit relatif à la
gouvernance desdites entreprises
Une lecture attentive de ce projet de révision du code
des assurances ou de ladite décision du CGA à la
lumière d'autres textes relatifs au domaine des affaires à
l'instar de la loi n° 200596 du 18 octobre 2005 relative au renforcement
de la sécurité des relations financières, loi n°
2007-69 du 27 décembre 2007, relative à l'initiative
économique, la loi n° 2009-16 du 16/03/2009, modifiant et
complétant le code des sociétés commerciales et la
circulaire de la Banque Centrale de
Tunisie (BCT) aux établissements de
crédit n° 2011-06, en date du 20 mai 2011, nous
révèle la nécessité, voir, l'obligation de mise en
place d'un système de gouvernance43 incluant
nécessairement la fonction de gestion des risques, la fonction d'audit
interne, la fonction actuarielle et la fonction de vérification de la
conformité.
L'idée pour les autorités de contrôle est
de diffuser la culture de bonne gouvernance et d'inciter, à cette fin,
les entreprises d'assurances ou de réassurance à mettre en place
un dispositif de contrôle interne faisant obligatoirement partie
intégrante de leurs structures organisationnelles et que la fonction de
vérification de la conformité soit l'un des piliers sur lesquels
repose ce dispositif (section I).
Certes, l'implémentation de la fonction de
conformité et le déploiement de ses outils au sein de la
structure organisationnelle de l'entreprise sont d'une importance capitale,
mais en terme de bonne gouvernance cette fonction est appelée à
concilier la conformité et l'excellence opérationnelle
(section II) pour pouvoir créer de la valeur et
garantir la pérennité de l'entreprise.
43 Dans son article 4, la décision n°1
-2016 du Comité Général des Assurances a rendu obligatoire
la création d'un ensemble de fonctions au sein des structures
organisationnelles des sociétés d'assurances ou de
réassurance. A son tour l'article 241 nouveau du projet de
révision du code des assurances oblige lesdites compagnies de faire de
la conformité, de l'audit interne, de la gestion des risques et de
l'actuariat des fonctions intégrantes dans leurs structures
organisationnelles.
30
Section 1 : La fonction de conformité, un outil
de gouvernance d'entreprise
« La gouvernance consiste à mettre en oeuvre tous
les moyens pour qu'un organisme puisse réaliser les fins pour lesquelles
il a été créé, et ce de façon transparente,
efficiente et respectueuse des attentes de ses parties prenantes. La
gouvernance est donc faite de règles d'imputabilité et de
principes de fonctionnement mis en place par le conseil d'administration pour
en arrêter les orientations stratégiques, assurer la supervision
de la direction et favoriser l'émergence de valeurs de probité et
d'excellence au sein de l'organisation44.45»
Au sens de l'article 218 du projet de révision du code
des assurances, la gouvernance désigne un système d'organisation
constitué par un ensemble de structures, méthodes et
procédures de gestion et de contrôle mises en oeuvre au sein de
l'entreprise d'assurances ou de réassurance en vue d'assurer une
conduite transparente, ordonnée et efficace de ses activités
conformément à la règlementation en vigueur et au principe
d'imputabilité.
Au sens de la directive Solvabilité II
« Les entreprises d'assurance et de réassurance
disposent d'un système de contrôle interne efficace. Ce
système comprend au minimum des procédures administratives et
comptables, un cadre de contrôle interne, des dispositions
appropriées en matière d'information à tous les niveaux de
l'entreprise et une fonction de vérification de la
conformité». Il ressort de ces deux textes que la fonction de
contrôle de conformité est l'un des piliers du contrôle
interne pour les entreprises d'assurances ou de réassurance
(Paragraphe I).
Dans la pratique et compte tenu de sa qualité de ligne
de défense, cette structure nécessite une organisation
spécifique (Paragraphe II) à fin de lui garantir
l'efficacité et faciliter ses interactions avec les autres
structures.
Paragraphe 1 : la fonction de conformité au Coeur du
contrôle interne
La notion de gestion est en tant que telle un concept
d'organisation, d'où la création d'une fonction pour la gestion
du risque de non-conformité qui illustre la mise en oeuvre de cette
notion.
Certes, créer une fonction c'est mettre en place des
procédures adéquates pour structurer, communiquer, ordonner et
piloter des ressources afin d'atteindre un objectif.
Ainsi la gestion de la conformité dans les entreprises
d'assurances ou de réassurance est une fonction qui doit jouir d'une
structure autonome dans le dispositif global de la gouvernance de l'entreprise
et de « la capacité administrative de remplir certaines
tâches de gouvernance46 ».
La création de cette fonction de conformité est
désormais obligatoire selon les dispositions de la décision
n°1 -2016 du CGA et de l'article 241 du projet de révision du code
des assurances, elle se trouve aujourd'hui au coeur du contrôle interne
et constitue une deuxième ligne de défense
(A).
44 Gouvernance :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gouvernance#Gouvernance_de_l'entreprise.
45 YVAN ALLAIRE : président du conseil
d'administration de l'Institut sur la gouvernance d'organisations
privées et publiques (IGOPP) et président du Global Council on
The Role of Business, Forum économique mondial, « forum de Davos
»
46 Directive 2009/138/ce du parlement européen
et du conseil du 25 novembre 2009
31
Pour les entreprises d'assurances ou de réassurance, la
création de cette fonction ne doit pas faire un objectif en soi, il faut
penser à conjuguer un ensemble de facteurs pour faire réussir la
fonction de conformité (B)
A : la fonction de conformité, une
deuxième ligne de défense
Adopter une approche systématique et proactive pour la
gestion des risques (identifier, évaluer, maîtriser et
contrôler) nécessite la définition des relations entre les
unités opérationnelles et les fonctions de contrôle au sein
des entreprises d'assurances ou de réassurance et la fondation d'un
modèle de gestion qui s'articule autour de trois lignes de
défense.
Une première ligne formée par les unités
opérationnelles, et à laquelle revient principalement
l'identification des risques par l'application stricte des
procédures.
Une deuxième ligne de défense comprenant la
fonction de gestion de risque, la fonction actuarielle et la fonction de
contrôle de conformité qui sont chargées de s'assurer de
l'efficacité des opérations d'identification des risques et en
assurer l'évaluation, la maîtrise et le contrôle.
La troisième ligne est constituée de l'audit
interne qui a pour mission principale la veille à l'efficacité du
système de contrôle interne de l'entreprise.
Ce modèle de trois lignes de défense recouvre
deux catégories de contrôle, un contrôle permanent
assuré par les deux premières lignes dont le contrôle
conformité constitue un sous-ensemble et un contrôle
périodique assuré par la troisième ligne.
Figure 2 : Les catégories et les lignes du
contrôle interne
32
Certes, la multiplicité des lignes de défense et
des fonctions de contrôle d'une part et la diversité des
catégories de contrôle au sein des organismes d'assurances ou de
réassurance nous amènent à faire le point sur la
spécificité du contrôle de conformité, notamment son
processus (I) et son périmètre
(II)
I. Le processus du contrôle de
conformité
Pour définir le processus du contrôle de
conformité, on entend beaucoup parler du « cycle
vertueux de la conformité ». Il s'agit
réellement d'un ensemble d'étapes successives formant un cycle
répétitif.
Bien que ces étapes sont au nombre de huit, rien
n'empêche de les reclasser sous quatre activités
corrélées.
a) L'identification
A ce niveau du processus, et dans une première
étape, la fonction de contrôle de la conformité
procède à un travail de veille règlementaire qui consiste
au recensement des obligations règlementaires et déontologique
qui sont lui imposées et à la prospection de tout éventuel
changement règlementaire. Dans une deuxième étape, la
fonction de contrôle de la conformité doit mettre à jour la
cartographie des risques de non-conformité à la lumière
des nouvelles obligations recensées après avoir analyser leurs
impacts sur l'entreprise.
b) L'évaluation
Lors de ce deuxième niveau du processus et en une
première étape, la fonction de contrôle conformité
procède à la formalisation d'un plan de mise en conformité
et à la mobilisation des moyens nécessaires à cette fin
à la lumière des risques identifiés et en fonction de la
gravité de chaque risque. La deuxième étape de ce
deuxième niveau du processus et réservée à la
formalisation des nouvelles procédures et leur mise en place au niveau
de la première ligne de défense, c'est-à-dire au niveau
des unités opérationnelles et ce en exécution du plan de
mise en conformité préalablement établi.
c) Le contrôle ou la surveillance
À ce niveau du processus, seuls les risques qui
rentrent dans la sphère de l'acceptation par l'entreprise doivent faire
l'objet de ce contrôle, par conséquent, la fonction de
contrôle de la conformité est tenu, en une première
étape, de définir les mesures adéquates et de les mettre
en oeuvre en vue soit d'éliminer les risques soit de limiter ou mitiger
leurs impacts. La deuxième étape à ce niveau est une
étape de suivi régulier et elle consiste à faire les
ajustements nécessaires et à gérer les alertes et les
incidents avec la due vigilance.
d) Le pilotage et le reporting
Le dernier niveau du processus couvre à son tour deux
étapes, la première consiste dans le pilotage du dispositif de
contrôle de la conformité. A ce fait un ensemble d'indicateurs
clés47 d'ordre quantitatif et qualitatif doivent être
dégagés sous forme de ratios et de notations. La deuxième
étape pour ce niveau et la dernière pour le processus dans son
ensemble consiste dans la gestion de la
47 Il s'agit par exemple des ratios suivants : le
taux de réalisation des contrôles (ratio, contrôles
réalisés / contrôles planifiés). Ou encore taux
d'efficacité (ratio, risques maitrisés / risques
cartographiés)...etc.
La notation pour juger les aspects qualitatifs du dispositif
de contrôle a l'instar du degré d'implication des relais dans le
processus...etc.
33
relation avec les organes de supervision en interne et les
instances de contrôle en externe. Lors de cette phase, la fonction de
contrôle de la conformité joue un rôle d'aide à la
prise de décision par la fourniture de l'information et le rôle de
correspondant par l'émission des comptes rendus les cas
échéants.
Figure 3 : Processus de gestion des risques de
non-conformité
II. Le périmètre du contrôle
permanent de la conformité
Le contrôle de la conformité est en tant que tel
un sous-ensemble du contrôle interne permanent, il s'agit de deux
fonctions très proches mais chacune d'entre eux a son propre
périmètre.
Les contours du périmètre de contrôle de
conformité se clarifient à la lumière du programme de
contrôle préalablement défini. Mis à part son
objet48, ce programme doit obligatoirement définir en premier
lieu les contrôles qui seront effectués par les lignes
métiers, en second lieu le contrôle sur les contrôles ou
encore la supervision de la fonction de contrôle de conformité en
sa qualité de deuxième ligne et en fin les contrôles
à réaliser d'emblée par la fonction de contrôle de
conformité. Essentiellement le périmètre du contrôle
de conformité doit couvrir au moins les missions suivantes :
> L'identification et la définition d'une politique
de prévention des risques de non-conformité.
> Informer et conseiller les unités
opérationnelles et les organes dirigeants des exigences de
l'environnement règlementaire dans lequel opère l'entreprise.
> Superviser le dispositif de conformité et juger sa
pertinence en regard des objectifs de performance de l'entreprise.
> L'aide à la mise en oeuvre des garde-fous de
contrôle au sein des processus de toutes les structures de
l'entreprise.
> L'évaluation de l'efficacité des
contrôles et de l'engagement des opérationnels dans leur
réalisation.
> Assister le management opérationnel pour pouvoir
opérer en bonne conduite et en conformité avec les aspects
stratégiques, juridiques, réglementaires
prédéfinis.
Généralement les missions de contrôle
permanent relevant du périmètre du contrôle de la
conformité doivent viser deux objectifs :
D'une part, contrôler la bonne implémentation des
dispositifs déployés au sein des structures métiers de
l'entreprise, ainsi et par conséquent, toute défaillance des
missions de contrôle implique une mauvaise conception du programme de
contrôle préalablement défini par la fonction
conformité ou son incomplétude.
D'autre part, il s'agit de s'assurer de la bonne
réalisation des contrôles par la première ligne de
défense. Ainsi par exemple pour les contrôles effectués aux
fins de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme,
l'identification et la vérification de l'identité des personnes
lors d'une nouvelle souscription doivent se faire au niveau de la
première ligne de défense et la deuxième ligne, notamment
la fonction conformité n'intervient que pour s'assurer que ce
contrôle a effectivement été réalisé.
B : Les facteurs clés pour le succès de
la fonction conformité
La réussite de la fonction de la conformité
dépend de la coordination d'un ensemble de facteurs, il s'agit
principalement de l'engagement non conditionné du top management
(I), de l'allocation rationnelle des ressources (II)
et la mise en place par l'entreprise d'un modèle
organisationnel étanche (plus de détails dans le paragraphe 2
ci-après)
34
48 Le périmètre thématique
I. L'engagement non conditionné du top
management
La conformité est l'affaire de tous, mais la mise en
conformité d'une entreprise d'assurances ou de réassurance en
matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du
terrorisme ou en matière de protection des droits du consommateur ou
n'importe quelle autre thématique est l'affaire du top management de
l'entreprise, il s'agit d'une stratégie d'entreprise nécessitant
la volonté et l'engagement pour la conduite du changement.
Cet engagement est loin d'être réduit à
une note de la direction générale, bien qu'elle soit obligatoire,
cette note ce n'est que le coup d'envoi pour le lancement d'une démarche
de quatre étapes :
? La première étape consiste à la
définition de la stratégie et la délimitation de la
démarche. Lors de cette étape le top management de l'entreprise
doit identifier les axes porteurs de changement à l'instar du plan de
formation, la formalisation du manuel de procédures, définition
et automatisation des processus...etc.
Le cadrage de la démarche consiste dans l'obligation
pour le top management de prioriser les enjeux, de fixer les
échéances...etc.
Généralement à l'issue de cette phase une
feuille de route formalisant un plan d'action pour le déploiement des
changements envisagées doit voir le jour.
? La deuxième étape consiste dans la
définition des outils et les supports pour mener les changements que
nécessite la mise en conformité. Lors de cette étape, le
top management doit réussir sa stratégie de communication. A
cette fin des choix doivent être faits, il s'agit du choix des supports
soit de communication interne (réunions, notes d'information...) soit de
formation et de sensibilisation (e-learning, présentielle ...). Encore,
le choix doit porter sur le contenu substantiel et pédagogique de la
formation.
? La troisième étape est réservée
au déploiement de la démarche. Cette étape est
considérée la plus critique du fait d'une éventuelle
résistance au changement que peut manifester l'ensemble de personnel. En
raison de cette criticité, le top management de l'entreprise peut se
faire assister par des experts pour le déploiement du changement qui
doit être progressif et non brutal et l'aider à développer
l'argumentation pour expliquer le pourquoi des choses. Lors de cette
étape le top management doit accompagner le changement et le mener.
? La quatrième étape consiste à faire le
suivi des résultats de la démarche, à tirer les
enseignements du vécu et apporter les corrections nécessaires le
cas échéant. A ce niveau de la démarche, le top management
doit valoriser les succès réalisés et les déclarer
pour lancer la dynamique du changement.
Il est intéressant de noter que la mise en
conformité de l'entreprise ne peut réussir sans le parrainage des
instances de gouvernance opérationnelle et institutionnelle, d'ailleurs
leurs rôles ne se limitent pas à la conception de la
stratégie, elles sont responsables de sa mise en oeuvre.
35
Dans ce cadre, il est intéressant de rappeler les deux
principes suivants :
36
> Au sens de l'article 5 de la décision
n°1-2016 du CGA et de l'article n° 229 du projet de
révision du code des assurances, le conseil d'administration est
chargé de définir la politique de conformité, par
proposition de la direction générale, et de superviser la gestion
du risque de non-conformité. Il doit, en premier lieu, approuver la
politique de conformité (y compris le document qui crée la
fonction, la feuille de route pour la démarche de mise en
conformité...), en deuxième lieu, il doit évaluer
périodiquement (au moins une fois par année) la qualité du
dispositif global de gestion du risque de non-conformité.
> Au sens de l'article 7 de la décision
n°1-2016 du CGA et des articles 225 et 226 du projet de
révision du code des assurances, la direction générale est
responsable de la gestion du risque de non-conformité. Elle a la charge
de la mise en place et du déploiement de la fonction conformité
conformément aux directives de la politique de conformité, de
formaliser et de communiquer la politique de conformité, de veiller
à son respect, de rendre des comptes au conseil d'administration sur la
gestion du risque de non-conformité.
D'après ces deux principes, l'engagement du top
management de l'entreprise d'assurances ou de réassurance n'est pas
uniquement moral, il est encore juridique, il est soumis au contrôle des
instances de régulation.
II. L'allocation rationnelle des ressources
Ayant la qualité d'une « capacité
administrative de remplir certaines tâches de gouvernance49
», la fonction conformité ne peut réussir ses missions que
par la mobilisation d'un ensemble de ressources humaines (a)
et matérielles notamment un système d'information
(b).
a) Les bonnes compétences
Le métier de conformité nécessite de
multiples compétences : une bonne connaissance de l'environnement
réglementaire de l'entreprise et une veille réglementaire et
juridique permanente, une approche transversale du métier de l'assurance
ou de réassurance, une bonne maîtrise de la cartographie des
risques et des outils de contrôle permanents, ainsi que la
capacité d'analyse et de contrôle réglementaire.
L'équipe dédiée à la fonction
conformité doit être capable de:
> évaluer les enjeux liés à
l'activité et aux risques au sein de l'entreprise,
> planifier les missions de conformité, de
contrôle et de gestion des risques,
> comprendre le système global de contrôle et
les caractéristiques essentielles de ses composantes (contrôle
périodique et contrôle permanent, filière conformité
et filière risque),
> concevoir et réaliser des missions de
contrôle (recueil d'informations, vérifications de
conformité, mesures d'écart, recommandations
d'amélioration, contrôle des processus...),
> établir, conformément aux attentes,
l'ensemble des états et rédiger des rapports concernant la
conformité à l'attention des organes de gouvernance de
l'entreprise et des instances de régulation le cas
échéant.
49 Directive 2009/138/ce du parlement européen
et du conseil du 25 novembre 2009
37
L'expertise juridique, l'expertise en matière de
l'organisation et de maitrise des processus et l'expertise en matière de
contrôle et gestion des risques sont plus que cruciales pour le
succès de la fonction conformité.
b) Le système d'information
Par définition, le système d'information est un
ensemble organisé de ressources qui permet de collecter, stocker,
traiter et véhiculer l'information, c'est un système qui
dégage des informations de certaines qualités permettant une
prise de décision plus pertinente.
Comme toute fonction, le succès de la conformité
dépend largement de la qualité de l'information
dégagée par ce système, ainsi, la maîtrise des
risques de non-conformité nécessite une connaissance parfaite et
à jour des clients, de même, le suivi des opérations de
contrôle et l'évaluation des résultats nécessitent
l'accès à de nombreuses informations et le recours à des
outils de visualisation des données.
Dans la même perspective, on peut préciser que
l'animation de la filière conformité
(Plus de détails dans le paragraphe 2 ci-après)
nécessite le déploiement d'un outil (logiciel) pour faciliter la
communication entre les différentes parties agissantes sur le processus
de gestion du risque de non-conformité.
Cet outil ne doit pas être limité à la
mission de reporting, il doit fournir d'autres fonctionnalités comme
> la capacité de l'analyse de données pour
mesurer l'exposition aux risques, mieux orienter
les efforts et les missions de contrôle...etc.
> la capacité de visualiser les données et les
informations pour assurer un pilotage et un
reporting efficaces,
> la capacité de générer des alertes et
des blocages, le cas échéant, dans les outils des
opérationnels,
> la capacité de définir les risques, les
rattacher à des processus et les évaluer,
> la capacité de définir et formaliser les
contrôles de premier et de deuxième niveau et les
rattacher à des processus et à des risques,
> la capacité de définir et formaliser les plans
d'actions et suivre leur exécution,
> la capacité de recenser de nouveaux risques et mettre
à jour la cartographie des risques.
Toutefois, il est a rappelé que l'efficacité de
l'outil de gestion de risque de non-conformité ne dépend pas de
la diversité des fonctions qu'il fournit, il dépend de la
qualité des données recueillies et stoker dans le système
d'information de l'entreprise. Pour atteindre cette efficacité, les
entreprises d'assurances et de réassurance doivent formaliser une
politique de qualité des données et mettre en place une
stratégie de gouvernance en la matière.
38
Paragraphe 2 : Configuration et déploiement de la
structure de contrôle de conformité
L'obligation pour les entreprises d'assurances et de
réassurance de créer une fonction pour le contrôle de
conformité ne les « empêche pas de décider librement
de la façon d'organiser cette fonction en pratique50 »,
et « ne devrait pas conduire à des exigences trop lourdes, car il
faudrait tenir compte de la nature, de l'ampleur et de la complexité des
opérations de l'entreprise. Toutefois ce caractère obligatoire ne
doit pas éclipser l'aspect nécessaire de la fonction de
contrôle de la conformité et ne doit pas traduire uniquement la
soumission des entreprises d'assurances ou de réassurance à une
règle de droit, mais encore leur volonté de faire de cette
fonction un outil de gouvernance (par la définition d'un nouveau
processus de prise de décision) et une source de création de
valeurs.
Il n'y a pas donc de recette standard pour la configuration de
cette fonction ou pour son positionnement dans l'organigramme de l'entreprise.
Néanmoins, toute proposition d'un modèle doit observer quelques
exigences règlementaires au sens des deux textes
référentiels en Tunisie51.
A ce titre, les entreprises sont appelées d'une part
à observer, sous contrôle du CGA, la
compétence et l'honorabilité pour la nomination du responsable de
la fonction de contrôle de conformité, d'autre part à
veiller à la non cumulation des fonctions pour ce responsable et en fin
à garantir son indépendance par rapport aux lignes
métiers.
À ces trois impératifs règlementaires, on
peut ajouter un quatrième principe relatif à la capacité
d'action.
Dans la pratique, les entreprises bénéficient
d'une grande marge pour concevoir leur propre modèle. Et
l'adéquation d'un modèle organisationnel (B) au
profil de l'entreprise et son efficacité dépendent largement de
l'observation d'un ensemble de principes et objectifs organisationnels
(A) qui représentent finalement des facteurs
clés pour la réussite d'une éventuelle structuration pour
la fonction de contrôle conformité.
A : Les principes et les objectifs organisationnels
La création d'une fonction conformité doit faire
l`objet d'un document formalisant sa mise en place au sein de l'entreprise, il
s'agit d'un acte fondateur, détaillant entre autres les questions
relatives à l'indépendance de la fonction, à la nature de
ses relations avec les entités ou fonctions de l'entreprise, à
son emplacement, à son niveau hiérarchique, à ses
attributions...etc. Ce document constitutif doit ensuite être
communiqué à l'ensemble du personnel.
Dans ce cadre on peut évoquer deux principes
fondamentaux celui de l'autonomie (I) de la structure du
contrôle de conformité et celui de la synergie (II)
entre les entités.
I. L'autonomie de la fonction de
conformité
Généralement l'organisation d'une entreprise
doit faire apparaitre trois macro-processus : le processus métier,
processus pilotage et celui de support. Tenant compte des exigences de
l'efficacité, la question qui se pose, est où est-ce que l'on
doit affecter la fonction de contrôle conformité ?
50 La directive solvabilité II paragraphe
31.
51 La décision n° 1-2016 du CGA et le
projet de révision du code des assurances.
39
40
Le principe de l'indépendance des lignes de
défense par rapport aux lignes métier fait exclure le processus
métier. Reste alors à vérifier s'il s'agit d'une fonction
de support ou d'une fonction de pilotage.
Sachant que le processus de pilotage est un processus
d'analyse et de décision52 et que le processus de support est
un processus destiné à supporter et à accompagner
l'activité principale de l'entreprise et à contribuer au bon
déroulement des autres processus, on peut confirmer d'abord que le
processus de contrôle de conformité est un processus transversal,
ensuite que cette fonction revête un double aspect, elle est à la
fois organe de support et organe de pilotage.
Ayant ainsi un caractère hybride, la fonction
conformité doit être placée dans le dispositif global de la
gouvernance de l'entreprise au sens de l'article 222 du projet de
révision du code des assurances et de la directive solvabilité
253. De ce fait, cette fonction exige la séparation
hiérarchique et organisationnelle d'avec des fonctions
génératrices de risques.
Encore, faut souligner que pour des fins de reporting, cette
fonction nécessite un accès direct (le cas échéant
par l'intermédiaire du comité des risques) au conseil
d'administration54.
Dans la même perspective et en vue de consolider
l'autonomie de la fonction conformité, l'article 229 du projet de
révision du code des assurances stipule que le conseil d'administration
est garant de son indépendance.
Outre les attributs de l'indépendance par rapport au
management opérationnel, de la séparation hiérarchique et
organisationnelle et de la relation privilégiée avec le conseil
d'administration, l'autonomie de la fonction conformité demeure
incomplète.
D'autres prérequis semblent indispensables pour
l'autonomie de cette fonction, il est à noter dans ce cadre que cette
fonction nécessite :
? un niveau hiérarchique suffisamment
élevé exprimant ses attributions et le pouvoir dont elle
dispose.
? la mise à disposition d'un ensemble d'outils et des
moyens techniques appropriés (seront détaillés
ultérieurement).
? Une équipe dotée de bonnes compétences
et d'un bon niveau de technicité. L'expertise juridique, l'expertise en
matière de l'organisation et de maitrise des processus et l'expertise en
matière de contrôle et gestion des risques sont plus que cruciales
pour l'autonomie de la fonction conformité
II. Promotion de la synergie
Par définition, la synergie désigne l'action
coordonnée de plusieurs organes pour la réalisation d'un objectif
partagé. La leçon tirée pour notre sujet consiste pour
l'entreprise dans l'obligation de bien placer cette fonction et de bien
définir ses relations avec les différentes unités ou
fonctions
52 Jl est alimenté par l'ensemble des
informations remontées par les autres processus. A partir de ces flux de
données, il permet de réaliser une analyse fine dont pourront
être tirées des directives destinées aux autres
processus.
53Paragraphe (30) stipule « Le système de
gouvernance inclut la fonction de gestion des risques, la fonction de
vérification de la conformité, la fonction d'audit interne et la
fonction actuarielle ».
54 L'article 13 de la décision n°1-2016 du
CGA
constituantes de son organigramme. Pratiquement pour
créer de la synergie il faut d'une part la définition stricte du
périmètre d'intervention de chaque fonction et d'autre part la
formalisation des procédures organisant les interactions entre les
différentes parties prenantes.
C'est dans ce cadre qu'on doit rappeler que l'objectif globale
de la mise en conformité de l'entreprise est l'affaire de toutes les
parties prenantes en interne et que la fonction conformité n'a pas
vocation à rassembler en son sein toutes les expertises
nécessaires pour la réalisation de ses missions, et pour
atteindre ses objectifs elle est appelée à nouer des partenariats
avec de différentes structures.
Ainsi, la direction juridique doit
interagir et collaborer quotidiennement avec la fonction conformité pour
le recensement, l'analyse et l'interprétation des textes
réglementaires applicables et pour l'anticipation de tout
éventuel changement dans l'environnement réglementaire. Ce
travail de veille réglementaire doit aboutir à la diffusion d'une
culture juridique partagée par tout le personnel de l'entreprise.
Dans le même esprit la fonction de gestion
des risques est considérée comme partenaire par
excellence pour la fonction conformité, c'est en collaboration que ces
deux fonction procèdent à la définition de la
méthodologie pour cartographier et piloter les risques. Au-delà
de la collaboration, la fonction conformité est appelée à
alimenter le tableau de bord de suivi des risques et à rapporter
auprès de la fonction de gestion des risques les cas
échéants.
Chargée du contrôle périodique,
la fonction d'audit interne se trouve à son
tour étroitement liée avec la fonction de contrôle de
conformité, cette relation consiste notamment dans un échange
fréquent. A ce titre, les deux fonctions sont tenues de coordonner leurs
programmes de contrôle et d'échanger les données relatives
à des sujets d'intérêt commun et les résultats des
missions de contrôle le cas échéant. Cette relation peut
aller jusqu'à l'exécution des missions de contrôle
approfondi par la fonction d'audit interne pour le compte de la fonction de
contrôle de conformité.
De ce que précède, on peut qualifier la relation
de la fonction conformité avec les autres fonctions clés de
relation de coordination et de collaboration, mais la question se pose encore
pour ses relations avec les structures métier, sachant que c'est au
niveau de ces lignes que la conformité se vérifie.
De prime abord, et compte tenu de la stratification des lignes
de défense dans l'entreprise, il est légitime de qualifier cette
relation de relation de complémentarité.
Aujourd'hui et face à l'ampleur des enjeux
réglementaire et déontologique, la fonction conformité
n'est pas l'acteur unique sur le processus de gestion des risques de
non-conformité. Supporter et superviser les lignes métier en
matière de conformité implique pour cette fonction la
nécessité d'impliquer les lignes métier et leur
reconnaître un rôle vital sur ce processus.
Structurellement, des relais à cette fonction doivent
être logés au sein des lignes métier pour assurer la
vérification du déroulement et de l'exécution des missions
de contrôle par les opérationnels conformément aux
procédures et de collecter les incidents.
41
Assurant ainsi l'une des étapes du processus de gestion
des risques de non-conformité, les directions métier en leur
qualité de première ligne de défense participent à
la maitrise des risques qu'ils génèrent.
B : Modèle organisationnel : Toile
d'araignée
Considérée auparavant comme l'affaire d'une
fonction spécialisée, le contrôle conformité s'est
progressivement évolué pour constituer la pierre angulaire dans
l'organisation de l'entreprise et se présente désormais comme
l'un des facteurs clés de réussite de la stratégie
opérationnelle.
Proposer un modèle organisationnel dépend, comme
déjà évoqué, largement du profil de l'entreprise,
d'un ensemble de principes et des objectifs à atteindre. La
littérature en la matière parle souvent de la filière
conformité pour schématiser sa présence sur tous les
processus de l'entreprise et mettre en avant les acteurs qui oeuvrent pour le
compte de la conformité et qui sont répartis dans les
différentes structures métier.
A notre sens, et compte tenu de l'aspect transversal de la
fonction conformité, de la diversité des relations nouées
avec de différentes directions et de la richesse de son
périmètre thématique, on peut comparer le modèle
organisationnel de la structure de la fonction conformité à la
« toile d'araignée ».
Des liens fonctionnels dans toutes les directions (horizontale
et verticale) et avec de divers objets (conseil, partenariat, accompagnement,
assistance, complémentarité...), comme illustré dans le
schéma ci-après.
42
Figure 4 : Modèle pour l'organisation et le
déploiement de la fonction de contrôle de
conformité
Ainsi nous estimons que notre modèle doit réunir
deux composantes : une direction de conformité (I) et
des correspondants ou des relais (II)
I. La direction de contrôle
conformité
Compte tenu des enjeux et de l'ampleur des missions de la
direction de la conformité, celle-ci doit loger en son sein, et sous la
direction d'un responsable de contrôle conformité
(RCC), une équipe hétérogène.
Hiérarchiquement liée à la direction
générale, la personne en charge de la fonction conformité
(RCC) doit faire preuve d'un niveau de compétences managériales
très haut, d'une technicité considérable et d'une
honorabilité reconnue dans l'entreprise et surtout auprès des
instances de régulation.
Principalement le RCC doit :
> Avoir une vision transversale métier et la
capacité à animer pour pouvoir piloter le dispositif de
contrôle de conformité.
> Maîtriser l'environnement réglementaire et
avoir des connaissances métier pour pouvoir définir le
périmètre normatif applicable à l'entreprise.
> Avoir une vision basée sur les risques pour
pouvoir contrôler et évaluer l'adéquation et
l'efficacité du dispositif de contrôle de conformité.
> Avoir le sens analytique et la capacité de
conviction pour assurer un rôle de conseil auprès de la direction
générale et du Conseil d'Administration.
> Participer ainsi au processus décisionnel et
stratégique de l'entreprise d'assurances ou de réassurance.
Le RCC doit se faire assister par une
équipe dédiée spécialement au contrôle de
conformité et lui est lié hiérarchiquement. Cette
équipe comprend un ensemble d'experts de divers domaines. Le choix de
ces experts est fonction des thématiques de la conformité
notamment la sécurité financière, la protection de la
clientèle, la protection des données personnelles et
l'éthique et la déontologie.
Ces experts sont appelés à animer le dispositif
de la conformité selon les spécificités de chacune des
thématiques en question et de communiquer avec les membres de la
filière de contrôle de conformité
II. Les correspondants (les relais)
En sa qualité de deuxième ligne de
défense, la fonction de contrôle conformité doit avoir des
relais au sein de de la première ligne de défense (les directions
métier et les fonctions support autres que les fonctions partenaires).
Ces relais assurent pratiquement la déclinaison des procédures et
la concrétisation de la politique interne de gestion des risques de
non-conformité.
L'existence de ces correspondants sur le processus de gestion
des risques de non-conformité nous amène à soulever les
observations suivantes :
43
> Les relais gardent leur rattachement hiérarchique
aux responsables des directions métiers au sein des quelles sont
logés mais fonctionnellement ils se trouvent également
liés aux experts de la direction de contrôle conformité.
44
45
? La formalisation des
procédures, l'automatisation des processus et la définition
stricte des statuts de ces correspondants semblent indispensables pour
éviter les éventuels conflits de compétences ou les cas
d'incompatibilité qui peuvent naître du double rattachement.
? Les relais doivent être
positionnés en fonction des zones et de la gravité des risques.
C'est-à-dire, il faut définir préalablement les parties du
processus les plus vulnérables aux risques et les activités qui
génèrent les risques les plus élevés pour pouvoir
affecter au mieux les compétences.
En résumé, bien que nous estimions que la
conformité en assurances est l'affaire de toutes les parties prenantes
en interne, nous tenons à rappeler que la gestion des risques de
non-conformité est l'affaire de quelques acteurs et que l'organisation
de la structure en charge de la conformité doit permettre la couverture
de la structure globale de l'entreprise. La conformité c'est la toile
d'araignée.
Section 2: Les outils de la gestion de la
conformité
Souvent perçues comme des barrières au
développement commercial, les enjeux de la conformité doivent
faire l'objet d'une gestion étudiée et planifiée pour
pouvoir concilier conformité et l'excellence opérationnelle.
Une gestion étudiée désigne pour
l'entreprise d'assurances le choix d'une approche parmi trois possibles :
? L'approche réactive qui
implique l'intervention pour la mise en conformité après un
contrôle sur place de l'autorité de supervision. Cette approche
peut coûter cher dans la mesure où l'entreprise se trouve dans
l'obligation de réaliser des travaux dans l'urgence, de mobiliser des
ressources massives surtout en faisant appel à des prestataires
externes.
? L'approche active qui signifie une
gestion au quotidien, l'entreprise ne procède pas à un travail
d'anticipation, elle traite les enjeux de la conformité dès la
promulgation d'une nouvelle règlementation. l'adoption de cette approche
peut aboutir à des résultats précipités du fait des
dates limites serrées édictées souvent par les nouvelles
réglementations.
? L'approche proactive qui implique
le maintien de l'entreprise en état d'alerte, elle nécessite une
maîtrise parfaite de l'environnement réglementaire dans lequel
opère l'entreprise d'assurances, une ouverture sur le
développement de l'activité d'assurance dans le monde et une
veille réglementaire très active.
A notre sens, cette approche proactive se révèle
la moins coûteuse et la plus efficace et doit être appliquée
par la fonction conformité.
L'approche proactive repose sur l'identification prospective
des nouvelles réglementations et permet par conséquent à
l'entreprise d'assurances ou de réassurance de se préparer
à la mise en conformité, de planifier les actions
nécessaires pour la conduite des changements, de choisir rationnellement
les ressources à mobiliser...etc.
Par ailleurs et outre la question de l'approche la plus
appropriée pour la mise en conformité, l'idée de la
gestion de la conformité nous amène à évoquer la
question du plan de conformité, qu'est-ce qu'un plan de
conformité ? À quoi sert un plan de conformité ? Qui
prépare le plan de conformité ?...
Techniquement, le plan de la conformité
c'est le document qui illustre les axes de la stratégie de
conformité comme conçue par le top management
opérationnelle de l'entreprise. La préparation de ce plan
nécessite au préalable un mappage pour les zones d'exposition aux
risques et une identification et hiérarchisation des risques de
non-conformité. Il vise à définir les thèmes de la
conformité qui devront être traités en priorité.
En pratique, nous estimons que la stratégie peut
couvrir une période de trois ans, tandis que le plan de
conformité doit être annuel, ainsi il est possible d'apporter les
ajustements nécessaires le cas échéant.
Le plan annuel de conformité doit être
consolidé par un plan d'action propre à chaque thème
détaillant surtout les mesures de traitement des risques lui
inhérents. Dans ce cadre l'entreprise est appelé à
entreprendre les mesures suivantes :
? L'évitement, pour les risques qui n'entrent pas dans
l'appétence aux risques par le biais d'un procédé que
l'entreprise juge utile.
? La réduction de l'impact ou de l'occurrence du risque
par la mise en place d'un ensemble de mesures limitant l'une ou des deux dites
dimensions, tout en gardant permanents le contrôle et la surveillance.
? Le transfert du risque par l'externalisation ou par la
souscription d'une assurance.
? L'acceptation pour les risques qui entrent dans le seuil
d'appétence aux risques par l'entreprise.
Logiquement, le plan d'action doit mettre l'accent
principalement sur deux axes : les mesures de réduction des risques
à travers le renforcement du dispositif du contrôle soit pour
limité leur survenance soit pour en mitiger l'impact et les supports de
communication et de formation et les contenus pédagogique lui
inhérents.
Une fois le choix d'une approche de gestion est fait et les
plans de la mise en conformité sont préparés, la fonction
de la conformité doit disposer au moins de deux outils pour assurer une
gestion efficace, il s'agit du référentiel réglementaire
(paragraphe 1) et la cartographie des risques
(paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le référentiel
réglementaire
Considéré d'ordre public, le secteur des
assurances est parmi les activités les plus réglementées,
raison pour laquelle les sociétés d'assurances ou de
réassurance doivent avoir une vision holistique de leur environnement
réglementaire, cette vision doit aller au-delà du recensement de
l'existant pour anticiper les éventuels changements pour pouvoir
préparer au mieux les plans de mise en conformité.
Ainsi on peut confirmer que la veille réglementaire est
la pierre angulaire pour toute démarche de mise en conformité,
d'où la nécessité de mettre la lumière en premier
lieu sur la constitution du référentiel réglementaire
(A) pour pouvoir élaborer un exemple en matière
de lutte anti blanchiment d'argent et financement du terrorisme
(LAB/FT) (B) en deuxième lieu.
A : La constitution d'un référentiel
réglementaire
Le référentiel réglementaire est en tant
que tel un document récapitulatif, comprenant essentiellement un
recensement des textes juridiques et réglementaires applicables
(I), les interprétations à vulgariser pour
servir de culture à partager par l'ensemble du personnel (II) ,
les sanctions et risques encourus en cas de manquements (III)
et les meilleurs pratiques ou des recommandations
(VI).
I. Identification du cadre
réglementaire
Maîtriser l'environnement réglementaire est une
condition incontournable pour lancer une démarche de mise en
conformité. Pour un secteur très réglementé et dans
un monde de plus en plus ouvert, les entreprises d'assurances ou de
réassurances sont appelées à se soumettre non seulement
à un cadre légal national mais encore à des textes de lois
transnationaux comme par exemple la loi américaine sur la
conformité fiscale des comptes étrangers de 2010 connue sous
l'acronyme FATCA55.
L'identification des textes applicables doit s'étendre
aux différentes sources de législation possible (notes et
procédures internes, décisions et directives des instances de
régulation, arrêts et décrets ministériels, les lois
nationales, des textes émanant des instances internationales ou encore
des gouvernements mais à vocation internationale...). Une fois les
textes sont recensés, la fonction conformité doit les classer par
thèmes et selon un ordre décroissant en fonction de leurs
forces.
Dans ce cadre, il est important pour le RCC
de se rappeler que « nul n'est censé ignorer la loi »
et qu'une veille réglementaire pertinente constitue la pierre angulaire
pour la démarche de la mise en conformité, il est
nécessaire de connaitre nos obligations pour pouvoir les respecter.
De plus, il faut rappeler qu'une gestion proactive de la
conformité rend crucial pour le RCC d'opter pour une
veille prospective, par conséquent il faut :
? Aller chercher l'information juridique là où
elle peut exister (même auprès des sources informelles).
? Etre actif et ouvert sur les associations professionnelles
(FTUSA56, corps des experts en assurances, corps
des intermédiaires en assurances, les lobbyistes...).
? Identifier les pratiques de l'entreprise qui n'ont pas
encore fait l'objet d'une règlementation et les traiter à la
lumière des bonnes pratiques et des expériences
comparées.
55 La loi FATCA (Foreign Account Tax Compliance
Act) est une loi visant à s'assurer que les personnes soumises
à l'impôt selon le régime fiscal américain
déclarent les revenus perçus sur les avoirs financiers qu'elles
détiennent en dehors des Etats-Unis dans le but de détecter et
lutter contre la fraude fiscale.
La Tunisie a signé le 30 Novembre 2014 un accord de
principe intergouvernemental et a opté pour le modèle 1 selon
lequel les institutions financières tunisiennes doivent rapporter
auprès de l'autorité de la tutelle qui a le pouvoir de
représentation avec son homologue américaine.
Cet accord de principe a été
concrétisé par un traité signé entre la Tunisie et
les Etats Unis d'Amérique le 13 mai 2019 afin de mettre en oeuvre la loi
FATCA.
46
56 FTUSA : la fédération tunisienne des
sociétés d'assurances.
II.
47
La vulgarisation de l'information et La simplification
des exigences réglementaires
La vulgarisation réglementaire consiste en deux
tâches élémentaires, à savoir :
? L'interprétation des textes juridiques et
règlementaires : Il s'agit pour la fonction de contrôle
conformité de reformuler les textes réglementaires avec un
langage plus intelligible pour qu'ils soient appréhendés par une
population non juriste.
En interprétant les textes, le RCC doit faire
prévaloir l'esprit sur le texte mais sans aller à distordre le
sens et l'étendue des exigences réglementaires, c'est une
identification simplifiée des obligations réglementaires de
l'entreprise.
Pour assurer la pertinence des interprétations, le RCC
doit se faire assister par la direction juridique et par des experts
métier le cas échéant.
? La diffusion de l'information juridique et
réglementaire : Après avoir reformulé l'information
réglementaire et la simplifier, le RCC doit procéder à sa
diffusion auprès de l'ensemble du personnel de l'entreprise.
Le référentiel réglementaire est un
outil de travail qui doit être à la portée de tout le
personnel et c'est par le biais de ce document et son contenu que la fonction
conformité assiste le top management de l'entreprise dans la conduite de
changement.
Le but de la vulgarisation c'est donc d'identifier les
obligations à respecter, de les proposer dans un document
simplifié et d'inciter les gens à se référer
à ce document pour s'autocontrôler sous peine de sanctions ou de
risques. La vulgarisation vise à traduire les textes
réglementaires en obligations opérationnelles, de ce fait, le
référentiel réglementaire peut servir de
référence pour la rédaction des notes de direction et les
procédures.
III. Définition des sanctions
encourus
Parmi les axes d'une démarche pour la conduite de
changement c'est d'agir sur la culture partagée par l'ensemble du
personnel et pousser vers son harmonisation avec la stratégie globale de
l'entreprise.
Pour une démarche de mise en conformité, le
référentiel réglementaire est considéré
comme l'outil le plus pertinent pour gérer les changements culturels,
par conséquent ce document doit favoriser la culture de risque par la
définition des risques de non-conformité et les sanctions
encourues.
Dans la pratique, la fonction conformité doit
identifier les sanctions prévues par les réglementations
intégrant le périmètre de la veille réglementaire
et évaluer les risques encourus en cas de non-conformité (risque
d'image, risque de perte financière, risque de sanctions), puis elle
propose pour diffusion un sommaire bien organisé (par thème, par
nature de risque, par gravité...etc.) et facile à consulter par
le personnel de l'entreprise.
VI. Les recommandations
En plus du recensement des éléments du cadre
réglementaire, de l'identification des exigences et des obligations, de
la définition des sanctions et risques encourus et leurs vulgarisations,
le référentiel réglementaire peut comprendre une rubrique
pour l'identification des bonnes pratiques de la place. Cette rubrique doit
traduire l'ouverture de l'entreprise sur son environnement et sa diligence en
matière de respect de la clientèle.
Les bonnes pratiques détectées peuvent faire
d'une part l'objet de notes de synthèse à diffuser en interne
sous forme de recommandations et d'autre part l'objet d'un échange avec
les intervenants sur le marché de l'assurance pour engager des actions
de lobbying.
Il convient de rappeler que le référentiel
réglementaire en sa qualité de document pour la veille
réglementaire est auditable et que son efficacité doit être
régulièrement contrôlée.
B : Simulation d'un référentiel en
matière de LAB/FT57
Bien qu'il n'y'a pas un modèle type pour la
constitution d'un référentiel réglementaire, il est
nécessaire que ce document doit comprendre au moins les
éléments précédemment évoqués. Nous
proposons, ci-après, un modèle tout en précisant que le
choix est limité au thème de la lutte contre le terrorisme et la
répression du blanchiment d'argent.
48
57 Lutte anti blanchiment d'argent et
financement du terrorisme.
EXIGENCES ET OBLIGATIONS
RISQUES ENCOURUES
SOURCES
FONDEMENTS ET OBJET
DESCRIPTIF
JUDICIAIRE
SANCTIONS: TYPES ET FONDEMENTS
DISCIPLINAIRE
RISQUE D'IMAGE
-La loi organique n° 2015-26 du 07-08-2015 telle que
modifiée et complétée par la loi organique n° 2019-9
du 2301-2019 et les textes applicatifs notamment
-Le décret gouvernemental n° 54-2019 du 21-01-2019.
-L'arrêté du ministre des finances du 0103-2016.
-Le règlement du CGA n°1- 2018 du 02-03-2018.
Le devoir de tenir et de conserver les documents comptables et
les justificatifs des opérations financières
-L'article 103 nouveau de la loi n° 2015-26.
Le devoir de geler les avoirs en exécution des
décisions de la CNLCT
-L'article 121 de la loi n° 2015-26.
Le devoir de coopération avec la CTAF
-L'article 124 et 127 de la loi n° 2015-26.
Le devoir du respect du secret professionnel et de la
confidentialité
-L'article 126 de la loi n° 2015-26.
le devoir de reporting pour les opérations
nécessitant une vigilance renforcée
-L'article 100 et l'article 113 de la loi n° 2015-26.
- La tenue d'un livre-journal faisant état des recettes et
des dépenses.
- La tenue d'un inventaire des recettes réalisées
en espèces qui sont en rapport avec l'étranger en
précisant les sources, les montants et les justificatifs avec
l'obligation d'en aviser le BCT.
- L'établissement d'un bilan annuel. - La conservation,
sur un support matériel ou électronique, des documents comptables
pour une période de dix ans au moins.
- Prendre les mesures nécessaires pour concrétiser
la décision de gel des avoirs prise par la CNLCT et lui fournir les
informations nécessaires pour l'exécution de sa
décision.
-Les résultats des travaux et des examens effectués
dans le cadre de l'application des mesures de vigilance renforcée
doivent faire l'objet d'un rapport écrit mis obligatoirement à la
disposition des autorités de contrôle et des commissaires aux
comptes
- La société est tenue de communiquer à la
CTAF les renseignements et les documents nécessaires pour enquêter
efficacement les opérations objet des déclarations
- Les personnes qui en vertu de leurs fonctions, ayant
accès aux dossiers objet des déclarations sont tenues du: *
respect du secret professionnel, * non abus des renseignements dont ils ont eu
connaissance.
et ce même après cessation de leurs fonctions.
* abstention d'aviser les personnes concernées des
déclarations faites à leur encontre.
-L'article 140 de la loi n° 2015-26 prévoit
* l'emprisonnement pour une période allant de six mois
à trois ans et * une amende de cinq mille dinars à dix mille
dinars.
Et ce à l'encontre des dirigeants, des
représentants, des agents, et des associés de la personne morale
dont la responsabilité personnelle est établie pour avoir ne pas
respecter ou observer les devoirs édictés par les articles:
-1/ 100 et 113.
-2/ 103 nouveau.
-3/ 121.
-4/ 124 et 127.
-5/ 126.
de la loi organique n° 2015-26
-L'article 116 de la loi n°2015-26 renvoie implicitement
à l'article 87 du code des assurances pour l'application des sanctions
disciplinaires par les autorités de contrôles.
49
THEME : LUTTE CONTRE LE TERRORISME ET LA REPRESSION DU
BLANCHIMENT D'ARGENT
Le devoir de vigilance
-L'article 105 nouveau de la loi n° 2015-26.
le devoir de lever le gel des avoirs en exécution de la
décision de la CNLCT
-L'article 108 nouveau, 109, 110, 112, et 126 de la loi n°
2015-26.
-La société est tenue d'un devoir de vigilance
générale sur toutes ses opérations et transactions
relevant de son activité.
-La vigilance doit être renforcée lorsque la
transaction implique une PEP, une personne provenant d'un territoire
blacklisté par le GAFI, une OBNL ou encore en cas de non présence
physique de la personne concernée.
-Cette vigilance consiste en
-1/ un contrôle formel des pièces
et des justificatifs visant à s'assurer de l'identité des
personnes (physique ou morale) concernées et se renseigner de leurs
qualités (souscripteur, assuré ou bénéficiaire) et
des relations qui les relient en cas de pluralité.
-2/ l'identification du
bénéficiaire effectif selon la démarche graduelle
suivante:
* est considéré bénéficiaire effectif
en premier lieu le(s) personne(s) détenant 20% soit du capital social
soit des droits de vote dans les AG.
* en deuxième lieu le(s) personne(s) ayant le pouvoir de
contrôle sur les organes de direction et de gestion de
l'entité.
* en troisième lieu la personne liée occupant la
poste du dirigeant principal de l'entité.
-3/ La détection des opérations
inhabituelles (ayant un caractère complexe ou un objet
économiquement non justifié ou non légitime ou impliquant
une somme d'argent élevée) et/ ou soupçonnées
(suspicion de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme).
-4/ la veille à la mise à jour des
données relatives à l'identité des clients et à
l'examen permanent de la concordance des opérations effectuées
avec les données initialement fournies.
-5/ la mise en place d'un dispositif pour la
détection et la gestion des risques et soumettre le démarrage ou
la poursuite des relations d'affaires avec les PEP à l'autorisation
préalable du dirigeant principal
- La levée du gel immédiatement après
l'approbation de la demande ou l'acceptation du recours exercé par
quiconque concerné par une décision de gel.
-Risque juridique: une action en dommage peut être
engagée à l'encontre de la société en cas de retard
significatif de lever du gel et ce sur la base des dispositions du droit commun
relatives à la responsabilité délictuelle
-L'article 140 de la loi n° 2015-26 prévoit
*L'emprisonnement pour une période allant de trois mois à deux
ans et *une amende de mille à cinq mille dinars.
Et ce à l'encontre des dirigeants, des
représentants, des agents, et des associés de la personne morale
dont la responsabilité personnelle est établie pour avoir ne pas
respecter les mesures de vigilances particulières aux opérations
aux valeurs sensiblement élevées.
*Une amende de cinq fois le montant susmentionné contre la
personne morale.
-L'article 116 de la loi n°2015-26 renvoie implicitement
à l'article 87 du code des assurances pour l'application des sanctions
disciplinaires par les autorités de contrôle.
50
-L'article 140 de la loi
n°2015-26.
Le devoir de vigilance particulière pour les
opérations ayant une valeur supérieure ou égale à
dix mille dinars
-L'article n° 108 nouveau de la loi n°2015-26. Le
devoir de renoncer aux relations d'affaires nettement suspectes.
-L'article n° 125 de la loi n° 2015-26.
Le devoir de déclaration auprès de la CTAF
-Une vigilance particulière doit être
accordée aux opérations que soient habituelles ou occasionnelles
dont la contrepartie est supérieure ou égale à dix mille
dinars selon l'arrêté du ministre des finances du 01-03-2016. -Ce
seuil est réduit à trois mille dinars pour la prime unique et
à mille dinars pour la prime périodique d'une assurance vie.
-L'abstention de nouer ou de
poursuivre une relation d'affaires en cas de données non
suffisantes ou si elles ne sont pas suffisamment claires ou non
véridiques
-La société doit faire, sans délai et par
écrit, une déclaration auprès de la CTAF sur les
opérations soupçonnées de faire lien avec:
*des fonds provenant d'actes criminels, *le financement de
terrorisme.
Cette déclaration doit porter sur les opérations
non entamées (tentatives) et sur les opérations
réalisées si des nouvelles données viennent renforcer la
suspicion
-L'article 136 de la loi n° 2015-26.
Le manquement
intentionnel au devoir de déclaration est puni d'une
amende égale à la moitié du montant objet de la
déclaration
51
Tableau 1 : Modèle de référentiel
réglementaire
Paragraphe 2 : La cartographie des risques
Dans son article 13, la décision n°1-2016 du
CGA prévoit qu'en plus du contrôle du respect des
dispositions législatives et réglementaires et des exigences
déontologiques et professionnelles afférentes à l'exercice
de l'activité d'assurance, la fonction conformité est
appelée également à identifier et évaluer le risque
de non-conformité. Pour ce faire, le RCC doit
formaliser et maintenir à jour une cartographie des risques de
non-conformité.
Par définition, la cartographie de risques est une
démarche qui consiste à identifier, évaluer,
hiérarchiser et gérer les risques inhérents aux
activités de l'entreprise, c'est un élément clé
pour la gestion des risques de non-conformité. Elle constitue un outil
qui permet à la fonction de conformité d'avoir une vision
dynamique des foyers d'exposition aux risques et d'agir en temps réel
sur les incidents générateurs de risques pour en atténuer
soit l'impact soit la fréquence, compte tenu de l'appétence au
risque de l'entreprise.
En sa qualité d'outil de gestion, la cartographie des
risques permet d'appréhender l'ensemble des facteurs susceptibles
d'affecter les activités et leur performance et d'investiguer de
façon approfondie l'ensemble des processus managériaux, support
et opérationnels que les activités exigent de mettre en oeuvre
afin de définir les actions nécessaires pour se prémunir
au maximum des risques. Il s'agit d'un levier indispensable au pilotage des
risques et constitue le socle de la stratégie de gestion des risques.
L'élaboration de la cartographie des risques de
non-conformité relève parmi les prérogatives de la
fonction conformité, mais la complexité de cette mission
nécessite l'adhésion de multiples parties prenantes en interne,
notamment le comité d'audit et le comité de risques au niveau du
conseil d'administration, la direction générale, le comité
de direction...etc.
Sur le plan méthodologique, l'élaboration de la
cartographie des risques (B) doit prendre en
considération un ensemble d'éléments
méthodologiques (A) pour lui assurer la pertinence et
la fiabilité.
A : Préconisations méthodologique
Pour qu'elle soit pertinente, la cartographie des risques doit
présenter certaines caractéristiques (I) qui
dépendent largement de l'approche adoptée
(II).
I. Caractéristiques de la cartographie des risques
a) Cartographie exhaustive et précise
Pour établir la cartographie des risques, le RCC doit
répertorier préalablement les différents processus
(métier, managérial et support) mis en oeuvre par l'entreprise
dans le cadre de son activité afin de rendre plus facile le recensement
des risques inhérentes, un tel procédé nécessite
l'implication de l'ensemble des acteurs concernés notamment les
dirigeants et les experts métier.
52
Il est à noter dans ce cadre que la recherche de
l'exhaustivité à l'occasion de l'élaboration de la
cartographie ne doit pas affecter le travail de recensement, certains de ces
risques s'avérant au final non significatifs.
b) La granularité de la cartographie
Renvoyant au niveau de détail que peut retenir
l'entreprise pour construire la cartographie des risques, la granularité
est essentielle dans la mesure où la finesse du détail rend
l'identification des risques plus importante et permet de calibrer la
démarche aux moyens déployés et au planning mis en
place.
Pour une société d'assurances, cinq niveaux de
granularité peuvent être définis :
? Métier : assurance Auto,
IARDS58, Vie...
? Famille ou domaine IARDS : Incendie,
assistance en voyage... ? Processus : souscription, sinistres...
? Opération : règlement de sinistre, recours
inter-compagnies... ? Tâche élémentaire : nomination d'un
expert...
c) Cartographie formalisée et
accessible
La cartographie des risques est un document structuré,
comprenant une présentation synthétique des informations
relatives aux risques de non-conformité que peut encourir l'entreprise
d'assurances ou de réassurance. Ce document peut être
organisé selon les niveaux de granularité retenus par
l'entreprise, une telle organisation fait de la cartographie une
présentation arborescente des risques.
Bien que ce document soit à la base un outil de
management, rien n'empêche de le présenté à
l'ensemble du personnel pour des fins de sensibilisation et de conduite de
changement, la cartographie des risques est un support pour la diffusion de la
culture de risques dans l'entreprise.
d) Cartographie évolutive
Compte tenu de l'évolution de l'entreprise et de sa
réactivité avec les changements soit interne (nouveau processus,
évolution du modèle économique, restructuration ...) soit
externe (changement du cadre réglementaire, mutations économique
profondes...). Il est indispensable de faire vivre la cartographie des risques
en l'actualisant régulièrement, une évaluation annuelle
rend cet outil plus opérant. En tout état de cause, la
cartographie des risques doit être mise à jour en fonction de
l'évolution de l'organisation de l'entreprise, de l'évolution de
son activité et des mutations qui surgirent dans son environnement. La
fiabilité de la cartographie des risques de non-conformité se
mesure par sa capacité à refléter l'évolution de
l'entreprise.
II. Le choix d'une approche
En plus des préconisations méthodologiques
citées plus haut, l'élaboration d'une cartographie de risques
nécessite le choix d'une méthode parmi plusieurs possibles. Dans
ce cadre, nous allons passer en revue l'approche Top Down (a)
et l'approche Bottom up (b). Mais pour des
raisons relatives à la pertinence de la cartographie et sa
fiabilité, nous proposons de combiner (c) ces deux
approches.
53
58 Incendie, accidents, risques divers et
spéciaux.
a) L'approche Top Down
Utilisée souvent lors d'une démarche de
recensement par thématique, l'approche descendante consiste à
faire détecter et identifier les risques par les dirigeants effectifs de
l'entreprise, elle se base sur un inventaire des risques formulé soit
à partir de l'historique des incidents rencontrés soit des
rapports d'audit interne et d'inspection ou des reporting du contrôle
permanent. Selon cette approche, le risque est appréhendé dans
une vision générale puis il est soumis à une analyse
d'experts.
Bien qu'elle présente l'avantage d'impliquer vivement
les dirigeants de l'entreprise, l'approche Top Down peut se trouver en
difficulté pour établir le rattachement des risques aux processus
et pour remplir la double condition de l'exhaustivité et de la
granularité de la cartographie des risques.
b) L'approche Bottom Up
Cette approche reconnait aux opérationnels un
rôle crucial dans l'identification des risques, il s'agit de faire la
remontée des risques de leurs foyers vers les personnes en charge de
l'élaboration de la cartographie. Pour se faire, cette approche
nécessite la tenue intensive des réunions de groupes de travail
et des comités de réflexion, cette approche dite ascendante,
nécessite comme point de départ le recensement des processus.
L'approche Bottom Up permet, d'une part, l'analyse
systématique et concomitante des risques et des éléments
déployés par l'entreprise pour les maîtriser et d'autre
part l'implication satisfaisante des opérationnels et favorise
significativement l'exhaustivité et la granularité de la
cartographie des risques. Cette approche parait plus adéquate pour
l'élaboration d'une cartographie générale des risques
inhérents à l'activité de l'entreprise
c) L'approche combinée
Ce passage en revue nous a révélé que ces
deux approches ne s'opposent pas, elles sont complémentaires. La vision
globale de l'approche Top Down facilite l'identification des actions à
entreprendre selon l'approche Bottom Up et définie ce qui remonte en
priorité. L'approche Bottom Up permet de combler les lacunes de la
vision globale de l'approche Top Down et de décliner ensuite cette
vision dans tous les niveaux des processus de l'entreprise.
Ces deux approches peuvent être menées soit
successivement, soit simultanément, et la conduite concomitante nous
donne une nouvelle approche dite combinée.
Cette approche consiste dans la conciliation des deux
méthodes précédentes et de les faire cohabiter lors de
l'élaboration de la cartographies des risques.
La mise en oeuvre de cette méthode permet de :
? définir le niveau de granularité opportune
pour l'entreprise en conciliant la vision globale des risques que
procède l'approche Top Down et la redondance59 qui
caractérise l'approche Bottom Up.
54
59 La recherche du niveau le plus fin de la
granularité.
55
56
? Construire la cartographie qui reflète la
stratégie de l'entreprise en matière de gestion de risque et qui
exprime son appétence au risque. Pour cette fin, il faut
considérer la vision globale des dirigeants comme une
référence pour déterminer l'étendue de
l'exhaustivité de la cartographie.
? Faire vivre au mieux la cartographie des risque et la
maintenir à jour dans la mesure où, d'un côté,
l'approche Top Down permet aux dirigeants d'intervenir le cas
échéant sur la base des de l'inventaire des incidents
rencontrés soit des rapports d'audit interne et d'inspection ou de
reporting du contrôle permanent et d'un autre côté,
l'approche Bottom Up permet une maîtrise parfaite des processus et les
risques y rattachés.
B : L'élaboration de la cartographie des
risques
Sachant que l'élaboration de la cartographie des risques
est une démarche qui se compose d'un ensemble d'étapes, nous
estimons qu'un passage obligé ou non par toutes ces étapes n'est
pas un objectif en soi. Toutefois, la cartographie des risques, de par sa
nature de document descriptif, doit ressortir les risques (I)
et les éléments de maîtrise (II)
pour pouvoir donner par la suite une cotation objective
(III).
I. Identification des risques
Généralement les entreprises d'assurances ou de
réassurance sont exposées à quatre grandes familles de
risques : les risques financiers, les risques d'assurances, les
risques opérationnels et les risques stratégiques, de
réputation et environnementaux. S'agissant des risques de
non-conformité, il est à préciser qu'il s'agit
principalement d'un sous-ensemble des risques opérationnels.
Considérée comme la première
étape, l'identification des risques cherche à définir les
risques « brut »60 c'est-à-dire les risques
intrinsèques ou inhérents aux processus indépendamment des
mesures de mitigation et de contrôle mis en place. Et pour être
efficace, l'identification des risques nécessite deux prérequis,
à savoir, le référentiel des processus61 et le
référentiel réglementaire.
Pour son objet, l'identification des risques consiste à
recenser l'ensemble des risques de non-conformité inhérents
à différentes activités de l'entreprise, définir
leurs foyers et localiser les points de vulnérabilité de
l'entreprise.
Dans la pratique, il s'agit de dresser une liste de tous les
risques de non-conformité aux quels l'entreprise fait ou peut faire
face. L'architecture de cette liste doit révéler un nombre de
niveaux pouvant aller à cinq ou même à six, avec chaque
niveau exprime la déclinaison du niveau précédent.
L'ensemble de ces niveaux reflète le niveau de la granularité
retenu par l'entreprise.
Le premier niveau ce n'est que la famille des risques
opérationnels, il est donc commun à toutes les entreprises,
tandis que les autres niveaux expriment en quelque sorte les
spécificités de chaque entreprise.
60 Par opposition à la notion du risque «
Net » qui correspond au niveau du risque après avoir être
traité en mettant en place les mesures d'atténuation et de
contrôle adéquates.
61 (Processus métiers, processus supports et
processus managériaux).
Après avoir listé les risques d'une
manière arborescente, il est nécessaire de les
qualifier62 et de détailler leurs causes et
conséquences63, puis enfin, les rattacher aux processus pour
pouvoir déployer au mieux les éléments de
maîtrise.
L'ensemble des risques recensés doivent faire l'objet
d'une évaluation en mesurant le niveau de leur criticité en terme
d'impact (perte éventuelle en unités de valeur) et le niveau de
leur criticité en terme de fréquence (l'occurrence possible en
une année) (moyen, élevé et certain)
II. Evaluation des éléments de
maîtrise de risques
La deuxième phase de la démarche de
l'élaboration de la cartographie des risques consiste à
identifier les composants du dispositif de contrôle interne dans son
globalité et évaluer les éléments
dédiés aux risques de non-conformité afin de
déterminer les risques nets ou résiduels.
En fait, le dispositif de maîtrise des risques regroupe
plusieurs éléments qui visent à réduire
l'exposition aux risques et qui sont soit de nature
préventive agissant sur les causes pour réduire la
probabilité d'occurrence soit de nature curative
agissant sur les conséquences pour réduire
l'impact.
Parmi les éléments composants du dispositif de
maîtrise de risque on peut citer : > Le manuel de procédures,
méthodes, normes et règles de gestion.
> Les structures de contrôle permanent de premier et de
deuxième niveau.
> Les outils de pilotage et de reporting comme les
indicateurs de risques, les tableaux de bord...
> Audit interne et externe.
> Habilitation, qualification et formation des ressources
humaines. > L'organigramme, fiche de poste.
Dans la pratique la rigidité/flexibilité du
dispositif de maîtrise de risques reflète l'appétence pour
le risque (généralement formulée quantitativement et
qualitativement) comme elle est définie par les organes de gouvernance
et de direction.
Le rôle des éléments de maîtrise se
manifeste pratiquement dans la gestion quotidienne de l'entreprise64
et consiste dans l'encadrement de la prise de risque en fixant les seuils de
tolérance
Une fois listés dans un document
référentiel, les éléments de maîtrise doivent
faire l'objet d'une évaluation rigoureuse, il faut interroger le
dispositif de contrôle mis en place et vérifier s'il est
formalisé65 ? S'il est supervisé66 ? S'il
est pertinent67 ? S'il est efficace68 ?
62 Attribuer à chaque risque une nomenclature
adéquate.
63 Définir les causes et déterminer
les conséquences ça va servir de base pour quantifier la
fréquence et l'impact et construire les matrices inhérentes.
64Exemple : La politique de souscription
définie les produits autorisés à la vente, ou les
conditions de souscriptions acceptables, ou les engagements maximaux.
57
Bien que le dispositif de contrôle doit être
formalisé, supervisé, pertinent et efficace, il est à
noter que seules l'efficacité et la pertinence sont
considérées comme échelles pour l'évaluation de sa
performance.
L'évaluation du dispositif de contrôle et les
éléments qu'ils le composent et au coeur de l'élaboration
de la cartographie des risque dans la mesure où elle permet le profilage
des risques nets.
Figure 5 : Matrice d'évaluation des
éléments de maîtrise des risques
65 La formalisation consiste à
élaborer un plan de contrôle détaillant l'objet de
contrôle et son étendue ainsi que son niveau, sa
périodicité et les personnes en charge.
66 La supervision désigne la nomination d'un
responsable pour assurer l'exécution et la continuité du
contrôle et par conséquent la fiabilité des
résultats à remonter.
67 La pertinence réside dans l'application
stricte des directives du plan de contrôle d'une part et dans la
mobilisation des moyens adéquats pour l'exercice du contrôle
d'autre part, la pertinence renvoie à l'adéquation du
contrôle par rapport son objet.
68 L'efficacité désigne la
capacité du dispositif de contrôle à détecter les
incidents, à filtrer les risques et rejeter ceux qui dépassent
les seuils de tolérance acceptés par l'entreprise,
l'efficacité renvoie à la bonne application du contrôle.
58
III. La cotation des risques
Au départ, l'évaluation des risques consiste en
une analyse qualitative dont l'objet est d'identifier et de décrire les
trois facteurs suivant : les causes des risques, le dispositif de
maîtrise et les conséquences.
Comme expliqué plus haut, en entend par cause,
l'élément générateur direct de
l'évènement nuisible et par dispositif de maîtrise,
l'ensemble des éléments (procédures, systèmes,
indicateurs de suivi et autres) mis en place afin de réduire
l'occurrence de l'évènement de risque et de limiter les impacts
en cas d'occurrence.
La conséquence est un effet consécutif à
l'occurrence de l'évènement générateur de risque.
Elle peut être définie quantitativement ou qualitativement.
Une fois ces trois facteurs sont bien identifiés et
analysés, des échelles d'évaluation doivent être
établies et mises en place pour pouvoir concevoir par la suite les
matrices relatives à :
? La criticité : les deux
paramètres de la criticité sont la fréquence et la
gravité des risques. D'habitude chaque paramètre se manifeste sur
quatre à cinq niveaux comme illustrée dans la matrice suivante
:
Figure 6 : Matrice de criticité
59
? L'évaluation des risques bruts
: Il s'agit de hiérarchiser les risques et de les classer
dans des catégories selon les degrés de leur criticité
(voir la matrice de criticité)
? La performance du dispositif de
contrôle et les éléments de maîtrise de risques
afférents : c'est-à-dire la capacité du dispositif
à contrôler et à maîtriser les risques (voir la
matrice d'évaluation des éléments de maîtrise)
? L'évaluation des risques nets
: il s'agit mesurer les risques résiduels ou les risques
persistants après mise en oeuvre des éléments de
maîtrise, cette évaluation consiste dans la combinaison de la
performance du dispositif de maîtrise et le risque brut.
Figure 7 : Matrice d'évaluation du risque
net
Bien que ces matrices visent au final à quantifier
l'impact des risques sur l'activité de l'entreprise et à
évaluer la perte financière qui en résulte, il importe de
souligner que la cotation des risques d'image semble difficile voire même
impossible, c'est un risque non quantifiable notamment pour le paramètre
« impact ». Face à cette limite, nous qualifions
d'indispensable l'enrichissement de la cartographie en signalant chaque risque
présentant en plus de l'impact financier un risque de
réputation.
Relevant de la démarche de gestion des risques, la
cartographie des risques est un outil indispensable pour mener au mieux la
gouvernance de l'entreprise d'assurances. Elle permet d'une part le partage
d'un même référentiel de risques afin d'unifier la
perception des risques et leur évaluation par l'ensemble du personnel et
d'autre part l'amélioration du reporting et de la communication en
donnant la possibilité de visualiser en temps réel des risques.
En tant que
60
telle, la cartographie des risques est un outil de mise en
conformité qui peut agir positivement sur la perception de l'image de
l'entreprise par l'ensemble des parties prenantes. Son intérêt est
loin d'être un simple recensement et évaluation d'un ensemble
d'évènements préjudiciables, son rôle de levier de
performance doit être appréhendé et confirmé dans la
prise des décisions stratégiques et dans la gestion quotidienne
des activités de l'entreprise.
En conclusion de ce chapitre nous tenons à rappeler que
la conformité est définie comme l'ensemble des processus qui
permettent d'assurer le respect des normes applicables à l'entreprise
par ses parties prenantes, mais aussi des valeurs et d'un esprit éthique
insufflé par les dirigeants. C'est aussi, et surtout, une action
proactive qui vise à organiser les procédures et les moyens
nécessaires au respect de la réglementation par l'entreprise
d'assurances ou de réassurance. Elle est donc un sujet
multidimensionnel.
Ce sujet soulève ainsi de nombreuses interrogations
chez les dirigeants. Comment les nouvelles obligations vont-elles impacter les
entreprises dans leur organisation, leur gouvernance et leur business model ?
Comment faire de la compliance un outil de performance économique et de
compétitivité ? Quels rôles le responsable
conformité et son équipe vont-ils endosser pour accompagner cette
évolution et comment doivent-ils s'y préparer ? Comment concilier
transparence et secret des affaires ?
Au plan business et opérationnel, c'est en effet, la
conformité est un outil incomparable en matière d'organisation et
de développement interne et externe de l'entreprise, qui assure la
cohésion des parties prenantes autour de valeurs communes. On estime
qu'arriver à démontrer l'efficacité du dispositif de
conformité est un véritable avantage compétitif.
On pense que la question est de savoir comment être
conforme demain, comment établir un plan d'action efficace et se
questionner à nouveau sur la façon d'organiser sa
conformité. les bons plans de conformité contribuent à
préserver une image positive de l'entreprise, facteur de confiance pour
les clients et les fournisseurs et gage de bon fonctionnement et de bonne
gouvernance pour les actionnaires, tout en limitant les risques auxquels
l'entreprise peut être exposée.
61
Conclusion générale
Dans une note de synthèse publiée en octobre
2012, l'Institut Français des
Administrateurs (IFA) préconise les
dirigeants effectifs des entreprises à « définir les valeurs
communes et les principes d'action devant gouverner la conduite des
activités et le comportement des collaborateurs et de s'assurer de leur
mise en oeuvre »
Bien que cette préconisation illustre une forte
conscience pour les dirigeants du rôle prépondérant de
l'éthique et de la déontologie pour diffuser une culture
d'entreprise, elle parait de l'autre côté insuffisante pour
convaincre ces dirigeants de satisfaire les exigences règlementaires,
d'où l'accroissement du rôle des instances de régulation
dans la démarche de la mise en conformité pour les
entreprises.
La gouvernance d'entreprise nécessite la mise en place
d'un dispositif de pilotage intégré incluant en plus de la
dimension opérationnelle et la dimension stratégique une
troisième relative aux risques.
Aujourd'hui, l'appréhension de l'environnement, la
maîtrise du cadre règlementaire et normatif et la construction
d'une cartographie exhaustive des risques de non-conformité
avérés et potentiels avec un niveau de granularité
compatible avec l'appétence aux risques de l'entreprise semblent des
prérequis indispensables pour le fonctionnement du dispositif de
pilotage
Renvoyant à l'engagement à
l'intégrité et au respect des prescriptions légales et des
bonnes règles de conduite, la conformité est souvent
perçue comme une entrave sur la voie de réalisation du chiffre
d'affaire. En fait la conformité, et de par sa nature de dispositif de
contrôle, peut ne pas permettre la célérité des
transactions et affecte négativement le chiffre d'affaire.
A notre sens, la présomption de la solidité de
cette perception, ne peut pas dénier le rôle que joue la
conformité pour l'atteinte des objectifs commerciaux pour l'entreprise.
Contrairement à cette optique, la conformité est un pilier de
bonne gouvernance et un levier de performance. L'implémentation de la
fonction conformité et la veille à sa bonne organisation ne
peuvent que consolider la bonne gouvernance de l'entreprise, la maîtrise
de l'ensemble des risques de non-conformité et le soin de l'image de
l'entreprise ne peuvent que renforcer sa performance.
Bibliographie
62
+ Code des assurances.
+ Code des sociétés commerciales.
+ La loi organique n°2015-26 du 7 août 2015
relative à la lutte contre le terrorisme et la
répression du blanchiment d'argent telle que
modifiée et complétée par la loi n°2019-9
du 23 janvier 2019.
+ Loi n° 2015-36 du 15 septembre 2015, relative à
la réorganisation de la concurrence et
des prix.
+ Loi 92-117 du 07 décembre 1992 relative à la
protection du consommateur.
+ Loi 98-40 du 02 Juin 1998 relative aux techniques de vente
et à la publicité
commerciale.
+ Loi organique n° 2004-63 du 27 juillet 2004, portant
sur la protection des données à
caractère personnel.
+ La loi n° 1994-17 du 14 novembre 1994 portant
réorganisation du marché financier.
+ Loi n° 2005-96 du 18 octobre 2005 relative au
renforcement de la sécurité des
relations financières.
+ le décret-loi cadre n° 2011-120 du 14 novembre
2011, relatif à la lutte contre la
corruption.
+ Le décret gouvernemental n° 54-2019 du
21-01-2019, portant fixation des méthodes et
des critères d'identification du
bénéficiaire effectif.
+ L'arrêté du ministre des finances du
01-03-2016, portant fixation des montants prévus
aux articles 100, 107, 108, 114 et 140 de loi n° 2015-26
du 7 août 2015, relative à la
lutte contre le terrorisme et la répression du
blanchiment d'argent.
+ Le règlement du CGA n°1- 2018 du 02-03-2018,
relatif à la lutte contre le terrorisme
et de la prolifération et la répression du
blanchiment dans le secteur des assurances
+ Projet de révision et modification du code des
assurances.
+ Règlement n°1- 2016 du CGA du 13 juillet 2016
relatif à l'assurance vie et la
capitalisation.
+ la Directive 2009/138/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 novembre 2009
« solvabilité II »
+ Recommandation n° 1 du GAFI en matière de LAB/FT
« Évaluation des risques et
application d'une approche fondée sur les risques
».
+ La conformité et la gestion prudentielle dans une
compagnie d'assurance : Démarche
d'implémentation dans le contexte tunisien : Radhouane
BEN AMARA. Diplôme de
master professionnel
+ Conformité pourquoi et comment : revue horizons
bancaires. HORIZONS
BANCAIRES-NUMÉRO 329- MAI 2006 REVUE EDITEE PAR
CREDIT
AGRICOLES.
+ IFACI : LES CAHIERS DE LA RECHERCHE. Cartographie des
risques. (c) IFACI -
Paris - décembre 2013 ISBN : 978-2-915042-53-5 - ISSN :
1778-7327.
+ AEAPP : CEIOPS' Advice for Level 2 Implimenting Measures on
Solvency II: system
of governance. (former Consultation Paper 33) October 2009.
+
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gouvernance#Gouvernance
de l'entreprise.
+
file:///C:/Users/USER/Desktop/LA%20CONFORMITE/conformité.pdf.
63
+ Le cercle d'éthique des affaires :
RÉFÉRENTIEL PROFESSIONNEL : ÉTHIQUE &
CONFORMITÉ.
+ SUR LE CONTROLE INTERNE DANS UNE ENTREPRISE D'ASSURANCE :
Jean-Louis BELLANDO. Version révisée le 6 avril 2004.
+ Les métiers de la conformité dans la banque :
Stéphane Sébéloué & Camille Zanvit.
LES ETUDES DE L'OBSERVATOIRE : ETUDE METIER. OCTOBRE 2015. +
VEILLES, PROCESSUS ET METHODOLOGIE : DAMIEN DEROUET ET
FABIEN LEPOIVRE. NEVAOCONSEIL stratège en entreprise :
2001-2005
+ YVAN ALLAIRE : Forum économique mondial, « forum
de Davos ». 21 JUIN 2013. + The compliance function in banks. Une lecture
du document consultatif publié par le
Comité de Bâle HAL. Marc Lenglet : HAL Id: halshs
00349044. 26 février 2009 :
archives ouvertes.
+ Reverso Dictionnaire.
+ Larousse.
+ La toupie : Toupictionnaire
64
Table des matières
Remerciements 3
Liste des figures 4
Liste des sigles et acronymes 5
Introduction générale 7
Chapitre 1 : La dimension substantielle de la
conformité en assurance 9
Section 1 : La conformité, un socle normatif 9
Paragraphe 1 : La conformité un devoir
d'intégrité 10
A : Définition du devoir d'intégrité 10
B : La portée du devoir d'intégrité 11
Paragraphe 2 : La conformité un devoir
règlementaire 12
A : Définition du devoir règlementaire 12
B : Les contours du devoir règlementaire 13
Section 2 : la non-conformité et les instances de
contrôle 15
Paragraphe 1: les risques encourus 16
A : Le risque de pertes financières 16
B : Le risque de sanctions 17
I. La sanction judiciaire 17
a) La sanction pénale 17
b) La sanction civile 18
II. La sanction administrative et disciplinaire 18
C : Le risque d'image ou de réputation 19
Paragraphe 2 : les instances de contrôle 20
A : Les instances dotées du pouvoir de sanction 20
I. Le comité général des assurances (CGA)
20
a) Présentation du CGA. 20
b) Les pouvoirs du CGA 21
1. Le pouvoir d'enquêter 21
2. Le pouvoir de sanction 22
II. Le conseil de la concurrence (CC) 22
a) Présentation du conseil de la concurrence 22
b) L'attribution juridictionnelle du conseil de la concurrence
23
B : Les instances non dotées du pouvoir de sanction 23
65
I. Le conseil du marché financier (CMF) 23
a) Présentation du CMF 24
b) Les attributions du CMF 24
II. L'instance nationale de protection des données
personnelles (INPDP) 25
a) Présentation de l'INPDP 25
b) Les pouvoirs de l'INPDP 25
III. L'Instance Nationale de Lutte Contre la Corruption (INLUCC)
26
a) Présentation de l'INLUCC 26
b) Les pouvoirs de l'INLUCC 27
Chapitre 2: La dimension organisationnelle de la
conformité en assurance 29
Section 1 : La fonction de conformité, un outil de
gouvernance d'entreprise 30
Paragraphe 1 : la fonction de conformité au Coeur du
contrôle interne 30
A : la fonction de conformité, une deuxième ligne
de défense 31
I. Le processus du contrôle de conformité 32
a) L'identification 32
b) L'évaluation 32
c) Le contrôle ou la surveillance 32
d) Le pilotage et le reporting 32
II. Le périmètre du contrôle permanent de la
conformité 34
B : Les facteurs clés pour le succès de la fonction
conformité 34
I. L'engagement non conditionné du top management 35
II. L'allocation rationnelle des ressources 36
a) Les bonnes compétences 36
b) Le système d'information 37
Paragraphe 2 : Configuration et déploiement de la
structure de contrôle de conformité 38
A : Les principes et les objectifs organisationnels 38
I. L'autonomie de la fonction de conformité 38
II. Promotion de la synergie 39
B : Modèle organisationnel : Toile d'araignée 41
Figure 4 : Modèle pour l'organisation et le
déploiement de la fonction de contrôle de
conformité 42
I. La direction de contrôle conformité 43
II. Les correspondants (les relais) 43
Section 2: Les outils de la gestion de la conformité 44
Paragraphe 1 : Le référentiel réglementaire
45
A : La constitution d'un référentiel
réglementaire 46
I. Identification du cadre réglementaire 46
II. La vulgarisation de l'information et La simplification des
exigences réglementaires 47
66
III. Définition des sanctions encourus 47
VI. Les recommandations 48
B : Simulation d'un référentiel en matière
de LAB/FT 48
Paragraphe 2 : La cartographie des risques 52
A : Préconisations méthodologique 52
I. Caractéristiques de la cartographie des risques 52
a) Cartographie exhaustive et précise 52
b) La granularité de la cartographie 53
c) Cartographie formalisée et accessible 53
d) Cartographie évolutive 53
II. Le choix d'une approche 53
a) L'approche Top Down 54
b) L'approche Bottom Up 54
c) L'approche combinée 54
B : L'élaboration de la cartographie des risques 55
I. Identification des risques 55
II. Evaluation des éléments de maîtrise de
risques 56
III. La cotation des risques 58
Conclusion générale 61
Bibliographie 62
Table des matières 64
67
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