Isolationnisme et la géoéconomie des états-Unis d'Amérique sous Donald Trump. Enjeux et perspectives.par Raphael Mbumba Muamba Université de Lubumbashi(UNILU) /RDC - Licence en Relations Internationales 2018 |
6. Théorie explicative de l'étudePour conduire à bon port cette recherche, nous optons pour la théorie réaliste. Le réalisme plonge sans doute ses racines dans une longue tradition qui remonte à l'Antiquité, avec notamment Thucydide, Nicolas Machiavel18(*), et prend une forme particulièrement structurée dans des oeuvres telles que celle de Thomas Hobbes, au XVIIe siècle, privilégiant la dimension conflictuelle des relations internationales et insistant sur l'anarchie caractéristique de la société internationale19(*).Cependant, le réalisme contemporain, en tant que paradigme des relations internationales, émerge comme le rejet d'une vision idéaliste de ces relations, apparue au lendemain de la première Guerre mondiale. Le courant réaliste des relations internationales, représenté notamment par George Kennan, George Schwartzenberger, Kenneth Thompson, Arnold Wolfers, E. H. Carr, Henri Kissinger, a eu comme chefs de file aux États-Unis Hans Morgenthau et en France Raymond Aron.Pour Hans Morgenthau, dont l'ouvrage clé Politics among Nations paraît en 1948, les relations internationales sont marquées du sceau du conflit, en raison des pulsions agressives inscrites dans la nature humaine, ainsi que de la nature anarchique et non intégrée du système international, caractérisé par l'absence de toute autorité capable d'imposer à ses membres un ordre contraignant. Selon lui, l'humanité n'a pu engendrer que des solidarités politiques partielles sous forme d'États souverains, la société internationale restant fragmentée. Dans cette perspective, le comportement des États est mû par la recherche de l'intérêt national exprimé en termes de puissance. L'État est l'acteur central des relations internationales, et ces dernières ont pour dynamique l'évolution du rapport des forces entre les États. La politique étrangère a pour préoccupation principale la sécurité de l'État et les choix en matière de politique étrangère sont des choix rationnels qui sont opérés en fonction de l'intérêt national.Pour Morgenthau, « la politique internationale peut être définie [...] comme un effort continuel pour maintenir et accroître la puissance de sa propre nation et pour restreindre ou réduire la puissance des autres nations »20(*). Sans parvenir à effacer la nature profondément anarchique du système international, la politique étrangère des États peut toutefois assurer la recherche d'un certain ordre minimal, un équilibre dans le rapport des forces, notamment à travers la diplomatie, l'économie, le développement du droit international et celui des organisations internationales. Bien que partageant l'essentiel de la vision réaliste de Morgenthau et de son rejet de l'illusion idéaliste, Raymond Aron, philosophe sceptique, refuse d'élaborer une théorie de la nature humaine et se livre à une analyse sociologique du champ « diplomatico-stratégique » mettant l'accent sur la nature non intégrée de ce dernier. Pour lui, le trait spécifique des relations internationales réside dans « la légitimité et la légalité du recours à la force de la part des acteurs»21(*). Il considère que les réalistes américains ne prennent pas suffisamment en compte la différence existant entre la politique interétatique et la politique intraétatique. Il note que les États « n'ayant pas renoncé à se faire justice eux-mêmes et à demeurer seuls juges de ce qu'exige leur honneur, la survie des unités politiques dépend, en dernière analyse, de l'équilibre des forces et, les hommes d'État ont le devoir d'être soucieux d'abord de la nation dont le destin leur est confié. La nécessité de l'égoïsme national dérive logiquement de ce que les philosophes appelaient l'état de nature qui règne entre les États »22(*).En outre, Aron se dissocie de Morgenthau, car il considère la notion de puissance à laquelle recourt ce dernier comme imprécise, et la notion d'intérêt national comme dépourvue de signification, car variant d'une situation et d'un État à l'autre. Au moins les postulats de ces auteurs(Hans Morgenthau et Raymond Aron) rencontrent l'assentiment de notre étude, surtout qu'ils posent que : ü L'Etat est le seul ou le principal acteur le plus important des relations internationales.23(*) Ce postulat épouse mieux notre étude, car toutes les actions que mène l'administration Trump prime la nation américaine. ü Pour Hans Morgenthau la puissance et la quête de la puissance constitue le fondement de toute politique entre Etat24(*). Ce deuxième postulat du réalisme, rencontre mieux notre étude dès lors que toute série des mesures protectionnistes de l'administration Trump est pour restaurer la puissance américaine perdue par ses prédécesseurs et son leadership. ü L'intérêt national est le principe monteur de toute politique étrangère et ce concept d'intérêt se définit en termes de puissance25(*). Dans ce troisième postulat, nous tirons comme leçon que l'isolationnisme économique de Trump est pour apporter beaucoup d'emplois aux américains afin de garantir l'intérêt national. * 18 Voir Nicolas, M., Le prince, Paris, Pocket, 1998, 84-87. * 19 Voir Hobbes, T., Leviathan, Paris, Gallimard, 2000, pp.281-289. * 20 Morgenthau, H., Politics among Nations. The Struggle for Power and Peace, 2ième éd. New York, Alfred A. Knopf, 1948, p. 211. * 21 Aron, R., Qu'est-ce qu'une théorie des relations internationales »In Revue française de science Politique, vol.17, 1967, p. 843. * 22 Aron, R., Paix et guerre entre les nations Paris, Calmann-Lévy, 1962, p. 568. * 23Philippe, B., Théories des Relations Internationales, Paris, PUF, coll. Thémis, 55-56. * 24 Morgenthau, H., Opcit., p.688. * 25 Smouts M. C., Battisitella D. et Vennesson P., Dictionnaire des Relations Internationales, Paris, Dalloz, (2ième), 2006, p.13. |
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