Isolationnisme et la géoéconomie des états-Unis d'Amérique sous Donald Trump. Enjeux et perspectives.par Raphael Mbumba Muamba Université de Lubumbashi(UNILU) /RDC - Licence en Relations Internationales 2018 |
CHAPITRE I :LE CADRE CONCEPTUEL DE L'ETUDEAvant d'entrer dans le vif de cette dissertation, il importe de saisir ses contours notionnels. Il s'agit des notions sur l'isolationnisme et la géoéconomie. Section. I. LES NOTIONS SUR l'ISOLATIONNISMECette section circonscrit l'origine de l'isolationnisme, son contenu et son évolution. §1. L'origine du conceptL'idée de « non engagement » fut exprimée d'abord par le premier président américain Georges Washington (de 1789-1797) dans son discours d'adieu prononcé en 1796 : « notre grande règle de conduite envers les nations étrangères est d'étendre nos relations commerciales afin de n'avoir avec elles qu'aussi peu des liens politiques qu'il est possible. Autant que nous avons déjà formé des engagements remplissons-les, avec une parfaite bonne foi. Et tenons-nous-en là. L'Europe a un ensemble d'intérêts primordiaux, qui avec nous n'ont aucun rapport ou alors très lointain. Par conséquent elle est engagée dans les fréquentes polémiques dont les causes sont essentiellement étrangères à nos soucis. Par conséquent donc il est important pour nous de s'impliquer, à cause des liens artificiels, dans les vicissitudes ordinaires de sa politique ou les combinaisons et les conflits ordinaires de ses amitiés ou des inimitiés 26(*)». Pour Georges W., un certain nombre des questions mérite d'être posé :27(*) ü Pourquoi renoncer aux avantages d'une situation aussi particulière ? ü Pourquoi quitter notre propre sol pour nous tenir une terre étrangère ? ü Pourquoi, en entrelaçant notre destin avec celui d'une quelconque part de l'empire, empêtrer notre paix et notre prospérité dans les labeurs des ambitions, des rivalités, intérêts ou caprices européens ? L'idée de l'isolationnisme a été reprise par Jefferson (deuxième président des USA de 1801-1809) et puis par Monroe(troisième président américain des USA de 1817-1825), qui en fin fonde une doctrine appelée « l'isolationnisme », pour faire entendre « l'Amérique aux américains ». L'origine de l'isolationnisme nous permet d'aborder par la suite son contenu. §2. Le contenu de l'isolationnismeL'isolement géographique des États-Unis a amené dès sa création un courant isolationniste, incitant le pays à rester à l'écart des relations internationales. Ce courant isolationniste s'est maintenu jusqu'à l'acquisition de la bombe atomique par l'Union Soviétique, rendant illusoire la croyance en la protection des océans qui était toujours dans les esprits. George Washington, dans son « discours d'adieu » de 1787, affirme ne pas vouloir créer de liens artificiels avec l'Europe afin de ne pas laisser dépendre la paix et la prospérité américaines de l'ambition, de la rivalité, de l'intérêt, de l'humeur ou du caprice des Européens. Toujours dans l'optique de ne pas avoir à traiter avec les Européens, la doctrine de Monroe, telle qu'interprétée vers 1850, donne aux États-Unis la fonction de défendre le continent américain contre les empiétements des puissances européennes. Cet aspect moraliste de leur politique étrangère, soit la défense des peuples face à la domination européenne par la protection des États-Unis, affirme leur hégémonie sur le continent et implique que celui-ci devienne une zone d'influence américaine. Ainsi, même à cette époque, les intérêts nationaux étaient défendus dans la politique étasunienne. À la fin du XIXième siècle, avec la naissance de l'impérialisme américain, les principes moraux sont évoqués au même titre que les intérêts nationaux pour justifier l'expansionnisme américain28(*).L'isolationnisme devient une tendance de lapolitique étrangère des États-Unis pour une intervention minimale dans les affaires du monde. Il a longtemps été l'un des fondements de la politique étrangère des États-Unis, érigé en doctrine par le président James Monroe en 1823. Il a été historiquement défendu par les deux franges de l'échiquier politique américain, mais il a été mis à mal aux XXième et XXIième siècles. Avec George Washington : partisan de l'isolationnisme.À l'origine historique de l'isolationnisme américain était la volonté de maintenir une politique consensuelle vis-à-vis des anciennes puissances colonisatrices (surtout le Royaume-Uni et la France). En effet, le président George Washington, lors de son second mandat, devait faire face à deux courants. Le premier courant, défendu par le secrétaire au Trésor, Alexander Hamilton, voulait un rapprochement avec le Royaume-Uni au détriment de la France. Le second courant, mené par Thomas Jefferson, qui était sympathique à la France, s'opposait à toute concession aux ex-colonisateurs, surtout au Royaume-Uni. Un extrait du « message d'adieu » de Washington, écrit par Hamilton, explique le principe : « La grande règle vis-à-vis des nations étrangères est, en étendant nos relations commerciales, de n'avoir avec elles qu'aussi peu de liens politiques qu'il est possible.... L'Europe a toute une série d'intérêts de premier plan qui ne nous concernent pas ou qui ne nous touchent que de très loin.... Notre véritable politique doit être d'éviter des alliances permanentes avec quelque partie que ce soit du monde étranger »29(*). La souveraineté absolue et la liberté entière des États-Unis sont ainsi postulées. A travers cette doctrine, les USA promettaient de ne pas s'engager dans les affaires européennes alors qu'ils regardaient toute intervention des Etats européens sur le continent américain comme une agression. Cette clause était prévue pour protéger les Etats indépendants d'Amérique latine des prisées coloniales des Etats Européens.Au demeurant, l'isolationnisme ou la doctrine Monroe dont Jefferson et Monroe furent les fondateurs sinon les défenseurs devient un véritable courant de la politique étrangère américaine défendu jusqu'aujourd'hui par la bonne partie de l'opinion et des décideurs américains. C'est une forme déguisée d'interventionnisme ou impérialisme limité au continent américain, géostratégiquement découpé de l'Europe continental et des visées impériales. Il s'agit en filigrane, de défendre la thèse du continent américain « chasse gardée des USA », dont sa politique étrangère a décliné sa facette au cours la guerre froide.C'est une sorte d'impérialisme dirigé d'abord vers l'Amérique latine qui donne lieu à une formulation théorique avec corollaire Roosevelt de la doctrine Monroe en 1904 soulignent Pascal Gauchon et Jean-Marc Huissoud30(*). L'isolationnisme ainsi né et connu comme une véritable doctrine de la politique étrangère américaine devrait connaitre une évolution d'autant plus que les réalitéssociales restent mouvantes. * 26 Mwayila Tshiyembe, La politique étrangère des grandes puissances, L'Harmattan, collection géopolitique mondiale, 2012, pp. 81-82. * 27Extrait du testament de Georges W. de 1796, cité par Mwayila Tshiyembe, Op. Cit, p.82. * 28 Nouailhat P.-H., Les États-Unis et le monde au XXiè siècle, Paris, Armand-Colin, 2000, p.55. * 29 Mwayila Tshiyembe, Op.cit., p.82. * 30 Gauchon P. et Huissoud J.-M., les 100 mots de la géopolitique, Paris, Que sais-je, 2008, p.66. |
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