vi
REPUBLIQUE TOGOLAISE TRAVAIL - LIBERTE
- PATRIE
PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE
MINISTERE DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME
ADMINISTRATIVE
ECOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION B.P: 64
- Lomé (TOGO)
Email:
enatogo@ids.tg
Site web:
www.ena.tg
SOMMAIRE
MEMOIRE
natogo@ids.tg
POUR L'OBTENTION DU DIPLOME DE L'ENA CYCLE
III OPTION : DIPLOMATIE
THEME :
LA CONTRIBUTION DE L'ORGANISATION INTERNATIONALE
DE LA FRANCOPHONIE (OIF) A LA CONSOLIDATION DE LA DEMOCRATIE EN AFRIQUE
DE L'OUEST
Présenté et soutenu par : Sous la
direction de :
M. M'BEOU Kofi Nagno M. AGOKLA Kossi
Mawuli,
Enseignant chercheur à
l'Université de Lomé et de Kara
Chargé de Cours à l'ENA
Promotion: 2011-2013
vii
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS i
DEDICACE .iii
REMERCIEMENTS iv
AVERTISSEMENT ..v
INTRODUCTION .1
PREMIERE PARTIE : UNE CONTRIBUTION SALUTAIRE .7
CHAPITRE I: UNE CONTRIBUTION MULTIFORME A LA CULTURE
DEMOCRATIQUE 9
Section I: La promotion de la démocratie ..9
Paragraphe I : L'adoption d'un arsenal juridique
référentiel 9
Paragraphe II: La dénonciation des
régimes anti-démocratiques 13
Section II : L'appui à la consolidation de la
démocratie 17
Paragraphe I : La prévention des situations
conflictuelles 18
Paragraphe II: L'accompagnement des processus de sortie
de crise ..22
CHAPITRE II : LA CONSOLIDATION DE LA DEMOCRATIE PAR LA
COOPERATION 26
Section I : Le partenariat avec les réseaux
institutionnels 26
Paragraphe I : Le renforcement des capacités
nationales 26
Paragraphe II: La coopération
juridico-judiciaire 30
Section II : L'implication des acteurs
non-étatiques 34
Paragraphe I : L'implication des organisations
internationales 34
Paragraphe II: L'action de la société
civile .39
DEUXIEME PARTIE : UNE CONTRIBUTION PERFECTIBLE 43
CHAPITRE I : LES LIMITES DES ACTIONS DE L'OIF 45
Section I : Les difficultés intrinsèques
à l'OIF .45
Paragraphe I : Une organisation affaiblie ...45
Paragraphe II: La relative efficacité des
actions de l'OIF ..48
Section II : Les difficultés extrinsèques
51
Paragraphe I: La contestation de l'implication de l'OIF
52
Paragraphe II: La perte de crédibilité de
l'OIF 55
VIII
CHAPITRE II : UNE ADAPTATION NECESSAIRE DES ACTIONS DE L'OIF
|
..60
|
Section I : Les perspectives organisationnelles
|
60
|
Paragraphe I : La nécessité d'amélioration
de la démarche de la Francophonie
|
60
|
Paragraphe II: Un système institutionnel à
revisiter
|
64
|
Section II : Les adaptations aux actions de l'OIF
|
68
|
Paragraphe I : L'amélioration des actions instaurant la
démocratie
|
68
|
Paragraphe II: Le perfectionnement de l'assistance
|
71
|
CONCLUSION
|
...76
|
BIBLIOGRAPHIE
|
...vi
|
SIGLES ET ABREVIATIONS
AAHJF : Association Ouest Africaine des
Hautes Juridictions Francophones ACCT: Agence de
Coopération Culturelle et Technique
ix
ACP: Afrique-Caraïbes et Pacifique
AFCNDH : Association Francophone des Commissions
Nationales de promotion et de protection des Droits de l'Homme
AIF: Agence Intergouvernementale de la
Francophonie
AIMF: Association Internationale des Maires
Francophones
AOMF : Association des Ombudsmans et
Médiateurs Francophones
APF: Assemblée Parlementaire de la
Francophonie
APG: Accord Politique Global
AUF : Agence Universitaire Francophone
CEDEAO: Communauté Economique des Etats
de l'Afrique de l'Ouest
CEGEDI : Collecte, Gestion et Diffusion du
Droit
CENI : Commission Electorale Nationale
Indépendante
CIB : Conférence Internationale des
Barreaux de tradition juridique
CNT : Conseil National de Transition
CPF: Conseil Permanent de la Francophonie
CPI : Cour Pénale Internationale
CRESDA : Centre de Recherche Scientifique pour
le Développement à la base de la Démocratie en Afrique
CVJR: Commission Vérité Justice et
Réconciliation
DDHDP : Délégation aux Droits de
l'Homme, à la Démocratie et à la Paix DOMP:
Département des Opérations de Maintien de la Paix des
Nations Unies EPU : Examen Périodique Universel
FFIDHOP: Fonds Francophone d'Initiatives pour la
Démocratie, les Droits de l'Homme et la Paix
FMU : Fonds Multilatéral Unique
GF2D : Groupe de Réflexion et d'Action
Femme, Démocratie et Développement GIC-G :
Groupe International de Contact sur la Guinée-Conakry
X
HCDH: Haut Commissariat des Nations Unies aux
Droits de l'Homme
JURICAF : Jurisprudence des Cours
Suprêmes Francophones
OCAM: Organisation Commune Africaine et
Malgache
OIF: Organisation Internationale de la
Francophonie
ONU: Organisation des Nations Unies
OING: Organisation Internationale Non
Gouvernementale
ONG: Organisation Non Gouvernementale
OMP: Opération de Maintien de la
Paix
OSC: Organisation de la Société
Civile
PAIM: Programme d'Aide à l'Instruction
Militaire du Canada
PNUD: Programme des Nations Unies pour le
Développement
POSPM: Programme de Renforcement des
Opérations de Soutien de la Paix dans le Monde
RADDHO: Rencontre Africaine Des Droits de
l'Homme
RECAMP: Programme de Renforcement des
Capacités Africaines de Maintien de la Paix
RECEF : Réseau des Compétences
Electorales Francophones
REFAMP : Réseau des Femmes Anciens
Ministres et Parlementaires
TCA: Traité sur le Commerce des
Armes
UA: Union Africaine
UE: Union Européenne
UNIDIR: Institut des Nations Unies pour la
Recherche sur le Désarmement
UNITAR : Institut des Nations Unies pour la
formation et la Recherche
WILDAF-Togo: Women in Law and Democratic in
Africa au Togo
xi
XII
DEDICACE
Nous dédions ce mémoire à nos parents
Patrice M'BEOU et Véronique OGNAMIDIKOU pour nous avoir permis
d'accomplir d'inestimables réalisations sur cette terre.
REMERCIEMENTS
Au terme de ce travail, nous exprimons nos sincères
remerciements à :
- Monsieur Kossi Mawuli AGOKLA qui a accepté de tout coeur
la direction de ce travail malgré ses multiples occupations
professionnelles;
AVERTISSEMENT
XIII
- Messieurs les membres du jury pour leurs remarques
bienveillantes et utiles ;
Nos remerciements vont également à:
- Mademoiselle Nadège Hezouwè Tchilalo EKPAO pour
son courage et son soutien moral;
- Monsieur Hubert Kokou Nayo M'BEOU pour son soutien multiforme
;
- Monsieur Kokou Dzifa ADJEODA ;
- Toute l'administration de l'Ecole Nationale d'Administration
(ENA) ;
- Tout le personnel du Ministère des Affaires
Etrangères et de la Coopération ;
- Tous nos professeurs pour nous avoir cédé une
partie de leur connaissance et au-delà, tous ceux, parents,
collègues et amis, qui, chacun à sa manière, a
contribué, par l'aide et les encouragements constants, à
l'élaboration de ce document.
xiv
« L'ENA N'ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION
NI IMPROBATION AUX OPINIONS EMISES DANS CE MEMOIRE. ELLES DOIVENT ETRE
CONSIDEREES COMME PROPRES A LEUR AUTEUR »
xv
Introduction
Dès leur accession à l'indépendance, les
Etats se sont trouvés dotés de la
souveraineté1, un attribut qui leur permet de s'affirmer sur
le plan international et d'agir d'égal à égal2
avec leurs homologues de la communauté internationale. La
souveraineté implique l`exercice plein et entier des prérogatives
reconnues aux Etats, notamment la libre détermination de leur statut
politique. La Cour Internationale de Justice pour sa part, dans son arrêt
du 27 juin 1986 dans l'Affaire des activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua, a reconnu une valeur coutumière au principe
de non-ingérence et donc l'exclusivité dans l'exercice de la
souveraineté3. Dans l'exercice de cette souveraineté,
certains Etats ont opté pour le régime politique
démocratique4 dont les principes fondamentaux sont
malheureusement, pour la plupart, bafoués, ce qui amène les
observateurs à parler de déficit démocratique.
Ce déficit démocratique, qui est à la
base de nombreuses crises politiques en Afrique, a eu pour conséquence
la mise au ban des accusés, par la communauté internationale, de
bon nombre de pays. Les séries de coups d'Etat, formes
décriées d'accessions antidémocratiques au pouvoir, ont
malheureusement jalonné l'histoire de nombreux pays africains,
majoritairement francophones5. La communauté internationale,
qui était au départ permissive sur la gestion politique des
Etats, a fait désormais de la démocratie une condition de la
reconnaissance internationale de gouvernement, comme le témoigne le
discours de la Baule dont la substance peut être ainsi
résumée : « la France liera tout son effort de contribution
aux efforts qui seront accomplis pour aller vers plus de liberté
»6. Ce discours venait d'annoncer le début du processus
de démocratisation de l'Afrique.
En effet, si les années 1960 ont été
considérées comme celles des indépendances et des
régimes de partis uniques caractérisés par une gestion peu
démocratique des affaires de l'Etat,
1 Caractère suprême du pouvoir
politique, la souveraineté a fait son apparition avec le concept d'Etat
avec Jean Bodin en 1615 avant d'être systématisée par le
traité de Westphalie de 1648.
2 Cf. paragraphe 1er de l'article 2 de la
Charte des Nations Unies.
3Voir Cour Internationale de Justice, Affaire des
activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci
(Nicaragua c. /USA, fond, Arrêt du 27 juin 1986), Rec., 1986, p. 133,
§ 263.
4 Le régime politique en droit
constitutionnel peut être défini comme un mode de gouvernement
d'un Etat. Il résulte de la combinaison de multiples
éléments notamment juridiques (cadre constitutionnel, qui forme
le régime politique au sens étroit de l'expression) et
extra-juridiques (système de partis, personnalisation du pouvoir,
idéologie...) Cf. le Lexique des termes juridiques, Dalloz,
13è Ed. 2001, p. 473.
5 Au nombre de ces pays, figurent le Togo, le
Burkina-Faso, le Mali, le Niger...
6 Cf. Extrait de l'allocution prononcée le
20 juin 1990 par M. François Mitterrand, alors président de la
République française, à l'occasion de la séance
solennelle d'ouverture de la 16ème Conférence des
Chefs d'Etat de France et d'Afrique à la Baule.
xvi
les années 1990 au contraire ont rimé avec la
démocratie, le multipartisme et une série de conférences
nationales7 devant servir de cadres transitionnels des Etats vers la
démocratie. Cette période, quoique tardive, selon Hubert
Védrine, et qui a été témoin de l'accouchement
heureux des constitutions africaines néo-libérales, cadres de
consécration des principes démocratiques et des droits et
libertés publiques, constitue désormais une
réalité.8
Plusieurs institutions ont joué et continuent de jouer
un important rôle dans ce processus9. C'est justement dans
cette optique que nous avons choisi de réfléchir sur « la
contribution de l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) à
la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest ».
En effet, l'OIF joue un rôle considérable dans la
promotion et la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest de
sorte que la démocratie est devenue un principe majeur et
intrinsèque de l'existence de cette organisation. Nous en voulons pour
preuve la Déclaration de Bamako : «Francophonie et
démocratie sont indissociables; il ne saurait y avoir
d'approfondissement du projet francophone sans une progression constante vers
la démocratie et son incarnation dans les faits; c'est pourquoi la
Francophonie fait de l'engagement démocratique une priorité qui
doit se traduire par des propositions et réalisations concrètes
»10. Les Chefs d'Etat et de gouvernement ont
réaffirmé cette vision en prenant l'engagement de «
renforcer le rôle de la francophonie en faveur de la consolidation de la
paix, de la démocratie et des droits de l'homme » au cours du
sommet de Ouagadougou en 2004.
Cependant, parler des actions de l'OIF revient tout d'abord
à la présenter. L'OIF est un regroupement d'Etats ayant en
partage la langue française. L'idée d'une communauté
organique francophone et de l'édification d'un Commonwealth à la
française fut lancée par les Chefs d'Etat africains en juin 1966
lors du sommet de l'Organisation Commune Africaine et Malgache (OCAM) afin
d'éviter le morcellement des pays africains nouvellement
7 Parmi ces conférences nationales, on peut
mentionner celles tenues au Bénin ( du 19 au 28 février 1990), au
Congo ( du 25 février au 10 juin 1991), au Gabon ( du 27 mars au 19
avril 1990), au Niger ( du 29 juillet au 3 novembre 1991), au Mali ( du 29
juillet au 12 aout 1991), au Togo ( du 10 juillet au 28 aout 1991), au
Zaïre ( du
7 aout 1991 au 6 décembre 1992), au Tchad ( du 15 janvier
au 7 avril 1993) etc.
8 Pour Hubert Védrine, le discours de la
Baule est un « discours tardif mais réel », in les Mondes de
François Mitterrand, 1981-1995, Fayard, Paris, 1997, p.593.
9 Il s'agit notamment de l'Organisation des Nations
Unies (ONU), de l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), de
l'Union Africaine(UA), de la CEDEAO.
10 Voir l'article 1er, chapitre 1 de la
Déclaration de Bamako, 3 novembre 2000.
xvii
indépendants et de faire contrepoids au mouvement
panafricain provenant des anciennes colonies anglaises.
La première pierre institutionnelle a été
posée à Niamey le 20 mars 1970 lors de la deuxième
conférence constitutive intergouvernementale des Etats francophones, par
la création de l'Agence de Coopération Culturelle et Technique
(ACCT)11. La Convention signée à cette
conférence assigne à l'ACCT de développer entre ses
membres une coopération multilatérale sous forme d'une nouvelle
solidarité dans les domaines de l'éducation, de la culture, des
sciences et des techniques afin de devenir un « facteur
supplémentaire de rapprochement des peuples par le dialogue permanent
des civilisations».12
C'est depuis le milieu des années 1990 et à la
faveur de la chute du mur de Berlin13 puis du renouveau du
constitutionnalisme14, que la Francophonie jusque-là
essentiellement consacrée à la coopération culturelle,
technique et économique, a commencé à prendre aussi une
dimension politique.
Dans ce contexte et afin de donner à l'OIF sa pleine
dimension politique, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont
décidé en 1995 au sommet de Cotonou (Bénin) de se doter
d'un premier Secrétariat Général, clé de
voûte du système institutionnel francophone. Ce qui fut
concrétisé à Hanoi (Vietnam) en 1997 par l'élection
de son premier Secrétaire Général15. Il lui a
été assigné plusieurs objectifs à atteindre, dont
l'instauration de la démocratie.
La démocratie en question, au centre de notre
étude, fait l'objet de définitions variées. Elle peut
s'entendre d'un régime dans lequel tous les citoyens disposent à
l'égard du pouvoir d'un droit de participation (vote) et d'un droit de
contestation (liberté d'opposition)16. Bref, tous les
citoyens sont libres d'exercer et de jouir des droits et libertés
à eux reconnus dans le
11 L'ACCT a été créée
sous l'impulsion de trois Chefs d'Etat africains à savoir Léopold
Sédar Senghor du Sénégal, Habib Bourguiba de la Tunisie,
Hamani Diori du Niger ainsi que du Prince Norodom Sihanouk du Cambodge.
12 Cf. Léopold Sédar Senghor, Discours
de réception à l'Académie des sciences d'outre-mer, 2
octobre 1981.
13 La chute est intervenue le 9 Novembre 1989.
14 Le constitutionnalisme est une théorie du
droit qui considère que le pouvoir souverain et les droits fondamentaux
doivent être garantis par une constitution écrite. Il est
fondé sur la suprématie accordée à la constitution
dans la hiérarchie interne des normes juridiques et la loi en
particulier. Une autre perception du constitutionnalisme le définit
comme un courant politique qui voit en la constitution écrite le
meilleur garant des libertés individuelles ; sur cet aspect, voir C.
Debbasch et Y. Daudet : Lexique de Politique. Dalloz. 6ème
éd. Paris. 1992. P.116.
15 M. Boutros Boutros-Ghali est élu premier
Secrétaire Général et dirige l'organisation en tant que
représentant légal et porte-parole de l'OIF. Il est
remplacé par M. Abdou Diouf, ancien président
sénégalais depuis 2006.
16 Voir le Lexique des termes juridiques,
13è Ed, P.193. Parmi les grands théoriciens, on peut
citer l'ancien Président américain Abraham Lincoln (1809-1865)
pour qui la démocratie est le « Gouvernement du peuple, par le
peuple, pour le peuple».
xviii
respect des lois qui les garantissent17. Ceci est
en conformité avec l'article 16 de la Déclaration des Droits de
l'Homme et des Citoyens (DDHC) adoptée le 26 août
178918 dont la substance indique que « Toute
société dans laquelle la garantie des droits n'est pas
assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée,
n'a point de constitution ».
La démocratie implique le respect des droits de l'homme
sans lesquels on ne peut parler d'Etat de droit19. Cela signifie que
tout le monde y compris les gouvernants doivent être soumis au respect du
droit considéré par Del Vecchio comme « la colonne
vertébrale du corps social »20. Aussi, les Etats doivent
observer les règles de droit international. La souveraineté, tout
en excluant la soumission de l'Etat à l'ordre juridique d'un autre Etat,
ne serait pas incompatible avec celle relative à l'ordre juridique
international produit par leur action commune d'où la réflexion
suivante: « l'autolimitation de l'Etat est le mécanisme qui
concilie souveraineté et obéissance».21
L'Afrique de l'ouest, cadre de notre étude, est un
espace géographique composé de seize Etats. Cet espace est
couvert par la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO)22. Nous allons limiter cette étude comme l'indique
le thème, aux Etats d'Afrique de l'ouest. Cependant, dans un souci
d'illustration de certaines actions menées par la Francophonie, nous
pourrions être amenés à citer l'exemple de d'autres Etats
de l'espace francophone.
De ce qui précède, une question mérite
d'être posée. Quel est le rôle de l'OIF dans la
démocratisation de l'Afrique de l'ouest? Autrement, comment l'OIF
oeuvre-t-elle pour la promotion et la consolidation de la démocratie en
Afrique de l'ouest? A-t-elle su bien jouer ce
17 Au nombre de ces actes, figurent les
constitutions, la Charte africaine de la démocratie et des
élections adoptée à Addis-Abeba (Ethiopie) le 30 janvier
2007 ; le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne
gouvernance ; la loi N° 2011-010 du 16/05/2011 fixant les conditions
d'exercice de la liberté de réunion et de manifestation
pacifiques publiques au Togo in Journal Officiel de la République
Togolaise (JORT) du 27 juin 2011. EDITOGO. Lomé. P. 21.
18 Voir Dominique Rousseau et Alexandre Viala, Droit
Constitutionnel, Montchrestien, EJA, Paris, 2004, p.46.
19 Un Etat de droit est un Etat dans lequel tous
les citoyens sont soumis à la règle de droit y compris les
gouvernants et où les droits et les libertés individuels et
collectifs sont garantis puis respectés non seulement dans l'ordre des
buts mais aussi dans celui des moyens. Suivant l'article 2 de la
Déclaration de Bamako, cela implique la soumission de l'ensemble des
institutions à la loi, la séparation des pouvoirs, le libre
exercice des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ainsi que
l'égalité devant la loi des citoyens, femmes et hommes.
20 Cf Del Vecchio cité par Eric Oliva,
Aide-mémoire Droit constitutionnel, Philosophie du droit, 1953,
réimp. Dalloz, Paris, 2004, p.279.
21 Voir Jean Combacau, Droit International Public,
Montchrestien, 4è Ed. Paris, 1987.
22 Depuis 2000, la Mauritanie pour des raisons de
convenance, s'est retirée de la CEDEAO, ce qui réduit
l'organisation à quinze Etats membres.
xix
rôle? Sinon quelles adaptations faut-il apporter pour
une OIF plus dynamique dans le domaine de la démocratie?
Il est à noter que l'OIF a énormément
contribué au processus démocratique en Afrique de
l'ouest23. Cependant, la persistance des coups d'Etat, des
violations graves des droits de l'homme et des révisions
anticonstitutionnelles des textes fondamentaux, constituent des signes de
fébrilité de cette démocratie naissante. L'OIF se trouve
donc confrontée à nombre de difficultés de divers ordres
qui noient du coup les efforts consentis par celle-ci en dépit des
avancées enregistrées comme le souligne en termes non
équivoques la Déclaration de Bamako24.
On peut supposer que ces difficultés ont, en partie,
amené les Chefs d'Etat et de gouvernement à penser à une
OIF plus modernisée et efficiente. Ainsi M. Abdou Diouf,
Secrétaire Général de cette organisation a rappelé
ce souhait des Chefs d'Etat lors de la séance inaugurale de la
Conférence ministérielle de l'OIF, réunie à
Antananarivo (Madagascar) les 22 et 23 novembre 2005 en ces termes :«
Préparer l'avenir, renforcer la Francophonie, la rendre plus dynamique,
plus cohérente et plus visible, voilà ce que nos Chefs d'Etat et
de gouvernement nous avaient demandé à Ouagadougou [etc.] et nous
ont donné en particulier le mandat de mieux fonder juridiquement l'OIF
et de mieux définir le cadre d'exercice des attributions du
Secrétaire Général ». Il paraît donc judicieux
de revoir ses modes d'intervention et ses mécanismes de gestion des
crises au gré des mutations.
Cette étude est consacrée à
l'évaluation des actions de l'OIF en faveur de la démocratie en
Afrique de l'ouest. Il s'agit de mettre en lumière l'apport de cette
organisation au processus démocratique dans cette sous-région.
Fruit d'une recherche documentaire, cette étude a pour
but de faire ressortir la nature de la contribution de l'OIF en vue de la
consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest. Elle s'articule
autour de deux (2) grandes parties dont la première porte sur la
contribution généreuse de l'OIF en matière de
consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest; La deuxième
permet de voir à quel point cette contribution est perfectible.
23 L'OIF a permis la tenue de plusieurs
séminaires de formation, de renforcement des capacités des
membres des diverses institutions. Elle a offert également son expertise
en matière de prévention et de gestion des conflits sans oublier
l'assistance dont bénéficient les Etats surtout en matière
électorale.
24 Il s'agit en l'occurrence du chapitre
1er de la Déclaration de Bamako.
xx
xxi
PREMIERE PARTIE :
UNE CONTRIBUTION SALUTAIRE
L'OIF a joué un rôle très
appréciable en matière de consolidation de la démocratie
d'une manière générale dans l'espace francophone et tout
particulièrement en Afrique de l'ouest. Elle contribue ainsi de
manière multiforme à l'enracinement de la culture
démocratique et aux efforts de paix internationaux en mettant l'accent
sur la promotion de la légitimité démocratique et
l'échange des expériences sans compter l'observation des
pratiques démocratiques (Chapitre I). Elle noue en vue de participer
à l'affermissement de la
xxii
démocratie, des liens de coopération avec
diverses institutions quelles soient universelles, régionales ou
sous-régionales (Chapitre II).
CHAPITRE I: UNE CONTRIBUTION MULTIFORME A LA CULTURE
DEMOCRATIQUE
L'évaluation de cette contribution de l'OIF sera faite
sur la base des diverses actions entreprises par celle-ci. Cette contribution
se présente sous deux aspects. D'une part, il sera fait un état
des actions de l'OIF en matière de promotion de la démocratie
(Section I) et d'autre part nous verrons son appui à la consolidation de
la démocratie (Section II).
Section I: La promotion de la démocratie
Elle se manifeste par l'adoption d'un arsenal juridique de
référence (Paragraphe I) et par la dénonciation des
régimes en cas de déficit démocratique (Paragraphe I).
Paragraphe I: L'adoption d'un arsenal juridique
référentiel
xxiii
L'OIF s'emploie à se doter d'un ensemble de
règles transcrites dans des actes. Ces actes sont
considérés comme des cadres normatifs de consécration des
principes démocratiques qu'elle prend et qui sont adoptés par
l'ensemble des Etats membres pour régir le comportement de ceux-ci. Au
nombre de ces actes, figurent en bonne place la Charte de l'OIF (A) et les
Déclarations de Bamako et de Saint-Boniface, véritables textes de
référence (B).
A- La Charte de l'OIF
La démocratie est une valeur universelle qu'il faut
promouvoir. Divers textes notamment la Charte de l'OIF ont posé des
principes allant dans ce sens.
Support juridique de l'ensemble du cadre institutionnel
francophone, la Charte de l'OIF définit notamment son rôle et ses
missions. Elle a été adoptée par la Conférence
Ministérielle de la Francophonie à Antananarivo (Madagascar), le
23 novembre 2005.
L'OIF s'est assignée plusieurs missions au nombre
desquelles figure la promotion de la démocratie. L'OIF contribue
à cet effort quand bien même cette valeur constitue une des
priorités de l'Organisation des Nations Unies (ONU) depuis les
années quatre-vingt-dix (1990). Elle s'attache donc à
réaffirmer et à promouvoir des objectifs à elle
assignés par sa Charte. L'accent sera mis sur quelques articles. En
effet, l'article 1er du titre I de la Charte adoptée à
Hanoi (Vietnam) le 15 novembre 1997, souligne l'engagement des Chefs d'Etat et
de gouvernement à assurer l'approfondissement de la démocratie,
des droits et libertés et de l'Etat de droit au sein de l'espace
francophone.
La nouvelle Charte adoptée à Antananarivo le 23
Novembre 2005 relève d'emblée la détermination des Etats
membres à promouvoir la démocratie. Elle est au service de la
paix, de la coopération, de la solidarité et du
développement durable. Pour cela, elle s'est donnée « comme
objectifs entre autres l'aide à l'instauration et au
développement de la démocratie, de la prévention, la
gestion et le règlement des conflits, le soutien à l'Etat de
droit et des droits de l'homme ».25
La réalisation de ces objectifs fait intervenir
différentes institutions dont le Secrétaire
Général. En tant que premier responsable de l'action politique et
porte-porte de l'OIF, celui-ci
25 Aux termes de l'article 1er du titre
1 de la Charte de l'OIF adoptée le 23 novembre 2005 à
Antananarivo « la Francophonie, (...) a pour objectifs d'aider à
l'instauration et au développement de la démocratie, à la
prévention, à la gestion et au règlement des conflits, et
au soutien à l'Etat de droit et aux droits de l'homme; à
l'intensification du dialogue des cultures et des civilisations; au
rapprochement des peuples par leur connaissance mutuelle». Cette
disposition dénote à suffisance la volonté des Chefs
d'Etat africains de faire de l'organisation un instrument de promotion de la
démocratie, de la liberté et des droits de l'homme.
xxiv
dispose, à cet effet, beaucoup de prérogatives.
Les Etats membres pour faciliter la mise en oeuvre des engagements pris ont
bien voulu lui consacrer tout un article.
L'article 7 alinéa 3 de la Charte relève bien
les fonctions du Secrétaire Général. De cet article, il
ressort que celui-ci se tient en permanence informé de l'état des
pratiques de la démocratie, des droits et libertés dans l'espace
francophone. En cas d'urgence, il saisit le conseil permanent et, compte tenu
de la gravité des évènements, le président de la
conférence ministérielle des situations de sortie de crise ou de
conflit dans lesquelles des membres peuvent être ou sont
impliqués. Il propose à cet égard, les mesures
spécifiques pour leur prévention, leur gestion et leur
règlement, éventuellement en collaboration avec d'autres
organisations internationales.
C'est en vertu de ses prérogatives que le
Secrétaire Général a déclaré lors de la
85è session du Conseil Permanent de la Francophonie (CPF) réuni
à Paris le 28 juin 2012 en présence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement que « le rétablissement de l'unité du Mali est
un enjeu majeur et prioritaire pour le pays, pour la région, pour le
continent, pour toute la communauté internationale
».26
La contribution normative de l'OIF en matière de
consolidation de la démocratie ne se limite pas à la
rédaction de sa Charte. Elle s'étend aussi aux diverses
déclarations adoptées généralement à l'issue
de rencontres de haut niveau. Au nombre de ces actes, il y a la
Déclaration de Bamako et celle de Saint-Boniface qui en la
matière sont des déclarations de référence.
B- Les Déclarations de
référence
L'OIF a adopté bon nombre de
déclarations27 mais nous n'en retiendrons dans le cadre de
cette étude que celles de référence à savoir les
Déclarations de Bamako et de Saint-Boniface. S'agissant de la
Déclaration de Bamako, il est utile de rappeler qu'elle a
été adoptée le 3 novembre 2000 par les Ministres et chefs
de délégation des Etats membres, réunis à Bamako
pour le symposium international sur le bilan de la démocratie, des
droits et des libertés dans l'espace francophone. Elle fait suite
à l'objectif fixé au sommet de Moncton de tenir un tel
symposium.
26 La déclaration fait suite au coup d'Etat
du 22 mars 2012 du Lieutenant Amadou Haya Sanogo renversant le Président
Amadou Toumani Touré.
27 Une Déclaration s'entend d'une
résolution adoptée par une assemblée
générale et dans laquelle il est fait mention d'un idéal
à atteindre. En l'espèce, il est bien question de la
démocratie en tant que système de valeur universelle.
xxv
Cette Déclaration se fonde sur l'article 1er
alinéa 1er de la Charte de l'OIF28. L'engagement
démocratique de l'OIF selon la Déclaration, est une
priorité qui doit se traduire par des propositions et des
réalisations concrètes d'où les termes « Francophonie
et démocratie sont indissociables »29. Les Ministres,
chefs de délégation des Etats membres ont pris l'engagement
d'oeuvrer à la consolidation de l'Etat de droit.
Cette consolidation se traduit par leur souci de renforcer les
capacités des institutions nationales de l'Etat de droit, d'encourager
la réhabilitation et le renouveau de l'institution
parlementaire30, d'assurer l'indépendance de la magistrature
et la promotion d'une justice efficace et accessible31. Ils ont
aussi à coeur de mettre en oeuvre le principe de la transparence
à travers la promotion de la bonne gouvernance. Les Etats membres
participant se sont définis un rôle dans le processus
électoral notamment à travers l'assistance en cette
matière par l'OIF.
Quant à la Déclaration de Saint-Boniface
(France), elle a été adoptée le 14 mai 2006 par les
Ministres et chefs de délégation des Etats membres, réunis
à Saint-Boniface (Canada) dans le cadre de la Conférence
ministérielle de la Francophonie sur la prévention des conflits
et la sécurité humaine. Elle s'inscrit dans la droite ligne de la
Déclaration de Bamako. Les points suivants peuvent être
relevés aux fins de notre étude. Par cette déclaration les
Etats s'engagent à promouvoir la paix et la sécurité dans
l'espace francophone.
Aux termes de l'article 4, les Pays participant ont
réaffirmé leur volonté de conforter l'action
préventive de l'OIF telle que prévue par la Déclaration de
Bamako et contenue dans le programme d'action annexé à
celle-ci.
Ainsi, dans le souci de prévenir l'éclatement
des crises et conflits dans l'espace francophone, limiter leur propagation,
faciliter leur règlement pacifique et hâter le retour à une
situation de paix durable, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont
confirmé leur volonté politique d'agir et d'exercer pleinement
leur responsabilité par la mise en oeuvre des dispositions librement
28 Voir le Paragraphe 2 de la Déclaration de
Bamako.
29 Voir la Déclaration de Bamako, ibid. article
1er, Chapitre 3.
30 Le parlement est une assemblée
délibérante ayant pour fonction de voter les lois et de
contrôler le gouvernement. Voir le Lexique des termes juridiques, opcit.
P. 402. Avec le renouveau du constitutionnalisme des années 1990 en
Afrique, l'institution parlementaire a retrouvé son rôle d'antan,
celui de garant du pluralisme politique et servir ainsi d'organe de
prévention puis de contrôle de toute dérive
exécutive.
31 Cf. Déclaration de Bamako, op.cit. Chapitre
4, article 1er.
xxvi
consenties au titre de la Déclaration de Bamako et des
instruments internationaux auxquels les Etats sont parties.32
Ils ont pris également l'engagement suivant les
dispositions de l'article 6 de soutenir les efforts du Secrétaire
Général de l'OIF dans l'exercice de son mandat politique en
fournissant dans ce sens des informations sur l'état de mise en oeuvre
des engagements qu'ils ont pris à Bamako.
En outre, le Secrétaire Général est
invité aux termes des articles 7 et 9, à rendre pleinement
opérationnel le mécanisme d'observation et d'évaluation
permanentes des pratiques de la démocratie, des droits et des
libertés dans l'espace francophone.
Les Chefs d'Etat et de gouvernement encouragent le
Secrétaire Général à recourir, aux fins de
consultation et de concertation, à tous les instruments dont il dispose,
tels les comités ad hoc consultatifs restreints ou les sessions
extraordinaires du CPF, ainsi qu'à l'envoi, en liaison avec
l'Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF), des missions
d'information, de facilitation et d'observation électorale de même
que la désignation d'envoyés spéciaux ou de
représentants spéciaux.
Les Chefs d'Etat ont appelé l'OIF à
systématiser sa démarche, caractérisée par
l'échange des expériences et par le souci de ne pas imposer de
l'extérieur des processus inadaptés, en matière
d'accompagnement des processus de sortie de crise et de transition, notamment
dans les domaines de l'identification et de la mise en place de
mécanismes favorisant le consensus et d'institutions de contrôle,
de régulation et de médiation.33
De plus, l'OIF est invitée à établir des
« liens utiles » avec la Commission de Consolidation de la Paix. Pour
cela, les Etats membres ont pris la résolution de poursuivre leur
plaidoyer, au sein de cet organe, en faveur des Etats en situation de sortie de
crise pour conforter leurs processus de réconciliation nationale et
leurs efforts visant à assurer la gouvernance démocratique, en
favorisant par exemple l'accès de ces pays aux financements
internationaux.34 Ils ont réitéré leur
volonté, aux termes des dispositions de l'article 16, à mettre en
oeuvre leur décision d'Antananarivo visant à assurer une plus
forte participation des Etats membres aux opérations de maintien de la
paix, en étroite collaboration avec l'ONU et les organisations
régionales compétentes.
32 Cf. l'article 5 de la Déclaration de
Saint-Boniface.
33 Voir en ce sens la Déclaration de
Saint-Boniface, ibid. article 10.
34 Ibid. article 15.
xxvii
L'OIF joue un rôle majeur en matière de suivi de
la mise en oeuvre des engagements souscrits en faveur de la promotion des
principes démocratiques. Pour cela, elle se permet, en conformité
avec les dispositions de la Déclaration de Bamako, une remise en cause
des régimes.
Paragraphe II : La dénonciation en cas de
déficit démocratique
L'appréciation de cette dénonciation consistera
à faire ressortir l'attitude de l'OIF face aux Etats qui violent les
obligations découlant de leurs engagements à promouvoir la
démocratie. Face à de telles situations, l'OIF prend soin de les
condamner (A) dans un premier temps avant de sanctionner (B) dans un second
temps les Etats en cause.
A- Les condamnations
La condamnation des coups d'Etat résulte d'un
changement d'attitude des organisations internationales longtemps
restées permissives face aux situations de coups d'Etat35 et
de conflits. En effet, ces organisations, sur le fondement des principes
sacro-saints de non ingérence dans les affaires intérieures des
Etats et de leur liberté de choisir leur régime politique dans un
contexte de guerre froide, ont adopté une attitude de neutralité
voire d'indifférence devant les prises de pouvoir par coup d'Etat. C'est
aussi le cas lorsqu'un gouvernement démocratique vient à
être contesté par les moyens d'une rébellion armée.
Cette attitude s'explique aux dires de Ben Achour par l'idée que " le
droit de la coexistence pacifique a même fait de l'absence d'un
modèle politique universel une condition sine-qua-none de
l'établissement de la paix et de la sécurité
internationales "36. C'est ce qui explique
le fait que le coup d'Etat militaire de 1963 renversant le président
Sylvanus Olympio au Togo ainsi que la vague de coups d'Etat qui ont suivi sont
restés sans condamnation.
Mais à la faveur de la chute du mur de Berlin et suite
au repositionnement de l'OIF, le principe de l'autonomie
constitutionnelle et donc la liberté du choix du système
politique,
35 En droit constitutionnel, un coup d'Etat est une
«action de force contre les pouvoirs publics exécutée par
une partie des gouvernants ou par des agents subordonnés, notamment des
militaires (dans ce dernier cas, on parle aussi de putsch ou de
pronunciamiento), et qui vise à renverser le régime établi
exceptionnellement à le défendre». Voir Guillien, Guinchard
et Montagnier, Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 16è Ed.,
2007, P. 193.
36 Cf. Ben Achour (R), "Égalité
souveraine des États, Droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes et liberté de choix du système politique,
économique, culturel et social", Solidarité,
Égalité, Liberté, Bruylant, Bruxelles, 1995, p. 786.
xxviii
économique, social et culturel a subi des
évolutions. Cet état de choses a manifestement changé
lorsque l'OIF a adopté un discours politique faisant du respect de la
légalité constitutionnelle et de la démocratie un
impératif dans les relations internationales. Ce discours s'est traduit
en action du moment que l'OIF mène une pratique revendiquant le respect
de la légalité constitutionnelle et de la
légitimité démocratique.
En effet, l'OIF a commencé par prendre en
considération ce phénomène dans ses relations avec ses
membres. Dès lors, elle s'évertue à travers ses organes
à condamner les coups d'Etat et à exiger un retour à
l'ordre constitutionnel. Dans cette optique, elle a commencé par
condamner presque tous les coups d'Etat survenus en Afrique. Cependant,
étant donné que notre champ d'étude se limite à
l'Afrique de l'ouest, nous nous contenterons d'illustrer cette partie par des
exemples ouest africains.
Suite au coup d'Etat militaire du 23 décembre 1999
perpétré par le Général Robert Guéi
renversant le président Henri Konan Bédié en Côte
d'Ivoire, L'OIF par l'entremise de son SG a condamné cet acte
anticonstitutionnel.
Elle est aussi intervenue pour condamner fermement à
travers le CPF réuni le 1er mars 2010 le coup de force
perpétré, le 18 février 2010 au Niger par le Conseil
Suprême pour la Restauration de la Démocratie CSRD ayant
renversé le président Mamadou Tandja.
En Guinée-Conakry, on se souvient de la vive
réaction du CPF lors de la prise du pouvoir par Moussa Dadis Camara,
après le décès du président Lansana Conté le
23 décembre 2008. De même, elle ne s'est pas fait prier pour
condamner le coup d'Etat survenu en Mauritanie le 6 août 2007. En effet,
le général Mohamed Ould Abdel Aziz a mené l'armée
mauritanienne à renverser le président Sidi Mohamed Ould Cheikh
Abdellahi, élu démocratiquement en mars 200737.
Il en va de même tout récemment du
communiqué rendu public le 24 mars 2012 par lequel le CPF a
condamné et a exigé un retour à l'ordre constitutionnel
après le coup d'Etat perpétré le 22 mars 2012 au Mali par
l'armée conduite par le Capitaine Amadou Haya Sanogo et renversant le
président Amani Toumani Touré.
En outre, l'OIF s'est prononcée sur la situation en
Guinée-Bissau. Dans un communiqué, le Secrétaire
Général de l'OIF a "condamné fermement" le coup d'Etat
intervenu en Guinée-
37 Face à cette situation, l'OIF par un
communiqué en date du 26 août 2007 signé de son
Secrétaire Général, M. Abdou Diouf a indiqué que le
CPF « confirme la condamnation du coup d'État [...] et
décide de prononcer la suspension de la Mauritanie de la Francophonie
». Ce faisant, la Francophonie s'est jointe à la communauté
internationale, notamment le Conseil de Sécurité des Nations
Unies, l'Union africaine, la Ligue des États arabes, l'Union
Européenne et les partenaires bilatéraux de la Mauritanie pour
dénoncer ce renversement.
xxix
Bissau qu'il a qualifié de "violation flagrante de la
constitution". Dans le même communiqué, il a déclaré
que "L'arrestation du président par intérim, Raimundo Pereira, et
du premier ministre Carlos Gomes Junior, en plus de l'interruption du processus
électoral en cours et la dissolution des institutions constituent une
violation flagrante de la constitution et sont, à ce titre, totalement
inacceptables"38.
Il y a lieu de relever la réaction de l'OIF à
l'égard du Togo suite au décès du président
Gnassingbé Eyadéma le 5 février 2005. En effet, la
violation et la modification de l'article 6539 de la constitution
togolaise a suscité des réactions de toutes les institutions
internationales qui ont demandé le retour à l'ordre
constitutionnel. La pression a été tellement forte que selon
Alioune Tine40, « Jamais on a vu une telle réaction
énergique de la part des institutions africaines et internationales par
rapport à un pays africain » et pour M. Khalifa Aboubacar Sall,
député du parti socialiste (PS) à l'Assemblée
nationale sénégalaise "La situation politique au Togo est
inacceptable. On ne doit pas accepter une autre Côte d'Ivoire et, pour
cela, nous devons nous mobiliser pour un retour rapide à la
légalité constitutionnelle dans ce pays".
La simple condamnation et l'exigence de retour à
l'ordre constitutionnel normal à la suite des coups d'Etat ne suffisent
parfois pas pour remédier la situation de crise. L'OIF va quelques fois
plus loin en prenant des sanctions à l'encontre des régimes
anti-démocratiques.
B- Les sanctions
L'Afrique a connu, dans la décennie 2000-2010, une
recrudescence particulière d'actes de déstabilisations politiques
qui sont la conséquence de la résurgence des coups d'Etat. A
titre d'illustrations, nous pouvons noter les coups d'Etat en
Guinée-Bissau (septembre 2003) et à Sao-Tomé- et-Principe
(juillet 2003), les tentatives de coup d'Etat au Burkina Faso et en Mauritanie
(octobre 2003), le renversement de M. Charles Taylor par une rébellion
au Liberia (août 2003), les remous politiques au Sénégal en
2003, la déstabilisation de la Côte d'Ivoire
38 M. Abdou Diouf a fait à ce propos la
déclaration suivante : "Nous devons, à présent, refuser
avec fermeté toutes les manoeuvres qui ne sont pas conformes à la
constitution et aux principes de la démocratie et de l'Etat de droit, et
exiger le strict respect des droits et des libertés".
39 Voir l'article 65 de la constitution togolaise
qui dispose : « En cas de vacance de la présidence de la
République par décès, démission ou
empêchement définitif, la fonction présidentielle est
exercée provisoirement par le Président de l'Assemblée
nationale. La vacance est constatée par la Cour Constitutionnelle saisie
par le Gouvernement. Le gouvernement convoque le corps électoral dans
les soixante (60) jours de l'ouverture de la vacance pour l'élection
d'un nouveau président de la République. ».
40 Responsable de la Rencontre Africaine de la
Défense des Droits de l'Homme (RADDHO), institution dont le siège
est à Dakar (Sénégal).
xxx
(depuis septembre 2002)...Tout cela ajouté à la
situation récente au Mali montre que l'Afrique de l'ouest semble
s'être durablement installée dans la crise politique même si
certains pays parmi lesquels le Cap-Vert et le Ghana y échappent.
Ainsi, en cas de persistance de violations ou de prolongement
de la rupture de l'ordre constitutionnel, des sanctions allant jusqu'à
la suspension peuvent être prononcées à l'encontre des
Etats malgré l'attitude contraire de la France de sanctionner les reculs
de la démocratie. Les propos de l'ancien président
français M. Jacques Chirac au cours de la conférence de presse
finale ayant sanctionné le sommet d'Hanoi en 1997 sont édifiants.
Il a affirmé que « la sanction n'est pas dans la tradition de
l'espace francophone. C'est du ressort des Nations Unies. La France n'est pas
disposée à ce que la Francophonie soit le support à
quelque sanction que ce soit. Nous voulons convaincre, pas contraindre
».
Dans le passé, l'OIF a déjà marqué
sa désapprobation par rapport à certains régimes
antidémocratiques, mais d'une manière moins visible que la prise
de sanction ou le boycottage économique. En 1991, à l'initiative
du Canada, le sommet qui devait se dérouler à Kinshasa, au
Zaïre, avait été déplacé en France. Cependant,
cette mesure a semblé avoir donné le ton en matière de
sanctions. Quelques exemples peuvent être donnés.
La résolution adoptée à Paris le 26
août 2007 suspend la Mauritanie, avec la possibilité de
réexaminer sa décision lors de la prochaine session du Conseil,
à la lumière des avancées que le gouvernement aura su
faire quant au retour à la légalité constitutionnelle et
à la situation des droits et libertés individuels.
Aussi, le CPF a-t-il sanctionné les coups d'Etat
survenus en Côte d'Ivoire le 19 septembre 2002, au Niger en
février 2010 et la prise du pouvoir par des moyens non constitutionnels
au Togo à la suite du décès du président
Gnassingbé Eyadéma le 05 février 2005 évoqué
ci-dessus.
Il faut signaler que les sanctions sont de nature diverse et
généralement varient suivant la gravité de la faute et du
non respect de la Déclaration qui régule l'organisation. Les
décisions vont de la suspension provisoire à la suspension
définitive. Cette suspension consiste pour l'organisation de refuser
qu'un Etat sous le coup d'une telle mesure, participe aux activités de
l'organisation comme ce fut le cas notamment de la Mauritanie41.
41 Pour la Mauritanie, c'est une suspension totale
de toutes formes d'activités parce que le Coup d'Etat est
avéré. C'était un régime démocratiquement
élu qui était en place jusqu'à son renversement par les
militaires. Pour la Guinée-Conakry, il n'y a pas eu de renversement de
pouvoir à proprement parler car il y a eu décès du
président au pouvoir comme ce fut le cas au Togo. Les militaires se sont
accaparés du pouvoir de manière illégale. La
Guinée-Bissau pour sa part, fut suspendue à titre provisoire car
ceux qui dirigeaient cet Etat là
notamment la junte militaire, se sont engagés à
faire une transition politique rapide, après avoir mis les
mécanismes de démocratie en route.
xxxi
Les sanctions à l'endroit des Etats membres qui ne
respectent pas les textes en usant des voies anticonstitutionnelles pour
arriver au pouvoir peuvent aller jusqu'à l'exclusion. C'est la sanction
extrême que l'OIF n'a pas encore mis en exécution jusqu'à
présent. L'apport de l'OIF dans le processus de renforcement et de
promotion de la démocratie exige de sa part des actions d'appui à
la consolidation en cette matière.
Section II : L'appui à la consolidation de la
démocratie
Aux termes de la Déclaration de Bamako, notamment
à l'alinéa 2 de l'article 1er du chapitre V, l'OIF
s'évertue à prévenir et à régler les crises
et les conflits (Paragraphe I). En outre, elle oeuvre dans le sens de
l'accompagnement des Etats à sortir de leur situation de crises et de
conflits (Paragraphe II).
Paragraphe I : La prévention des crises
Depuis la fin de la guerre froide, la scène
internationale a enregistré de nombreux conflits, qui se distinguent des
conflits traditionnels par leur caractère davantage civil
qu'international, leur intensité, la nature des victimes et des acteurs
qui y participent, sans que la communauté internationale parvienne
toujours à y faire face de manière efficace. Il est maintenant
bien connu que certaines crises humanitaires tragiques, comme celle du Rwanda
en 1994, auraient pu être désamorcées si tout le dispositif
de prévention et de réaction prévu par l'ONU et par
certaines autres institutions avait été mis en place.
En conséquence, en tirant les leçons des
échecs du passé le concept de prévention semble s'imposer
aujourd'hui comme l'une des notions centrales du discours politique
international, dans un monde toujours traversé par de multiples menaces
(conflits interétatiques, conflits intra-étatiques, terrorisme,
génocide, insécurité humaine, crises humanitaires etc.).
Ainsi, pour prévenir les crises et les conflits, l'OIF a mis en place un
observatoire des pratiques de la démocratie, des droits de l'homme et
des libertés (A). Elle met ensuite en oeuvre les mécanismes de
prévention à cet effet (B).
A- L'observatoire des pratiques de la
démocratie, des droits de l'homme et des libertés
Le processus d'observation et d'évaluation permanente
des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés
constitue une des conditions indispensables à la mise en oeuvre de la
xxxii
Déclaration de Bamako. Mis en place en 2004, ce
processus repose sur la collecte d'informations fiables émanant des
différentes parties concernées de l'espace
francophone42. L'OIF à travers la Délégation
aux Droits de l'Homme, à la Démocratie et à la Paix
(DDHDP), dispose des informations transmises par les Etats et gouvernements.
Ces informations sont recueillies dans le cadre du partenariat avec les
réseaux institutionnels francophones oeuvrant dans les domaines de la
démocratie, de l'Etat de droit et des droits de l'homme. Il y a aussi
l'apport des structures locales ou régionales
spécialisées, des experts indépendants, des Organisations
Intergouvernementales (OIG) et Organisations Internationales Non
Gouvernementales (OING) qui constituent des observatoires. Dans cette optique,
plusieurs réunions ont été organisées
successivement en 2002, 2003 et 2004 par la DDHDP.
La Commission Politique de l'Assemblée Parlementaire de
la Francophonie (APF) joue aussi de son côté un certain rôle
dans l'Observatoire de la démocratie et des droits de l'homme
prévu par la Déclaration de Bamako. En plus de participer aux
réunions des réseaux institutionnels francophones et d'avoir des
relations étroites avec la Délégation à la Paix,
à la Démocratie et aux Droits de l'Homme (DDHDP), la Commission
politique transmet à l'OIF son rapport sur les situations de crise
politique dans l'espace francophone.
Ce rapport et les résolutions de l'APF contribuent
d'une certaine manière au dispositif d'observation et
d'évaluations permanentes. Cette Commission politique a entrepris
diverses démarches afin de concourir davantage à cet
Observatoire. Le rapport ainsi dirigé est transmis aux
différentes sections considérées comme en situation de
crise dans le but d'obtenir de leur part une contribution écrite. Cette
procédure permet aux différents points de vue de s'exprimer,
voire de se confronter dans un souci d'examen contradictoire.
L'OIF encourage et soutient les pays francophones à
mettre en oeuvre les instruments et mécanismes internationaux et
régionaux, de la ratification des textes à l'incorporation des
normes dans l'ordonnancement juridique interne, en passant par le respect de
leurs obligations conventionnelles, en particulier pour l'élaboration et
la présentation de rapports périodiques.
Dans le domaine des droits de l'homme, l'OIF s'est
particulièrement mobilisée en faveur des droits de l'enfant, de
la lutte contre la torture et de la peine de mort. S'agissant des droits de
l'enfant, l'OIF a appuyé la tenue d'une réunion régionale
qui s'est déroulée à Niamey en
42 Nous pouvons citer les représentations
permanentes de l'OIF auprès des OI, de l'APF, de l'AIMF, de l'AUF, de
l'Université Senghor puis de l'ensemble des acteurs associés au
processus de Bamako réunis au sein du réseau d'information et de
concertation développé par la DDHDP.
xxxiii
novembre 2011 à l'intention des responsables de la
formation des écoles des forces de l'ordre des seize pays francophones
d'Afrique de l'ouest et centrale.
A titre d'exemple, on peut citer le Togo qui a, grâce
aux actions de l'OIF, aboli la peine de mort le 23 juin 2009.43
Les Etats pour leur part, reçoivent le soutien de
l'organisation surtout dans le processus d'édification institutionnelle
et de mise en oeuvre des recommandations du Conseil des droits de l'homme des
Nations Unies par le biais des programmes d'efforts de sensibilisation et de
mobilisation et de l'assistance à la préparation de l'Examen
Périodique Universel (EPU) 44. Prévenir et
gérer les crises et les conflits, revient à se doter de
mécanismes devant les détecter et veiller à ce qu'elles ne
perdurent point. L'OIF à l'instar de l'ONU et bien d'autres organismes
dispose de mécanismes de prévention.
B- Les mécanismes de prévention
Conformément à ses textes de
référence et aux diverses résolutions des sommets
successifs, notamment celui de Montreux (Suisse) tenu en 2010, l'OIF poursuit
ses actions en matière de prévention en s'appuyant sur une
expertise politique et technique de haut niveau.
Le mécanisme d'alerte précoce constitue une
pièce maîtresse du processus de Bamako qui détermine la
possibilité d'agir au vu de l'analyse des données
évaluées dans des situations à fort potentiel conflictuel.
Les conditions d'une alerte réussie résident dans la
capacité à rassembler des informations fiables, recoupées
et validées par des sources différenciées ; à
repérer les noeuds conflictuels et les facteurs d'instabilité sur
lesquels des initiatives rapides doivent être engagées pour
empêcher le conflit d'éclater ou de s'amplifier; à
mobiliser les différentes parties concernées, acteurs politiques,
société civile, médias, organisations
43 En outre, l'OIF a apporté son soutien aux
OING accréditées qui travaillent principalement sur la
thématique ci-dessus évoquée. On peut retenir notamment
l'Association pour la Prévention de la Torture (APT) et la
Fédération Internationale de l'Action des Chrétiens pour
l'Abolition de la Torture (FIACAT). Nombreuses ONG du sud ont vu leurs projets
financés en 2012 par le 6è Fonds Francophone d'Initiatives pour
la Démocratie, les Droits de l'Homme et la Paix (FFIDHOP).
44 C'est un exercice coopératif impliquant
le dialogue entre tous les acteurs à l'issue duquel des recommandations
sont faites. Au sein de l'espace francophone, le 3è Séminaire
francophone sur l'EPU tenu à Tunis du 30 octobre au 1er
novembre 2011 n'a pas manqué de faire des recommandations dans le sens
de l'amélioration de la situation des droits de l'homme. Notons que
l'OIF met en place un processus de suivi et de mise en oeuvre des
recommandations en partenariat bien évidemment avec les OI, en
témoigne le Fonds de contributions volontaires créé en
2008 par la résolution 6/17 du Conseil des droits de l'homme du 28
septembre 2007 pour permettre aux pays en développement et aux moins
avancés d'entre eux de mettre en oeuvre les recommandations faites
à l'issue de l'EPU.
xxxiv
syndicales, ligues de défense des droits de l'homme et
instances régionales et internationales, afin d'arrêter la
dégradation de la situation45.
Ainsi, face à la récurrence des crises et des
conflits dans l'espace francophone, l'OIF dans le souci permanent et
conformément au titre I de sa charte, recourt-elle à des
mécanismes en vue de leur prévention.
L'alerte précoce est la première étape du
continuum46 qui mène de l'identification d'une crise
potentielle aux interventions appropriées que l'OIF doit apporter
à son action de prévention. Elle dispose donc dans ce cadre, d'un
dispositif qui a pour assise un processus de collecte d'informations et des
capacités d'analyse et de production de notes qui doivent appuyer les
initiatives du Secrétaire Général. La collecte
d'informations incombe tout particulièrement à la DDHDP qui le
fait avec la collaboration des réseaux francophones, des
différentes missions de l'OIF à l'oeuvre sur le terrain ainsi que
par contacts informels à tous les niveaux de l'OIF47. La
DDHDP pour sa part, fait préparer des documents et des rapports ad hoc
par ses partenaires sur le terrain. Tous les Etats francophones font l'objet
d'une observation en continu.
Après la collecte de l'information, « cinq
responsables de projets » au sein de la DDHDP sont chargés de
l'analyse des situations. Chaque membre de l'équipe est plus
particulièrement chargé de suivre une région ou une
sous-région de l'espace francophone et de préparer des documents
y relatifs.
Tout en assurant la coordination des activités de
coopération avec le ou les pays dont il assure le suivi, il a la
responsabilité dans les cas où un pays fait l'objet d'une
observation plus poussée, de la préparation des documents de
suivi et le cas échéant, des notes destinées aux hautes
autorités, le tout sous la responsabilité de la DDHDP. Les notes
sur l'évaluation de la situation proposent donc une analyse claire et
très précise de l'état de la situation dans un pays ou une
région donnée et de l'évolution des dossiers au moment de
la rédaction.
45 Consulter notamment Francophonie : agir pour
prévenir, Rapport du Panel d'experts de haut niveau sur la
problématique du passage de l'alerte précoce à la
réaction rapide, Délégation à la paix, à la
démocratie et aux droits de l'homme, OIF, Paris, le 3 septembre 2010, P.
23-28.
46 Objet ou phénomène progressif dont
on ne peut considérer une partie que par abstraction. Bref, c'est un
ensemble d'éléments cohérents. Le nouveau Petit Robert de
la langue française, 2010, p.524.
47 L'OIF a poursuivi, dans ce sens, ses
concertations avec ses partenaires multilatéraux ayant
développé des systèmes d'observation et
d'évaluation, à l'occasion, notamment, des réunions de
haut niveau.
xxxv
Ces notes et analyses stratégiques sont
communiquées en temps réel au cabinet du Secrétaire
Général et sont prises en considération dans la
rédaction du rapport d'activités politiques et diplomatiques
déposé mensuellement auprès de la commission politique du
CPF.
Les périmètres couverts par la DDHDP dans sa
fonction d'observation des pratiques de la démocratie et des droits de
l'homme sont ceux établis par les Déclarations de Bamako et de
Saint-Boniface. Il en va autrement de l'alerte précoce, raison pour
laquelle le Panel mis sur pied par M. Abdou Diouf en mai 2010 a proposé
que le périmètre de l'alerte précoce soit élargi
afin de contextualiser la crise ou le conflit en couvrant toutes les
informations qui sont pertinentes à une compréhension
adéquate des faits et à leur analyse subséquente. Ce
périmètre doit couvrir l'ensemble des éléments qui
peuvent avoir un impact de déstabilisation telles les catastrophes
naturelles, l'existence des sanctions politiques de la part de la
communauté internationale ou des sanctions
économiques.48
L'insuffisance des moyens dont disposent les Etats,
amène souvent l'OIF à entreprendre des actions afin de les
accompagner dans leur processus de sortie de crise et dans les pays où
la situation est susceptible de dégénérer.
Paragraphe II : Un accompagnement des processus de sortie
de crise
L'OIF offre à ses Etats membres de multiples soutiens
en matière de transition ou de sortie de crise. Ces soutiens se
matérialisent par son appui pour la tenue de dialogue entre les
différents acteurs (A) sans compter son assistance dans le domaine des
consultations électorales (B).
A- La facilitation de dialogues
L'accompagnement des transitions constitutionnelles et
politiques se trouve au coeur des actions de l'OIF. Se fondant sur les
principes de la Déclaration de Bamako, l'OIF a déployé des
stratégies de renforcement de l'Etat de droit dans les pays en crise ou
en sortie de crise. Ces dernières confèrent à la
démarche francophone l'objectif de réconciliation par
l'identification de la vérité et de la restauration du dialogue
national et font de cet objectif le premier moyen de lutte contre
l'impunité en offrant l'occasion de poursuivre et de sanctionner des
auteurs de violations graves des droits de l'homme. Consciente qu'une vie
politique apaisée passe par un consensus de l'ensemble des acteurs
politiques nationaux,
48 Francophonie : agir pour prévenir,
op.cit. Rapport du Panel d'experts de haut niveau sur la problématique
du passage de l'alerte précoce à la réaction rapide,
Délégation à la Paix, à la Démocratie et aux
Droits de l'Homme, OIF, Paris, 2010, op.cit. P. 23-28.
xxxvi
l'OIF a fait du dialogue politique l'une de ses
priorités en matière de consolidation de la démocratie.
Elle a, dans cette optique, apporté son soutien
à la mise en place de commissions vérité et
réconciliation. Cette préoccupation a déjà
été exprimée par l'organisation dans son rapport sur
l'état des pratiques de la démocratie, des droits et des
libertés dans l'espace francophone de 201049.
Il faut aussi saluer l'apport et le rôle de certaines
actions de l'OIF notamment l'appui et le suivi des conclusions à la
tenue d'importantes manifestations nationales de dialogue et de
réconciliation à forte dimension cathartique tels « les
états généraux de la justice » que différents
Etats francophones en sortie de crise comme le Tchad, la Guinée-Conakry
et le Niger ont organisés récemment.
Dans tous les champs abordés, l'OIF possède un
savoir-faire qui pourrait lui permettre d'accompagner, de manière
ciblée, les processus de transition, justice, vérité et
réconciliation. En Côte d'Ivoire, elle a oeuvré à la
signature de l'Accord de Linas Marcoussis conclu le 24 janvier 2003. Cet accord
prévoyait entre autres le maintien au pouvoir du président
Laurent Gbagbo et la formation d'un gouvernement composé de tous les
signataires y compris les rebelles. Il a été suivi de nouvelles
négociations placées sous les auspices de la médiation
internationale notamment à Accra (en 2003 et 2004) puis à
Pretoria (2004-2006).
On ne peut ignorer l'Accord Politique de Ouagadougou,
résultat d'un dialogue direct entamé depuis la fin 2006 entre la
présidence de la république sous Laurent Gbagbo et les Forces
Nouvelles avec la facilitation du Président du Burkina Faso et alors
Président en exercice de la CEDEAO, Blaise Compaoré, signé
le 4 mars 2007 entre Laurent Gbagbo et Guillaume Soro.50
49 A titre d'illustrations, elle a soutenu la
création par le Togo, le 25 février 2009, de la Commission
Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) à la suite
des rapports d'enquête établis par le Haut Commissariat des
Nations Unies aux Droits de l'Homme (HCDH) et la Commission nationale pour
l'élection présidentielle du 24 avril 2005 après la
vacance brève constatée suite au décès du
président Gnassingbé Eyadéma. La CVJR a reçu une
aide technique et financière de la part de l'OIF. Au Togo, cette
commission avait pour mission de faire la lumière sur les
évènements à caractère politique qui sont survenus
depuis 1958 jusqu'en 2005.
50 Cet accord prévoit la relance du
processus d'identification et d'enregistrement des électeurs, un
calendrier pour le désarmement et l'organisation des élections.
Le Secrétaire général des Forces nouvelles, Guillaume
Soro, devient le Premier ministre d'un gouvernement d'union nationale,
chargé des questions du désarmement, de la réunification
et de l'organisation des élections. L'Accord Politique de Ouagadougou
est complété au cours des années 2007 et 2008 par des
accords complémentaires précisant notamment certaines
modalités techniques pour les opérations d'identification et
d'inscription sur la liste électorale, déterminant un agenda au
redéploiement de l'administration sur le territoire ivoirien et fixant
de nouvelles échéances et conditions pour le désarmement
et le regroupement des ex-combattants.
51 Voir le Rapport sur l'état des pratiques
de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace
francophone, Délégation à la paix, à la
démocratie et aux droits de l'homme, OIF, Paris 2012, p.37.
xxxvii
Il faut aussi souligner le rôle joué par l'OIF
dans la facilitation et la conclusion de l'Accord Politique Global (APG) le 20
août 2006 au Togo.
En Guinée-Conakry par exemple, l'OIF a pris part aux
travaux du Groupe International de Contact sur la Guinée (GIC-G). Elle a
appuyé le Conseil National de Transition (CNT) dans l'organisation de
séminaires régionaux sur la sensibilisation au dialogue
social.
A la suite de la condamnation du coup d'Etat au Mali, M. Abdou
Diouf a appelé à un retour immédiat à l'ordre
constitutionnel et à un dialogue politique. L'OIF a souhaité, en
outre, oeuvrer en étroite collaboration et concertation avec ses
partenaires notamment la CEDEAO et l'Union Africaine (UA) pour le suivi de la
situation au Mali. Elle a également soutenu les initiatives dans le
règlement de la crise puis a participé au Groupe International
d'Appui et de Suivi au Mali mis en place le 7 juin 2012 à Abidjan.
La tenue des dialogues débouche quelques fois sur
l'organisation d'élections. Dans ce domaine, les Etats ne sont pas
abandonnés : ils bénéficient de l'assistance multiforme de
l'OIF.
B- L'assistance électorale
« L'élection, en tant que mode de
régulation des institutions et de légitimation du pouvoir, s'est
imposée indiscutablement dans l'espace francophone »51.
C'est en substance ce que relève le rapport 2012 de la DDHPD. Les
élections constituent dès lors pour les Etats membres de l'espace
francophone, l'élément d'ancrage et de consolidation de la
démocratie représentative promue et soutenue par l'OIF.
Cependant, ces Etats sont confrontés à bon nombre de
difficultés raison pour laquelle l'OIF s'est engagée à les
accompagner conformément à la Déclaration de Bamako.
En Guinée-Conakry par exemple, les institutions
électorales ont bénéficié d'un important soutien de
l'OIF. Il en a été ainsi de la révision des textes
constitutionnels et électoraux ainsi que pour la mise en place d'un
mécanisme sécurisé de traitement et de transmission des
résultats de l'expertise de l'OIF. En effet, elle est impliquée
dans l'accompagnement et la consolidation des institutions électorales
guinéennes.
En plus de jouer un rôle de médiation entre les
parties guinéennes pour asseoir les bases d'un processus
électoral inclusif, transparent et fiable, l'OIF contribue au
renforcement des compétences techniques et informatiques de la CENI afin
qu'elle puisse superviser dans les
xxxviii
conditions optimales l'opération de révision des
listes électorales. Dans ce sens, le Général Siaka
Sangaré52 qui est un expert de l'OIF, a participé
activement au règlement entre les deux tours de la crise de la CENI en
supervisant le 2è tour de l'élection
présidentielle.
Plusieurs missions électorales, d'information et de
contacts, d'observation et d'expertise technique ont été
envoyées dans les pays en proie à
l'instabilité53.
Dans son accompagnement, l'OIF diversifie son appui. Il peut
prendre la forme d'une enveloppe financière qu'elle octroie aux Etats.
Cet appui peut aussi consister en une formation des différents acteurs
et institutions impliqués tout au long du processus électoral
notamment les membres de la CENI ou CENA54, des leaders politiques,
de la société civile, les membres des cours constitutionnelles,
des commissions nationales des droits de l'homme, les journalistes et les
populations par le biais de sensibilisation...Cet appui peut aussi prendre la
forme d'une aide logistique et matérielle.
Tous ces efforts déployés par cette organisation
visent à n'en point douter à la consolidation de la
démocratie.
Dans le cadre de la réalisation de tous ces objectifs,
notamment l'affermissement de la démocratie dans l'espace ouest africain
francophone, l'OIF travaille en collaboration avec différents
acteurs.
52 De nationalité guinéenne, il est
depuis 2011 le président du Réseau des Compétences
Electorales Francophones (RECEF). Il est aussi un expert de l'OIF avec laquelle
il a participé à de nombreuses missions d'appui aux processus
électoraux notamment en Haïti, en Mauritanie, au Tchad, au
Bénin, en cote d'ivoire ou encore en Guinée-Conakry.
53 Au titre de missions d'information et de
contact, on peut noter celles dépêchées en Côte
d'Ivoire en octobre et novembre 2010 dans l'optique de l'élection
présidentielle et des législatives de novembre 2011 ; au Burkina
Faso (élection présidentielle du 21 novembre 2010) ; en
Guinée-Conakry (élection présidentielle du 7 novembre
2010), au Niger et au Bénin respectivement les 31 janvier et 12 mars et
le 13 mars 2011 (élections présidentielles).
C'est justement dans le cadre de ces missions d'information
que le professeur Henriette Diagri-Diabaté, représentante
spéciale du Secrétaire Général s'est rendue le 30
avril 2013 au Togo dans l'optique de l'organisation des élections
législatives et locales de cette année.
54 Commission Electorale Nationale
Indépendante ou Autonome suivant les dénominations
adoptées par
chaque Etat.
xxxix
CHAPITRE II : LA CONSOLIDATION DE LA DEMOCRATIE PAR
LA
COOPERATION
L'OIF accompagne la mise en place d'espaces de
coopération professionnalisée, entre institutions de
compétences similaires, privilégiant l'échange
d'expériences et de savoirs, notamment par la concertation, la formation
par les pairs et le développement de capacités et d'outils de
travail comparatifs et mutualisés.
Dans le domaine de la consolidation de l'Etat de droit et de
la promotion des droits de l'Homme, cette démarche s'est traduite par la
création de réseaux institutionnels. Afin de contribuer
efficacement à la consolidation de la démocratie, l'OIF
entretient un partenariat avec ses réseaux institutionnels (Section I).
Dans le même temps, elle coopère avec les acteurs
non-étatiques (Section II) oeuvrant dans ce domaine.
Section I : Le partenariat avec les réseaux
institutionnels
Le partenariat avec les réseaux institutionnels de
l'OIF se traduit par leur participation au renforcement des capacités
nationales des Etats membres (Paragraphe I). Ceux-ci favorisent
également la coopération juridico-judiciaire initiée par
l'organisation (Paragraphe II).
Paragraphe I : Le renforcement des capacités
nationales
L'OIF, en vertu de l'article 1er du titre I de sa
Charte et conformément au chapitre V de la Déclaration de Bamako,
initie des formations à l'attention des acteurs des organes des
institutions en charge de la promotion et de la consolidation de la
démocratie dans les Etats membres (A) et plaide auprès de ces
derniers pour la ratification des instruments pertinents (B).
A- La coopération par la formation
La culture démocratique intériorisée
implique que tous les acteurs intervenant dans le processus de
démocratisation disposent de capacités réelles leur
permettant de mettre en oeuvre les recommandations et autres principes
démocratiques de base. L'immensité de la tâche à
laquelle est appelée l'OIF, l'a conduit à s'associer avec des
partenaires oeuvrant dans le même domaine. C'est la raison pour laquelle,
elle a entrepris depuis plus d'une décennie
xl
une coopération avec ses divers réseaux
institutionnels qui lui offrent un champ d'action
étendu55.
Au regard des objectifs communs poursuivis par l'OIF et les
réseaux institutionnels, le partenariat noué permet d'associer
étroitement ces derniers aux programmes de l'OIF en faveur du
développement institutionnel et de la gouvernance démocratique
par l'amélioration de l'offre et des actions de formation et de
perfectionnement à l'attention des acteurs des institutions de la
promotion des droits de l'homme et de la culture démocratique, ainsi que
de la consolidation de la paix conformément aux dispositions du
Programme d'action de Bamako adopté en octobre 2002.
Ce partenariat, qui repose sur une logique
multilatérale reflétant la diversité de l'espace
francophone, s'adresse aux professionnels du droit, de la médiation, de
la régulation et des droits de l'homme.
Le rôle confié aux secrétariats permanents
des réseaux institutionnels contribue à pérenniser leur
action et facilite la mise en place d'outils documentaires comparatifs
participant à la promotion de la diversité des systèmes
juridiques et au dialogue des cultures juridiques56.
En matière de prévention, les réseaux se
sont distingués par leurs actions notamment par le biais de
l'organisation des séminaires de formation en octobre 2003 à
Hammamet (Tunisie) et en septembre 2004 au Québec autour des
thèmes « l'ombudsman/médiateur : Acteur de la transparence
administrative » et « le triple défi de l'AOMF en rapport avec
la Déclaration de Bamako ».
La Commission Nationale des Droits de l'Homme du Bénin
a pour sa part reçu le soutien de l'Association Francophone des
Commissions Nationales de promotion et de protection des Droits de l'Homme
(AFCNDH)57.
55 L'OIF coopère avec L'Association
Africaine des Hautes Juridictions Francophones (AAHJF), L'Association des Cours
Constitutionnelles ayant en partage l'usage du Français (ACCPUF),
L'association des Institutions Supérieures de Contrôle ayant en
Commun l'usage du Français (AISCCUF), L'Association des Ombudsmans et
Médiateurs de La Francophonie (AOMF) ...
56 Au titre de la contribution de la Conférence
internationale des Barreaux de tradition juridique (CIB), il est utile de
souligner les sessions de formation d'avocats stagiaires africains au Barreau
de Paris en 2003 et en 2004 pour une durée de deux mois. Le
réseau des structures gouvernementales chargées des droits de
l'homme dans l'espace francophone a de son côté contribué
au renforcement des capacités du Haut Commissariat aux Droits de l'Homme
et à la Paix du Sénégal en novembre 2004 et de la
direction des droits de l'homme et des affaires sociales du Ministère
Nigérien de la justice en juillet 2005 par une dotation en
matière informatiques et bureautiques.
57 Notons que ce réseau a apporté son
soutien dans le renforcement des capacités humaines par l'octroi de
bourses de formation à des membres ou des agents des
commissions nationales de plus d'une dizaine de pays d'Afrique en 2003. Il est
intervenu également en favorisant la participation du président
de la commission
xli
Les réseaux institutionnels comptent parmi les
partenaires privilégiés de la Francophonie pour le rayonnement et
l'ajustement de ses projets en faveur du développement institutionnel.
Ils accompagnent les Etats membres dans leurs activités de consolidation
de la démocratie et de l'Etat de droit par un plaidoyer pour la
ratification des instruments pertinents.
B- Le plaidoyer pour la ratification des instruments
pertinents
Le quatrième engagement important auquel les Etats
membres de l'OIF ont souscrit est la promotion d'une culture
démocratique et le plein respect des droits de l'homme. Le renforcement
des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans
l'espace francophone doit aller de pair avec l'adhésion aux normes et
conventions adoptées par la communauté internationale même
si l'efficacité d'une organisation ou d'une institution ne peut se
mesurer seulement au regard des textes (ses normes, ses principes, sa
politique, ses déclarations), aspect sur lequel nous reviendrons dans la
deuxième partie de notre étude.
Le socle de la démocratie est sans nul doute la
règle de droit qu'impose l'Etat de droit. Les dirigeants y tirent leur
légitimité et la légalité de leur action. L'Etat de
droit voudrait aussi que le respect et la protection des droits des citoyens
soit assuré. Pour ce faire, les Etats prennent part à des
traités et conventions qu'ils se doivent d'incorporer dans leur ordre
juridique interne. Ils se sont donc engagés à ratifier les
principaux instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits
de l'homme et à appeler à la ratification rapide du statut de
Rome portant création de la Cour Pénale Internationale (CPI).
Le plaidoyer de l'OIF en faveur de la ratification des divers
instruments oeuvrant dans le même domaine a abouti à la
ratification notamment de la Convention et du protocole facultatif sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination à
l'égard des femmes58.
Aussi, la Convention sur l'élimination de toutes les
formes de discrimination raciale a été ratifiée par un
nombre important d'Etats francophones. C'est le cas de Saõ Tomé
et Principe le 9 septembre 2000, de la Guinée-Bissau le 12 septembre
2000 et de la Guinée Equatoriale le 8 octobre 2002. Il en va
également du Pacte international relatif aux droits civils et politiques
ainsi que ses deux protocoles additionnels été ratifiés
par Djibouti le 05 novembre 2002. Le
nationale des droits de l'homme et des libertés
fondamentales du Niger ainsi que d'un représentant de la commission
nationale des droits de l'homme du Togo à la 7è Conférence
internationale des institutions nationales des droits de l'homme qui a
été organisée à Séoul en septembre 2004
autour du thème : « le respect des droits de l'homme dans un
contexte de conflit et de lutte contre le terrorisme ».
58 Presque tous les Etats dont le Bénin le
25 mai 2000, le Sénégal le 26 mai 2000, le Mali le 5
décembre 2000, le Burkina Faso le 16 novembre 2001 et le Togo l'ont
ratifié.
xlii
Cap-Vert quant à lui, a ratifié les deux
protocoles ensemble le 19 mai 2000 alors que le Mali n'a ratifié que le
1er le 24 mai 200159. L'OIF s'est employée
à faire signer la Convention des Nations Unies contre la torture
à ses membres. Parmi eux, il y a le Cap-Vert (le 22 septembre 2000),
Madagascar (le 1er octobre 2001). Le Sénégal a de son
côté ratifié le protocole facultatif à la Convention
contre la torture le 04 février 2003.
Dans le cadre de la protection des droits économiques,
sociaux et culturels, l'OIF a réussi à persuader ses membres de
ratifier le protocole international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels et la convention sur la protection des droits de tous les
travailleurs migrants et des membres de leur famille. Comme résultats de
cette action, on note l'adhésion de Djibouti au protocole le 05 novembre
2002 et la signature de la Convention par la Guinée-Conakry le 07
septembre 2000, le Mali le 05 juin 2003 et le Burkina Faso le 26 novembre
2003.
La volonté exprimée par l'OIF dans la protection
des droits de l'homme s'est ensuite manifestée par ses actions en faveur
de la ratification du Protocole facultatif à la convention relative aux
droits de l'enfant concernant l'implication d'enfants dans les conflits
armés et de celui concernant la vente d'enfants, la prostitution des
enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.60
S'agissant du Statut de Rome instituant la CPI, l'action
francophone a porté ses fruits car nombreux sont les Etats francophones
parties à ce traité.
Le bilan des engagements internationaux des Etats membres de
l'OIF reste très louable malgré la réticence de quelques
Etats pour ratifier certains traités. La ratification ne constitue pas
une fin en soi. Il convient de mettre en oeuvre les traités que ce soit
sur le plan international ou sur le plan interne d'où l'obligation d'en
rendre compte par le biais d'un rapport que chaque Etat est tenu de produire
à la commission de surveillance qui est mis en place.61
Cependant, force est de constater que nombreux sont ces Etats qui s'en
dispensent. L'OIF dans le souci d'aider ceux-ci à remédier
à cette situation encourage une synergie
59 Voir Rapport sur l'état des pratiques de
la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace
francophone, Délégation à la paix, à la
démocratie et aux droits de l'homme, OIF, 2004. Op.cit. P. 67 et s.
60 Certains Etats membres de l'OIF ont
ratifié ces actes. Parmi eux, citons le Gabon et la Guinée Bissau
le 08 septembre 2000, le Bénin le 22 février 2001, le Niger
n'ayant ratifié que le deuxième le 27 mars 2007.
61 Il s'agit d'une obligation de base qui
conditionne l'instauration d'un dialogue constructif avec les instances
internationales. Voir Rapport sur l'état des pratiques de la
démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone,
Délégation à la paix, à la démocratie et aux
droits de l'homme, OIF, Paris, 2004. P. 72.ibid.
xliii
d'action entre différentes institutions juridiques et
judiciaires d'où la coopération juridico-judiciaire.
Paragraphe II : La coopération
juridico-judiciaire
Les hautes juridictions des pays francophones ont très
tôt réalisé que pour contribuer à la consolidation
du processus démocratique en cours dans les Etats membres, il fallait
unir leur action. La création de l'Association des Hautes Juridictions
répond à ce souci. Cette contribution se traduit par son soutien
aux institutions juridictionnelles des Etats membres. Elle a but est de
promouvoir et de partager les expériences et les pratiques en cette
matière en privilégiant une coopération juridique (A) et
judiciaire entre les différentes institutions des Etats membres (B).
A- La coopération juridique
Afin de mettre en oeuvre les recommandations issues du
symposium de Bamako à savoir l'instauration de la culture
démocratique, l'OIF ne ménage aucun effort pour diffuser le droit
par l'intermédiaire des juridictions francophones dont la mission est de
favoriser la participation active des Etats francophones aux grands forums et
négociations juridiques internationaux, d'aider à la
présence effective des juristes et praticiens du droit francophones dans
les manifestations, réunions, colloques et séminaires
internationaux, d'appuyer le développement des échanges et de
l'information entre juristes et praticiens du droit francophones, de soutenir
les processus d'intégration régionale...
L'action de l'OIF en matière de justice a
été possible grâce au plan d'action défini au Sommet
du Caire (Egypte) le 1er novembre 1995. Il s'agit en
réalité de faciliter la diffusion du droit tant au plan interne
qu'au plan international62. Ce soutien de l'OIF s'est
matérialisé par les efforts qu'elle a entrepris ces
dernières années à travers son programme de Collecte, de
Gestion et de Diffusion du Droit (CEGEDI) depuis 1993. Celui-ci vise à
soutenir les Etats qui le désirent dans l'organisation de la collecte et
la gestion fiables de leurs droits nationaux afin de faciliter leur diffusion
à la fois au plan national et international, grâce aux techniques
modernes de la communication et de l'information.
62 Cet objectif est contenu dans les
recommandations de la deuxième conférence des ministres
francophones de la justice, réunie à Paris en janvier 1989. Le
soutien à la diffusion du droit et à l'information juridique
constitue donc un axe majeur et permanent de la coopération juridique.
Voir Justice et État de droit : état des réalisations
2000-2006. Document de travail à la préparation de la 4ème
Conférence des ministres francophones de la Justice (13 & 14
février 2008). Délégation à la paix, à la
démocratie et aux droits de l'Homme. 15 novembre 2007. Paris. P. 7.
xliv
La Déclaration de Bamako a d'ailleurs souligné
l'importance de la collecte et de la diffusion du droit. Elle a dans ce sens,
recommandé que la collecte, la mise à jour et la diffusion des
constitutions et des textes d'organisation des pouvoirs publics des pays
francophones, ainsi que les textes encadrant la vie démocratique, soient
poursuivies, dans le cadre du Système d'Information Juridique,
Institutionnel et Politique (SIJIP). 63
En 2003, dans le cadre du projet « Diffusion du droit
», l'OIF a mis en ligne un site portail `'Droit Francophone» pour
offrir un cadre unique d'accès rassemblant les hyperliens avec
l'ensemble des ressources juridiques pertinentes en ligne, des Etats membres de
l'OIF. Ce site Internet, est le moyen le plus adapté pour offrir aux
Etats membres l'accès effectif à leur droit et au droit des
autres Etats64.
L'OIF oeuvre en outre dans cette optique en apportant un
soutien en matériels informatiques et accessoires, aux opérateurs
nationaux de diffusion du droit comme ce fut le cas au Burkina Faso, en
Guinée-Conakry, au Niger, en Côte d'Ivoire, à Madagascar,
au Sénégal en vue de favoriser la mise en ligne du droit de ces
pays sur Internet ainsi que de créer des liens informatiques entre les
banques de données de ces structures nationales et le site portail de
droit francophone.
L'OIF a apporté son concours financier au projet
Memproge (Mémoire sur le génocide rwandais) de la section belge
de l'ONG Avocats Sans Frontières. Le Togo a aussi
bénéficié de ce soutien financier en témoigne les
chiffres.65 De plus, elle a apporté un appui financier
à l'organisation d'un colloque sur les droits de l'enfant et l'exclusion
sociale tenu à Ouagadougou, au Burkina Faso en mars 2003 puis un soutien
financier à l'association rwandaise, Haguruka pour la défense des
droits de la femme et de l'enfant, en vue de
63 Idem
64 Ce site est accessible à l'adresse :
http://portail.droit.francophonie.org.
Il a pour objectifs, de réunir d'une part, l'ensemble des données
collectées et gérées directement par l'OIF, et d'autre
part, d'offrir un accès immédiat à l'ensemble des
données juridiques gérées par des opérateurs
nationaux, ainsi que par les réseaux appuyés ou
créés à l'initiative de la Francophonie pour contribuer au
développement de ses programmes de coopération. L'OIF entend
ainsi continuer son action et accorder une place prépondérante au
portail droit francophone, pour les années à venir. Même si
au démarrage beaucoup de problèmes notamment le manque de
volonté politique ajouté aux difficultés pour organiser la
collecte, la gestion et la diffusion du droit et les réticences des
Etats à participer au projet ont été rencontrés,
ceux-ci ont manifesté un engouement grâce à l'apparition
des nouvelles technologies de l'information.
65 Ce concours était de 25.000.000 FCFA en
1993 et de 14.269.252 FCFA en 1995. Voir Etat de la coopération entre
l'OIF et le Togo. Montant de la coopération juridique et judiciaire.
Document préparé en vue de la participation au XIe sommet des
chefs d'Etat et de gouvernement de la Francophonie, tenu à Bucarest en
Roumanie les 28 et 29 septembre 2006, ministère des affaires
étrangères et la coopération, direction de la
communication, Lomé, 2006.
xlv
l'organisation, en partenariat avec la Banque mondiale, d'un
atelier sous-régional sur le thème « Aspects juridiques
liés à la problématique hommes/femmes et accès aux
services juridiques dans les pays sortants de conflits » à Kigali,
au Rwanda en juin 2003.
Près de deux décennies après la
troisième conférence des ministres francophones de la
justice66, les engagements de la Déclaration du Caire et les
axes du plan d'action du Caire restent assurément d'actualité.
L'espace judiciaire international a connu, et connaît, d'importantes
évolutions auxquelles la coopération multilatérale
francophone doit s'adapter pour être toujours utile et pertinente.
B- La coopération judiciaire
Les Chefs d'Etat et de gouvernement réunis en 1999
à Moncton (Canada) lors du VIIIe Sommet de l'OIF, ont renouvelé
leur attachement à l'indépendance de la magistrature et leur
volonté de renforcer les systèmes de justice nationaux et de
promouvoir la diffusion du droit. Ces principes se sont traduits
concrètement, en 2000-2001, dans un certain nombre d'actions
articulées autour de cinq principaux axes qui sont l'appui à la
justice ; la réhabilitation judiciaire dans les pays en situation
d'urgence ; la collecte, la gestion et la diffusion évoquée
ci-dessus ; les actions de concertation et la coopération
interparlementaire.
Le premier axe s'est traduit par l'exécution de quatre
projets qui portent successivement sur la modernisation de la justice, le
renforcement des capacités nationales de formation, l'éducation
des justiciables et un dernier volet intitulé droit, justice et
développement.
S'agissant de la modernisation de la justice, le but est
d'aider huit Etats membres de l'OIF dans leurs efforts pour améliorer le
fonctionnement de leur système judiciaire, son accessibilité et
son efficacité dans le traitement des dossiers.
Il est aussi utile de relever le soutien du Centre de
Recherche Scientifique pour le Développement à la base de la
Démocratie en Afrique (CRESDA), dans l'organisation au Bénin en
janvier 2001 d'un séminaire-atelier sur la mise en oeuvre du Travail
d'Intérêt Général (TIG), le financement de l'achat
de matériel informatique et bureautique pour le ministère de la
justice de la Guinée Bissau et pour la Cour Suprême et le tribunal
de Praia (Cap Vert).
Le deuxième volet porte sur le renforcement des
capacités nationales de formation. Il vise à favoriser les plans
nationaux de formation et d'échanges ainsi que les concertations sur les
politiques menées par les huit Etats membres identifiés dans le
programme d'appui à la
66 Cette conférence s'est tenue au Caire le
1er novembre 1995.
xlvi
justice pour le biennum (Bénin, Cameroun, Haïti,
Madagascar, Mali, Roumanie, Tchad et Vietnam)67.
Quant à l'éducation des justiciables sur
l'état des droits applicables devant les juridictions, elle vise
à favoriser la concertation entre les acteurs judiciaires et la
société civile sur les mécanismes à mettre en
oeuvre pour assurer une meilleure prise en compte des problèmes
suscités par l'application du droit positif et du droit coutumier, mais
aussi de dispenser une meilleure information judiciaire aux justiciables. En
effet, dans nombre de pays du Sud, où droit coutumier et droit positif
cohabitent, il est nécessaire de mettre en place des approches et des
politiques spécifiques en matière de diffusion du droit et qui
puissent toucher toute la population.
Sur le projet droit, justice et développement, la
conférence des ministres francophones de la justice du Caire a
souligné la nécessaire adaptation du droit aux exigences de
sécurité que requiert la promotion des investissements et le
développement du commerce international, dans le respect du principe de
la liberté contractuelle.
Enfin, la réhabilitation judiciaire dans les pays en
situation d'urgence est un projet qui s'adresse aux pays francophones en
situation de crise et vise à contribuer à la reconstruction et
à la consolidation de l'Etat de droit dans ces pays, à la
réhabilitation de leurs systèmes judiciaires, notamment en
matière de formation, de documentation juridique et judiciaire,
d'édition et de publication de codes ainsi qu'en matière
d'équipements informatiques et bureautiques des juridictions. Le Rwanda,
le Burundi et le Congo-Brazzaville, inscrits parmi les pays en situation
d'urgence pour le biennum 2000-2001, ont bénéficié de ce
projet.
Un appui a, d'autre part, été apporté par
l'organisation aux les autorités camerounaises, à travers le
séminaire régional d'information et de sensibilisation sur la CPI
en février 2001. L'Agence a également apporté son appui
financier à la Conférence d'experts nationaux sur la ratification
et la mise en oeuvre du statut de Rome instituant la Cour pénale
internationale, tenue à Kinshasa en décembre 2001. Les actions de
l'OIF dans ce domaine se sont renforcées par la signature le 28
septembre 2012 d'un accord entre elle et la CPI.
67 Notons que c'est un volet qui poursuit trois
objectifs plus spécifiques : appuyer la conception et
l'élaboration d'outils pédagogiques appropriés ; favoriser
l'accès à l'information juridique et judiciaire en s'appuyant sur
les nouvelles technologies de l'information ; mettre en réseau les
centres francophones de formation et structurer les centres de documentation.
Mais, l'initiative la plus marquante prise au cours de cette réunion est
le lancement du réseau des responsables nationaux de la formation
judiciaire. Regroupant quatorze membres, celui-ci est opérationnel
depuis décembre 2000. Un projet pilote de formation judiciaire à
distance, s'appuyant sur ce réseau, est à l'étude, en
collaboration avec l'Institut Francophone des Technologies de l'Information et
de la Formation (INTIF).
xlvii
A côté des institutions nationales et des
réseaux institutionnels sur lesquels l'OIF s'appuie dans la mise en
oeuvre de ses objectifs, se tiennent de nombreux autres acteurs. Ces derniers
constituent pour la plupart des organisations internationales. Aussi, bien
d'autres acteurs notamment non-étatiques y participent-ils.
Section II : L'implication des acteurs
non-étatiques
Dans une perspective d'accompagnement des Etats en vue du
renforcement de la démocratie, plusieurs acteurs et non des moindres
prennent une part active dans le processus. Parmi eux, on peut noter les
organisations internationales (Paragraphe I) à côté
desquelles se tiennent surtout la société civile (Paragraphe
II).
Paragraphe I : L'implication des organisations
internationales
L'examen de cette implication nous amène à
distinguer les organisations internationales (OI) suivant leur nature et
domaine d'intervention. Ainsi, nous avons des OI à vocation politique
(A) et celles à vocation économique (B).
A- Le rôle des organisations internationales
à vocation politique
Il s'agit dans cette partie de mettre en exergue
essentiellement le rôle de l'Organisation des Nations Unies (ONU) et de
ses institutions spécialisées, de l'Union Africaine (UA) et dans
une mesure de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO)68 dans le processus démocratique de l'Afrique de
l'ouest dans l'exécution duquel l'OIF intervient.
Au plan universel, L'OIF entretient des relations avec
l'Organisation des Nations Unies (ONU). En effet, le troisième
paragraphe du préambule de la Déclaration de Saint-Boniface
souligne le contexte actuel de l'interdépendance entre tous les Etats et
la nécessité de prendre en charge les différents dangers
qui menacent l'ensemble des Etats du monde par une approche
multilatérale, globale, concertée et complémentaire. La
Déclaration de Saint-Boniface inscrit l'action de l'OIF dans le cadre de
la coopération internationale, et s'engage à soutenir les
initiatives et les efforts de l'ONU en matière de gestion des crises.
Ce soutien de l'ONU concerne en particulier la
responsabilité de protéger, dont l'OIF a adopté le
principe depuis son sommet de Ouagadougou tenu en 2004. La Déclaration
de Saint-Boniface prend acte « avec satisfaction » de la
reconnaissance, par tous les Etats membres de l'ONU réunis à New
York lors du Sommet du millénaire en 2005, « du principe
68 La CEDEAO de plus en plus intervient dans le
domaine politique.
xlviii
de la responsabilité de protéger les populations
contre le génocide, les crimes de guerre, l'épuration ethnique et
les crimes contre l'humanité »69. L'OIF rappelle
également que cette obligation incombe à chaque Etat, et
subsidiairement à la communauté internationale au cas où
l'Etat concerné se montre défaillant, en soulignant notamment
« la responsabilité de la communauté internationale de
réagir d'une façon opportune et décisive, et en
conformité avec la légalité internationale... ».
Si l'OIF peut agir dans le domaine de la responsabilité
de prévenir, premier pilier de la responsabilité de
protéger, elle s'en remet à l'ONU pour la réaction, en
particulier au Conseil de sécurité (article 3)70
suscitant alors des interrogations quant à ses capacités
réelles de prévenir les crises. Malgré tout, il convient
de saluer l'approche multilatérale dans la recherche de la paix.
A la différence de l'ONU ou d'autres organisations
régionales comme l'Organisation de l'Atlantique Nord (OTAN), la
Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO),
l'Union Africaine (UA)..., l'OIF ne dispose pas de moyens logistiques pour
organiser dans son propre périmètre une réaction
adéquate. Bien évidemment, il ne s'agit pas seulement d'une
question de moyens, mais aussi d'une option politique. Ainsi,
conformément à l' article 1871 l'option pour la
prévention et, en cas de besoin, un soutien plus ou moins actif aux
opérations de maintien de la paix telles que le Programme de
Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix (RECAMP),
le Programme de Renforcement des Opérations de Soutien de la Paix dans
le Monde (POSPM) et le Programme d'Aide à l'Instruction Militaire du
Canada (PAIM) peuvent également avoir un effet préventif en
empêchant que les conflits ne surgissent de nouveau.
En se spécialisant dans le domaine de la
prévention, l'OIF est bien consciente des limites de la seule
prévention si les autres dimensions dans la préservation de la
paix ne sont pas assurées de manière efficace « en temps
voulu » et avec les moyens adéquats. On sait qu'au sein même
de l'ONU, les appels à une réaction rapide lancés par le
Secrétaire Général, une
69 Cf. le paragraphe 10 du Préambule de la
Déclaration de Saint-Boniface,
70 Consulter l'article 3 Déclaration de
Saint-Boniface « Soulignons la responsabilité de la
communauté internationale de réagir d'une façon opportune
et décisive, et en conformité avec la légalité
internationale, les principes de la Charte des Nations Unies et les
prérogatives dévolues au Conseil de sécurité pour
protéger les civils contre le génocide, les crimes de guerre,
l'épuration ethnique et les crimes contre l'humanité, au cas
où les moyens pacifiques s'avéreraient insuffisants et où
il serait manifeste que les autorités nationales ne protègent pas
leurs populations contre de tels actes».
71Voir l'article 18 de la Déclaration de
Saint-Boniface
xlix
fois qu'a été atteint un seuil critique dans
l'imminence d'un conflit, n'ont été suivis d'effet. C'est ce que
relève le Rapport fait par Monsieur Lakhdar Brahimi72: «
A moins de changements institutionnels importants, d'un appui financier plus
solide et d'un engagement renouvelé de la part de ses membres, l'ONU
n'aura pas les moyens, dans les mois et les années qui viennent,
d'exécuter les tâches cruciales de maintien et de consolidation de
la paix que les États membres lui confient ».
Lors du sommet de Montreux (Suisse), les Etats membres de
l'OIF ont appelé au renforcement de la coordination des initiatives
prises pour accroître leur contribution aux opérations de paix.
Dans cette optique, elle a entrepris des efforts pour consolider la paix dans
les pays en sortie de crise en apportant une assistance technique en vue du
renforcement de la participation francophone aux opérations de paix par
l'entremise de l'unité de la Police Francophone
(FRANCOPOL)73.
L'OIF a également accompagné l'ONU dans les
efforts entrepris pour la consolidation de la paix. Dans ce sens, elle a
apporté son appui à la réforme des systèmes de
sécurité à travers plusieurs actions. En effet, elle a
dépêché en mars 2011 en Guinée-Conakry, un expert
dans le domaine de la police et capable d'apporter à la mission
d'évaluation du secteur de sécurité menée
conjointement avec l'Union Africaine, la CEDEAO, l'ONU et l'UE.
De même, elle a collaboré avec le Haut
Commissariat aux Droits de l'Homme des Nations Unies (HCDH) pour dispenser des
formations en droits de l'homme à l'intention des forces de
défense et de sécurité guinéennes. Elle a, en
outre, participé au séminaire consacré à la
politique cadre sur la réforme des systèmes de
sécurité (RSS) en cours d'adoption par l'UA.74 Dans le
cadre de ses actions en faveur de l'appui aux processus de consolidation de la
paix, l'OIF s'est particulièrement mobilisée au Tchad, en
Guinée-Conakry et en République Centrafricaine (RCA) à
l'exemple des formations Guinée et RCA de la Commission de Consolidation
de la Paix des Nations Unies (CCP) dont la Francophonie est membre. Nous
72 A ce sujet voir le rapport fait par M. Lakhdar
Brahimi, ancien Ministre algérien des affaires étrangères
et Président du Groupe d'étude sur les opérations de paix
des Nations Unies, New-York, 17 août 2000, paragraphe 1er.
73 Précisons qu'elle a entre autres soutenu
l'organisation de séminaires portant sur le matériel à
l'usage des contingents des Nations Unies. Aussi grâce aux
activités de plaidoyer menées par l'OIF, un nombre important de
documents relatifs aux opérations de maintien de la paix a
été traduit en français par le Département des
Opérations de Maintien de la Paix des Nations Unies (DOMP). Un autre
séminaire portant sur les négociations relatives au Traité
sur le Commerce des Armes (TCA) a été organisé à
New York en lien avec l'Institut des Nations Unies pour la Recherche sur le
Désarmement (UNIDIR).
74 L'OIF est devenue aussi membre observateur des
conseils de fondation du Centre pour le contrôle démocratique des
forces armées (DCAF) rejoignant ainsi les principaux acteurs
internationaux oeuvrant en faveur de la RSS puis membre du comité de
pilotage du Réseau africain pour le secteur de sécurité
(RASS).
l
pouvons citer entre autres l'élaboration d'un cours en
ligne sur la gestion de la sécurité publique en contexte
électoral en lien avec l'Institut des Nations Unies pour la formation et
la Recherche (UNITAR).
La coopération entre l'OIF et les organisations
internationales en matière de consolidation de la paix et de la
promotion de la démocratie, loin de se limiter aux organisations
internationales à vocation politique, s'étend également
à celles dont le rôle premier est la promotion du
développement à travers celui de l'économie.
B- L'apport des organisations internationales à
vocation économique
Ce sont essentiellement des institutions à vocation
économique et commerciale à l'exemple de celles de Bretton Woods,
de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de multiples institutions du
système des Nations Unies...qui oeuvrent pour un ancrage effectif de la
démocratie en Afrique.
En effet, depuis les années 1990 se développe
une tendance généralisée des pays occidentaux à
associer développement économique ou politique et
démocratie, s'inscrivant ainsi dans la voie du développement
durable. Sur le plan économique, l'aide financière
octroyée aux pays en développement s'avère assujettie
à l'inclusion d'une clause de conditionnalité démocratique
dans les accords de coopération. L'accord du G8-Nouveau partenariat pour
le développement de l'Afrique signé en octobre 2001 et l'accord
de l'Union européenne Lomé IV l'illustrent bien75.
Avec la fin de la guerre froide, la dimension politique de ces
conditionnalités s'est affirmée, en complément des
exigences de bonne gestion. Les donateurs ont graduellement affiché leur
foi nouvelle dans le développement à travers la promotion et le
respect des principes démocratiques. Cette politique impose aux pays
tiers demandeurs d'aide le respect de ces principes et des droits fondamentaux
ainsi que l'instauration de la bonne gouvernance au sein de leurs
institutions.
La Banque Mondiale par exemple, dans son rapport de 1989, a
lié libéralisation économique et légitimité
du pouvoir, en vantant les mérites du « meilleur gouvernement qui
exige un renouveau politique »76. Cette politique vise à
inciter les Etats à opter pour le régime démocratique.
75 Voir Marie Elisabeth Lebrun, La
conditionnalité démocratique en matière d'aide publique au
développement : sa mise en oeuvre par l'union européenne et ses
conséquences, Essai de Maîtrise, Faculté de droit,
Université de Laval, Québec-Canada, 10 septembre 2003.
76 Cf. Banque Mondiale, L'Afrique sub-saharienne.
De la crise à une croissance durable. Etude de prospective à long
terme, Washington D.C., 1989, pp. xii et 190-191.
li
Ainsi, au fil des conventions de Lomé, les pays de la
CEE dont la France ont dessiné les contours d'une véritable
conditionnalité démocratique. L'idée de fonder la
coopération sur les droits de l'homme apparaît avec la Convention
de Lomé III en 1985. Celle de Lomé IV signée en 1990
autorise des sanctions de coopération dans une perspective positive. Les
critères d'accès à l'aide ont été ensuite
élargis par la convention de Lomé IV révisée
à Maurice en 1995 au respect des principes démocratiques et de
l'Etat de droit. L'article 96 de cette convention prévoit, en cas de
manquement, la suspension totale ou partielle de la coopération,
après consultations avec le pays incriminé77.
Dix ans presque jour pour jour après le discours de la
Baule, les Etats ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique) et de l'Union
Européenne ont conclu le 23 juin 2000 à Cotonou, un nouvel accord
renforçant les aspects institutionnels de la conditionnalité
démocratique. Par le dialogue politique, les parties s'engagent à
promouvoir un environnement politique stable et démocratique, à
améliorer le cadre institutionnel nécessaire au fonctionnement
d'une société démocratique, à soutenir activement
les processus de démocratisation et la consolidation de l'Etat de droit
et à procéder à une évaluation
régulière de leur évolution78. Le
mécanisme de suspension de la coopération en dernier recours est
reconduit79. Le caractère innovateur de cette convention
s'illustre par la plus grande part accordée à la dimension
politique au détriment de la dimension économique.
Conscient que la prévention des conflits passe aussi
par la lutte contre la pauvreté, la bonne gouvernance, la redistribution
des richesses nationales, comme l'a su si bien relever l'ancien
président de la Banque mondiale (BM) M. James Wolfensohn, l'OIF se doit
de jouer un rôle différent de celui des bailleurs de fonds
traditionnels.
77 Cf. l'article 96 paragraphe 2, point a) du
présent article. « Si, nonobstant le dialogue politique sur les
éléments essentiels prévus à l'article 8 et au
paragraphe la du présent article, une partie considère que
l'autre manque à une obligation découlant du respect des droits
de l'homme, des principes démocratiques et de l'État de droit
visés à l'article 9, paragraphe 2, elle fournit à l'autre
partie et au Conseil des ministres, sauf en cas d'urgence particulière,
les éléments d'information utiles nécessaires à un
examen approfondi de la situation en vue de rechercher une solution acceptable
par les parties. À cet effet, elle invite l'autre partie à
procéder à des consultations, portant principalement sur les
mesures prises ou à prendre par la partie concernée afin de
remédier à la situation conformément à l'annexe
VII. Les consultations sont menées au niveau et dans la forme
considérés les plus appropriés en vue de trouver une
solution. Les consultations commencent au plus tard 30 jours après
l'invitation et se poursuivent pendant une période
déterminée d'un commun accord, en fonction de la nature et de la
gravité du manquement. Dans tous les cas, le dialogue mené dans
le cadre de la procédure de consultation ne dure pas plus de 120 jours.
Si les consultations ne conduisent pas à une solution acceptable par les
parties, en cas de refus de consultation ou en cas d'urgence
particulière, des mesures appropriées peuvent être prises.
Ces mesures sont levées dès que les raisons qui les ont
motivées disparaissent ».
78 Voir les Accords de Cotonou notamment les articles
1, 8 et 9.2.
79 Cf. Accords de Cotonou, ibid. article 98, 23 juin
2000.
lii
Ainsi, l'OIF a, notamment à travers sa
représentation permanente organisé en 2003 et 2004, une
série de réunions de travail avec le bureau de Genève du
Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) pour examiner
les possibilités de renforcer la collaboration OIF-PNUD dans les
domaines des droits de l'homme et des technologies de l'information et de la
communication. Elle a participé aussi aux diverses réunions
organisées par le bureau du PNUD comme ce fut le cas lors de session
annuelle et à la 5ème Conférence des «
Bailleurs de fonds pour la République du Mali » qui a eu lieu
à Genève les 30 et 31 mars 200480.
Il serait inapproprié de ne pas relever parmi les
acteurs avec lesquels coopère l'OIF en vue l'enracinement de la
démocratie, la société civile. A cet égard,
quelques actions menées par les Organisations internationales non
gouvernementales (OING) et des associations au sein des Etats membres de ladite
organisation méritent d'être relevées.
Paragraphe II : L'action de la société
civile
Conformément au 3ème principe
directeur du cadre stratégique adopté en 2004 à
Ouagadougou, l'OIF veut favoriser des synergies entre opérateurs,
organisations intergouvernementales, OING et secteur privé81.
La société civile dont il est question ici joue un rôle
considérable tant au plan international (A) qu'au plan national (B).
A- Au plan international
« Cette nouvelle époque exige de redéfinir
la notion de leadership - de leadership mondial. Elle exige une nouvelle
coopération internationale entre tous - gouvernements,
société civile et secteur privé, travaillant ensemble pour
le bien collectif du monde entier » 82. Cette
déclaration de Ban Ki-Moon est largement partagée par l'OIF dans
son effort de promotion de la paix et de la stabilité mondiales. En
effet, un nombre croissant d'organisations non gouvernementales (ONG) et
d'autres organisations de la société civile sont des partenaires
du système des Nations Unies. Elles jouent un rôle clef dans les
grandes conférences des Nations
80 Avec l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l'OIF a eu
à mener plusieurs activités. Entre autres, il importe de
souligner l'organisation d'un séminaire de haut niveau du 25 au 27 juin
2003 au siège de l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie (AIF)
à Paris autour du thème « Les enjeux de la
5ème conférence ministérielle de l'OMC pour les
pays francophones ».
81 Voir la Déclaration de Ouagadougou, cadre
stratégique, 3ème principe directeur, OIF, 27 novembre
2004.
82 M. Ban Ki-moon, Secrétaire
général de l'ONU, allocution prononcée lors de la
séance plénière du Forum économique mondial, Davos,
Suisse.
liii
Unies et sont des partenaires indispensables pour soutenir les
efforts de l'ONU au niveau national. Les ONG sont consultées sur des
questions de politiques et de programmes de l'ONU. Cette dernière
organise des présentations, des réunions et des
conférences pour les représentants des ONG qui sont
accrédités auprès des bureaux, programmes et agences de
l'ONU.
Consciente de leur contribution, l'OIF a fait depuis quelques
années des ONG des partenaires de choix dans la mise en oeuvre de ses
objectifs notamment la promotion de la démocratie et de l'Etat de droit.
Elle entretient donc un partenariat avec diverses organisations non
étatiques puisque convaincue que leur action constitue une dimension
importante de l'établissement durable de sociétés libres,
tolérantes et démocratiques83.
L'OIF a poursuivi son soutien en mettant en place en 2005 le
Fonds Francophone d'Initiatives pour la Démocratie, les Droits de
l'Homme et la Paix (FFIDDHOP). Ce fonds est destiné à promouvoir
et à favoriser les activités des organisations de la
société civile notamment celles des ONG sur le terrain des droits
de l'homme84.
Le statut des femmes a connu aussi une amélioration
grâce aux actions de la Francophonie. Celles-ci sont
caractérisées par son soutien aux efforts nationaux en
matière d'amélioration de leur statut et de leurs droits, de la
lutte contre les violences qu'elles subissent puis leur intégration dans
le processus de développement socio-économique.
La coopération entre l'OIF et les Organisations de la
Société Civile (OSC) se trouve aussi marquée par des
actions au sein des Etats membres.
B- Au plan national
La société civile est considérée
généralement comme l'ensemble des institutions notamment, les
associations, organisations, alliances, confessions religieuses, médias
privés...Ces regroupements ou institutions entrent dans ce cadre
à condition qu'ils soient légalement constitués et
indépendants du pouvoir public.
83 On peut relever qu'à l'initiative du
Comité de suivi des Organisations Internationales Non Gouvernementales
(OING) et Organisations de la Société Civile (OSC), deux
journées de concertation et de mobilisation ont rassemblé du 31
mars au 1er avril 2010 à Paris, les OING autour du thème «
Villes éducatrices et développement durable, quels enjeux et
perspectives dix ans après la Déclaration de Bamako ? ». Les
20 OING présentes ont notamment rappelé leur mobilisation pour
mettre en oeuvre les dispositions de la Déclaration de Bamako relatives
à la démocratie locale et aux dimensions sociale,
économique et écologique des droits de l'Homme, en liaison avec
l'OIF, l'Association Internationale des Maires Francophones (AIMF) et l'IEPF.
Cette manifestation faisait suite à la participation d'OING
accréditées et de l'IEPF à la Conférence mondiale
sur l'éducation au développement organisée par l'Unesco en
mars 2009 à Bonn83.
84 L'OIF a en outre été partenaire du
Festival du Film et du Forum International sur les Droits Humains (FFFIDH) pour
la tenue de sa 10ème édition à Genève
(Suisse) en mars 2012.
liv
Plusieurs missions sont assignées à la
société civile au regard des divers domaines dans lesquels elle
intervient. Elle oeuvre en matière de culture démocratique
conformément à la Déclaration de Bamako en
référence à l'article 6 de son deuxième
chapitre85. Les citoyens ne peuvent participer à la vie
politique s'ils ne sont formés ou ne possèdent de connaissances
minimales en matière démocratique. La société
civile dans cette optique s'efforce de jouer ce rôle à travers son
implication dans la sensibilisation et la formation au profit des populations
surtout en période électorale.
A cet égard, la société civile a
notamment contribué à l'inscription des populations
réticentes sur les listes électorales en vue des élections
législatives de 2007 après les malheureux
évènements de 2005 au Togo.
L'OIF a, en outre, fait de la protection des droits de
l'homme, une condition essentielle à l'existence de la
démocratie, comme on peut le relever à l'article 4 du Chapitre
III de la Déclaration de Bamako86. Dans cet esprit, plusieurs
associations de défense des droits de l'homme se mobilisent et se
mettent à l'avant-garde en dénonçant fortement les
violations de ces droits, parfois au prix de la vie de leurs responsables. On
se rappelle l'assassinat tragique en 2010 du défenseur des droits de
l'homme Floribert Chebeya Bahizire87 en République
démocratique du Congo (RDC).
L'OIF apporte des appuis et mène des actions en vue de
rétablir la confiance entre les différentes associations de
défense des droits humains et les autorités publiques
étatiques dont le Groupe Lotus en RDC, la Ligue Togolaise des Droits de
l'Homme (LTDH), l'Association pour la Promotion de l'Etat de Droit (PED), le
Centre d'Observation de la Promotion de l'Etat de Droit
(COPED)88.
85 Cet article dispose que «La
démocratie requiert la pratique du dialogue à tous les niveaux
aussi bien entre les citoyens, entre les partenaires sociaux, entre les partis
politiques, qu'entre l'État et la société civile. La
démocratie implique la participation des citoyens à la vie
politique et leur permet d'exercer leur droit de contrôle ».
86 Cet article dispose « Que la
démocratie, pour les citoyens y compris, parmi eux, les plus pauvres et
les plus défavorisés se juge, avant tout, à l'aune du
respect scrupuleux et de la pleine jouissance de tous leurs droits, civils et
politiques, économiques, sociaux et culturels, assortis de
mécanismes de garanties. Il s'agit là de conditions essentielles
à leur adhésion aux institutions et à leur motivation
à devenir des acteurs à part entière de la vie politique
et sociale ».
87 Il était un Journaliste congolais et
Président de l'ONG « La voix des sans voix ». Il est mort
assassiné tragiquement en 2010.
88 Elle a organisé plusieurs tables rondes
entre ces deux catégories d'acteurs dont le but est de renforcer la
protection des défenseurs des droits humains et des dénonciateurs
d'actes de corruption et de détournement des deniers publics à
l'exemple de celles congolaises tenues du 25 au 27 mai 2011.
lv
Toujours dans cette perspective de garantie et de protection
des droits de l'homme, elle s'évertue à former et à
sensibiliser les cadres administratifs, officiers, magistrats et responsables
de mouvements associatifs, ce à travers des partenariats avec divers
instituts oeuvrant dans le même domaine comme en témoignent les
partenariats conclus avec les instituts d'études
spécialisés notamment l'Académie de Droit International de
la Haye, l'Institut International des Droits de l'Homme de Strasbourg.
La société civile a aussi oeuvré pour la
défense des droits de la femme en témoignent les actions du
Groupe de Réflexion et d'Action Femme, Démocratie et
Développement (GF2D), du Réseau des Femmes Anciens Ministres et
Parlementaires (REFAMP) et de Women In Law and Democratic in Africa au Togo
(WILDAF-Togo) dans l'adoption du nouveau Code des personnes et de la famille le
29 juin 2012. Tous ces différents regroupements oeuvrent en outre en
faveur de la réconciliation comme ils ont su bien le faire au Togo avec
la Commission vérité, justice et réconciliation (CVJR)
mise en place le 29 mai 2009.89
Toutes ces organisations participent à la bonne marche
de l'observatoire des pratiques démocratiques en signalant les risques
d'embrasement rendant très efficace le système de
prévention mis en place par l'OIF même si dans l'ensemble sa
contribution reste perfectible.
89 Voir Solitoke Donga, l'implication de la
société civile dans le processus de démocratisation en
Afrique noire francophone : cas du Togo, Mémoire pour l'obtention du
diplôme de l'ENA, cycle III, option Diplomatie, 2012.
DEUXIEME PARTIE :
lvi
UNE CONTRIBUTION PERFECTIBLE
Depuis son repositionnement sur la scène politique
mondiale, l'OIF s'est impliquée véritablement dans la
consolidation et l'affermissement de la démocratie en Afrique en
général et tout particulièrement en Afrique de l'ouest.
Que ce soit en matière de la promotion d'une culture politique
intériorisée, des efforts dans la prévention et de la
résolution des conflits..., elle a été toujours aux
côtés des Etats membres pour leur apporter son soutien, notamment
en expertise, en formation et en moyens financiers. Cependant, malgré
cet effort de l'OIF, on note des insuffisances qui mettent à mal la
pertinence de ses actions faisant dire
lvii
que c'est une contribution laborieuse. Il convient donc
d'examiner les difficultés auxquelles elle est confrontée
(Chapitre I) afin d'apporter des perspectives dans le sens du renforcement de
ses actions (Chapitre II).
CHAPITRE I : LES LIMITES DES ACTIONS DE L'OIF
L'OIF mène des actions extrêmement variées
eu égard à ses nombreux domaines d'intervention.
Le bilan de l'investissement de l'OIF semble présenter un actif
impressionnant mais aussi un passif palpable. Ses actions manquent de
pertinence et d'efficacité en raison des difficultés auxquelles
elle est confrontée. Ces limites peuvent être liées d'une
part à l'organisation elle-même (Section I) et aux actions des
Etats membres d'autre part (Section II).
Section I : Les difficultés intrinsèques
à l'OIF
De nombreux obstacles internes ne permettent pas à
l'OIF de mener à bien les objectifs qui sont les siens notamment l'aide
à l'instauration de la démocratie et de l'Etat de droit. Ces
difficultés font de l'OIF une organisation affaiblie (Paragraphe I) avec
comme conséquence le manque de pertinence et d'efficacité
relative de ses actions (Paragraphe II).
Paragraphe I : Une organisation affaiblie
90 Voir notamment le rapport de l'Observatoire,
Délégation à la paix, à la démocratie et aux
Droits de l'homme (DDHDP), OIF, 2006.
lviii
Au départ essentiellement consacrée à la
culture, l'OIF s'est assignée au fil des années bien d'autres
missions qu'elle ne parvient pas toujours à remplir comme cela convient.
Le manque d'efficacité de ses actions trouverait son origine dans la
multiplicité des objectifs à atteindre (A) et dans l'insuffisance
des ressources financières à sa disposition
(B).
A- La multiplicité des objectifs à
atteindre
La raison de la création de l'OIF est originellement
liée au souci de regrouper l'ensemble des Etats ayant en partage la
langue française. L'OIF a aujourd'hui bien d'autres missions. Elles
ressortent nettement des déclarations adoptées par les sommets et
les conférences, et des rapports du Secrétaire
Général : la langue française et l'éducation, la
culture démocratique des droits de l'homme, le renforcement de
l'influence de la Francophonie dans les relations internationales, la
diversité culturelle, le renforcement de la concertation et de la
solidarité Nord-Sud. L'OIF est donc présente sur tous les fronts.
Elle embrasse tous les domaines d'activités sans pour autant
véritablement arriver à les réaliser avec efficience.
L'OIF s'occupe de politique, d'économie et de culture sans en avoir
toujours les moyens; ce qui fait dire qu'il y a un éparpillement dans
les objectifs à atteindre.
Le 2e rapport de l'Observatoire des pratiques de la
démocratie conduit par la Délégation à la Paix,
à la Démocratie et aux Droits de l'homme (DDHDP) met en
lumière concernant, les objectifs fixés, des insuffisances, des
lacunes, voire des échecs.90 Ce rapport souligne à
titre d'exemple les effets pervers de la « consolidation »
forcée de la démocratie et de l'état de droit dans nombre
d'Etats du Sud. En effet, il y a eu un risque de « surinvestissement
institutionnel » pour des Etats incapables de dégager les moyens
humains et matériels nécessaires pour donner consistance aux
dispositifs conformes aux standards internationaux. On note aussi une
prolifération d'institutions notamment juridictionnelles et para
juridictionnelles toujours plus spécifiques et sophistiquées ; de
même on observe des difficultés à «
intérioriser » l'Etat de droit et à faire fonctionner des
institutions surdimensionnées et inadaptées d'où il faut
craindre les dangers du « mimétisme institutionnel ».
Quelque fois, on note une certaine dichotomie entre les
objectifs affichés et les capacités concrètes de
l'organisation en matière de consolidation de la démocratie, des
droits de
lix
l'homme et de l'Etat de droit. C'est ce qui explique justement
le fait que les initiatives de l'organisation manquent d'efficacité et
restent peu connues en dehors de ses propres instances. Le préambule du
cadre stratégique de 2004 défini à Ouagadougou
reconnaît d'ailleurs implicitement la faiblesse des capacités de
l'organisation raison pour laquelle il souligne la nécessité
d'avoir des « objectifs resserrés et en nombre restreint ».
Cette situation, non des plus envieuses, a amené les
Chefs d'Etat et de gouvernement à repenser les objectifs de l'OIF.
Ainsi, la nécessité de réagir contre
l'éparpillement des initiatives et de recentrer le champ d'action de
l'OIF est énoncée publiquement lors du Sommet de Beyrouth en
octobre 2002. Cependant, le manque de pertinence et le recadrage
nécessaire des objectifs de l'OIF ne peuvent à eux seuls
expliquer l'absence de vitalité de cette organisation tant de nombreuses
insuffisances ou nombreux échecs trouvent leurs causes dans
l'insuffisance de ressources financières.
B-L'insuffisance des ressources financières
Les objectifs de l'OIF même en évolution
croissante, peuvent être atteints si celle-ci dispose suffisamment de
moyens lui permettant de mettre en application les différentes
stratégies en vue de les atteindre. Les ressources financières
constituent l'élément fondamental dans la mise en oeuvre des
objectifs et la réalisation des projets.
Les ressources financières de l'OIF sont
constituées principalement par les contributions statutaires
obligatoires, par les contributions volontaires à un Fonds
Multilatéral Unique (FMU) 91 et par les financements
additionnels que l'OIF peut mobiliser à travers ses partenariats avec
des organismes publics ou privés. Cependant, elle n'en dispose quasiment
pas assez. Les Etats adhèrent sans réelle volonté
d'honorer leurs engagements. Le problème de l'OIF à l'instar
d'autres organisations, c'est que les contributions financières que les
Etats ont librement souscrites en adhérant ne sont pas ou tardent le
plus souvent à être versées à l'organisation ; ce
qui nuit véritablement à son fonctionnement. Quelque fois, ces
91 Le FMU est l'outil financier interne par lequel
la Francophonie finance les programmes de coopération
multilatérale décidés par les Sommets. Il recueille
directement les contributions des Etats membres de la Francophonie et les
ventile aux organismes de la Francophonie multilatérale : OIF et
opérateurs directs et reconnus du Sommet (hormis le cas
spécifique de TV5).
lx
contributions sont insuffisantes puisqu'elles ne permettent
pas à l'organisation de pouvoir mettre en oeuvre ses projets. Elle se
contente donc des moyens maigres que lui sont octroyés par ses Etats
membres. La question se pose donc de savoir s'il est approprié d'adopter
des projets de programmes si on ne dispose pas de moyens de les mettre en
oeuvre.
L'autre handicap qui nuit au fonctionnement de l'organisation
est que les obligations des Etats membres en matière financière
diffèrent selon leur statut. Les membres de plein droit doivent
obligatoirement contribuer mais peuvent aller volontairement au-delà de
leur contribution statutaire, alors que les membres associés et ceux
observateurs ne contribuent que sur une base volontaire au financement du FMU.
Les montants des contributions statutaires des membres de plein droit sont
déterminés selon un barème dûment approuvé
par les instances de l'OIF.
Cette situation serait de nature à défavoriser
certains membres notamment ceux de plein droit par rapport aux membres
associés et observateurs car les fonds obtenus servent à financer
divers programmes sans véritablement tenir compte de la contribution de
chacun. Une autre conséquence découlant de cette situation est la
réticence de certains membres à verser
régulièrement leurs cotisations.
Toujours au titre des difficultés financières,
on peut relever le faible pouvoir économique des membres de l'OIF qui
majoritairement sont des pays pauvres et essentiellement situés au sud.
La croissance économique de ces pays est peu dynamique. Ce sont
principalement des pays moins avancés (PMA) dont la plupart sont
touchés par la dette. Dans ces conditions, il est clair que ces pays ne
seraient pas en mesure d'honorer leurs engagements car en proie à des
difficultés financières.
L'OIF quant à elle ne dispose pas suffisamment de
moyens pour intervenir directement comme bailleur de fonds pour les programmes
importants qui sont désormais laissés au profit d'autres de
moindre importance.
Les difficultés liées à l'OIF
méritent en outre qu'on leur porte une attention particulière
à travers les actions qu'elle mène. Mais ces actions sont pour la
plupart d'une relative efficacité.
Paragraphe II : La relative efficacité des actions
de l'OIF
L'OIF, dans l'accomplissement de ses missions, est
amenée à poser des actions sur le terrain dans ses Etats membres.
Ces actions font intervenir le Secrétaire Général en tant
que porte-parole de l'organisation. Il dispose en la matière des
compétences définies par la Charte.
lxi
Seulement certaines de ses actions ou prises de position sont
jugées inconstantes (A). Aussi, le statut du Secrétaire
Général parait fragile (B).
A-L'inconstance des prises de position
L'OIF prend des mesures et des positions souvent à la
suite des coups d'Etat, des violations des droits de l'homme et des
révisions anticonstitutionnelles non consensuelles ainsi qu'en situation
de conflits armés. Ces actes se traduisent par des déclarations,
des condamnations et sanctions des régimes ne respectant pas les
principes démocratiques par eux souscrits. On ne peut ignorer les appels
à l'apaisement.
D'abord, pour ce qui est de la définition des concepts,
il semble opportun de s'interroger sur la conception francophone des notions de
« démocratie », de « culture démocratique
intériorisée», de « droits de l'homme » et
d'« Etat de droit » dans ses diverses déclarations. Un constat
s'impose : chacune de ces notions fait l'objet d'interprétation de
façon très variable selon les auteurs. Ceci est d'autant plus
vrai qu'il est permis aux négociateurs d'utiliser dans les grandes
conférences ces concepts, chacun avec la signification que lui accorde
chaque partie, selon que cela l'arrange dans le seul but d'aboutir à la
conclusion des conventions auxquelles elle est censée adhérer
sans réserve. En même temps, l'on peut regretter qu'une
institution qui fait l'éloge du français comme d'une langue qui
puise sa supériorité au plan diplomatique, dans sa
précision, ne montre pas plus de rigueur terminologique dans ses
documents les plus solennels.
Ensuite, il n'est point nécessaire de rappeler, car ce
n'est un secret pour personne, que l'OIF aujourd'hui connait une
évolution quant à ses missions. Le processus de leur
accomplissement fait observer que derrière cette évolution, se
cachent en réalité des « perceptions et
représentations plus difficiles à harmoniser et des tensions
résultant d'un risque de fonctionnement à deux vitesses à
apaiser » comme le disent si bien Martin et Michel-Louis dans l'ouvrage
« La francophonie, objet de la théorie des relations
internationales : brèves remarques de synthèse ».
S'agissant des sanctions, certains membres souhaitent que
l'OIF ne s'aventure pas trop hors de son domaine d'action traditionnel afin
d'éviter que l'intervention de l'institution ne constitue une source de
divisions comme l'a relevé l'ancien président Jacques Chirac pour
qui la sanction « n'est pas la tradition de l'espace francophone [...]
cela relève de l'ONU ». Il faut noter que les mécanismes
francophones reposent, avant tout, sur l'accompagnement des
lxii
Etats pour approfondir et pour consolider leur
expérience démocratique, plutôt que sur la
dénonciation des violations.
Dès lors, comment assurer l'effectivité d'un
droit francophone respectueux de valeurs et de principes démocratiques
si au sein même de la communauté des Etats membres de l'OIF, parmi
lesquels la France, des voix s'élèvent pour refuser d'en
sanctionner les violations? Les professeurs André Cabanis et Albert
Lourde, s'étaient attachés à relever ces distorsions par
rapport aux missions de l'OIF au cours d'un colloque organisé à
l'Université Jean-Moulin de Lyon92.
Dans l'ensemble, l'intervention de l'OIF semble être en
fonction des intérêts des Etats membres qui sont prêts
à faire l'impasse ou à fermer les yeux sur certains conflits de
l'espace francophone.
Il convient également de noter que sur la question de
l'engagement démocratique, le constat est celui d'une timidité de
l'action, l'absence d'un dessein réel car pour l'instant le verbe ne
fait que se substituer à l'action.
Une autre cause, non des moindres qui peut expliquer le manque
d'efficacité des actions de l'OIF, trouverait sa source dans la
fragilité du statut du Secrétaire Général.
B- Le statut fragile du Secrétaire
Général
Dans sa stratégie de résolution ou de
prévention des crises et des conflits, l'OIF a fait le choix de la
médiation et de la prévention depuis une période
récente. Ce rôle est confié au Secrétaire
Général qui reçoit ses compétences de la Charte et
de la Déclaration de Bamako notamment au travers des articles 6 et 7 en
ce qui concerne la Charte et conformément au chapitre 5 de la
Déclaration de Bamako. C'est le Sommet de Hanoi qui avait
consacré la Francophonie politique par l'adoption d'une Charte le 15
novembre 1997.
Elle se trouve donc dotée d'un nouvel ordre
institutionnel avec la création d'un poste de Secrétaire
Général. Cette mutation conférait à l'OIF une
présence au monde en même temps qu'elle lui donnait un responsable
politique, un concepteur de sa politique, une personnalité d'envergure
internationale capable de mettre en oeuvre la politique arrêtée
par l'organisation. La fonction d'intermédiation de l'OIF était
désormais assurée.
92Cf Cabanis André (2007), « Regard de
l'historien », Existe-t-il une culture juridique francophone ?, Toulouse,
p. 251). Cf. aussi les actes d'un récent colloque publiés par M.
Guillou et par Trang Ph. Thi Hoai (édit.), La Francophonie sous l'angle
des théories des relations internationales, Lyon,
Iframond/université Jean-Moulin, pp. 241-250.
lxiii
Aujourd'hui, la voix du Secrétaire
Général de l'OIF paraît étouffée alors que
l'universalisme marchand impose ses modes d'intervention partout faisant,
triompher l'unilatéralisme et au moment où la
multipolarité humaniste recule. A l'examen, l'on constate que le statut
juridique du Secrétaire Général paraît fragile et ne
lui permet pas de jouer le rôle de premier plan qui est attendu de lui.
La médiation francophone à présent n'est ni efficace ni
attractive. De plus, la promotion de la paix, de la démocratie et des
droits de l'homme, plus récente mission de l'OIF soulève plus
d'interrogations. Elle résulte en effet de la mise en oeuvre de la
Déclaration de Bamako. Dans ce texte, l'OIF rappelle son attachement
à certaines valeurs et se dote d'un dispositif d'observation et de
réaction en matière de prévention des crises et des
conflits dont le rôle échoit au Secrétaire
Général.
Le symposium international de Bamako, chargé de dresser
un bilan sur l'application de la Déclaration de 2000, a confirmé
en novembre 2005 ce mécanisme de prévention et de gestion de
crises. En mai 2006, la Déclaration de Saint-Boniface sur la
prévention des conflits et la sécurité humaine est
allée dans le même sens.
Pour montrer la fragilité du statut du
Secrétaire Général, on peut à titre d'illustration
renvoyer à l'alinéa 2 de l'article 793 de la Charte
qui se contente de limiter le rôle du Secrétaire
Général à une proposition d'une série de mesures en
faveur de la prévention. L'examen de cet article laisse penser que les
Etats ne sont pas obligés de suivre le raisonnement et les propositions
de ce dernier et l'usage du verbe « propose » est plus
qu'édifiant.
On peut aussi souligner le retard accusé dans les
actions posées par celui-ci. Ce retard pourrait être
justifié par la lenteur ou la réticence de certains Etats membres
à donner le quitus nécessaire au premier responsable qu'est le
Secrétaire Général d'où l'échec des
médiations de ce dernier dans certains conflits qui ont perduré
tels que la Côte d'Ivoire, les Comores ou le Liban. C'est donc
l'efficacité d'un dispositif purement diplomatique qui est en cause.
Il faut enfin regretter le retard de l`OIF à
réagir en Côte d'Ivoire et aux Comores alors même que
l'objectif assigné est précisément de prévenir les
conflits. Son absence d'anticipation et d'initiative dans ces deux cas peut lui
être reprochée. C'est pourquoi la posture défensive dans
laquelle se trouve l'OIF devrait pouvoir être revisitée.
Les difficultés intrinsèques à
l'organisation ne peuvent expliquer à elles seules l'échec
relatif de l'OIF dans sa mission de promotion de la démocratie, des
droits de l'homme et de
93 En cas d'urgence, le Secrétaire
Général saisit le Conseil permanent et, compte tenu de la
gravité des événements, le président de la
Conférence ministérielle, des situations de crise ou de conflit
dans lesquelles des membres peuvent être ou sont impliqués. Il
propose les mesures spécifiques pour leur prévention,
éventuellement en collaboration avec d'autres organisations
internationales.
lxiv
prévention des conflits dans l'espace francophone.
Elles ne peuvent cacher qu'il y a aussi à côté des
difficultés qui sont le fait des Etats. Ces difficultés ont pour
origine le regard de l'implication de l'OIF qu'ont ceux-ci et de l'attrait
réduit qu'offre désormais l'organisation.
Section II : Les difficultés
extrinsèques
Les difficultés dont il est question ici sont
dépendantes des Etats membres. Le degré d'implication du à
la multiplicité des missions de l'OIF est de plus en plus
récusé. Cette dernière en plus est davantage
contestée par ses membres (Paragraphe I) d'où la perte de
séduction de l'OIF (Paragraphe II).
Paragraphe I : La contestation de l'implication de
l'OIF
L'appréciation de la contestation de l'OIF par les
Etats membres se fera à travers le prisme du regard porté sur
elle par ces derniers qui trouvent que leur souveraineté semble
être menacée d'où leur résistance (A). En outre, ils
refusent l'idée d'une nouvelle colonisation (B).
A- La résistance du souverainisme
La démocratisation des Etats d'Afrique fait intervenir
plusieurs acteurs extra étatiques comme l'OIF. Ceux-ci à travers
leur implication posent de nombreuses actions dont la mise en oeuvre est
confrontée à la résistance des Etats membres.
La contestation de l'intervention de l'OIF se justifie par le
fait que les Etats membres n'adhèrent pas à certaines de ses
actions. En effet, ils ne sont pas disposés à recevoir des
injonctions en matière démocratique et de surcroît venant
de l'extérieur. Dès lors, le constat est qu'il existe une
inadéquation entre le principe de souveraineté et les processus
de démocratisation dont il est question.
La confrontation des définitions des professeurs Jean
Combacau et Serges Sur selon lesquelles « dans l'ordre international au
contraire, affirmer qu'il est souverain (l'Etat) signifie qu'on ne trouve au
dessus aucune autorité dotée à son égard d'une
puissance légale : la souveraineté internationale se
définit négativement comme la non soumission à une
autorité supérieure, le fait de n'être le sujet (au sens
d'assujetti) d'aucun sujet (au sens de personne juridique) »94
et de M. Boutros Boutros Ghali pour qui « la démocratisation est
un
94 Voir Jean Combacau et Serges Sur, DIP, 4è
éd., 1999, Paris, p.227.
lxv
processus conduisant à une société plus
ouverte et participative, et moins autoritaire »95,
révèle qu'en théorie souveraineté et
démocratisation sont compatibles. Ceci traduit la libre
détermination des Etats dans le choix ou non du régime
démocratique. Cependant dans la réalité des faits, il
existe une incompatibilité96.
Les Etats dénoncent alors cette implication surtout
s'agissant de la sanction des Etats qui n'observeraient pas les obligations
internationales en matière des droits de l'homme et de l'Etat de droit.
Les Etats en effet considèrent ces actions comme une ingérence
dans leurs affaires internes, ce qui est contraire à l'article 2 de la
Charte des Nations Unies aux termes duquel « l'Organisation est
fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses
membres ».
Au plan des élections, il existe également des
critiques. Elles sont relatives notamment à l'observation internationale
des élections et aux rapports des commissions accréditées
dont les conclusions ont pour conséquence la reconnaissance ou non de la
légitimité des élus et des gouvernements mis en place par
les institutions étatiques en principe autonomes. Ainsi, à
travers les dons qui sont faits en matière d'assistance
électorale, les Etats sont contraints de respecter certaines conditions
préalables même si pour certains, l'observation internationale des
élections à la suite des accords de paix consécutifs
à des conflits armés ou à des crises politiques, est
compatible avec la souveraineté étatique puisqu'étant
expressément prévue ou consacrée, voire
consentie97.
Et lorsque l'OIF se retrouve en pareille situation, il est
clair qu'elle subtilise anormalement une prérogative fondamentale
appartenant aux Etats. Cette analyse est confortée par les propos de
Jiang Zemin qui pense qu'« aucun pays n'a le droit d'imposer aux autres
son système social et son idéologie et encore moins, de les
accuser à tort et à travers pour ce qui est de leurs affaires
internes »98.
A côté de la résistance du principe de
souveraineté, nous ne devons pas ignorer le fait que les Etats
réfutent le modèle démocratique. Dans la
Déclaration de Bamako notamment en son chapitre 3, l'OIF en faisant de
la démocratie le meilleur système de gouvernement entre en
95 Cf. le document de M. Boutros Boutros Ghali,
A/51/761, 20 décembre 1996.
96 Voir notamment, Kpadé A. Agossou, «
Implication de l'Organisation des Nations Unies dans la démocratisation
de l'Afrique Subsaharienne », Mémoire pour l'obtention du
diplôme de l'ENA, Cycle III, 2010, p.51.
97 Cf Itsouhou Mbadinga, « Brèves
remarques sur l'assistance électorale internationale des Etats africains
» (sept.-déc.1998) Rev. Jur. Pol. Ind. Coop. 309, pp. 309-326.
98 Se rapporter à l'allocution de M. Jiang
Zemin, ancien président de la République populaire de Chine,
à la cérémonie d'ouverture du forum sur la
coopération sino-africaine à Béijing, le 10 oct. 2000.
lxvi
contradiction avec les dispositions de sa Charte pour ce qui
est de la souveraineté. Pour preuve, on peut relever l'exemple de
l'alinéa 2 de l'article 1er99 .
D'une façon globale, la résistance du
souverainisme ainsi que le rejet du modèle démocratique
considéré comme le meilleur système de gouvernement
constituent les entraves aux actions de l'OIF dans le processus de
démocratisation de l'Afrique en général et en Afrique de
l'ouest en particulier. Ces entraves ont également pour origine, le
refus des Etats de subir une nouvelle fois la colonisation.
B- Le rejet du néocolonialisme
La plupart des Etats membres de l'OIF majoritairement
situés dans l'hémisphère sud ayant acquis difficilement
leur souveraineté et par delà leur liberté, ne voudraient
plus revivre les méfaits de la colonisation. C'est pourquoi ils sont
prêts à la défendre quel que soit le prix.
En effet, se fondant sur le droit des peuples à
disposer d'eux-mêmes, ils invoquent pour se défendre, les
dispositions de la Charte des Nations Unies notamment l'alinéa 2 de
l'article 1er du chapitre I100 et des différents instruments
internationaux pertinents relatifs aux doits de l'homme. Au nombre de ces
dispositions, nous pouvons noter l'extrait de la Résolution 1514 (XV) en
date du 14 décembre 1960 de l'Assemblée Générale
des Nations Unies relative à la Déclaration sur l'octroi de
l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux qui a consacré
le droit à l'autodétermination des peuples dont la substance suit
: « Reconnaissant que les peuples du monde souhaitent ardemment la fin du
colonialisme dans toutes ses manifestations, convaincue que le maintien du
colonialisme empêche le développement de la coopération
économique internationale, entrave le développement social,
culturel et économique des peuples dépendants et va à
l'encontre de l'idéal de paix universelle des Nations Unies,...
».101
Les Etats africains presque dans leur ensemble accusent les
Etats surtout occidentaux et anciennes puissances colonisatrices qui apportent
leurs concours à l'OIF dans son implication
99 Voir l'article 1er alinéa 2 de
la Charte de l'OIF «La Francophonie respecte la souveraineté des
Etats, leurs langues et leurs cultures. Elle observe la plus stricte
neutralité dans les questions de politique intérieure. »,
adoptée par la Conférence ministérielle de la
Francophonie, Antananarivo, 23 novembre 2005, p.2.
100 Cf alinéa 2 de l'article 1er du chapitre
1er « Développer entre les nations des relations
amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité
de droit des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, et
prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix du monde
», Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, p.3.
101 Voir le recueil d'instruments internationaux, volume I,
instruments universels, résolution 1514(XV), 14 décembre 1960,
Assemblée Générale des Nations Unies, Déclaration
sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux a
consacré le droit à l'autodétermination des peuples,
Nations Unies, New York et Genève, 1994, pp.55-57.
lxvii
dans le processus d'enracinement de la démocratie en
Afrique subsaharienne. Ils dénoncent l'hypocrisie dont ils font preuve
à cet égard.
Quand on jette un regard rapide sur les différents
processus qui ont cours en Afrique et tout particulièrement dans les
Etats disposant d'importantes ressources énergétiques et
minières, un constat amer s'impose : la démocratie peine à
s'instaurer. La situation souvent vécue dans ces pays est celle des
conflits qui opposent le plus souvent des rebelles et les régimes
légitimes en place qui ne garantisseraient pas leurs
intérêts. Les questions qui méritent ici réflexion
sont qui sont derrières ces rebellions en leur fournissant des armes ?
Qu'attendent-ils en retour ? Ces interrogations posées par les analystes
sont largement partagées et confortent l'idée selon laquelle les
processus de démocratisation seraient menacés par les
intérêts des anciens colons et autres puissances.
Les anciens colons offriraient des soutiens multiformes et
quasi permanents aux régimes africains qui préservent leurs
intérêts bien évidemment au détriment des
intérêts et projets de développement de leur pays en
échange desquels ils s'éternisent au pouvoir.
Il semble évident au vu de ces analyses que des
puissances étrangères (à l'exemple de la France)
mènent une politique de garantie de la survie de leurs fidèles
amis même si à côté et au même moment, elles
tiennent un discours en faveur de la démocratisation.
Au regard de tous ces éléments ci-dessus
relevés, il est clair que les Etats ne voient qu'à travers cette
valeur promue et défendue, un moyen de domination nuisible à leur
développement et au bien-être de leurs populations au profit des
intérêts des puissances dominantes.
La résistance du souverainisme et le rejet d'une autre
forme de néocolonialisme caractérisée par la politique de
deux poids, deux mesures sont des handicaps pour des actions réussies de
l'OIF en matière de droits de l'homme et de prévention des
conflits. Malheureusement, ces causes vont au-delà et recouvrent le
dilemme du développement marqué par la désillusion des
pays du sud concernant leur développement puis la menace du
Commonwealth. Du coup, l'OIF est en perte de séduction.
Paragraphe II : La perte de crédibilité de
l'OIF
La perte de crédibilité de l'OIF pourrait
s'expliquer par la désillusion des pays du sud quant à leur
développement (A). De plus, le rayonnement du Commonwealth constitue de
nos jours une réelle menace à la survie de l'OIF (B).
A- Le dilemme du développement des pays du
sud
lxviii
« Sans développement, il n'y a guère
d'espoir de réduire les conflits en Afrique »102. Ces
propos de Kofi Annan traduisent bien les ambitions des Etats en matière
de développement. L'OIF a pris la mesure de la chose en apportant son
soutien faisant sienne l'un des objectifs principaux de son institution
à savoir la promotion du développement. Pour ce faire, l'OIF
s'emploie à développer des liens de coopération en vue
d'un développement durable et solidaire des Etats qui se résument
en l'intégration des Etats du sud à l'économie mondiale et
l'aide à la lutte contre la pauvreté. Il est bien reconnu qu'il y
aura une réduction des situations d'instabilités si les Etats
connaissent ou arrivent à un niveau de développement où
tous les citoyens pourraient satisfaire leurs besoins primaires notamment
manger à leur faim.
Dans cette perspective, l'organisation s'est employée
à réaliser ce double objectif. D'abord, elle mène des
actions ciblées en termes d'expertise et de formation. Ensuite, elle
encourage l'économie de proximité et les partenariats d'affaires,
les appuis aux financements des Petites et Moyennes Entreprises (PME) et de la
microfinance, des soutiens aux formations universitaires en économie et
gestion et des programmes de développement local mettant en avant
organisations non gouvernementales et associations francophones.
Ces différents programmes très modestes sont
insignifiants au regard de l'objectif affiché par l'OIF à savoir
créer un espace de solidarité. Cette situation justifie
l'interrogation sur l'efficacité des actions de l'OIF en ce domaine.
Dans l'ensemble, il faut noter que l'OIF constitue un ensemble
hétérogène et peu dynamique sur le plan
économique.
Hétérogène puisqu'elle rassemble cinq
pays parmi les plus riches du monde et vingt-quatre autres qui figurent dans la
catégorie des Pays les Moins Avancés (PMA). En plus, chaque
sommet témoigne des résistances des bailleurs de fonds et des
conceptions divergentes de ce que doit être le fonctionnement des
institutions francophones : divergences entre pays du Nord et du Sud mais aussi
entre pays du Nord notamment entre la France et le Canada...
Peu dynamique car sa croissance est faible. La majeure partie
de ses membres sont des pays en développement, producteurs de
matières premières et touchés par la dette. En outre, les
échanges commerciaux dans cet espace sont dominés par des flux
Nord-Nord qui fournissent 70% des échanges tandis que les flux Nord-Sud
ne représentent que 28% des échanges.
Toutes ces analyses nous permettent de mettre en exergue le
fait que les membres de l'OIF ont des intérêts économiques
et des objectifs trop dissemblables. En réalité, chaque Etat
102 Voir à ce sujet Kofi Annan, causes des conflits et
la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique,
rapport du Sécrétaire Général de l'ONU,
A/52/871-S/1998/318, paragraphe 7, New York, 13 avril 1998.
lxix
membre a ses propres intérêts et ses motivations
spécifiques en y adhérant. Les Etats espèrent trouver dans
cet ensemble géoculturel, les moyens d'assurer leur développement
économique. Leurs approches de l'OIF en cette matière et leurs
attentes sont toutes aussi différentes pour espérer qu'à
court terme la solidarité puisse se manifester.
De plus, les Etats les plus nantis font passer leurs
principales contributions et aides au développement par d'autres canaux
bilatéraux et multilatéraux. Sur cet aspect, il y a eu des
critiques aussi sur l'impact des plans mis en place par les institutions
internationales en faveur des pays en développement sur
l'économie notamment les Plans d'Ajustement Structurel (PAS)
imposés aux Etats à faible taux de croissance.
L'une des faiblesses de l'OIF est son incapacité
à organiser un espace économique véritable. Finalement,
l'OIF ne peut véritablement rien faire si ce n'est des interventions
limitées à la concertation, au conseil, à la
formation...
Les atermoiements observés dans la gestion du volet
économique ne rassurent pas les Etats quant à la prise en compte
du développement. Cette lacune se manifeste par le manque de symboles
forts ayant un impact économique suffisant. Le partage des valeurs de
liberté et de démocratie, face à cette faiblesse
économique, semble être pour la majorité des pays du Sud et
en particulier ceux d'Afrique noire en état d'indigence constante, un
objectif secondaire voire de dernier plan. La liberté prise dans ce
domaine comme celle d'entreprise, l'emporterait sur la vraie valeur qu'est la
démocratie. Elle impose en effet sa dure loi au Nord comme au Sud avec
des conséquences incalculables en termes d'accroissement de la
pauvreté, de la précarité et de la marginalisation de
couches importantes de la population d'où la déception des pays
du Sud.
Cette situation ne peut être comparée à
celle vécue par les Etats membres du Commonwealth, ce qui ne manque pas
d'attirer les Etats de l'espace francophone. Ces derniers commencent à
se désintéresser de l'OIF et de la langue française
pourtant considérée comme porteuse de valeurs fortes à
savoir le développement et la solidarité des membres à
travers des actions de coopération et d'aide. Le Commonwealth
présenterait donc à cet égard une réelle menace
à l'avenir de l'OIF.
B- La menace du Commonwealth
En adhérant à l'OIF, les Etats ont nourri
l'espoir de trouver en son sein un soutien pour assurer leur
développement. Pour cela, ils devraient compter sur l'OIF à
travers les divers partenariats qu'elle noue avec les différents acteurs
en développement notamment les
lxx
institutions financières et sur les grandes puissances
comme la France et le Canada-Québec également membres. En
échange, ceux-ci devraient servir la cause de la langue
française, porteur de valeurs. Cependant, plus de quatre
décennies après, leur situation n'a aucunement changé en
comparaison avec les Etats du Commonwealth à obédience
anglaise.
Le Commonwealth de son côté n'en finit de
séduire les pays africains. Le Burundi a fait le 04 octobre 2012 une
demande d'adhésion à l'association anglophone d'anciennes
colonies ou protectorats de l'Empire britannique. Il n'est pas le seul pays
à vouloir intégrer la grande famille anglophone. Le Rwanda, de
tradition francophone, a été admis comme 54e membre du
Commonwealth en novembre 2009103. Quelles en sont les causes ?
Certains analystes pensent que ces causes trouvent leurs
explications dans le déclin de la langue française. D'autres par
contre, lient ce manque d'attrait pour l'OIF à la colonisation et au
niveau de croissance économique au sein du Commonwealth. Enfin, il y a
ceux qui l'expliquent par le contexte politico-social en cours dans les pays
francophones d'Afrique. Cependant, dans le cadre de notre étude, les
situations économique et politique seront les aspects sur lesquels nous
insisterons.
Sur le plan de l'économie, il faut relever que le
Commonwealth est trois fois plus peuplé et apparemment plus riche avec
un produit national brut de 3 717 milliards de dollars en 2002 contre 2934
milliards du moins en apparence seulement car le revenu par habitant est plus
élevé chez les francophones (5150 dollars contre 2 000 chez les
anglophones). Cependant, il existe une différence en matière de
mobilisation des ressources car, 90 % de la richesse en terre francophone est
assurée par les pays développés alors qu'elle ne l'est
qu'à hauteur de 74 % dans le Commonwealth104. Ceci traduit le
degré de dépendance extérieure des Etats francophones par
rapport à leurs homologues d'obédience anglaise. L'OIF semble ne
plus être le meilleur cadre d'expression et de promotion du
développement de ses Etats membres et quand on sait que les Etats
n'intègrent les organisations internationales que s'ils y ont des
intérêts, la séduction du Commonwealth trouve ici tout son
sens.
Sur le plan politique, les Etats du Commonwealth connaissent
un niveau de stabilité très remarquable par rapport à ceux
de l'OIF qui par contre sont en retard. Les Etats du
103 La langue de Shakespeare attire de plus en plus les pays
d'Afrique francophone. Pour preuve, M. Ali Bongo, président du Gabon, un
des plus proches alliés de la France en Afrique, s'était
effectivement prononcé le 1er octobre 2012 pour l'introduction de
l'anglais dans son pays. Le Gabon envisage même d'introduire l'anglais
comme langue officielle, au même titre que le français.
104 Voir Francophonie-Commonwealth : duel au sommet, Samir
Gharbi, Jeune Afrique,
www.jeuneafrique.com,
23/11/2004.
lxxi
Commonwealth ont fait depuis leurs accessions à la
souveraineté internationale des progrès en matière de
démocratie en comparaison avec les pays de l'OIF. Le retard des Etats
francophones semble dans bien des esprits des populations voire des dirigeants
de l'espace francophone être lié au système de colonisation
français ainsi qu'au sentiment de néocolonialisme ressenti par la
présence française dans tous les grands dossiers brûlants
internationaux: allusion est faite à la Françafrique.
L'illustration de ce retard est donnée par le niveau de
développement spectaculaire du Ghana, pays anglophone entouré par
trois Etats francophones notamment le Togo, le Bénin et la
Côte-d'Ivoire. En effet, ce pays a aujourd'hui un niveau de
prospérité et une avancée en matière politique
libérale marquée depuis près d'une décennie d'une
alternance et surtout des élections jugées transparentes et
acceptées par tous les acteurs politiques.
Une des leçons qu'il convient de retenir de cet
exemple, est que développement et progrès démocratique
sont liés.
A la différence des Etats francophones, ceux du
Commonwealth du moins pour la plupart, ont su imbriquer le droit colonial avec
le droit traditionnel. La France contrairement au Royaume Uni, s'est certes
retirée officiellement mais elle continue par exercer son influence dans
les affaires intérieures de ses anciennes colonies.
De plus, le contexte politique de l'Afrique francophone en
général et de l'Afrique de l'ouest en particulier est
fréquemment agité par des crises et des conflits. En effet, de
nombreux pays connaissent une instabilité palpant en témoigne les
nombreuses missions de paix de l'ONU et l'UA en Afrique notamment avec la
MONUSCO en RDC, la MUNICI en Côte d'Ivoire, la MINUSMA au Mali...Ceci dit
la plupart des crises liées au déficit démocratique ont
lieu dans l'espace francophone. Dans ce vaste espace, l'Afrique de l'ouest fait
figure de mauvais élève puisque la plupart des changements
anticonstitutionnels y ont lieu. Les exemples du Niger, de la Guinée, de
la Mauritanie, du Mali, de la Côte d'Ivoire et aussi de la
Guinée-Bissau sont édifiants.
Face à ces multiples crises, l'OIF n'arrive pas
à trouver des solutions adéquates d'où l'attrait
réduit qu'elle présente.
Ainsi, dans la poursuite de ses objectifs, elle est
amenée à poser certaines actions et à adopter des
positions. Ces différents actes ne produisent malheureusement pas
l'effet escompté en raison des difficultés auxquelles
l'Organisation se trouve confrontée. Ces insuffisances qui sont autant
liées à l'organisation elle-même et aux Etats,
l'empêche de jouer véritablement son rôle notamment
l'accompagnement des Etats dans la promotion et l'enracinement de la
CHAPITRE II : UNE ADAPTATION NECESSAIRE DES ACTIONS DE
L'OIF
lxxii
démocratie. Pour cela et dans le souci de renforcer
l'efficacité des actions de l'OIF, un certain nombre d'adaptations
s'avère nécessaires.
lxxiii
Afin de mieux remplir ses missions, des solutions
adaptées se doivent d'être trouvées aux limites ci-dessus
relevées. A cet égard, on peut envisager des perspectives tant
à l'égard de l'organisation elle-même (Section I)
qu'à l'égard de ses actions (Section II).
Section I : Les perspectives organisationnelles
Les diverses propositions visant à renforcer la
capacité de l'OIF dans l'atteinte de ses objectifs, ne peuvent avoir un
impact réel que si elles prennent en compte l'amélioration de la
démarche francophone (Paragraphe I) et la révision du
système institutionnel (Paragraphe II).
Paragraphe I : L'amélioration de la démarche
de la francophonie
Améliorer la démarche de la francophonie revient
à établir une adéquation entre les objectifs et les moyens
dont dispose l'OIF. Il s'agira dans ce sens de redéfinir ses objectifs
(A) et ensuite de renforcer le système de prévention (B).
A- La redéfinition des objectifs de l'OIF
La nécessité de réagir contre
l'éparpillement des initiatives et de recentrer le champ d'action de
l'OIF est énoncée publiquement lors du sommet de Beyrouth en
octobre 2002.
Le Xe sommet de l'OIF tenu en novembre 2004
à Ouagadougou (Burkina Faso) a adopté un cadre stratégique
décennal des actions de l'OIF. Dans ce cadre stratégique, il y
est reconnu que « la Francophonie ne peut pas intervenir sur tous les
fronts. Elle doit impérativement faire des choix afin d'agir dans les
domaines où son expérience et son savoir faire ainsi que ses
capacités réelles peuvent faire la différence et apporter
des progrès décisifs grâce à une masse critique
suffisante » 105.
En effet, l'OIF embrasse à la fois plusieurs domaines
d'intervention. De l'éducation à l'économie en passant par
le politique, le social..., elle est présente sans véritablement
les mener à bien ou mieux obtenir des résultats probants. Le
problème c'est qu'il existe une inadéquation entre les objectifs
dont elle s'est assignés et les modestes moyens financiers dont elle
dispose. Il est donc impérieux de revoir les missions en fonction des
moyens dont elle dispose. Il ne sert à rien d'avoir des ambitions et des
programmes aussi nobles soient-ils si on ne peut les réaliser.
C'est pourquoi ayant pris conscience du danger que
représente une telle pratique, les Chefs d'Etat et de gouvernement
réunis à Ouagadougou ont retenu dans le cadre stratégique
sus
105 Voir le Cadre stratégique décennal, point
2.2.
lxxiv
évoqué à l'horizon 2014 les missions
prioritaires que doit s'attribuer l'OIF ainsi que les principes directeurs et
les modalités d'intervention qui s'imposent à la programmation,
désormais quadriennale des opérateurs.
Il s'agit en réalité suivant ce cadre, des
missions dans lesquelles « la Francophonie peut et doit jouer un
rôle majeur ». Selon ce cadre stratégique, l'accent devrait
être mis sur la promotion de la langue française et de la
diversité culturelle et linguistique, la promotion de la paix, de la
démocratie et des droits de l'homme, l'appui à
l'éducation, la formation, l'enseignement supérieur et la
recherche, le développement de la coopération au service du
développement durable et de la solidarité.
Cependant, neuf (9) ans après l'adoption de ce cadre et
à un an de son évaluation, on peut mesurer la portée des
actions de l'OIF au regard des principes directeurs et des objectifs retenus.
Globalement, le bilan est contrasté faisant une part belle aux
nombreuses lacunes relevées plus haut. L'OIF continue d'intervenir sur
tous les fronts. Il est donc clair que beaucoup reste encore à faire
d'où l'idée de revoir les domaines d'intervention et mettre
l'accent sur les plus prioritaires.
Améliorer la démarche francophone, revient non
seulement à redéfinir les objectifs mais aussi à revoir
les conditions d'adhésion à l'organisation et du coup à
trouver une solution au dilemme de l'élargissement sans fin de l'OIF.
Originellement, l'OIF est le regroupement des Etats ayant en
partage la langue française. Mais de plus en plus, on retrouve des Etats
dont la langue officielle n'est pas le français ou du moins où le
français n'a qu'une faible audience.
Nous pensons modestement que l'une des faiblesses de l'OIF est
son élargissement sans fin. En effet, il n'y a pas de sommets où
on n'enregistre pas de nouvelles candidatures notamment des Etats d'Europe
centrale, d'Asie, d'Afrique... Cette situation loin de créer une
harmonie véritable entre les membres et un atout pour l'OIF,
représente plutôt une faiblesse. L'identité de l'OIF semble
donc être menacée. C'est pourquoi l'OIF doit à l'instar de
l'Union européenne et bien d'autres organisations, faire face aux enjeux
de l'élargissement. L'OIF doit faire preuve de crédibilité
en refusant l'adhésion de certains Etats.
Certes le critère linguistique n'en est pas le seul
critère. Il y est également tenu compte entre autres de
l'évolution de la démocratie et de l'Etat de droit or ce n'est
pas souvent le cas. Un regard panoramique sur les dernières
adhésions montre qu'aucun des critères n'est pris en compte mais
ces adhésions se font désormais sur la base des
intérêts. L'illustration est donnée par l'entrée
controversée du Qatar le 13 octobre 2012.
lxxv
Cette entrée du Qatar a fait des polémiques. La
polémique portait principalement sur la légitimité du
Qatar qui n'est pas francophone à entrer dans l'OIF. Certains se sont
aussi inquiétés de l'ambition de ce pays de développer
davantage son influence en Afrique de l'ouest musulmane et notamment de sa
propension à financer des écoles religieuses prenant parfois la
place d'écoles en langue française. Et si cela s'avérait,
il faudrait craindre l'extrémisme religieux qui n'est pas de nature
à offrir un climat de paix et de stabilité contrairement aux
objectifs de l'OIF.
En somme, tous les Etats membres ne semblent pas s'accorder
sur les conditions d'adhésion certains préférant faire
passer leurs intérêts au détriment de ceux de
l'organisation. Tout ceci accroît la nécessité de
réviser ces conditions.
Au regard de ces analyses, l'OIF devrait revoir ces
conditions, veiller à ce qu'elles soient respectées et dans la
mesure du possible être renforcées. De plus, dans le souci de
prévenir les crises et les conflits, il serait opportun de parfaire le
système de prévention.
B- Le renforcement de l'action préventive
La prévention des crises et des conflits par l'OIF tire
son fondement des divers textes de référence à savoir la
Déclaration de Bamako, la Charte de l'OIF ainsi que de la
Déclaration de Saint-Boniface. C'est un terrain qui est en
réalité largement occupé par la multiplicité
d'acteurs tant à l'international qu'au plan régional et parmi
ceux-ci figure l'OIF.
Afin de contribuer à l'enracinement de la
démocratie, l'OIF devrait s'atteler à faire en sorte que les
conflits ne surgissent plus au sein de l'espace francophone en mettant
nettement opérationnel le système de veille et d'alerte
précoce.
La pratique quotidienne de l'alerte précoce n'est pas
toujours aisée. De plus, l'action préventive de l'OIF est
confrontée à un certain nombre de difficultés surtout
s'agissant de la prévention opérationnelle. Il existe dans ce
domaine un écart entre les ambitions affichées et les actions
entreprises aux fins de règlement des crises. Des difficultés
surgissent à toutes les étapes du processus. Elles sont relatives
à l'imprécision des paramètres de l'alerte, à la
difficulté d'identifier précisément les
éléments déclencheurs d'une crise ou encore au défi
d'obtenir une information fiable et de produire une analyse de
qualité.
Le système actuel semble ne pas être efficace
comme le témoigne la situation au Mali. En effet, l'OIF n'a pu jouer ce
rôle de prévention sinon la guerre au Mali n'aurait pas eu lieu
puisque qu'il y a eu des signes précurseurs notamment dus aux
velléités séparatrices de la rébellion
touarègue et à la circulation des armes vers le sud suite
à la crise libyenne.
lxxvi
Pour pallier ces difficultés, il s'avère
nécessaire de renforcer le système actuel d'alerte précoce
par la systématisation de la collecte de l'information et du processus
d'analyse. Revoir les modes et les moments d'intervention permettra
d'éviter que certaines situations de crises surviennent. C'est pourquoi
le Conseil permanent de l'OIF réuni au Québec en octobre 2008, a
réaffirmé à l'occasion de sa 72ème
session « toute l'importance qu'il attache à une réflexion
approfondie sur la problématique de l'alerte précoce
».106
Depuis mai 2010, il y a eu un panel qui a été
mis en place par M. Abdou Diouf. Ce panel avait pour mission de faire des
recommandations en vue de l'amélioration de l'action de
prévention francophone notamment le passage de l'alerte précoce
à la réaction rapide. Aux termes donc de ses travaux, il a
été suggéré de créer une boîte
à outils107.
Pour être efficace, l'action préventive
francophone doit se faire en temps réel et empreinte d'une
effectivité véritable. Aussi, faudra-t-il un renforcement de
capacités du personnel en charge de l'analyse des situations. De
même, il convient de revoir à la hausse ce nombre qui
jusqu'à présent se limite à seulement cinq (5)
responsables. Ils ne peuvent à eux seuls s'employer à suivre tous
les Etats membres répartis sur tous les continents. Il faut noter qu'ils
sont aussi chargés de l'observation des pratiques de la
démocratie. A cette fin, ils doivent produire des documents ou des notes
et faire des propositions à l'attention du Secrétaire
Général qui risquent de prendre du retard.
L'accent doit être mis sur la formation des divers
acteurs intervenant dans ce domaine notamment les
délégués. L'OIF doit également désormais
agir en complémentarité de l'action de ses partenaires
régionaux et internationaux. En outre, elle devrait s'attacher à
ce que le processus de collecte d'informations soit rendu plus
systématique. Elle devrait se concentrer sur ses Etats membres et
éviter par exemple d'intervenir hors de ses zones d'influence. L'OIF
doit aussi éviter de faire un choix quant à son intervention
auprès de certains de ses membres. Ceci dit, l'attention doit être
portée sur tous les Etats et surtout ceux dans lesquels la
communauté internationale n'est pas présente.
106 Francophonie : agir pour prévenir, rapport du panel
d'experts de haut niveau sur la problématique du passage de l'alerte
précoce à la réaction rapide, Délégation
à la paix, à la démocratie et aux droits de l'homme, OIF,
Paris, 3 septembre 2010, op.cit. p. 15 et s.
107 Ce sont des outils systématiques d'analyse et de
planification servant à répertorier tous les outils qui
pourront
appuyer le passage de l'alerte précoce à la
réaction rapide et guider ainsi son action et ses interventions en
matière de prévention des crises et des conflits...Elle doit
notamment contenir une typologie des mesures d'intervention disponibles; un
répertoire des médiateurs, experts et des autres ressources
francophones disponibles ; un répertoire des bonnes pratiques; une
grille de vérification et d'évaluation; et une carte des acteurs
et intervenants afin d'aider à déterminer qui pourrait avoir de
l'influence dans un cas donné.
lxxvii
Une autre attention devrait être portée sur la
coopération entre l'OIF et les autres organisations tant
régionales qu'internationales pratiquant l'alerte précoce. L'OIF
devra se doter à l'exemple de l'ONU, de capacités d'alerte
précoce et de prévention des crises en mettant à
contribution ses nombreuses agences et organisations. Par ailleurs, il serait
aussi utile de créer une Unité au sein de la DDHDP dont la
prévention constituerait une de ses missions centrales. Elle devrait
collaborer avec les autres acteurs notamment sous-régionaux comme la
CEDEAO à travers son réseau ECOWARN très actif dans le
domaine de l'alerte précoce et la Communauté Economique des Etats
d'Afrique Centrale (CEEAC) qui vient de se doter de telles capacités.
L'efficacité des actions de l'OIF dépend il est
vrai de l'amélioration de la démarche francophone mais celle-ci
ne constitue pas une condition suffisante. Il faut également renforcer
le rôle des institutions partenaires et les attributions du
Secrétaire Général. Tout ceci grâce à la
révision du système institutionnel.
Paragraphe II : Un système institutionnel à
revisiter
Dans l'accomplissement de ses missions, l'OIF noue des
partenariats avec diverses institutions dont le rôle très
apprécié reste à être renforcé (A). De plus,
il convient de revoir le statut du Secrétaire Général,
porte-parole de l'institution notamment en révisant ses attributions
(B).
A- Le renforcement du rôle des institutions
partenaires
Pour une organisation comme l'OIF, travailler en
complémentarité avec les autres acteurs est un choix
stratégique. Ainsi, dans l'accomplissement de ses missions, elle
s'appuie sur des partenaires notamment les réseaux institutionnels.
Ceux-ci couvrent divers secteurs. Du secteur de la justice
avec les barreaux et les cours constitutionnelles, de contrôle, de
médiation et de régulation, ils participent à la mise en
oeuvre des engagements souscrits dans les Déclarations de Bamako et de
Saint-Boniface. Cependant, l'établissement et le fonctionnement effectif
et efficient de ces institutions restent des soucis qu'il convient de
régler.
«La Francophonie se doit de continuer à
réfléchir sur le rôle collectif des réseaux, de
même que sur celui de chacun d'entre eux, afin, de ce fait, de mieux
arrimer l'Etat de droit dans l'espace francophone» tel était le
souhait de la DDHDP en 2004. Au regard de cet élément, il est
nécessaire de renforcer le rôle de ces institutions. Il s'agira de
renforcer les capacités de
lxxviii
celles-ci à travers des formations des personnels et la
dotation des moyens humains, matériels et financiers. A terme, ce
renforcement leur permettra de jouer pleinement le rôle qui est
dévolu à chacun. Une fois bien structurés, ces
réseaux couvriront mieux l'espace francophone de la démocratie et
des droits de l'homme.
En raison des enjeux et de la complexité des questions,
nous pensons qu'au-delà du fait que chaque réseau possède
son champ d'action propre, il faut une synergie entre eux. Cela participe de la
concertation et de la collaboration en vue de rendre plus efficaces les actions
menées par les différents partenaires.
La dotation des ressources doit être équitable.
Ceci dit, il n'est pas question de prioriser un secteur donc un réseau
au détriment d'un autre. Aussi, le recrutement de presque tout le
personnel devrait à tout moment sauf urgence faire l'objet de
publicité et être fait sur la base des critères objectifs
et ne pas s'apparenter à des recommandations.
Pour ce qui est de la promotion de la culture
démocratique, un constat s'impose : les instruments notamment les
engagements souscrits à Bamako et à Saint-Boniface restent en
dehors des instances de l'OIF, très largement inconnus des populations
des Etats membres. Pour cela, la création d'une unité
chargée uniquement de la diffusion de ces instruments et de la
sensibilisation des populations serait véritablement
bénéfique.
Insuffisamment représentatives, les institutions de
l'OIF ne présentent pas la cohérence juridique et formelle pour
réaliser les missions de l'organisation. Mais cette
institutionnalisation, globalement souhaitée par les « petits
» Etats pour équilibrer et encadrer davantage leurs relations avec
les « grands » à savoir la Belgique, le Canada et la France
n'aboutit pas en raison de l'inaction de ces derniers108.
Même si la Charte de 2005 a de façon sensible
simplifié et clarifié le mécanisme institutionnel, on note
toutefois la subsistance des ambiguïtés. Cette situation s'explique
notamment par le choix des Chefs d'Etat et de gouvernement de maintenir une
pluralité d'opérateurs et de séparer l'opérationnel
du politique. Il existe à cet égard une dyarchie entre le
Secrétariat Général et les acteurs de la
coopération que sont les opérateurs. Ces derniers ne
dépendent pas du Secrétaire Général et des
instances de l'OIF mais directement des Etats et des gouvernements.
L'amplification du poids de l'intergouvernemental ces
dernières années, contraste bien avec le souci réel du
renforcement des institutions de l'OIF. La cohérence institutionnelle
108 Cf. Francophonie et relations internationales, op.cit.
lxxix
supposerait que l'intergouvernemental cède la place
à l'organisation et que les opérateurs soient placés sous
l'autorité du Secrétaire Général dont la
révision du statut s'impose.
B- La révision de la situation statutaire du
Secrétaire Général
Le Secrétaire Général, depuis le sommet
de Hanoi (Vietnam) est considéré comme le concepteur et
l'exécutant de la Francophonie politique. Fort de cela, il intervient
à plusieurs niveaux. Cependant, sa voix ne semble plus être
entendue compte tenu des divers intérêts en jeu au sein de
l'espace francophone et qui relèguent en arrière plan les
recommandations prises.
Il urge donc que le statut du Secrétaire
Général ainsi que ses attributions soient revus. Dans ce sens,
celui-ci devrait disposer de plus de pouvoirs en matière de
prévention et de règlement des crises. Tout comme le panel, nous
estimons que l'OIF devrait à l'instar de l'Organisation des Nations
Unies, se doter d'une unité de médiation qui viendrait appuyer
les initiatives du Secrétaire Général en vue de
l'instauration d'une démocratie viable et véritable.
Cette démocratie suppose que soient résolus les
problèmes de droits humains, de l'alternance à tous les niveaux,
de ceux d'une jeunesse consciente des enjeux et qui s'implique. Elle
nécessite surtout une véritable reconversion des
mentalités au sein de la classe politique et donc un dépassement
de soi d'où l'importance de la médiation. Cela voudrait signifier
que le Secrétaire Général devrait avec l'appui du Conseil
Permanent de la Francophonie, choisir un
médiateur impartial accepté par tous les
protagonistes. Ainsi, deux protagonistes ne pouvant s'entendre, le mythe et
le charisme d'un médiateur averti peuvent forcer l'admiration et
préparer les protagonistes à faire contre mauvaise fortune bon
coeur. Il va dès lors de M. Kofi Annan, ancien Secrétaire
Général des Nations-unies qui est parvenu non sans mal à
convaincre les acteurs politiques kényans de la nécessité
d'oeuvrer de concert pour le mieux-être de la population.
Dans le même sens, les Etats devraient apporter leur
soutien aux actions de ce dernier. Il est certes le premier responsable et le
porte-parole de l'organisation mais il n'est pas le seul dépositaire des
mandats de Bamako et de Saint-Boniface ni le seul responsable de leur mise en
oeuvre, les Etats membres doivent y participer. Le Secrétaire
Général n'est en réalité que l'exécutant
naturel des décisions prises par ceux-ci regroupés au sein du
Conseil Permanent. En outre, il doit faire preuve d'une sagacité
intellectuelle dans ses choix et les scénarios de sortie de crises. Il
serait aussi intéressant de doter la mission de prévention et de
médiation de ressources financières dont le Secrétaire
Général pourrait disposer librement puis exiger de
La démocratie ne peut véritablement s'enraciner
que si les actes de l'OIF ont une portée juridique réelle (A) et
prennent en compte les réalités africaines (B).
lxxx
lui des comptes à la fin. Ce dernier peut inventer des
scénarios et avoir des ambitions aussi nobles mais s'il ne dispose d'un
minimum de moyens, il ne pourra rien faire.
Au lieu de toujours choisir l'envoi de
délégations, le Secrétaire Général devrait
privilégier la coopération avec les autres acteurs notamment
régionaux qui, à la différence de l'OIF, constituent des
institutions dont l'assise territoriale est bien définie et qui
maitrisent donc plus le terrain. Ici également, tout est question de
moyens.
Depuis Hanoi, la priorité est donnée à la
Francophonie politique au détriment de l'activité de
coopération qui est pourtant la vocation première de l'OIF. Dans
l'organigramme actuel de l'OIF, les diplomates sont en force. La
conférence ministérielle est composée des Ministres des
Affaires Etrangères alors que précédemment, la
conférence générale de l'ACCT comprenait les Ministres de
la Coopération et de la Culture. Les sujets politiques sont donc les
plus susceptibles de figurer à l'ordre du jour. En revanche, les
conférences ministérielles spécialisées à
l'exemple de celles de l'éducation, la jeunesse, l'économie, la
justice... passent au second plan.
Dès lors, étant donné que les
opérateurs interviennent tous dans le domaine culturel, la mise en
oeuvre du volet politique est confiée au Secrétaire
Général et sous son autorité, à la
Délégation à la Paix, à la Démocratie et aux
Droits de l'Homme (DDHDP). Ici encore, la dyarchie entre le Secrétaire
Général et les opérateurs risque d'être un obstacle
à l'efficacité si elle devait se confirmer avec
l'institutionnalisation en cours. Il est donc utile de veiller à ce que
cette concurrence en matière de prérogatives ne subsiste.
Il est tout particulièrement important que les actions
de l'OIF trouvent une adaptation aux fins de l'efficacité
souhaitée.
Section II : Les adaptations des actions de l'OIF
La réussite de l'instauration de la démocratie
considérée comme l'une des plus importantes missions de l'OIF,
passe obligatoirement par l'amélioration des actions dans ce domaine
(Paragraphe I). Il faut également que l'assistance dont
bénéficient les Etats membres soit améliorée
(Paragraphe II).
Paragraphe I : L'amélioration des actions instaurant
la démocratie
lxxxi
A- L'accroissement de la portée juridique des
actes de l'OIF
Le problème de la portée juridique des actions
de l'OIF résulte d'abord de l'inexistence d'un statut juridique qui le
fonde. En effet, l'OIF à la différence des autres organisations
n'est pas née d'un traité. Cette absence de fondements est tout
aussi déplorée dans le document « Francophonie et relations
internationales » précédemment mentionné en ces
termes : la Francophonie est encore « marquée par l'absence de
fondements juridiques et institutionnels à la hauteur d'une si grande
ambition ; que l'on songe à la lenteur du processus de son
institutionnalisation qui ne prendra son essor qu'après 1986, pour
être véritablement notable avec le Sommet de Cotonou en 1995 et
surtout celui de Hanoi en 1997 ».
Le seul texte qui encadre normativement l'OIF, c'est la
Convention de Niamey instituant l'ACCT le 20 mars 1970. L'examen de tous les
autres textes adoptés ensuite par l'OIF montre que ce ne sont que des
actes déclaratoires, c'est-à-dire non contraignants, y compris la
Charte de l'OIF. L'institutionnalisation progressive de l'OIF s'est donc faite
de manière très pragmatique et expérimentale. Le
résultat est assez ambigu puisque l'OIF n'est devenue juridiquement une
organisation intergouvernementale qu'en prenant la place de l'ACCT.
Cela correspond à la limitation des moyens
alloués à l'organisation et à celle de ses instruments.
Pour donner à cette entité largement informelle une existence
internationale pleine et entière, la proposition du groupe de
chercheurs, auteurs de la Francophonie et les relations internationales,
mérite bien d'attention. En effet, il faut un véritable
traité ratifié par les parlements des Etats membres et
définissant les droits et les devoirs de chaque signataire. La
ratification d'un tel traité par ces derniers, leur ferait prendre
conscience des engagements par eux souscrits lors de leur adhésion. Nous
pensons que l'effort d'institutionnalisation se doit de se poursuivre.
L'efficacité des actions de l'OIF ne peut être atteinte que
lorsque le rôle et l'autorité du Secrétaire
Général seront renforcés. Il y a lieu de tenir aussi
compte d'une meilleure définition du statut de l'organisation, de ses
instances et des mécanismes d'évaluation et de contrôle de
ses réalisations. En somme, une nouvelle convention qui fonderait
juridiquement l'OIF institutionnelle et préciserait les droits et
obligations de ses membres pourrait être salutaire.
C'est à ce prix que « la Francophonie pourra
dépasser son statut actuel de simple association pour constituer une
communauté au sens plein du terme : une « communauté de
cultures » qui serait pour chacun de ses membres complémentaire de
la « communauté politique » représentée par
l'ONU et de la « communauté régionale » plus ou moins
intégrée mais où
lxxxii
l'économie joue toujours un rôle important (Union
européenne, Union africaine, ASEAN, selon les pays)
».109
Une autre perspective à envisager dans le sens de
l'amélioration et la recherche de l'efficacité de l'organisation,
revient à revoir les prises de positions à travers les
décisions qu'elle prend. Il faut revoir sérieusement la position
de l'OIF et tout particulièrement de la France quant à la
sanction des violations des principes démocratiques notamment le
bafouement des droits de l'homme. Il serait aussi très
intéressant de rendre plus efficaces et effectives les sanctions
décidées à l'encontre des Etats qui violeraient les
engagements contenus dans les dispositifs de Bamako et de Saint-Boniface. Ceci
étant, il va falloir s'assurer du retour à l'ordre
constitutionnel ou du rétablissement de la situation antérieure
avant toute levée de sanctions ou de suspension. Souvent ce n'est pas le
cas. L'exemplification en a été donnée par le coup d'Etat
de 2007 en Mauritanie où moins d'un an après la levée des
sanctions imposées, un autre coup d'Etat a été
perpétré en 2008.
Il est tout à fait séduisant d'accroître
la portée juridique des actions de l'OIF en vue de rendre plus
effectives les décisions et sanctions qu'elle prend. Cependant, la prise
en compte des réalités africaines permettra mieux à
l'organisation de remplir convenablement les missions à elle
assignées par la Charte et les diverses Déclarations.
B- La prise en compte des réalités
africaines
Il n'est un secret pour personne que l'ensemble des Etats
africains sinon presque à l'exception du Botswana, regroupent une
multitude d'ethnies. Ce facteur est de nature à influencer
véritablement les processus de démocratisation en cours depuis
les années 1990. Cette hétérogénéité
ethnique est essentiellement liée aux conclusions issues de la
conférence sur le partage de l'Afrique tenue en 1855 à Berlin et
qui a vu des frontières créées ignorant du coup les
diversités existantes. De ce partage donc il ressort que certaines
ethnies se retrouvent en majorité alors que d'autres restent
minoritaires.
Même si de nos jours on est parvenu à
reconstruire les Etats, il semble évident que la majorité des
Etats sinon tous peine à bâtir une nation. La conséquence
qui en résulte est que l'intérêt national est bafoué
au détriment de ceux des clans et tribus.
Il faudra donc tenir compte de ce facteur et veiller à
ce que les droits des différentes minorités ethniques soient pris
en compte dans le forum de partage des richesses et du pouvoir tout en
109 Voir Francophonie et relations internationales, ibid.
110 Proposition de Kofi Annan : dans une liberté plus
grande : développement, sécurité et respect des droits de
l'homme pour tous, résumé du rapport du Secrétaire
général, New York, Nations Unies, 2005, page 12.
lxxxiii
condamnant et sanctionnant sans réserve la promotion
des politiques identitaires et l'exploitation à des fins malveillantes
du concept d'ethnicité avec ses lots de conséquences
désastreuses comme nous avons pu être témoins au Rwanda en
1994 avec le génocide entre tutsis et hutus et récemment en
Côte d'Ivoire. Il semble bien évident que la démocratie
tout en valorisant la loi de la majorité, promeut également le
respect des droits de la minorité.
Ainsi, nous pensons également que l'OIF dans sa
politique d'accompagnement des Etats, devrait proposer à ceux-ci
l'inscription dans leur ordre juridique du caractère pluriethnique des
gouvernements et des formations de partis politiques afin qu'on ne se retrouve
pas uniquement en présence des gouvernements ou des partis mono
ethniques.
Outre la valorisation de la pluralité ethnique dans le
sens du bien commun, un accent particulier devrait être mis sur la
promotion et le renforcement de la culture démocratique souvent absente
chez les populations. Cela pourrait réduire les risques de conflits.
L'OIF devrait donc se doter d'« un fonds pour la
démocratie destiné à aider les pays qui cherchent à
instaurer la démocratie ou à la renforcer » comme l'avait
proposé M. Kofi Annan s'agissant de l'ONU110.
La culture démocratique qui implique la participation
citoyenne à la gestion des affaires publiques et au pouvoir politique,
constitue à bien des égards une condition indispensable de
l'instauration de la démocratie et d'une paix durable.
De plus, au lieu d'attendre l'éclatement des conflits
et mobiliser des fonds mirobolants qu'on injecte dans les opérations de
maintien de la paix (OMP), l'OIF devrait s'atteler à aider ses Etats
membres notamment ceux de l'Afrique au sud du Sahara dans leur souci constant
de réduction de la faim et par delà de la pauvreté car il
est avéré que la majeure partie des crises et des conflits que
connaît l'Afrique est liée directement ou non à la
pauvreté.
Une fois la démocratie instaurée, il convient de
la consolider et cela au travers des actions qui vont de la
généralisation des conditionnalités démocratiques
à l'amélioration de l'observation internationale des
élections. Bref, c'est à toute l'assistance qu'il faut apporter
des aménagements.
Paragraphe II : Le perfectionnement de l'assistance
lxxxiv
En vue de la consolidation des processus de
démocratisation en Afrique de l'ouest, l'OIF se doit de
généraliser les conditionnalités démocratiques (A)
et d'apporter une réponse aux difficultés liées à
l'observation internationale des élections (B).
A- La généralisation des
conditionnalités démocratiques
L'affermissement de la démocratie dans le cadre
francophone induit une coopération de l'OIF avec divers partenaires dont
les institutions internationales à vocation économique.
L'allusion est principalement faite aux institutions de Bretton Woods.
Celles-ci, dans la mise en oeuvre de leur mandat en viennent à imposer
des conditions notamment le respect des principes démocratiques quand
bien même cela est défendu par leurs statuts.
Cependant, cette conditionnalité démocratique
semble souffrir d'un malaise profond. C'est en réalité la
partialité dont elle fait preuve dans l'application. Ces
conditionnalités ne s'appliquent aux Etats que sur la base d'une carte
sélective. Cette façon de faire a pour conséquence la non
adhésion des membres dans les valeurs promues par l'ensemble de la
communauté francophone. C'est pourquoi comme d'autres avant nous, nous
pensons qu'il faut généraliser ces conditions et les appliquer de
façon impersonnelle à tous sans distinction. A ce titre, il
importe que l'OIF soit plus attentive et regardante sur les sanctions qu'elle
impose suite à l'inobservation de ces conditions. Ceci dit, elle doit
veiller à ce que les Etats dans leurs relations bilatérales,
accordent aussi une importance capitale à ces conditions notamment en ce
qui concerne le respect des droits de l'homme. Nous pensons
particulièrement à la Chine et bien d'autres pays. On sait tous
que la Chine ne conditionne pas ses aides car n'étant elle-même
pas un modèle en la matière. De plus, les Etats sur le fondement
de leurs intérêts en viennent à ignorer les exigences
démocratiques défendus par eux-mêmes.
Ces pratiques quoiqu'on dise diminuent l'effet des sanctions
qui sont imposées raison pour laquelle l'organisation devrait exiger que
les Etats tiennent compte de ces conditionnalités pour un meilleur
ancrage de la démocratie en Afrique. Des sanctions pourraient aussi
être imposées à l'encontre des Etats qui ne respecteraient
pas les mesures décidées par l'organisation. Il serait certes
difficile d'exiger une telle mesure des Etats qui ne sont pas membres de l'OIF
mais cela peut être résolu sur la base d'une coopération
avec l'ONU au sein de laquelle presque tous les Etats sont
représentés ou sont membres.
Pour ce qui est des institutions financières
internationales, il s'avère nécessaire qu'il y ait une
adéquation entre leurs statuts et la pratique qui est faite. Cette
adéquation devrait être
lxxxv
marquée par l'introduction des considérations
politiques dans leurs statuts et l'affirmation de l'indissociabilité
entre développement, démocratie et droits de l'homme ; de cette
façon, la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire
International (FMI) pourraient dans leurs fonctions, les exiger au besoin de
tout Etat qui n'agirait pas sur des bases démocratiques sans distinction
faite en considération du poids économique et politique de
celui-ci.
Encore faudrait-il savoir si elles auront des coudées
franches s'agissant des grandes puissances pour le faire vu que leurs
principaux contributeurs sont la plupart du temps ces dernières. En tout
état de cause, il faudrait oser si véritablement on veut voir la
démocratie et le développement s'instaurer.
Pour espérer un succès des processus de
démocratisation, il ne s'agit pas seulement de généraliser
les conditionnalités démocratiques mais aussi et surtout de
chercher à parfaire l'implication souvent contestée de l'OIF
à travers l'observation internationale des élections en Afrique
subsaharienne.
B- L'amélioration de l'observation
internationale des élections
La réussite d'un véritable ancrage des principes
démocratiques et de l'Etat de droit résulte du succès des
processus électoraux notamment des pays qui connaissent ou ont connu des
situations conflictuelles. Dans ces processus électoraux, on peut noter
l'observation internationale des élections qui constitue un
élément essentiel à la crédibilité du
scrutin et à la légitimité des élus. Celle-ci
présente des avantages en matière de consolidation de la
démocratie si elle se passe dans de bonnes conditions et que les
recommandations font l'objet d'un suivi dans leur mise en oeuvre. Cependant,
cette observation connait des lacunes auxquelles il faut apporter des approches
de solutions.
En effet, si la démocratisation des Etats est un
thème majeur de l'agenda politique de la communauté
internationale111, l'efficacité des missions d'observation
internationales des élections doit être recherchée et
organisée. Or l'observation internationale des élections se
trouve décrédibilisée par un certain nombre de limites.
Ces limites, très préoccupantes doivent être
corrigées afin de rendre effective et réalisable, en partie,
l'instauration de la démocratie libérale. Il importe donc de
débattre des conditions juridiques et institutionnelles
111 Voir Bretton (Ph.), « La notion de grand
problème politique international contemporain », Mél. B.
Jeanneau, Les institutions contemporaines du droit public, Dalloz, 2002, (719
p.), p. 293-304 in Contribution à l'étude de l'observation
internationale des élections, K. Dodzi Kokoroko, Thèse de
doctorat en droit, 17 mars 2005, p.304.
lxxxvi
qui seraient susceptibles de faire de l'observation
internationale des élections un moyen légitime et efficace de
renforcement de l'Etat de droit et des droits fondamentaux.
Nous convenons que ces correctifs doivent prendre en compte
non seulement la nature juridique du mandat délivré aux
observateurs internationaux à travers une détermination
rigoureuse mais également tenir compte de l'adhésion ferme et
sincère de la classe politique de l'Etat hôte et des partenaires
internationaux à ces objectifs.
Il y a des controverses autour de la problématique de
la nature juridique de l'observation internationale des élections.
Fondamentalement, le problème avec les missions d'observation
résulte de la difficulté de la détermination exacte de
leur nature. Pour certains, le mandat confié aux missions d'observation
doit être restrictif alors que pour d'autres, il doit être
général (Executive or Non Executive Role)112. Mais
nous sommes convaincus que de sa détermination juridique,
dépendront la crédibilité et l'efficacité desdites
missions.
Consolider la démocratie, revient à envoyer des
observateurs impartiaux pour superviser les élections mais la
réussite de telles opérations reste largement tributaire de la
bonne volonté des Etats. Ceux-ci doivent cesser de voir en ces
opérations qu'ils ont d'ailleurs eux-mêmes sollicitées, une
atteinte à leur souveraineté. Les Etats à travers l'acte
de sollicitation de ces opérations émettent leur consentement.
Ils devraient alors faire preuve de volonté
réelle en honorant les divers engagements souscrits et tout comme les
modifications constitutionnelles et institutionnelles qui doivent être le
fruit d'un large consensus national du moins de la part de la classe politique,
l'observation internationale devrait être discutée et
partagée afin de réduire le risque de suspicion entre les
gouvernements et l'opposition. La bonne foi113 et partant le
consensus politique permettraient une observation électorale
parfaite.
112 Pour les tenants d'une conception restrictive, par leur
présence et les avis qu'ils vont donner, les observateurs internationaux
vont éclairer la communauté internationale sur la manière
dont s'est déroulée une élection. Cet avis n'aura pas de
valeur juridique en soi, mais il permettra de renforcer ou d'affaiblir la
légitimité des élus au regard de la société
internationale. Voir en ce sens, Abbink (J.), Hessling (G.), Election
Observation and Democratisation in Africa, p. 114-125. Alors que pour les
tenants de la conception extensive, la validité d'un scrutin dans
certains pays en transition démocratique serait liée à
l'avis donné par les organismes officiels représentant les
observateurs internationaux. Voir Johnson (R.-W.), Schlemmer (L.), Launching
Democracy in South Africa. The First Open Election. April 1994, New-Haven,
Y.U.P., 1996, (412 p.), p. 289-299.
113 Selon l'article 26 de la Convention de Vienne de 1969
« tout traité en vigueur lie les parties et doit être
exécuté par elles de bonne foi ». L'exécution de
bonne foi et le respect de la règle pacta sunt servanda sont ainsi
intimement liés pour constituer les deux aspects complémentaires
du même principe. L'exécution de bonne foi doit être
définie comme celle qui exclut toute tentative de « fraude à
la loi », toute ruse, et exige positivement fidélité et
loyauté aux engagements pris. Certes, toute définition serait
abstraite, elle doit donc
lxxxvii
En outre, l'observation internationale ne peut connaître
véritablement de réussite que si la communauté
internationale dans son ensemble adhère. La communauté
internationale se doit d'adhérer à un suivi rigoureux des
rapports d'observation et de renouveler son engagement en faveur du droit
à des élections libres et honnêtes.
L'OIF elle-même après avoir reconnu que le suivi
accordé aux rapports des missions d'observation internationales des
élections visant à instaurer un ordre démocratique
international est en deçà des espérances, a
souhaité revoir son dispositif d'observation internationale des
élections dans lequel il n'existe pas de lien codifié entre ce
qui a pu être constaté sur place et une réaction politique
de l'ensemble francophone 114. Dans cette optique, le voeu
imploré est que les Etats de tradition démocratique mais
également des OIG et ONG accordent une dimension politique plus
accentuée aux rapports d'observation des élections. Roland Adjovi
trouve cette option pertinente d'où ces propos : « si les
élections ont été supervisées par des observateurs
internationaux et que tous s'accordent à dire que le peuple s'est
réellement exprimé librement dans le sens des résultats
proclamés, l'Afrique ne peut que se soumettre à la volonté
populaire qui aura entériné le changement. Dans le cas contraire,
le régime reste[rait] anticonstitutionnel et donc soumis à la
clause de l'article 4 (p) 115 » 116.
La communauté internationale devrait en outre
réaffirmer son adhésion à l'organisation
d'élections libres, transparentes et honnêtes et prendre la mesure
de la chose. Aussi, elle doit éviter comme le dit R. Kolb d'être
claudicante : affirme mais ne se donne pas les moyens correspondant à
ses affirmations117. Ce constat se vérifie à travers
le suivi limité des rapports d'observation en dépit du fait
qu'ils contiennent des observations et des recommandations pertinentes. Cette
situation s'explique par le fait que la communauté internationale se
trouve dans un état de primitivisme. Il n'existe pas aujourd'hui de
législateur, ni de juge ni de
être éclairée par la pratique. acte
simplement inamical (CIJ, arrêt du 27 juin 1986, Activités
militaires au Nicaragua, Rec., 1986, p. 138).», K. Dodzi Kokoroko in
Contribution à l'étude de l'observation internationale des
élections, Thèse de doctorat en droit, ibid., 17 mars 2005,
p.318.
114 Dans ce sens voir Champin (Ch.), Perret (Th.),
«Élections en Afrique francophone : des progrès relatifs
», p. 190 ; Nzinzi (P.), « Stabilité politique et alternance
démocratique en Afrique », Colloque de Ouaga, p. 1-16 ; Combacau
(J.), « Le droit international, bric à brac ou système ?
», op.cit, p. 85-105 ; Synomidès (J.-I.), Human Rights :
International Protection, Monitoring,Enforcement, op.cit., p. 256-267
115 Voir « Article 4-p) condamnation et rejet des
changements anti-constitutionnels de gouvernement », O. de Schutteret
al..., Code de droit international des droits de l'homme, p. 737-747.
116 Consulter Adjovi (R.), « L'Union africaine :
Étude critique d'un projet ambitieux », p. 9 et s ; Kodzo Amenyo
(D), Tsagai (T.), « Essai de réflexion sur la génèse,
l'évolution et l'état actuel du droit des peuples à
disposer d'eux-mêmes et sa signification actuelle dans le contexte
africain », p. 49-63.
117 Kolb (R.), Réflexions de philosophie du droit
international. Problèmes fondamentaux du droit international public.
Théorie et philosophie du droit international, Bruxelles, Bruylant,
2003, (434 p.), p. 31 et s.
lxxxviii
gouvernement centralisé, ce qui explique que les normes
internationales s'appliquent de manière décentralisée,
plurielle et hétérogène.
Globalement, l'instauration et la consolidation de la
démocratie en Afrique noire et plus particulièrement dans la
partie ouest par l'OIF nécessite de revoir l'assistance notamment la
généralisation des conditionnalités ainsi que
l'amélioration de l'observation internationale des élections. Ce
n'est qu'à cette condition que ses actions connaitront une réelle
efficacité.
CONCLUSION
Les processus de démocratisation entamés depuis
le célèbre discours de la Baule, présentent d'une
manière générale en Afrique et surtout en Afrique de
l'ouest un bilan mitigé. Il y a eu certes des avancées notamment
au Cap-Vert, au Ghana qui aujourd'hui peuvent être
considérés comme des modèles de démocratie.
Cependant, il existe encore des insuffisances dues à plusieurs causes
dont la réticence voire la résistance de certains Etats face au
modèle démocratique. Cette situation s'explique aussi par le fait
que la communauté internationale, du moins certaines puissances, en
intervenant, visent leurs intérêts plutôt que ceux des Etats
dont la situation est décriée.
L'OIF pour sa part veut jouer un rôle déterminant
dans ces processus. L'espace francophone connait depuis quelques années
des crises, des instabilités politiques et un certain nombre de
régressions démocratiques qui ont conduit l'OIF à
fortement s'engager d'une manière plus pragmatique aux
côtés des organisations internationales existantes dans ce
domaine. Il en va ainsi de son engagement à la lutte contre l'injustice,
la protection des droits et libertés, la lutte contre l'impunité,
la promotion du développement durable, à aider à
l'instauration de la démocratie ainsi qu'à sa
consolidation...Tous ces engagements ressortent clairement de sa Charte
adoptée en 2005 à Antananarivo (Madagascar) puis des
Déclarations de Bamako (Mali) de novembre 2000 et de Saint-Boniface de
mai 2006, véritables textes de référence.
lxxxix
Sur ces fondements, elle a posé plusieurs actions qui
participent à l'instauration de la démocratie qu'elles ne la
consolident. L'OIF a notamment contribué à la mise en place et au
renforcement des capacités de nombreuses institutions à l'exemple
de plusieurs Commissions Nationales des Droits de l'Homme, de Commissions
Electorales Nationales Indépendantes dont le rôle est crucial dans
l'avènement d'une démocratie pluraliste.
Elle a également apporté son soutien aux Etats
qui connaissent des difficultés et des crises en les aidant à
mieux gérer leur transition politique. Ceci s'est
démontrée par ses appuis à la tenue de dialogues dans de
nombreux pays aux côtés desquels elle a participé aux
divers travaux des groupes de contact institués à cet effet. Ces
différents dialogues et accords ont pour la plupart
débouché sur l'organisation des élections pluralistes
où tous les acteurs politiques nationaux pourront être candidats.
Pour ce faire, l'OIF intervient en apportant son assistance multiforme.
L'implication de l'OIF dans les processus de
démocratisation de l'Afrique, loin de constituer son seul apanage, est
aussi l'oeuvre d'une multiplicité d'acteurs tant nationaux,
sous-régionaux, régionaux qu'internationaux. De plus, les
questions à résoudre sont très complexes. Ainsi, afin de
donner plus d'élan et d'efficacité à ses actions, l'OIF a
depuis quelques années initié d'entreprendre des partenariats
avec l'ensemble de ces acteurs. Cette vision a été marquée
par des accords de coopération signés notamment avec la Cour
Pénale Internationale (CPI), le Haut Commissariat des Nations Unies pour
les Droits de l'Homme (HCDH).... Nous ne pouvons ignorer l'important rôle
que jouent les réseaux institutionnels mis en place par l'OIF.
En outre, tirant les leçons des conséquences
tragiques des conflits et des crises graves affectant le développement
économique et social de certains Etats, l'OIF a développé
à l'instar d'autres organisations internationales des programmes visant
à prévenir les conflits et à renforcer le soutien aux
processus démocratiques.
Cependant, l'OIF dans la mise en oeuvre de ses engagements est
confrontée à de nombreux obstacles qui influencent voire
dénaturent son implication dans les processus de démocratisation
de l'Afrique particulièrement francophone. En effet, les
résistances à la fois du souverainisme et du modèle
anti-démocratique ont justifié la contestation des actions de
cette dernière. Ces difficultés sont aussi dues au statut fragile
du Secrétaire Général et aux imprécisions de ses
attributions. Elles sont également le fait d'une mauvaise politique de
l'organisation notamment pour ce qui est de l'éparpillement dans les
objectifs à atteindre alors qu'elle ne dispose pas d'assez de moyens sur
les plans humain et financier. A tout cela
118 Cf. Guilba Charles Joseph, Rôle de la Francophonie
dans la promotion de la paix en Afrique, Ecole Nationale d'Administration,
rapport de stage 2011,
www.mémoireonline.com,
consulté le 5 mars 2013.
xc
s'ajoute l'hypocrisie dont la communauté internationale
fait preuve en exigeant le respect de critères démocratiques au
demeurant volatiles et applicables aux Etats sur la base d'une carte
sélective.
Dans l'optique d'apporter des solutions en vue de parfaire les
actions de l'OIF, des efforts devraient être envisagés. Dans ce
sens, il convient donc de revoir la démarche francophone à
travers une redéfinition des objectifs où un accent particulier
devrait être mis sur les priorités au regard des capacités
d'intervention réelles de l'organisation ainsi que les conditions
d'adhésion au mépris des règles en la matière. Il
faudrait ensuite revoir la portée juridique des actions notamment en ce
qui concerne l'efficacité et l'effectivité des sanctions. Dans
cette optique, il urge de doter l'institution d'un véritable statut
juridique fondé sur un traité où les droits et obligations
des Etats membres seront clairement définis.
La prise en compte des identités africaines ainsi que
de l'aménagement nécessaire de l'assistance apportée aux
Etats contribueront à instaurer le respect des droits et des
libertés et partant de la démocratie pluraliste. Sur ce dernier
aspect, les conditionnalités démocratiques parfois
désastreuses devraient être généralisées. Ce
qui suppose une adhésion des institutions financières
internationales à ces conditionnalités et leur application
à tous les Etats sans considération de la puissance de l'Etat qui
viendrait à en violer le principe. L'observation internationale des
élections doit également être perfectionnée. Il faut
que les Etats respectent les engagements qu'ils ont souscrits et arrêtent
de voir à travers l'observation internationale des élections une
ingérence dans leurs affaires intérieures et donc une atteinte
à leur souveraineté. La communauté internationale devrait
en outre accorder plus d'attention à ces missions d'observation et faire
un suivi régulier ainsi que la vulgarisation des rapports et
recommandations issus de ces opérations.
Il est évident que si l'OIF veut véritablement
jouer un rôle sur la scène internationale largement occupée
par une multiplicité d'acteurs, elle se doit d'accroître la
visibilité et la lisibilité de ses actions, car beaucoup
d'africains voient dans cette organisation un « marché de dupes
», une certaine recolonisation des pays africains par la métropole
par le biais de la langue, un outil de négation ou un obstacle à
l'émergence des langues africaines118.
Elle doit affirmer son autonomie en se démarquant aussi
clairement que possible de la pseudo démocratie de certains Etats
africains et en dénonçant fortement les atteintes graves
portées aux droits de l'homme. Elle doit enfin se départir des
considérations idéologiques et
xci
politiques pour mieux assurer sa présence avant,
pendant et après les élections afin de pouvoir adopter une
position objective quant à la validité des élections en
Afrique et tout particulièrement en Afrique de l'ouest.
Ce n'est qu'à ce prix qu'elle pourra faire valoir ses
actions en matière démocratique et contribuer
véritablement à sa consolidation.
xcii
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xciv
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Délégation à la paix, aux droits de l'Homme et à la
démocratie, OIF, 142 p.
V- TEXES JURIDIQUES
Le Protocole de L'OUA relatif au mécanisme de
prévention, de gestion et de règlement des conflits, signé
à Lomé le 10 décembre 1999.
La Déclaration de Bamako relative au bilan des pratiques
de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace
francophone adoptée le 3 novembre 2000 à Bamako.
La Déclaration de Saint-Boniface portant prévention
des conflits et sécurité humaine adoptée à
Saint-Boniface le 14 mai 2006.
La Charte africaine de la démocratie et des
élections adoptée à Addis-Abeba (Ethiopie) le 30 janvier
2007.
La loi N° 2011-010 du 16/05/2011 fixant les conditions
d'exercice de la liberté de réunion et de manifestation
pacifiques publiques au Togo in Journal Officiel de la République
Togolaise (JORT) du 27 juin 2011. EDITOGO. Lomé. P. 21.
Protocole A/SP1/12/01 de la CEDEAO sur la Démocratie et la
Bonne Gouvernance additionnel au protocole relatif au mécanisme de
prévention, de gestion et de règlement des conflits, de maintien
de la paix et de la sécurité.
La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
adoptée le 10 décembre 1948 à New York, Secrétariat
des Nations Unies, New York, 16 p.
La Charte des Nations Unies signée le 26 juin 1945
à San Francisco (USA).
Le Recueil d'instruments internationaux, vol. 1 (première
partie), instruments universels, Secrétariat des Nations Unies, 1994,
New York, 428 p.
VII- Webographie
www.droits-fondamentaux.org
www.democratie.francophonie.org.
www.francophonie-durable.org
www.un.org
www.accpuf.org
www.fidh.org
95
TABLE DES MATIERES
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
DEDICACE
REMERCIEMENTS
AVERTISSEMENT
|
|
|
i
.iii
iv
..v
|
INTRODUCTION
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.1
|
PREMIERE PARTIE : UNE CONTRIBUTION SALUTAIRE
|
|
|
.7
|
CHAPITRE I: UNE CONTRIBUTION MULTIFORME A LA CULTURE
|
|
|
|
DEMOCRATIQUE
|
|
|
9
|
Section I: La promotion de la démocratie
|
|
|
..9
|
Paragraphe I : L'adoption d'un arsenal juridique
référentiel
|
|
|
9
|
A- La Charte de
l'OIF
|
9
|
|
|
B- Les Déclarations de
référence .11
|
|
|
|
|
Paragraphe II: La dénonciation des régimes
anti-démocratiques
|
|
|
13
|
A- Les condamnations
13
|
|
|
|
B- Les
sanctions
|
|
16
|
|
|
Section II : L'appui à la consolidation de la
démocratie
|
|
|
17
|
Paragraphe I : La prévention des situations
conflictuelles 18
A- L'observation des pratiques de la démocratie, des
droits de l'homme et des
libertés .18
B- Les mécanismes de prévention 20
Paragraphe II: L'accompagnement des processus de sortie de
crise ..22
A- La facilitation des
dialogues 22
DEUXIEME PARTIE : UNE CONTRIBUTION PERFECTIBLE 43
96
B- L'assistance
électorale 24 CHAPITRE II : LA CONSOLIDATION DE LA
DEMOCRATIE PAR LA
COOPERATION 26
Section I : Le partenariat avec les réseaux
institutionnels 26 Paragraphe I : Le renforcement des
capacités
nationales 26
A- La coopération par la
formation ..26
B- Le plaidoyer pour la ratification des instruments
pertinents 28
Paragraphe II: La coopération juridico-judiciaire
30
A- La coopération
juridique ......30
B- La coopération
judiciaire .....32
Section II : L'implication des acteurs
non-étatiques 34 Paragraphe I : L'implication des
organisations
internationales .34
A- Le rôle des organisations internationales à
vocation
politique 34
B- L'apport des organisations internationales à
vocation
économique 37
Paragraphe II: L'action de la société civile
.39
A- Au plan
international .......40
B- Au plan
national .......41
97
CHAPITRE I : LES LIMITES DES ACTIONS DE L'OIF 45
Section I : Les difficultés intrinsèques
à l'OIF .45 Paragraphe I : Une organisation
affaiblie 45
A- L'éparpillement dans les objectifs à
atteindre .45
B- L'insuffisance des ressources
financières 47
Paragraphe II: La relative efficacité des actions de
l'OIF
|
..48
|
A- L'inconstance des prises de position
|
48
|
B- Le statut fragile du Secrétaire Général
|
50
|
|
Section II : Les difficultés extrinsèques
|
51
|
Paragraphe I: La contestation de l'implication de l'OIF
|
52
|
A- La résistance du souverainisme
|
52
|
B- Le rejet du néocolonialisme
|
54
|
|
Paragraphe II: La perte de crédibilité de
l'OIF 55
A- Le dilemme du développement des pays du
sud .55
B- La menace du
Commonwealth 57
CHAPITRE II : UNE ADAPTATION NECESSAIRE DES ACTIONS DE L'OIF
..60
Section I : Les perspectives
organisationnelles .60
Paragraphe I : La nécessité
d'amélioration de la démarche de la francophonie 60
A- La redéfinition des
objectifs 60
B- Le renforcement de l'action
préventive 62
Paragraphe II: Un système institutionnel à
revisiter 64
A- Le renforcement du rôle des institutions
partenaires 64
B- La révision de la situation statutaire du
Secrétaire
Général 66
98
Section II : Les adaptations aux actions de
l'OIF 68
Paragraphe I : L'amélioration des actions
instaurant la démocratie 68
A- L'accroissement de la portée juridique des actes de
l'OIF ..68
B- La prise en compte des réalités
africaines 70
Paragraphe II: Le perfectionnement de l'assistance 71
A- La généralisation des
conditionnalités
démocratiques 71
B- L'amélioration de l'observation internationale des
élections ..73
CONCLUSION ...76
ANNEXE 79
BIBLIOGRAPHIE ..vi
99
|