8.3.1-
Violences psychologiques
Les violences psychologiques ont trait à tout acte
tendant à porter atteinte à la dignité de la personne
âgée et qui est susceptible de constituer une entrave à son
équilibre psycho-affectif. Ainsi, dans les paragraphes qui suivent nous
exposons les différentes tendances de violence psychologiques auxquelles
les enquêtés ont été confrontés. Il s'agit
des violences pour motif de sorcellerie et des restrictions de visite et
rétention d'information.
· Violences pour motif de sorcellerie
Nous avons enregistré quatre témoignages directs
de femmes âgées ayant en moyenne un âge de 76 ans et toutes
accusées de sorcellerie mais traitées différemment.
Une veuve de 87 ans sans enfant, membre de la classe
d'âge des Mbédié-kata, a passé quatre mois en prison
au motif qu'elle est sorcière. Généralement,
l'emprisonnement se fait en dehors de procès judiciaire. Les accusateurs
usent de leur influence auprès de la gendarmerie pour les maintenir dans
les geôles.
Une autre veuve de 78 ans, de la classe d'âge des
Mbédié-bago est accusée de sorcellerie. Trois de ses six
enfants sont décédés. Ainsi face à ses
calomniateurs, compte-elle les contredire par sa longévité et sa
décence de vie.
Une veuve de 75 ans, de la classe d'âge des
Mbédié-kata, mère de six enfants est accusée par
les enfants de son défunt frère (neveux), de sorcières.
Quotidiennement, elle dit être injuriée par ces derniers. Pour les
enfants, elle serait à l'origine de la mort de leur père. En
effet, les règles du matriarcat confèrent aux enfants de la
vieille dame le droit d'hériter des biens de l'oncle. Du coup, elle peut
en jouir du fait des rapports qui la lient à son fils. La vieille dame
aurait donc compromis leur avenir au profit de la réussite des siens.
En outre, une Mborman-kata de 67 ans, malade depuis 6 ans,
divorcée et mère de deux enfants est la risée de sa
famille et de ses enfants qui la traitent de sorcière. Elle aimerait
vivre dans un hospice. Elle nous a reçus en cachette hors du domicile
familial. Cette femme vit une situation particulièrement difficile du
fait d'un double acharnement. D'abord les persécutions de ses propres
enfants et celles de sa famille.
Nous constatons aussi dans les quatre cas que toutes les
femmes accusées sont veuves. Avec un tel statut, elles n'ont en principe
que deux potentiels soutiens. Le soutien des enfants et celui de la famille. Ce
sont d'ailleurs ces soutiens qui entretiennent avec elles des rapports
conflictuels. Après les violences pour cause de sorcellerie, nous avons
les restrictions de visite et rétention d'information.
· Restrictions de visite et rétentions
d'information
Les personnes âgées comme tous les hommes ont
droit à une vie normale. Elles doivent être tenues
informées de ce qui se passe dans le village ou dans la famille et
être libre d'entrer en relation avec qui elles veulent. Ces droits
à une vie normale, sous le prétexte des effets de l'âge
leur ont parfois été refusés.
Comme témoignage, nous avons celui d'une femme
âgée de 90 ans de la classe d'âge des Ndjurman-kata, veuve
et mère de deux enfants. Elle est de surcroît la doyenne de son
village. Elle ne se sent pas utile à la société parce que
sa famille pense qu'elle n'est pas cohérente dans ses propos. Pourtant,
durant l'administration du questionnaire, elle a répondu à toutes
les questions avec lucidité. En d'autres termes, elle ne se
reconnaît pas en état de démence sénile. Elle vit de
fait un enfermement, une privation de liberté contre laquelle sous le
couvert de la dépendance, elle ne peut lutter. Elle est contrainte de
coopérer pour garantir son pain quotidien et les éventuels soins
de santé.
Dans le même cas, nous avons une femme âgée
de 72 ans, divorcée et membre de la classe d'âge des
Mborman-odjogba qui dénonce l'attitude de rejet des personnes
âgées pour cause d'insalubrité et de mauvaise
hygiène. Selon elle, il y a des individus qui refusent l'usage commun de
certains objets avec les personnes âgées prétextant
qu'elles manquent de soin. C'est un comportement que les personnes
âgées trouvent vexatoire car les vomissements et les
défécations ne les ont pas détournées de leur
rôle de procréation.
Les violences psychologiques faites aux aînés
sociaux ont concerné les restrictions de visite et d'information et les
accusations de sorcellerie. Cependant, elles peuvent prendre la forme
d'atteinte à l'intégrité physique.
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