Dynamique des paysages végétaux autour d'une ville moyenne et sa périphérie. Cas de mMiganga (de 1987 à 2015)( Télécharger le fichier original )par Issouhou Mouhaman Université de Ngaoundéré - Master 2015 |
ConclusionD'une manière générale, la croissance démographique et les activités humaines telles que le déboisement, les mauvaises méthodes utilisées en agriculture et dans l'élevage, l'introduction d'espèces envahissantes, sont des facteurs qui concourent à l'évolution régressive des formations végétales à Meiganga ainsi qu'à sa périphérie. Ajoutés à ces éléments, les facteurs naturels comme le climat (la répartition des précipitations et la variation des températures), les vents violents couplés à l'action des rongeurs et le type de sol sont à l'origine de la configuration actuelle des paysages végétaux. Ainsi, la dynamique des paysages est un phénomène naturel qui se voit exacerbé par l'action humaine. Conscient des changements opérés dans l'environnement en subissant les revers de ceux-ci (mauvaises répartition des précipitations, raréfaction voire disparition de certaines espèces, fluctuation de la température ambiante, etc.), une prise de conscience des sociétés a conduit à la mise en place des lois et règles en faveur de la préservation des ressources disponibles d'une part et à l'augmentation des plantes via les actions de reboisement et la vulgarisation des concepts telle que « ville verte, espaces verts, etc. ». La mise en place du mécanisme REDD+47(*) dans la commune de Meiganga, ajouté aux efforts des services administratifs en place, sont autant d'éléments qui s'attèlent à assurer un avenir radieux pour l'environnement dans cette ville ainsi que dans sa périphérie. En effet, dans le but de contribuer à l'élaboration de la stratégie nationale REDD+, le PNDP a mis en oeuvre depuis 2014la composante REDD+ au niveau local, afin de ressortir cinq projets pilotes parmi les 10 communes sélectionnées. Parmi ces communes, Meiganga s'y trouve avec pour projet pilote « l'amélioration des pratiques agropastorales et forestières » (appel à manifestation d'intérêt pour la présélection des consultants pour accompagner les communes ou groupements de communes dans l'élaboration des documents descriptifs de projet (DDP) REDD+, 2015) Conclusion générale et perspectivesL'étude de la dynamique des paysages végétaux à la périphérie de la ville de Meiganga de 1987 à 2015s'est faite sur certaines bases. En effet, longtemps restée statique dans les faits (réalisations) sur les questions de développement, Meiganga a connu un changement important à partir du bitumage de la Nationale qui la traverse en 2012. Des flux importants ont émergé de cette ville et vice versa. Le foisonnement des activités dans et autour de la ville s'est accompagné d'un recul sans cesse progressif de la végétation à la périphérie de celle-ci. La recherche du bien-être est ainsi passée en avant, en délaissant le volet environnement. Tous ces éléments, en plus de l'insuffisance d'études réaliséesdans cette zone nous a poussée à nous attarder sur l'évolution de la végétation à la périphérie de cette ville et de s'interroger sur le niveau d'emprise que cette dernière pouvait avoir sur sa périphérie. D'où le choix de cinq villages situés dans un périmètre de 900 km² autour de la ville. En rapport avec sa démographie, l'étendue de son espace urbain et la qualité des infrastructures qu'elle abrite, la ville de Meiganga se positionne parmi les villes moyennes du pays. Elle a connu différents statuts en relation avec la vie politique de l'État. Son milieu physique est marqué par un réseau hydrographique dense, une biodiversité en régression (faune et flore) sous l'effet des activités humaines. Par ailleurs, son volet social est marqué par une économie basée sur l'agriculture, l'élevage, le commerce et le transport. L'analyse de la végétation révèle six formations notamment les forêts-galeries, les forêts claires, les savanes arborées, boisées, arbustives et herbeuses. La mise en place de 66 placettes et la réalisation de 08 transects dans les villages Bardé, Nganhi,Bounou, Meidougou et Dokolim, ont permis d'identifier 3705 ligneux appartenant à 104 espèces, regroupées au sein de 34 familles. Avec 506 occurrences soit 15,82% des relevés, Annonasenegalensisde la famille des Annonaceae est l'espèce dominante. Par ailleurs, les analyses montrent que la répartition des formations est fonction de certains paramètres dont l'un des plus importants est la topographie. L'analyse de la végétation urbaine a retenu notre attention et c'est à travers celle-ci qu'on remarque un fort intérêt de la population et des autorités pour préserver et multiplier lesarbres dans le centre urbain, utile pour leurs multiples rôles (embellissement, brise-vent, ombrage, pharmacopée traditionnelle, etc.). L'analyse diachronique effectuée sur les trois scènes retenues via la classification dirigée des images Landsat de 1987, 1999 et 2015, associées aux calculs de différences d'évolution et productions des cartes dans ce sens révèle une régression de la végétation au profit des champs, brulis, constructions et autres aménagements importants (routes, pipeline, etc.), un phénomène attribué de prime abord à la croissance démographique qui entraine une conquête des terres, généralement occupée par la végétation. Des différentes régressions observées, la plus importante est celle des forêts-galeries dont la superficie a fortement diminué, dans l'intervalle [1999-2015]. Le dépouillement des 90 questionnaires administrés dans les 5 villages enquêtés, couplées aux observations de terrain et entretiens menés avec le personnel des délégations consultées, a permis de ressortir les facteurs de la dynamique des paysages végétauxainsi que les différents acteurs. La croissance démographique impulsée par le bitumage d'une portion de la Nationale N°148(*) et l'arrivée des réfugiés centrafricains, a indubitablement augmenté les surfaces cultivées, le nombre de vendeurs de bois, qui au départ pratiquaient le ramassage du bois mort en conformité avec la loi, se livrent à l'abattage des arbres (dont les plus exploitées sont Terminalia sp et Lophira lanceolata), à cause de la rareté et des longues distances à parcourir pour en trouver. Les mauvaises méthodes dans la culture et l'élevage se traduisent par le surpâturage et la non-maitrise des feux de brousse qui engendrent la régression des savanes arbustives et arborées au profit des savanes herbeuses.En outre, le passage du pipeline a engendré d'énormes pertes pour la végétation lors de sa phase d'exécution. De même, l'apport du bois dans les écoles en campagne, certes négligeable contribue à dégrader la végétation, surtout lorsque cette pratique devient une obligation pour les élèves. Les actions concertées des autorités et la population pour le reboisement, les actions répressives face aux contrevenants sont des actions qui freinent cette dégradation. Toutes fois, l'ignorance des textes en matière de protection de la biodiversité est une réalité chez la plupart des populations en milieu rural. Il convient de fournir davantage d'efforts dans la sensibilisation et dans la mesure du possible, mettre en place des points focaux affectés à des secteurs spécifiques avec pour « leitmotiv » la protection de l'environnement, un modèle des services de santé publique qui peut être appliqué à ce secteur primordial pour l'intérêt de tous. Le reboisement est certes un excellent procédé pour combler les coupes abusives des arbres. Cependant il est prouvé qu'à peine la moitié des plants arrive à grandir à cause du faible suivi et de la négligence des populations, qui souvent ne sont pas conviées à ces actions. D'où la nécessité d'intégrer les populations dans le reboisement, afin qu'ils soient des protecteurs des plants, et non leurs bourreaux. Des échanges menés avec le personnel de la délégation de l'environnement et la protection de la nature, les plantes octroyées aux établissements lors de la journée mondiale de l'environnement, destinées à reboiser l'établissement sont plantées à une mauvaise période (en juin). Un mois après la mise en terre de celles-ci, les élèves sont en vacances et les plantes abandonnées à elles même, vandalisées et à la merci des bêtes en divagation. Il convient donc soit de recruter un agent chargé de veiller sur ces plantes, soit changer la date de remise des plantes pour la reporter au mois de septembre, à la rentrée scolaire. En fin de compte, l'utilisation de l'imagerie satellite est un excellent moyen pour suivre l'évolution des paysages végétaux autour des agglomérations. Avec l'avènement des grands projets structuraux et le développement des villes sous l'impulsion de la croissance démographique,mener une telle à l'échelle régionale en utilisant la modélisation est une piste de recherche qu'il convient d'explorer. Par ailleurs, le travail, bien qu'arriver à son terme contient des limites qu'il convient de relever. L'usage des images satellites pour analyser l'évolution de la végétation via la production et la comparaison des cartes d'occupation des sols réalisées pour chaque pas de temps choisi est un excellent procédé qu'il convient d'effectuer pour les villes afin de contrôler le comportement de la biodiversité qui les entoure et de prendre des décisions qui s'imposent. Cependant, les confusions entre les classes qui entrainent la fusion de certaines entrainent une perte d'informations qui auraient pu être capitalisées. Les résultats obtenus confirment nos hypothèses de départ. Ils traduisent une évolution régressive du couvert végétal dans l'ensemble sur les pas de temps 1999 et 2015. Ce résultat est, d'une part, pareil que celui de certains auteurs (Rahim, op cit.), d'autre part, divergent (Abdelgader, op cit ;) où l'on note des phases de régression et extension, influencées par la dimension des reboisements qui sont effectués. Sur cette même base, d'autres analyses révèlent une évolution positive de la végétation (Wafo T.,et Fotsing J.M, op cit). L'échantillon retenu constitué de 90 individus, et focalisé sur les activités en relation directe avec la végétation présente des résultats qui s'il était étendu à un nombre de personnes plus important, pourraient être différents. Ce constat concerne aussi le nombre de villages choisis. La méthode statistique utilisée pour déterminer la population de la ville et des villages (projection des données du recensement de 2005) présente des limites. En effet, elle ne donne que des informations indicatives et selon les situations, ces informations peuvent être très différentes de la réalité. Après analyse des résultats de terrains, la population est l'une des premières causes de dégradation des paysages végétaux, cependant, avec l'accélération de la croissance de la ville, suite aux projets d'envergures (pipeline, bitumage de la route), on en déduit que c'est l'association de ces éléments qui a un impact significatif. * 47 REDD est une initiative internationale et transnationale lancée en 2008. Elle vise à lutter contre le réchauffement climatique provoqué par les émissions de gaz à effet de serre. Elle est coordonnée par l'ONU qui a mis en place le programme UN-REDD (en). Elle s'appuie sur des incitations financières et est indirectement liée au marché du carbone. REDD est l'acronyme anglais pour Reducing emissions from deforestation and forest degradation, « Réduire les émissions de C0² provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts ») * 48 Selon le nouveau catalogue des routes du Cameroun, le bitumage comprend trois sections : Garoua Boulaï-Meiganga long de 106,83 km avec pour code CAMN000108, le second, Meiganga-Babongo long de 39,16 km nom de code CAMN000109 et Babongo-Ngaoundéré d'une longueur de 117,78 km code CAMN000110. |
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