0. INTRODUCTION
0.1.Etat de la question
La sécurité alimentaire passe par le
développement de l'agriculture, qui reste un atout majeur pour
l'amélioration des conditions de vie des populations et contribue
à la croissance économique du pays ; lequel développement
impose à son tour, la mise en place des programmes de production
(Ministère de l'agriculture et du développement rural, 2006).
L'Afrique est un continent qui dispose d'énormes
potentialités. Les difficultés auxquelles elle se heurte,
tiennent en partie à son retard dans le développement et dans
l'utilisation des nouvelles technologies. Les agronomes estiment par exemple
que les rendements agricoles pourraient encore augmenter de 20 à 25%
sans un accroissement notable de l'utilisation des intrants (Fida cité
par Souleymane Ouédraogo, 1957).
Le succès de l'agriculture africaine va donc
dépendre fortement des initiatives de changement à apporter dans
la structure des systèmes de production. Les agriculteurs doivent saisir
les opportunités de commercialisation offertes par l'urbanisation
accélérée des villes pour passer d'une agriculture de
subsistance à celle orientée vers le marché. Ils doivent
pour ce faire, prendre l'initiative de l'intensification et de la
diversification des systèmes de production. Les nouvelles technologies
agricoles peuvent les aider à saisir ces opportunités. Les
pouvoirs publics, quant à eux, doivent créer un environnement
favorable et incitatif pour faciliter la commercialisation des produits
agricoles. Ceci montre que le progrès de l'agriculture demeure encore la
clé du développement économique de l'Afrique ; d'où
la nécessité de redynamiser le secteur agricole pour
accroître la productivité. Celle-ci ne sera possible qu'à
travers une intensification des systèmes de production.
L'intensification des systèmes de production permettrait non seulement
d'augmenter la production vivrière pour satisfaire les besoins d'une
population croissante mais également, les productions commerciales afin
de générer des devises pour rembourser la dette et assurer les
besoins d'importation. C'est le seul moyen de sortir les pays africains du
bourbier de la dette et de l'insécurité alimentaire (Souleymane
Ouédraogo).
L'auteur expose les différents problèmes de
politique agricole qui limitent l'efficacité du fonctionnement des
marchés. On peut en énumérer sept problèmes
importants : les difficultés d'accès au marché, la
rigidité de l'offre agricole, l'instabilité des prix agricoles,
la formation des prix est souvent inéquitable, la tromperie sur la
qualité est fréquente, il est difficile d'accroître la
productivité, il est encore plus difficile d'améliorer la
qualité. Le même auteur soutient que dans tous les cas, les
produits africains doivent être plus compétitifs en
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termes de prix et de qualité et par conséquent
la solution à tous ces problèmes suppose qu'existent des formes
satisfaisantes d'organisation des transactions et cela peut se réaliser
par des stratégies ne résultant que d'accords privés ou
bien des décisions publiques (Michel Griffon, 2001).
Souleymane Ouedraogo donne l'exemple du Burkina Faso en
indiquant que la production agricole est encore tributaire de la
pluviométrie. C'est ainsi que des années de déficit
alimentaire alternent avec celles des excédents en fonction des
aléas climatiques. D'une manière générale, le pays
est de temps en temps déficitaire depuis la grande sécheresse de
l'année 1973. Les populations sont soumises à des famines
saisonnières. Régulièrement, 500 à 600 mille
personnes sont menacées par la famine entre 1995 et 1997. Ce chiffre est
passé à 800 mille pour l'année 1998. Les systèmes
de production de cette partie du pays n'arrivent plus à couvrir les
besoins alimentaires de ceux qui y vivent et ce sont les productions d'autres
régions (Ouest, Est) et les importations qui permettent de combler le
déficit. La modélisation comme approche et la programmation
linéaire comme outil d'analyse lui a permis de palier à ces
problèmes (Souleymane Ouedraogo, 1957).
C'est à ce juste titre que la Fao énonce les
causes de la baisse des exploitations agricoles dans les pays en voie de
développement (PVD). Il s'agit entre autres de la situation
économique et sociale faible, de l'analphabétisme,... Ce qui
entraîne comme conséquence la réduction des revenus
procurés par le secteur agricole.
Comme solution, l'étude propose la reforme agraire, la
vulgarisation agricole, le système de coopérative, etc. (Fao,
1964).
C'est ce qui est à l'origine d'un exode rural massif
dont l'ampleur n'est pas encore mise en évidence ; c'est
l'insécurité qu'y font régner les milices locales et les
bandes armées étrangères. La solution légale qui
met en rapport la paysannerie avec l'administration foncière, est
jusqu'à ce jour ineffective et inefficace. Pour accéder à
la terre et/ou sécuriser leurs possessions, les paysans opèrent
selon le droit coutumier local et s'adressent comme autrefois aux
autorités coutumières. Celles-ci se considèrent comme
revêtues de compétences en matière foncière alors
que la loi les a exclues des rangs des autorités foncières. Elles
sont ainsi continuellement aux prises avec l'administration foncière qui
leur conteste toute compétence en ce domaine. La vénalité
des chefs coutumiers les conduit assez souvent à des spoliations
paysannes au profit des bourgeoisies urbaines qui entretiennent des rapports de
complicité avec ces autorités. Ces bourgeoisies sont par ailleurs
les seules à pouvoir mobiliser le droit positif et à diligenter
l'enregistrement des terres à travers les méandres de
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l'administration. Pour apporter la preuve de la mise en valeur
des concessions acquises, ces bourgeoisies urbaines proposent des contrats
précaires aux paysans dont les terres ne suffisent plus à la
subsistance des familles. En contrepartie, les paysans fournissent, selon le
cas, des prestations en travail non rémunérées ou payent
des redevances en nature ou en argent. (Severin Mugangu Matabaro, 2008).
Face à ces corollaires de la crise foncière,
Severin Mugangu Matabaro avance des arguments pour une réforme de la
législation et une décentralisation de la gestion
foncière.
L'homme demeure le principal moteur du progrès social.
On sait que la RDC regorge d'hommes formés mais inutilisés et
souvent inutilisables parce qu'aigris, découragés et
diminués notamment par la faim.
Le problème de désertification et de famine
périodique auquel est confronté le peuple du Bushi au Sud-Kivu
date depuis 1948. Or, comme d'aucuns le savent, une bonne santé
entraîne un meilleur rendement des masses laborieuses. Le
développement de l'agriculture améliore la nutrition et partant
la santé. L'éducation contribue aux efforts d'augmentation de la
qualité de la vie grâce à l'éducation sanitaire.
La déficience de protéines et de certains
minéraux est une des formes les plus graves et
généralisées de faim spécifique ou de carence. La
faim spécifique des vitamines A, B, B2, D entraîne des
manifestations macabres, selon De Castro cité par c.b. Kinghombe wa
Kinghombe(2003).
La faim chronique ou la déficience alimentaire a une
action plus prolongée et plus persistante. Elle tend à provoquer
la dépression et l'apathie. La faim chronique des protéines et
celle des vitamines provoque une inappétence habituelle, une perte
d'intérêt pour les aliments, ajoute le même auteur.
L'accroissement de la surexploitation du travail et ses effets
sur la campagne font que les possibilités de stockage diminuent. Les
communautés domestiques dépendent de plus en plus des revenus
monétaires. Dans les campagnes, les populations vivent en partie de leur
production grâce à une agriculture vivrière
dégradée. Ils dépendent cependant des importations pour
combler les déficits. En ville, l'accès aux denrées
alimentaires dépend des possibilités d'emploi qui sont
précaires. La dégradation de l'économie atteint la phase
de dépendance presque complète du prolétariat d'Afrique au
capital et à la production agricole des Etats-Unis en particulier.
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En cas de catastrophe naturelle, poursuit-il, les grandes
famines apparaissent comme un moyen de régulation de la population
provoquée par le grand capital international. Avec l'utilisation de la
technologie de très haute productivité, le prolétariat
créé par le capital international, ne convient plus. Ainsi, des
millions d'individus sont condamnés à la misère
physiologique et à la mort. La misère, la maladie ou la mort
passent inaperçues et apparaissent comme des effets de crises ou
fléaux naturels.
Selon Mandel E. (cité par c.b. Kinghombe wa Kinghombe,
2003), « la moitié de l'humanité est affamée non
parce que les produits alimentaires manquent "mais parce que la demande
solvable ne peut pas suivre la demande physique".
Berenbourg L., se demande pourquoi le Congo/Zaïre est un
pays riche et sa population vit mal. L'auteur note que le budget 1958 de la
colonie Belge prévoyait 24 millions de dollars pour la protection de la
santé publique, 47 millions pour l'entretien de l'administration, de la
police et de l'armée. Par contre, les trusts touchent 260 millions de
dollars par an. Selon l'auteur, en réservant au Congo-Belge la
moitié du bénéfice des trusts, on peut disposer de 130
millions de dollars et changer le niveau de vie des populations. La famine
serait vaincue en affectant environ 250 dollars par tête d'habitants au
lieu d'enrichir les trusts (c.b. Kinghombe wa kinghombe, 2003).
Quant à Ernest Kuyengila et Frans van Hoof(2010), les
principaux défis de la population paysanne sont liés au fait que
la RDC est un «Etat fragile»: le manque de marché
rémunérateur pour les produits agricoles suite à
l'inaccessibilité des zones de production, les tracasseries sur la route
par des militaires et agents de l'Etat, et l'inondation du marché par
des produits alimentaires importés à vil prix. S'y ajoute
l'absence de moyens de production : accès difficile à la terre
(particulièrement à l'Est), manque de semences
sélectionnées et autres intrants, manque de financement agricole,
qui fait que la quantité produite reste faible. Et en aval, l'absence
d'infrastructures de base pour stocker et transformer la production
empêchant la création d'une valeur ajoutée, maintenant les
paysans dans une grande pauvreté et sans perspectives
d'amélioration.
C'est ainsi que les auteurs suggèrent le renforcement
des capacités des organisations paysannes par un appui institutionnel au
même titre que les ministères partenaires, et de manière
générale de créer une plus grande professionnalisation et
spécialisation au niveau des différents acteurs du secteur
agricole et d'intégrer le secteur privé dans les
différents plans.
Selon Destin Ajabu Bihimana(2004), dans son mémoire,
les exploitants agricoles ne sont pas encore outillés des techniques
appropriées, des formes d'utilisation des terres
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susceptibles de valoriser les ressources locales de
façon à résoudre adéquatement le problème de
déficit alimentaire. L'agriculture telle que pratiquée depuis
longtemps par les paysans, a entrainé l'épuisement de ressources
locales dont dépend la production agricole. Le sous équipement
technique et l'insuffisance d'intrants agricoles due notamment à
l'insuffisance des capitaux ne permettent pas aux paysans de vaquer normalement
aux activités agricoles.
En outre, les conditions inadéquates de
conditionnement, d'écoulement, de transformation et de commercialisation
des produits agricoles à la suite de mauvais état de route de
desserte agricole, voire de leur absence et par manque d'unités de
transformation de ces produits agricoles, sont souvent responsables de pertes
importantes.
Eu égard à toutes ces insuffisances, l'auteur a
proposé une politique agricole intégrée reflétant
sous une forme condensée, les stratégies visant à
promouvoir le secteur agricole afin d'assurer la sécurité
alimentaire.
C'est dans ce même cadre que Juvenal Zirimwabagabo
Bahizire(2004) constate que la pauvreté s'installe comme un engrainage
et affecte tous les éléments de la vie. Il s'avère que les
efforts sont réalisés par les différents acteurs de
développement pour combattre cette pauvreté. Même les
hommes fournissent d'efforts à travers différentes actions mais
les revenus restent toujours médiocres. L'auteur se pose quelques
questions qu'il considère comme perpétuelles : comment tant de
pauvres dans un milieu où beaucoup d'actions sont
déployées ? Y a-t-il eu gaspillage des ressources et du temps ?
Quels facteurs sont à la base de la faiblesse des revenus ? C'est ainsi
que cet auteur constate après sa réflexion que la
sécurité alimentaire, la structuration des artisanats, l'appui
à la promotion féminine représentent une ultime
réponse à la question de pauvreté. Il conclut en disant
que cela nécessite l'innervation des acteurs de développement.
Quant à Benjamin Wimba Michumbi(1999), il énonce
dans son mémoire que la mauvaise politique de gestion de la culture du
haricot fait chuter des productions à part les perturbations
éco-climatiques observées depuis un certain temps dans les deux
territoires de Walungu et Kabare. La mauvaise pratique culturale par les
paysans producteurs est à la base de la baisse de production du haricot
volubile chez les paysans. Il faut signaler également la non mise en
pratique des conseils donnés par les chercheurs, le manque de suivi
auprès des paysans producteurs, la paresse à outrance qui
caractérisent certains villages. Ce qui est à la base d'une
dépendance totale des fermiers vis-à-vis de la station de
recherche.
L'auteur suggère quelques traits importants pour une
bonne mise en place de la politique de développement agricole en vue de
bien mener à bon port la recherche et le
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développement comme étant un soutien à la
masse productive, surtout dans le cas du haricot du type volubile.
Comme on peut le remarquer, ces différents auteurs ont
fourni des efforts considérables pour montrer les situations
économiques et sociale faibles des ménages agricoles dans le
territoire de Kabare. Certains auteurs se limitent simplement à
l'observation du problème lié à des crises agricoles sans
pour autant chercher les causes et d'autres comme Ernest Kuyengila et Frans Van
Hoof cherchent à identifier les principaux défis. Il s'agit entre
autres du manque de marché rémunérateur pour les produits
agricoles suite à l'inaccessibilité des zones de production, les
tracasseries sur la route par des militaires et agents de l'Etat, et
l'inondation du marché par des produits alimentaires importés
à vil prix. S'y ajoute l'absence de moyens de production : accès
difficile à la terre (particulièrement à l'Est), manque de
semences sélectionnées et autres intrants, manque de financement
agricole, qui fait que la quantité produite reste faible.
Toutefois, ces auteurs ne s'accordent pas quant aux
stratégies pour assurer la promotion et l'émergence des
ménages agricoles.
Apres l'analyse des différentes oeuvres de nos
prédécesseurs, nous avons focalisé notre travail à
l'étude comparative des stratégies d'adaptation des
ménages agricoles face à la crise agricole dans le Kivu
montagneux et particulièrement dans le territoire de Kabare. Cette
étude présentera les indicateurs de la crise agricole, dont
certains des auteurs ci-haut cités ont évoqué notamment
l'insécurité alimentaire, la diminution de la production agricole
sur le marché, la baisse du revenu agricole, la dépendance
alimentaire ainsi que le faible accès aux services sociaux de base suite
au faible revenu et les conséquences étant entre autres la
malnutrition et la maladie liée à l'alimentation (kwashiorkor,
marasme et les troubles gastro-intestinaux). La présente étude
relève les faiblesses de certaines stratégies
développées par les ménages agricoles pour
l'amélioration des conditions de vie socio-économiques de la
population de Kabare dans le groupement de Mudusa, Cirunga et Miti.
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