1.3 Contexte et justification du choix de
thème
Dans le cadre du partenariat qui existe entre la
coopération technique Belge à travers le programme GRAAP 3A et le
Département de Géographie de l'UAM de Niamey, une bourse de six,
(6) mois a été attribuée à dix (10)
étudiants en master 2, pour conduire des recherches sur plusieurs
thématiques dans les régions de Dosso, Maradi et Tahoua dont le
département de Dakoro est l'un des sites choisi pour abriter les
investigations sur les facteurs de vulnérabilités des
systèmes d'élevage et ménages pastoraux.
Les raisons du choix de ce sujet se résument à deux
niveaux:
Le premier est purement scientifique. En effet, de nombreux
travaux (Abdoulaye (2004), Sitou (2011), Sidikou (1994), Kandine (2006)) ont
été faits au Niger sur le
9
foncier en zone agricole. Mais il n'existe pas assez
d'études sur le foncier pastoral en lien avec la
vulnérabilité autour de la vallée de la Tarka. Il s'agit
de contribuer au processus de réflexion sur la question foncière
qui est au coeur de toutes les actualités tant sur le plan national
qu'international.
Le deuxième choix résulte d'un stage
octroyé par la Coopération Technique Belge (CTB), suite a une
recherche qu'ils ont initié sur la thématique : «
évolution et perspectives du seuil de vulnérabilité
des systèmes pastoraux dans les départements de Dakoro, Birni
N'Gaouré et Abalak ».
1.4 Problématique
En Afrique de l'ouest, les sécheresses des trente
dernières années ont considérablement modifié les
équilibres écologiques et les systèmes de production. La
dégradation du potentiel productif conjuguée à la pression
démographique et à l'absence des techniques appropriées
ont conduit agriculteurs et éleveurs à de nouvelles pratiques
dans l'exploitation et la gestion des ressources naturelles. Ainsi,
l'accès à la terre devient de plus en plus difficile. Dans les
régions strictement pastorales, les points d'eau déterminent
l'accès aux pâturages environnants, avec des statuts d'utilisation
variés4 (tantôt libre, tantôt sous
l'autorité d'une entité ou d'un clan). Faire pâturer du
bétail ne confère aucun droit sur la terre, contrairement
à l'agriculture qui produit grâce au travail du sol, d'où
une dissymétrie des droits d'usage souvent source de
conflits5 . Cela montre que les enjeux autour du foncier pastoral ne
sont pas à négliger dont la législation est souvent
insuffisante.
En effet, sur le plan foncier, la déclaration finale du
forum de Praia+9 relatif au foncier rural et développement durable au
Sahel et en Afrique de l'ouest constitue le seul cadre de
référence régionale (CEDEAO, 2008). Il n'existe donc pas
de texte réglementaire de portée régionale relatif au
foncier pastoral en Afrique de l'ouest. Mais au niveau des pays
(sahéliens notamment), des textes de loi tenant lieu de codes pastoraux
ont été adoptés récemment (année 2000) et
appliqués avec plus ou moins de succès.
Au Niger, le texte relatif au pastoralisme (l'ordonnance
2010-29 du 20 mai 2010) n'a pas encore un décret d'application.
4 Propos cités dans les dossiers thématiques du
CSFD numéro 9 60p.
5 Ickowicz et al. 2010, cité dans dossiers
thématiques du CSFD n°9 60p.
10
Face à la dégradation des terres de culture et
à la démographie galopante du pays (3,5%6 de taux de
croissance annuelle), le Niger est dans l'urgence de trouver des nouvelles
stratégies et politiques foncières (Kandine, 2006). Cette
situation est combinée au faible taux de production agricole (2%) et
surtout devant la pression sur le foncier7. Ainsi, un code rural a
été élaboré pour fixer le cadre juridique des
activités agricoles, sylvicoles et pastorales avec des commissions
foncières comme représentation dans le pays jusqu'au niveau des
villages. Cet accroissement démographique et celui des champs au
détriment des espaces vitaux pour l'élevage détruit
progressivement une grande partie des ressources pastorales. Cette extension et
les contraintes climatiques ont conduit les pasteurs à pratiquer
l'agriculture pour subvenir aux petits besoins et contrecarrer leurs espaces
pastoraux au nord avec l'avancée progressive du front agricole. Au sud,
la zone agricole est saturée par les champs qui se sont étendus
jusqu'à emprunter les superficies destinées initialement au
pâturage et à l'abreuvement. Beaucoup de couloirs de passage et
aires de pâturages ont été mis en culture et les
éleveurs doivent souvent se contenter de déplacer leur troupeau
sur la route ou son bas-côté quand celui-ci n'est pas
cultivé (RéDéV, 2005).
Cette situation a favorisé en zone intermédiaire
le développement des champs largement au nord de la limite officielle
des cultures et occupe les superficies de pâturages précieux pour
les éleveurs. Ceci rend difficile voire impossible l'accès
à certaines ressources.
La zone de cette étude (la moyenne vallée de la
Tarka) au niveau de Dakoro correspond à la partie agropastorale et
pastorale du département est concernée par les problèmes
et contraintes évoquer précédemment.
Cette vallée se caractérise par une forte
pression foncière liée à une agriculture extensive,
d'où l'avancée du front cultural vers la zone pastorale
au-delà de la limite nord des cultures. Cette colonisation agricole est
le fait des agriculteurs Haussa venus du sud qui défrichent les espaces
pastoraux mais aussi le fait des éleveurs convertis à
l'agriculture (Mohamadou, 2004). Les chefs traditionnels Touareg ont
contribué à cette avancée en encourageant les
éleveurs à se sédentariser. La vallée de la Tarka
fait aujourd'hui l'objet d'une vive compétition entre les
éleveurs, les agriculteurs, les politiciens, les chefs traditionnels et
les élus locaux.
6 Selon l'INS en 2011.
7 94,1% de la population est concentrée dans les
régions du sud qui ne couvrent que 34,9% du pays.
11
Un autre phénomène autour de cette
vallée, est l'appropriation privative des points d'eau. Les puits
publics et communautaires sont systématiquement
privatisés8. Cette stratégie s'inscrit dans une
logique d'appropriation de l'espace parce qu'en zone pastorale, qui
contrôle l'eau contrôle l'espace.
Ces conditions difficiles prouvent que les pasteurs font face
à des dangers et risques qui facilitent la vulnérabilité
des systèmes et ménages pastoraux.
Ce travail envisage d'analyser les différents enjeux
autour du foncier pastoral et les stratégies développées
par les acteurs dans la gestion des ressources naturelles. Partant de ces
constats, il est nécessaire de poser ces quelques questions :
- Quels sont les différents acteurs intervenant dans la
vallée de la Tarka ?
- Qui gère le foncier dans la vallée de la Tarka
?
- Quelles sont les pratiques ou stratégies des acteurs
pour l'accès à des terres et la gestion du foncier pastoral ?
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