1
Table des matières
Introduction 3
Chapitre 1 : La place des femmes dans le conseil
d'administration : analyse critique 6
1.1 Mise en contexte 6
1.2 Préjugés, généralités
concernant les femmes - approche théorique 11
1.2 La loi : facteur libératoire ? 16
Chapitre 2 : Les apports des femmes au sein des conseils
d'administration : mythe ou réalité ?
25
2.1 Les critères actuelles de recrutement des femmes
administrateurs 25
2.2 Un apport en capital humain différencié
30
Chapitre 3 : Analyse empirique 36
3.1 Méthodologie 36
3.2 Echange avec Nathalie Brunelle - Total 38
Conclusion 42
Annexe 1 46
Annexe 2 47
Annexe 3 48
Annexe 4: 48
Annexe 5 49
Annexe 6 : 49
Bibliographie 51
Article 51
Ouvrage 52
Résumé 53
Summary 55
1
3
Introduction
Les bouleversements économiques du XXième
siècle marqué par les deux guerres
mondiales ont également entériné
l'entrée des femmes dans le monde du travail. Elles ont soutenu
l'économie à bout de bras au nom de l'effort de guerre, et
pourtant face à tous ces bouleversements, il reste des choses immuables.
Malgré toutes les révolutions sociales, industrielles et
désormais numériques : les femmes et le travail sont toujours mal
perçus. Si les pays anglo-saxons lancent le terme de « Glass
ceiling », la France, elle, parle de plafond de verre. Cette notion est
définie dans les années 1990 selon Morrison et Von Glinow «
comme un ensemble d'obstacles artificiels, crées par certains
préjugés et stéréotypes qui empêcheraient des
femmes qualifiées d'avancer dans l'organisation. » Avec une
progression sociale plus périlleuse, un salaire encore bien souvent
inégal et une représentativité moindre dans les organes de
gouvernance d'entreprise, les femmes sont encore discriminées dans le
monde du travail. Au regard de notre société contemporaine qui ne
cesse d'innover, on voit poindre un paradoxe. Cette problématique est
mondiale allant même jusqu'à devenir un business case pour les
entreprises, et même si les inégalités entre hommes et
femmes tentent de s'alléger, ce phénomène continue
d'exister. Il est intéressant de se demander comment dans une
république telle que la France dont l'une des valeurs n'est autre que
l'égalité, des inégalités de ce genre subsistent,
latentes, sans réelle amélioration. Pourtant les gouvernements
tentent par bien des aspects d'amorcer un processus de conduite de changement
dans ce domaine : par des aspects coercitifs bien sûr mais aussi par des
outils communicationnels1. On se rappellera la publicité de
Léa, encore dans le ventre de sa maman qui sans changement d'ici son
entrée sur le marché du travail gagnera 25% de moins que les
hommes, aura une carrière plus longue avec moins de chance d'avoir une
promotion. De plus, elle consacrera 1h50 de plus aux tâches
ménagères quotidiennement que les hommes nés la même
année qu'elle. Ce problème, comme je l'ai spécifié
plus haut est un problème de longue date, mais depuis une dizaine
d'années, on voit une société qui tente d'amorcer ce
changement. L'Union Européenne par exemple en a fait l'un de ses
objectifs majeurs notamment avec le Livre Vert de la Commission
Européenne du 1er mai 2011 sur l'égalité des
sexes dans le monde des affaires.
1
https://www.youtube.com/watch?v=naEAJJt63HQ
4
Légiférer permet de mettre au centre des
préoccupations managériales la question de la diversité au
sein des firmes. Le concept de diversité se définit comme «
les perspectives et les approches variées du travail que les membres
d'un groupe aux identités différentes peuvent apporter »
(Thomas D , Ely R.1996.) Mais cette notion s'appuie également sur des
caractéristiques cognitives non visibles, en termes d'expérience
professionnelle, de connaissance et de perception (Bantel et Jackson, 1989.) Le
processus de socialisation serait donc différent selon le genre et
permettrait d'apporter une plus-value sur le plan des compétences mais
aussi sur les connaissances et la performance (Mamadou Toé, 2014.) In
fine on s'intéresse donc principalement aux dimensions économique
et financière de la diversité. Notre problématique
s'articule autour de la féminisation des mécanismes de
gouvernances, il est donc important d'en rappeler la définition.
D'après Charreaux et Desbrières (1998) le gouvernement
d'entreprise se définit comme : « l'ensemble des mécanismes
organisationnels ayant pour objet de délimiter les pouvoirs et
d'influencer les décisions (notamment de financement et
d'investissement) des dirigeants, autrement dit, qui gouvernent leur conduite
et définissent leur espace discrétionnaire ». Il est
nécessaire det distinguer les mécanismes de gouvernances tant sur
le plan internes qu'externes. La participation des dirigeants au capital
action, les contrats de rémunération incitatifs, les
investisseurs institutionnels, les actionnaires dominants et le conseil
d'administration sont autant de mécanismes internes dont les entreprises
sont dotées. Mais nous nous intéresserons uniquement au
cinquième élément qu'est le conseil d'administration. Nous
nous poserons alors la question suivante :
Quel est l'impact de la féminisation des
conseils d'administrations sur les mécanismes de gouvernance
?
Dans une première partie, nous aborderons les freins
à l'entrée des femmes dans les CdA à travers deux axes. Le
premier s'articule autour des préjugés et autres
généralités concernant les femmes en entreprises et leurs
difficultés à évoluer. Ensuite dans le second axe, il
s'agit d'examiner si la loi est vraiment un facteur libératoire pour la
carrière des femmes. Nous dresserons à cette fin un état
des lieux sur différents pays et analyserons les questions que se posent
les entreprises et les premières controverses qui entourent le
caractère coercitif des lois dans ce cadre.
Ensuite dans un second temps, il sera temps de se poser la
question des apports des femmes au sein des CdA, sont-ils réels ou non ?
La première sous partie traitera des critères actuels de
recrutement des femmes administrateurs. La question de l'objectivité se
posera bien évidemment. Nous continueront notre étude sur
l'apport en capital humain différencié des
5
femmes administrateurs. A cette question nous apporterons une
vision globale des controverses qui entoure cette thématique. De plus,
l'analyse du capital humain des futurs administrateurs à travers leur
expérience permettent de comprendre s'ils seront efficients2
dans leur rôle de surveillance et de conseils au sein du CdA (Kroll et
al, 2008). Le capital humain apporté par les administrateurs constitue
donc une des ressources essentielles de l'entreprise, c'est la raison pour
laquelle le choix des administrateurs est si crucial pour une entreprise.
Enfin pour finir, nous réaliserons une petite
étude au sein d'un conseil d'administration pour recueillir les points
de vue et présenter une étude quantitative, bien que trop
réductrice pour être considérée comme
référence.
2 L'efficience est l'usage rationnel des moyens que
l'on dispose pour atteindre des objectifs fixés au préalable. Il
s'agit de la capacité d'atteindre les objectifs et les buts
envisagés tout en minimisant les moyens engagés et le temps,
réussissant ainsi à leur optimisation.
6
Chapitre 1 : La place des femmes dans le conseil
d'administration : analyse critique
Cette première partie est une approche théorique
qui vise à dresser un état des lieux de la place des femmes dans
l'entreprise. Ces femmes qui ont les mêmes compétences que leurs
homologues masculins sont stigmatisées par différents aspects :
leur niveau d'études, leur image dans la construction familiale, leur
manière de pensée. Et pourtant Mamadou Toé affirme «
la diversité du genre au CdA peut être une source significative
d'enrichissement des conseils, participant à son efficience en
réduisant le risque de coalition des administrateurs et en favorisant la
compétition entre administrateurs. » Des études ont
été menées devant ce constat à la fois outre-manche
mais aussi sur notre territoire.
1.1 Mise en contexte
Pour bien comprendre notre problématique, il est
essentiel de bien en cerner les notions qui l'entourent. La loi3
présente le conseil d'administration comme étant l'organe qui
« détermine les orientations de l'activité de la
société et veille à leur mise en oeuvre.» Il doit
donc s'assurer de la pérennité de la société par
des délibérations plus ou moins régulières. Le
conseil d'administration désormais CdA est présent dans les
sociétés de capitaux et plus particulièrement les
sociétés anonymes qui en font le choix et délaisse ainsi
le choix du conseil de surveillance en association du directoire. Cet organe de
gouvernance est très encadré par la loi par différents
aspect (durée du mandat, l'âge, la rémunération...),
nous allons donc aller plus loin dans la connaissance de sa constitution.
La durée du mandat ne peut excéder la
durée maximale de six ans. L'âge est lui aussi
réglementé, avec une coercition d'avoir plus d'un tiers des
administrateurs âgé de plus de soixante-dix ans. La
rémunération des administrateurs se fait sous la forme de jetons
de présence. En moyenne, en France et par mandat, la
rémunération est de l'ordre de 25 000€ dans les
sociétés cotées et se voit doublée dans les
sociétés du CAC 40. Si le montant peut paraitre excessif, il
l'est bien plus dans les pays anglo-saxons où les sommes atteignent
des
3L225-24 du code de commerce
«
http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=8F931AF71E819853AFCC8AACD8A163.tpdjo05v_1?c
idTexte=LEGITEXT000005634379&idArticle=LEGIARTI000006223640&dateTexte=20150110&categorieLien=cid#LEGI
ARTI000006223640 »
7
sommets. On note un rapport de un à deux4
entre la France et les Etats-Unis. Une forme de prime est également
possible : la rémunération exceptionnelle. Juridiquement
très encadré, on se référera aux conventions
règlementées pour plus de précision sur cette pratique.
La question de l'obligation de devenir actionnaire pour
devenir administrateur est, depuis la loi du 4 août 2008, une
responsabilité qui revient aux entreprises. En effet, « les statuts
peuvent imposer que chaque administrateurs soit propriétaire d'un nombre
d'actions de la société, qu'ils déterminent » (Art
L225-25 alinéa1 du code de commerce). Ainsi, il revient aux entreprises
de dresser cette barrière d'entrée ou non, mais aucune
règlementation ne l'impose. Cette mesure permet de laisser une plus
grande liberté aux entreprises, encourager une certaine mixité
sociale mais aussi laisser une chance aux talents.
Différents rôles lui sont attribués: le
premier et, certainement le plus controversé, est d'ordre disciplinaire.
La théorie de l'agence (Jensen et Fama, 1983 ; Jensen 1993 ; Charreaux ,
2000), célèbre pour avoir été relayé par des
grands économistes permet de mettre en contraste ce rôle. Le
postulat nous rappelle que les actionnaires sont représentés par
le ou les dirigeants de la société. Le raisonnement se poursuit
pour mettre en exergue les intérêts divergents des parties
prenantes. En effet tandis que les actionnaires vont désirer avoir un
rendement maximum de leurs actions, les dirigeants eux, voudront tirer
bénéfice de leur position. Un équilibrage est donc
nécessaire entre tous les points de vue. Un système de
contrôle s'impose donc aux dirigeants afin qu'ils respectent la
volonté des actionnaires. Si cette action est menée efficacement,
alors l'entreprise sera performante. In fine, cela nous conduit
également à penser à la nomination d'administrateurs
externe à l'entreprise, limitant ainsi les divergences
d'intérêts de chacune des parties prenantes.
On peut également parler d'une célèbre
théorie qui est celle des coûts de transactions (Williamson,
1985). Celle-ci caractérise le CdA comme un mécanisme
organisationnel permettant de « garantir la sécurité des
transactions via deux types de relations5 ». De manière
simplifiée cette théorie s'illustre par le fait que toutes les
transactions économiques conduisent à des coûts
antérieurs qui peuvent être liés à différents
facteurs comme les coûts liés à la recherche
d'information... Les agents économiques cherchent alors de
manière systématique à réduire ces coûts. Du
point de vue des CdA, on peut établir différents types de
relation conduisant à des coûts de transactions.
4
http://administratrices.femmes.gouv.fr/vous-etes-candidate/le-mandat-dadministrateur-en-20-questions/
5 Gérard Charreaux «Conseil
d'administration et pouvoir dans l'entreprise» volume 31, 1994
8
La première est celle que l'on peut établir
entre l'entreprise et les actionnaires. Les actionnaires sont ici
considérés sous l'aspect d'apporteurs de capitaux et comme groupe
homogène, non comme un seul individu propre. En effet, comme l'explique
l'auteur, un groupe homogène d'actionnaires peut difficilement
récupérer son apport s'ils décident tous de se retirer,
toutefois ils peuvent se prémunir via différents
mécanismes juridiques et organisationnels.
La seconde relation que l'on peut mettre en exergue concerne
l'entreprise et les dirigeants. Les capacités managériales de
ceux-ci sont considérées comme « loué » par la
société. Les dirigeants sauf comité de
rémunération, ont la liberté de s'accorder une
rémunération plus ou moins importante. C'est ainsi que l'on peut
voir apparaitre les golden parachute même en cas de défaillance du
dirigeant de la firme. Leur permettre de participer au CdA s'assimile à
un mécanisme de contrôle mutuel et permets de responsabiliser. La
théorie des coûts de transaction ajoute un autre critère
autour de l'intentionnalité du mécanisme permettant ainsi de
distinguer les mécanismes dits « spontanés », « de
nature contractuelle », « liés aux marchés »,
« des mécanismes intentionnels ». Ces mécanismes sont
conçus dans le but de contrôler ou tout du moins de limiter la
liberté décisionnelle des dirigeants.
Le CdA a aussi une mission stratégique6. En
effet, il doit établir la stratégie à long terme de
l'entreprise. Cet aspect est par bien des égards remis en cause dans
beaucoup de CdA qui déplorent un cruel manque de temps consacré
à ce point7. La mission stratégique à une
dimension perceptive et cognitive (Charreaux, 2002) placé après
l'accès aux ressources. Dans un environnement de plus en plus
globalisé, l'avantage des entreprises reposent de plus en plus sur des
éléments immatériels tels que l'image de marque ou des
notions de compétences voir de ressources cognitives. Le capital est
devenu vital pour les entreprises souhaitant conserver un avantage
concurrentiel durable. Enfin, bien que moins développé, on peut
également attribuer au CdA une fonction de monitoring. Celle-ci peut
s'illustrer par un transfert de délégation de pouvoirs entre les
actionnaires et les administrateurs. Cette délégation concerne la
surveillance des dirigeants.
De manière générale, les rôles du
CdA sont de fournir « une structure de protection des
intérêts dans les relations contractuelles exposées au fort
opportunismes du pouvoir discrétionnaire des dirigeants»
(Charreaux, 1996.) Les administrateurs peuvent par ailleurs avoir
différents statuts. La théorie de l'agence (Fama et Jensen, 1983)
met en exergue la notion d'administrateurs interne et externe. Aujourd'hui la
notion s'est développé et on
6 Article 116 de la loi NRE en France, 2002
7
http://www.mckinsey.com/insights/strategy/tapping_the_strategic_potential_of_boards
9
retrouve quatre profils différents : les
administrateurs internes, les business experts, les supports specialists et les
membres de communautés influentes (Hambrick et Mason, 1984 ; Hillman et
al, 2000.) Les administrateurs internes ont pour mission de fournir les
informations nécessaires à la prises de décision a priori.
Ils doivent fournir l'éclairage suffisant sur la structure interne de
l'entreprise (Fama et Jensen, 1983.) Les administrateurs externes regroupent
les trois autres castes. Les business experts sont des dirigeants qui bien
souvent sont administrateurs de plusieurs grandes sociétés. Leur
expérience est un précieux atout pour l'entreprise. Les supports
spécialists sont des experts dans leur domaine. Actuellement, au regard
de la structure des CdA, les femmes occupent plus largement que les hommes des
positions d'administrateurs externes. Une deuxième
différentiation coexiste avec celle développée. Elle fait
le distinguo entre les administrateurs externe indépendants et les
administrateurs indépendants. Le premier critère concerne les
membres qui « sont, soit en relation d'affaires avec l'entreprise
(banquiers, fournisseurs, clients, etc.), soit des dirigeants de
sociétés « amis », qui siègent dans le conseil
et proposent en contrepartie des sièges d'administrateurs dans leur
propre société (participations croisées) » Godard et
Schatt, 2000).
La seconde catégorie regroupe les membres du CdA qui
n'entretiennent « aucune relation de quelques nature que ce soit avec la
société, son groupe ou sa direction, qui puisse compromettre
l'exercice de sa liberté de jugement (Rapport Bouton, 2002). Coté
rémunération, il est important de préciser que leur statut
ne permet pas le cumul des jetons de présence et les honoraires de
conseils, un arbitrage est donc nécessaire entre les deux voies pour ne
pas être hors champs d'application de la loi.
Depuis quelques années, un nouveau statut à
également émergé, posant dans un même temps, un
certain nombre de problématiques juridiques. Ce nouveau statut est celui
des administrateurs référents ou « Senior Independant
Director » qui s'appuie sur le modèle anglo-saxon. Il a pour
mission principale d'apporter au conseil une assistance consistant à
assurer le bon fonctionnement des organes de gouvernance de la
société. Cet administrateur peut parfois avoir le titre de
vice-président. Toutefois il est important de souligner que le statut de
vice-président du conseil n'est pas une fonction reconnue par la loi.
L'Autorité des Marchés Financiers (AMF) considère que
l'intervention d'un administrateur référent est de nature
à prévenir les conflits d'intérêts et recommande la
création de ce dispositif, surtout quand les postes de président
et de directeur général sont fusionnés.
Dans son rapport 2009 sur le gouvernement d'entreprise, l'AMF
a «invité les sociétés, lorsque des changements de
gouvernance avaient lieu, à indiquer les dispositions adoptées
par la société pour prévenir les éventuels conflits
d'intérêts comme par exemple la désignation d'un
10
administrateur référent».8
Après avoir brossé le portrait des différents
éléments du CdA, nous allons poursuivre les
éléments invisibles, latents qui freinent l'entrée des
femmes au sein des organes de gouvernances.
8
http://www.kpmg.com/FR/fr/Regard-Gouvernance/Documents/LdG5F5-1-IFA-Note-administrateur-referent-2014.pdf
11
1.2 Préjugés,
généralités concernant les femmes - approche
théorique
Si les femmes sont encore si peu nombreuses au sein des
organes de gouvernances, le spectre de leurs anciennes conditions restent,
malgré tout une des raisons principales invoquée. A l'origine,
les femmes s'occupaient des tâches domestiques et élevaient les
enfants. Tandis que les hommes avaient pour activité la gestion
financière du ménage, la prise de décision et des affaires
publics. Les hommes ont donc gardé une certaine légitimité
aux postes de dirigeants et ils ont façonné les entreprises
à leur image. Cette « illégitimité » (Laufer) de
la femme dans les sphères de prise de décision s'est donc
conservée malgré les évolutions. Laufer (2005) « les
organisations sont aussi ces lieux où se structurent les relations de
pouvoir et les processus informels, souvent inégalitaires, qui
déterminent l'accès aux postes de pouvoir. [Elles...] sont le
lieu de fonctionnements informels, qui fonctionnent le plus souvent au
bénéfice des hommes et des parcours masculins ». Eliev et
Bernier (2003 : 92), continuent en insistant sur le fait que « la culture
organisationnelle est, fondamentalement, une culture masculine.». Le
management d'entreprise est marqué par un certain nombre de
stéréotype relatif au genre. Ces idées
préconçut émerge sous l'influence du milieu, de
l'éducation ou des valeurs propre à un groupe, ou un individu.
Ainsi pour devenir un bon manager et administrateur, il faudrait avoir un
profil plus marqué par une certaine agressivité et un fort
appétit pour l'esprit de compétition. Dans l'imaginaire ce type
de caractère serait plus répandu chez les hommes, même si
désormais de nombreuses femmes possèdent le même type de
caractéristiques. (Schein, 1994) Ainsi « Les hommes
représenteraient l'autorité et le leadership, les femmes
l'écoute et l'empathie » (Vivianne de Beaufort et Lucy Summers,
2012.)9 A travers cette même étude, ces auteurs ont dressés
la liste des qualités requises pour être un bon administrateur du
point de vue des femmes :
- Connaitre le terrain/le secteur
- Participer aux comités spécialisés dont le
comité d'Audit
- Apporter une expertise particulière
- Avoir une capacité à appréhender les
sujets complexes en les rendant compréhensibles et
exécutables.
- Contrôler et mesurer la mise en oeuvre de la
stratégie
Mais aussi :
9 « Femmes et Pouvoir : Tabou ou nouveau modèle de
gouvernance ? », Viviane de Beaufort, 2012.
https://sites.google.com/a/essec.edu/viviane-de-beaufort/engagement-women/leadership-au-feminin
12
- Piloter la stratégie de l'entreprise et le coaching de
l'équipe de Direction - Intégrer les dimensions « vision
» « avenir » « long terme ».
- Participer à la construction de ce qui rend
l'entreprise « préférée » aux yeux de tous fait
partie de la mission de l'administrateur.
- Eclairer sur de nouveaux business Modèles ou Territoires
- Challenger / défier le Business Modèle de la
Société
Les conclusions des auteurs devant cette vision
idéalisée du CdA les amènent à se poser la question
suivante : quelles sont les solutions envisageables pour les femmes qui ne
répondent pas aux critères précédents ? Avec un
comportement en inéquation avec l'ordre établi, les
hypothèses pour ces femmes sont alors de deux types : « entrer en
résistance ou se conformer. Leur influence risque d'être remise en
question malgré leurs compétences » (Viviane de Beaufort et
Lucy Summers, 2012.)
Tout autrement, de nombreux auteurs considèrent les
organes de gouvernance comme des « clubs old boy ».
Considéré comme un cercle ou clan composé exclusivement
d'homme et où les attributs, compétences et la performance des
femmes sont jugés différemment de ceux des hommes. L'exemple que
nous pouvons citer s'articule autour des attentes vis-à-vis de la gente
féminine qui serait plus importantes avec un moindre droit à
l'erreur (Sylvie St-Onge et Michel Magnan.) Ces clubs se caractérisent
par différents aspect qui sont : « participent d'une logique de
socialisation professionnelle instrumentale, sise sur la
sélectivité cooptative, l'informalité des rencontres et
l'inter-personnalité des relations. » (Maria Giuseppina Bruna,
2013.) Un autre aspect de ces réseaux ou cercles sociaux est le recours
à une importante forme de cooptation au sein ceux-ci. « Dans un
contexte marqué par une asymétrie de l'information, la
fréquentation de sphères informelles de socialisation
professionnelle s'avère essentielle à la compréhension de
la culture et des normes organisationnelles, au décryptage des
situations contextuelles et des enjeux stratégiques, à la
perception des canaux sous-jacents du pouvoir » (Crozier, Friedberg,
1977). Pour l'organisation, ce genre de cooptation est bénéfique
puisqu'il permet de réduire les risques à la fois liés aux
coûts de recrutement mais aussi de s'assurer que la personne
cooptée s'intègrera parfaitement au cercle auquel elle
appartiendra in fine. En effet, en recrutant sur le même profil, on
s'assure de générer de moindre problèmes. Ce type de
recrutement renforce la problématique émise par les entreprises
autour de la difficulté « d'attirer et de conserver des talents en
règle générale et de fidéliser les femmes en
particulier.» Il est également important d'aborder la
problématique de l'isomorphisme mimétique qui est un frein
important dans le recrutement de femmes des CdA. Selon DiMaggio et Powell
(1983), ce concept renvoie au fait d' « imiter le comportement d'une
13
organisation similaire, plus particulièrement
lorsqu'elle est considérée comme performante et légitime.
» Si aucune entreprise ne se révèle comme le modèle
à suivre, alors beaucoup d'entreprises se montreront réticentes
concernant la parité homme-femmes dans les organes de gouvernances. Cet
isomorphisme engendre la création d'un cercle vicieux qui pousse les
hommes à nommer d'autres hommes avec les mêmes similitudes, on
parle alors de « reproduction homosociale » (Westphal et Stern, 2006)
et conduit à un verrouillage des conseils. Il faut noter que la
discrimination direct, reposant sur des préjugés est
considérée comme illégale. Par contre, c'est bien souvent
face à des situations de discrimination indirecte que le problème
se pose. Celle-ci est directement issus des règles, par des biais
conduise à des situations de déséquilibre en terme de
genre (Sylvie St Onge, Michel Magnan, 2010.)
Par ailleurs, nombre de femmes ou hommes souffrent
également de l'attribution du genre sur certains métiers, ou
certaines activités : « on a peu de femmes dans nos équipes
de commerciaux parce que l'alcool c'est un produit surtout masculin »
(Directeur RH, entreprise de taille intermédiaire) ou bien encore «
ben, les chefs d'agence sont tous des hommes donc, ça fait les
binômes homme/femme. De toute façon, ils ne veulent que des femmes
comme assistantes... Et puis l'assistante est souvent la seule présence
féminine dans une agence ! Les chefs, les ingénieurs et les
techniciens sont pratiquement tous des hommes, on ne va donc pas, en plus
embaucher un homme comme assistant. » (Directrice RH, grande entreprise.)
Même si, depuis les positions sont différentes, les
stéréotypes sexistes demeurent. Encore aujourd'hui, peu de
métiers sont mixtes ainsi définis : ils sont 19 en 2011 (20 en
1983), et regroupent 19,8 % de l'emploi total (23,8 % en 1983)
Bien souvent l'aspect qui pèse le plus en termes
d'évolution vers les sphères managériales est la charge
familiale réelle ou potentielle des femmes. Les moindres liens que
peuvent entretenir les femmes avec les « leaders », leur moindre
implication dans les réseaux d'affaires sont deux raisons qui expliquent
aussi les freins à l'entrée des femmes dans les CdA. Par
ailleurs, des facteurs sociaux propres à chacune des femmes rentrent
aussi en jeu comme la peur de la solitude mais surtout l'absence de
modèle (Sylvie St Onge, Michel Magnan, 2010.) Ces mêmes auteurs
mettent en avant six facteurs explicatifs des principaux obstacles
rencontrés pour les femmes à leur intégration au sein du
CdA. Les trois premiers sont d'ordre structurels/ culturel et l'on retrouve en
première place la culture old boys que nous avons expliqués
précédemment. En second plan, le processus de recrutement est mis
en place. L'inconscient collectif a tendance à favoriser les hommes
à ces postes. Les femmes font donc face à une discrimination
à la fois directe mais aussi indirecte. Enfin le traitement qui exclue
les femmes des réseaux informels représente un frein important
à l'intégration des
14
femmes. Ces réseaux se tissent bien souvent
après les heures de bureaux, et les femmes ont tendance à se
priver de cette partie de la journée de travail pour privilégier
leur famille.
Il est important de souligner l'apport du modèle du
« déficit individuel » (Gutek, 1993) qui consiste à
reporter « le poids du changement sur les femmes et occulte la dynamique
sociale régissant les rapports de sexe au sein des
sociétés et des organisations » (French, 1986). A la base
des inégalités, on retrouve les barrières structurelle ou
liée à la culture. Ce modèle outrepasse ces
barrières et redonne leur part de responsabilité aux individus.
L'exemple mis en avant consiste a dire que : si les femmes limite leur
implication dans leur carrière au profil de leur vie familiale, c'est un
choix personnel.
L'image de la femme au pouvoir reste encore
marginalisée. Pourtant aux Etats Unis, le plafond de verre10
est toutefois plus fin que dans les pays Européens. « Le
nouveau monde » a su bien plus vite se féminiser et compter
sur les femmes présentent, bien que le mouvement reste toutefois trop
lent. Ainsi même dans un pays où les normes sont
différentes, les premières raisons invoquées restreignant
les femmes au poste de top management sont les mêmes que dans
les pays Européens : les stéréotypes sexistes, la
hiérarchisation sexuées des postes, la résistance
organisationnel et la faiblesse des réseaux professionnels des
cadres-femmes et leur exclusion des cercles sociaux. De nombreux ponts peuvent
être ainsi établis entre ces deux pays.
10 Plafond de verre ou glass ceiling : «
ensemble d'obstacle artificiels, crées par certain
préjugés et stéréotypes qui empêcheraient des
femmes qualifiées d'avancer dans l'organisation. » Morrison et Von
Glinow (1990)
15
16
1.2 La loi : facteur libératoire ?
Devant des situations qui semblent inextricables, le dernier
recours est bien souvent la loi. Coercitive, universelle, elle apparait comme
le meilleur choix pour faire changer la société. Si H. Lacordaire
(1848) déclara « Entre le fort et le faible, entre le riche et le
pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui
opprime et la loi qui affranchit », la pertinence du choix de la loi est
bien posée. Plus concrètement depuis 1946 l'article 3 du
préambule de la Constitution impose le principe universel de
l'égalité hommes femmes selon les termes « la loi garantit
à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à
ceux de l'homme ». Si nous revenons vers notre sujet, nous constatons que
bien des pays ont eu recours à la loi pour augmenter le pourcentage de
femmes au sein des conseils d'administrations. Nous allons donc étudier
de plus près ces pays, voir qu'elle a été l'impact de ces
lois, ses limites et dresser un bilan après plusieurs années
d'existence.
La loi est-elle une fausse bonne idée
?
Selon DiMaggio et Powell (1983) il existe trois sortes
d'isomorphismes. Ce concept renvoie à l'idée que «
l'entreprise s'adapte à un contexte institutionnel particulier en
adoptant des pratiques bien établies » (Scott, 1995.) Selon le
premier auteur, l'isomorphisme normatif est le premier et nous renvoie aux
normes et codes encadrant la pratique. Peu de rapport ont incité les
entreprises à véritablement changer les pratiques vis à
vis des femmes et du pourcentage au sein des CdA. L'isomorphisme coercitif ne
s'est imposé aux pays européens qu'après les années
2000 et ne représente toujours pas la norme pour Bruxelles.
L'isomorphisme mimétique conduit à reproduire le comportement
d'une organisation similaire. Ainsi tant que les organisations ne se
réfèrent pas à une autre entreprise, elles rechignent
à vouloir intégrer les femmes au sein de leur propre CdA, se
privant du potentiel de celles-ci11. Après avoir fait un
rapide balayage de ce type d'isomorphisme juridique, nous allons poursuivre
avec l'étude plus approfondie de l'environnement légale qui
entoure cette problématique.
Aux yeux du reste du monde, les pays d'Europe du Nord sont
ceux où les taux d'activités féminins sont parmi les plus
élevés au monde, où "l'égalité entre les
sexes fait partie intégrante de l'identité nordique", souligne le
Conseil nordique et représente pour le reste du monde un
véritable modèle. D'ailleurs les trois pays où la plus
grande proportion de postes dans les CdA est occupée par des femmes sont
: la Finlande, la Norvège et la Suède. Le cas que nous allons
aborder est la Norvège. Les femmes norvégiennes
ont obtenu le droit de vote
11 Voir page 34, partie 2.2 : un apport en capital
humain différencié
17
identique aux hommes en 1913 soit près de 30 ans avant
la France. Presque autant d'années de luttes ont marqué ces
norvégiennes pour obtenir ce droit. Un siècle plus tard, en 2003,
la Norvège est le premier pays au monde à vouloir instaurer un
quota de femme au sein des conseils d'administrations. Votée dans
l'année, cette loi instaure un objectif de 40% de femmes au sein des
conseils d'administration des entreprises cotées en bourse
(regroupées sous l'acronyme ASA en Norvège.) Treize ans
après le vote de cette loi, nous pouvons relever différents
éléments. Un bond de 18% à 40.5% de femmes12 au
sein de l'ASA est observé. Le chiffre est adopté de
manière officiel. Pourtant ce qui peut apparaitre comme une
réussite totale et toutefois marquée par certains points noirs.
Richard Milne (2014) dénonce qu'au moment de l'adoption de la loi, les
entreprises ont pris parti de détourner le système en sortant du
référencement par l'ASA. Alors que 563 entreprises étaient
référencées en 2003, aujourd'hui ce n'est plus que 179,
soit trois fois moins qu'il y a bientôt quinze ans. Par ailleurs, il
existe aussi des sociétés anonymes (SA) qui ne sont pas
cotées en bourse. Le quota des 40% de femmes ne s'appliquent donc
à pas à ces structures, faisant ainsi l'impasse sur nombres
d'entreprises. Au sein de celles-ci, on retiendra le nombre de 17.9% de femmes
siégeant au conseil d'administration, ce qui représente en
Norvège 90 481 sièges appartenant aux femmes, sur un total de
plus de 500 000. La structure du marché de l'emploi en Norvège
est répartit également entre les deux sexes, pourtant deux
dirigeants sur trois sont des hommes, 8 sur 10 dans les SA. La
sous-représentativité des femmes au sein des organes de
gouvernances restent bien ancrée.
Par ailleurs, si au regard des chiffres officiels on voit une
hausse conséquente, c'est que la sanction est de taille. En effet, en
cas de violation de ces dispositions, l'entreprise peut se voir dissoute de
manière définitive. Pour aider les entreprises à respecter
au mieux ces quotas, l'organisation patronale a pris le parti de créer
un programme de formation de préparation au mandat de conseils
d'administration. Cette aide à destination des femmes doit permettre de
contrebalancer le manque d'expérience des femmes dans le management
d'entreprises commerciales13. Pour améliorer la
visibilité et augmenter la part des femmes au sein des CdA, la
gouvernement à créer une série de base de données.
Ainsi les femmes intéressées peuvent s'inscrire et, les
entreprises peuvent sélectionner les candidates plus facilement aux
postes d'administratrices.
12 « Le capital humain des femmes récemment
nommées dans les conseils d'administration des sociétés
françaises cotées à Paris » Isabelle Allemand et
Bénédicte Brullebaut, 2014
13 Voir page 31, partie 2.2 Un apport en capital
humain différencié
18
L'Espagne est le second pays à partir
duquel nous allons appuyer notre réflexion. La loi pour
l'évolution de la place de la femme dans la société a
été votée le 15 mars 2007. Plébiscitée par
le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, elle instaure parmi d'autres
mesures plus larges 40% de femmes de au sein des CdA des entreprises espagnoles
(article 75.) Avec une proportion de femme à hauteur de 51% dans le
pays, le gouvernement entend tirer parti de ce talent entrepreneurial pour
relancer l'économie du pays.
La loi prévoie dans une de ses recommandations que :
« si le nombre de femmes dans le CdA d'une société
cotée est faible ou nul, celui-ci doit veiller à ce qu'en cas de
places vacantes, le processus de sélection ne porte pas préjudice
à la sélection de femmes et que la société inclue
parmi les candidats potentiels, des femmes qui remplissent les critères
du profil recherché » (le Code Unifié de Gouvernement
d'entreprise des sociétés cotées de l'Autorité des
Marchés Financiers espagnole, la Comisión Nacional del Mercado de
Valores.)
Figure numéro 1 : Société avec 40%
ou plus de femmes dans son conseil
d'administration
Maria Alvarez, 02-2014, Les mujerers en los consejos de
aministracion y organismo de decisión de las empresas españolas,
Maria Alvarez
Sur 1 077 840 sociétés
référencées en 2014 seule 16 836 soit 1.56% des
sociétés commerciales sont directement concernées par
cette loi. De plus sur les 1.56% seule 12.19% respecteraient le seuil des 40%
imposé par la loi, ce qui nous ramène à seulement 2053
entreprises. La pertinence de cette loi est donc remise en question par bien
des aspects. Tous comme la loi norvégienne sur les quotas, l'Espagne est
aussi affectée par ce biais.
19
Parallèlement à l'article 75, une autre loi
stipule que les entreprises de plus de 250 salariés ont le devoir de
mettre en place un plan d'égalité des sexes au sein de leurs
organes de gouvernance.
Comme l'illustre le graphique ci-dessus, 10.41% des
entreprises concernées par l'article 45 respectent la parité des
sexes au sein du CdA. Mais le constat va plus loin et l'on remarque que sur le
nombre total d'entreprises (1 077 840), 26.32% (soit 283 735) sont hors champs
d'application de l'article 75 et du plan d'égalité. Pourtant
celles-ci respectent la proportion des 40% de femmes au sein de leurs conseils.
Ainsi, dans le cas de l'Espagne, la loi est moins efficace que
l'autorégulation. Elle permet cependant d'impulser une tendance à
suivre.
Contrairement à la France14, l'Espagne n'a
pas adopté de lois concernant les sanctions en cas de non-respect des
quotas (loi 75) par les entreprises. Certains avancent même le fait que
ce soit une « recommandation de type soft law.» Il s'agit de
règles de droit non obligatoire ce qui contredit l'essence même du
droit qui se veut coercitive. Cependant la doctrine confirme qu'il s'agit
«d'une norme juridique authentique dotée de force contraignante,
alors que la recommandation du code d'éthique n'a aucune force
contraignante pour ses destinataires car étant une règle de soft
law.» Différents aspects peuvent être mis en avant concernant
l'Espagne. Le premier est qu'il existe une disparité sur le plan spatial
de la féminisation des CdA. Les régions avec le plus grand nombre
de femmes siégeant au sein des conseils sont la Galice (29.11%),
Asturias (28.84%) et Madrid (28.31%.) Contrairement aux idées
reçut, qui affirme que les îles ont souvent un temps de
décalage dans les résultats suite à l'application d'un loi
comparé à la métropole, les îles Baléares
font mieux. En effet, les îles affichent un résultat de 27.78%
d'entreprises assujetti au plan d'égalité et 25.44% à
l'article 75 qui ont, tous deux plus 40% de femmes nommés.
Le second aspect concerne la forme juridique des entreprises.
En effet, on remarque une féminisation plus ou moins importante selon
que l'entreprise soit une société anonyme ou une
société à responsabilité limité. Au global,
on note que les femmes sont plus présentes dans les
sociétés à responsabilités limités : 26.63%
contre 22.12% dans les sociétés anonymes. Ce trait se
vérifie dans la plupart des pays européens. Pour aller plus loin,
on observe que plus une entreprise est petite, plus la proportion de femmes
administrateurs est importante. On passe ainsi de 11.39% pour les grandes
entreprises à 27.58% pour les micros entreprises (à plusieurs
administrateurs)
14 Voir page 19, partie 1.2 : la loi : facteur
libératoire ?
20
On dénotera également une disparité au
sein des secteurs d'activités. Celui de l'éducation et de la
santé sont les secteurs où les femmes sont le plus largement
représentées au sein des CdA avec au taux supérieur
à 40%. A contrario, ce sont les métiers des transports et de
l'énergie qui recensent le moins de femmes administrateurs. Cet aspect,
bien que très controversé rejoint l'idée que nous avons
développé précédemment 15: le taux de
féminisation des métiers influe directement sur la
féminisation des organes de gouvernance. Les secteurs de la
construction, des transports et de l'énergie sont des métiers
à la fois très marqués par le genre mais aussi par des
profils ingénieurs où les hommes sont plus largement
représentés. Sur le secteur hispanique, cette analyse est vraie
au niveau d'un secteur d'activité mais se révèle fausse
lorsque l'on parle en termes d'entreprises. En effet, on peut voir que la
proportion de femmes salariées n'influe pas réellement sur leur
représentation au CdA. Les entreprises ayant entre 25 et 50% de femmes
sont celles où les femmes sont le plus représentées au
conseil d'administration (25.26%). Après cela le taux baisse sur la
tranche 5075% et remonte lorsque les femmes représentent 75% de
l'effectif total (28.56%).
De manière générale, la loi hispanique a
généré une hausse du nombre de femmes dans les conseils
d'administration. La participation des femmes est ainsi passée de 4% en
2006 à 10% en 2010. Pourtant en 2014, seul trois des entreprises de
l'Ibex 35 (principal indicateur de la bourse de Madrid) étaient
représentées par une femme à sa tête. De plus, il
existe encore des entreprises sans aucune présence féminine au
sein du CdA. Huit des entreprises de ce classement n'ont seulement qu'une femme
au sein de leur organe de gouvernance principale. L'entreprise la mieux
noté est Red Electrica Espanola avec cinq femmes sur 12
administrateurs, même s'il faut noter qu'elles ont toutes le statut
d'administrateurs indépendants. Avec ces différents aspects, on
voit que la loi ne couvre pas tous les champs d'applications qu'elle devrait,
afin de faire évoluer les choses à long terme. Malgré la
promulgation de la loi sur le territoire hispanique, le manque cruel de
sanctions laisse aux entreprises le choix de poursuivre dans un mode de
gouvernance unisexe. En effet on a d'abord retenu la loi comme contrainte et
comme punition. La loi conduit donc à une obligation, et c'est à
l'aune de cette obligation que mène la sanction. Sans elle la loi perd
en parti de sa valeur puisque l'obligation n'est pas universelle.
15 Voir partie 1.2 : Préjugé,
généralité concernant les femmes - approche
théorique, page 12
21
Enfin pour finir, nous allons étudier le cas de
la France. La loi Coppé-Zimmerman a été
promulguée et définitivement adoptée en janvier 2011. Pour
permettre aux entreprises d'appréhender cette nouvelle loi, deux paliers
ont été prévus : le premier a eu lieu en 2014. Il
prévoyait alors que les conseils d'administrations et de surveillance
soient dotés de 20% de femmes (les comités exécutifs ont
été exclus de cette loi.) En 2011, au moment de l'adoption de la
loi, tout conseil d'administration ne comprenant aucune femme a eu l'obligation
d'en nommer une dans les six mois suivants. La seconde étape aura lieu
en 2017 et instaure un taux de 40% de femmes au sein de ces instances : on ne
parle donc pas de parité puisque le taux de 50% n'est pas
envisagé. D'ici deux ans, les entreprises françaises vont devoir
faire face à un important processus de recrutement d'administratrices.
Ce chiffre est estimé à 1 000. Le gouvernement via le
ministère des droits des femmes (de la ville, de la jeunesse et des
sports) mène également une action pour forcer l'engagement des
grands groupes en faveur de l'égalité professionnelle et de la
féminisation des comités directeurs. Actuellement vingt-sept
grands groupes ont déjà signé cette convention (Accor, Air
France BNP-Paribas, Michelin,Total...). Dix autres devraient les rejoindre au
cours des prochains mois. Cette démarche représente aussi pour
les entreprises, une très bonne occasion de donner un coup
d'accélérateur à leur image en mettant en lumière
son intégrité (par le respect des lois en matière de droit
du travail) et sa bonne gestion des carrières. En effet cela permets
aussi à l'entreprise d'améliorer ses processus de recrutement et
à terme une meilleure rétention des talents.
A l'image de la Norvège, des mesures disciplinaires,
des sanctions ont également été prévues par la loi.
La première étant la nullité des nominations masculines
qui devront être remplacé par des femmes. La seconde est
pécuniaire puisqu'elle prévoit la suspension temporaire des
jetons de présence16 (rémunération des
administrateurs.)
La loi s'applique aux groupes français cotés et
aux sociétés réalisant au moins 50 millions d'euros de
chiffres d'affaires et employant plus de 500 salariés. Le champ d'action
de cette loi s'est depuis, étendu aux entreprises réalisant un
chiffre d'affaires de plus de 50 millions et dont le nombre de salarié
compte a minima 250 salariés. Cette extension a eu lieu dans le cadre de
la loi sur l'égalité réelle17.
En 2006, les femmes représentaient 47% de la population
active et seulement 8% des sièges au sein des conseils d'administrations
des 500 plus grandes entreprises françaises. Quatre ans
16 Articles L. 225-45, alinéa 2 et L. 225-83,
alinéa 2 du Code de commerce,
17 Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour
l'égalité réelle entre les femmes et les hommes
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029330832&categorieLien=id
22
après le vote de cette loi, la coercition de la loi
a-t-elle permis de de faire évoluer radicalement la situation sur le
territoire français ?
Figure numéro 2 : Place des Femmes dans les
conseils d'administration et de
surveillance entre 2008 et le 1er juin
2014
Source : Ethics and Boards , governance analytics, Juin 2014
Le graphique ci-dessus montre que les entreprises du CAC 40
entres autres ont connu une très forte hausse du nombre de femmes
siégeant au sein des CdA et conseil de surveillance. Avec près de
17.4 points de hausse, la France s'est positionné en leader de 2011
à 2013. Les entreprises du SBF 120 affichent une progression plus
raisonnée avec une augmentation de 3,1 points pour atteindre 28,8 %.
Cependant pour les entreprises du SBF 12018, les femmes comptent en
moyenne pour presque un quart des membres des conseils. Certaines
sociétés à l'image de Derichbourg ou Ubisoft sont, pour le
moment toujours unisexes. En mars 2014, sept cent entreprises ont
été mises en demeure et 10 ont été
sanctionnées financièrement. Pourtant l'idée que les
entreprises préfèrent payer plutôt que de respecter la loi
est une réalité pour celles-ci.
Au travers de ces trois cas, nous pouvons voir que sur le plan
légal, il subsiste de nombreuses failles. Des groupes de travail de
l'IGOPP préfèrent une manoeuvre plutôt incitative que
législative, qui viserait à atteindre une masse critique minimale
de « 40% de représentants de femmes et d'hommes en s'appuyant sur
l'échéancier de renouvellement des membres des conseils ».
Pourtant à l'heure actuelle, l'Union Européenne
réfléchit sérieusement à appliquer le
système de quotas à tous les pays membres. De nombreux auteurs
militent en faveur d'une
18 SBF 120 : CAC 40 + 80 entreprises de moindre
capitalisation
23
meilleure intégration des femmes au sein des conseils
en passant par le recueil du gouvernement d'entreprise. Cela passerait en outre
par l'inclusion de dispositions en matière de mixité et de
promulgation de l'information.
Plus généralement, on peut dire que les quotas
présentent des avantages et des inconvénients. A terme, les
avantages sont les suivants : cela conduit à « augmenter la
probabilité d'avoir des administrateurs qualifiés dans les
conseils » (I.Allemands et B.Brullebaut, 2014) Les femmes qualifiés
se retrouveraient donc comme véritables candidates potentielles et non
remis en bas de liste. La loi permettrait aussi de mieux connaitre les
caractéristiques et les compétences des administratrices
permettant ainsi d'évaluer de façon plus concrète et sans
biais les capacités des candidates à ces postes (Mateos de Cabo
et al. 2011)
Les points négatifs sont principalement
articulés autour de la coercition de la loi et de ses dérives. En
effet, en se focalisant exclusivement sur les quotas et la peur des sanctions,
on peut assister à un recrutement bâclé de femmes non
compétentes. On assisterait donc à une perte non seulement de
capital humain mais aussi en terme de performance. Par ailleurs, d'autres
auteurs tels qu'Adams et Ferreira mettent en avant le libre fonctionnement du
marché sans tenir compte des déterminations sociales. Finalement,
le bien de l'entreprise doit passer avant la question de genre imposée
au conseil d'administration. Une autre étude menée
récemment par Dalton et Dalton, met cependant en avant l'importance de
l'interaction de certaines lois sur la féminisation des CdA. La loi
Sarbanne-Oxley par exemple a considérablement fait augmenter l'influence
des femmes. Les chiffres relevés sont les suivants : Entre 2001 et 2009,
la féminisation des sous-comités des organisations du Fortune
50019 est passée de 5 à 13% pour les comités de
vérification, de 4 à 17% pour les comités de
rémunération et de 8 à 20% pour les comités de
nomination ou gouvernance.
Rétrospectivement, on peut observer que l'après
2010 a été marquée par une hausse conséquente du
nombre de femmes dans les organes de gouvernance au sein de l'Union
Européenne. Pour rappel, la France est le pays ayant connu la plus forte
hausse. Cependant, les progrès sont annoncés comme «
glacials » par l'OIT et « 100 à 200 ans nécessaires
pour parvenir à la parité au sein de la hiérarchie des
entreprises, si rien ne change » (OIT, 2015). En effet, même si les
certains aspects se sont améliorés, on voit encore les biais des
lois. Notamment en ce qui concerne les comités exécutifs, et de
direction. Les applications coercitives ne couvrent pas ce champ. Pourtant,
à la base ces comités peuvent être un
19 Fortune 500 est le classement des 500
premières entreprises américaines, classées selon
l'importance de leur chiffre d'affaires. Il est publié chaque
année dans le magazine Fortune
http://fortune.com/fortune500/
24
excellent tremplin pour accéder par la suite à
des postes d'administrateurs. Mamadou Toé (2014) confirme d'ailleurs cet
aspect avec une meilleure féminisation des CdA lorsque les
comités exécutifs sont eux-mêmes dotés de plus de
femmes. Mais avec l'arrivée des quotas on voit l'inverse se produire,
les CdA se féminisent tant bien que mal et les COMEX se replient sur eux
même car hors champs d'application des lois et restent
indéniablement aux mains de la gente masculine. Par exemple, en France
de nombreuses entreprises du secteur bancaire et des
télécommunications tels que BNP Paribas, Crédit agricole
et Axa mais aussi Vivendi ou Iliad ont un COMEX presque exclusivement
masculin20. Pourtant la coercition de la loi permet
d'améliorer à court terme une situation critique. En effet,
malgré les biais cités, les pays où le pourcentage de
femmes a crû rapidement sont ceux où la loi a agi.
L'autorégulation a, pour le moment peu porté ses fruits.
Nonobstant, la Commission Européenne tend à conserver une forme
d'autorégulation via une manoeuvre incitative pour donner « une
chance aux sociétés cotées de se rattraper et les a
invité à s'engager à atteindre volontairement 30% de
femmes dans les conseils en 2015, et 40% en 2020.»
A l'image de la Norvège, une nouvelle situation est
également apparue dans les entreprises. De manière à
détourner le système des quotas, les entreprises non
cotées peuvent changer de régime juridique en
société par action simplifié (S.A.S) pour ne citer qu'un
exemple. La S.A.S étant le régime juridique le plus proche de
celui de la société anonyme. La Norvège affirme que
l'ensemble du processus, depuis les premières discussions jusqu'à
l'application complète de la loi, a duré dix ans. Si la
Norvège reste le pays ayant amorcé à l'échelle
européenne les politique de quotas, rétrospectivement, elle
considère avoir été trop lente dans sa mise en place. Le
gouvernement norvégien incite donc les pays qui voudraient poursuivre
dans la voie légale à le faire plus rapidement qu'elle ne l'a
fait, et donc rapprocher les paliers entres eux, voir les supprimer.
Pour conclure, nous rappellerons que la loi agit non pas au
profit du sexe féminin, mais bien dans l'intérêt
général des sociétés. L'Autorité des
Marchés Financiers espagnole, nous rappelle ainsi que « Ne pas
profiter du talent potentiel de 51% de la population (les femmes), ne peut
être économiquement rationnel pour l'ensemble des grandes
entreprises de notre pays.»
20 Voir annexe 3 page
http://www.agefi.fr/articles/place-aux-talents-feminins--1336070.html,
2014
25
Chapitre 2 : Les apports des femmes au sein des conseils
d'administration : mythe ou réalité ?
2.1 Les critères actuelles de recrutement des
femmes administrateurs
Cette première partie nous a permis de mettre en
lumière les différents freins à l'entrée des femmes
dans les CdA. Cette nouvelle section s'appuie sur les études
déjà menées va nous permettre de mettre en lumière
les critères de recrutement employés à jour pour
intégrer les CdA. On se posera la question de la différence qui
peut coexister entre les pratiques employées d'une part pour les hommes,
et d'autre part pour les femmes. Enfin il s'agit de mettre en avant quels
facteurs influencent le recrutement d'administrateurs de sexe féminin,
pourquoi certains secteurs sont aujourd'hui au-dessus des quotas imposés
tandis que d'autres plafonnent et s'enfoncent dans un cercle vicieux.
La première remarque que nous pouvons formuler est que
les entreprises qui promeuvent les femmes aux postes les plus
élevés sont souvent celles qui investissent beaucoup dans la
recherche, l'innovation et la technologie (OIT.)
Cinq autres caractéristiques semblent être
motrices dans la féminisation des CdA (Yves Moulin, Sebastien Point,
2012). Le premier est la taille de l'entreprise. Le constat
est simple, plus l'entreprise est grande, plus elle sera visible et sera
contrainte aux pressions de son micro et macro-environnement. Les parties
prenantes sont donc d'autant plus attentives quant au respect des lois et
à la bonne image que doit véhiculer l'entreprise (Hillman et al,
2007). La visibilité s'est d'ailleurs accrue en raison de l'explosion
des NTIC et de la nécessaire stratégie d'internationalisation.
Des études menées dans le contexte anglo-saxon ont permis de
mettre en évidence une importante connexion entre la taille de
l'entreprise et la féminisation des CdA (Burke, 2000 ; Peterson et
Philpot, 2007 ; Terjesenet Singh, 2008). Dans son étude, Mamadou
Toé (2014) relativise la relation entre taille et taux de
féminisation des organes de gouvernance. En effet, de son étude
ressort une relation négative, même s'il pose lui-même les
limites réelles ou non de son étude. Il convient donc de nuancer
son approche sur ce point en particulier.
Le second aspect se rapporte au secteur
d'activité. Une première hypothèse met en exergue
que le secteur d'activité, manufacturier ou non influe sur la
féminisation (Fields et Goodman, 1994). On peut constater que certains
secteurs sont encore attribués à un genre spécifique.
26
Une RH explique ainsi « quoiqu'on en dise, il y a des
métiers pour les hommes et d'autres pour les femmes... c'est comme
ça, c'est tout ! » (Bref du Céreq, 2013)
Les exemples les plus flagrants d'une moindre
féminisation sont sans conteste les métiers de la construction et
du bâtiment, de l'agriculture, de la défense et de
l'ingénierie21. A contrario, les métiers les plus
attractifs et où l'on retrouve la plus grande part de femme sont ceux
des relations publiques et de la communication, la finance et l'administration
(OIT, 2015.) Cette relation entre le secteur d'activité et le
pourcentage de femmes au poste d'administrateur pose cependant certain
problème. Cette première hypothèse semble ne pas se
vérifier dans tous les secteurs selon Singh et Vinnicombe (2007.) Une
réelle connexion semble toutefois coexister entre la proportion de
femmes administratrices et la féminisation du secteur d'activité.
Là où les femmes sont plus nombreuses, elles ont plus de chance
d'évoluer sur des postes d'administrateurs. L'étude de Mamadou
Toé (2014) met en exergue qu'une plus forte féminisation des
effectifs, du nombre de femmes cadres ou bien encore des comités
influent, in fine sur le nombre de femmes administrateurs. Le taux passe de 24%
à 37.8%.
Le troisième aspect concerne la diversification
stratégique. Rappelons qu'une entreprise peut opter soit pour
une intégration verticale dans la recherche de réduction des
couts par la maitrise de tout le processus de la chaine de valeur. Sinon elle
peut opter pour la standardisation dans le but de faire des économies
d'échelles. Mongomery (1994) avance que « le niveau optimal d'une
diversification dépend de la spécificité des ressources
détenus par l'entreprise. » De manière plus explicite, Yves
Moulin et Sébastien Point (2012) nous explique que moins les secteurs
d'activité seront éloignés les uns des autres, moins elle
sera exposé à la dépendance de son environnement. Par
contradiction, si les secteurs d'activités sont éloignés
les uns des autres (diversification conglomérale), le conseil
d'administration aura nécessairement besoin d'un conseil
hétérogène et donc de femmes qui ont souvent une
compétence spécifique.22
Le quatrième aspect se rapporte directement à
l'incertitude environnementale. L'idée est construite
autour de différent aspects. Le premier étant que si
l'environnement de l'entreprise est complexe, associé à une forte
croissance alors la dépendance aux ressources sera forte. Ensuite, dans
ce contexte, les fonctions d'administrateurs sont d'autant plus complexes.
C'est dans ce contexte que les firmes sont tentées de mettre en place un
CdA hétérogène avec des administrateurs ayant les
mêmes profils et bien souvent du même sexe pour éviter
toutes sortes de conflits. De ce résonnement découle
l'idée que le taux de féminisation est lié à
21 Voir annexe 5 page 48
22 Voir partie 2.2 : un apport en capital humain
différencié, page 29
27
l'incertitude environnementale. La stabilité
économique comme élément moteur du recrutement des femmes
au sein des organes de gouvernance (Mamadou Toé, 2014). La faible
croissance des entreprises23 est synonyme d'une plus forte
féminisation de ces organes.
Le quatrième aspect se rapporte au
contrôle du capital par un actionnariat familial.
L'idée étant que le nombre de femmes administrateurs
étaient plus présent dans les entreprises familiales car moins
enclin à la pression du genre et des actionnaires, mais aussi dans un
objectif de pérennité de la firme. Bien souvent, c'est au moment
du passage de relais entre les renouvellements de mandat que la famille
détentrice du capital affirme sa volonté de favoriser
l'entrée de nouveaux membres au sein du CdA. Il s'agit d'un enjeu
très important pour elle, car cela dilue le pouvoir tout en conservant
le contrôle de la société. Pour exemple, en France, la
troisième plus grosse entreprise en capitalisation qu'est L'Oreal est
une entreprise familiale. Trois membres sur 15 dont deux femmes sont issus de
la famille Bettencourt, famille créatrice. Avec une proportion de 38.5%
de femme au sein de son conseil, il respecte presque le pourcentage des 40%
imposé. Cet aspect est également corroborer par Belghitu-Mahut et
Lafont (2010) qui mettent en avant que « plus du 1/3 des femmes
siégeant au CdA présentent des liens avec la famille
propriétaire de l'entreprise.»
Enfin le cinquième et dernier élément que
les auteurs mettent en avant capable d'influencer le nombre de femmes
administrateurs est le contrôle du capital par des investisseurs
institutionnels. Les investisseurs institutionnels se sont largement
développés au début des années 2000. Cet
investissement est basé sur la construction d'une relation capital
/gestion étroite et durable. Le dirigeant en contrepartie se couvre
contre les risques de rachat hostiles. Les investisseurs utilisent le
mimétisme coercitif pour inciter les entreprises à respecter la
loi sur les quotas notamment. Ainsi dans ce type de schéma, les
entreprises ayant ce type de configuration technique devraient avoir une
féminisation de leurs instances de gouvernance plus significative.
L'ancienneté est également un
facteur invoqué dans le choix des administrateurs (Bacon et Brown,
1973.) Cette réflexion est facile à comprendre puisqu'un
salarié acquiert de l'expérience, une meilleure connaissance des
processus internes et du gouvernement d'entreprise au fil des années.
Nous allons maintenant voir les aspects qui impactent sur le
recrutement des femmes à ces postes vu par différentes
études empiriques. Mamadou Toé (2014), nous révèle
dans son étude
23 Diversité du genre et gouvernance
d'entreprise : les déterminants endogènes, Mamadou Toé,
IRG Université Paris-Est, VARIA, 2014
28
le profil des administratrices. Le premier constat est une
différence d'âge entres les femmes et les hommes nommés.
Tandis que les hommes attendent en moyenne 59,20 ans avant d'être
nommé, les femmes accèdent plus rapidement à ces postes
puisque c'est à l'âge (moyenne) de 53,87 ans qu'elles y
parviennent. Hillman et al (2002) ont obtenu les mêmes résultats
à partir des bases de données recueillis sur le territoire
américain. Second constat apporté par l'auteur, les femmes
administrateurs ont plus souvent le statut d'administrateurs indépendant
: 59.02% de femmes contre 43.47% d'hommes. L'étude mené par
Isabelle Allemand et Bénédicte Brullebaut confirme cet aspect et
nous explique les conclusions positives et négatives de cet aspect. En
effet, pour reprendre la théorie de l'agence, les administrateurs
indépendants sont considérés comme exerçant un
meilleur contrôle des dirigeants car moins soumis à la pression
des actionnaires. De manière défavorable la forte
représentativité des femmes en qualité d'administrateurs
indépendants confirme une « moins bonne connaissance de
l'entreprise dans laquelle elles exercent un mandat. »
Il subsiste toutefois une interrogation : les femmes
nouvellement nommées ont-elles le même niveau d'influence que
leurs homologues ? Finalement le glass ceiling quantitatif n'aurait-il pas
laissé place à un glass ceiling qualitatif ? (Stephane Gregoir et
Frédéric Palomino.) La loi en vigueur exclue tous les autres
comités, ce qui explique une faible probabilité pour les femmes
de siéger au sein de ceux-ci. Par ailleurs, il semble que les
responsabilités attribuées aux femmes soient toujours en dessous
de leur homologue masculin. Ainsi, une fois franchi la barrière du
plafond de verres, les femmes administrateurs doivent cette fois-ci se heurter
à celle de leur implication dans le processus décisionnel. Leur
présence se serait qu'à titre « symbolique » (Bilimoria
et Pederit, 1994 ; Graig et Philpot, 2007) ou relevant du « symbolisme et
du moral que du mérite et de la recherche de l'efficience »
(Burgess et Tharenou, 2002.) Kanter (1977) a déjà
dénoncé le problème sous le nom de « Tokenisme »
qui consiste à nommer de simple figurant (ici figurante), perdant au
passage le rôle et la compétence qui est lui normalement dû
au sein du CdA.
Nous allons maintenant revenir sur les « clubs old boys
»24, ils représentent un canal de recrutement important
pour intégrer les CdA. Ainsi, « l'élitisme scolaire
associé au passage par la haute fonction apparait comme beaucoup plus
déterminant dans la sélection des administrateurs » (Bauer,
Bertin-Mourot, 1997 ; Dudouet et Joly, 2010.) On peut par ailleurs avancer le
chiffre de 50,86%25 des administrateurs recrutés en 2006
provenaient des grandes écoles de l'Etat (Polytechnique, ENA). Certains
vont même jusqu'à avancer le terme de
24 Voir partie 1.1 Préjugés,
généralités concernant les femmes, approche
théorique page 11
25 Ethique et gouvernance d'entreprise en France,
Elizabet Genaivre, 2006
« consanguinité » des CdA, « trop
homogènes et fermés », « réservés
à des hommes du même moule éducatifs et professionnel qui
se partagent les mêmes réseaux sociaux et se cooptent »
(Picard, Labègue, 201026). Les courants de pensées
mettent en avant l'inefficience et la source de dysfonctionnement de
l'uniformité des profils et encourage à une diversité des
profils, que pourrait, entre autre, apporter les femmes. Enfin nous allons
terminer sur les trois critères objectivement mis en avant pour recruter
un administrateur (femme administrateur, gouvernement français, 2014) Le
premier est le professionnalisme qui induit la notion
sous-jacente d'engagement, d'assiduité et de participation aux
débats du conseil. Le statut des administrateurs est ici très
important. Le second critère est celui de la
loyauté. L'administrateur doit toujours
privilégier l'intérêt général,
considérer l'entreprise afin de ne pas favoriser sa propre situation. On
entend aussi par loyauté le fait d'accepter de bon gré la
collégialité dans laquelle les décisions sont prises. La
relation avec les dirigeants exécutifs doit s'exercer sans concession
mais avec une compréhension et une volonté d'apporter quelques
choses et de construire ensemble. Enfin le dernier élément est
l'indépendance : qui est propre à chaque
individu. En effet, on sous-entend que chaque administrateur a le droit et le
devoir d'exprimer sa propre opinion. Lorsqu'il se trouve en désaccord
grave et persistant
avec la direction exécutive de l'entreprise ou avec son
conseil, il a le devoir de démissionner. (Pour ne pas mettre en
péril sa responsabilité civile, un administrateur a le devoir de
faire notifier son refus quant à la décision et son
éventuel départ de la réunion)
29
26 Isa.fr, M.Picard et D.Labègue, 04 mars
2010,
30
2.2 Un apport en capital humain
différencié
Si les femmes sont peu présentes au sein des organes de
gouvernance, elles incarnent pourtant un apport en capital humain très
important pour l'économie de l'entreprise. Le capital humain se
définit comme « l'ensemble des connaissances, des aptitudes, des
compétences, et des valeurs d'un individu » (Becker, 1964).
L'auteur continue en mettant en exergue la nécessité d'investir
dans l'éducation, la formation, l'expérience professionnelle pour
pouvoir ouvrir et développer son capital humain individuel. On peut
étendre cette pensée au monde de l'entreprise.
Considérées comme un moteur de croissance et de
compétitivité mondiale de premier plan (rapport OIT), les femmes
dynamisent le marché de l'emploi.
Deux grands groupes de chercheurs si distinguent lorsque l'on
aborde la théorie du capital humain (Agarwal, 1981). Les premiers
mettent en lumière l'intérêt de la formation de la
socialisation pour que les femmes puissent développer leur capital
humain et intégrer à termes les CdA. Les seconds partent du
constat inverse et incite au contraire les entreprises à intégrer
les femmes en raison de leur capital différent de celui des hommes.
McKinsey & Company met en exergue les résultats de
ses recherches entre performance organisationnelle27 et
financière28 comparativement au nombre de femmes cadres. Au
regard d'une augmentation de femmes dirigeantes, la valeur de l'action avait
augmenté de 17% entre 2005 et 2007. Il faut également ajouter
à cela un bénéfice d'exploitation deux fois
supérieur à celui de la moyenne des entreprises sur la
période. (Ce point de vue est au centre de bien des controverses, une
étude globale est attendue afin de trancher définitivement sur ce
point) Catalyst défend aussi ce point de vue avec de meilleurs
résultats pour les entreprises comptant un plus grand nombre de femme au
CdA. De manière générale et même si ces chiffres
peuvent paraitre abstraits, l'OIT avancent tout de même les chiffres
suivant : « une
27 Performance organisationnelle : La performance
organisationnelle se définit comme la réalisation d'un
résultat équivalent ou supérieur à l'objectif
fixé par l'organisation compte tenu des moyens mis en oeuvre. Il est
important pour une organisation de pouvoir la mesurer. L'analyse de la
performance va se décliner en deux grandes notions : L'efficacité
mesure la capacité de l'organisation à atteindre ses buts. On
considère qu'une activité est efficace si les résultats
obtenus sont identiques ou supérieurs aux objectifs définis.
L'efficience est le rapport entre les ressources employées et les
résultats atteints. Une organisation est efficiente si elle atteint les
objectifs fixés en optimisant les moyens utilisés
(c'est-à-dire une meilleure utilisation des ressources pour une
diminution des coûts). Certains auteurs (Kalika, 1988 ; Kaplan et Norton,
1992, 1993 ; Morin et al., 1994) proposent une vision plus large de la notion
de résultat, en proposant d'intégrer des indicateurs
variés tels que la qualité du produit et du service, la
mobilisation des employés, le climat de travail, la productivité,
la satisfaction de la clientèle, etc.
28 Performance financière : La loi impose de mesurer la
performance financière. Cette mesure se fait par les documents
comptables et de synthèse à la fin de chaque exercice. La
performance renvoi depuis longtemps a un concept qui se base sur l
création de valeurs et la manière de la piloter. . Des
études récentes (Le cercle.les Echos, 2013), montrent qu'à
ce jour, 200 entreprises répertoriées par la revue Fortune
utilisent un indicateur basé sur la valeur créée pour les
actionnaires pour évaluer la performance. Il existe toutefois plusieurs
indicateurs : la rentabilité, la profitabilité, l'autofinancement
et les dividendes versés aux actionnaires
31
représentativité des femmes à hauteur de
deux minimum apporterait en terme de rendement : 84% de vente, 60% sur les
capitaux investis, et enfin 46% sur les capitaux propres ». Comme nous
l'avons noté dans le chapitre précédent, les femmes sont
souvent mises de côté en raison d'un manque d'expérience
dans l'encadrement.
Les femmes représentent pourtant une source de talent
très importante. Dans un marché de consommatrice de plus de plus
important, il est important pour les entreprises de prendre les
décisions stratégiques en adéquation avec ces nouveaux
marchés. Il représenterait le troisième marché dans
le monde selon Booz & Company. De ce fait, logiquement la place des femmes
dans la prise de décision des entreprises aurait dû augmenter
d'une part en raison de la place qu'elles occupent dans le monde du travail et
d'autre part, en raison du marché grandissant qui leur est
destiné. Mamadou Toé confirme ce point, car, 61% des entreprises
dont le coeur de métier est orienté à destination des
ménages possèdent au moins une femme au sein de son CdA.
En renforçant la place des femmes au sein des CdA, cela
permettra de « véhiculer des informations permettant de mieux
cerner les attentes des femmes qui demeurent les principales acheteuses de
biens et services concernant la consommation des ménages, mais
également de laisser entendre que l'organisation est sensible aux
carrières des femmes » (Brammer, Millington et Pavelin, 2007 ;
Millinken et Martins, 1996.)
Nous allons étudier les conséquences sur le CdA
suite à l'apport en capital humain des femmes. La notion de
compétence est donc au coeur de cette réflexion et se
définissant comme suit : « un savoir agir résultant de la
mobilisation et de l'utilisation efficace d'un ensemble de ressources interne
et externe dans des situations authentiques d'apprentissage ou dans un contexte
professionnel. » 29 La compétence est donc propre à chaque
individu, qui l'a forgé en fonction de ses expériences, de sa
formation et enfin de ses socialisation au cours sa carrière. Hillman et
al (2002) considèrent ainsi que la composition du CdA «
s'assimilerait à la constitution d'un portefeuille dans lequel chaque
administrateur apporterait une contribution spécifique en termes de
ressources cognitives (Hillman et all, 2000,2002.)
Le premier aspect que nous allons donc aborder est la
formation. Contrairement aux idées reçues, les femmes
ont un bagage plus important que les hommes. Différentes études
confirment cet aspect. L'UNESCO indique que sur le plan mondial le nombre de
diplômés de sexe féminin est supérieur aux hommes.
De plus, selon cette même étude, 57% d'entre elles poursuivraient
jusqu'au niveau maitrise. Deux autres études confirment cette tendance
:
29
http://www.communagir.org/comprendre-et-agir-chapitre/competences/
32
Simpson et al et Aher et Dittmar. Toutes deux indiquent un
niveau académique identique ou supérieur à celui des
hommes. A noter également que les femmes ont plus souvent un double
diplôme, que ce soit l'association du profil école de commerce et
ingénieur ou bien université et diplôme étranger.
C'est un aspect important puisque cela permets aux femmes d'apporter une
réelle diversité aux organes de gouvernance. En effet les hommes
auraient plus souvent un profil ingénieur. Concernant la formation, les
femmes ont également plus souvent un profil juridique que leur homologue
masculin. C'est un véritable apport pour les entreprises qui
bénéficie à travers ce type de profil d'un regard
aiguisé sur l'environnement légal au plan national et
international. (Isabelle Allemand et Bénédicte Brullebaut, 2014)
La formation en tant que tel, ne détermine pas de manière
optimale la valeur d'un individu sur le marché de l'emploi mais, au
niveau managériale, son profil influera sur ses prises de
décisions. Wiersema et Bantel (1992) vont dans le même sens en
expliquant que le type d'étude va influer sur les sources d'informations
et d'innovation dans la prise de décision. En favorisant une ouverture
en terme de genre et donc de source de formation, cela conduira l'entreprise
à appréhender l'environnement différemment et donc de
manière indirect à rechercher l'information et les solutions
possibles de manière plus large lors de la prise de décision
stratégique (Watson et al., 1993.) En outre, les caractéristiques
des administrateurs joueraient également un rôle important dans la
performance de celles-ci. Bien que ce sujet soit encore soumis à
controverses, nous pouvons considérer l'idée que le choix des
administrateurs réputé permet, à terme d'attirer les
parties prenante et d'assurer sa pérennité.
Le second aspect concerne une moindre
expérience managériale. Près de 70% des hommes
administrateurs aurait eu une expérience managériale contre
seulement un tiers des femmes (Simpson et al.) Jugé comme un
élément déterminant, cette carence est souvent la raison
invoqué pour refuser la candidature de femmes à ces postes.
Pourtant aujourd'hui dans le monde entier, ce sont près de 30% de femmes
dirigeantes d'entreprise de toutes tailles (micro, petite, moyenne et grande.)
Pour devenir femme administrateur, ce manque d'expérience
managérial constitue une lacune très importante. Cela conduirait
à un manque d'efficacité une fois en poste (Simpson et al,
2012.)
Nonobstant, il subsisterait une relation entre le degré
de féminisation des instances de gouvernance et la taille de
l'entreprise30 (Carter et al, Hillman et al.)
Le troisième aspect est quelques peu induit par le
précédent. Les femmes ont des expériences
différentes des hommes, quelques secteurs privilégiés sont
ainsi principalement occupés par
30 Voir partie 2.1 Les critères actuels de
recrutements des femmes administrateurs, page 25
33
des femmes. On relèvera les secteurs à traits
aux relations publics et à la communication, la gestion des ressources
humaines et enfin la finance et l'administration. Comparativement les hommes
ont un passif plus orienté ingénieur tandis que les femmes ont
tendance à s'orienter dans les domaines où la place de l'humain
est plus forte avec moins de technique.
On peut donc relever que les femmes ont des formations et des
expériences différentes de celles des hommes, leur profil
candidat est donc diamétralement différent. Bien que la
diversité soit reconnue pour ces vertus elle est aussi source de
conflits (Milliken et Martins, 1996.) Ainsi Earley et Mosakowski, (2000) mets
en avant cet aspect à travers des « conséquences
négatives sur la dynamique du groupe, la communication et la
coopération. » Mamadou Toé (2014) met cependant cet aspect
en relief avec une amélioration du climat social et une meilleure
féminisation de la structure lorsqu'à minima une femme
siège au conseil. Il poursuit sa réflexion en citant la
diversité comme « source d'adaptation et de flexibilité,
atout important dans une dynamique de croissance.» L'internationalisation
est donc un facteur conduisant l'entreprise à s'ouvrir à une plus
grande diversité. Les chances des femmes peuvent augmenter entre 8 et
18% lorsque la firme développe le type de stratégie (Mamadou
Toé, 2014) A contrario il montre qu'une entreprise en pleine croissance
nuit à la proportion de femmes dans les conseils.
Les femmes apporteraient à l'entreprise une vision et
un style de management radicalement différents. En effet, il
subsisterait, selon certain spécialistes « si les hommes et les
femmes utilisent des mots similaires, ceux-ci n'auraient pas
nécessairement le même sens du fait de leur expérience des
relations sociales et de leur conscience de soi » (Sophie
Landrieux-Kartochian, 2004)
Pour certains acteurs, la vision du travail est
différente en fonction des sexes, ce qui explique aussi que le style
managérial soit différent. Tandis que les hommes vont
privilégier « la possibilité d'apprendre ou de ses
perfectionner, de rester au courant des développements technique »
les femmes vont quant à elle s'attacher plus particulièrement
à l'atmosphère amicale et la sécurité de l'emploi
(Bollinger et Hofstede, 1987.) A partir de ce constat, on voit se dessiner le
capital humain différencié que les femmes peuvent apporter au
management. Les femmes auraient donc un mode de management « interactif
», incitant chacun des acteurs à donner leur avis, partageant
l'information et le pouvoir, agissant de manière positive « sur
l'estime de soi de leurs subordonnées et motiveraient les autres quant
à leur travail » (Rosener, 1990.) Grâce à ces
caractéristiques, le style managériale des femmes, à
l'opposé de la hiérarchie masculine seraient cependant
complémentaire à celui des hommes (enquête Accenture-GEF,
2003.)
34
Le lien entre la performance et la présence des femmes
est un élément très souvent abordé et, bien souvent
au centre de bien des controverses. La fonction de monitoring défini
précédemment31 conduit à mettre en exergue un
élément : ce mécanisme serait d'autant plus efficace que
les administrateurs sont indépendant du dirigeant (Hermalin, 2005 ;
Adams et Ferreira, 2007). Comme nous l'avons dit, les femmes lorsqu'elles
deviennent administrateurs, le sont bien plus souvent avec un statut
indépendant. Ce qui nous conduit donc à penser de manière
raisonnable que cette indépendance pourrait améliorer la
performance de l'entreprise. D'autres aspects permettent également
d'étayer cette thèse. En effet, les femmes : auraient tendance a
à mieux préparer les réunions (Huse et Soldberg, 2006),
permettraient de diminuer considérablement l'absentéisme et enfin
augmenteraient la probabilité de départ des dirigeants ayant de
mauvais résultats (Adams et Ferreira, 2009.)
Catalyst, (2007) confirment le lien entre performance et
féminisation des organes de gouvernances, dans la mesure ou leur nombre
est égale ou supérieur. Une corrélation positives entre la
présence des femmes dans les CdA et les performances financières
sont misent en avant «En effet, il ressort que les femmes sont en
général plus jeunes lorsqu'elles intègrent les CA, elles
sont donc plus innovantes, elles apportent de nouvelles solutions et de
nouvelles approchent. Elles peuvent placer à un autre niveau les
discussions entre des membres du «board » parce qu'elles ont d'autres
manières de penser et d'autres parcours professionnels. Ce qui permet de
constituer des boards plus diversifiés et donc enrichis d'idées
et de solutions» (Etienne Redor, 2014),
Cette corrélation influence de manière indirecte
la performance mais permet, à terme d'améliorer le contrôle
des dirigeants. Par ailleurs, nous allons aussi nous intéresser au lien
entre la féminisation des CdA et la performance du point de vue de la
capitalisation boursière. Pour cela, il est communément admis
d'utilisé le « q de Tobin », qui permets de mesurer le rapport
entre la valeur boursière de l'entreprise et la valeur de remplacement
du capital fixe (immobilisation corporelle et incorporels destinées
à être utilisées dans le processus de production pendant au
moins une année). Plus généralement cette mesure est
capable de déterminer la performance économique. En s'appuyant
sur cet indicateur, une relation clairement négative est avancée
avec une contre-production et une conduite managériale de moins bonne
qualité (Sabri Boubaker, Rey Dang, Duc Khuong Nguyen, 2000.) Les auteurs
mettent ainsi la avant l'aversion au risque potentiellement
surreprésenté chez les femmes qui conduirait à un moindre
développement de l'entreprise. Cet aspect est à mettre en relief
avec l'étude de Campbell, Minguez Vera (2010), qui démontre une
amélioration du cours de
31 Voir partie 1.1 Mise en contexte page 6
35
bourse à court et moyen terme sur le territoire espagnol
tout du moins. Le lien de causalité est très largement remis en
question puisque d'autres chercheurs affichent des résultats
négatifs.
Afin de trouver un point de consensus, certains auteurs explique
l'absence de lien entre la présence de femmes dans CdA et une source de
performance par leur trop faible représentativité à ce
jour.
Toutefois, il est important de souligner que l'engagement des
entreprises via des politiques de diversités et de conciliation de la
vie professionnelle et personnelle ont un impact positif sur les cours de
bourses de ces entreprises (Wright et al, 1995, Arthur, 2003.)
36
Chapitre 3 : Analyse empirique
3.1 Méthodologie
L'entretien a pour but d'étayer mes recherches sur la
place des femmes au sein des conseils d'administrations. Ensuite, il s'agit
d'apporter une vision plus personnelle à mon travail, montrer un cas
réel d'une femme siégeant au sein d'un CdA. Le métier dans
lequel siège N.Brunelle est très sexué puisqu'il s'agit du
milieu de l'automobile. La représentativité du sexe masculin est
prépondérant à la fois dans les organes de gouvernances
mais aussi dans sa masse salariale.
Par ailleurs, mettre en corrélation les
résultats et un point de vue permets de nuancer certains aspects de
recherche.
J'ai décidé de m'appuyer sur mon réseau
professionnel pour réaliser cet échange. Ainsi, j'ai
décidé de choisir l'entreprise Hutchinson, filiale du groupe
Total. Avec un rayonnement mondial, les pressions externes sont fortes sur ce
groupe : le choix stratégique de ses administrateurs est donc d'autant
plus fort. De plus, le groupe Hutchinson, n'est représenté que
par une seule femme dans son conseil, il est intéressant de percevoir
quelles ont étés les freins, et la vision qu'elle peut avoir sur
son expérience.
Avec un rayonnement mondial, les pressions externes sont
fortes sur ce groupe, il est donc intéressant d'avoir choisis celle-ci.
L'outil d'enquête que nous utilisé est l'entretien semi-directif
qui a été réalisé auprès d'une
administratrice du groupe Hutchinson. En amont de l'entretien, une grille
d'entretien semi-directif a été
réalisé32. Un entretien est : « un speech event
(évènement de parole) dans lequel une personne A extrait une
information d'une personne B, information, qui est contenue dans la biographie
de B. » (Labov et Fanshel, 1977). Il est important de préciser le
terme biographie qui renvoie au « caractère vécu de
l'information recueillie. » L'entretien semi-directif quant à lui
permet : « d'analyser le sens que les acteurs donnent à leurs
pratiques, aux évènements dont ils ont pu être les
témoins actifs ; lorsque l'on veut mettre en évidence les
systèmes de valeurs et les repères normatifs à partir
desquels ils s'orientent et se déterminent. » (Alain Blanchet et
Anne Gotman, 2001.) Les entretiens semi-directifs que nous avons choisi
d'utiliser nous ont permis un recueil d'informations qualitatif nous semblant
plus approprié à notre thème de recherche et plus
réaliste par rapport au temps impartis. Il est donc important de
souligner que cette partie apporte un éclairage restreint et non comme
une étude empirique qui nécessiterait d'être
32 Voir annexe numéro 4 page 48
37
approfondis auprès d'une plus large population et des
entreprise de : de taille différentes, issus de tous système de
cotation en continu (CAC 40, SBF 120) et ou de secteurs différents. Afin
d'être le plus réaliste possible, l'entretien a été
enregistré.
Un second entretien a été réalisé
a priori de celui présenté ci-dessous. Il s'agit de Dominique
Bellos, directrice des ressources humaines et de la communication du groupe
Hutchinson. Elle est la toute première femme à
siégé au sein du comité de direction et au comité
opérationnel du groupe. Elle a entre autre oeuvré pour
féminisé au mieux l'entreprise. En quatre ans, elle a
porté le taux de femme à 36% sur le plan mondial, dont une
poussé sur le nombre de femme cadres, passant ainsi de 10% en 2010
à 16% en 2014.
38
3.2 Echange avec Nathalie Brunelle - Total
Question 1 : Présentez-vous en quelques mots
(étude, parcours professionnel...)
Diplômée de l'Ecole Polytechnique et de l'IFP
School (formation complémentaire «Advanced Technology in
Petrochemicals, Polymers & Plastics» en association avec Mc Gill
University, Canada).
Elle a débuté sa carrière chez Elf
Atochem à Villers-St-Paul en tant qu'ingénieur
procédé avant d'exercer des responsabilités
opérationnelles sur le site pétrochimique de Gonfreville. Suite
aux fusions entre Total, Fina et Elf, elle part travailler en Belgique au sein
de la Division Chimie de Base où elle occupe des fonctions en Business
Development puis dans le département commercial. Entre 2006 et 2008,
elle est responsable des opérations de Fina Antwerp Olefins, une
coentreprise entre Total & Exxon Mobil basée à Anvers. En
2009, elle prend la tête du département Plan et Stratégie
de Total Petrochemicals. En 2010, elle devient Directeur Commercial pour la
Chimie de Base. Le 1er janvier 2012, elle a été nommée
Directeur Stratégie, Développement et Recherche de la branche
Raffinage Chimie. Elle a été administratrice de Futerro
(développement d'une technologie de bio polymère PLA), de CEPSA
(Espagne) et de Rosier (Fertilisants) avant de représenter Total au CdA
de ses filiales
Question 2 : Depuis quelle date siégez-vous au Conseil
d'administration d'Hutchinson?
J'ai pris mes fonctions en 2012, à la suite de la
réorganisation des branches qui a eu lieu en 2012 chez Total
(évoqué ci-dessus.)
Question 3 : Quels sont les choix qui ont motivé votre
candidature au CdA ?
Mes choix ne sont pas propres, ils ont été
imposés de par ma fonction (ndlr stratégie, développement
et recherche). Dans le cadre de la gouvernance d'Hutchinson France, un certain
nombre de membre issus de Total SA, actionnaire unique doit être
présent au sein du CdA. A ce titre on a regardé chez Total SA qui
avait la légitimité pour suivre de plus près
Hutchinson.
Question 4: Avez-vous perçut des réticences en
raison de votre genre à votre nomination ?
Absolument pas, pas du tout ! C'est vrai qu'il y a une
attention particulière dans le choix des personnes à ce que les
quotas soient respectés, précédemment j'ai
été administratrice d'une société cotée
Rozier en Belgique, encore avant j'étais administratrice de CEPSA,
compagnie de pétrole en Espagne. C'est vrai qu'il y a une attention, et
le fait que je sois une femme me
39
permets en effet d'atteindre les quotas mais je ne suis pas
choisis parce que je suis une femme, je suis choisie parce que je suis dans la
fonction
Question 5. Les attentes sont-elles plus importante envers
vous ?
Je n'ai jamais ressenti cet aspect sur ma personne.
Question 6. Que pensez-vous apporté de plus que vos
collègues ?
Je ne saurais pas vous dire...J'apporte mes compétences et
mon expertise
Question 7. Quelles sont, selon vous les qualités
nécessaires pour être une femme administrateur ?
Bien comprendre les enjeux de l'entreprise, être en
capacité de comprendre ce qui disposé au conseil
d'administration, c'est-à-dire avoir quand même un semblant de
connaissances sur le domaine de la société, on ne peut pas
être complétement étranger au domaine de la
société, même si l'on ne peut pas avoir une complète
maitrise technique. On ne peut pas comprendre tout ce qui se passe mais il faut
être capable de comprendre ! Des bases de gouvernance et de finance pour
comprendre les enjeux de ce qui se joue dans un conseil d'administration et
pouvoir jouer son rôle par rapport aux données financières
et aux décisions qui sont amenées sur la table.
Dans un second temps, il faut aussi avoir envie de
créer un peu de liant avec les autres personnes qui sont autour de la
table du conseil d'administration pour comprendre les enjeux de chacun et
pouvoir appréhender, avant que la réunion ne démarre,
quels vont être les sujets qui vont faire l'objet de discussion et
pourquoi.
En sachant que dans un conseil d'administration comme
Hutchinson, il y a peu de débat, on parle ici d'un conseil
d'administration d'une entité juridique, sachant que la gouvernance de
l'entreprise, même si elle respecte bien évidemment toute les
entités juridique, il y a également une gouvernance de par le
fait qu'Hutchinson fait des business review pour présenter ses
résultats, son plan, son budget auprès de la branche Raffinage
chimie de Total. Donc une grosse partie des sujets sont déjà
regardé dans ces instances de gouvernances, qui sont en plus des
structures de gouvernances de l'entité juridique.
Question 8. Comment expliquez-vous que si peu de femmes
soient administrateurs ? Peur de l'engagement ou clivage sociétale
?
40
Aujourd'hui, je dirai que le plus gros frein c'est que souvent
dans un parcours de carrière, on devient administrateur après ou
en même temps sur un poste de direction et que, clairement c'est le
manque de femmes dans ces étages de direction qui créé le
fait que, spontanément, quand il va falloir aller chercher des
administrateurs, on va .... Aujourd'hui on cherche plus de femmes
administrateurs qu'il n'en existe dans le vivier historique, qui est le vivier
de comité de direction, des postes de direction des
sociétés. Pour moi le plus gros frein est là, parce que
c'est en effet le vivier historique, et donc du coup on va chercher dans
d'autres viviers, ce qui n'est pas inintéressant, je ne dis pas que
c'est bien ou mal, je ne porte pas de jugement. C'est un fait que pour
respecter les quotas dans les conseils d'administration et qu'il n'y a pas le
vivier habituelle, on va chercher dans d'autres espace de la
société, qui apporte des profils un peu différents.
Certaines femmes qui font cela bien sont
sur-sollicitées, ce qui a terme n'est pas forcément positif.
Question 9 : Quels sont les pistes à explorer pour
faire inverser la situation ?
Je crois que la féminisation des conseils
d'administration va réussir grâce au quota, effectivement
derrière cela permet d'accélérer les choses, de varier les
profils, ce qui en somme très intéressant. Il faut effectivement
que ce mouvement se poursuive dans les autres niveaux de gouvernance des
entreprise, le conseil d'administration n'est pas le seul organe de
gouvernance, les COMEX le sont aussi. Les COMEX reste pour le moment
très masculin, et donc la vraie question est : est-ce que la vitesse
actuelle des quotas est suffisante ?
Aujourd'hui, on entend beaucoup le fait que lorsque l'on
choisit une femme on ne choisit pas des hommes, et des hommes qui sont
prêts à prendre ce type de job, il y en a pleins. Donc lorsque
l'on prend une femme, il faut savoir dire aux hommes que ce ne seront pas eux
qui siègeront, ce qui n'est pas simple en ce moment. En effet, j'ai
connu un ancien dirigeant qui espérait beaucoup siéger au conseil
d'administration au moment de sa retraite, qui a mis beaucoup de mois avant
d'en obtenir un, parce que comme tout le monde lui disait « ton profil est
super mais je dois privilégier des candidatures de femmes en ce moment.
»
Les personnes très pro-quotas défendent aussi le
fait « pendant des années, il y avait des femmes très
compétentes qui n'ont jamais eu leur chance, on ne s'est même pas
posé la question de savoir si elle l'étaient parce que des hommes
devaient alors prendre leur place, donc après tout forcé le
système pendant dix ans, alors que pendant un siècle
c'était l'inverse... »
41
Des choix doivent être faits et heureusement il y a plus
de vivier que d'élus. Il faut surtout éviter que ce soit toujours
les mêmes élues que l'on retrouve. On a trouvé la
poignée de femmes qui remplissaient (ndlr : les quotas) et que l'on
aille plus faire ce qui était la fraicheur du premier instant qui est
d'aller chercher des profils un peu originaux. Certaines femmes font des choix
en fonction des rémunérations dans les conseils, ce
n'était pas forcément l'idée de départ mais sans
doute un épiphénomène.
Question 10: Quelles sont vos aspirations pour l'avenir
?
Je pense continuer au sein des CdA mais il faut être
clair, tout ce que j'ai fait, c'était été lié
à ma fonction chez Total. On est jamais venu me cherche pour mon
curriculum vitae, je n'ai jamais été
rémunérée pour ces administrations-là, toujours
j'étais dans le cadre de ma fonction. C'est un peu particulier quand
même. Le jour où je démissionne de ma fonction chez Total,
je démissionne de manière siné qua none de tous les
conseils d'administration où je suis.
D'un point de vue entité juridique et gouvernance, dans
certains je représente l'entreprise, dans d'autre je suis
administratrice indépendante mais je suis nommée de par le poste
que j'ai.
Ce qui est important de souligner, c'est qu'il ne faut pas
rentrer sans être formé. Moi quand j'ai été
nommée dans un conseil d'administration, j'ai souhaitée
participer via l'Institut Français des administrateurs qui aident les
femmes à se former, savoir quelles vont être les missions, les
attributions et les non attributions. Beaucoup d'administrateurs vont
au-delà de leur rôle d'administrateurs. Cela engendre pour
conséquence de donner une image de personnes qui sachent tout faire. Il
y a aussi une question de formation et qu'il faut soi même aller se
former, même si ce n'est pas proposé par les entreprises.
Moi-même, Total ne m'a jamais proposé ce type de formations, ils
pensaient que je saurais faire cela de manière .... Que ce serait
inné. Effectivement, il faut oser aller le faire, même si cela
peut paraitre un peu scolaire de ma part mais cela m'a permis de me sentir plus
solide dans mes décisions. Mais c'est peut-être moins
français, la cooptation a encore une grande place également.
42
Conclusion
L'augmentation du nombre de femmes au sein des CdA est un
résultat en demi-teinte par différents aspects. Le premier pose
le problème du vivier disponible afin de répondre aux exigences
des quotas. Rétrospectivement, on peut voir que les femmes
répondant aux critères usuelles sont sur-sollicités et les
entreprises ne s'ouvrent pas à de nouveaux profils. Nous avons pu
établir une liste de corrélation entre la structure, le
macro-environnement et le taux de féminisation des CdA. Cet organe de
gouvernance est très sensible aux pressions de son environnement. Cet
aspect seul, explique leur constitution actuelle, très masculine. Les
freins vers une égalité homme-femme au sein des organes de
gouvernances sont nombreux. Au-delà des stéréotypes et
autres aspects sexistes, les facteurs les plus répandues sont
L'entretien réalisé met quant lui en avant la
présence du plafond de verre au sein des organisations mais, non pas
à l'entrée des CdA mais plutôt au postes de direction
menant in fine à des postes des organes de gouvernances.
Les quotas mis en place par les gouvernements sont une
excellente mesure incitative pour les entreprises puisqu'elle permet
d'augmenter substantiellement le nombre de femmes au sein des CdA. Mais, si
l'on regarde plus attentivement, de nombreuses failles ternissent un peu les
résultats, largement divulgués par les politiques pro-quotas.
Pour ne citer que quelques exemples de ces failles, il y a la
possibilité de nommer une femme moins compétente qu'un homme
à ce poste, son caractère restrictif qui exclue les COMEX de son
champ d'application, mais également des sanctions en cas de non-respect
des quotas qui ont le mérite d'exister mais restent trop faible. Ce
dernier aspect est certainement le plus important, puisqu'il n'incite pas les
entreprises à modifier leurs politiques. Enfin les gouvernements restent
seuls juges dans l'application des politiques de quotas. L'union
Européenne ne s'est pas encore mise d'accord pour faire appliquer
conjointement une seule et même loi au sein des pays membres. Sur ce
sujet, le livre vert de l'U.E tend à influencer directement les pays
vers l'uniformisation de la situation législative.
L'amorcement du changement est freiné par la structure
juridique de chaque pays et de sa culture comme le montre l'exemple suivant :
récemment l'Etat allemand à mis au point un
document sur les bonnes pratiques de
gouvernance33, malheureusement, ce document n'a pas encore
passé les frontières de l'état germaniques.
Les pistes à envisager pour pallier aux
défaillances de l'aspect législatif sont nombreuses. L'OIT
propose d'ailleurs un certain nombre de mesures pouvant contribuer à
améliorer l'intégration des femmes au sein des CdA.
Figure numéro 3: Les mécanismes d'aide
proposés
Expliquer et fournir des arguments justifiant
l'intégration d'un plus grand nombre de femmes
aux postes de direction
Collaborer avec d'autres entreprises sur les bonnes
pratiques
Fournir des exemples de bonnes pratiques, de mesures et de
stratégies visant à promouvoir
les femmes aux postes de direction
Mettre au point une stratégie pour promouvoir les
femmes aux postes de direction
Concevoir une politique d'égalité des chances
Collaborer avec des associations de femmes occupant des postes
de direction
Fournir des recommandations sur des systèmes de gestion
des ressources humaines soucieux
de l'égalité entre hommes et femmes
Rédiger des guides indiquant des mesures et
stratégies promouvant les femmes aux postes de
direction
Introduire un programme de mentorat
Élaborer une politique contre le harcèlement
sexuel
Introduire un programme de parrainage
Rapport de L'OIT, 2015
43
33 Des bonnes pratiques de gouvernance. Le Deutscher Corporate
Governance Kodex Section 4.1.5, 2010 ou le Finnish Corporate Governance Code
2008 -RecommandationKodex
44
Nous souhaiterions accentuer nos propos à travers deux
éléments : le premier étant les programmes de mentorats et
le second les formations. Très présent pour nombre d'homme, cette
mesure s'étend aujourd'hui aux femmes. Cette initiative peut se passer
par la création de binômes, et ceux à n'importe quel
échelon, ou bien encore
Saluons également l'initiative développé
en Belgique, et inspiré du modèle britannique : le «
Mentoring Pilot Program». Ce concept consiste à attribuer un
administrateur, le mentor dans cette situation au service d'une candidate
à poste d'administrateur. Le mentor, directement issus du milieu
économique, pourra alors dispenser son expertise mais aussi sa
connaissances des organes de gouvernances. La candidate sera d'autant plus
motivée par ce mentorat et sera mieux accompagné dans son projet.
Les Mentors sont actifs eu sein des sociétés cotées ou non
et dans les secteurs publics et privés. Les Mentors occupent des
fonctions exécutives, managériales, et possèdent
déjà une solide expérience professionnelle et sont
candidates potentielles à une fonction d'administrateur. Le mentorat
peut également s'accompagner d'un programme dit « de
parrainage.» Des personnes hiérarchiquement placé prennent
alors le parti de d'attribuer la direction d'un projet visible à
l'échelle de l'entreprise à une femme. Cela lui permettra de
mettre en avant ses qualités et d'être accompagné en cas de
besoin par le parrain. Ce système est moins répandue car plus
risqué pour le parrain et la gouvernance de l'entreprise doit s'y
prêter.
L'idée de développer des formations pour devenir
administrateur est également en train de se développer. En
France, l'Institut Français des Administrateurs (IFA) met à
disposition de ses adhérents un certain nombre de formations permettant
: d'acquérir de nouvelles compétences ou de les
réactualiser à travers un regard sur la règlementation,
les pratiques de bonnes gouvernances, les recommandations économiques et
financières. N'ayant que très peu d'image de femmes au sein des
CdA, les formations sont souvent l'occasion pour les femmes de se rassurer sur
leur futur poste.
Actuellement, pour ne pas avoir à arbitrer entre la
famille et leur carrière, de nombreuses femmes font désormais le
choix de l'entrepreneuriat féminin. Ce choix leur permet
d'accéder à une flexibilité et une autonomie qu'elles
n'ont pas au sein des entreprises. Plus largement, le sujet nécessite
d'être plus largement exploité notamment à N+10
après la promulgation du dernier pallié de la loi. Il faudra
également suivre l'implication des pays européen dans la voie
législative ou non. L'Allemagne est actuellement le pays le plus en
avancé pour poursuivre cette voie.
45
Table des Annexes
Annexe 43
Annexe 1 44
Annexe 2 48
Annexe 3 49
Annexe 4 49
Annexe 4 50
46
Annexe 1
CAC 40 - Pyramide des ages des administrateurs élus en
assemblée générale 2014
Source : Ethics&Boards Governance Analytics, Avril 2014
47
Annexe 2
Féminisation des instances dirigeantes - Palmarès
des entreprises 2014
Source : Ministère du droit des femmes, 2014
48
Annexe 3
Trajectoire de femmes au sein des COMEX, 30 ans après
leur diplôme : projection linéaire jusqu'en 2040
Source : Mc Kinsey, Women Matter, 2010
Annexe 4:
Source : CapitalCom
Evolution de la part des femmes dans les COMEX et de direction
Annexe 5
Evolution de la presence des femmes selon le secteur
d'activité
Source : INSEE - Observatoire des inégalités
Annexe 6 :
Question 1 :
Présentez-vous en quelques mots (étude, parcours
professionel...)
Question 2 :
Depuis quelle date siégez-vous au Conseil d'administration
d'Hutchinson?
Question 4:
Avez-vous perçut des réticences en raison de votre
genre à votre nomination ?
Grille d'entretien semi-directif
Question 3 :
Quels sont les choix qui ont motivé votre candidature au
CdA ?
Question 5:
Les attentes sont-elles plus importante envers vous ?
Question 6:
49
Pensez-vous que votre « genre » apporte quelque chose
de différents ? Si oui lequel ?
Question 10:
Quelles sont vos aspirations pour l'avenir ?
Réalisé et validé le 22/05/2015
Question 7:
Quelles sont, selon vous les qualités nécessaires
pour être une femme administrateurs ?
Question 8:
Comment expliquer vous que si peu de femmes soit
administrateurs ? Peur de l'engagement ou clivage sociétale ?
Question 9 :
Quels sont les pistes à explorer pour faire inverser la
situation ?
50
51
Bibliographie
Article
Isabelle Allemand et Bénédicte Brullebaut, le
capital humain des femmes recemment nommées dans les conseils
d'administration des sociétés françaises cotées
à Paris, Management international, 2014, 31 pages
Mamadou Toé, Les déterminants individuels du
plafond de verre : cas de la composition des instances de gouvernance des
entreprises françaises cotées, Management international, 2014, 67
pages
Sabri Boubaker, Rey Dang, Duc Khuong Nguyen, Does board gender
diversity improve the performance of French listed firms?,
Lydie Chaintreuil et Dominique Epiphane, « Les homes sont
plus fonceurs mais les femmes mieux organisées »: quand les
recruteur-e-s parlent du sexe des candidat-e-s, Bref du Céreq,
numéro 315, octobre 2013
Yves Moulin et Sébastien Eska, Les femmes dans les
conseils d'administration du SBF120 : qualités féminines ou
affaires de famille ?, Revue de gestion des resources humaines, numéro
83, 2012, 44 pages.
Sophie Landrieux-Kartochian, Femme aux commandes, entreprises
performantes ?, La découverte : travail, genre et
sociétés, numéro 23, 2010, 10 pages.
Claude Francoeur et Réal Labelle et Bernard
Sinclair-Desgagne, Gender diversity in Corporate Governance and Top Mangement,
Journal of Business Ethics, 81 :83-95, 2008, 13 pages
Sabrina Chickh, Physionomie des patrons du CAC 40, la
persistance des élites françaises, association de recherches et
publication en management- Gestion 2000, 2013, 14 pages
52
Ouvrage
Bertrand Richard et Dominique Miellet, 2003, La dynamique du
gouvernement d'entreprise, Editions d'Organisation.
Linda Wirth-Dominicé, 2015, Femmes d'affaires et femmes
cadres Une montée en puissance, Organisation internationale du travail
(OIT).
53
Résumé
La féminisation des conseils d'administration est au
coeur de la réflexion des entreprises. Depuis quelques années,
cette question revient à la fois pour des question de gouvernance mais
aussi légales. Il est de notoriété public que les femmes
sont moins représentées au sein des organes de gouvernances. L'un
d'entre eux est le conseil d'administration qui est chargé de «
déterminer les orientations de l'activité de la
société et veiller à leur mise en oeuvre. » Il a donc
un rôle crucial qui doit le mener à amorcer une conduite du
changement efficace en faveur d'une meilleure promotion de la femme dans sa
société.
Moins compétente donc moins représenté ?
Le parallèle est vite établi mais la réalité est
tout autre. Un certain nombre de stéréotypes et d'idée
préconçus demeurent au sein de notre société
contemporaine. Pour ne lister que quelques exemples, les obstacles les plus
récurrents sont la faiblesse des modèles féminins qui
agirait en qualité de référence pour la gente
féminine, la charge familiale réelle ou potentielle qui
pèse sur les femmes, la sexualisation des métiers, mais
également les « old boy club » qui sont souvent
évoqué lorsque l'on parle des conseils d'administrations. Depuis
quelques années, les gouvernements ont décidé d'agir par
la voie légale. La Norvège a ouvert le pas en 2003. En imposant
aux entreprises d'intégrer un certain nombre de femmes au sein de leur
conseil d'administration, la voie légale permet d'améliorer
rapidement la situation. Les résultats affichés sont très
bon même s'ils restent à nuancer. Avec un champ d'application trop
restrictive, des sanctions qui peinent à convaincre, l'encadrement des
lois restent à revoir.
Seul la Norvège a pris des mesures coercitives de
taille concernant le non-respect de la loi sur les quotas dans les conseils
d'administrations. Cette sanction est la dissolution pure et simple des
entreprises. Les pays européens ayant adopté les lois sur les
quotas restent encore timides dans ce domaine. Ce qui a bien souvent comme
conséquence de ne pas effrayer les entreprises qui
préfèrent payer les amendes plutôt que de respecter les
quotas imposés. Mais les entreprises sont également
confrontées à un problème de recrutement des femmes
administrateurs. Le plafond de verre qualitatif (trouver des femmes
compétentes) à laisser place un à plafond de verre
quantitatif (trouver suffisamment de femmes intéressé par la
fonction d'administrateurs pour répondre aux quotas.) Le vivier de
femmes disponible est différents des viviers couramment utilisés
pour les hommes. En effet, la gente féminine est moins présente
au sein des réseaux professionnel, qui se tissent bien souvent
au-delà des heures de travail. Cet aspect, entre autre, conduit à
une identification plus compliqué des talents au féminin. Mais si
la voie légale permet d'améliorer la situation, bien d'autres
moyens peuvent également être mis en place, notamment au sein des
entreprises. Mettre en
54
place une meilleure flexibilité du temps de travail,
des collaborations avec des femmes actuellement en postes qui serviront de
modèles pour les autres mais aussi développer programmes de
mentorat sont autant d'exemple que nous pouvons citer pour augmenter le nombre
de femmes dans les conseils d'administration.
Si la question de la représentativité des femmes
est au centre des préoccupations, c'est que l'apport en capital humain
des femmes est différent de celui des hommes. Cet apport est source de
performance. Si le lien reste encore au centre de bien des controverses, il est
reconnu que la diversité est synonyme de performances. En contexte de
crise économique, la diversité est donc la bienvenue.
55
Summary
The feminization of board of directors is in the heart of firm
strategy. For few years, this problematic is global, and deal with governance
and legacy question. It is well-known that women are less represented in
governance mechanisms. One of them is the boards of directors who has the
mission to «determine the strategic direction of the firms and ensure to
their apply». He has a crucial role which lead it to initiate the way to
change in favour of a better promotion of women in society.
Less competent so less represented? It is easy to establish
this parallel but reality is really different. There are many stereotypes in
the current society. To quote just few examples, the most important obstacle
are the weak repetitiveness who act as a reference and the familial charge,
real or potential, which affect women, the sexualisation of the jobs. The board
of directors are often compared to an old boys club. Few years ago, governments
decided to act by legal way. Norway began in 2003,to force firms to integrate a
quota of women in the board of directors, legal way conduces to improve quickly
the situation. The communicated results are very good, but it needs to be taken
carefully. A too restrictive field, sanctions which seem too weak, the
supervision of the law needs to be reinforce.
Only Norway took significant coercive measures against
non-respect of law about quotas in board of directors. This sanction is the
strict dissolution of the company. European country remains subdued in this
subject. That's conduct firms to not scare and then prefer pay whereas to
respect the law.
But firms are also confronting to hire trouble to find women
administrators. The qualitative glass ceiling (find competent women) has
transform to change in a quantitative glass ceiling (find enough women
enthusiastic by administrator job)
The breeding ground for women is different than for men.
Indeed, professional connexion is always built after work; women are less
present to give priority in their family. This aspect and others conduct to a
complicate identification of talents.
If legal way gives good result, there are many other way which
could be develop in the firms. Develop more flexible working time, some
collaboration with current women in board of directors who are going to be
their referent and also mentoring program. All of this are examples to raise
the number of women in board of directors.
Women bring a different kind of human capital than men. This
supply conduces to improve the performance for the firm. This link between
gender diversity on board of directors and
56
performance is still in heart of controversies. But it is
admitting diversity brings performance, and during economic crisis diversity is
welcome to galvanize the market.