CHAPITRE III
L'INVESTISSEMENT EN HAÏTI : LES FAITS
L'investissement évolue dans un environnement où
il est influencé d'une part, par des variables économiques comme
le crédit, le taux d'intérêt, la demande et
l'épargne et d'autre part, des variables qualitatives comme le nombre de
jours nécessaires à l'immatriculation et l'incorporation d'une
nouvelle entreprise, les frais d'immatriculation, la gouvernance politique,
économique et administrative. Cet environnement doit inspirer confiance
chez les entrepreneurs dans leur décision d'investissement par rapport
à leur anticipation.
C'est ainsi que, dans ce présent chapitre, nous allons
exposer, dans une première section, le climat des affaires en Haïti
en priorisant l'aspect institutionnel, et dans la suivante, nous analysons le
profil des investissements réalisés au cours de la période
sous-étude.
SECTION I : LE CLIMAT DES INVESTISSEMENTS EN HAITI :
Aspect institutionnel
Le climat d'investissement se définit selon la Banque
Mondiale42(2004), comme « L'ensemble des facteurs
propres à la localisation de l'entreprise, qui influent sur les
opportunités de marché ou le désir des entreprises
d'investir à des fins productives, de créer des emplois et de
développer leurs activités. Les politiques et le comportement des
pouvoirs publics ont une influence très importante en raison de
l'incidence qu'ils ont sur les coûts, les risques et les obstacles
à la concurrence. L'entreprise est le point de départ du cadre
d'analyse. Selon ce rapport, le générique
<<Entreprise>> désigne tout l'éventail des agents
économiques privés depuis les agriculteurs et les
micro-entrepreneurs jusqu'aux entreprises manufacturières locales et aux
multinationales, et ce quels que soient leur taille, leur activité ou le
statut juridique formel ».
En effet, au tournant des années 80, une situation de
dégradation continuelle du niveau de vie a prévalu en Haïti.
Cette situation se caractérise par une intermittente instabilité
politique43 et macroéconomique, de violences et conflits
civils et politiques, de coups d'Etats, la mauvaise
42 Cette définition est extraite
textuellement du Rapport sur le Développement dans le Monde 2005
publié par la Banque Mondiale en 2004 intitulé :»Un meilleur
climat de l'Investissement pour tous `'.
43 Respectivement les années
(1980,1982,1983,1984,1985) ,contestation au régime des Duvalier ;
1986(chute du régime duvaliériste), 1991(coup d'Etat millitaire)
; 1991 à 1994 (Embargo commercia et financier), 2000 à
2004(contestation contre le régime d'Aristide).
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gestion des ressources nationales, de hauts coûts de
transaction induits par l'inefficience et l'inefficacité du cadre
légal et réglementaire des affaires. Tous ceux-ci inhibent tout
projet d'investissement productif et toute perspective de développement
et engendrant la fuite des capitaux humains, monétaires, vu les risques
encourus et les coûts liés à l'instabilité dans le
pays.
1.1 La Gouvernance politique en Haïti
Des conflits internes intermittents sont survenus en
Haïti depuis la chute du régime duvaliériste dans la
deuxième moitié des années 80. Coups d'Etats, des troubles
civils et politiques de tout acabit, un embargo durant trois années
(1991-1994), une période de troubles qui s'intensifie après le
départ du président Jean Bertrand Aristide en 2004, la hausse de
la corruption par la multiplication des pots-de-vin, l'inefficience de la
structure de gestion des affaires publiques et du système juridique ;
tels ont été les faits saillants de la période en terme de
gouvernance.
C'est ainsi que, tous les indicateurs reconnus et
acceptés sur le plan international en vue d'une évaluation de la
qualité de gouvernance classent la République d'Haïti
à la marge en terme de performance.
L'indice global de libertés civiles
élaboré par Freedom House44 réflétant
les aspects suivants : Le niveau de la liberté d'expression, celui du
droit d'assemblée, d'association, d'éducation et de religion.
L'établissement d'un État de droit équitable, ainsi qu'une
activité économique libre favorisant l'accès à
l'égalité des chances des citoyens. Sur une échelle de 1
à 7, les scores les plus bas (1 et 2) sont les pays qui répondent
aux critères ci-dessus, les scores les plus élevés sont
alloués aux États qui offrent peu de libertés à
leurs citoyens qui gémissent dans la crainte de la répression.
Pour Haiti, l'indice global moyen a été de 6,00 environ pour la
période de 1980 à 2010 ; durant la période de coup d'Etat
et d'embargo commercial (19911994), Haïti affiche une note de 7,00. Il en
est de même pour la période de troubles politiques (2000-2005),
l'indice a été de 6,00. Selon le Rapport annuel de freedom House
en 2005, sur une échelle graduée de 1 à 7 avec 1
représentant la catégorie la plus libre et 7 celle la moins
libre,
44Freedom House est une organisation
indépendante, non gouvernementale, fondée aux Etats-Unis au cours
des années 1940. Elle comprend de personnalités du monde des
affaires et des syndicats, ainsi que d'intellectuels et des gens de tous les
milieux.
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pour Haïti les deux indicateurs de libertés
publiques et de droits politiques étaient respectivement de 6 et 7.Tout
ceci révèle l'état de répression dans lequel Haiti
évolue.
L'indice de liberté économique fournit par
Heritage Fondation45 et du Wall street Journal regroupant 50
indicateurs, à la fois quantitatifs et qualitatifs, en vue de mesurer la
faiblesse des interventions et des contraintes gouvernementales sur les
activités économiques ont aussi affirmé le mauvais
environnement des affaires qui gangrène Haïti. Ce pays se
positionne dans les abysses de l'échelle, hormis Cuba, dans l'espace
caribéen. Ceci est prouvé clairement par les scores
enregistrés par ce pays entre 1999 et 2005 (voir tableau XVIII
en annexe) Haïti se trouve toujours parmi les économies
contrôlées, sauf en 2003.
Enfin, les données du CIDCM46 de
l'université de Maryland nous renseignent sur l'état du climat
politique en Haïti. Les indicateurs de démocratie et d'autocratie,
respectifs allant à l'espace politique allant de 1986 à 2003, ont
prouvé que les régimes en place en 1988-1989 et ceux des
périodes 1991-1993 et 2000-2003 étaient autocratiques alors
qu'ils se sont révélés, en 1990, démocratiques
ainsi qu'à la période 1994-1998. Les années 1986-1987 et
1997 représentaient des périodes transitoires.
La mauvaise gouvernance en Haïti est du ressort d'autres
indicateurs comme la corruption et le délai imparti pour enregistrer et
incorporer une nouvelle entreprise dans l'économie.
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