Résumé
Cette étude vise à évaluer la
compatibilité des mesures de politique économiques du Cameroun
avec la spécificité de son environnement de l'investissement
compte tenue de la vision de développement à moyen et long terme.
Pour y parvenir, nous avons eu recours aux données primaires
collectées auprès des responsables d'entreprises et des
données secondaires sur les indicateurs macroéconomiques issues
des bases de données et celles des rapports spécialisés
sur les questions d'environnement de l'investissement sur la période
2009-2013. Les données recueillies ont été traitées
à l'aide de la statistique descriptive et présentées sous
forme de tableaux analytiques, de graphiques et de diagrammes afin de mieux
affiner nos analyses. Les résultats obtenus mettent en évidence
un effet mitigé de la politique économique telle que
définie par le Document de Stratégie pour la Croissance et
l'Emploi sur l'environnement de l'investissement. Ce qui nous a amené
à formuler de nombreuses recommandations pour insuffler une nouvelle
dynamique aux diverses mesures d'amélioration de l'environnement de
l'investissement.
Mots clés : environnement,
investissement, politique économique.
Abstract
This study aims to assess the compatibility of Cameroon's
economic policy measures with the specificity of its investment environment
held account of the development in the medium and long term vision. To achieve
this, we used primary data collected from business leaders and secondary data
on macroeconomic indicators from databases and those specialized investment
reports of environmental issues in the period 2009-2013. The data collected
were processed using descriptive statistics and presented in the form of
analytical tables, charts and graphs to better refine our analysis. The results
show a mixed effect of such an economic policy defined by the Strategy Document
for Growth and Jobs on the investment environment. What brought us to formulate
a number of recommendations for a new dynamic to the various environmental
improvement measures of investment.
Keywords: environment, investment, economic
policy
Introduction
L'économie camerounaise a connu une croissance
soutenue, de 5% en moyenne, jusqu'en 1978, grâce aux exportations
agricoles. La découverte du pétrole en 1978 a permis
d'accélérer cette croissance à 7% jusqu'au milieu des
années 80. Sous les effets conjugués de la baisse tendancielle de
la production pétrolière, de la chute des prix des principaux
produits d'exportation et d'une appréciation d'environ 40% du taux de
change effectif réel du franc CFA, l'économie camerounaise a
connu la crise sur la période 1986-1993. Il en a résulté
une chute du PIB réel de 1/3, une chute du PIB réel par habitant
de plus de 50%, la rupture des équilibres macro-économiques et le
recours à l'endettement extérieur.
Pour renverser cette tendance, les autorités ont mis en
oeuvre, à partir de 1987, des mesures internes de réduction des
dépenses de l'Etat, et des réformes économiques soutenues
par la Communauté internationale. Ces programmes étaient
principalement basés sur des politiques de : (i) réduction des
déficits budgétaires par l'augmentation du taux d'imposition, la
réduction de la masse salariale et des subventions aux entreprises
publiques ; (ii) restauration de la compétitivité externe
centrée sur la réduction des coûts des facteurs ; et (iii)
restructuration des entreprises publiques. Toutefois, en l'absence d'un
ajustement monétaire, les résultats enregistrés par ces
programmes sont restés très limités.
Suite de la dévaluation du franc CFA, en janvier 1994,
deux programmes de réformes soutenus par le FMI entre 1994 et 1996 n'ont
pas atteint leurs objectifs, notamment de rétablissement de
l'équilibre des finances publiques. Ce n'est qu'en 1997 que le
Gouvernement s'est résolu à mettre en oeuvre des réformes
plus importantes avec l'élaboration d'un programme économique et
financier à moyen terme (1997/1998 - 1999/2000), appuyé par une
FASR du FMI (devenue FRPC en novembre 1999), un crédit d'ajustement
structurel (CAS III) de la Banque mondiale et le PAS II du FAD. Ce programme a
été exécuté de manière satisfaisante et a
permis à l'économie camerounaise de renouer avec la
croissance.
En août 2000, un document intérimaire de
Stratégie de réduction de la pauvreté (DSRPi) a
été finalisé par le Gouvernement. Le DRSPi a permis au
pays d'atteindre le point de décision de l'initiative PPTE en octobre
2000. En avril 2003, le Cameroun a adopté un DSRP complet qui
présentait la vision et les actions prioritaires du gouvernement pour
lutter contre la pauvreté dans l'optique des Objectifs de
développement du millénaire (ODM) fixés pour 2015. Le
cadre stratégique du DSRP reposait sur sept piliers : i) la promotion
d'un cadre macroéconomique stable et de nature à renforcer la
croissance ; ii) la diversification de l'économie pour conforter la
croissance ; iii) l'octroi de moyens d'agir au secteur privé pour en
faire le principal moteur de la croissance et un partenaire dans la prestation
des services sociaux ; iv) le développement des infrastructures de base
et la mise en valeur des ressources naturelles d'une manière
écologiquement durable ; v) l'accélération de
l'intégration régionale dans le cadre de la Communauté
économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) ; vi) le
renforcement de la valorisation des ressources humaines et le soutien aux
services sociaux ; et vii) l'amélioration de la gouvernance, notamment
dans l'administration publique et le système juridique et judiciaire.
Malheureusement les résultats escomptés en termes de croissance
sont restés en dessous des performances envisagés par les
autorités au cours de la période de mise en oeuvre. En effet, les
taux de croissance sont restés en dessous de 4% en ; et le taux de
pauvreté est resté quasiment stable, soit 39,9% en 2007
d'après la troisième enquête camerounaise auprès des
ménages (ECAM III).
Confronté à la difficulté de se doter
d'un secteur industriel compétitif, en raison notamment de sa mauvaise
insertion dans l'économie mondiale et de la faiblesse des
capacités opérationnelles au niveau national, le Cameroun s'est
doté d'une vision à long terme. La Vision du Cameroun à
l'horizon 30-35 qui s'appuie sur les résultats des études
rétrospectives, le recensement des besoins et aspirations des
populations et les ambitions des politiques voudrait faire du pays une
économie émergente. Pour parvenir aux résultats
escomptés, un ensemble de stratégies globales
d'opérationnalisation de la vision est envisagé. Ainsi, pour la
première décade de la mise en oeuvre de la vision, la
stratégie vise à jeter les bases d'une croissance forte
grâce à d'importants investissements dans les infrastructures et
à la modernisation rapide de l'appareil de production, en accompagnant
cet effort d'une amélioration significative de l'environnement des
investissements et de la gouvernance ainsi que d'une volonté
affirmée de donner à cette croissance un contenu riche en
emplois.
La mise en oeuvre de cette stratégie, consignée
dans le document stratégique pour la croissance et l'emploi,
nécessite la mobilisation d'un important volume d'investissement. Et
lorsqu'on sait que les ressources de l'Etat sont limitées, il apparait
nécessaire de mobiliser des investissements privés(nationaux ou
internationaux). D'ailleurs dans son discours de prestation de serment à
l'assemblée nationale le 03 novembre 2011, le Président de la
République du Cameroun disait : « (...) Me
demanderez-vous, comment financer des investissements aussi
considérables ? Il sera en priorité fait appel aux investisseurs
privés nationaux et étrangers (...) ». Mais seulement
la décision d'investir d'un agent économique est
influencée par un ensemble de facteurs.
Cependant, l'investisseur au Cameroun, fait face à de
multiples contraintes qui freinent énormément le
développement de ses activités. De nombreux rapports et
études indiquent que le Cameroun n'est pas attractif aux investissements
privés en dépit de ses atouts considérables. Les
réformes engagées jusqu'à présent, n'ont pas permis
aux investisseurs privés de générer des ressources
suffisantes pouvant induire une croissance économique réelle. Au
cours de la période 2008-2014,la croissance du PIB a reposé sur
un taux d'investissement de l'ordre de 19 % en moyenne, dont 2,3% pour le
secteur public et 16,7% pour le secteur privé alors que les
prévisions pour l'émergence ciblent un taux d'investissement de
l'ordre de 25% à 30% (comptes nationaux/INS). De plus, on observe
toujours une dégradation des indicateurs de référence
mondiale en matière d'évaluation de l'environnement des
investissements. Ainsi les institutions spécialisées du
benchmarking international à l'instar du World Economic Forum dans le
cadre du Global Competitiveness and Benchmarking Network produit un rapport
annuel sur la compétitivité des économies à
mobiliser les investissements et de la Banque Mondiale dans le cadre du Doing
Business ont positionné le Cameroun dans les plus mauvais rangs ces
dernières années. Les préoccupations spécifiques
qui découlent de cette problématique conduisent aux questions ci-
après :
Ø Quelle appréciation, les opérateurs
économiques, se font-ils de l'environnement de l'investissement au
Cameroun ?
Ø Au regard des positions occupées par le
Cameroun dans les différents classements des rapports « Global
Competitiveness Report » et « Doing Business »,
quelle est l'influence de la politique économique du Cameroun sur
l'environnement de l'investissement ?
I. Objectif de l'étude
L'objectif principal de cette étude est
d'évaluer la compatibilité des mesures de politique
économiques du Cameroun avec la spécificité de son
environnement de l'investissement compte tenue de la vision de
développement à moyen et long terme. Spécifiquement, il
s'agira pour nous d'évaluer la perception de l'environnement de
l'investissement par les acteurs économiques au Cameroun et d'analyser
la pertinence des mesures de politique économique camerounaise sur ce
dernier.
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