FSE
N° d'ordre:14
Année: 2015 -2016
UNIVERSITE MARIEN NGOUABI FACULTE DE SCIENCES
ECONOMIQUES
MEMOIRE
Pour l'obtention du diplôme de Master
Mention: Economie de l'Entreprise
Parcours: Recherche
Option/Spécialité: Economie et
Organisation de l'Entreprise
Présenté et soutenu
publiquement Par NASSOUR Ali Titulaire de La Licence
d'Economie Fondamentale Année académique 2010-2011
Les strategies d'implantation des firmes
multinationales chinoises au Tchad et leur contribution à la
diversification de l'économie tchadienne.
Directeur de mémoire
Bethuel MAKOSSO, Maître de
Conférences (CAMES), Chef de département des Masters à la
faculté de Sciences Economiques de l'Université Marien Ngouabi,
République du Congo.
Jury
Président: Bethuel MAKOSSO,
Maître de Conférences (CAMES), Université Marien Ngouabi
(Congo)
Rapporteur: JJ KIMO, Maître-assistant
(CAMES), Université Marien Ngouabi (Congo) Membre: T. DZAKA
Kikouta, Maître-assistant (CAMES) HDR, Université Marien
Ngouabi (Congo)
DEDICACE
La vie, elle est parfois dure de par ce qu'elle réserve
à l'être humain le bonheur et le malheur, la douleur et
l'apaisement, le succès et l'échec. Ce sont les vicissitudes qui
s'invitent chez l'homme au quotidien. Qu'il me soit permis, ce jour, de
dédier cette oeuvre en mémoire de ma feue mère FATOUMA
Hassane. Tu gouverneras mes pas, m'élevas, m'éduquas et tu te
dévouas si merveilleusement bien que presque rien ne me manquât.
Mais contre toute attente, tu disparus. Ton décès m'a
été effroyablement fatal et me chagrine. Repose- toi en paix.
II
REMERCIEMENTS
La rédaction d'un travail de recherche ne saurait
être l'oeuvre exclusive d'une seule personne. Il serait trop
prétentieux d'affirmer que c'est sans le concours d'autres personnes que
nous sommes venu à bout de ce travail.
Nous adressons nos plus profonds remerciements à notre
directeur de mémoire, Professeur Bethuel MAKOSSO, pour la confiance
qu'il a su nous accorder, pour ses conseils avisés et ses
recommandations décisives. Nous le remercions tout
particulièrement pour la disponibilité et le soutien dont il a
toujours su faire preuve à notre égard. Nous lui exprimons toute
notre gratitude, pour l'affection et la gentillesse qu'il nous a toujours
témoignées. Nous saluons aussi sa souplesse, son ouverture
d'esprit et sa bonne humeur qui ont su nous laisser une large marge de
liberté pour mener à bien ce travail de recherche.
Nous tenons à remercier le Professeur NDINGA Mathias,
le Doyen de la Faculté des Sciences Economiques, principal artisan dans
le suivi dont nous sommes l'objet, ainsi que tous les enseignants de
l'Université Marien Ngouabi et ceux de la faculté des Sciences
Economiques en particulier à qui nous devons cette formation
universitaire.
Nous remercions également monsieur ABBA DANNA, le
Recteur de l'Université Virtuelle de Ndjamena, monsieur ALI Abderaman
Haggar, le Recteur de l'Université de Ndjamena, AWAT Hissein et TOINAR
Anatole respectivement Doyen de la Facultés des Sciences Economiques et
Gestion de l'Université de Ndjamena et Doyen de la faculté des
Sciences Economiques et Gestion de l'Université de Sarh, DJIBRINE Hassan
Lawan et Mahamat MOUTA tous deux enseignants chercheurs à
l'Université de N'djamena d'avoir consacré une partie de leur
temps durant notre parcours permettant ainsi la réalisation de ce
travail.
Nos remerciements vont principalement à : notre
père Ali Badradine, nos oncles ZAKARIA Issa, ADAM Badradine, MAHAMAT
Hassane et MAHAMAT Aly El-hadj Cassius, nos Frères et Soeurs et à
tout le reste de la famille qui, a de degré divers m'ont
été d'un confort inestimable.
Nous remercions vivement ADAM Abakar, MAHAMAT Abdelkarim,
MAHAMAT Abderaman, SENOUSSI Ahmat, TAHIR Adam, ANNOUR Nadjal, AHMAT Allam,
IBRAHIM Yacoup, MAHAMAT Abakar, ADAM Defallah, DJIDDO Abdoulaye, DJIDDO Ahmat,
AHMAT Assil, NGARO Ronaîmou, IDRISS Oumar, Fred MOUKALA, Josette BOUMA,
Trinité CHARLOTTE, OKANDZE Elenga, Belengar CALEB , MBAI Doiletta et
NGOLO Jean Claude pour leur aide dans la compréhension et la
rédaction de ce mémoire.
Nous ne saurons oublier d'exprimer notre vive gratitude aux
diplomates de l'Ambassade de la République du Tchad près la
République du Congo pour la gratuité des actes administratifs
dont nous, étudiants tchadiens, continuons à être les
bénéficiaires. La communauté tchadienne à
Brazzaville n'était pas du reste: elle s'est manifestée à
notre égard par divers apports positifs. Merci lui suffirait- il ? Et
vous étudiants tchadiens en République
III
du Congo et vous ceux de ma promotion qui m'avez
témoigné votre gentillesse, votre sagesse et quelques rires
taquins parfois, je m'en souviendrais.
IV
SIGLES ET ABREVIATIONS
ADF : Agence Française de Développement
APD : Aide Publique au Développement
ASS : Afrique au Sud du Sahara
BAD : Banque Africaine de Développement
BCE : Banque Centrale Européenne
BEAC : Banque des États de l'Afrique Centrale
CACF : China Africa coopération forum
CDMA : Code Division Multiple Access
CEMAC : Communauté Economique et Monétaire des
Etats de l'Afrique Centrale
CFA : Sigle de franc de la Communauté Financière
Africaine
CHECEC : Société Nationale des Travaux de
Construction du Henan de Chine
CNOOC : China National Offshore Oil Corporation
CNPC : China National Petroleum Corporation
CNUCED : Conférence des Nations Unies pour le Commerce
et le Développement
COVEC : Société d'Ingénierie d'Outre-mer
de Chine
CWE : Compagnie Internationale des Eaux et
d'Electricité
DTS : Droit des Tirages Spéciaux
Exim Bank : China Export-Import Bank
FEC : Facilité Elargie du Crédit
FMI : Fonds Monétaire International
FMN : Firme Multinationale
IDE : Investissement Direct Etranger
INSEED : Institut National de la Statistique, des Etudes
Economiques et Démographiques
JV : Joint-Venture
MOFCOM : Ministère du Commerce Chinois
NEPAD : Nouveau Partenariat Pour le Développement de
l'Afrique
OCDE : Organisation pour la Coopération et de
Développement Economique
V
OIT : Organisation Internationale du Travail
OMC : Organisation Mondiale du Commerce
OPEP : Organisation des Pays Exportateurs du Pétrole
PAS : Programme d'Ajustement Structurel
PCC : Parti Communiste Chinois
PED : Pays en Voie de Développement
PIB/hab : Produit Intérieur Brut par Habitant
PIB : Produit Intérieur Brut
PME : Petite et Moyenne Entreprise
PNSA : Programme National de Sécurité
Alimentaire
PNUD : Programme des Nations-Unies pour le
développement
PPTE : Pays Pauvres Très Endettés
R&D : Recherche Développement
RDC : République Démocratique du Congo
RPC : République Populaire de Chine
SHT : Société des Hydrocarbures du Tchad
SINOPC : China Petroleum and Chemical Corporation
SNE : Société Nationale d'Electricité
SRN : Société de Raffinage de Ndjamena
SSI : Sonangol Sinopec International
STN : Société Transnationale
UMAC : Union Monétaire d'Afrique Centrale
UMOA : Union Monétaire Ouest Afrique
USD : United States Dollar
ZES : Zone Economique Spéciale
ZTE : Zhongxing Telecom
VI
SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE : LES ANALYSES THEORIQUES DE L'IMPLANTATION
DES
FIRMES MULTINATIONALES CHINOISES .6
CHAPITRE I : L'aperçu général sur la
firme multinationale 8
Section 1 : Le fondement théorique de l'implantation de
firme multinationale 8
Section 2 : Les formes et organisations de la firme
multinationale .17
CHAPITRE II : Les stratégies d'implantation des firmes
multinationales chinoises au
Tchad 27
Section 1 : Le fondement de la politique chinoise au Tchad
27
Section 2 : Les modes et stratégies mis en place par la
Chine pour accompagner ses
entreprises à investir à l'étranger
.36
DEUXIEME PARTIE : LES EFFETS DES STRATEGIES D'IMPLANTATION
DES
FIRMES MULTINATIONALES CHINOISES SUR LA DIVERSIFICATION DE
L'ECONOMIE TCHADIENNE 46
CHAPITRE III : Les investissements directs étrangers
chinois au Tchad 48
Section 1 : Les politiques d'attractivité
d'investissements directs étrangers au
Tchad 48
Section 2 : Les investissements chinois au Tchad 56
CHAPITRE IV : L'apport des investissements directs
étrangers chinois à la diversification de
l'économie tchadienne 65
Section 1 : L'économie tchadienne avant et après
l'exploitation du pétrole 65
Section 2 : Les effets des investissements directs
étrangers sur la diversification de l'économie
tchadienne 74
CONCLUSION 84
1
INTRODUCTION
Depuis quelques années, le continent africain a
renforcé ses relations économiques avec les pays
émergents, spécialement la Chine. Cette dernière a accru
ses effets de financement et d'investissement extérieur, dans une
stratégie d'extension de l'activité de ses entreprises au reste
du monde (Going Global Strategy). La conquête de l'Afrique, riche en
matières premières (pétrole, or, cobalt, bois, uranium)
constitue en ce début du XXIe siècle, un enjeu majeur.
Quand la Chine s'éveillera, le monde tremblera, cette prophétie
de Napoléon Bonaparte se réalise aujourd'hui1. En
effet, la Chine est à présent une puissance économique
redoutable. L'un des aspects les plus remarquables du changement de
l'économie chinoise est son ouverture vers les marchés
extérieurs 2 . Désormais la Chine, dotée d'une
capacité économique importante et d'une ambition politique de
premier plan, est devenue un pays incontournable dans la géopolitique
mondiale. Vouloir l'arrêter semble être une mission impossible.
L'ignorer serait encore plus grave, « c'est-à-dire ce serait
faire preuve d'une dangereuse cécité politique
»3.
Depuis les réformes de Deng Xiaoping4 avec
son fameux mot d'ordre " Enrichissez-vous ! " la Chine est ouverte aujourd'hui
sur le monde, même s'il existe des poches d'exercice de réforme
monolithique. L'ère de la politique néolibérale et la
tendance à une politique de consommation ont donné un coup de
fouet à l'économie. Ainsi, l'économie chinoise est
passée d'une économie planifiée de type soviétique
à un socialisme de marché selon les spécificités
chinoises, où le Parti Communiste Chinois garde son contrôle sur
l'économie5. Après une période de relatif repli
entre 1980 à 1990, la Chine fait un retour plus remarquable: c'est une
nouvelle République Populaire de Chine très active qu'on
rencontre en Afrique. Une offensive économique et commerciale
s'accompagnant d'une intense activité diplomatique vit le jour avec
l'arrivée au pouvoir en 2003 du Président Hu Jintao.
Désormais la politique chinoise en Afrique se particularise par son
pragmatisme. Le modèle chinois du « win win
»6, ce nouveau jeu économique où selon
Pékin il n'y aurait a priori aucun partenaire perdant.
1Empereur, général, militaire et
homme d'Etat français (1769-1821), cité par Amadou DIALLO,
(2012), Investir en Afrique le point de vue des entreprises chinoises :
les cas du Mali, thèse de doctorat en sciences de gestion,
Université de Peau et des Pays de l'Adour, France, p. 2.
2 Idem.
3Gaye Adama, cité par : Fode Sire DIABY,
(2014), Les stratégies des entreprises chinoises en Afrique :
quels objectifs, quelle coopération, thèse de doctorat
en sciences économiques, Université de Nice Sophia Antipolis,
France, p. 11.
4Homme d'Etat Chef suprême de la Chine.
Ancien Secrétaire Général du Parti Communiste Chinois
(PCC) de 1956 à 1967. Dirigeant de la République Populaire de
Chine de (1978-1992), cité par Amadou DIALLO. (2012), op. Cit., p. 2.
5 Idem.
6Termes anglais désignant «
gagnant-gagnant» est un accord par lequel chaque partenaire se
préoccupe aussi de l'intérêt de son partenaire dans le but
de maximiser son propre intérêt. Il ne s'agit pas de rechercher le
meilleur compromis de partage des gains, mais d'augmenter les gains de chaque
partenaire, cité par Amadou DIALLO. (2012), op. Cit., p. 4.
2
Dans cette optique il y a eu émergence de plusieurs
départements chargés de l'Afrique avec l'organisation des grandes
rencontres Chine-Afrique7.
Depuis la fin des années 1990, la Chine et le continent
africain ont consolidé leurs relations dans plusieurs domaines dont
notamment l'aide au développement, les investissements directs, la
coopération économique et technique, puis les échanges
universitaires. En 2000, l'organisation périodique des sommets
sino-africains allant jusqu'à rassembler plus de 40 chefs d'État
est devenue la pierre angulaire de l'accroissement de la coopération
entre la Chine et les pays d'Afrique8. Au sommet sino-africain de
2006 qui se tenait à Beijing, Wen Jiabao, le Premier ministre chinois,
s'est engagé à ce que les échanges économiques
s'élèvent à plus de 100 milliards de dollars d'ici
20109. La Chine gagne donc de plus en plus d'influence en Afrique.
C'est ainsi qu'en 2005, elle est devenue le troisième partenaire
économique du continent africain après les États-Unis, la
France, mais devant le Royaume-Uni. En 2006, les échanges sino-africains
ont atteint le plateau record des 55 milliards de dollars10. Les
États africains apparaissent de plus en plus désenchantés
par le modèle occidental propre au consensus de Washington qui associe
le développement économique avec la démocratie, la
transparence économique et le respect des droits de l'homme. Plusieurs
auteurs s'entendent pour dire que les programmes d'ajustement structurel
imposés par les institutions de Bretton Woods ont entraîné
la plupart des États en développement dans une véritable
mondialisation de la pauvreté en limitant le rôle de l'État
et en l'empêchant de veiller à la justice sociale. De nombreux
États africains sont désormais en quête de repères
et de modèles alternatifs. Il va de soi que la recette chinoise devient
alors attrayante. D'autant plus que les Chinois et les Africains se sentent
dorénavant liés par une communauté de destin, ceux-ci et
ceux-là ayant tous été, au cours de leurs histoires
récentes, des victimes de certaines occurrences de l'impérialisme
et du colonialisme dont le Tchad faisait partie.
Le Tchad, pays enclavé de l'Afrique Centrale, fait
partie des Etats les plus vastes de l'Afrique avec une superficie de 1284000
km2 et une population qui se chiffre à environ 11.175915
d'habitants en 200911 dont près de la moitié a moins
de 14ans. L'espérance de vie à la naissance est de 52 ans pour
les femmes et 49 ans pour les hommes. La croissance économique a
toujours été relativement faible depuis l'indépendance.
Entre les années 1995
7 Idem.
8 The Economist. Asia: On Safari; Chinese Summitry.
4novembre 2006
9 Marks, Stephen. Introduction in African Perspectives
on China in Africa.Pambazuka: Nairobi. 2007. p. 2.
10 Servant, Jean-Christophe. La Chine à
l'assaut de marché africain. Le Monde diplomatique. Mai
2005.
11 Résultat du recensement
général de la population et d'habitat2(RGPH2) du Tchad, septembre
2009.
3
et 2002, la performance économique est
significativement meilleure par rapport aux décennies
antérieures. Il partage ses frontières avec six autres Etats
(Soudan, Niger, Nigeria, Lybie, Cameroun et Centrafrique). Ne possédant
aucune façade maritime, il est dépendant des ports des pays de la
sous-région (du Benin et du Cameroun). En effet, c'est dans cette
optique que la nouvelle coopération sino-africaine s'est établie
avec une présence croissante et massive des grandes entreprises
chinoises d'Etat. Ces entreprises sont en concurrence avec les
opérateurs occidentaux et dans une moindre mesure avec les entreprises
africaines au niveau du continent. Elles sont considérées comme
des concurrentes et partenaires potentiels capables d'apporter leur
savoir-faire, leurs moyens financiers et leurs technologies qui font
défaut aux entreprises africaines. Cependant, le réchauffement de
relation diplomatique entre le Tchad et la Chine s'inscrit dans le cadre de la
politique africaine de la Chine, lancée par son gouvernement dans les
années 2000.
Aussi, depuis quelques années on assiste à des
investissements directs étrangers d'origine chinoise de plus en plus
importants dans ce pays. La question de l'implantation des firmes
multinationales chinoises en Afrique fait l'objet de plusieurs contributions
dans la littérature. Dzaka-Kikouta (2012) en étudiant le
rôle des joint-ventures et alliances stratégiques dans
l'internationalisation des multinationales chinoises, a démontré
que les joint-ventures sino-occidentales ont aidé les firmes chinoises
à améliorer leurs capacités techniques et
managériales tant sur le marché domestique que sur les
marchés étrangers. Les joint-ventures et autres alliances
stratégiques sont devenus un vecteur de réalisation des IDE par
les multinationales chinoises en Afrique Centrale. Pour Richet (2013)
l'internationalisation des firmes multinationales relève d'une
stratégie qui leur est propre et s'inscrit dans un projet d'accès
aux ressources; elle est aussi motivée par les conditions de la
concurrence domestique. Toutefois, l'articulation entre stratégie
domestique et internationale est encore problématique. Beaucoup de
firmes chinoises s'internationalisent pour acquérir ce qu'elles ne
trouvent pas chez elles ou avec de grandes difficultés. Seules quelques
grandes firmes chinoises sont aujourd'hui capables de développer des
stratégies similaires à celles que mettent en oeuvre les grandes
firmes multinationales occidentales.
Dans une étude comparative, Gugler et Boie (2015) ont
montré les facteurs expliquant les choix d'IDE chinois aux
critères de choix classiques des multinationales occidentales. Ils
soulignent que les principales motivations des firmes multinationales chinoises
sont dérivées de leurs opérations dans une économie
de marché internationale capitaliste. Les motivations traditionnelles de
l'internationalisation des entreprises captent relativement bien le
processus
4
d'expansion à l'étranger. Ces entreprises
présentent des caractéristiques particulières rendant ce
phénomène spécial. Toutefois, la différence
fondamentale qui existe entre les multinationales chinoises et occidentales
réside dans le choix et les objectifs d'implantation en Afrique. Dans la
même perspective, Tanguy Struye (2009) a montré dans un
célèbre article intitulé "l'offensive chinoise en Afrique"
que l'approche de la Chine envers l'Afrique est multiple; elle vise
principalement les matières premières (pétrole, gaz et le
gisement minier) et procure aussi des aides publiques au développement
aux pays africains. Elle a aussi créé un fonds de
développement pour accompagner les entreprises chinoises et leurs
partenaires (joint-ventures) étrangers.
Par contre, Mainguy et Rugraff (2012) estiment que compte tenu
de manque de fiabilité des données sur les IDE chinois en Afrique
subsaharienne, les études macroéconomiques d'impact des IDE sur
la croissance, l'emploi, les externalités sont aujourd'hui hors de
portée. Une meilleure connaissance de l'impact des IDE chinois est la
condition sine qua non pour que les gouvernements africains puissent
développer des politiques de guidage et d'accompagnement qui maximisent
les effets positifs en termes d'effet d'entraînement pour les firmes
locales, de création d'emplois ou encore de recettes fiscales, et
minimisent les impacts négatifs. La littérature empirique sur
l'impact des IDE dans les pays moins avancés montre en effet, que les
IDE n'engendrent pas automatiquement la croissance, ne réduisent pas
mécaniquement la pauvreté et peuvent ne pas entraîner le
développement des pays d'accueil (Rugraff et al., 2009 ; Mainguy, 2011).
En effet, Hellendorff (2010) affirme que la Chine a trouvé en Afrique
des éléments indispensables à sa croissance
économique, telle qu'imaginée dans sa politique de
développement harmonieux: des ressources naturelles, des marchés
d'exportation, de banc d'essai pour ses entreprises et sa nouvelle diplomatie
de puissance, des alliés nombreux dans l'arène internationale et
des opportunités de renforcer son statut de puissance mondiale.
Par contre, Diallo (2012) souligne que les stratégies
de pénétrations des entreprises chinoises en Afrique visent
beaucoup plus la coopération, l'aide au développement et les
opportunités d'investissement. La connaissance du processus
d'implantation est un atout non négligeable car elle peut
procéder, en amont à certaines corrections limitant les
problèmes de flexibilité et de crédibilité en aval
vis-à-vis de leurs concurrents. Concernant les effets des IDE chinois en
Afrique, on peut citer la contribution de Diaby (2014) qui, dans une
étude basée sur des données portant 38 pays africains sur
la période de 2003à 2011, a montré que les IDE chinois
n'ont pas d'effet significatif sur le PIB par tête, notamment à
cause de la
5
politique des entreprises chinoises en Afrique qui encourage
les investissements dans les secteurs qui créent moins d'emploi local et
qui ne permettent pas de vrai transfert de technologie. En effet, la
présence massive des entreprises chinoises en Afrique n'est pas
génératrice de croissance durable et des richesses en raison des
procédés généralement mis en place dans les
investissements. En réalité, la Chine investit dans les secteurs
comme l'exploitation des matières premières, qui créent
moins d'emplois en Afrique. Sur les grands chantiers dans le BTP, la
main-d'oeuvre qualifiée est chinoise et les emplois se font donc au
détriment des Africains. Et enfin, la politique des subventions mise en
place par Pékin peut occasionner le ré-endettement de certains
pays africains qui ont déjà bénéficié d'une
annulation partielle ou totale de leur dette.
Aussi dans cette recherche, notre problématique est
axée autour des questions de recherche suivante: Quelles sont les
stratégies d'implantation adoptées par les firmes chinoises au
Tchad ? et quels sont les effets de ces stratégies sur la
diversification de l'économie Tchadienne ? Pour répondre à
cette problématique, nous avons formulé des hypothèses de
travail construites autour des idées suivantes:
H1 : les formes d'implantation des firmes multinationales
chinoises fondées sur la coopération et l'exploitation
d'opportunité d'investissement ne contribuent pas à la
diversification de l'économie tchadienne ;
H2 : les stratégies adoptées par les firmes
multinationales chinoises visent les ressources naturelles et les
opportunités d'investissement.
L'objectif général de cette recherche est
d'analyser les effets des stratégies d'implantation des firmes
multinationales chinoises sur la diversification de l'économie
tchadienne. Comme objectif spécifique, cette recherche vise à
analyser les stratégies d'implantation adoptées par les
multinationales chinoises au Tchad.
L'approche méthodologique que nous avons adoptée
dans cette recherche est à la fois descriptive et analytique. En effet,
le traitement des questions posées dans cette recherche s'est fait au
moyen d'une analyse, à la lumière de la théorie
économique, des attitudes liées à l'implantation des
firmes chinoises au Tchad et leur contribution à la diversification de
l'économie tchadienne.
Ce travail est structuré en deux parties. La
première est consacrée aux analyses théoriques de
l'implantation des firmes multinationales chinoises au Tchad et la seconde
traite des effets des stratégies d'implantation des firmes
multinationales chinoises sur la diversification de l'économie
tchadienne.
6
Première partie : Les analyses
théoriques de l'implantation des firmes multinationales (FMN) chinoises
au Tchad
7
L'internationalisation des firmes multinationales chinoises
est un phénomène nouveau, la nature et l'intensité avec
lesquelles ces entreprises se développent constituent aujourd'hui un
véritable enjeu de recherche. Les firmes multinationales chinoises ont
connu une très forte expansion cette dernière décennie
grâce aux ressources accumulées d'une part et par la
nécessité de recherche des approvisionnements en matières
premières afin de maintenir une croissance en pleine évolution
d'autre part.
Ces firmes sont pour la plupart des grandes entreprises d'Etat
et elles se développent dans les secteurs tels que les manufactures, les
services, les finances, bref en ciblant certains secteurs juteux de
l'économie. Face à la concurrence des grands groupes
multinationaux occidentaux, elles ont su développer des
stratégies particulières qui lient l'aide publique au
développement, le commerce et l'investissement direct
étranger.
Depuis quelques années, plusieurs chercheurs ont
développé des théories qui expliquent le
déploiement de leurs activités, selon quelles modalités
elles s'implantent et quels sont les facteurs qui les attirent vers
l'extérieur, etc. Ce qui nous amènera à présenter
dans cette partie d'une part l'aperçu général sur la firme
multinationale (Chapitre I) et d'autre part, les stratégies
d'implantation des firmes multinationales chinoises au Tchad (Chapitre II).
8
CHAPITRE I : L'APERCU GENERAL SUR LA FIRME
MULTINATIONALE (FMN)
Les FMN sont aujourd'hui les vecteurs les plus structurants
des processus d'intégration, de transformation de l'économie et
de la société mondiale. Elles sont devenues un rouage si
important de l'économie mondiale, qu'elles peuvent
considérablement peser sur le fonctionnement des différents
éléments de l'ordre économique international, à
savoir, le système monétaire, le système commercial, la
répartition internationale des revenus (notamment, entre pays
industrialisés et pays en développement), voire la croissance
économique et la stabilité des prix à l'échelon
mondial12. Dans ce chapitre, nous tenterons de faire une
présentation succincte des approches théoriques en
économie internationale s'intéressant à la
multinationalisation des entreprises. La première section traitera les
théories expliquant l'apparition de la FMN, tandis que la seconde
section abordera la question des formes d'implantation des FMN.
Section I : Le fondement théorique de
l'implantation de firme multinationale (FMN)
L'analyse de l'internationalisation des activités de
l'innovation est récente, dans la mesure où la naissance de la
théorie de firme multinationale dans la théorie économique
est elle-même relativement très récente. L'étude des
firmes multinationales relève d'une discipline que l'on peut qualifier
d'hybride, à savoir l'économie industrielle. Son apparition
remonte aux années 50, dans un contexte de prédominance
d'oligopoles nationaux, à ce stade, Norel (1951) les qualifie de firmes
primaires dont la principale stratégie est l'approvisionnement par un
processus d'intégration verticale. Les investissements étrangers
consistaient à s'implanter dans une zone ayant les matières
premières nécessaires à leurs
activités.13 En effet, ce n'est qu'à partir des
années 60 que la firme multidomestique apparaît, notamment, par
l'implantation des filiales-relais qui étaient constituées dans
l'objectif de répondre à une demande étrangère.
Ainsi, donc la véritable naissance de la théorie des FMN fait son
apparition avec en particulier, la thèse de Hymer (1960) dont la
publication (posthume) n'interviendra qu'en 197614. Cette
contribution originale présentait deux axes essentiels de recherche:
l'analyse des avantages monopolistiques qui par nature, ne peuvent être
exploités sur des marchés étrangers que par le biais d'une
présence directe de la firme, c'est-à-dire par le biais de l'IDE
et l'analyse de l'implantation à l'étranger comme le moyen,
12 FRED Bergsten et al., (1983), Les
multinationales aujourd'hui, Paris, Ed. Economica, pp. 305-340.
13GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., p.11.
14CHRISTOPHE Sierra. (2003), Firmes
multinationales et dynamique de création technologique : des coûts
de transaction aux coûts de coordination, thèse de
doctorat en sciences de gestion, Université de Limoges, France, pp.
10-11.
9
pour une firme de s'affranchir de la concurrence
oligopolistique prévalant sur son marché domestique.
L'objectif de cette section est de présenter les
définitions et théories (paragraphe1) ainsi que les
déterminants expliquant l'apparition de la FMN (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les définitions et théories
de la firme multinationale (FMN)
L'évolution des technologies et l'intensification de la
concurrence basée sur l'innovation ainsi que l'augmentation du niveau de
la demande et de l'offre sur les marchés nationaux et internationaux ont
conduit les FMN à se transformer dans les années 80 et 90. Par
conséquent, plusieurs firmes multinationales sont devenues des
réseaux de firmes et des firmes globales qui se fondent sur des
stratégies d'innovation ou de flexibilité, laissant pour le
compte les stratégies conglomèrales au profit des réseaux
transnationaux plus cohérents. A partir de ces évolutions,
plusieurs auteurs ont développé les théories expliquant le
phénomène de multinationale de la firme. Pour mieux
appréhender la question de multinationalisation de la firme, il est
nécessaire d'aborder d'une part les définitions de la FMN (1-1),
et d'autre part, les théories de la FMN (1-2).
1-1: Les définitions de la firme multinationale
(FMN)
Il n'existe pas de définition unique de la firme
multinationale. Les raisons de cette diversité sont principalement de
deux ordres: l'origine des définitions et la nature des critères
retenus (Andreff, 1987)15. Concernant l'origine des
définitions, on fait remarquer tout d'abord que, les définitions
émanent à la fois de dirigeants, d'organismes internationaux et
d'universitaires (économistes, gestionnaires, juristes). Ensuite, elles
reposent sur des critères divers tels que l'ampleur de l'activité
(taille de l'entreprise), l'existence de filiales à l'étranger,
le nombre de pays d'implantation, le nombre de salariés de
nationalité autre que celle de la maison mère ou encore la
structure organisationnelle adoptée. Certains auteurs
caractérisent ainsi une multinationale par la présence de
filiales de production à l'étranger.
C'est à partir des années 50, avec
l'instauration d'un cadre économique et politique international
favorable aux activités économiques à
l'étranger16, que les chercheurs se sont penchés sur
l'étude de la FMN de manière générale. Ainsi,
Maurice Baye en 1953 définit les
15ISABELLE Martinez. (2011),
L'internationalisation est-elle créatrice de valeur,
22eme congres de L'AFC, May 2001, France. pp.CD-Rom.
<halshs-00584641>, p. 2.
16 DELAPIERRE Michel, MILLELI Christian. (1995),
Les firmes multinationales, Ed Vuibert, pp. 10-50. Cité
par GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., 12.
10
grandes unités interterritoriales comme un ensemble
intégré des organisations de production contrôlées
en divers territoires, par un centre unique de décision17.
Cette définition a été développée ensuite
par Stephen Hymer en 1960, qui s'appuie sur l'importance du contrôle dans
la définition de la firme étrangère à partir de
deux principes pouvant inciter un investisseur à prendre le
contrôle. En premier lieu, l'investisseur doit assurer la
sécurité de son investissement et contrôler l'ensemble du
rendement des capitaux investis, en second lieu, les structures de
compétition entre firmes seront modifiées, les firmes doivent
donc organiser une connivence avec ses filiales étrangères. Ce
qui implique une organisation interne entre filiales en réseau
d'échange international fondé sur une volonté de modifier
à son avantage les conditions de la concurrence internationale au sein
des grands oligopoles18.
En effet, pour que l'investissement à l'étranger
soit possible et rentable, la firme doit posséder un avantage
spécifique sur ses concurrents locaux, et cet avantage trouve sa source
dans les imperfections du marché dont Charles Kindelberger en 1971
distingue trois firmes ayant des activités dans le monde en fonction de
leurs relations avec les pays dans lesquels elles opèrent, ceci en
suivant une classification des entreprises selon qu'elles soient
multinationales, transnationales, internationales ou mondiales19:
- les firmes nationales: ce sont des firmes citoyennes
produisant à l'étranger;
- les sociétés internationales: ce sont des
entreprises qui prennent des décisions avec pour seule finalité
le profit, sans se référer aux législations et politiques
du pays où elles opèrent;
- les firmes multinationales: ce sont des firmes qui
produisent à l'étranger suivant la législation des pays
dans lesquels elles opèrent.
En 1979, Vernon a défini une firme multinationale comme
une entreprise de taille ayant des filiales industrielles dans au moins six
pays. Plus tard, en 1982 Caves considère qu'une multinationale
contrôle et gère une production à l'étranger dans au
moins deux pays20. Les organisations comme l'organisation
internationale du travail (OIT) ou l'organisation pour la coopération et
le développement économique (OCDE), définissent la FMN
comme une entreprise ou d'autres entités établies dans plusieurs
pays et liées de telle façon qu'elles peuvent coordonner leurs
activités de diverses manières. Une ou plusieurs de ces
entités
17 BAYE Maurice. (1987), Relations
économiques internationales, 5éme Edition, Ed DALLOZ, p.
694. Cité par GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., p.12.
18MUCHIELLI Jean louis. (1998),
Multinationales et mondialisation, Paris, Ed DU SEUIL, pp. 17-18.
Cité par GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., p. 13.
19 RAINELLI Michel. (1979), La
multinationalisation des firmes, Paris, Ed ECONOMICA, p. 11.
Cité par GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., p. 15.
20 ISABELLE Martinez. (2011), op. Cit., pp. 3-5.
11
peuvent être en mesure d'exercer une grande influence
sur les activités des autres, mais leur degré d'autonomie au sein
de l'entreprise peut être très variable d'une multinationale
à l'autre. Leur actionnariat peut être privé, public ou
mixte21. La définition de l'OIT se lit comme suit: les
entreprises multinationales comprennent des entreprises, que leur capital soit
public, mixte ou privé, qui possèdent ou contrôlent la
production, la distribution, les services et autres moyens en dehors du pays
où elles ont leur siège. Le degré d'autonomie de chaque
entité par rapport aux autres au sein des entreprises multinationales
est très variable d'une entreprise à l'autre, selon la nature des
liens qui unissent ces entités et leur domaine d'activité et
compte tenu de la grande diversité en matière de forme de
propriété, d'envergure, de nature des activités des
entreprises en question et des lieux où elles opèrent.
On peut définir la multinationalisation des entreprises
comme une facette de leur internationalisation, c'est-à dire de
l'élargissement de leur champ d'activité au-delà du
territoire national. Elle s'effectue d'abord par des IDE (investissements
directs à l'étranger), qui consistent à la création
ou l'achat de sociétés à l'étranger qui deviennent
des filiales de la firme ainsi multinationalisée, dès lors que
leur capital est détenu majoritairement par la FMN. Il peut aussi s'agir
de création d'une joint-venture, c'est-à-dire d'une filiale
commune à deux entreprises de deux nationalités distinctes.
Parfois l'IDE amène l'entreprise initiatrice à transférer
son activité de production du pays d'origine vers un autre pays. On
parle alors de délocalisation. Mais la multinationalisation se
réalise aussi par la mise en place de « réseaux d'alliance
» entre une ou plusieurs entreprises « centre névralgique
» et un ensemble d'entreprises liées à celle(s)-ci par des
contrats (sous-traitance, franchise, partenariat,
coopération...)22. Apres avoir donné la
définition opérationnelle de la FMN, il convient de comprendre sa
raison d'être. En effet, pour investir à l'étranger, une
entreprise est dans l'obligation de déployer d'importants efforts, aussi
bien financiers qu'humains. A ce niveau, les FMN élaborent les plans
à l'échelle mondiale dans le but d'optimiser les avantages
liés à leur mobilité, à la diversité des
pays potentiels à l'implantation.
1-2: Les théories de la firme multinationale
(FMN)
Depuis la mondialisation, les firmes multinationales prennent
de plus en plus d'importance et elles sont devenues un élément
primordial de la stratégie d'internationalisation des
sociétés transnationales. Des chercheurs comme Caves (1971),
21Michèle RIOUX. (2012),
Théories des firmes multinationales et des réseaux
économiques transnationaux, CEIM, pp.
6-10.
22 Idem
12
Dudas (2007), Vernon (1966) ont déjà
proposé des réponses à cette question. Les
différentes réponses traduisent les théories expliquant
l'investissement étranger. Ces théories sont basées sur
différentes approches selon les éléments qui concourent
à la réalisation de l'IDE23. Lors des premières
manifestations de l'internationalisation des firmes domestiques, la
théorie du commerce international n'était pas en mesure de
reconnaître et d'analyser la firme. Pour elle, le marché est
constitué d'individus qui échangent librement et la concurrence,
principe organisateur des échanges, neutralise toutes stratégies
ou tout exercice de pouvoir de la part des agents économiques. La firme
n'existe donc pas comme acteur structurant de l'évolution du
capitalisme.
L'un des premiers auteurs à s'attaquer à ce
problème fut Vernon avec sa théorie de l'échange
international intégrant commerce et IDE (Vernon, 1966)24. Au
moment où Vernon construit son modèle, c'est-à-dire dans
les années 1960, les FMN sont principalement des firmes
américaines qui investissent massivement en Europe. Selon sa
théorie, les FMN américaines détiennent alors un avantage
absolu vis-à-vis des firmes étrangères, ce qui explique,
à la fois, l'accumulation des excédents commerciaux des
États-Unis vis-à-vis de l'Europe et le développement des
flux d'IDE des États-Unis vers l'Europe. Le modèle de Vernon
admet donc l'existence de différentes fonctions de production entre les
entreprises en fonction de leur origine nationale. La théorie de Vernon
(le modèle du cycle du produit) s'articule autour de deux concepts: au
niveau microéconomique, le cycle du produit, et, au niveau
macroéconomique, l'écart technologique entre les nations.
L'idée était de remplacer l'exportation par la licence et plus
tard, par les IDE lorsque la demande à l'étranger se
développe et que la standardisation de la production le permet, c'est
ainsi qu'à la fin du cycle, un pays exportateur à l'origine peut
devenir importateur. L'intérêt de cette théorie est
d'intégrer l'investissement international et de spécifier les
facteurs de localisation qui influencent les avantages des entreprises sur le
plan commercial et des IDE.
Il faudra attendre les années 1990 pour voir
réapparaître un intérêt pour les variables de
localisation et pour le rôle des États. C'est Hymer, un
économiste d'origine canadienne, qui a probablement eu le plus
d'influence et d'importance dans les efforts de développer une
théorie des FMN. C'est lui qui fut le premier à mettre l'accent
sur les avantages spécifiques des entreprises et à noter les
avantages « O » pour les oligopolistiques. Sa théorie explique
les causes de l'IDE par les imperfections du marché. Pour surmonter ces
imperfections, les entreprises utilisent des IDE afin de contrôler la
production de leurs produits à l'étranger. Le
23 Fode Sire DIABY. (2014), op. Cit., p. 28.
24Michèle RIOUX. (2012), op. Cit., pp. 9-11.
13
contrôle de la production permet ensuite de gagner en
compétitivité face aux entreprises locales et ainsi
acquérir le monopole. La théorie de la concurrence monopolistique
de Hymer soutient que l'IDE est le résultat des imperfections du
marché, car les investisseurs étrangers ont un avantage
spécifique (ou avantage monopolistique) que les entreprises locales
n'ont pas. Les imperfections du marché peuvent générer des
avantages spécifiques aux STN à travers la diversité des
produits (image de marque, techniques de commercialisations, etc.),
l'accès aux marchés de capitaux, l'exploitation d'économie
d'échelle, la détention d'une technologie et les politiques
interventionnistes des gouvernements. Par contre, la théorie de Hymer
n'explique pas pourquoi les entreprises doivent investir à
l'étranger plutôt que d'exporter25.
En effet, pour certains auteurs tels que (Dunning et Rugman,
1985), les imperfections de marché ne sont pas liées à
l'existence de barrières à l'entrée et aux structures de
marché, elles sont, dans la perspective de l'internalisation,
essentiellement naturelles. Il existe des obstacles à la performance des
marchés internationaux et par conséquent des coûts de
transaction transfrontalière, ce qui fait que les firmes ont
intérêt à internaliser les activités
transfrontalières. En général, les auteurs de ce courant
accordent peu d'importance aux avantages oligopolistiques et si certains
d'entre eux, notamment Buckley (1992), admettront que les FMN sont capables de
créer et d'exploiter les imperfections de marché, règle
générale, les hiérarchies institutionnelles prenant la
place du marché sont déterminées par des facteurs externes
aux entreprises.
Néanmoins, ces théories n'ont pas pu expliquer
la présence de petites et moyennes entreprises (notamment japonaises)
sur le marché international des IDE. Pour expliquer alors cette
particularité, le professeur Kojima (1975) de l'université
Hitotsubashi (Japon) évoque la théorie des avantages comparatifs
selon laquelle les IDE sortants sont entrepris de façon
séquentielle dans les pays les plus avancés industriellement vers
les pays les moins avancés. Selon cette dernière théorie,
nous pouvons classifier les raisons des IDE sortants en quatre groupes
d'orientation: les IDE orientés vers la recherche des matières
premières, les IDE à la recherche du travail à bas
coûts, les IDE à la recherche de marché et ceux à la
recherche de la production et la distribution internationale26.
25 Fode Sire DIABY. (2014), op. Cit., p. 30.
26Idem
14
Paragraphe 2 : Les déterminants de
l'implantation de la firme multinationale (FMN) dans un pays
étranger
Il existe deux principales théories qui ont
expliqué les déterminants de l'implantation des firmes: la
théorie d'internalisation qui introduit la notion de l'avantage que
crée le contrôle d'un marché étranger à
partir de l'implantation de filiales et la théorie de Dunning
basée sur la détection des avantages que détiennent les
firmes. La décision de l'implantation à l'étranger et la
forme qu'elle prend répondent principalement à une logique
microéconomique propre à chaque entreprise. Dans ce cadre, un
territoire peut se montrer attractif pour certaines activités et non
pour d'autres. Cela explique l'existence de flux d'IDE. Par contre, le choix du
mode et du pays de l'implantation sera fonction de la combinaison des avantages
de la firme et de la zone d'accueil (accès aux ressources naturelles,
coût et qualification de la main-d'oeuvre, incitations fiscales,
accès préférentiel à certains marchés
étrangers, etc.). Par ailleurs, d'autres déterminants plus
actuels entrent en ligne de compte dans le choix stratégique de
l'implantation des firmes, notamment, le critère de la globalisation,
qui explique comment les stratégies des firmes peuvent évoluer.
C'est dans cette optique que sont exposés ci-après, d'abord les
apports de la théorie des coûts de transaction (2-1) et ensuite
les déterminants de l'implantation selon la théorie de Dunning
(2-2).
2-1: Les apports de la théorie des coûts de
transaction
La théorie des coûts de transactions a
donné des explications plus claires aux éventuelles
décisions des firmes à s'implanter à l'étranger.
Selon O.E. Williamson, le marché est caractérisé par la
rationalité limitée des agents et de contrats incomplets,
d'incertitude, de la complexité des situations, de la loi du petit
nombre, de l'asymétrie de l'information, de la spécificité
des actifs et de la gestion des contrats qui peuvent conduire les dirigeants
à vouloir réduire les imperfections de marchés en optant
pour une meilleure organisation de la transaction27. En effet, les
contraintes d'internalisation peuvent être sources de plusieurs
coûts de transactions tels que28:
- l'absence de contrat entre acheteur et vendeur: cela peut
induire la firme à des coûts d'annonce et de recherche;
- la méconnaissance du produit par l'acheteur: le
coût est lié à une perte due à l'achat d'un produit
qui ne correspond pas à ce que l'acheteur voulait au départ, ou
que les
27KOENIG Gilbert. (1998), Les théories
de la firme, Paris, 2e édition, Ed ECONOMICA, pp.
58-70. 28GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit, pp. 67-68.
15
acheteurs ne savent pas utiliser, la perte peut aussi s'agir
d'une éventuelle revente du produit;
- le désaccord sur le prix de vente: il peut surgir
dans le cas de méconnaissance de technologie dont le produit est
composé des marchés, cela se transforme en coûts de
négociation du produit auxquels la firme doit faire face;
- les autres coûts: ils sont relatifs aux défauts
de qualité des produits qui engendrent un coût lié à
son utilisation ou de sa réparation, les risques de transport tels que
les chocs que subissent les produits impliquant aussi la réparation, de
refus du produit et de la demande de son remboursement. Les coûts de
transaction liés aux difficultés juridiques, cela entraîne
des coûts dus aux recours et aux frais de justice.
Ces différents obstacles conduiraient à faire
une internalisation par la création de plusieurs filiales afin de
contrôler l'internationalisation des coûts de transaction par
l'investissement direct étranger ou par l'implantation29.
L'internalisation est un moyen pour la firme de lutter contre l'imperfection
des marchés et peut aussi être source de création d'autres
imperfections à son profit, de plus, l'internationalisation permet
à la firme d'assurer ses approvisionnements à une qualité
souhaitée, de sauvegarder et de renforcer l'avantage spécifique
de la firme à l'échelle mondiale. Le marché interne permet
à la firme de ne pas perdre sa technologie sur le marché libre et
accroît le pouvoir de négociation face aux agents
économiques en particulier de fructifier ses brevets et licences, en
négocier la cession et d'effectuer des échanges
croisés30. En effet, le modèle de l'internalisation
n'explique pas les raisons qui poussent les firmes à s'implanter
à l'extérieur de leurs pays d'origine.
2-2: Les déterminants de l'implantation selon la
théorie de Dunning
L'une des premières tentatives de recensement des
diverses combinaisons d'avantages qui conduisent une entreprise à
s'implanter à l'étranger et à choisir une nation
particulière comme lieu de l'implantation est l'oeuvre de Dunning (1950)
connue sous le nom de la théorie éclectique31. Cette
théorie, connue également sous le nom de paradigme OLI
(Ownership, Localisation, Internalisation), suggère la présence
de trois avantages :
- l'avantage spécifique représente l'avantage
exclusif que peut avoir la firme multinationale vis-à-vis des firmes
locales du pays d'accueil. Il consiste en la maîtrise d'un produit
nouveau, d'un nouveau processus de production ou d'un actif intangible comme la
réputation de la qualité du produit ;
29 MUCCHELLI J. L. (2005), Les relations
économiques internationales, Paris, 4e
édition, Ed HACHETTE, p. 82.
30 CHESNAIS François. (1997), Le
capitalisme mondial, Paris, Ed SYROS, pp. 100-110.
31 MUCCHELLI J.L. (1998), Multinationales et
mondialisation, Paris, Editions du Seuil, pp. 76-86.
16
- l'avantage de localisation est généralement
lié aux caractéristiques du pays hôte. En effet, en
produisant à l'étranger, la firme peut éviter les
barrières naturelles ou artificielles à l'échange comme
les droits de douane, les quotas à l'exportation ou l'importation, les
coûts de transports, etc. Elle peut aussi bénéficier d'un
accès préférentiel à d'autres marchés, dont
bénéficie le pays hôte. Cet avantage peut être
lié à l'allocation spatiale des ressources naturelles entre les
pays ;
- et enfin, la firme multinationale dispose d'un avantage
d'internalisation car en présence des deux précédents, il
n'est pas toujours profitable d'installer une nouvelle filiale à
l'étranger. Si la firme envisage d'accorder une licence de production
à une firme locale, elle sera confrontée à deux
principales difficultés: d'une part, elle n'est pas incitée
à révéler la totalité de son processus ou de sa
technologie de production du fait que la firme à laquelle elle
concède la licence peut rejeter le contrat, copier la technologie
à moindre coût et devenir une concurrente de la multinationale.
D'autre part, il existe un problème d'asymétrie d'information
entre la multinationale et le licencié, lié au fait que tout
accord doit comporter des incitations à maintenir la réputation
sur la qualité ou la marque du produit pour ceux à qui on
concède la licence. Ces difficultés créent une incitation
à internaliser les transactions au moyen de l'implantation directe, donc
à l'apparition des flux d'IDE.
En se basant sur le paradigme OUI, Dunning examine les
motivations et analyse les déterminants de l'IDE à partir d'une
approche d'équilibre partiel de la firme multinationale. D'une part, il
discute les facteurs spécifiques internes à la firme
(modèles microéconomiques) qui expliquent la décision de
produire à l'étranger plutôt que d'exporter ou d'accorder
des licences, c'est-à-dire qui expliquent le choix du mode
d'accès à un marché étranger; il s'agit
essentiellement de facteurs comme la présence d'actifs intangibles
spécifiques à la firme tels que la technologie de production ou
des savoir-faire managériaux. D'autre part, il examine les facteurs
externes (c'est-à-dire les facteurs macroéconomiques
exogènes) qui expliquent le choix de la localisation et les flux
d'entrée d'IDE dans une économie particulière. Ces
facteurs sont représentés essentiellement par les effets
liés à la volatilité des taux de change, la taxation (ou
la fiscalité), la qualité des institutions (incluant des facteurs
comme la corruption, la propriété intellectuelle, le
développement des infrastructures, etc.) et par la protection et la
libéralisation commerciale 32 . Les déterminants de
l'implantation sont nombreux et l'avènement de la mondialisation a
encore apporté un lot de nouveaux déterminants qui ne
32 DRISS Slim. (2007),
L'attractivité des investissements directs étrangers
industriels en Tunisie, article, Revue région et
développement, pp. 141-142.
17
remettent pas en cause ceux cités par Dunning. Dans la
section qui suit nous allons aborder les formes et organisations de la firme
multinationale (FMN).
Section II : Les formes et organisations de la firme
multinationale (FMN)
Dans le processus de l'internationalisation, les FMN, en
fonction de leur objectif ultime qui est la maximisation des profits,
déploient plusieurs stratégies d'implantation sur le
marché étranger à travers la délocalisation de
leurs activités. Ce processus d'internationalisation favorise
l'homogénéisation des techniques de production et de management,
des modèles de consommation, bref, concourt à la propagation
spatiale du mode de production capitaliste à l'échelle mondiale.
La décision de l'implantation à l'étranger mérite
une réflexion préalable de la part de firme multinationale. Elle
nécessite un examen sur les formes et organisations de la firme.
Dans cette section nous allons montrer les facteurs qui
influent sur les stratégies de l'implantation des FMN, à travers
une étude sur les formes d'implantation de la FMN (paragraphe 1) d'une
part ; et d'autre part sur les organisations de la firme (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les formes d'implantation de la firme
multinationale (FMN)
L'expansion commerciale d'une FMN s'intéresse à
la demande intérieure ou domestique. Son objectif est de rechercher un
pays d'implantation en vue d'une production pour le marché national ou
local, elle est aussi appelée la stratégie du marché. Elle
implique l'implantation de la filiale-relais, qui sert de pont vers les
marchés étrangers difficiles d'accès à cause de
certains paramètres tels que les barrières protectionnistes, des
coûts de transport, et l'intensité de la concurrence, qui sont
donc substitués par des opérations d'exportation ou
d'implantation directe d'unités de productions sur un marché
étranger 33. Ainsi, l'économiste Michalet distingue
trois formes de FMN correspondant à trois types de stratégies
(pouvant être associés) :
- les stratégies d'approvisionnement correspondent aux
FMN primaires, qui sont des firmes disposant d'unités de production de
matières premières, des produits agricoles..., pour
répondre aux besoins des industries de transformation ;
- les stratégies de marché sont le fait de FMN
disposant de filiales-relais. Une filiale-relais est une filiale
implantée dans un pays pour y accroître les ventes en se
rapprochant des clients. C'est par exemple le cas pour les entreprises
productrices de
33 GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., p. 61.
18
biens durables. C'est aussi le cas de nombreuses FMN de
services qui constituent aujourd'hui la part la plus importante des
investissements à l'étranger provenant des pays
développés. Il s'agit de banques, de compagnies d'assurances,
d'institutions financières, de sociétés de commerce,
d'agence de publicité, de compagnies de télécommunication,
etc. ;
- et enfin, les FMN développent des stratégies
de rationalisation en créant des filiales-ateliers. Une filiale-atelier
est une filiale implantée dans un pays (notamment un pays à bas
salaires) pour y produire à des coûts plus bas que dans le pays
d'origine et non pas pour conquérir un nouveau marché.
Par contre, il existe également d'autres formes
d'implantation, celles-ci sont cependant choisies suivant un arbitrage entre
les ressources et la capacité de la firme à s'accroître,
suivant un processus d'internationalisation selon la taille d'une entreprise
à chaque stade de son développement. L'expansion sur des
marchés étrangers peut prendre plusieurs formes : exportation
directe à partir de sa base nationale, implantation d'une filiale de
commercialisation, possession d'une unité de production (par
création ou par rachat d'une entreprise locale), concession d'une
licence de production à une firme étrangère ou bien
formation d'une joint-venture avec une firme alternative est fonction de
plusieurs variables relatives non seulement à la stratégie de la
firme mais aussi aux caractéristiques du pays hôte (degré
de maturité du produit, structure et organisation du marché
étranger, barrières à l'échange, etc.)
34 . C'est pourquoi, nous allons aborder dans ce paragraphe les
formes d'implantation les plus répandues au monde qui sont :
l'exportation indirecte (1-1) d'une part et l'implantation par association
(1-2) d'autre part.
1-1: L'exportation indirecte
L'exportation indirecte est l'action par laquelle une
entreprise vend des produits sur un marché étranger, sans avoir
le contrôle sur le marché de destination, la firme fait
référence à la connaissance et l'expérience d'un
intermédiaire commercial, pour bénéficier d'une structure
de réseau de distribution mise en place par ce dernier. L'exportation
indirecte est choisie lorsqu'une entité contourne les difficultés
liées à une exportation directe, ceci pour plusieurs
raisons35 :
- surmonter les barrières entre elle et les clients
étrangers, comme la langue, l'instabilité économique, le
recouvrement des créances des particuliers ;
34DRISS Slim. (2007), op. Cit., pp. 140-141.
35GRAICHE Lynda. (2012) op. Cit., pp. 80-81.
19
- partager les coûts et les risques liés à
l'acheminement des produits aux clients ;
- pallier aux conséquences du manque des connaissances de
la clientèle, du marché et de la concurrence ;
- faciliter les mécanismes d'adaptation des produits.
1-2: L'implantation par association
Dans le cadre de l'implantation par association, les
partenaires ne disposent pas des fonds propres dans un bilan, leur autonomie
par rapport aux maisons-mères est donc faible. Ce type d'alliance permet
de mettre souvent en commun des moyens (équipement de R&D, ligne de
production, réseaux de distribution). La coopération reste
limitée dans le temps comme dans le projet. Dans le cas d'espèce,
on distingue trois types de stratégies : la licence internationale, la
franchise internationale et la joint-venture :
- la licence internationale: le contrat de licence est un
droit de propriété qu'une firme cède à une autre
entité dans le but d'exploiter un procédé de fabrication,
d'un brevet de fabrication ou d'un contrat temporaire permettant l'utilisation
d'une marque sur un territoire défini (la licence de
marque)36 ;
- la franchise internationale: elle est un contrat entre une
entreprise (franchiseur) qui concède un droit d'usage et d'exploitation
d'une marque, d'une enseigne, d'une raison sociale, d'un nom commercial ou d'un
signe, un symbole, un logo, une expérience, un savoir-faire, un ensemble
de produits et/ou de technologies à un ou à plusieurs entreprises
(franchisées). Cette technique industrielle est appliquée
spécialement dans des secteurs de distribution et met en jeux deux
partenaires (le franchisé et le franchiseur) qui fonctionnent en
réseau37 ;
- la joint-venture : on entend par joint-venture, la
création d'une filiale commune nommée co-entreprise industrielle
ou commerciale en utilisant les compétences locales. Cette co-entreprise
est mise en oeuvre par au moins deux partenaires différents et ayant un
objectif en commun. Cette démarche est fondée sur un contrat
suivant une réglementation locale. Les partenaires doivent s'entendre
sur le statut juridique de
36 MEIER Olivier. (2005), Entreprises
multinationales, Paris, Ed DUNOD, p. 96. Cité par GRAICHE
Lynda. (2012) op. Cit., p. 91.
37 BUSSEAU Annick. (1994),
Stratégies et techniques du commerce international, Ed
Masson, Issy les Moulineaux, p. 129. Cité par GRAICHE Lynda. (2012) op.
Cit., pp. 93-94.
20
l'entité, du degré de participation qui sera en
fonction à la fois de la réglementation qui fait limiter la
participation étrangère à 49%38.
Paragraphe 2 : Les organisations de la firme
multinationale (FMN)
La FMN constitue un objet de recherche
privilégié en sciences de gestion depuis les années 1970
car cette forme d'organisation est de plus en plus répandue. Les modes
de gestion des FMN présentent des spécificités et des
enjeux importants39. La FMN par son développement et son
expansion comme modèle d'entreprise suscite beaucoup
d'intérêt, d'autant plus qu'elle soulève de nombreuses
problématiques organisationnelles. Il est utile de préciser que
certaines approches théoriques et pratiques sont rattachées
à ce mouvement, mais rares sont celles qui s'intéressent à
l'organisation des multinationales. Les auteurs en théorie des
organisations ont étudié les structures des entreprises et leur
efficacité avec des perspectives différentes reflétant
l'évolution des idées sur le fonctionnement des
organisations40. En effet, l'organisation est un outil incontestable
dans la réalisation des objectifs des FMN. Elle représente l'une
des caractéristiques du fonctionnement des FMN dans la mesure où
elle forme le support de leur stratégie de localisation. Il est
important de connaître la structure organisationnelle de la FMN pour
pouvoir faire la distinction avec les entreprises qui opèrent sur les
marchés nationaux. La structure organisationnelle est l'expression des
relations de pouvoir, des processus de décision et de contrôle
dans l'espace réglementé qui est l'organisation. Elle est une
indication des orientations retenues par la maison-mère pour son
développement. La direction générale a pour tâche,
le choix pertinent d'une structure adéquate à ses
activités dans le monde afin de pouvoir les mener à
bien41.
Par conséquent, la structure organisationnelle est
devenue une stratégie à part entière, elle permet à
la firme de faire face à un environnement mouvant, qui transforme les
processus de multinationalisation qui induisent des changements
organisationnels. En effet, la gestion des structures organisationnelles permet
à la FMN de ne pas subir d'éventuelles modifications qui
entraineraient de retard dans le système de gestion des activités
internationales, ce qui engendrerait des coûts liés au temps
d'exécution des stratégies42. Cependant, pour
comprendre la structure organisationnelle (SO) de la FMN, il est important dans
un premier temps de
38 BUSSEAU Annick. (1994), op. Cit., p.130.
Cité par GRAICHE Lynda. (2012) op. Cit., p. 97.
39Athmane EL MOUDEN. (2007), L'impact de
l'évolution des structures organisationnelles des FMN sur leur
stratégie de localisation et leur système de
contrôle, thèse de doctorat en sciences de gestion,
Institut d'administration des entreprises, Université Limoges, France,
pp. 5-10.
40 Idem
41 Manuel de la balance de paiement, 5ème
Edition, Fond monétaire international, Washington, 1993.
42 DE BRUEKER Roland. (1995), Les
stratégies organisationnelles, Paris, Ed ECONOMICA, pp,
10-12.
21
définir la complexité structurelle de
l'organisation de la FMN (2-1) et dans un second temps d'analyser les
principaux types de structures organisationnelles de la FMN (2-2).
2-1: La complexité structurelle de l'organisation
de la firme multinationale (FMN)
Quelle que soit la définition retenue de la firme
multinationale, les auteurs soulignent systématiquement ses
difficultés de gestion et sa grande complexité. Les
difficultés de gestion sont inhérentes aux choix d'organisation
et de management synthétisé. Ainsi, Galbraith et Kazanjian (1986)
43 mettent en valeur les interrelations qui existent entre les
éléments représentant les principaux pôles
organisationnels. Ceux-ci sont positionnés par rapport au marché
et ses impératifs (stratégie et performance). La
complexité intrinsèque de la FMN est liée à la fois
aux problématiques de structure et de stratégie, mais aussi aux
difficultés induites par la gestion de filiales de nationalités
diverses. La FMN se distingue par son caractère multidimensionnel, qui
s'exprime par ses multiples activités couvrant différents espaces
géographiques, la répartition des activités dans plusieurs
pays présente des complexités structurelles qui s'expliquent plus
aisément par deux caractéristiques principales de la FMN qui sont
la diversité et l'hétérogénéité :
- la diversité constitue une source d'avantage
concurrentiel, elle peut être une diversité des ressources et/ou
des produits variés (cas des firmes multi-produits), ou bien une
diversité des marchés en distribuant ou en produisant un
même produit ou service dans plusieurs pays ; par ailleurs, la
diversité présente des complexités structurelles, dans ce
cas, la FMN a pour tâche de coordonner les filiales
représentatives de la diversité des marchés et des
ressources du groupe ;
- l'hétérogénéité de la FMN
est due aux éventuelles divergences entre l'ensemble des filiales, par
conséquent, ces dernières doivent être
différenciées en termes de complexité environnementale et
de leurs niveaux des ressources locales d'intégration44.
La complexité de la firme réside dans la
complexité environnementale dans laquelle elle agit, mais aussi dans la
variété interne de cette structure et dans les relations entre
ces entités. Les deux facteurs de complexité (diversité et
hétérogénéité) sont proches et
complémentaires, en ce sens que, la multidimensionalité de la FMN
engendre le plus souvent une diversité de
43 Galbraith J.R., Kazanjian R.K. (1986),
Organizing to implement strategies of diversity and
globalization
: The role of matrix designs, Human Resource
Management, spring, n°1, pp.37-54. Cité par EL MOUDEN
Athmane. (2007), op. Cit., pp, 30-35.
44 ELMOUDEN Athmane. (2007), op. Cit., pp, 9-14.
22
filiales et une
hétérogénéité des rôles de
celles-ci45. Selon les théories de la firme, la structure
organisationnelle d'une entreprise est formée d'agents et d'organes
liés les uns aux autres par des relations qui traduisent une
hiérarchie et qui permettent la coordination de l'activité, la
diffusion des informations et les prises de décision. Elle peut
différer d'une firme à l'autre et elle évolue au cours de
l'existence de l'entreprise en fonction de facteurs, comme la taille et les
conditions du marché.
2-2: Les typologies structurelles de l'organisation de la
firme multinationale (FMN)
Il existe différents types de structures, la FMN se
doit donc d'adopter une structure en adéquation avec son histoire et ses
développements à venir, plutôt que de chercher à
mettre en place une structure répondant aux besoins multiples des
environnements des filiales. Les structures organisationnelles les mieux
adaptées de la FMN sont au nombre de trois et elles ont des
caractéristiques distinctes où chaque structure correspond
à un niveau particulier de son développement. On distingue entre
autres: la structure fonctionnelle, la structure divisionnaire et la structure
multinationale.
? La structure fonctionnelle
Elle repose sur le principe de la division par fonction, de
l'autorité, de la pluralité de commandement et de l'unité
de spécialité (tout salarié dépend de plusieurs
chefs, chacun n'ayant autorité que dans son domaine propre). On doit
l'apparition de la structure fonctionnelle aux entreprises industrielles, elle
consiste à diviser les activités par fonctions
spécialisées (marketing, production, R&D, vente, ressources
humaines, finances). A travers ce type de structure, l'entreprise recherche une
rationalisation des ressources et une coordination des activités
fonctionnelles qui se caractérisent par une stratégie
mono-produit pour une multitude de marché ; par contre, elle
présente un inconvénient lié au nombre de décisions
complexes qui sont prises par un petit nombre des responsables46.
45 GRAICHE Lynda. (2012), op. Cit., pp. 18-19.
46 GUILLAUME Franck, RAMIREZ Rafael. (2003),
Les meilleurs pratiques des multinationales, Ed
d'Organisation, p. 20.
Figure 1 : La structure
fonctionnelle
Directeur Général
Achats
Conception
Production
Ventes
Comptabilité
23
Source : Don Hellrirgrl et John W. Slocum. (2006),
Management des organisations, Bruxelles, 2e édition, Ed. DE BOECK
Université, p. 513.
? La structure divisionnaire :
Elle s'impose lorsque la structure fonctionnelle ne s'adapte
plus à la stratégie de diversification des produits et des
marchés de la firme. Les causes de cette diversification sont:
- éviter les risques de la monoproduction ;
- assurer la vie de l'organisation après que le produit
principal ait achevé son cycle de vie ;
- vendre à l'extérieur des produits annexes
liés à la production intégrée ou à des
facilités de production à certaines
périodes47.
La structure divisionnaire serait, dans ces conditions, la
structure adéquate dans la mesure où « elle est
constituée par des divisions opérationnelles
indépendantes, responsables de toutes les fonctions de la firme sur les
segments produits-marchés qui leur sont alloués » (H.
De Bodinat) 48 . L'organisation par produit ou structure
divisionnaire (structure de troisième stade d'après Stopford),
dans laquelle la division des tâches à l'intérieur de la
firme se réalise selon le critère du produit de marché ;
chaque unité est alors responsable de la production et de la vente du
bien considéré.
47 Stopford et Wells. (1972), Managing the
Multinational Enterprise, Basic Books, N.Cité par ELMOUDEN
Athmane. (2007), op. Cit., pp. 42-43.
48 H. DE BODINAT et collaborateurs, «
Gestion internationale de l'entreprise ». Cité par
ELMOUDEN Athmane. (2007), op. Cit., pp. 43-45.
Figure 2 : La structure divisionnaire
PDG
Equipe fonctionnelle
Marketing
Finance
Production
DG / Produit
A
DG / Produit
B
Marketing
Finance
Production
24
Source : ELMOUDEN Athmane. (2007), op. Cit., p. 43.
? La structure multinationale :
Enfin, la structure multinationale semble être la mieux
adaptée aux FMN, elle tente de maintenir une coordination entre
produits, fonctions et zones géographiques. Il est
particulièrement difficile de répondre à la
nécessité d'assurer une coordination étendue entre ces
trois pôles, dans la mesure où les divisions
opérationnelles sont séparées par la distance et le temps.
Une complication supplémentaire tient au fait que, fréquemment,
les dirigeants d'entreprise sont séparés par la culture et la
langue. Mais cette structure comporte certains avantages tels que :
- la présence et l'importance croissantes de concurrents
et de clients mondiaux ;
- la mondialisation grandissante de la demande de produits sur le
marché ;
- les nouvelles technologies de l'information ;
- et les usines efficaces, pouvant fabriquer des produits pour
une clientèle du monde entier49.
En outre, les gouvernements nationaux et les marchés
locaux peuvent exercer de fortes pressions, qui obligent fréquemment les
FMN à commercialiser des lignes de produit complètes dans tous
les principaux pays desservis. Toutefois, les compagnies peuvent ne pas
bénéficier d'ouvertures commerciales, sauf si elles en
négocient les conditions avec les pays hôtes.
Figure 3 : Options
fondamentales pour une structure multinationale
Fonctions Fonctions
Implantation géographique
Ligne de Production
Marketing Fabrication Manufacturière Ressources Humaines
Autre
25
Structure nationale Matrice Structure mondiale
ou régionale par produit Sensibilité du pays
Intégration mondiale
Adaptation au pays Produits mondiaux
Concurrents nationaux Concurrents mondiaux
Fabrication industrielle nationale Usines mondiales
Client national Clients mondiaux
Source : Hellriegel Don, Slocum John W. (2006), op. Cit.,
p. 522.
49 HELLRIEGEL Don, SLOCUM John W. (2006),
Management des organisations, Bruxelles, 2e
édition, Ed. DE BOECK Université, pp. 520- 525.
26
Après avoir présenté dans ce premier
chapitre l'aperçu général sur la FMN, nous allons voir
dans le chapitre suivant les stratégies d'implantation des FMN chinoises
au Tchad.
27
CHAPITRE II : LES STRATEGIES D'IMPLANTATION DES FIRMES
MULTINATIONALES (FMN) CHINOISES AU TCHAD
Depuis une dizaine d'années, les relations
sino-africaines ont connu un développement considérable.
L'Afrique est devenue pour la Chine un continent rempli d'autant
d'opportunités que de difficultés50.
L'objectif du présent chapitre consiste donc à
rendre compte des stratégies déployées par les FMN
chinoises en Afrique et plus particulièrement au Tchad. Avant d'aborder
en détail la question des stratégies d'implantation des FMN
chinoises au Tchad, il paraît opportun de s'interroger sur les raisons
d'implantation des FMN chinoises en Afrique avec un accent particulier pour le
Tchad. Cependant, un bref rappel sur les raisons d'implantation de ces firmes
nous permettra de mener à bien ce travail. C'est pourquoi, nous allons
aborder dans un premier temps le fondement de la politique chinoise au Tchad
(section1) puis dans un second temps les modes et les stratégies mis en
place par la Chine pour accompagner ses entreprises à investir
(section2).
Section 1 : Le fondement de la politique chinoise au
Tchad
C'est à partir des années 1980 que la Chine a
fait son retour sur le continent africain après près d'une
décennie d'absence. Pour la Chine, première puissance
émergente au monde sans passé colonial en Afrique, il s'agit de
consolider les retrouvailles autour de principes fondateurs qui tirent leurs
légitimités de l'histoire commune partagée. Comme le
rappelle l'ancien président chinois Hu Jintao : «
l'amitié sino-africaine plonge ses racines dans la profondeur des
âges et ne cesse de s'approfondir au fil des ans »51.
Cette légitimité historique représente le moyen
idéal pour asseoir la légitimité idéologique. Cette
dernière est le fruit de la présence incontournable de la Chine
à côté de l'Afrique, comme porte drapeau du non alignement,
au moment des luttes d'influence de la guerre froide.
En novembre 2006, lors de la troisième
conférence ministérielle du Forum sur la coopération
sino-africaine regroupant 48 pays africains, un plan d'action de 2007 à
2009 a été adopté incluant les mesures à prendre
par les bilatéraux52. Dès le 12 janvier 2007, la Chine
qui semblait être très intéressée par le
pétrole tchadien, a racheté par l'entremise de la China
50HELLENDORFF Bruno, La Chine en Afrique :
néocolonialisme ou nouvel axe coopération sud-sud ?
Note d'Analyse du GRIP, 13 décembre 2010, Bruxelles, p. 6.
51Discours du Président chinois Hu Jintao
à la cérémonie d'ouverture du Forum de Coopération
sino-africaine, 4 nombre 2006. Cité par Fode Sire DIABY. (2014), op.
Cit., p.68.
52 Pour plus de précision voir FOCAC (2006).
28
National Petroleum Corporation (CNPC) l'ensemble des permis
d'exploration pétrolière de la société canadienne
ENCANA. Ce permis couvre une superficie d'environ 220 000 km2 et
englobe les bassins ci-après : le bassin des Erdis, une partie du bassin
du Lac Tchad, le bassin de Madiago, le bassin de Bongor, le bassin à
l'Ouest de Moundou, le bassin de Pala à la frontière du Cameroun,
une partie du bassin à la frontière de la République
Centrafricaine et tout le bassin du Salamat53. Pour mieux
appréhender les raisons d'implantation des FMN chinoises, il est
nécessaire d'aborder d'une part les causes d'implantation des FMN
chinoises au Tchad (paragraphe1) et d'autre part, la diplomatie tchado-chinoise
au coeur de la mondialisation (paragraphe2).
Paragraphe 1 : Les causes d'implantation des firmes
multinationales (FMN) chinoises au Tchad
La présence chinoise en Afrique s'est
développée dans les années 1990, par la volonté de
Pékin de sécuriser ses approvisionnements en matières
premières. C'est à partir de 1999, lors de la réunion
inter-agences à Pékin qu'une stratégie a été
mise en place pour renforcer et diversifier une présence croissante des
entreprises chinoises sur le continent africain présentant des
opportunités adaptées aux besoins et savoir-faire chinois. Les
pays africains dans lesquels les intérêts et investissements
chinois sont les plus importants soulignent des avantages comparatifs dont
bénéficie Pékin pour élargir son
développement international: c'est-à-dire la possibilité
pour le gouvernement chinois de servir d'appui diplomatique, militaire, ou
encore économique à des régimes africains
dénoncés sur la scène internationale à cause des
conflits internes ou de mauvaise gouvernance. Les intérêts
économiques chinois et les préoccupations politiques des
dirigeants africains peuvent ainsi converger.
De plus, lorsque les investisseurs chinois se concentrent sur
l'exploitation de matières premières (pétrole et
minerais), ils restent dans le sillage des politiques économiques ayant
prévalu au sud du Sahara: des économies de rente reposant sur des
capitaux et des débouchés étrangers, reléguant
l'importance de l'environnement économique et politique interne
54. Cependant, quoi qu'il en soit et quoi qu'il arrive, les causes
d'implantation des FMN chinoises en Afrique sont les mêmes quels que
soient les pays. Partant de l'analyse de ce texte, les causes d'implantation
des FMN chinoises en Afrique peuvent être subdivisées en causes
politiques (1-1) et économiques (1-2).
53Symphorien Ndang TABO et Al. (2008), Les
relations entre la Chine et l'Afrique subsaharienne : le cas du Tchad,
article, CREA, p. 4.
54Fode Sire DIABY. (2014), op. Cit., p.154.
29
1-1: Les causes politiques
C'est en 1978 que Deng Xiaoping et les dirigeants chinois
décidèrent de tourner le dos au maoïsme en introduisant des
réformes économiques de marché visant à ouvrir
l'économie chinoise aux investissements étrangers.
Derrière l'entreprise de ces réformes économiques,
l'objectif fondamental des dirigeants chinois était de donner une
seconde vie au régime politique que les dérives maoïstes des
vingt années précédentes avaient lourdement
précarisé. L'intégration de l'économie chinoise au
marché mondial, alors au coeur d'un processus
accéléré de globalisation, devait permettre de moderniser
le pays, de galvaniser le développement économique et d'augmenter
le niveau de vie de la population55. L'ouverture économique
de la Chine en 1979 sous la conduite du parti communiste chinois (PCC) a
été le point de départ d'une série de
réformes progressives vers une économie plus libérale:
l'économie socialiste de marché. Le souci majeur des dirigeants
à chaque étape des réformes est de mettre en place les
conditions institutionnelles pour une plus grande efficacité des
entreprises sans pour autant perdre le contrôle de la machine
économique qui comme pour tout régime dirigiste, doit être
au service des intérêts politiques de la Chine au niveau
intérieur et dans sa politique étrangère56.
La réforme primordiale qui engage l'ouverture de
l'économie chinoise aux firmes étrangères se traduit par
l'établissement de zones économiques spéciales (ZES) et
oblige ces dernières à établir des joint-ventures avec des
entreprises chinoises d'Etat. Cette ouverture est partielle car elle exclut la
libéralisation du secteur de l'énergie et des banques. La
deuxième réforme qui comme la première aura des incidences
sur l'internationalisation des entreprises chinoises en Afrique est celle qui
en 1998 consistera à ne maintenir dans le giron de l'Etat que les
entreprises ayant atteint une certaine taille et un niveau de performance leur
permettant de devenir des grandes entreprises capables d'affronter la
concurrence au niveau international. Les deux autres réformes qui
particulièrement relevant notre propos sont l'adhésion en 2001 de
la Chine à l'OMC et la révision constitutionnelle de 2004. En vue
de son adhésion prochaine à l'OMC, l'Etat chinois relâche
son contrôle sur la politique d'investissement à l'étranger
de certaines entreprises d'Etat et permet l'entrée dans le capital de
ces entreprises de fonds privés chinois ou étrangers tout en
restant majoritaire. Ces entreprises semi-
55HELLENDORFF Brun. (2010), op. Cit., p. 2.
56Amadou DIALLO. (2012) op. Cit., pp. 41-42.
30
publiques tout en bénéficiant de l'aide de
l'Etat opèrent à tout point de vue comme des entreprises
privées typiques57.
En effet, les institutions chargées de la conduite de
ces réformes sont l'Administration d'Etat des devises
étrangères, la commission de développement national et des
réformes et le ministère du commerce qui, selon l'ordre de
citation veillent à ce que les IDE chinois soient conformes aux lois et
réglementations chinoises et aux recommandations du parti communiste
chinois vis-à-vis des investissements à l'étranger.
L'Administration d'Etat des devises étrangères assure le
contrôle de l'origine et de l'utilisation des devises
étrangères alors que les autres institutions veillent à la
conformité des investissements projetés aux intérêts
de l'Etat chinois. Mais ce qui est important à noter c'est le
caractère souple dans l'application de ces réformes et la
réactivité du parti communiste face à la globalisation et
aux défis internes de l'économie chinoise qui se traduit par les
amendements ou révisions des réformes ou simplement des
assouplissements ou relâchement quant à la rigueur dans leurs
applications pour rendre les entreprises chinoises plus compétitives. Il
faut à cela ajouter le statut particulier dont bénéficient
les grandes entreprises d'Etat de par le soutien financier et diplomatique que
leur accorde le pouvoir central en liaison avec le caractère hautement
stratégique des secteurs des matières premières
énergétiques et extractives et de hautes technologies dans
lesquels elles opèrent58.
1-2: Les causes économiques
L'internationalisation des firmes chinoises s'inscrit dans un
lent processus lié aux phases de la réforme économique et
de l'ouverture, aux choix du gouvernement central et aux incitations
régulièrement introduites. Il existe une forte corrélation
entre les réformes institutionnelles, la libéralisation politique
et le développement des IDE Buckley et al., (2012), Ren, Liang, Zheng.
(2012)59. Les causes économiques de l'internationalisation
des entreprises chinoises en Afrique sont intimement liées aux raisons
stratégiques qui poussent ou attirent ces dernières vers
l'Afrique60. Quatre grands motifs poussent les firmes chinoises
à s'internationaliser (Zhan. (1995), OECD. (2008), Gugler et Boie.
(2008), Wang. (2012))61:
57 Idem
58 Ibidem
59 Xavier Richet. (2012),
L'internationalisation des firmes chinoises : croissance, motivations,
stratégies, FMSHWP-2013-27, février, pp. 12-14.
60Idem
61Amadou DIALLO. (2012), op. Cit., p. 35.
31
? L'accès aux ressources
C'est certainement le premier motif d'internationalisation des
firmes chinoises. L'économie chinoise doit s'assurer des ressources
nécessaires pour maintenir le taux de croissance à deux chiffres
en tenant compte à la fois des limites et de l'épuisement des
ressources nationales (à l'exception du charbon) et d'un appareil
productif en grande partie vétuste fortement consommateur de
matières premières. Les choix technologiques affichés dans
le cadre du 12ème plan (2011-2015) mettent l'accent sur des
énergies substituables mais la transition énergétique
risque d'être longue. Parmi les toutes premières firmes
internationalisées, on compte plusieurs firmes d'Etat, activement
soutenues par le gouvernement central, opérant dans l'extraction de
pétrole et de gaz naturel. L'accès aux ressources n'est pas
contraint par la proximité. Les firmes chinoises opèrent au
niveau mondial: Amériques, Afrique, Océanie, Asie centrale.
? L'accès aux marchés
L'accès aux marchés, notamment proches suit les
courants d'échange et la pénétration des marchés
réalisés par les exportations chinoises. L'entrée sur le
marché s'en trouve facilitée grâce au savoir-faire
accumulé. C'est aussi le moyen de contourner les barrières
douanières, de créer un réseau local ou régional de
distribution, de se rapprocher de marchés régionaux en forte
expansion. Une autre motivation tient à l'accroissement de la
concurrence et à la hausse de surcapacités au niveau domestique.
Sur le marché domestique qui réduit les marges de profit des
firmes. A travers des investissements de proximité, les firmes chinoises
acquièrent un nouveau savoir-faire (produire en dehors du marché
domestique) et peuvent expérimenter leur stratégie
d'internationalisation en limitant les risques et les coûts en cas
d'échec.
? La recherche d'efficience
Ce facteur a été moins important au début
de la phase d'internationalisation en raison de l'existence de bas coûts
en Chine. La hausse des coûts domestiques au cours des dernières
années a poussé à la délocalisation d'entreprises
dans les pays asiatiques (Vietnam, Corée du Nord), dans les industries
de main-d'oeuvre (textile). Aujourd'hui, dans la province du Guangdong, la
hausse rapide et conséquente des salaires (plus de 20% en l'espace de
2-3 années) contribue à accroître les
délocalisations dans des économies voisines aux coûts
salariaux moins élevés.
? La recherche d'actifs stratégiques
La recherche d'actifs stratégique est devenue une des
toutes premières préoccupations des firmes chinoises, à la
fois pour asseoir leur avantage sur les marchés étrangers et
pour
32
acquérir les technologies qu'elles n'ont pas pu
recevoir à travers la coopération avec les FMN
étrangères implantées en Chine ou en raison des faiblesses
du système d'innovation chinois. L'acquisition de technologie, de
marques étrangères est un moyen d'accélérer la
montée en puissance des firmes chinoises et d'accroître leur
réputation à l'étranger. Par ce biais les firmes chinoises
peuvent acquérir la totalité d'actifs (une entreprise et son
réseau) ou plus simplement un segment, souvent à haut contenu
technologique, qui sera rapatrié et intégré dans la
production en Chine (avec parfois la tentation du dépeçage).
L'entrée sur les marchés, par ce moyen se révèle
avantageux en permettant d'acquérir une renommée et
d'accéder à la technologie qui fait défaut. Les firmes
chinoises, via des opérations de fusion-acquisition, acquièrent
ainsi des actifs qu'elles cherchent à intégrer dans leur
stratégie globale.
Paragraphe 2 : La diplomatie tchado-chinoise au coeur
de la mondialisation
Dans ce contexte, la politique africaine de la Chine veut se
distinguer par l'accent officiellement mis sur le respect des
intérêts des pays africains, en opposition au modèle
néocolonialiste traditionnel. Le livre blanc sur la politique africaine
de Chine publié pour la première fois à Pékin au
mois de janvier 2006 précise : « la Chine oeuvre à
établir et développer un nouveau type de partenariat
stratégique marqué par l'égalité et la confiance
mutuelle sur le plan politique, la coopération dans un esprit
gagnant-gagnant sur le plan économique62 ». Cette
position reprend les principes généraux de la coexistence
pacifique qui demeurent pour Pékin d'actualité et s'exprime
quasiment dans les mêmes termes depuis la déclaration
publiée lors de la visite de Jiang Zemin en 1996, jusqu'aux cadres
fondateurs du forum de coopération Chine-Afrique (China-Africa
coopération forum, CACF) en 200663. Il s'agit pour la RPC de
développer les échanges, en multipliant les visites de haut
niveau qui soulignent l'importance de l'Afrique, d'accroître l'aide
« sans condition politique », de pousser la communauté
internationale à augmenter son soutien, et de défendre le
rôle de l'Afrique sur la scène internationale64.
Le réchauffement des relations entre le Tchad et la
Chine s'inscrit sans doute dans le cadre de la politique africaine de la Chine,
lancée en janvier 2006 par son gouvernement, par lequel elle entend
présenter au monde entier ses objectifs en termes de coopération
avec les
62« La politique de la Chine à
l'égard de l'Afrique », <
www.chineafrique.com>.
Cité par Valérie NIQUET : « la stratégie
africaine de la Chine » article publié initialement dans
Politique étrangère, 2e trimestre 2006.
63 « China Africa Coopération Forum » et
« China's African Policy », <
china.org.cn >. Cité par
Valérie NIQUET : « la stratégie africaine de la
Chine » article publié initialement dans Politique
étrangère, 2e trimestre 2006, pp. 2-4.
64 Idem
33
pays africains et les stratégies pour atteindre ces
objectifs65. Le Tchad étant l'un des pays les plus pauvres au
monde, la reprise de sa coopération avec la Chine a été
jugée importante par le gouvernement, surtout avec le lancement de la
politique africaine de la Chine en 2006. La vitalité de cette relation
ne repose pas uniquement sur les ressources naturelles, elle vise aussi le
perfectionnement des cadres de l'administration tchadienne et l'octroi des
bourses d'étude aux jeunes en phase d'entrer à
l'université, etc. Il semble d'emblée nécessaire
d'étudier d'une part la coopération sino-tchadienne (2-1) et
d'autre part, l'aide publique chinoise au développement du Tchad
(2-2).
2-1: La coopération sino-tchadienne
La coopération sino-africaine a connu un
développement rapide, voire spectaculaire cette dernière
décennie. Quel que soit le domaine, des avancées notoires
reflètent la bonne santé de cette relation entre l'Afrique et la
Chine. Le rythme auquel s'intensifie cette coopération démontre
que les parties engagées y trouvent largement leur intérêt
et cela bien au-delà de ce qui est normalement escompté vu les
résultats peu satisfaisants, du moins du côté de l'Afrique
au regard de son niveau de développement actuel, des relations de
coopération privilégiées qu'elle a jusque-là
entretenues avec ses anciens colonisateurs et autres nations
européennes, américaines ou asiatiques66. Selon le
premier ministre chinois Wen Jiabao, « l'Afrique et la Chine ont
oeuvré ensemble à l'instauration d'un nouveau partenariat
stratégique, caractérisé par l'égalité et la
confiance réciproque sur le plan politique, la coopération
gagnant-gagnant sur le plan économique, les échanges et
l'inspiration mutuelle sur le plan culturel, ouvrant ainsi de nouveaux horizons
à la coopération sino-africaine »67.
Il faut noter également que, les ambitions qu'affiche
la Chine dans sa relation avec le continent africain évoluent selon la
logique historique interne de chaque pays. Il convient de souligner que
contrairement à une certaine vue longuement répandue, l'Afrique
n'est pas un pays mais un continent constitué de 54 Etats, chacun avec
ses réalités et son histoire même s'il existe des points de
convergence entre les pays. Comme le fait remarquer Wang (2009), la Chine est
passée par trois phases dans son engagement avec l'Afrique68
:
65Symphorien Ndang TABO et Al. (2008), op. Cit., p.
3.
66 Amadou DIALLO. (2012), op.cit., p. 88.
67W.Jiabao, Discours d'ouverture de la
quatrième conférence ministérielle du forum de
Coopération Chine-
Afrique (FOCAC), 8 novembre 2009.
http://www.voltairenet.org/article162985.html
, cité par Fode Sire DIABY. (2014), op.
Cit., p. 13.
68www.focac.org,
http://english.focacsummit.org/2006-11/05/content_5167.htm
34
- relations essentielles de nature politique, l'aide
économique pour les équipements d'infrastructure et des
hôpitaux (Effort d'obtenir le soutien pour le Tiers Monde) ;
- la priorité de la Chine est décalée
vers l'établissement d'un modèle économique plus
axé sur le marché tout en s'intégrant avec les pouvoirs
économiques avancés du monde (moins d'efforts vers l'acquisition
d'influence politique) ;
- suivi de la montée de la Chine comme puissance
économique avec la demande croissante pour les matières
premières (accroître les investissements chinois dans plusieurs
secteurs).
Ainsi, les relations diplomatiques entre Pékin et
N'djamena ont été établies pour la première fois en
1972. Ces relations ont été accompagnées par de
retombées économiques dont les plus importantes ont
été enregistrées dans les années 1980, parmi
lesquelles la construction d'un des deux plus grands hôpitaux du Tchad,
la construction du palais du peuple (actuel Palais du 15 janvier) et d'un stade
omnisport dans la capitale N'djamena, ainsi que l'encadrement des casiers
rizicoles A et B dans le sud-ouest du pays69. En 1997, une rupture
sera prononcée par Pékin à cause de la reconnaissance de
Taiwan par N'djamena. Le Tchad qui cherchait des sources de financement pour
faire face aux dépenses courantes avait trouvé en Taiwan un
partenaire idéal et à juste raison car en neuf ans de
coopération, le Tchad classé parmi les pays les plus pauvres du
monde, a reçu plus de 30 millions de dollars par an de Taiwan. Les
projets de coopération portaient sur quatre axes prioritaires :
transport, santé publique, agriculture et éducation. Un pont
à double voie sur le Chari (fleuve traversant N'djamena) et le bitumage
de nombreuses voies à N'djamena ont ainsi été
réalisés. Taiwan a également financé le recrutement
de 1 000 enseignants du secondaire et la construction de nombreuses
écoles. En Juillet 2006, les circonstances politiques (les menaces de la
rébellion à l'est) ou économiques (exploitation du
pétrole tchadien) ont conduit le Tchad à renouer avec
Pékin en rompant avec Taiwan70.
2-2: L'aide publique chinoise au Tchad
La Chine a accru sa participation économique en Afrique
au cours de ces dernières décennies dans le but d'accéder
à des ressources naturelles de ce continent, de développer des
débouchés pour les travailleurs chinois et d'acquérir un
accès préférentiel aux marchés. Les liens entre la
Chine et l'Afrique ont été renforcés de manière
significative dans les domaines
69Symphorien Ndang TABO et al. (2008), op. Cit., pp.
2-6. 70 Idem
35
du commerce, de l'investissement, de l'APD et de la
migration71. La Chine a augmenté son aide financière
aux pays africains sous-développés et pauvres en capital,
notamment l'Afrique subsaharienne, la plupart du temps sous la forme de dons,
d'allégement de la dette, des infrastructures, ou les conditions de
prêt favorables (par exemple: les prêts avec une bonification
d'intérêt) bien au-delà de ce que ses entreprises et
institutions sont prêtes à fournir, en échange de
l'accès aux ressources naturelles.
Dans la relation sino-africaine, 80 % des exportations
africaines vers la Chine concernent le pétrole. Plus de 90 % du
pétrole importé par la Chine proviennent de quatre pays :
l'Angola (51 %), le Soudan (18 %), le Congo-Brazzaville (13 %) et la
Guinée équatoriale (11 %), ensuite viennent loin derrière
le Nigéria (3 %), le Gabon et le Tchad (1 %). En effet, l'Afrique est le
second fournisseur de pétrole (26 % en 2007), après le
Moyen-Orient (39 %). Et la Chine est la seconde destination du pétrole
de l'Afrique subsaharienne, après les États-Unis, mais avant
l'Union Européenne72. Selon Dzaka (2008), les objectifs
majeurs de la coopération sino-africaine sont73 :
- la promotion des investissements bilatéraux ;
- la coopération dans divers domaines (la paix et la
sécurité, consultation au sein des organisations internationales,
coopération en droite ligne avec le NEPAD, etc.) ;
- un engagement en faveur de la paix sur le continent ;
- le rééquilibrage de la balance commerciale.
Par ailleurs, en ce qui concerne le financement de l'APD, nous
convenons qu'à la suite des travaux de Dzaka (2008), un modèle a
émergé dans le financement de l'APD de la Chine à
l'Afrique. Ce modèle établit une distinction entre les
infrastructures sociales et les projets de développement relatifs aux
secteurs industriels et aux infrastructures économiques. L'aide
bilatérale chinoise, quant à elle, est destinée aux
infrastructures sociales (hôpitaux, adductions d'eau potable,
établissements scolaires...) et aux bâtiments gouvernementaux
(ministères, stades...) ainsi qu'à l'assistance
technique74. Elle est assurée par les dons, les prêts
sans intérêts ou à très faibles taux avec
possibilités de rééchelonnement de la dette et/ou de son
annulation. Par contre le financement des projets industriels et des
infrastructures
71www.focac.org,
http://english.focacsummit.org/2006-11/05/content_5167.htm
72 Idem.
72 Alden, C., Alves, A.C., « China and
Africa's Natural Resources : The Challenges and Implications for Development
and Governance », in Occasional Paper, South African
Institute of International Affairs, September 2009, n° 41, p. 7.
Cité par Tanguy Struye de Swielande (2010), La Chine et les
grandes puissances en Afrique : une approche géostratégique et
géoéconomique, Ed, Presses Universitaires de Louvain, p.
30.
73 T. Dzaka. L'aide publique au
développement de la Chine aux pays pétroliers et miniers
d'Afrique centrale contribue-t-elle au développement durable des pays
récipiendaires ? Tunis : BAD-CEA Conférence
économique africaine, 12-14, novembre 2008. 21p, cité par Amadou
DIALLO. (2012), op. Cit., p. 56.
74 Idem
36
économiques est fourni par des prêts à
taux préférentiels et des crédits commerciaux. C'est dans
cette perspective que la nouvelle coopération économique entre
Pékin et N'djamena semble être conduite par les deux parties avec
grand intérêt. Dans cette coopération, la Chine cherche
à profiter du pétrole pour satisfaire sa demande sans cesse
croissante et le Tchad cherche à assurer sa stabilité politique
ainsi que son développement économique. Une série
d'accords subséquents à l'accord cadre rétablissant les
relations entre les deux pays, signés le 04 janvier 2007 à
N'djamena, a permis au Tchad d'engranger les dividendes de ces relations. Il y
a eu, outre la conception d'un vaste programme de perfectionnement des cadres
de l'administration tchadienne et l'octroi à des jeunes tchadiens en
phase d'entrer à l'Université d'une soixantaine de bourses
d'études en Chine75 :
- l'annulation totale de la dette (y compris les
arriérés) du Tchad, pour un montant total de 34 millions de
dollars ;
- un don d'un montant de 66 millions de dollars ;
- l'envoi d'une mission médicale chinoise à
l'hôpital de la Liberté de N'djamena pour une durée de deux
ans ;
- l'envoi d'une mission technique agricole avec un projet
rizicole dans la région du Mayo-Kebbi Est et un projet maraîcher
à Koundoul (à 25 kilomètres au sud de
N'djamena).
En septembre 2007, des prêts préférentiels
ont été accordés par la Chine dans les
télécommunications (45 millions de dollars), pour la construction
d'une cimenterie (92 millions de dollars) et pour la construction d'une
raffinerie. Ces prêts sont caractérisés par un délai
de grâce d'au moins 5 ans et un taux d'intérêt annuel de
1,5% et l'aide de la Chine en faveur du Tchad se chiffre à plus de 100
millions de dollars76, exception faite des accords-cadres de
construction de la raffinerie et de la cimenterie77.
Section 2 : Les modes et stratégies mis en
place par la Chine pour accompagner ses entreprises à
investir
L'Afrique paraît comme une cible
privilégiée des investissements chinois, une sorte de tremplin
dans la stratégie de mondialisation des grandes entreprises chinoises
encouragées par les autorités: en 2004 Hu Jintao déclarait
d'ailleurs que la mondialisation constituait un axe prioritaire pour
l'économie chinoise78. L'Afrique présente une
situation particulièrement
75Symphorien Ndang TABO et Al. (2008), op. Cit., pp.
10-11.
76 Pour plus de précision voir les annexes
77 Idem
78Valérie NIQUET. (2006), op. Cit., pp. 6-8.
37
favorable pour les investissements et les entreprises
chinoises: bien souvent elles n'y rencontrent une concurrence limitée du
fait de la désaffection occidentale qui a suivi la fin de la guerre
froide79. Les coûts pratiqués par les entreprises
chinoises et le fait que Pékin privilégie les zones vides
où la sécurité, tant des investissements que des
personnes, est mal assurée, facilitent considérablement
l'offensive chinoise. La Chine prend des risques que les grandes entreprises
occidentales ne peuvent assumer.
On est cependant amené à nous poser une
question. Quelles sont les stratégies d'implantation des FMN chinoises
en Afrique et notamment au Tchad ? En effet, avant d'aborder les
stratégies déployées par les entreprises chinoises, il est
nécessaire de comprendre comment ces entreprises s'implantent.
Cependant, un bref rappel sur les modes d'implantation de ces entreprises nous
permettra de mieux comprendre les stratégies adoptées par ces
dernières. C'est pourquoi dans cette section, nous allons aborder tour
à tour les modes d'implantation des FMN chinoises (paragraphe1) et les
stratégies mises en place par la Chine pour accompagner ses entreprises
à investir à l'étranger (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les modes d'implantation des FMN
chinoises au Tchad
Les modes d'implantation des entreprises chinoises sur le sol
africain répondent d'abord à une logique de politique
étrangère de Pékin pour ensuite se diversifier tout en
étant en partie influencée par certaines dispositions des
autorités chinoises. Il s'agit là d'entités qui, pour
étendre leurs activités ont besoin de capitaux significatifs pour
opérer les IDE80. Le type d'investissement effectué
par une entreprise chinoise à l'étranger est
caractérisé par son statut juridique et l'origine de sa tutelle.
Selon Pairault (2011), les entreprises chinoises qui investissent à
l'étranger sont classifiées en six catégories : les
entreprises à capitaux d'Etat ; les entreprises appelées des
sociétés de capitaux, c'est-à-dire des
sociétés à responsabilité limitée et des
sociétés anonymes, dont le capital social peut être
totalement, partiellement ou nullement à capitaux d'Etat; les
entreprises privées dans lesquelles il y a de petites entreprises
individuelles et des sociétés de personnes; les entreprises
à capitaux étrangers dans lesquelles sont inclues les entreprises
dites chinoises de Hong-Kong, de Taiwan et d'outre-mer dont les capitaux
viennent majoritairement de l'étranger ; enfin les coentreprises
(à capitaux chinois) et les entreprises coopératives qui sont
groupées dans la catégorie autres entreprises81.
79Idem
80Amadou DIALLO. (2012), op. Cit., p. 20.
81Fode Sire DIABY. (2014), op. Cit., p. 43.
38
Tableau 1: Participation des entreprises chinoises à l'IDE
sortant non financier (2009)
Entreprises
|
Stock d'IDE sortant
|
Entreprises d'Etat
|
69,2%
|
Entreprises collectives
|
0,3%
|
Sociétés des capitaux*
|
27,6%
|
Entreprises privées
|
1,0%
|
Entreprises à capitaux étrangers
|
0,8%
|
Autres entreprises
|
1,1%
|
Source : (Pairault Thierry, 2011) dans Fode Sire DIABY. (2014),
op. Cit., p. 43.
*Les sociétés de capitaux sont totalement,
partiellement ou aucunement à capitaux publics Dans ce paragraphe, nous
allons aborder d'une part le mode d'implantation des entreprises publiques
(1-1) et d'autre part celui des entreprises privées (1-2).
1-2: Le mode d'implantation des entreprises publiques
Le mode d'implantation des entreprises publiques chinoises
découle de la logique politique de la Chine lancée en 2006, il
lie l'aide publique au développement, le commerce et l'IDE. Les grandes
entreprises chinoises d'Etat telles que la société
d'ingénierie d'outre-mer de Chine (COVEC), la société
générale d'ingénierie de chemin de fer, la compagnie
internationale des eaux et d'électricité (CWE), la
société nationale des travaux de construction du Henan de Chine
(CHECEC) et bien d'autres se voient attribuer des grands contrats de
construction en Afrique. Elles s'établissent sur le continent par
l'ouverture de filiales avec l'aide du gouvernement chinois et les
facilités accordées par le pays africains
bénéficiaires du projet82. En effet, dans le cadre de
l'implantation de ces entreprises, les firmes pétrolières jouent
un rôle très important. L'implantation de ces firmes se fait sous
la forme de la joint-venture ou package deal qui est connu sous le nom du
modèle anglais en Afrique. Ce modèle a été mis en
oeuvre pour la première fois en Angola et dans d'autres pays riches en
ressources naturelles en Afrique.
Au Tchad, actuellement, plus de 50 entreprises d'origine
chinoise opèrent dans les secteurs aussi variés que le commerce,
l'agriculture, la construction, les mines et le tourisme83. A
l'exception des entreprises comme la société filiale tchadienne
de la société
82 Amadou DIALLO. (2012), op. Cit.,
p. 21.
83www.fmprc.gov.cr/zflt/fra/jlydh/t1024662.htm.
39
pétrolière de Chine qui a financé la
construction de la raffinerie de N'djamena connue de tout le monde et qui
opère aujourd'hui sous la forme de la joint-venture avec la
société des hydrocarbures du Tchad (SHT), la
Société CAMC qui a réalisé la Cimenterie de
Baoaré, la société CGCOC Groupe qui a construit et est en
train de construire des routes totalisant à plus de 500
kilomètres de long, la société SINOMACH qui est
chargée de construire le projet de transmission et de transformation
électrique lequel est prévu pour atténuer la
pénurie de l'électricité dans la capitale N'djamena, la
société SIUCC de Shandong qui travaille à titre de
l'entrepreneur des travaux de construction du nouveau bâtiment du
parlement et du centre de formation des femmes tchadiennes, et enfin la
Société SINOHYDRO qui est en train de construire une route dans
le sud du pays. En effet, toutes ces entreprises sont à capitaux publics
et elles s'implantent au Tchad par le biais de l'APD mise en oeuvre par le
gouvernement central chinois.
1-2: Le mode d'implantation des entreprises
privées
Les entreprises privées chinoises opérant sur le
continent africain sont en très grande partie des PME et
dépassent de très loin en nombre les firmes d'Etat et les
entreprises semi-privées. En conséquence leurs investissements
quand bien même significatifs sont plutôt faibles comparés
à ceux des entreprises d'Etat engagées dans de grands projets
d'infrastructures associées à la recherche et l'exploitation
pétrolière et minière84. Néanmoins il
existe quand même un club très restreint de firmes privées
dont les capacités financières et technologiques sont beaucoup
élevées parmi lesquelles LENOVO, ZTE, HUAWEI, SUNTECH Power et
HAIER pour ne citer que celles-là qui, sont les plus connues. Quel que
soit leur poids les entreprises privées échappent dans une large
mesure au contrôle des autorités centrales qui régulent les
IDE pour prendre en compte les intérêts de l'Etat chinois. La
nature privée de ces entreprises et la grande marge de liberté
dont elles disposent font que leurs investissements sont guidés par un
souci de croissance ou d'exploitation d'opportunités économiques
existantes sur le marché africain pour les investisseurs
privés85.
Au Tchad on peut trouver les entreprises privées
chinoises dans les domaines tels que l'hôtellerie, l'import-export, le
service, les outils agricoles, l'élevage, l'industrie textile, etc. Nous
pouvons citer entre autres: la Société Huawei et la
Société ZTE qui sont parmi les plus importants fournisseurs des
équipements de télécommunication à l'échelle
mondiale et qui sont entrées en collaboration avec les entreprises
spécialisées dans le secteur de la
84Amadou DIALLO. (2012), op. Cit., pp. 23-24.
85 Idem
40
télécommunication du Tchad avec le projet CHAD
CDMA 2000 (Code Division Multiple Access, Téléphonie fixe sans
fil) et la téléphonie mobile au sein de la société
des télécommunications du Tchad. En effet, le mode d'implantation
de ces entreprises est commandé par le niveau d'investissement et le
secteur d'activités visés. Or pratiquement tous les secteurs de
l'économie africaine sont ciblés par les PME chinoises,
même ceux où traditionnellement opèrent les grandes
entreprises publiques ou semi-privées. Ainsi, leur implantation se
manifeste par la création d'unités de production ou d'usines de
fabrication de taille moyenne dans le secteur de la manufacture quelle que soit
l'industrie concernée86.
Paragraphe 2 : Les stratégies mises en place
par la Chine pour accompagner ses entreprises à investir à
l'étranger
Au cours de ces dernières années, la Chine a
développé sur le continent africain une stratégie
agressive de pénétration des marchés, en exploitant les
failles de relations paternalistes longtemps fondées sur des zones
d'influence historique entre les puissances occidentales et les pays africains.
La Chine a mis en place des stratégies et des moyens colossaux pour
accompagner ses entreprises dans leur processus d'internationalisation, ce qui
n'est pas le cas de la puissance occidentale. Comme le souligne
Chaponnière (2006), la stratégie chinoise se démarque de
celle de ses prédécesseurs sur deux points importants pour
l'avenir87:
- la Chine est très ouverte aux investissements directs
étrangers (IDE), elle est devenue l'une des plus grandes destinations
des IDE. La Chine joue de son attractivité pour acquérir des
technologies et renforcer la R&D ;
- les moteurs de la croissance chinoise ont été
l'exportation et l'investissement, encouragés par l'abondance de
liquidités et des taux d'intérêt bas. En effet,
l'investissement représente 40 % du PIB de l'économie chinoise
depuis 2000.
Ainsi, l'internationalisation des FMN chinoises provient des
entreprises à capitaux publics, bénéficiant d'un soutien
multiforme, en particulier financier, de l'Etat stratège qui
opère au profit d'un véritable capitalisme d'Etat chinois
à travers notamment la conclusion de divers accords de partenariats
stratégiques avec les pays d'accueil (contrats pétroliers et
86 Ibidem
87Jean-Raphaël Chaponnière (2006),
Les échanges entre la Chine et l'Afrique : situation actuelle,
perspectives et sources pour l'analyse, Agence française de
développement, p. 150.
41
miniers contre la réalisation de projets
d'infrastructures et les joint-ventures)88. En effet, ces firmes ont
eu le privilège d'accéder à des capitaux bon marché
en liaison avec des stratégies de long terme, à l'inverse de
leurs concurrentes occidentales qui ont tendance à identifier les
investissements risqués avec l'opportunité de réaliser des
IDE à taux élevés de retour et considérant
l'instabilité politique des pays africains comme une contrainte. Par
ailleurs, nous convenons à la suite des travaux d'Alden et David (2006),
que les FMN pétrolières chinoises déploieraient sur le
continent africain trois types de stratégies
managériales89 :
- la stratégie d'approvisionnement et
d'intégration verticale : c'est le cas de SINOPC qui a largement investi
au Soudan et en Angola, ainsi qu'au Congo-Brazzaville et au Gabon. Tout comme
la FMN CNPC qui a réalisé des investissements en amont et en aval
de la filière énergétique au Gabon et surtout au Tchad
où elle va construire la première raffinerie du pays d'accueil,
parallèlement à ses activités de prospection et de forage
;
- il s'agit de la stratégie de sécurité
énergétique au profit de l'Etat chinois. Dans ce sens, pour
l'Etat chinois (y compris les fonds souverains), il est impératif
d'acquérir des actifs énergétiques à
l'étranger, notamment en Afrique, en Amérique latine et au
Moyen-Orient. Dans cette perspective, le gouvernement chinois appuie
directement ses FMN au plan financier et lie ce soutien aux projets de
développement (l'aide-projet), y compris en intervenant auprès
des leaders politiques des pays cibles ;
- et enfin, la stratégie de partenariats et de
joint-ventures, celle-ci permet aux FMN chinoises de s'associer aux partenaires
locaux et/ou ceux des pays occidentaux sur les marchés étrangers
en vue d'un apprentissage technologique et managérial, à l'instar
de la joint-venture SSI Sonangol (45%) Sinopec (55%) International
établie en Angola entre SINOPEC et SONANGOL, la firme publique angolaise
de pétrole.
Dans ce paragraphe, nous examinerons d'une part la
stratégie de financement des entreprises chinoises (2-1) et d'autre part
le modèle angolais (2-2).
2-1: La stratégie de financement
La Chine a mis en place en 2007 un fonds sino-africain pour
encourager ses entreprises à investir en Afrique. Ce fonds a pour but de
soutenir la coopération stratégique dans les domaines politique,
économique et diplomatique. Il est doté d'un milliard de
dollars
88 T. Dzaka. (2011), L'investissement chinois
en Afrique centrale, Outre-Terre2011/4 n° 30, p. 207-226.DOI:
10.3917/oute.030.0207.
89 Idem
42
de la part de la Banque chinoise de développement, un
capital qui devrait atteindre cinq milliards de dollars dans les prochaines
années. Le plan d'action adopté à l'issue du sommet
Chine-Afrique de 2006 indique que ce fonds« soutient les entreprises
chinoises performantes et crédibles et les encourage à investir
en Afrique surtout dans les projets qui permettent aux pays africains
d'améliorer le niveau technologique, de créer des emplois et de
contribuer au développement durable économique et social
»90. Le président du fonds, Gao Jia, a
indiqué que cet établissement va se concentrer sur les secteurs
susceptibles de développer l'Afrique, comme l'agroalimentaire,
l'électricité, les infrastructures routières et les
systèmes d'adduction d'eau.
En outre, la Chine dispose d'une réserve de change
colossale de plus 1 900 milliards de dollars pour l'essentiel à la
disposition de l'Exim Bank (China Export-Import Bank) de façon à
mener sa politique d'investissement à l'étranger. Cette banque
étatique joue un rôle essentiel dans la rétrocession de
prêts gouvernementaux étrangers à des conditions
préférentielles et elle négocie des contrats de travaux
publics ou tout type d'investissement à l'étranger, ceci
s'appliquant en particulier à l'Afrique. C'est une banque à
caractère politique créée en 1994, entièrement
détenue par l'État et qui relève directement de
l'autorité du Conseil des affaires de l'État. Sa notation
internationale de solvabilité est identique à la notation
souveraine de la Chine. L'Exim Bank dispose dans le monde, d'un bureau de
représentation pour le Sud-Est de l'Afrique, d'un bureau à Paris
et d'un autre bureau à Saint-Pétersbourg. Elle a noué des
relations par le biais de quelque 300 représentations à travers
le monde. Cette structure bancaire et financière est un acteur majeur du
développement économique et commercial de la Chine à
l'étranger. Elle est le principal canal de financement à
caractère dit politique des exportations de produits mécaniques
et électroniques, des installations clés en main et des
livraisons de produits hautes technologies, ainsi que des contrats de travaux
publics et de tous types d'investissements à l'étranger, jouant
ainsi un rôle essentiel dans la rétrocession de prêts
gouvernementaux étrangers de même qu'elle est chargée par
l'État chinois de proposer des prêts à des conditions
préférentielles à l'étranger.
Dans son déploiement à l'étranger,
Pékin, sur le plan opérationnel, a mis à contribution les
secteurs essentiels de l'économie. Ainsi, dans le domaine des
matières premières énergétiques, la china national
petroleum corporation(CNPC) et la china petroleum and chemical
corporation(SINOPEC) pour ne citer que ces deux majors, mettent en oeuvre une
politique d'approvisionnement énergétique par l'exploitation
à des conditions
90Fode Sire DIABY. (2014), op. Cit., pp.
144-145.
43
avantageuses de champs pétroliers dans nombre de pays
africains. En effet, la Chine est présente au Tchad principalement par
le biais de sa société la china national petroleum corporation
(CNPC). La CNPC est une entreprise pétrolière appartenant
à l'État chinois dont l'essentiel de ses activités ont
été transférées à une filiale cotée
en bourse, la Petro China. Elle est présente dans 30 pays d'Afrique,
d'Asie et d'Amérique. Tout comme au Kazakhstan où elle a fait
l'importante acquisition de la société canadienne Petro
Kazakhstan pour 4,18 milliards de dollars. En 2010, la CNPC a
réalisé un chiffre d'affaires de 240, 192 milliards de dollars,
devenant ainsi la 6e compagnie pétrolière au monde.
Ainsi, comme nous avons souligné plus haut, la Chine qui semblait
être intéressée par le pétrole a racheté par
l'entremise de la CNPC l'ensemble des permis d'exploration
pétrolière de la société canadienne ENCANA. Elle
exploitera cette raffinerie à travers la CNPC à hauteur de 60 %
contre 40 % de la société des hydrocarbures du Tchad.
2-2 : Le modèle angolais
Les entreprises chinoises s'associent dans la plupart de cas
à des sociétés africaines ou nationales pour l'exploration
et l'exploitation des gisements, pour la construction des infrastructures, etc.
Ce qui n'est pas le cas des multinationales occidentales qui travaillent
naturellement seules ou en consortium entre elles91. Il y a
plusieurs exemples des JV en Afrique, mais le cas le plus connu est celui de
modèle angolais. Selon Martyn Davies et al., (2008), Sanfilippo. (2011),
Dzaka. (2011), ce modèle correspond à un package deal mis en
oeuvre par la Chine pour gestion optimale du risque pays en Afrique. Il lie
l'APD, le commerce et les IDE effectués par les FMN publiques chinoises
dans les pays d'accueil richement dotés en ressources
pétrolières et minières. En effet, il convient de rappeler
qu'aucune somme d'argent n'est directement prêtée au gouvernement
africain, mais le gouvernement chinois mandate une firme publique de
construction recevant en général le soutien financier de China
Export-Import Bank pour réaliser des projets d'infrastructure avec
l'accord du gouvernement africain92. En contrepartie de la provision
de ces infrastructures, le gouvernement africain accorde aux FMN chinoises le
droit d'exploiter des ressources naturelles dans le pays d'accueil via
l'acquisition de parts dans une entreprise publique nationale sous forme de JV
ou de licences de production.
91Fode Sire DIABY. (2014), op. Cit., p. 145.
92 T. DZAKA. (2012), Le rôle des
joint-ventures et alliances stratégiques dans l'internalisation des
multinationales chinoises : évidence pour les pays d'Afrique
Centrale, Editions ICES, Revue congolaise de gestion, pp. 105-107.
44
Par ailleurs, pour montrer cette stratégie
d'association, nous pouvons citer plusieurs exemples. L'Angola, par exemple,
est un pays membre de l'OPEP depuis 2007, et actuellement 2e
exportateur mondial de pétrole vers la Chine, après l'Arabie
Saoudite, Sinopec a créé, en 2006, une JV, SSI (Sonangol Sinopec
International) avec le partenaire public angolais, Sonangol (45%), pour une
participation majoritaire du partenaire chinois (55%).L'objectif poursuivi
consistait à exploiter conjointement les participations dans les blocs
pétroliers offshores et de construire une seconde raffinerie du pays
à Lobito, la Sonaref d'une valeur de 3,5 milliards de dollars et d'une
capacité de 240000 barils/jour, toujours sous forme d'une JV entre
Sonangol (70%) et Sinopec (30%). Il est vrai que les négociations sur le
projet de la raffinerie ont été suspendues en 2007, l'Angola
ayant décidé par patriotisme économique de réaliser
seul ce projet pour réduire sa dépendance en matière de
carburants importés qui est actuellement de l'ordre de
60%93.
Plus généralement, outre l'Angola, les trois
principales FMN pétrolières chinoises (CNPC, SINOPEC, CNOOC) ont
investi, à compter du milieu des années 2000, dans tous les
autres pays pétroliers d'Afrique Centrale (Congo-Brazzaville, Tchad,
Gabon, Guinée Equatoriale, Cameroun) en fonction de leur
spécialisation à travers des alliances de type contrats de
partage de la production, impliquant souvent comme partenaires les entreprises
publiques pétrolières des pays d'accueil et/ou les majors
pétroliers des pays occidentaux ou ceux des pays émergents
(Dzaka, 2011). En effet, en République Démocratique du Congo
(RDC), par exemple l'accord de prêt concessionnel chinois de 8,5
milliards de dollars a été conclu en avril 2008,
conformément au « modèle angolais »: contrats miniers
contre infrastructures et JV. Ce contrat apparaît à ce jour le
plus important contrat chinois signé avec un Etat africain, ceci
s'explique certainement par le fait que la RDC considérée comme
un « scandale géologique » soit richement dotée en
ressources minières (cuivre, cobalt, diamant, or, coltan, etc.) dont
l'économie de la Chine a tant besoin pour poursuivre sa croissance
rapide. Au terme de cet accord, a été constituée une JV
minière, dénommée SICOMINES, entre l'entreprise publique
locale, la GECAMINES (32%) et un consortium de cinq FMN chinoises (68%): China
Railway Group Ltd, Sinohydro Corporation, China RailwaySino-CongoMining Ltd,
Sinohydro Harbour Co Ltd, China Railway Ressources Development Ltd. En
contrepartie du prêt concessionnel de la China Exim Bank (durée de
remboursement: 30 ans; taux d'intérêt: 0,25%) un contrat
d'exploitation des ressources minières réserves de
93 T. DZAKA. (2012), op. Cit., pp. 107-108.
10616070 tonnes de cuivre, de 626619 tonnes de cobalt et, pour
un tonnage restant à déterminer, toutes substances
minérales valorisables a été accordé à la
Chine94.
Un autre exemple est celui du Tchad où la CNPC a
livré clés en mains à l'Etat tchadien en juin 2011 sa
première raffinerie d'une capacité de 20000 barils/jour. Dans
cette JV dénommée société de raffinage de N'djamena
(SRN), dont la durée de vie est prévue pour 99 ans, la CNPC
détient une participation majoritaire à hauteur de 60% contre 40%
pour la société des hydrocarbures du Tchad (SHT) 95 .
La JV a prévu le volet transfert de connaissances aux travailleurs
tchadiens notamment à travers la formation en Chine de 50
ingénieurs et techniciens. Ces derniers ont de ce fait, en 2010,
passé un stage professionnel en Chine dans le domaine de la gestion et
l'exploitation dans l'industrie du raffinage. Cette formation a
été complétée au Tchad par un stage
d'imprégnation des stagiaires tchadiens aux normes de
sécurité sur le site de la raffinerie, sous l'encadrement
d'ingénieurs chinois.
Nous convenons de ce qui précède, que les
stratégies d'implantation des FMN chinoises divergent de celles des
firmes occidentales. Elles lient, comme nous venons de le voir, la
coopération, l'aide publique au développement et l'IDE. C'est
dans cette perspective que nous nous posons la question de savoir : quels sont
les effets de ces stratégies sur la diversification de l'économie
tchadienne ? C'est ce que nous allons examiner dans la partie qui suit.
45
94 T. DZAKA. (2012), op. Cit., pp. 111-112.
95 Idem
46
Deuxième partie : Les effets des
stratégies d'implantation des firmes multinationales chinoises sur la
diversification de l'économie tchadienne
47
Depuis plus d'une décennie nous assistons de plus en
plus à la présence des investissements directs étrangers
d'origine chinoise. Face à l'ampleur de ce phénomène un
consensus se dégage parmi les auteurs pour dire que les impacts de ses
investissements sur les économies sont loin d'être atteints du
fait de leur caractère récent. Dans un rapport de la Banque
mondiale ces auteurs constatent qu'il est difficile d'obtenir des
données désagrégées pour mener une analyse un peu
fine des rapports entre la Chine et l'Afrique, d'où leur
nécessité de définir une méthodologie pour
constituer une base des données relative à leur objet de
recherche. De plus les statistiques sur les IDE chinois présentent
quelques différences par rapport aux autres IDE notamment ceux des pays
développés. Les statistiques chinoises sur les IDE sortants
présentent des lacunes majeures qui rendent les évaluations de
montant, nombre et secteurs d'investissement particulièrement
difficiles.
C'est pourquoi, dans cette partie, nous nous proposons de
présenter d'abord les investissements directs étrangers (IDE)
chinois au Tchad (Chapitre III) et puis ensuite d'analyser l'apport de ces
investissements sur la diversification de l'économie tchadienne
(Chapitre IV).
48
CHAPITRE III : LES INVESTISSEMENTS DIRECTS ETRANGERS
(IDE) CHINOIS AU TCHAD
L'objectif de ce chapitre consiste à présenter
les investissements directs étrangers (IDE) chinois au Tchad. Pour ce
faire, la question des conditions de l'attractivité des investissements
directs étrangers (IDE) est devenue au coeur des réflexions
stratégiques des pays en voie de développement (Ferrara et
Henriot, 2004). Durant ces dernières années, on a assisté
à une concurrence entre les responsables gouvernementaux pour attirer
les firmes multinationales. Certains ont joué sur les politiques
fiscales en proposant des exonérations pendant une période
donnée. D'autres pays ont proposé des subventions
spécifiques et une atténuation des restrictions imposées
habituellement comme le contenu local minimum ou bien la limitation de
l'importation des biens intermédiaires à un montant lié
aux exportations, un niveau maximum d'exportation, etc.96 C'est
pourquoi, nous nous proposons de présenter dans ce chapitre, les
politiques d'attractivité d'IDE (section 1) avant d'aborder les
investissements directs étrangers (IDE) chinois au Tchad (section 2).
Section 1 : Les politiques d'attractivité
d'investissements directs étrangers (IDE) au Tchad
Dans les années 1950 et 1960, les flux
d'investissements directs étrangers (IDE) à destination des pays
en voie de développement (début de leur accession à
l'indépendance) étaient très faibles. Cela s'explique par
le fait que, pour des raisons politiques, beaucoup de décideurs
considéraient l'IDE comme une menace réelle et un facteur de
dominance pouvant porter atteinte à la souveraineté nationale
nouvellement acquise (Alaya, 2004). L'IDE était considéré
comme un facteur de domination et les firmes multinationales étaient
soupçonnées de réduire le bien-être social par la
manipulation des transferts, des prix et la formation d'enclaves
économiques. Aujourd'hui, on assiste à un changement radical de
l'attitude des pays en voie de développement vis-à-vis de
l'investissement direct étranger. Le comportement de suspicion est
désormais remplacé par une politique de promotion visant à
drainer des flux substantiels d'IDE (Oman, 2000). Ce changement d'attitude a
été rendu possible en partie grâce à un
environnement économique mondial de plus en plus libéral et une
littérature économique abondante vantant les mérites de
l'IDE.
L'objet de cette section consiste à montrer comment les
politiques d'attractivité d'IDE au Tchad sont organisées.
Cependant, on entend par la politique d'attractivité l'ensemble des
96 DRISS Slim. (2007), op. Cit., p. 138.
49
politiques économiques, fiscales, douanières et
institutionnelles que les autorités ont élaboré afin de
rendre le pays attractif aux yeux des investisseurs. C'est pourquoi, nous
verrons dans le paragraphe suivant comment l'attractivité d'IDE est
organisée au Tchad.
Paragraphe 1 : L'attractivité d'investissements
directs étrangers (IDE) au Tchad
Les institutions publiques sont naturellement l'un des
déterminants essentiels de la compétitivité des
entreprises, de leur capacité et volonté d'investir. Un
environnement défavorable en la matière conduit à des
surcoûts de production qui ne sont pas supportables dans un contexte de
globalisation marqué par l'intensification de la concurrence à la
fois sur le territoire national et, bien-sûr, sur les marchés
tiers. L'État est donc un acteur de toute première importance. La
façon dont il remplit ses tâches régaliennes en termes de
sécurité des personnes, des biens et de fourniture de services
publics marchands et non marchands affecte directement la rentabilité
privée des entreprises et, par conséquent, les décisions
d'investissements97.
1-1: La politique économique
La politique macroéconomique, d'ouverture et de
privatisation a pour but d'attirer les firmes multinationales.
? La politique budgétaire
La mise en oeuvre d'un programme économique
signé en juillet 2013 avec le FMI a permis d'améliorer
l'orientation budgétaire du pays. Ses résultats positifs ont
conduit à l'approbation par le FMI d'un accord triennal au titre de la
facilité élargie de crédit (FEC), pour un montant total
équivalant à 79.92 millions de DTS (environ 122.4 millions de
dollars), le 1er août 2014. Sa bonne exécution a permis
d'atteindre le point d'achèvement de l'Initiative Pays Pauvres
Très Endettés (PPTE) au cours de l'année
201598. La réalisation de cet objectif a permis au Tchad de
bénéficier d'une réduction de sa dette de près de
850 millions de dollars, selon les estimations du FMI. La consolidation
budgétaire s'est poursuivie tout au long de l'année 2014, comme
l'atteste l'évolution du déficit primaire hors pétrole
rapporté au produit intérieur brut (PIB) hors pétrole, qui
est ainsi passé de 20,1% du PIB hors pétrole en 2010 à
17,6 % et 16% du PIB hors pétrole respectivement en 2013 et
201499. La loi de finance rectificative a pris en compte des
dépenses d'investissement, notamment celles
97 BAD. (2012), Environnement de
l'investissement privé au Tchad, p. 17.
98 Rapport PNUD 2015.
99 Idem
50
liées à l'organisation programmée du
sommet de l'Union Africaine en 2015 et des dépenses en matière de
sécurité. La baisse des recettes pétrolières
générée par celle de la production de pétrole,
ainsi qu'un accroissement du service de la dette pour faire face au
remboursement d'une avance sur les ventes de pétrole et d'un emprunt
obligataire contracté en 2013, ont également été
pris en compte dans la loi de finance rectificative de 2014.
La mise en oeuvre d'un plan visant à toiletter le
fichier de la solde des fonctionnaires a été engagé en
2014. Il permettra de réaliser une économie annuelle pouvant
aller jusqu'à près de 17 milliards francs CFA. L'organisation
d'une table ronde sur le financement du gap du PNUD (2013-15) et du programme
national de sécurité alimentaire (PNSA) en juin 2014 a permis
d'enregistrer des promesses de financement de plus de 1 000 milliards francs
CFA, donnant ainsi plus de cohérence avec la programmation
budgétaire du pays et aussi davantage de visibilité en
matière de financement, notamment pour les programmes d'actions
prioritaires (PAP) retenus dans ce plan. La bonne exécution du PNUD est
l'un des éléments clés pour atteindre le point
d'achèvement de l'initiative PPTE. Par ailleurs, au sujet de la
transparence de la gestion pétrolière, des efforts ont
été réalisés via l'initiative pour la transparence
dans les industries extractives (ITIE). Ils ont permis au Tchad d'obtenir la
conformité à la norme ITIE en octobre 2014.
? La politique monétaire
Bien que disposant d'instruments variés pour soutenir
et orienter l'investissement productif, les orientations de la politique
monétaire du Tchad sont déterminées par la Banque des
États de l'Afrique Centrale (BEAC), du fait de son appartenance à
la zone franc. Constituée de trois zones monétaires: les Comores,
l'Union Monétaire Ouest-Africaine (UMOA) et l'Union Monétaire
d'Afrique Centrale (UMAC), à laquelle le Tchad appartient, la zone franc
permet aux États membres de bénéficier d'un système
de taux de change fixe mais ajustable, d'une garantie illimitée
accordée par le trésor français aux monnaies émises
par les différentes institutions régionales d'émission,
d'une centralisation des réserves de change et d'une liberté de
transfert des capitaux. En ce qui concerne le Tchad, la BEAC, via son
comité de politique monétaire (relayé au niveau national
par le comité monétaire financier) définit les grandes
orientations de la politique monétaire et la gestion des réserves
de change.
La politique monétaire conduite en zone CEMAC vise deux
objectifs au moyen de l'utilisation des taux d'intérêt comme
instrument de la régulation monétaire : d'une part le taux
d'intérêt d'appels d'offres, dit TIAO et d'autre part à
maîtriser l'inflation et à conforter le niveau de parité du
franc CFA/euro. Son niveau a été abaissé au cours de
l'année 2014,
51
passant de 3.25 % en octobre 2013 à 2.95 % en juillet
2014, afin de soutenir l'activité économique de la
sous-région par la mise en oeuvre d'une politique monétaire
accommodante, sur le modèle de celle conduite par la Banque Centrale
Européenne (BCE). Les avoirs extérieurs nets ont
enregistré une baisse de près de 4.5 % entre fin décembre
2012 et fin décembre 2013, notamment en raison de la baisse des
exportations de pétrole. Cette tendance pourrait s'accentuer avec la
baisse du prix du pétrole observée sur le marché
international en 2014. Sur l'ensemble de l'année 2013, le taux
d'inflation au Tchad s'était établi à 0.2 %, largement en
deçà de la norme communautaire de 3 % fixée dans le cadre
du pacte de convergence de la zone CEMAC. En 2014, toutefois le taux
d'inflation est remonté à 2.9 %, selon les estimations, en raison
notamment d'une moins bonne campagne agricole et de la fermeture de la
frontière avec le Nigéria, qui affecte le commerce
intracommunautaire100.
? La politique d'endettement
L'endettement est considéré comme un obstacle
aux IDE car il est une source d'incertitude, de la même manière
que la politique économique est aussi incertaine avec un taux
d'endettement élevé. Les risques combinés d'inflation et
d'imposition réduisent l'investissement. Cependant, le paiement du
service de la dette réduit l'excédent des ressources domestiques
susceptibles d'être consacrés aux investissements. Cette situation
décrédibilise l'image du pays à l'échelle
internationale. Ainsi, Borensztein (1990, p.315) pense que pour les
investisseurs domestiques, l'existence d'une dette très
élevée réduit le rendement futur des investissements car
une proportion très élevée du profit sera utilisée
pour le paiement de la dette101. En effet, un taux d'endettement
modéré est considéré par les investisseurs comme un
signe de bonne gestion et partant, susceptible d'attirer plus d'IDE.
Dans le cadre du programme signé avec le FMI en vue de
l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative PPTE,
l'évolution de la dette fait l'objet d'une attention
particulière. Afin d'en contrôler son évolution, des
changements ont été effectués dans son suivi. Tout projet
de prêt doit désormais être examiné par la commission
nationale d'analyse de la dette (CONAD), présidée par le ministre
des finances et du budget et appuyée par l'équipe tchadienne
d'analyse de viabilité de la dette (ETAVID).Les missions de cette
commission sont les suivantes : définir une stratégie nationale
d'endettement et de désendettement et évaluer les offres de
financement. L'atteinte du point d'achèvement de l'initiative de
désendettement doit permettre au Tchad de réduire
significativement le risque
100 Idem
101Ibrahim NGOUHOUO. (2008), Les
investissements directs étrangers en Afrique centrale:
attractivité et effets économiques, thèse de
doctorat en Sciences économiques, Université du Sud Toulon-Var,
France, p. 59.
52
élevé de surendettement constaté par le
FMI dans sa dernière analyse de la viabilité de la dette, en
août 2014, et de bénéficier ainsi d'une réduction de
la dette évaluée à près de 850 millions de dollars.
L'évolution récente de la dette, tant externe qu'interne, se
caractérise par une tendance à la hausse. La dette publique
extérieure a ainsi atteint 23.5 % du PIB en 2013, contre 20.3 % du PIB
en 2012, et elle est estimée à 27.1 % du PIB en 2014
102 . L'augmentation de ce ratio s'explique essentiellement par le
recours à des prêts commerciaux relativement importants au cours
de l'année 2013. Pour sa part, la dette publique intérieure est
passée de 7.7 % en 2012 à 8.3 % en 2013, en raison notamment de
l'émission d'emprunts obligataires sur le marché régional
et des prêts contractés auprès de certains pays de la
CEMAC.
1-2: La politique des réformes
Le Tchad s'est engagé résolument depuis
décembre 1990 pour la démocratie et l'Etat de droit, après
trente ans de dictature et de troubles politico-militaires. Cela constitue
incontestablement le grand changement qualitatif dont il faut attendre des
bénéfices certains dans tous les secteurs économiques. Il
encourage la libre entreprise et les investissements privés, tant
nationaux qu'étrangers, considérés comme levier du
développement économique et industriel. Un certain nombre de
textes garantissant les investissements privés ont été
élaborés par le gouvernement. Il s'agit de: la charte
communautaire des investissements, la charte des investissements de la
République du Tchad, le code minier, le code des impôts, le code
des douanes, etc. Le Tchad a conclu des accords bilatéraux et
multilatéraux en matière de garantie des investissements: Agence
Multilatérale de Garantie des Investissements (AMGI), Agence
Internationale pour le Règlement des Différends relatifs aux
Investissements (CIRDI)103.
? La charte nationale des investissements
La loi n°006/PR/2008 du 3 janvier 2008 a institué
la charte des investissements de la République du Tchad 104 .
Cette charte constitue le cadre juridique de l'ensemble des dispositions
destinées à favoriser l'instauration d'un environnement et des
dispositions propices à la promotion des investissements et à
l'implantation des entreprises. Elle énonce les objectifs et les
mécanismes à mettre en oeuvre pour favoriser l'investissement ou
l'expansion des entreprises et des activités industrielles, sans
discrimination selon l'origine de
102 Rapport PNUD 2015.
103 Ministère du commerce et de l'industrie (2011),
Investir au Tchad. 104Voir charte nationale des
investissements (2008).
53
l'investisseur et le secteur d'activité dans lequel il
opère. Elle prévoit un certain nombre d'avantages et de garanties
à accorder aux investisseurs tant nationaux qu'étrangers.
? Le régime douanier
Le régime douanier applicable au Tchad est le
régime de la Communauté Economique et Monétaire de
l'Afrique Centrale (CEMAC) caractérisé par la libre circulation
des biens originaires des pays membres et un tarif extérieur commun
(TEC). Ce tarif extérieur commun a été récemment
simplifié et allégé notamment en ce qui concerne les biens
et matériels d'investissement dont le taux a été
réduit à 10% quelle que soit leur origine. En dehors de ce taux
privilégié, qui s'obtient sans aucune formalité
administrative, il n'y a pas d'autres droits et taxes à asseoir sur ces
biens et matériels qui sont totalement exonérés de la taxe
sur le chiffre d'affaires en vigueur au Tchad. Il existe également au
Tchad le régime de l'admission temporaire applicable aux
matériels lourds destinés à être
réexportés à la fin des opérations pour lesquelles
ils sont importés. Les droits de douane sont suspendus sur les
matériels bénéficiaires de ce régime pendant toute
leur durée d'utilisation au Tchad.
? Le régime fiscal
Le code général des impôts (CGI) accorde
aux investissements, des exonérations temporaires d'impôts et
taxes. Il s'agit particulièrement des contributions foncières des
propriétés bâties, des contributions foncières des
propriétés non bâties, de la taxe sur la valeur locative
des locaux professionnels, de la taxe forfaitaire et taxe d'apprentissage, de
la patente, de l'impôt minimum fiscal, de l'impôt sur les
sociétés, de la déduction de 40% des sommes investies des
bases taxables à l'impôt sur le revenu des personnes physiques et
l'impôt sur les sociétés105. Par ailleurs,
d'autres réformes en matière de réglementation telles que:
le projet du code de commerce, le projet de loi relative à la
liberté des prix et à la concurrence, le projet de loi relative
à la création d'une agence de la normalisation et de la
métrologie sont en cours106. Dans le paragraphe qui suit nous
parlerons des ressources naturelles susceptibles d'attirer les investisseurs
étrangers dont dispose le pays.
Paragraphe 2 : Les ressources naturelles
Le Tchad est l'un des pays d'Afrique Centrale disposant des
ressources naturelles considérables susceptibles d'attirer les IDE. En
1998, la CNUCED a estimé qu'il y a de façon
générale une probabilité de plus de 60% pour qu'un dollar
investi en Afrique aille dans les ressources naturelles et
particulièrement dans le secteur pétrolier. Assiedu (2000) abonde
dans
105 Idem
106 Ministère du commerce et de l'industrie (2011),
Investir au Tchad.
54
le même sens dans une étude sur les
déterminants des IDE en Afrique sub-saharienne: l'Afrique détient
plus de la moitié du cobalt du globe, le tiers de la bauxite et 12% de
la production mondiale de pétrole, sans parler des réserves
potentielles107. Depuis le début des années 2000, les
perspectives de développement ont radicalement changé grâce
à des facteurs d'économie géographique et à des
changements dans la dotation factorielle mobilisable, en l'occurrence la
découverte et l'exploitation des ressources pétrolières.
En effet, l'explosion des prix de pétrole au cours des années
2000 ainsi que l'exploration des gisements importants ont permis au Tchad
d'être au-devant de la scène. Dans ce paragraphe nous allons
aborder dans un premier temps le secteur pétrolier (2-1) et dans un
second temps les ressources hors pétrole (2-2).
2-1: Le secteur pétrolier
Selon les estimations de la BEAC en 2006, la CEMAC produit
environ 61,5 millions de tonnes de pétrole brut par an (dont 4.5
millions pour le Cameroun ; 13,8 millions pour le Congo; 13,4 millions pour le
Gabon; 18.5 millions pour la Guinée Equatoriale; et 11,4 millions pour
le Tchad). En 2004, les réserves pétrolières de la CEMAC
étaient évaluées à environ 160 milliards de
barils.108Ce n'est qu'en juin 2000 que la Banque Mondiale a
donné son accord pour l'exécution du projet d'exploitation du
pétrole, validant ainsi un vaste programme de développement
auquel les autorités croient beaucoup. La réalisation du
programme d'exploitation est d'un coût d'environ 3,7 milliards de dollars
et rapportera à l'Etat tchadien 2 milliards de dollars par an pendant 25
ans. Le gisement de Doba dans le sud du pays est le premier site d'exploitation
qui devrait fournir 225 000 barils par jour. Ce site regroupe les
localités de Komén de Bolobo et de Miandoum, formant le bassin de
Doba dans la région du Logone oriental. Dans ce bassin 300 puits
alimentent déjà des réservoirs de stockage109.
En effet, le transport du pétrole de Doba au port de Kribi au Cameroun,
se fera par un oléoduc de 1 070 km. Sur la côte Atlantique au sud
de Douala, au Cameroun se trouve le terminal offshore de Kibri d'où
chargeront des tankers pour le marché occidental. L'exploitation sera
donc effective à partir de la mi-juillet malgré la fin des
travaux des équipements de surface prévue en 2004, parce que le
pouvoir tchadien veut absolument tirer bénéfice de l'avance de 6
mois prise sur les prévisions initiales.
107Ibrahim NGOUHOUO. (2008), op. Cit., pp. 64-67. 108
Idem
109www.aefjn.org
55
L'exploitation du pétrole est confiée au
consortium composé par Exxon-Mobil (40%, Etats-Unis), Chevron (25%,
Etats-Unis) et Petronas (35%, Malaisie). L'Etat tchadien n'intervient que dans
la société de commercialisation du brut, pour une part de 5% du
capital du Tchad Oilcompany et 15% dans la même société,
côté camerounais. La production tchadienne de pétrole
intervient à un moment où l'Europe et les Etats-Unis veulent
réduire leur dépendance vis-à-vis de l'Arabie Saoudite et
du Moyen-Orient. La fourniture en hydrocarbures en provenance de cette
région vers les pays européens et nord-américains
s'élève à plus de 55%, contre une importation des pays
d'Afrique qui s'élève à 37%. Selon certaines études
et prévisions, la production africaine d'hydrocarbures devrait, à
l'horizon 2015, supplanter celle de l'Arabie Saoudite110. En effet,
selon la déclaration de Malabo du 7 octobre 2001, où on pouvait
entendre de la bouche de certains experts de la CEMAC que le Tchad sera dans
les prochaines années l'un des trois pôles de croissance de
l'industrie pétrolière en Afrique Centrale.
2-2: Les ressources hors pétrole
L'économie tchadienne possède des
potentialités énormes qui peuvent booster sa croissance et
entraîner son développement économique. Une large partie de
ses ressources existantes restent notamment inexploitées. Avant
l'ère pétrolière, l'agriculture et l'élevage
constituaient les deux mamelles de l'économie tchadienne, mais depuis
l'exploitation du pétrole, ils ont été
relégués au second rang. En effet, au Tchad le secteur agricole
emploie 77% de la population active et contribue à 22,6% du PIB (PNUD,
2010), les superficies irrigables sont estimées à 335
000hectares, moins de 10% de cette surface est effectivement mise en valeur
(PNSA, 2010). La production agricole reste donc largement dépendante du
rythme de la pluviométrie, ce qui autorise des fluctuations qui peuvent
aller du simple au double (près de 2 millions de tonnes en 2006-2007,
à peine 1,1 millions de tonnes en 20092010), si bien qu'elle n'a
satisfait que 5 fois sur 7 les besoins nationaux entre 2003 et 2009 (DPSA,
2010).En ce qui concerne l'élevage, l'effectif du cheptel national, mal
connu, avoisine 20 millions de têtes, dont plus de 7 millions de bovins
qui alimentent des flux réguliers d'exportation vers les pays voisins,
estimés à 26% de la valeur des exportations hors pétrole
(PNSA, 2010). Cependant, ceci n'empêche pas des importations du lait d'un
niveau double (environ 500 000 tonnes équivalent lait) à celui de
la production (Ministère de plan et de l'économie, 2006).
110 Idem
56
Par ailleurs, le Tchad dispose d'un cheptel important et de
ressources halieutiques non négligeables. Ces ressources jouent un
rôle fondamental dans la sécurité alimentaire en ce
qu'elles contribuent à améliorer l'apport en protéines et
constituent une importante source de revenus particulièrement dans les
régions semi-arides. Toutefois, la reproduction et la
productivité du cheptel restent également fortement
dépendantes des variations pluviométriques et de la
disponibilité de pâturage ce qui peut exacerber les conflits pour
l'utilisation des ressources naturelles avec les populations
sédentaires. A ces contraintes s'ajoutent la faible disponibilité
des aliments concentrés et la fragile situation zoo-sanitaire en raison
de la persistance des maladies du bétail. Les opportunités de ce
secteur ne se limitent cependant pas à ces éléments :
l'anacardier, l'hibiscus, la gomme arabique, le karité, le moringa, les
produits halieutiques, la spiruline, les arachides, le sésame, le lait
et les produits laitiers ainsi que le marbre ne sont que des exemples de
produits exploitables au Tchad qui sont peu ou mal utilisés. En
dépit de ses ressources, le Tchad demeure moins attractif pour les
investisseurs étrangers, cette situation s'explique par l'enclavement
géographique, la faiblesse des infrastructures et des ressources
humaines, les lenteurs judiciaires et administratives, les contraintes fiscales
et énergétiques ainsi que le risque sécuritaire dans la
région. En effet, une bonne exploitation de ce secteur peut contribuer
à l'augmentation des recettes et à la diversification de
l'économie tchadienne. Dans la section suivante nous abordons les
investissements chinois au Tchad.
Section 2 : Les investissements chinois au Tchad
La mondialisation financière a été
facilitée par l'internationalisation de la production et la croissance
des industries, le rythme rapide des changements technologiques et la
déréglementation des services financiers. Les nouvelles
technologies de l'information permettent la circulation transfrontalière
de données financières, 24 heures sur 24. L'entrée d'IDE
dans les pays en développement est généralement
considérée comme favorable: source de financement plus stable que
les investissements de portefeuilles, apports de technologies, producteurs
d'effets d'apprentissage, ils constituent une alternative à l'APD.
L'objet de cette section consiste à présenter
les investissements chinois au Tchad. Pour ce faire, un bref rappel sur les
investissements au Tchad dans le cadre général nous permettra de
mener à bien ce travail. C'est pourquoi nous nous proposons d'aborder
dans cette section la typologie d'IDE au Tchad (paragraphe 1) d'une part et les
caractéristiques des investissements réalisés par les
entreprises chinoises au Tchad (paragraphe 2) d'autre part.
57
Paragraphe 1 : La typologie d'investissements directs
étrangers (IDE) au Tchad
Depuis le boom pétrolier, le Tchad a enregistré
des entrées d'IDE importants de son histoire et de nombreuses
études et rapports estiment qu'il sera l'un des pays d'Afrique Centrale
qui recevra dans l'avenir le plus d'IDE. Dans ce paragraphe, nous abordons dans
un premier temps, l'origine d'IDE au Tchad (1-1) et dans un second temps, la
répartition sectorielle d'IDE au Tchad (1-2).
1-2: L'origine d'investissements directs étrangers
(IDE) au Tchad
En Afrique, il existe une forte corrélation entre le
pays d'origine d'IDE et le pays d'accueil. Les premiers investissements vers
cette zone furent fortement influencés par des liens coloniaux et la
langue parlée. On rencontre facilement les investisseurs français
au Gabon, au Congo, au Tchad et au Cameroun, pays colonisés par la
France et qui ont en commun la langue française; on rencontre
également les Anglais au Cameroun (pays bilingue qui fut jadis
colonisé par l'Allemagne mais placé sous mandat français
et britannique) et enfin les Espagnols en Guinée
Equatoriale111. Cependant, au Tchad, de 1960 jusqu'aux années
2000, les investissements étrangers étaient pratiquement
inexistants. La véritable apparition d'IDE remonte au début des
années 2000 avec la découverte de gisements du pétrole par
les compagnies américaines et malaisiennes Exxon Mobil, Petronas et
Chevron. En 2000, les Etats-Unis ont investi un montant de 155 millions USD
d'actifs contre 100millions en 1999, soit une augmentation de 50% et un
doublement en deux ans, faisant ainsi du Tchad son 67ème
client. Les Etats-Unis ont pris la place du premier investisseur au Tchad
surtout avec ses investissements dans le secteur pétrolier avec 70% du
total d'IDE, la France vient en deuxième position avec un pourcentage de
11% du stock total d'investissements 112, le pourcentage restant
appartenant à des investisseurs tiers tels que l'Inde, la Malaisie, le
Bénin, le Burkina Faso, l'Egypte, l'Allemagne, l'Italie, le Mali,
l'île Maurice, etc. En effet, le réchauffement de relations
diplomatiques entre N'djamena et Pékin s'inscrit dans le cadre de la
politique africaine de la Chine, lancée en janvier 2006 par le
gouvernement chinois. La Chine est devenue l'un des plus grands investisseurs
au Tchad, elle a investi dans les domaines tels que l'exploration et
exploitation du pétrole, les infrastructures routières,
sanitaires et des bâtiments, l'industrie textile, hôtellerie, bref
dans presque tous les secteurs de l'économie tchadienne.
111Ibrahim NGOUHOUO. (2008), op. Cit., p. 32.
112Idem
58
1-2 : La répartition sectorielle des
investissements directs étrangers (IDE) au Tchad
La décision d'investir en Afrique repose principalement
sur l'existence de sous-sol riche (en minerais et hydrocarbures) et la
possibilité d'un marché de plus de trente-deux millions
d'individus. La recherche d'une main-d'oeuvre bon marché est une
motivation secondaire car les investisseurs reprochent souvent à
l'Afrique le coût relativement élevé de sa main-d'oeuvre,
en comparaison aux autres pays en voie de développement, notamment ceux
d'Asie du Sud-Est et du Sud-Ouest113. Cependant, dans la zone CEMAC
les IDE sont inégalement répartis dans quatre secteurs principaux
de l'activité économique: minerais, hydrocarbures, manufactures
et les services. En 2004, on estime à 3171millions de dollars le montant
d'IDE vers la CEMAC et de ce montant, environ 85% de ces IDE étaient
investis dans le secteur des hydrocarbures et des minerais, 11% dans le secteur
manufacturier (industrie) et environ 4% dans le secteur
tertiaire114. Il faut cependant noter que cette répartition
varie selon les pays et cette part est plus ou moins justifiée selon
qu'on se trouve au Congo, au Gabon, en Guinée, au Tchad ou au
Cameroun.
En effet, le Tchad est sans doute l'un des pays de l'Afrique
Centrale qui a reçu le moins d'IDE entre l'indépendance en 1960
et l'ère de la découverte du pétrole en 1999. Cette
situation est due pour une large partie aux obstacles naturels (pas de
côte maritime) et surtout à la diversité ethnique et
religieuse exploitée négativement par des politiciens
véreux. Au Tchad, environ 80% d'IDE sont concentrés dans le
secteur industriel dont environ 95% dans le seul secteur pétrolier. Les
20% restants sont répartis entre les secteurs primaire et tertiaire. La
France détient le monopole d'IDE dans l'agriculture avec une part
importante dans la société de production de coton. La
présence française dans ce secteur est aussi fortement
marquée par la transformation de la canne à sucre à
travers Vilgrain (sucre) et Dagris (coton), Castel
(bière)115. Depuis 2006, la Chine est devenue le plus grand
investisseur avec des investissements de grande envergure dans presque tous les
secteurs de l'économie avec des sociétés telles que: la
CNPC, la ZTE Corporation, la China CAMC Engineering Ltd, etc.
En outre, on trouve les investisseurs Américains et
Malaisiens dans le secteur pétrolier avec la société Exxon
Mobile. On trouve également les IDE français dans la distribution
des produits pétroliers (Schlumberger et Foraco), le transport transit,
la restauration, l'hôtellerie avec les groupes Accor et le
Méridien; le secteur financier est représenté par la
Société
113Article : Pablo Gabriel Ferreira. (2010),
Les théories des firmes transnationales issues des pays en
développement et les pétrolières étatiques : les
cas PDVSA et Petrobras, Centre de recherche-CEIM, p. 7.
114 Ibrahim NGOUHOUO. (2008), op. Cit., p. 35.
115 Idem
59
générale, Biat, Financial, Gras Savoye, le
conseil concentrant 16% d'IDE116. Et enfin, nous n'oublions pas non
plus la présence de l'Inde à travers le projet Techno Economic
Approach for Africa-India Movement, auquel on se réfère plus
communément sous la dénomination de Team 9. Il s'agit d'une
initiative du gouvernement indien lancée avec huit pays d'Afrique de
l'Ouest, dont six francophones. A travers ce projet, le Tchad s'est vu octroyer
un prêt de 50 millions de dollars sur 20 ans avec une période de
grâce de cinq ans et un taux d'intérêt de 2,5% dès la
fin d'intensification de l'investissement local117. En effet, le
Tchad, à l'instar d'autres pays africains, n'a pas
bénéficié d'une entrée plus importante des flux
d'IDE. Le graphique suivant donne l'évolution des flux d'IDE au Tchad
entre 1980 et 2012.
Graphique 1 : Evolution des flux d'IDE au
Tchad en millions de dollars (1980-2012)
1000
-200
-400
400
800
600
200
0
IDE
IDE
Source : Graphique réalisé par l'auteur à
partir des données de la Banque Mondiale
Ce graphique montre qu'après avoir connu une certaine
stabilité dans la décennie 1990, le Tchad a enregistré des
entrées d'IDE variant entre 18 millions de dollars en 1990 et 9,4
millions de dollars. Cette tendance s'est accentuée en 2000 et 2001 avec
des entrées d'IDE respectivement de 115 et 459 millions de dollars.
Cette hausse spectaculaire est le résultat de la mise en chantier de
l'oléoduc Tchad-Cameroun qui conduit le pétrole tchadien vers
l'exportation à travers le territoire camerounais. Une tendance à
la hausse s'est accélérée entre 2002, 2003 et 2004 dont
les montants respectifs sont 924 ; 712 et 466 millions de dollars
116 Ibidem
117 BAD. (2012), op. Cit., pp. 20-22.
60
avant de connaître une baisse drastique entre 2005 et
2007. En effet, cette baisse s'explique d'une part par la période
d'instabilité politique dans le pays et d'autre part par la crise
économique et financière de 2008. Et enfin, entre 2008 et 2012 la
tendance s'est poursuivie, elle a été en dents de scie.
Nonobstant notre analyse, la faible attractivité d'IDE
au Tchad relève de causes (internes et externes) conjoncturelles et
structurelles dont voici certaines : le rapport Doing Business continue de
classer le Tchad dans la catégorie des pays où il est le moins
simple de faire des affaires en 2014 (189ème sur 189 pays) ; à
cela s'ajoutent également d'autres facteurs internes tels que :
- une administration lourde ne facilite pas souvent les
formalités de l'investissement ;
- le caractère trop informel des activités
économiques du pays ;
- l'instabilité régionale, certains
investisseurs ont tendance à considérer globalement une
région sans se soucier forcément des caractéristiques
particulières de chaque pays (trouble politique en Libye, au Soudan et
en Centrafrique, le phénomène de Boko Haram au Cameroun, Niger,
et Nigeria) ;
- la corruption à tous les niveaux ;
- le faible développement du secteur privé
formel ;
- l'insécurité grandissante ;
- et enfin, l'absence d'infrastructures routières.
Paragraphe 2 : Les caractéristiques
d'investissements chinois au Tchad
Selon plusieurs travaux (CNUCED 2004, 2007, 2009, Aykut et
al.2004, Gelb 2005), les investissements directs étrangers (IDE) Sud -
Sud, pour l'essentiel réalisés par les firmes multinationales,
ont connu une croissance plus rapide que les flux d'IDE Nord-Sud depuis le
milieu des années 90. Dans le cas du continent africain, la
première source des IDE Sud-Sud vers le continent est constituée
par les pays émergents d'Asie, spécialement la Chine et dans une
moindre mesure l'Inde et les pays du Golfe persique membres de l'OPEP. La
seconde source de ces IDE Sud - Sud est représentée par les
multinationales originaires du principal pays émergent du continent,
à savoir l'Afrique du Sud 118 . Selon Chaponnière
(2012) « l'internationalisation des entreprises chinoises est
récente, le stock d'IDE chinois à l'étranger en 2004
n'était que de 45 milliards de dollars selon le Ministère du
Commerce. La Chine dispose des moyens et des réserves
considérables de l'internationalisation de ses
118 T. DZAKA. (2011), op. Cit., pp. 1-2.
61
entreprises » 119. Pour mieux cerner
les caractéristiques d'investissement des entreprises chinoises au
Tchad, il est important de s'interroger d'une part sur les secteurs
d'investissements des entreprises chinoises au Tchad (2-1) et d'autre part sur
les flux d'investissements chinois entrant au Tchad (2-2).
2-1: Les secteurs d'investissements des entreprises
chinoises au Tchad
La Chine, cherchant à sécuriser par tous les
moyens ses approvisionnements en pétrole pour ne pas freiner une
économie lancée à pleine vitesse et dévoreuse
d'énergie, a progressé dans sa coopération avec le Tchad
en investissant dans trois secteurs: les télécommunications avec
le projet CHAD CDMA 2000 (Code Division Multiple Access,
Téléphonie fixe sans fil) et la téléphonie mobile
au sein de la Société des Télécommunications du
Tchad (SOTEL-TCHAD), une entreprise paraétatique; la construction de la
cimenterie de Baoaré et la construction d'une raffinerie à 50 km
au nord de N'Djamena. Le Tchad étant un pays à haut risque pour
les investisseurs occidentaux, à cause des situations
d'insécurité récurrentes dont il est l'objet, les
investissements de grande envergure sont rares, voire inexistants. Le projet
CDMA 2000 est une technologie reposant sur le réseau
radioélectrique de 3ème génération,
introduite par le biais de la ZTE Corporation. Ses avantages sont entre autres,
la réduction des coûts d'investissement, la rapidité
d'installation et la facilité d'extension; ce qui doit concourir
à la réduction de la fracture numérique 120 .
La cimenterie, récipiendaire d'un investissement de la China CAMC
Engineering Ltd, dispose d'un atout majeur dans la perspective
économique actuelle.
En effet, dans le cadre de la Stratégie Nationale de
Croissance et de Réduction de la Pauvreté (SCNRP), le
gouvernement tchadien a retenu, entre autres, de renforcer le cadre
macroéconomique par la diversification de l'économie et surtout
l'intensification des investissements dans les secteurs porteurs de la
croissance. Le développement des infrastructures de base (routes,
habitats, écoles, centres de santé, aménagements
hydro-agricoles...) est donc fortement recherché, ce qui constitue un
atout majeur pour la future cimenterie. Le démarrage officiel des
travaux de construction de cette usine a eu lieu le 17 décembre 2007.
Cette cimenterie aura une capacité de production de 200 000 tonnes de
ciment portland par an et de 700 tonnes de clinker par jour. Il a
été affirmé par le gouvernement tchadien que la
main-d'oeuvre sera essentiellement locale et qu'à la fin du
119Jean-Raphaël Chaponnière. (2006), op.
Cit., p. 155.
120Symphorien Ndang TABO et Al. (2008), op. Cit., pp.
4-6.
62
projet, le prix du ciment va diminuer de
moitié121. Pour ce qui est de la raffinerie, elle sera
propriétaire à 60 % de la CNPC et à 40 % de la
Société des Hydrocarbures du Tchad (SHT). Elle sera
alimentée par la production des gisements de Sédigui (au nord du
Lac Tchad) et du Mayo-Kebbi (sud-ouest du pays), en phase d'exploration par la
CNPC. Découvert par un consortium américain en 1974 mais jamais
exploité, le champ de Sédigui disposerait de réserves
avoisinant 500 millions de barils. La réalisation de ce projet marquera
la consécration de la Chine comme grand concurrent des Etats-Unis et de
la France au Tchad puisque ces deux pays par le passé ont refusé
de financer le projet de raffinerie qu'ils ont jugé non rentable. Les
travaux d'aménagement du site de la raffinerie ont débuté
en novembre 2007. Il est attendu que cette raffinerie puisse permettre au Tchad
d'assurer la consommation locale en produits pétroliers raffinés
puisque jusqu'à ce jour le pays les importe du Nigeria et du
Cameroun122.
En effet, il convient de rappeler que l'investissement chinois
est caractérisé par l'implication directe du Gouvernement chinois
au niveau des autorités tchadiennes avec les compagnies chinoises qui
sont directement sous la tutelle de leur Gouvernement. Il y a comme corollaire
à cette façon d'agir la non implication des organisations de la
société civile dans les négociations et même un
déficit d'information pour celles-ci. Or, les organisations de la
société civile peuvent indirectement influencer l'action
gouvernementale à travers leurs activités de défense des
intérêts de la population. Leur engagement est donc inhibé
par cette situation mais si le gouvernement tchadien les implique, cela
constituera un bénéfice pour elles.
2-2: Les flux d'investissements chinois entrant au
Tchad
Depuis 2000, les flux d'IDE internationaux se sont maintenus,
surtout dans le secteur pétrolier et le développement des
infrastructures, en provenance notamment de l'Europe et de l'Asie. A
l'échelle mondiale, les flux d'IDE ont diminué de 16%
l'année dernière (2012), tombant à 1200 milliards de
dollars. Mais cette chute moyenne dissimule des disparités
impressionnantes, une très forte chute (-28%, à 499 milliards de
dollars) d'IDE vers les pays en développement, dont beaucoup
étaient en quasi-stagnation économique, une baisse sensible des
flux de capitaux entrants en Amérique latine (-16%) et aux Caraïbes
(-14% à 159 milliards de dollars), leur stagnation en Afrique (54
milliards de dollars en 2014, un niveau identique à celui
enregistré en 2013) et leur dynamisme en Asie (+ 9% , à 500
milliards de
121Idem 122Ibidem
63
dollars), où l'on bat des records
historiques123. En effet, c'est l'Afrique Centrale qui a
été la région qui a réalisé une meilleure
performance en recevant 12,1 milliards de dollars, soit une hausse de 33% en
comparaison avec celle de 2013. Par contre, les IDE en Afrique Centrale et plus
particulièrement au Tchad sont très volatiles et d'un poids
insignifiant au niveau mondial.
Par ailleurs, nous convenons à la suite des travaux de
Dzaka (2011) que les IDE chinois deviennent significatifs à partir de
2000. En moyenne annuelle, les flux d'IDE sortants qui n'étaient que de
2,1 milliards de dollars sur la période 1990-2000 allaient atteindre les
56,5 milliards de dollars en 2009. On prévoit qu'ils continueront
d'augmenter vu que la Chine ne cesse d'accumuler d'importants excédents
de sa balance et d'énormes réserves de change. L'effort
mené par la Chine pour que ses entreprises sortent et investissent
à l'étranger n'a pas été freiné par la crise
économique comme ce fut le cas en particulier pour le Royaume-Uni
(-59,6%) ou les Etats-Unis (-17,6). L'historique des IDE chinois est
récent puisque les effets de la politique lancée en 2000 n'ont pu
se faire réellement sentir qu'à partir de 2001 à
2002124. Sa part relative dans l'IDE mondial, quant à elle a
presque triplé passant de 1,0% en 2007 à 2,8% en 2008. En 2007,
plus de 7 000 firmes multinationales chinoises avaient réalisé
des IDE à travers 173 pays dans le monde, créant près de
10 000 entreprises à l'étranger dont 1000
implantées125.
En effet, les IDE chinois en Afrique étaient
insignifiants au début des années 1990, ils représentaient
en 2010 un cinquième du total des investissements chinois, en tenant
compte des investissements directs effectués dans la finance. Par
contre, la part de la Chine dans l'ensemble des flux d'IDE à destination
de l'Afrique est négligeable, elle est de 1,3 % en 2010 contre environ
40% en provenance d'Europe. Le flux d'IDE chinois à destination de
l'Afrique reste marginal, les principaux pays bénéficiaires des
IDE chinois sont l'Afrique du Sud (2,2%), le Nigéria (2,6), le Soudan
(2,4%), la Zambie (10,2%), la RDC (7,4%) et l'Algérie
(6,1%)126. La part d'IDE chinois au Tchad est estimée
à 0,6%, elle demeure très faible comparativement aux principaux
pays bénéficiaires en Afrique. Le tableau suivant donne
l'évolution des flux d'IDE chinois entrants en millions de dollars de
2003 à 2011.
123 Rapport CUNCED (2014).
124 Thierry PAIRAUT. (2010), Les chiffres de
l'investissement direct chinois en Afrique, Dounia, n°30, Revue
Européenne de Géopolitique, p. 18.
125 T. DZAKA. (2011), op. Cit., p. 10.
126
http://hzs.mofcom.gov.cn/accessory/201109/1316069658609.pdf
et la Base de données en ligne de UNCTAD:
http://unctadstat.unctad.org/ReportFolders/reportFolders.aspx.
64
Graphique 2 : Evolution des flux d'IDE chinois entrants au
Tchad en milliards de dollars (2003-2011).
60
50
40
30
20
IDE
10
0
-10
-20
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Source : Graphique construit par l'auteur à partir des
données de Statistical Bulletin of China's Outward Foreign Direct
Investment (MOFCOM, 2010)
Le graphique montre l'évolution des flux d'IDE chinois
entrants au Tchad de 2003 à 2011, cette évolution est erratique
et liée au niveau de l'activité économique du pays. Elle
se caractérise par trois situations différentes. De 2003 à
2007, les investissements directs étrangers (IDE) chinois étaient
nuls voire même inexistants. Ils ont connu un progrès
considérable à partir de l'année 2007. Cette
période coïncide avec la date à laquelle, la Chine avait
fait le retour en force au Tchad où elle a investi des moyens faramineux
pour le rachat de consortium américain. Une tendance à la baisse
s'est amorcée à partir de 2010 qui fait chuter l'IDE chinois
jusqu'à zéro.
Après avoir présenté dans ce chapitre les
investissements directs étrangers (IDE) chinois au Tchad, nous allons
aborder dans le chapitre suivant l'apport des investissements directs
étrangers (IDE) chinois à la diversification de l'économie
tchadienne.
65
CHAPITRE IV: L'APPORT DES INVESTISSEMENTS DIRECTS
ETRANGERS (IDE) CHINOIS A LA DIVERSIFICATION DE L'ECONOMIE
TCHADIENNE
Au lendemain des indépendances, la plupart des pays
africains ont entamé un processus de diversification de leurs structures
économiques à travers des politiques industrielles de
substitution aux importations, afin de réduire progressivement leur
dépendance à l'égard des produits de base. Ces
expériences d'industrialisation ont néanmoins abouti à des
échecs, du fait en particulier de la crise de la dette qu'ont subi les
pays en développement au cours des années 1980. La
diversification joue en effet un rôle essentiel dans la maîtrise
des aléas de la conjoncture et réduit notamment l'impact des
fluctuations des cours des matières premières sur les
économies127.
L'objet de ce chapitre consiste à analyser les effets
des stratégies d'implantation des FMN chinoises sur la diversification
de l'économie tchadienne. Cependant, un bref rappel sur l'historique de
l'économie tchadienne nous permettra de mener à bien ce travail.
C'est pourquoi, nous nous proposons d'aborder dans ce chapitre d'une part
l'économie tchadienne dans sa diversité (section 1) et d'autre
part les effets des investissements directs étrangers chinois sur la
diversification de l'économie tchadienne (section 2).
Section 1 : L'économie tchadienne avant et
après l'exploitation du pétrole
L'économie tchadienne se caractérise par une
faible productivité, surtout dans l'agriculture dont les moyens et
techniques de production restent rudimentaires et traditionnels. C'est une
agriculture de subsistance. La couverture alimentaire qui était de 22%
en 1963 a connu de très fortes détériorations dans les
années 1980 et 1990, à cause de la sécheresse et des
aléas climatiques, d'où des déficits chroniques
observés, particulièrement dans les années 1983 et 84.
Cette situation a poussé le pays à une importation respectivement
de 45% à 56% de sa production agricole pour satisfaire les besoins
alimentaires de sa population (profil démographique et économique
du Tchad, CERPOD, 2003). Les années 1970 ont été
marquées au Tchad par de sérieuses difficultés
économiques et financières qui sont liées au faible niveau
de développement économique. Elles ont été
aggravées par la crise politico-militaire occasionnant une rupture
économique 128 .Mais depuis les années 2000,
l'économie tchadienne vit à l'ère du pétrole.
L'exploitation de cet « or noir » a constitué le principal
moteur de la croissance. Il a permis d'enregistrer un taux de croissance record
de
127 Banque de France. (2007), Diversification
économique en Afrique Centrale : état des lieux et
enseignements, p. 113. 128: DJERABE Kélos. (2009),
Pauvreté des ménages et travail des enfants au Tchad :
niveaux et déterminants, mémoire de master en
démographie, IFORD, Université de Yaoundé II, Cameroun.
66
31.3% (FMI, INSEED, 2006). Pour mieux appréhender le
contexte économique du Tchad, il nous paraît important d'aborder
la doctrine économique du Tchad (paragraphe 1) d'une part et d'autre
part l'économie tchadienne à l'ère
pétrolière (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La doctrine économique
A l'instar de beaucoup d'autres pays africains, le Tchad, au
sortir de l'indépendance a largement mené une politique de
développement économique qui n'est pas adaptée avec ses
potentialités. Il a choisi sans ambiguïté la voie du
libéralisme qui, au plan de la vie économique, repose sur les
principes de la propriété privée des moyens de production
et de l'ouverture sur l'extérieur, comparativement à d'autres
pays qui ont des atouts similaires mais optent pour la collectivisation des
moyens de production et le développement endogène. A la faiblesse
des structures économiques héritées de la colonisation,
s'est ajouté le manque de stabilité politique engendrée
par les conflits armés. Le Tchad a des potentialités
énormes: le sous-sol est très riche (or, hydrocarbure, etc.) et
ne demande qu'à être mis en valeur. Outre les atouts
économiques, il existe aussi des obstacles externes et internes qui
limitent le développement de ce pays. Les obstacles internes majeurs
sont les turbulences qui existent partout dans le pays en terme de
rébellion armée qui ruine l'économie du pays. En plus de
cette rébellion, les conditions climatiques ne sont pas favorables pour
certaines cultures. Par ailleurs, il faut souligner que le pays manque
d'industries et d'infrastructures de base susceptibles de stimuler son
développement économique. L'enclavement et les carences en
infrastructures rendent toute activité productrice trop chère.
En effet, le début des années 1990 est
marqué par la reconstruction de l'Etat tchadien avec l'organisation de
la conférence nationale souveraine (CNS) en 1993 dont le but n'est rien
d'autre que de jeter les jalons d'un Etat démocratique et
économiquement prospère. Cette période a été
marquée par un faible niveau des recettes fiscales et une forte
dépendance à l'aide internationale. Elle coïncide aussi avec
les programmes d'ajustement structurels (PAS) dont l'une des
conséquences est la dévaluation du franc CFA, monnaie
communautaire utilisée par le Tchad. Cependant, le Tchad s'est
engagé en 1994 dans ce programme d'ajustement économique qui a
donné lieu à l'approbation d'un accord de confirmation avec le
FMI en mars 1994. Compte tenu du dérapage des recettes
budgétaires constaté au premier semestre de l'année, le
FMI a suspendu les tirages et défini un programme de
référence sans décaissement des bailleurs de fonds.
Toutefois, fin mai 1995, le Tchad a repris les négociations en vue de la
signature d'un accord triennal au titre de la facilité d'ajustement
67
structurel renforcé (FASR) qui ont abouti à la
signature d'un accord approuvé le 1er septembre 1995 par le conseil
d'administration du FMI. Cet accord couvre une période de trois ans avec
pour principaux objectifs la stabilisation macroéconomique et la
création d'un environnement favorisant une croissance soutenue à
moyen terme.
En particulier, il s'agissait de renforcer les recettes
budgétaires, d'améliorer l'efficacité de l'administration
publique et de revitaliser l'économie à travers la
libéralisation des prix et du commerce extérieur, la
privatisation et l'amélioration du dispositif réglementaire. Dans
l'ensemble et en particulier dans le domaine des finances publiques, le
programme a été satisfaisant dans la mesure où entre 1995
et 1997, les mesures adoptées ont permis d'accroître les recettes
fiscales et douanières. L'assiette fiscale a été
élargie et les exonérations limitées et mieux
contrôlées. Des réformes ont amélioré le
fonctionnement des administrations fiscales et douanières, permettant un
recouvrement plus efficace. Un fichier unique des contribuables a
été élaboré en 1995. Grâce à ces
dispositions, les recettes fiscales ont plus que doublé entre 1994 et
1999 passant de 27,6 milliards pour s'établir à 68,3 milliards de
franc CFA. C'est dans cette perspective que nous abordons dans ce paragraphe
l'analyse historique de la croissance économique (1-1) ainsi que celle
des agrégats macroéconomique (1-2).
1-1: L'analyse historique de la croissance
économique
Comprendre l'évolution de l'économie tchadienne
est un exercice essentiel car, déceler les raisons des faibles
performances économiques du pays permettrait de poser les jalons d'un
avenir plus prospère. L'histoire de l'économie tchadienne peut se
décomposer en cinq périodes, marquées par d'importants
événements politiques et économiques. Ces
événements constituent donc des référentiels
permettant une meilleure compréhension des fluctuations du produit
intérieur brut.
De 1960 à 1975, les performances économiques du
Tchad ont été médiocres. En effet, cette période
est marquée par le début de l'instabilité politique
à partir de 1965, la croissance économique a été
faible. En moyenne sur cette période, le taux de croissance du PIB/hab a
été négatif et se situe autour de -1,06%. Exprimé
en niveau, le PIB/hab passe de près de 550 dollars pour s'établir
à 463 dollars en 1975 correspondant à une baisse absolue de 87
dollars.
A partir de 1975 jusqu'à 1982, à cause des
insurrections armées qui se généralisent à
l'ensemble du pays, on a enregistré les plus mauvaises performances
économiques. La propagation de la guerre civile à l'ensemble du
pays se solde par l'effondrement de l'Etat tchadien et de l'appareil productif
en 1979. Ainsi, de mars 1979 à juin 1982, la zone
68
méridionale était coupée du reste du pays
et cela dans une situation de quasi autonomie. La production de coton grain qui
constituait alors la principale source de devises du Tchad était
acheminée directement vers l'extérieur. Durant cette
période, les infrastructures de base ont subi d'importants dommages, ce
qui a eu pour conséquence une désorganisation complète de
la vie économique. En particulier, de nombreuses entreprises
industrielles et commerciales ont dû cesser leurs activités,
privant l'Etat de recettes fiscales. Ces lourds handicaps expliquent le fait
que le pays soit dépendant de l'aide internationale. Conséquence
de cette situation, le PIB/hab chute brutalement passant de 467,2 dollars/hab
à 330,5 dollars en 1982 soit une baisse de près de 42%. Durant
cette période, la croissance réelle tourne autour de -4,37% en
moyenne annuelle.
De 1983 à 1990, l'économie est marquée
par une relative stabilité politique comparativement à la
précédente ayant pour conséquence la concrétisation
des performances économiques qui contrastent avec les périodes
précédentes. La communauté internationale et les bailleurs
de fonds en particulier reconnaissent les efforts réalisés par le
gouvernement tchadien dans la lutte contre la corruption et l'incurie qui ont
caractérisé les périodes antérieures. Malgré
ces succès, l'économie éprouve des difficultés en
relation avec l'effondrement de la filière coton. En effet, avec les
années de conflits, la société Coton-Tchad fut
confrontée à des difficultés de gestion interne
caractérisées par un laxisme généralisé. En
outre, étant la seule structure organisée dans le sud du pays,
l'Etat tchadien et le comité permanent en particulier ont
opéré des ponctions importantes dans les finances de la
société. A ces difficultés, il faut ajouter
également la chute des cours mondiaux du coton et la baisse du cours du
dollar, devise avec laquelle la plupart des transactions sur les
matières premières étaient conclues. Durant cette
période, la Coton-Tchad représentait un mastodonte dans la mesure
où elle faisait vivre directement ou indirectement près de deux
millions de personnes soit près de deux tiers de la population totale du
pays. Enfin, la filière cotonnière rapportait 35% des ressources
budgétaires et constituait 80% des exportations en valeurs.
De 1990 à 1999, cette période coïncide avec
la reconstruction de l'Etat tchadien (l'organisation de la conférence
nationale souveraine en 1993) et les Programmes d'Ajustement Structurels (PAS)
dont l'un des objectifs ultimes est la dévaluation de la monnaie
communautaire utilisée par le Tchad. La dévaluation a permis au
Tchad de renouer avec une croissance positive après la chute de
l'activité économique en 1993. En plus de cela, le
réajustement monétaire a entraîné une forte
croissance de la production de coton, des exportations de bétail et de
gomme arabique, tandis que l'effet revenu de la dévaluation
69
déprimait les importations et stimulait la demande de
produits nationaux. Le PIB a ainsi marqué une croissance significative
de 7,2 % en 1994. Les PAS enclenchés au Tchad en 1995 ont
débouché sur la privatisation de toutes les banques et presque
toutes les entreprises publiques ainsi qu'à la liquidation de certaines
d'entre elles. Cette politique a permis la réduction du déficit
des finances publiques qui est passé de 14,2 % du PIB réel en
1994 pour s'établir à 9 % en 1998. En outre, la politique
budgétaire mise en oeuvre durant cette période a conduit à
un assainissement des finances de l'Etat permettant le rétablissement
des équilibres macroéconomiques et une certaine
crédibilité du pays. Le PIB/hab passe de 409,2 dollars en 1990
à 384,5 dollars en 1999, soit une baisse de l'ordre de 6%. En moyenne
annuelle, la croissance par habitant tournait autour de - 0,4%. Cette situation
résulte d'une forte chute du PIB en 1993 de -15,9 occasionnée par
la baisse de la production agricole mais aussi de l'effet de la fermeture des
frontières camerounaises et nigérianes.
Et enfin, la période de 1999 à 2010, est celle
où l'économie tchadienne vit à l'ère
pétrolière, avec la construction du pipeline Tchad - Cameroun et
l'ouverture de la première vanne en octobre 2003. Cependant, nous allons
aborder cette partie dans le prochain paragraphe.
1-2: L'analyse des agrégats
macroéconomiques
L'évolution du taux de croissance nominal par
tête au Tchad est caractérisée par une forte
instabilité, comparée à celles des pays africains au sud
du Sahara (ASS) et du monde. Les épisodes de fortes baisses et hausses
correspondent à des événements internes et externes que le
Tchad a connus. L'ampleur des fluctuations est faible de 1960 jusqu'au
début des années 1970 qui est par ailleurs marquée par le
premier choc pétrolier. Ce dernier représente des hausses rapides
et très fortes du prix du pétrole, occasionnant un ralentissement
économique dans les pays industriels en raison de leur dépendance
du pétrole. Compte tenu de la faible dépendance du Tchad au
pétrole en cette période, cette crise aurait pu avoir un faible
effet sur la croissance du PIB/hab n'eut été l'augmentation des
coûts des produits industriels importés, induite par la hausse des
prix du pétrole. La deuxième forte baisse de la croissance et la
plus importante de l'histoire du Tchad date de 1979. A cette date, le PIB/hab a
connu une baisse de 23% par rapport à son niveau de 1978. Un consensus
se dégage dans la communauté des économistes pour imputer
cette chute historique à la guerre civile de 1979. Il a fallu attendre
l'année 1981 pour que le taux de croissance du PIB/hab redevienne
positif pour se situer à 3%, puis 13% en 1983. La littérature sur
les effets des guerres civiles prédit en effet
70
une chute de la production pendant les années des
conflits et une inversion juste après la fin des conflits. Certains
auteurs ont même montré que la probabilité de survenance
d'un conflit armé peut réduire la production.
L'application des PAS, inspirés des théories
libérales, résumés sous le nom de Consensus de Washington
et ayant pour but la stabilisation macroéconomique, conduisit à
la dévaluation du franc CFA en 1994 afin de doper les exportations des
pays africains dont la compétitivité était peu reluisante.
Compte tenu, d'une part, du fait que les PED n'exportent en majorité que
les matières premières et du fait de leur faible tissu industriel
d'autre part, la dévaluation du FCFA ne peut que déprimer la
production. Ce qui est corroboré par le taux de croissance du PIB/hab
négatif en ASS (-1,84%) et au Tchad (-1,83%) sur la période
1995-2000.En 2004, le Tchad enregistra une forte et historique croissance du
PIB/hab de 28,7%. Tout porte à croire que les ressources
pétrolières ont contribué fortement à cette hausse
historique. Ensuite, elle oscille entre 10,2% en 2010 à -2,9% en 2011 et
une évolution rythmée par les fluctuations des fondamentaux du
pétrole (offre et demande). D'une manière globale, le taux de
croissance du PIB/hab sous l'ère pétrolière est de 5,12%
par an alors qu'il était de -0,4% avant l'ère
pétrolière (1960-2002).
Par ailleurs, il convient de rappeler que parmi les sources de
financement d'une économie figurent les ressources internes (emprunts
internes, ressources publiques propres et seigneuriage) et externes (emprunts
externes, dons, aide publique au développement (APD), Investissements
Directs Etrangers (IDE) et transferts de migrants). En ce qui concerne l'APD,
son évolution est stable sur la période 1960-2011. Elle a connu
une légère hausse sur la période 1980-2000, atteignant son
pic en 1991 à 28,09% du PIB. Il n'est pas hasardeux de lier cette hausse
périodique aux PAS. Par contre, la dette intérieure n'a jamais
dépassé 20% du PIB sur la période 1960-2011. Elle a
atteint son apogée sur la période 1980 - 1990, période
marquée par l'exécution des PAS. Ensuite, elle a chuté sur
le reste de la période 1991-2011, n'excédant jamais 7% du PIB.
L'insuffisance de l'épargne des ménages et la faible
bancarisation constituent une explication possible du côté de la
demande.
Paragraphe 2 : L'économie tchadienne à
l'ère pétrolière
Depuis longtemps, le Tchad est resté un pays à
vocation agro-pastorale. Son économie est basée essentiellement
sur l'agriculture et l'élevage. Dernier né des Etats
pétroliers, avec une capacité de production de 250 000
barils/jour, le Tchad s'est ouvert aux nouveaux acteurs, à l'occasion du
programme d'exploitation pétrolière inauguré à l'an
2000. Depuis la
71
construction de l'oléoduc Doba-Kribi en 2003 long de 1
070 kilomètre, le Tchad a vu son taux de croissance économique
faire un bond spectaculaire passant de 1% en 2001 à 15% en 2004 et 8% en
2005.Selon Geoffrey H. Bergen représentant résident de la Banque
Mondiale au Tchad (2008), les statistiques officielles montrent que les PIB ont
nettement dépassé les taux de croissance démographique
2,8% ces dernières années du fait de l'exploitation du
pétrole129. Cependant, l'injection des ressources
pétrolières dans l'économie a entraîné une
hausse généralisée du niveau des prix en raison de la
faible capacité d'absorption de l'économie tchadienne et de
l'offre nationale. Il s'est accru en moyenne de 3,2% par an avec des fortes
fluctuations expliquées par les déficits pluviométriques
entraînant des baisses importantes de la production
agricole130. Après avoir fait un rappel historique du pays,
il est nécessaire de comprendre à quoi ressemble cette
économie à l'ère pétrolière. Cependant, il y
a lieu d'aborder dans ce paragraphe d'une part les caractéristiques de
l'économie tchadienne à l'ère pétrolière
(2-1) et d'autre part l'impact de l'exploitation du pétrole sur
l'économie tchadienne (2-2).
2-1: Les caractéristiques de l'économie
tchadienne à l'ère pétrolière
L'économie tchadienne se caractérise par la
dominance du secteur primaire, de l'informel et par un secteur privé
faible. Cependant, le secteur primaire comprend l'agriculture,
l'élevage, la pêche et dans une moindre mesure l'exploitation
minière. Ce secteur contribue fortement à la création des
richesses. Il représente en moyenne 61,2% du PIB entre 2006 et 2011.
Cette part importante se répartit de la manière suivante: 10,5%
pour l'agriculture, 9% pour l'élevage, 2,2 % pour la sylviculture, la
pêche et les mines et 39,3% pour l'exploitation pétrolière
131 ; le secteur secondaire regroupe les activités liées à
la transformation des matières premières issues du secteur
primaire et comprend des activités très variées dont,
entre autres: l'industrie, l'artisanat, l'eau, l'électricité
ainsi que les bâtiments et travaux publics (BTP). Ce secteur
représente en moyenne 7,7% du PIB pour la période
retenue132 et enfin le secteur tertiaire regroupe toutes les
activités économiques de services tels que les banques, le
commerce, le transport, l'administration, l'assurance, l'enseignement, les
associations, le tourisme, etc. Au Tchad, en termes de contribution dans le
PIB, ce secteur vient en deuxième position après le secteur
primaire avec une part moyenne de 31,1% (de
129DJERABE Kélos. (2009), op. Cit., pp.
25-26.
130 Rapport INSEED. (2014), Essai d'analyse de la
pauvreté non monétaire.
131 Conseil national du patronat tchadien, Livre blanc, Edition,
2012.
132 Idem
72
2006 à 2011). Le taux de croissance du secteur
tertiaire s'établit à 5,7%. Cette performance se traduit par le
développement des activités
précitées133.
Tableau 2: Indicateurs de croissance économique au Tchad
entre 2012-2016
Indicateurs de croissance
|
2012
|
2013
|
2014
|
2015
|
2016 (e)
|
PIB (milliards USD)
|
12,38
|
12,95
|
13,95e
|
11,69e
|
12,82
|
PIB (croissance annuelle en %, prix
constant)
|
8,9
|
5,7
|
6,9
|
6,9
|
4,2
|
PIB par habitant (USD)
|
1.152
|
1.176
|
1.236e
|
1.011
|
1.081
|
Endettement de l'Etat (en % du PIB)
|
17,9
|
18,7
|
24,6
|
25,2e
|
23,8
|
Taux d'inflation (%)
|
7,7
|
0,2
|
1,7
|
4,3
|
3,1
|
Balance des transactions courantes (milliards USD)
|
-1,08
|
-1,19e
|
-1,24e
|
-1,22e
|
-1,19
|
Balance des transactions courantes (en % du PIB)
|
-8,7
|
-9,2e
|
-8,9
|
-10,4
|
-9,3
|
Source : FMI - World Economic Outlook Database - 2014.
Note : (e) Donnée estimée
Ce tableau montre qu'après avoir subi un ralentissement
en 2013 du fait du recul de la production agricole et de problèmes
techniques survenus dans les champs pétroliers, la croissance
économique s'est accélérée en 2014 (9,6% du PIB),
tirée par les revenus pétroliers. En ce qui concerne la balance
des transactions courantes, cela montre que le Tchad importe plus qu'il
n'exporte c'est-à-dire que le pays dépend fortement de
l'extérieur; sa balance des transactions courantes est négative
sur toutes les périodes. En outre, le produit intérieur brut par
habitant n'a jamais dépassé le 1% sur l'ensemble des
périodes retenues et les dettes publiques augmentent d'une
période à une autre.
2-2: L'impact de l'exploitation du pétrole sur
l'économie tchadienne
La mise en exploitation du pétrole au Tchad a
été un vecteur de dynamisation de l'investissement dans un
contexte où, par ailleurs, le décollage de nouvelles puissances
émergentes a conduit à rehausser les enjeux que
représentaient les pays africains pour la sécurisation de
l'accès aux matières premières. Conséquence de ces
découvertes pétrolières et de l'attraction qu'elles ont
suscitée, l'investissement a considérablement augmenté par
rapport à son rythme de long terme. Jusqu'en 2000, le taux
d'investissement, défini à partir de la
133 Ibidem
73
formation brute de capital fixe, tourne autour de 15 % du PIB.
Depuis l'avènement du pétrole et la réalisation des
infrastructures nécessaires à son exploitation, l'accumulation du
capital a sensiblement progressé jusqu'à représenter 60 %
du PIB en 2002. Le rythme a ensuite décéléré mais
est resté à un niveau plus élevé que la tendance
à long terme du fait de l'ouverture de nouveaux champs d'exploitation
des hydrocarbures et des effets induits par la dynamique des relations
internationales avec les nouveaux pays émergents134.
Les perspectives économiques récentes ont
montré qu'après avoir enregistré une expansion de 14.3 %
en 2010, l'économie tchadienne a connu un fort ralentissement en 2011
avec un taux de croissance de 2.8 %. Cette évolution résulte
principalement de la baisse d'activité dans le secteur primaire. Le
secteur non pétrolier, qui représente 73 % du PIB, a
affiché une croissance de 2.4 % en 2011 contre 16.6 % en 2010. Quant au
secteur pétrolier (27 % du PIB), malgré la baisse de la
production (-1.4 %), le redressement des cours mondiaux du pétrole brut
a soutenu sa croissance. L'effet prix imprime ainsi à ce secteur un taux
de croissance de 3.6 % soit une progression de 0.3% par rapport au taux
affiché en 2010. Si les secteurs secondaire (14 % du PIB) et tertiaire
(40 % du PIB) prennent un poids accru dans la création de la richesse
nationale, celle-ci reste largement dépendante du secteur primaire qui
compte pour 46% dans le PIB135. Avec une baisse de 5.1 %, le secteur
primaire a ainsi contribué au ralentissement de la croissance en 2011.
Cette évolution est imputable à une baisse de la production
agricole vivrière de 29.1 % due, à son tour, au retournement
cyclique après la forte hausse de 61.7 % enregistrée en 2010 et
aussi au retard des pluies observées en 2011. En dépit de cette
tendance à la baisse, la croissance du secteur primaire a
enregistré en 2012 et 2013 un rebond grâce aux bons
résultats de la production agricole136. L'activité
agro-industrielle connaît quant à elle une croissance de 8.4 %
favorisée par le retour des paysans à la culture du coton et la
bonne tenue des cours mondiaux de ce produit. S'agissant de l'exploitation
pétrolière, la production du brut est en baisse de 1.4 % suite
à des conditions géologiques moins favorables et aux coûts
de production de plus en plus élevés. Cette baisse s'est
poursuivie avec des prévisions de taux de croissance respectivement de
1.1 % et -4.6 % en 2012 et 2013. L'activité dans le secteur secondaire a
connu une hausse de 18.7 %, progression qu'explique la forte hausse (53.8 %)
enregistrée par la branche égrenage de coton consécutive
à la solution apportée aux problèmes techniques connus par
la société Coton-Tchad.
134 BAD. (2012), op. Cit., pp. 8-11.
135www.africaneconomicoutlook.org
136 Idem
74
Le démarrage de la production de ciment au second
semestre 2011 et la bonne tenue de la demande intérieure ont permis
à l'ensemble des autres productions industrielles de progresser de 4.9
%. La branche électricité, gaz et eau a progressé de
11.8%, grâce à l'apport de la société de raffinage
de N'djamena (SRN) au second semestre 2011. Les perspectives du secteur
secondaire sont prometteuses pour 2012 et 2013 avec des prévisions de
taux de croissance respectivement de 18.7 % et de 7.5 %. Ces prévisions
s'appuient sur les changements structurels qui interviendront à court
terme dans ce secteur, notamment la mise en service de la zone industrielle et
l'amélioration significative de la production
d'électricité137. Quant au tertiaire, il affiche une
croissance de 5.8 % en 2011 contre 14.7 % en 2010, un résultat dû
au recul important des activités du commerce, des transports et des
télécommunications ainsi que des activités
hôtelières, conséquences, notamment, du retrait de la
Mission des Nations Unies en République Centrafricaine et au Tchad
(MINURCAT). L'activation de la fibre optique et ses implications sur les
sous-secteurs, en particulier de la communication, ont entraîné
une croissance du tertiaire de l'ordre de 6.7 % en 2012 avant un nouveau
fléchissement à 2.3 % en 2013 sous l'effet de la baisse des
activités du commerce. En termes de ressources et d'emplois, la
consommation finale marchande a enregistré en 2011 une croissance de 8.8
% contre 13 % en 2010. Cette évolution résulte de la consommation
des administrations publiques et du dynamisme du secteur privé.
Section 2 : Les effets des investissements directs
étrangers (IDE) sur la diversification de l'économie
tchadienne
Les effets de la découverte de pétrole sur
l'économie tchadienne sont doubles. Le premier effet, que l'on observe
aujourd'hui, est celui des grands travaux d'exploitation. D'après le
FMI, ces effets auraient été relativement importants en 2001
puisque les estimations actuelles sur le taux de croissance
s'élèvent à 8,9% (8,1% pour la BEAC). On distingue d'une
part, les effets dus à la masse salariale distribuée aux
travailleurs locaux (4 milliards en 2001), et d'autre part, ceux correspondant
à la valeur des contrats de sous-traitance obtenus par des entreprises
tchadiennes (environ une vingtaine de milliards en 2001). Le second effet est
à long terme, bien entendu le bénéfice de l'exploitation
qui avait débuté fin 2003138. L'exploitation des
champs pétroliers a entraîné un accroissement des recettes
et des dépenses publiques. En effet, les recettes totales sont
passées de135, 43 milliards (12,13% du PIB) pour s'établir
à 1329,6 milliards de franc CFA représentant près de (20%
du PIB).
137 Ibidem
138 AFD. (2002), Analyses et perspectives
macroéconomique au Tchad, pp. 5-8.
75
Cela correspond à une hausse en moyenne annuelle de
l'ordre de 22,5%. Pour ce qui est des dépenses publiques, elles ont
enregistré des fortes hausses passant 203,2 milliards (18,2% du PIB)
à 1463,56 milliards de FCFA correspondant à (22,02% du PIB). Un
point important concerne la dépendance de l'économie nationale au
pétrole. Ainsi, d'après le FMI (Rapport n°13/284),
l'économie tchadienne est fortement tributaire du pétrole qui
assurait plus de 70% des recettes budgétaires, 90% du total des
exportations de biens et 30% du PIB nominal en 2013. Ces chiffres traduisent la
nécessité de la diversification de l'économie qui
permettrait de faire face aux chocs résultant de la baisse des cours du
brut. C'est dans cette perspective que nous allons aborder d'abord la dynamique
de la diversification au Tchad (paragraphe 1) et ensuite les indicateurs de la
diversification au Tchad (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La dynamique de la diversification
De nouveaux outils d'analyse de la dynamique de
diversification permettent de mieux appréhender les sources de blocage
du processus de diversification. Lorsqu'un pays est très faiblement
diversifié, un processus de diversification des exportations suppose en
effet de créer de nouvelles lignes d'exportations et de les promouvoir
(on parle ici de marge extensive), mais également d'accroître ou
de maintenir les montants exportés des produits présents dans la
base exportatrice (on parle dans ce cas de marge intensive). Il convient de
souligner que l'Afrique subsaharienne reste très largement tributaire
des secteurs primaires. Bien que 20 % environ de ses exportations soient
classées comme biens industriels, il s'agit pour la plupart des produits
primaires faiblement transformés. Un quart à peine des
exportations industrielles est réellement composé de biens
manufacturés, dans ces derniers, les deux principales catégories
sont: les produits automobiles d'Afrique du Sud et les exportations textiles
des pays à faible revenu (FMI 2007, Gelb 2009)139. Il semble
à première vue que l'Afrique subsaharienne ne soit pas
compétitive dans les secteurs autres que celui des ressources
naturelles.
En ce qui concerne le Tchad, les flux commerciaux entre
Pékin et N'djamena concernent principalement les importations et dans
une moindre mesure les exportations du pétrole brut. En effet, le Tchad
offre pratiquement très peu de produits au marché mondial : le
coton fibre, le bétail, la gomme arabique et depuis 2003, le
pétrole brut. Les trois premiers produits intéressent très
peu la Chine en raison soit des coûts d'acquisition, soit de la
production locale suffisante. Cependant, la dynamique du pétrole brut
montre que depuis le
139 Alan Gelb, (2010), Diversification de
l'économie des pays riches en ressources naturelles, Center of
Global development, pp. 2-10.
76
lancement de la production, celle-ci n'a pas cessé
d'augmenter. Toutefois, à partir de 2005 où les exportations ont
atteint leur maximum (63 millions de barils), une tendance à la baisse
s'est amorcée depuis cette année jusqu'en 2011 où elle est
de l'ordre de 42 millions de barils. Comparativement à l'année
2010, les exportations en 2011 ont baissé de 4,55%140. Il
convient de rappeler que depuis le réchauffement des relations entre
Pékin et N'djamena, la Chine est devenue le principal pays de
destination des exportations du pétrole du Tchad. Le graphique suivant
donne l'évolution des exportations du Tchad à destination de la
Chine en millions de dollars de 2000 à 2011.
Graphique 3: Les exportations du Tchad à destination de
la Chine en millions de dollars de (2000-2012)
350 300 250 200 150 100
50
0
|
|
|
|
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
2011 2012
|
Source : Graphique construit par l'auteur à partir des
données de Trade Law Centre
Ce graphique montre que les exportations tchadiennes à
destination de la Chine pour les périodes 2000-2003 sont insignifiantes
voire même nulles. Entre 2004-2010, elles ont atteint le pic, cette
augmentation s'explique par le rachat de consortium américain par la
Chine, ce qui a permis à la Chine d'importer exclusivement le
pétrole brut du Tchad. Dans ce paragraphe nous allons aborder d'une part
l'évolution des exportations au Tchad (1-1) et d'autre part le processus
de la diversification au Tchad (1-2).
1-1: L'évolution des exportations au Tchad
Le premier pays de destination des produits d'exportation
(hors pétrole) du Tchad reste le Nigéria avec environ 85,2% des
exportations du Tchad pour une valeur de 38,92 milliards de FCFA. Ensuite vient
la France avec une part de 6,3% soit une valeur de 2,88
140 Ministère du plan, de l'économie et de la
cooperation internationale.
77
milliards de FCFA. Le Cameroun arrive en troisième
position en termes de pays de destination des exportations en 2011 avec une
valeur de 2,76 milliards de FCFA soit 6,0% des exportations totales. Ces trois
pays représentent à eux seuls environ 97,5% de la destination des
exportations du Tchad hors pétrole en 2011. Selon le ministère du
plan et de l'économie, le pétrole constitue 91,2% des
exportations totales au Tchad et 80,5% des exportations de ce pétrole
sont destinées pour la Chine. Le tableau suivant indique la structure
moyenne des exportations du Tchad en (%).
Tableau 3: Structure moyenne des exportations au Tchad en
pourcentage de (1987-2012)
Nombre des
|
1987-1993
|
1994-2000
|
2001-2006
|
2007-2012
|
Produits
|
|
|
|
|
Coton-fibre
|
61
|
57
|
19
|
28,47
|
Bétail
|
39
|
43
|
30
|
11,73
|
Pétrole
|
0
|
0
|
51
|
59,8
|
Source : données de la BEAC et l'INSEED
Ce tableau, montre l'évolution des exportations en
pourcentage pour les trois principaux produits d'exportation au Tchad.
S'agissant du coton-fibre et du bétail le pourcentage des exportations
décroît d'une période à une autre. En ce qui
concerne le pétrole, le pourcentage des exportations était de
zéro pour les deux premières périodes, tandis que pour les
deux autres périodes, il est passé de 51% à 59,8%.
1-2: Le processus de la diversification au Tchad
L'activité économique a connu une forte
croissance au début des années 2000 par les revenus provenant de
l'exportation du pétrole tchadien. De 2002 à 2003 l'expansion
économique a été en grande partie due au lancement du
projet pétrolier de Doba et la construction de l'oléoduc reliant
le bassin de Doba au terminal de Kribi sur la côte camerounaise. Cela
s'est traduit par une forte croissance du PIB pendant 4 à 5
années consécutives. La croissance globale du PIB a atteint une
moyenne de 10% par an de 2001 à 2003, nettement supérieure au
taux d'environ 2% réalisé pendant les trois années
précédentes. Elle atteint un record de plus de 33% en 2005 avant
de retomber à 8,5% en 2005. Les effets conjugués liés au
recul des activités d'extraction pétrolières, à la
baisse du prix du baril sur le marché mondial et aux troubles politiques
ont entraîné un recul de la croissance du PIB en 2007 (BEAC, FMI).
Cependant au niveau des zones rurales où vit plus de 80% de la
population, l'économie reste dominée par les activités
agricoles incluant les activités de
78
l'élevage, de la pêche et dans une moindre mesure
des activités sylvicoles. La part de l'agriculture et de
l'élevage dans le PIB est passée de près de 50% à
19,3% en 2006, la contribution du secteur des hydrocarbures dans le PIB pour la
même période était de 47,7% (BAD, OCDE, 2008).
Traditionnellement, le Tchad est un pays importateur net car
il dépend du monde extérieur pour satisfaire ses besoins
énergétiques, en biens d'équipement et en produits
manufacturés. Une partie des besoins alimentaires destinée plus
particulièrement aux populations urbaines est également
importée. Jusqu'en 2003, les principaux produits d'exportation formelle
du Tchad étaient: le coton brut (75% des exportations formelles) et la
gomme arabique (16%). Avec l'avènement du pétrole au Tchad
à partir de 2004 et les difficultés de la filière
cotonnière, l'élevage a supplanté progressivement le coton
et occupe la deuxième place des produits d'exportation.
En effet, le processus de la diversification de
l'économie au Tchad peut être apprécié à
travers l'évolution de la structure des exportations. Cette approche,
qui consiste à considérer la notion de la diversification de
l'économie comme étroitement liée à celle de la
dynamique de ses exportations, peut se justifier, compte tenu de sa structure
de production, dominée par l'exploitation et l'exportation de produits
de base (Gros et al, 2006) 141 . En matière d'exportation,
les statistiques officielles du Tchad, prennent en compte essentiellement, le
coton, les produits de l'élevage et la gomme arabique. Les exportations
des autres produits tels que l'arachide, le sésame, les oignons ou
l'ail, les céréales et une partie de la gomme arabique ne sont
littéralement pas inclues ni dans les statistiques de la BEAC, ni
même dans celui de l'Institut Tchadien de la Statistique et des Etudes
Démographique (INSEED). Dans les statistiques commerciales et la balance
de paiement de la BEAC, et de la Banque mondiale on ne trouve que les
exportations empruntant des circuits formels.
Paragraphe 2 : Les indicateurs de la diversification au
Tchad
Le débat sur la diversification trouve son origine aux
Etats-Unis et en Amérique latine, lors de la crise de l'entre-deux
guerres marquée par la chute spectaculaire du cours des matières
premières. Les arguments formulés en faveur de la diversification
ont progressivement inspiré les politiques commerciales et industrielles
des pays industrialisés puis, de manière plus large, les
politiques de développement des pays émergents jusqu'à
nos
141Banque de France. (2007), op. Cit., p. 116.
79
jours 142 . La diversification est un fait
désormais largement reconnu dans la littérature
économique, le niveau de revenu par habitant et le degré de
concentration sectorielle de l'activité économique
évoluent conjointement à long terme. En effet, la première
dimension de la diversification, qui capture le poids de chaque secteur dans
les exportations totales, est la plus standard. Dans cette approche, un pays
est considéré comme d'autant plus diversifié que la
dépendance limitée de ses exportations à un nombre
restreint de biens. A l'inverse, lorsqu'un, ou quelques-uns des biens,
représente(nt) une part élevée des exportations d'un pays,
celles-ci sont considérées comme concentrées et
constituent une source de vulnérabilité143.
Le lien théorique entre diversification et diminution
de la vulnérabilité est du même ordre que celui qui
explique la réduction attendue du risque d'un portefeuille financier
lorsque celui-ci est diversifié. Ainsi, comme le relèvent Imbs et
Wacziarg (2003) « la loi des grands nombres suggère que la
diversification devrait permettre de limiter l'effet macroéconomique
d'un choc sur un secteur spécifique ». En outre, face à
de faibles niveaux de développement, les pays se spécialisent
généralement sur des produits correspondant à leurs
dotations en ressources naturelles. Ce type de spécialisation renforce
la vulnérabilité associée à un haut degré de
concentration car le prix, les conditions de production et la demande pour ce
type de biens sont instables144. Dans ce paragraphe, nous allons
aborder quelques indicateurs de la diversification en (2-1) avant de les
mesurer en (2-2).
2-1: Quelques indicateurs de la diversification
Afin de bien tenir compte des effets des investissements
directs étrangers chinois sur la diversification de l'économie
tchadienne, nous avons choisi trois indicateurs qui sont: l'indice d'Ogive
(OGV), l'indice de Hirschman (H) et l'indice composite de spécialisation
(SPE) comptant parmi les taux de concentration les plus couramment
utilisés pour apprécier le degré de concentration ou de
diversification d'une économie.
? L'indice d'Ogive (OGV)
OGV = ? ( )
ou OGV = ? ( )
142 Idem
143 Christophe Cottet et Nicole Madariage. (2012),
macroéconomie et développement, AFD, Avril 2012
/n° 3 ; p. 4.
144 Idem.
80
Où Pi = (xi / X) est la part réelle du produit i
(xi) dans les exportations totales (X=Ó xi), N le nombre total des
produits exportés, et 1/N la part idéale des recettes
d'exportation qui est la part moyenne d'exportation de chaque produit.
i) Lorsque la valeur de l'OGV? 0; l'économie est
considérée comme étant fortement diversifiée
;
ii) Lorsque la valeur de l'OGV? élevée;
l'économie est relativement moins diversifiée.
? L'indice de Hirschman (H)
H =v? ( )
Où xi est la valeur à l'exportation d'un produit i,
X est le total des exportations, et N est le nombre de groupes de produits.
Ici, si la valeur de H est élevée, plus les
exportations sont concentrées sur un petit nombre des produits et
inversement.
? L'indice de Hirschman normalisé (NH)
v? v
NH =
v
Où Pi = , xi est la valeur des exportations du produit i,
X =? et N est le nombre
deproduits.
Si la valeur NH est proche de 1, cela représente une plus
forte concentration et inversement. ? L'indice agrégatif de
spécialisation (SPE)
SPE = ? ( )
Où xi représente l'exportation du produit i, X
le montant total des exportations et N le nombre de produits
exportés.
i) Si la valeur de SPE?1 ; cela indique la présence d'un
seul produit d'exportation ;
81
ii) Si la valeur de SPE?0 ; cela met en évidence le niveau
élevé de diversification
des exportations ;
2-2: La mesure de diversification
Pour mesurer le degré de la diversification de
l'économie tchadienne, nous avons calculé les indices suivants:
l'indice d'Ogive (OGV), l'indice de Hirschman normalisé (NH) et enfin
l'indice agrégatif de spécialisation (SPE) à partir des
données du tableau 3. En utilisant (le logiciel EXCEL) les
résultats obtenus sont donnés dans le tableau suivant.
Tableau 4: Indices de la diversification de l'économie
tchadienne
|
1987-1993
|
1994-2000
|
2001-2006
|
2007-2012
|
SPE
|
0,5242
|
0,5098
|
0,3862
|
0,4524
|
NH
|
0,1718
|
0,1582
|
0,0461
|
0,1053
|
OGV
|
0,0255
|
0,0186
|
0,0068
|
0,0396
|
Source : Tableau construit par l'auteur à partir des
données de la BEAC et INSEED
Soit le graphique suivant représentant
l'évolution des indices de la diversification de biens à
l'exportation du Tchad.
Graphique 4: Evolution des indices de la diversification de biens
à l'exportation du Tchad
SPE NH OGV
0,2
0,3
0,6
0,5
0,4
1987-1993 1994-2000 2001-2006 2007-2012
0,1
0
Source : Graphique réalisé par l'auteur à
partir des données de la BEAC et INSEED
82
Il convient de faire une représentation graphique de
l'évolution de ces indices par produit avant de porter un jugement sur
les résultats obtenus
Graphique 5 : Evolution des indices de la diversification de
l'économie tchadienne par produit
0,6
Série1 Série2 Série3 Série4
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
Indices
|
SPE
|
NH
|
OGV
|
Produits
|
1
|
2
|
3
|
? L'analyse comparative des indicateurs de la diversification
Les estimations de trois indices de la diversification de
l'économie tchadienne montrent clairement l'existence de deux phases. La
première phase est celle qui couvre la période 1987 à 2000
et la seconde s'étend sur la période 2001 à 2012.
- Prenons l'exemple de l'indice d'OGV, il passe de 0,0255
à 0,0186 dans la première phase et il s'établit entre
0,0068 et 0.0396 dans la deuxième phase. La courbe de l'indice d'OGV
dans le graphique montre une tendance à la baisse quand l'indice baisse
et tend vers zéro et inversement.
- En ce qui concerne l'indice NH, il passe de 0,1718 à
0,1582 dans la première phase et il s'établit entre 0,0461 et
0,1053 dans la deuxième phase. Cela montre également une tendance
à la baisse et inversement.
- Et enfin, il en est de même pour l'indice SPE
Dans la première phase les indices estimés
montrent une tendance au renforcement de la diversification économique.
Cependant, tous les indices estimés au cours de cette période
tendent vers zéro.
Par contre, dans la deuxième phase c'est-à-dire
la période 2001 à 2012, les indices qui sont estimés ont
connu une tendance à la hausse, prenons toujours l'exemple de l'indice
OGV, il est passé de 0,006 à 0,039. Cet accroissement se traduit
par un affaiblissement de la diversification économique, il en est de
même pour les deux autres indices. Cependant, l'économie
tchadienne présente une forte concentration dans son ensemble,
malgré
83
l'exploitation du pétrole, elle demeure plus ou moins
concentrée avec trois produits d'exportation seulement : le coton-fibre
dont les exportations ont évolué à un rythme presque
constant, le bétail, et le pétrole brut, nouveau produit
d'exportation apparu en 2003.Ce dernier produit est à l'origine de la
forte croissance des recettes d'exportation ces dernières années.
Ceci pourrait témoigner que malgré les différentes
stratégies qui ont été mises en place par les firmes
multinationales chinoises dans le cadre de leur implantation, l'économie
demeure toujours vulnérable. Elle est tributaire de secteurs
d'activités fondés sur l'exploitation et l'exportation des
ressources naturelles, son processus de diversification s'appuie sur un secteur
privé moins dynamique dominé par les activités
informelles, n'ayant pas l'accès à une main-d'oeuvre
qualifiée et évoluant dans un environnement institutionnel et
juridique défavorable. En définitive, les indices estimés
pour les périodes 2001-2006 et 2007-2008 sont :
- l'indice d'OGV passe de 0, 006 à 0,039 ;
- l'indice de NH passe de 0, 046 à 0, 105 ;
- et enfin, l'indice SPE passe de 0,386 à 0,452.
En effet, les indicateurs de la diversification estimés
confirment l'hypothèse selon laquelle les formes d'implantation des
firmes multinationales chinoises fondée sur la coopération et
l'exploitation d'opportunité d'investissement ne contribuent pas
à la diversification de l'économie tchadienne. Cette situation
pourrait s'expliquer par une forte concentration des entreprises chinoises
d'une part dans le secteur des ressources naturelles et d'autre part dans le
domaine des bâtiments et travaux publics. On observe aussi la
présence des entreprises chinoises privées dans presque tous les
secteurs de l'économie (import-export, hôtellerie, ventes des
objets fabriqués en chine, etc.).
Quoi qu'il en soit et quoi qu'il arrive les stratégies
d'implantation adoptées par les firmes multinationales chinoises dans le
cadre de leur internationalisation ne contribuent pas à la
diversification de l'économie tchadienne. Les investissements faits par
ces entreprises sont concentrés dans quelques secteurs (pétrole
et le BTP). Cependant, ce type d'investissement peut créer les
conditions nécessaires pour le développement de ce pays et
à long terme contribuer au processus de la diversification en stimulant
les activités économiques dans d'autres secteurs de
l'économie nationale.
84
Conclusion
A la lumière de cette étude qui s'achève,
il sied de rappeler que notre analyse a porté sur les stratégies
d'implantation des firmes multinationales chinoises au Tchad et leur
contribution à la diversification de l'économie tchadienne. Le
choix de ce thème de recherche part d'un constat que, les
multinationales chinoises s'implantent de plus en plus dans ce pays et
l'ampleur de ce phénomène attire l'attention des acteurs, tant
publics que privés en termes de retombées. L'investissement
direct étranger (IDE) réalisé par les multinationales
chinoises fait partie intégrante d'un système économique
international ouvert et efficace et constitue un des enjeux majeurs pour le
développement économique des nations. Les avantages qu'il procure
ne se manifestent pas de manière automatique et se répartissent
inégalement entre les nations, les secteurs et les collectivités
locales.
Les firmes multinationales chinoises ont fortement
augmenté leur présence en Afrique subsaharienne à partir
du milieu des années 2000, pour devenir un acteur important et
incontournable de la scène africaine. Les IDE chinois ont suscité
de nouveaux espoirs en Afrique: ils pourraient à la fois
représenter un financement additionnel nécessaire au
développement et, pour certains, leur spécificité sud-sud
suggère que les IDE chinois pourraient être plus profitables aux
pays d'accueil. Aujourd'hui la question de la diversification économique
est au coeur de l'actualité de tous les pays en voie de
développement. Les politiques nationales jouent un rôle important
dans le cadre de la diversification économique. C'est aux pays d'accueil
qu'il incombe de mettre en place les conditions nécessaires et de
renforcer les capacités humaines et institutionnelles susceptibles de
leur permettre d'atteindre certains niveaux de développement.
Notre étude a eu pour objectif principal d'analyser les
effets des stratégies d'implantation des firmes multinationales
chinoises sur la diversification de l'économie tchadienne. Pour ce
faire, nous avons choisi trois indicateurs: l'indice d'Ogive (OGV), l'indice de
Hirschman (H) et l'indice composite de spécialisation (SPE) qui sont les
plus couramment utilisés pour apprécier le degré de
concentration ou de diversification d'une économie. A partir de
l'estimation de ces indices, nous sommes parvenus à des résultats
importants. Les estimations de ces indices ont montré l'existence de
deux phases : la première phase est celle qui couvre la période
de 1987 à 2000 et la seconde est celle de 2001 à 2012. Durant la
première phase les indices estimés ont baissé, cela
suppose une tendance au renforcement de la diversification économique.
Par contre, dans la deuxième phase les indices
85
estimés ont connu une tendance à la hausse, cela
se traduit par un affaiblissement de la diversification économique.
Notre étude présente des limites dues à
la nature des données utilisées. En effet, comme nous avons
souligné ci-dessus, les entreprises chinoises ont réalisé
des investissements au Tchad dans presque tous les domaines de
l'économie. Malheureusement, la prise en compte de toutes ces dimensions
n'est pas toujours facile du fait qu'il est difficile de collecter toutes les
informations y relatives. De plus, les données utilisées pour
estimer les indicateurs sont prises dans le cadre global et ne concernent que
les grandes entreprises qui ont investi dans le pétrole, cela n'aurait
pas permis d'apprécier correctement l'apport des investissements directs
étrangers chinois à la diversification de l'économie
tchadienne. Nous souhaitons donc entreprendre les études dans ce sens
qui est d'autant plus essentiel pour la politique économique du fait
qu'elles pourront aider l'Etat dans sa prise de décision aux choix
judicieux pour ses investissements. Suite à ces résultats, nous
concluons que les stratégies d'implantation adoptées par les
firmes multinationales chinoises ne contribuent pas à la diversification
de l'économie tchadienne pour plusieurs raisons :
- les grandes entreprises chinoises ont investi uniquement
dans le domaine des
ressources naturelles (pétrole). En effet, il faut
quand même souligner qu'avant l'implantation de ces firmes, il existait
bien d'autres investisseurs dans ce secteur, ce qui fait que les effets
d'entraînement des investissements de ces entreprises ne sont pas
directement ressentis sur l'économie tchadienne en termes d'apport
d'éléments nouveaux;
- les investissements faits par les entreprises chinoises dans
le domaine des bâtiments et travaux publics ne contribuent pas au
processus de la diversification de l'économie. Par contre, ce type
d'investissements fournit à l'économie nationale des
infrastructures nécessaires qui peuvent faciliter la réalisation
de toute activité économique ;
- et enfin, on constate également une absence totale de
la politique du gouvernement dans le cadre de l'organisation de la
diversification économique du pays.
La diversification de l'économie a besoin d'un
environnement socioéconomique stable et un cadre juridique
approprié.
Tout travail scientifique a notamment pour but de contribuer
à la résolution d'un problème en vue d'assurer le bien-
être de la population. Nous ne pouvons pas terminer notre propos sans
formuler quelques recommandations. Compte tenu des limites ci-dessus, nous
suggérons ce qui suit pour les études ultérieures. Pour
pallier à ces insuffisances nous proposons, des
86
mesures de politique qui pourraient, si elles sont bien
appliquées permettront au Tchad d'amorcer le processus de sa
diversification économique.
y' Pour maximiser les effets d'entraînement des firmes
multinationales chinoises sur la diversification de l'économie
tchadienne, il faut promouvoir la politique de zones économiques
spéciales. Cependant, c'est cette politique qui a permis à la
Chine aujourd'hui d'être le plus grand importateur du monde. En effet,
cette politique peut être efficace dans le cas des pays africains et plus
particulièrement pour le Tchad;
y' L'Etat doit faire la promotion du secteur privé en
fonction des atouts dont dispose le pays pour attirer davantage les
investisseurs dans plusieurs domaines ;
y' Le pays doit investir dans des activités ayant une
intensité capitalistique assez élevée. L'industrie
manufacturière doit être développée pour pouvoir
exporter à terme des produits manufacturiers afin de modifier la
structure de ses exportations dominées par des produits agricoles,
l'élevage et le pétrole. Dans cette même lancée les
activités des principales industries du pays comme industries chimiques
du Tchad doivent être relancées et mises hors gestion politicienne
;
Et ainsi toute sorte d'industrie de substitution aux
importations doit être découragée si les avantages
comparatifs du pays ne les permettent pas. La promotion de l'industrie
nécessite une bonne politique de l'énergie car les nombreux
délestages de la SNE, découragent tout industriel voulant
s'installer au Tchad ;
y' Dans les grandes entreprises chinoises la main-d'oeuvre
qualifiée est chinoise et les emplois se font au détriment des
travailleurs tchadiens. On doit veiller à ce que les dépenses
d'éducation soient efficaces. Les formations doivent être
adaptées aux réalités du pays afin de renforcer les
capacités des ressources humaines dans le but de rechercher une
adéquation entre les programmes de formation et le marché du
travail.
y' Créer un environnement propice au commerce
extérieur en révisant les mesures tarifaires et non tarifaires
afin de réduire les coûts des transactions. Cette politique
d'ouverture économique permettra au Tchad de tirer profit des effets
bénéfiques de la mondialisation ;
y' Maîtriser le risque pays afin d'attirer plus les
investisseurs étrangers ;
y' La corruption est généralisée et elle
prend de plus en plus d'ampleur même dans la magistrature, le fait que la
justice soit intégralement contrôlée par l'exécutif
qui l'utilise à son gré ne peut pas faciliter l'environnement des
affaires ;
87
y' La transparence dans la passation des marchés
publics n'est pas ce qu'elle devrait être. La corruption est bien
présente dans ce domaine ;
y' Améliorer l'accès aux infrastructures et les
rendre plus abordables et fiables, particulièrement pour les
entreprises. Il s'agit entre autres d'abolir les innombrables péages le
long des routes, de réduire les tracasseries administratives
liées aux formalités de transport, de sécuriser les voies
de communication ;
y' Améliorer la coopération et le commerce au
niveau régional grâce à des meilleures connexions
transfrontalières des infrastructures.
Les solutions proposées dans cette étude ne sont
pas exhaustives. Il faut signaler également que l'étude sur les
effets des stratégies d'implantation des firmes multinationales
chinoises à la diversification de l'économie tchadienne est
beaucoup plus complexe, qu'on le croit réellement, d'autant plus que,
les effets sur cette dernière sont à la fois directs et
indirects. Le problème étant d'actualité, il serait
important qu'une attention particulière soit accordée à
une évaluation des effets directs et indirects L'analyse se complique
davantage du fait que cet impact dépend étroitement du mode
d'implantation du secteur d'activité, de la concurrence entre les FMN et
les firmes locales, et du degré du développement du pays
d'accueil.
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y' GALBRAITH J.R et al., (1986), organizing to implement
strategies of diversity and
globalization: The role of matrix designs, Human Resource
Management, spring, n°1.
y' HEC EURASIA Institue. L'internationalisation des entreprises
chinoises.
y' HELLENDORFF B., La Chine en Afrique : néocolonialisme
ou nouvel axe
coopération sud-sud ? Note d'Analyse du GRIP, 13
décembre 2010, Bruxelles.
y' INSEED. (2014), Essai d'analyse de la pauvreté non
monétaire.
93
V' LEVASSEUR S., (2002), Investissements directs à
l'étranger et stratégies des
entreprises multinationales.
V' MAINGUY C. et al., (2012), De la connaissance des IDE chinois
et de leurs effets en
Afrique subsaharienne, Colloque international du GEMDEV,
1e au 3 février 2012,
UNESCO, Paris.
V' Manuel de la balance de paiement, 5ème Edition, Fonds
monétaire international,
Washington, 1993.
V' MARKS S., (2007), Introduction in African Perspectives on
China in Africa.
Pambazuka : Nairobi.
V' Ministère du commerce et de l'industrie (2011),
Investir au Tchad.
V' OCDE. (2012), Point sur le soutien apporté à
l'investissement dans les infrastructures
africaines.
V' PNUD. (2012), Perspective économique en Afrique.
V' PNUD. (2015), Perspective économique au Tchad.
V' SERVANT J. C., (2005) La Chine à l'assaut de
marché africain : le Monde
diplomatique.
V' The Economist. Asia: On Safari; Chinese Summitry. 4novembre
2006.
VI) SITES INTERNET CONSULTES
>
http://english.focacsummit.org/2006-11/05/content_5167.htm:
Liens entre l'Afrique
subsaharienne et la Chine dans une période de fluctuation
économiques
>
http://hzs.mofcom.gov.cn/accessory/201109/1316069658609.pdf:
Bases de données
du Ministère du Commerce Chinois
>
http://www.voltairenet.org/article162985.html:
Discours d'ouverture de la quatrième
conférence ministérielle du forum de
coopération Chine-Afrique (FOCAC), 8
novembre
>
www.africaneconomicoutlook.org:
Perspectives économiques en Afrique 2012 : Le
cas du Tchad
>
www.endacacid.org:
Troisième sommet Chine-Afrique des Chefs d'Etats et des
gouvernements de 2012 tenue à
Beijing/Pékin(Chine)
>
www.aefjr.org: Examen des politiques
commerciales au Tchad
>
www.fmprc.gov.cr/zflt/fra/jlydh/t1024662.htm:
L'interview de l'Ambassadeur chinois
au Tchad
94
?
http://perspective.ushebook.ca/bilan/servlet/BMTendancestatPays?langue=fr&codePa
ys=COG&codetheme=2&codestat=FP.CPI.TOTL: Bases des données
sur les investissements de la Banque Mondiale
95
ANNEXES
Annexe 1:L'aide publique chinoise au
développement du Tchad
Secteur récipiendaire
|
Projet
|
Valeur (en millions de dollars)
|
Type d'aide/ Institution donatrice
|
Agriculture
|
Projet rizicole de
Mayo-Kebbi Ouest
|
Non disponible
|
Assistance technique
|
Projet maraîcher de
Koundoul
|
Non disponible
|
Assistance technique
|
Activités de Fabrication
|
Cimenterie de
BAOARE
|
92,33
|
Prêt préférentiel de la China EXIM Bank
|
Raffinerie
|
Non Disponible
|
Prêt préférentiel de la China EXIM Bank
|
Construction
|
9,7 km de routes
urbaines à
N'Djamena avec assainissement et éclairage public
|
30
|
Don du Gouvernement Chinois
|
Deux écoles primaires
|
Non disponible
|
Don du Gouvernement Chinois
|
Electricité et eau
|
Amélioration de la
production
d'électricité à N'Djamena
|
Non disponible
|
Don du Gouvernement Chinois
|
Télécommunications
|
CHAD CDMA 2000 (Téléphonie fixe sans fil)
|
25,06
|
Prêt préférentiel de la China EXIM Bank
|
Téléphonie mobile
|
20
|
Prêt préférentiel de la China EXIM Bank
|
Education
|
Bourses de
perfectionnement des
cadres et d'études universitaires
|
Non disponible
|
Don du Gouvernement Chinois
|
Santé et action Sociale
|
Assistance médicale à l'Hôpital de la
Liberté de N'Djamena
|
Non disponible
|
Assistance technique
|
(Annulation de la dette)
|
|
34
|
Don du Gouvernement Chinois
|
Source: Ministère de l'Economie et du Plan/Direction
des Ressources Extérieures et de la Programmation dans Symphorien Ndang
TABO et al., (2008), op. Cit., p 11.
96
Annexe 2: Evolution des flux d'IDE au Tchad en millions de
dollars (1980-2012)
Année
|
IDE
|
1980
|
-0,43
|
1981
|
-0,11
|
1982
|
-0,12
|
1983
|
-0,09
|
1984
|
9,186266
|
1985
|
53,650094
|
1986
|
28,200501
|
1987
|
8,162068
|
1988
|
1,289247
|
1989
|
18,739324
|
1990
|
9,4
|
1991
|
4,239528
|
1992
|
1,960771
|
1993
|
15,160902
|
1994
|
27,074699
|
1995
|
32,61157
|
1996
|
39,466174
|
1997
|
44,293941
|
1998
|
216,96618
|
1999
|
24,524971
|
2000
|
115,172422
|
2001
|
459,866392
|
2002
|
924,11921
|
2003
|
712,663455
|
2004
|
466,793492
|
2005
|
-99,342519
|
2006
|
-278,414
|
2007
|
-321,655
|
2008
|
466,131
|
2009
|
375,65
|
2010
|
312,956184
|
2011
|
281,85968
|
2012
|
342,783046
|
Perspective /Source : Banque Mondiale
Lien :
http://perspective.ushebook.ca/bilan/servlet/BMTendancestatPays?langue=fr&codePays=CO
G&codetheme=2&codestat=FP.CPI.TOTL.
97
Annexe 3 : Flux d'investissement chinois au Tchad en millions de
dollars (2003-2011)
Année
|
2003*
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
2010
|
2011*
|
IDE
|
0
|
0
|
2,71
|
1,61
|
0,75
|
9,47
|
51,21
|
2,13
|
-12,48
|
Source: Statistical Bulletin of China's outward foreign direct
investment (MOFCOM, 2010)
Lien:
http://hzs.mofcom.gov.cn/accessory/201109/1316069658609.pdf
(*) : Les données de 2003 et 2011 sont proviennent du
site :
Lien :
http://www.pairault.fr/sinaf/index.php/statistiques/412-flux-dinve
Note : Les données de 2003 à 2006 ne prennent en
compte que des flux d'IDE non financiers.
Annexe 4: Stocks d'investissement chinois au Tchad en millions
de dollars (2003-2011)
Année
|
2003*
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
2010
|
2011*
|
Stock
|
0
|
0
|
2,71
|
12,78
|
13,53
|
25,36
|
76,57
|
80
|
108,12
|
d'IDE
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Source: Statistical Bulletin of China's outward foreign direct
investment (MOFCOM, 2010)
Lien:
http://hzs.mofcom.gov.cn/accessory/201109/1316069658609.pdf
(*) : Les données de 2003 et 2011 sont recueillies sur
le site :
Lien :
http://www.pairault.fr/sinaf/index.php/statistiques/412-flux-dinve
(**) : Les stocks de 2010 sont recalculés après
ajustement des données historiques.
Note : Les données de 2003 à 2006 ne prennent en
compte seulement que des stocks d'IDE
non financier.
Annexe 5: Exportations chinoises à destination du Tchad
en millions de dollars (2000-2012)
TRALAC
Année
|
Exportation
|
2000
|
1
|
2001
|
0
|
2002
|
2
|
2003
|
2
|
2004
|
6
|
2005
|
15
|
2006
|
14
|
2007
|
65
|
2008
|
80
|
2009
|
154
|
2010
|
321
|
2011
|
94
|
2012
|
172
|
Source: Trade Law Centre
Lien :
http://www.tralac.org/2013/08/14/africa-china-trading-relationship/
98
Annexe 6: Importations chinoises en provenance du Tchad en
million de dollars (2000-2012) TRALAC
Année
|
Exportation
|
2000
|
0
|
2001
|
0
|
2002
|
2
|
2003
|
3
|
2004
|
223
|
2005
|
200
|
2006
|
260
|
2007
|
84
|
2008
|
41
|
2009
|
65
|
2010
|
496
|
2011
|
264
|
2012
|
221
|
Source: Trade Law Centre
Lien :
http://www.tralac.org/2013/08/14/africa-china-trading-relationship/
99
TABLE DES MATIERES
Dédicace ....I
Remerciements II
Sigles et Abréviations ..IV
Sommaire VI
Introduction 1
PREMIERE PATRIE : LES ANALYSES THEORIQUES DE L'IMPLANTATION
DES
FIRMES MULTINATIONALES CHINOISES 6
CHAPITRE I : L'aperçu général sur la
firme multinationale 8
Section 1 : Le fondement théorique de l'implantation de
firme multinationale 8
Paragraphe 1 : Les définitions et théories de la
firme multinationale 9
1-1: Les définitions de la firme multinationale 9
1-2: Les théories de la firme multinationale 11
Paragraphe 2 : Les déterminants de l'implantation de la
firme multinationale dans un pays
étranger
|
14
|
2-1: Les apports de la théorie des coûts de
transaction
|
14
|
2-2: Les déterminants de l'implantation selon la
théorie de Dunning
|
15
|
Section 2 : Les formes et organisations de la firme
multinationale
|
17
|
Paragraphe 1 : Les formes d'implantation de la firme
multinationale
|
17
|
1-1: L'exportation indirecte
|
....18
|
1-2: L'implantation par association
|
19
|
Paragraphe 2 : Les organisations de la firme multinationale
|
..20
|
2-1: La complexité structurelle de l'organisation de la
firme multinationale
|
....21
|
2-2: Les typologies structurelles de l'organisation de la firme
multinationale
|
22
|
100
CHAPITRE II : Les stratégies d'implantation des firmes
multinationales chinoises au
Tchad .27
Section 1 : Le fondement de la politique chinoise au Tchad
27
Paragraphe 1 : Les causes d'implantation des firmes
multinationales chinoises au Tchad 28
1-1: Les causes politiques
|
29
|
1-2: Les causes économiques
|
..30
|
Paragraphe 2 : La diplomatie tchado-chinoise au coeur de la
mondialisation
|
32
|
2-1:La coopération sino-tchadienne
|
33
|
2-2: L'aide publique chinoise au Tchad
|
34
|
Section 2 : Les modes et stratégies mises en place par la
Chine pour accompagner ses
entreprises à investir à l'étranger
|
.36
|
Paragraphe 1 : Les modes d'implantation des FMN chinoises au
Tchad
|
37
|
1-1: Le mode d'implantation des entreprises publiques
|
..38
|
1-2: Le mode d'implantation des entreprises privées
|
..39
|
Paragraphe 2 : Les stratégies mises en place par la Chine
pour accompagner ses entreprises à
investir à l'étranger
|
40
|
2-1: La stratégie de financement
|
.41
|
2-2 : Le modèle angolais
|
.43
|
DEUXIEME PARTIE : LES EFFETS DES STRATEGIES
D'IMPLANTATION DES FIRMES MULTINATIONALES CHINOISES SUR LA DIVERSIFICATION
DE
L'ECONOMIE TCHADIENNE .....46
CHAPITRE III : Les investissements directs étrangers
chinois au Tchad ..48
Section 1 : Les politiques d'attractivité
d'investissements directs étrangers au
Tchad 48
Paragraphe 1 : L'attractivité d'investissements directs
étrangers au Tchad .....49
101
1-1: La politique économique .49
1-2: La politique des réformes ....52
Paragraphe 2 : Les ressources naturelles 53
2-1: Le secteur pétrolier ...54
2-2: Les ressources hors pétrole 55
Section 2 : Les investissements chinois au Tchad ...56
Paragraphe 1 : La typologie d'investissements directs
étrangers au Tchad .57
1-1: L'origine d'investissements directs étrangers au
Tchad 57
1-2: La répartition sectorielle d'investissements
directs étrangers au Tchad 58
Paragraphe 2 : Les caractéristiques des investissements
chinois au Tchad .60
2-1: Les secteurs d'investissements des entreprises chinoises
au Tchad 61
2-2: Les flux d'investissements chinois entrant au Tchad 62
CHAPITRE IV : L'apport d'investissements directs
étrangers chinois à la diversification de
l'économie tchadienne ....65
Section 1 : L'économie tchadienne avant et après
l'exploitation du pétrole ...65
Paragraphe 1 : La doctrine économique 66
1-1: L'analyse historique de la croissance économique
...67
1-2: L'analyse des agrégats macroéconomiques
...69
Paragraphe 2 : L'économie tchadienne à
l'ère pétrolière 70
2-1 : Les caractéristiques de l'économie
tchadienne à l'ère pétrolière 71
2-2: L'impact de l'exploitation du pétrole sur
l'économie tchadienne 72
Section 2 : Les effets d'investissements directs
étrangers chinois sur la diversification de
l'économie tchadienne 74
102
Paragraphe 1 : La dynamique de la diversification ....75
1-1: L'évolution des exportations au Tchad 76
1-2: Le processus de la diversification au Tchad 77
Paragraphe 2 : Les indicateurs de la diversification au Tchad
....78
2-1: Quelques indicateurs de la diversification 79
2-2: La mesure de diversification ....81
Conclusion 84
Bibliographie 88
Annexes 95
Table des matières 99
|