Contribution socio-anthropologique à l'analyse de la protection des civils par les forces de défense républicaine dans les conflits armés en RCA( Télécharger le fichier original )par Blandine Laurette NGNOLO Institut des Relations Internationales du Cameroun - Master 2 2015 |
SECTION 2 : CADRE ILLEGAL DE L'ENCADREMENT DES CIVILS EN PERIODE CONFLICTUELLEAyant reçu mandat des Etats signataires des conventions de Genève, le CICR a un mandat double à savoir : agir en faveur des victimes de guerre, c'est-à-dire protéger et assister les victimes de la guerre et veiller au respect du DIH ; son mandat est à l'origine du développement et de la diffusion du DIH. Ainsi pour fêter les cinquante ans des conventions de Genève le CICR a fait mener une étude portait sur les origines et comportement dans la guerre : comprendre et prévenir les violations du DIH et le sondage « people in war », cette consultation avait été menée par le GreenbergResearch Inc. Cette enquête a été menée auprès des porteurs d'armes de douze pays. Les résultats de cette étude sont présentés par Daniel Muñoz-Rojas et Jean-Jacques Frésard.115(*) Il s'agit dans cette section de présenter les résistances à l'application du DIH en période conflictuelle, pour ce faire nous allons nous référer aux résultatsd'une étude demandée par le CICR. Cette étude avait pour objectif de contribuer à améliorer les politiques et les stratégies de communication du CICR, dans le but de prévenir efficacement les violations du DIH. Cet objectif s'articule autour d'une double interrogation : a. Quels sont les facteurs qui influencent de manière décisive le comportement des combattants en situation de respecter ou de violer le DIH ? b. Y a-t-il adéquation entre les stratégies de prévention développées par le CICR et les réponses apportées à la question ci-dessus ? Les causes de violations du DIH ont fait l'objet d'une tentative de catégorisation, ces causes sont 1) le caractère criminogène de la guerre ; 2) la définition des buts de la guerre ; 3) les raisons d'opportunité ; 4) les raisons psychologiques ; 5) les raisons liées à la personnalité des individus. Ces catégories ne sont bien sur pas étanches ni exclusives les unes des autres. L'étude est principalement centrée sur les raisons psychosociologiques telles que l'influence du groupe, l'insertion dans une structure hiérarchique ou le désengagement moral car elles semblent universellement présentes dans tout groupe de combattants armés qui prennent part à une guerre. Sur la base d'un cadre conceptuel initial reprenant les principales connaissances sociologiques et psychologiques dans ce domaine, des modèles relatifs au changement de comportement du combattant ont été élaborés. Ces modèles sont fondés sur les trois hypothèses suivantes : 1) comme les civils, les combattants reconnaissent et partagent les normes humanitaires, car elles seraient universelles ; 2) les violations du DIH impliquent des processus sociaux et individuels de désengagement moral déclenchés par deux mécanismes principaux : la justification des comportements et la déresponsabilisation ; 3) dans les situations de conflit armé, les mécanismes de déresponsabilisation sont induits principalement par le conformisme au groupe et l'obéissance aux ordres. A. LES CARACTERISTIQUES DES COMBATTANTS· Le conformisme au groupe Les combattants sont soumis à des phénomènes de comportement de groupe qui entrainent la dépersonnalisation, la perte de l'indépendance, et un fort conformisme. Cette réalité est favorable au processus de dilution de la responsabilité individuelle du combattant dans la responsabilité collective de son unité de combat. Par nature, l'individu n'est pas un tueur, le groupe l'est. De nombreuses études ont montré que les hommes au combat ne sont généralement pas motivés par la haine ou la peur, mais par la pression du groupe : estime pour leurs camarades, défense de leur réputation collective et volonté de contribuer aux succès du groupe. Le combattant n'est plus un individu totalement autonome, mais il est soumis aux règles du groupe, au respect des leaders et au conformisme. Les études militaires sur la cohésion qui peut exister au sein d'une unité montrent que les relations qui lient entre eux les combattants sont souvent plus fortes que celles qui existent au sein d'un couple. Cette réalité est favorable au processus de la dilution de la responsabilité individuelle du combattant dans la responsabilité collective de son unité de combat. A ces constations il faut ajouter des observations plus générales. L'individu dans le groupe a une tendance « naturelle» à valoriser son groupe et à dévaloriser les autres, à attribuer aux autres membres de son groupe des qualités dont les membres des autres groupes sont démunis. Le groupe, par définition génère des préjugés, des simplifications et des discriminations. Il faut insister sur le fait que lorsque l'autre groupe est déclaré ennemi, ces tendances seront plus vives, et le groupe pourra assez facilement tolérer le glissement vers des comportements criminels, et peut être même finir par les valoriser et les encourager. · L'obéissance à l'autorité Les combattants sont également soumis à un processus de déplacement de leur responsabilité individuelle vers la responsabilité de leurs supérieurs hiérarchiques. Les violations du DIH peuvent découler des ordres donnés par cette autorité, mais elles semblent le plus souvent liées à l'absence d'ordres explicites de ne pas violer le droit ou à l'autorisation implicite d'adopter des comportements répréhensibles. · La spirale de la violence Les combattants qui ont participé aux hostilités et ont été soumis à des situations traumatiques et de violence (contre eux-mêmes, leurs proches ou leurs biens) sont à court terme, amenés à perpétrer, eux aussi, des violations du DIH. Ces situations de violence résultent de deux processus qui fusionnent en spirale de la violence : 1) Le cycle de la vengeance, qui entraine le combattant « victimisé » à commettre des violations du DIH ; 2) L'enchainement des violations suite à une première transgression des principes humanitaires. Ces dynamiques ne doivent pas être négligées quand on connait le fort taux de « victimisation » parmi les combattants engagés dans les actions armées. · Les comportements pathologiques Les violations du DIH ne sont généralement pas l'oeuvre d'individus malades, sadiques ou irrationnels. La guerre est par essence criminogène. Certains individus, très minoritaires, profitent des circonstances pour donner libre cours à leurs pulsions et commettent des atrocités par plaisir. * 115 Origines et comportement dans la guerre : comprendre et prévenir les violations du DIH, consulté le 18 Novembre 2014, https://www.icrc.org/fre/resources/documents/publication/p0758.htm |
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