Les états et la construction de l'union africaine: le cas de la Libye et du Sénégal( Télécharger le fichier original )par Romaric TIOGO Université de Dschang - Master II 0000 |
II- INTERET DE L'ETUDESur le plan heuristique, ce travail est riche d'un double intérêt. D'abord, un intérêt socio-politique. Car, il apporte une réponse rafraîchissante à ceux qui s'intéressent de près comme de loin à l'évolution actuelle de l'Union et au processus d'intégration des Etats et peuples africains dans divers domaines politique, économique, social, etc. Puisqu'il faut le relever, des idées reçues tendent à admettre l'immobilisme du berceau de l'humanité dont on ne parle généralement que lorsqu'il est en difficulté. Ensuite, un intérêt académique. Ce travail s'inscrit avant tout dans le cadre de la recherche fondamentale. Il émane de la curiosité du chercheur néophyte que nous sommes de révéler comment les acteurs étatiques construisent concrètement l'UA. Cette perspective n'est que relativement analysée dans les travaux antérieurs. En effet, à l'image de l'OUA à laquelle elle a succédé, l'UA ne cesse de déchaîner des passions depuis sa création. Certains en parlent soit pour la tourner en dérision, soit pour en relever les faiblesses. D'autres l'abordent pour vanter ses mérites, mais à condition qu'elle atteigne les objectifs qu'elle s'est fixée. Contrairement à ces derniers, notre travail se révèle plus être un travail d'architecte. Notre ambition étant de clarifier comment l'UA se construit davantage à travers l'action du Sénégal et de la Libye. Etude qui n'a pas encore été faite jusque-là. Pour s'en convaincre, il est fondamental de passer en revue, mais sans exhaustivité aucune, les travaux déjà réalisés sur l'UA. D'entrée de jeu, citons l'ouvrage de Jean-Emmanuel PONDI, Reine Afrique ou Racines de l'union africaine34(*) qui retrace sous la forme d'une pièce théâtrale la naissance de l'OUA dans une atmosphère électrique, puis de l'UA sommet après sommet. L'on peut nettement apprécier le rôle de divers personnages dans ce processus de transformation, en l'occurrence celui de l'acteur Kadhafi qui y occupe une position centrale. Somme toute, cet ouvrage paraît inachevé par rapport à notre projet. Car, il se limite non seulement uniquement à la transformation de l'OUA en UA, mais aussi et surtout, ne met pas suffisamment l'accent sinon sur d'autres acteurs clés qui ont également contribué à cette transformation, du moins sur le rôle de tous ces acteurs dans le processus de construction de l'UA. Ensuite, évoquons le mémoire de Djibril FOFANA , L'Union africaine et le projet des Etats-Unis d'Afrique : identification et analyse des facteurs entravant la concrétisation de cet idéal panafricain35(*), qui revient sur un certain nombre de facteurs qui freinent la construction des Etats-Unis d'Afrique à savoir le dépérissement de la démocratie, les conflits armés et les divergences idéologiques des acteurs en jeu. S'il est vrai que les Etats-Unis d'Afrique sont l'objectif ultime des deux Etats dont les actions sont mises en évidence dans notre étude, ce travail ne montre pas comment ces Etats procèdent ou entendent procéder pour y parvenir. D'où la nécessité d'insister sur cet aspect. Nous pouvons également citer la thèse de DJUIDJE KOUAM Reine, Les dynamiques de l'ordre international africain : un espace d'interdépendance en mutation. Une analyse sociologique de la succession de l'organisation de l'Unité africaine par l'Union africaine36(*), l'une des premières thèses soutenue sur l'UA. Elle traite essentiellement du déroulement de la transformation de l'OUA en UA et met en exergue les enjeux, les acteurs, les mécanismes et les résolutions de cette mutation. Analyse pertinente, mais partielle aussi, car antérieure à l'étude que nous menons, elle se limite au rôle des acteurs de la mutation de l'OUA. Dans une perspective constructiviste, il convient de montrer comment les acteurs ainsi abordés construisent actuellement cette Union. Nous ne saurons continuer cette lecture sans mentionner le mémoire d'ESSONO Etiennette Ghislaine, La commission de l'Union Africaine : entre ambition et réalité37(*), qui aborde un organe spécifique de l'objet à savoir la commission de l'Union Africaine, « clé de voûte » de l'organisation qui souffre aussi bien des problèmes financiers que concurrentiels, tant avec la présidence de l'Union qu'avec les chefs d'Etat membres. Lesquelles difficultés ne lui permettent pas de mener à bien sa mission pour une intégration économique, politique et sociale réussie du continent africain. Dans le cadre de notre étude, nous comptons aller au-delà de l'aspect purement organique qui, ainsi abordé, réduit notre champ d'exploration. Pour mettre un terme à cette revue de la littérature, citons l'ouvrage de Guy MVELLE, L'Union Africaine. Fondements, organes, programmes et actions38(*), qui analyse entre autres le contexte et les codéterminants qui ont présidé à la création de l'UA au détriment de l'OUA qui ne répondait plus aux nouvelles exigences économiques et sécuritaires de l'heure et les raisons du rejet par certains de ses pairs du projet fédérateur de l'Afrique à l'image des États-Unis d'Amérique proposé par Monsieur Kadhafi, qui aurait des allures « calculatrices ». Parlant des limites de l'organisation, l'auteur relève une kyrielle d'obstacles qui freinent le processus d'intégration du continent à savoir le peu de cas fait à l'endroit de la société civile qui joue pourtant un rôle dans la résolution des conflits en Afrique, et à l'idée de coopération décentralisée entre pays africains issue des sommets de Windhoek, de Cotonou et de Maputo ; l'acceptation sans conditionnalité des Etats au sein de l'Union et la question du foisonnement des organisations sous-régionales. Enfin, l'auteur étudie un projet phare comme le NEPAD (Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique), mais sans donner plus de précision sur ses fondateurs. A l'instar de nombreux travaux, ce livre ne traite guère du rôle de tous les acteurs que nous mobilisons dans le processus de construction de l'UA et encore moins des enjeux qui les animent tel que nous comptons les aborder. C'est ce que nous comptons mettre en évidence, pour mieux comprendre le comportement des acteurs qui s'investissent pour cette organisation internationale africaine. De tout ce qui précède, le constat est patent. Les acteurs clés qui font de la construction de l'UA l'objet de leur bréviaire quotidien restent sinon méconnus du moins très peu abordés eu égard à leurs actions et stratégies pour parvenir à une Union forte qui défende des intérêts communs. Ce qui amplifie davantage notre soif de combler ce manque par la réalisation des recherches sur la nouvelle voie que nous balisons. L'essentiel de la tâche étant, comme l'a si bien relevé SCHOPENHAUER, « de ne point contempler ce que nul n'a encore contemplé mais de méditer comme personne n'a encore médité sur ce que tout le monde a devant les yeux »39(*). D'où la spécificité de notre question. * 34 PONDI Jean Emmanuel, Reine Afrique ou racines de l'Union Africaine, théâtre, édition clé, Yaoundé 2007, 30 p. * 35 FOFANA Djibril, l'Union Africaine et le projet des Etats-Unis d'Afrique: identification et analyse des facteurs entravant la concrétisation de cet idéal panafricain, Mémoire de Maîtrise en science politique, Université Gaston Berger de Saint- Louis, disponible sur http : // www.memoireonline.com, consulté le 3 janvier 2010. * 36 DJUIDJE KOUAM Reine, « Les dynamiques de l'ordre international africain: UN espace d'interdépendance en mutation. Une analyse sociologique de la succession de l'organisation de l'Unité Africaine par l'Union africaine: Thèse de doctorat de 3ème cycle en Relations Internationales, option diplomatie, Yaoundé, IRIC, mars 2003. * 37 ESSONO Etiennette Ghislaine, La commission de l'Union africaine: entre ambition et réalité, Mémoire de DESS en Relations Internationales, option diplomatie, Yaoundé, IRIC, février 2007. * 38 L'Union Africaine. Fondements, organes, programmes et actions, L'Harmattan, 2007. * 39 Cité par GRAWITZ Madeleine, Méthodes des sciences sociales, 10e édit., Editions Dalloz, 1996, Paris, p.317. |
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