CHAPITRE 3 : CADRE EMPIRIQUE
SECTION 1 : Etat des lieux sur l'agriculture
béninoise
1-1-Les grands traits caractéristiques de
l'agriculture béninoise
Le Bénin est constitué de huit zones agro
écologiques dans lesquelles se développent les activités
diversifiées de productions végétales, animales,
halieutiques et forestières. Sur les 11 millions d'hectares (ha) de
surface disponible, un peu moins de 60% sont aptes à l'agriculture. La
taille moyenne de l'exploitation familiale est estimée à 1,7 ha
pour 7 personnes. Toutefois, on note que 34% des exploitations couvrent moins
de 1ha et seuls 5 % des exploitations du sud et 20% de celles du nord disposent
de plus de 5 ha.
La principale culture de rente est le coton
qu a atteint une production record de 427.000 tonnes durant la campagne
2004/2005, avant de retomber à 191.000 tonnes en 2005-2006. L'avenir du
coton est actuellement très préoccupant au regard (i) des
dysfonctionnements au sein des structures issues de la réforme de la
filière, (ii) de la dégradation de l'environnement et (iii) des
fluctuations des cours mondiaux, avec des incidences fâcheuses sur les
revenus ruraux et sur l'économie du pays. Les cultures d'ananas et de
noix de cajou avec respectivement 110.000 tonnes et plus de 40.000 tonnes au
cours de la campagne agricole 2004-2005, connaissent une certaine
émergence aux côtés du coton. Le palmier à huile est
passé aussi de 130.000 tonnes d'huile en 1994 à environ 280 000
tonnes en 2005. Ces niveaux de production sont largement insuffisants pour
satisfaire un marché national et régional très
demandeur.
Les principales productions vivrières
(maïs, manioc, sorgho/mil, igname, niébé et
arachide) permettent de couvrir globalement les
besoins alimentaires, mais restent encore largement en deçà des
potentialités offertes par les conditions écologiques du pays.
Le riz, dont la demande est en augmentation croissante en est
un exemple, avec une production qui bien qu'ayant passé de 16.545 T en
1995 à 73.000 T en 2005, laisse place à des importations massives
(378.000 T en 2005) destinées à la consommation interne (60.000
T) et aux réexportations. Le maïs vient au premier rang des
cultures vivrières et connaît une
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évolution croissante : de 523.000 tonnes en 1995
à 841.000 tonnes en 2005. Son utilisation multiple pour la fabrication
des farines infantiles et des provendes nécessite d'en garantir un solde
vivrier acceptable.
Quant aux tubercules et racines, notamment l'igname et le
manioc, leur production a renoué avec une croissance
régulière au cours de cette décennie, grâce à
l'effet conjoint d'une amélioration du rendement et
l'élargissement des surfaces cultivées. Le niveau de la
qualité des produits dérivés reste encore à
améliorer sensiblement pour leur accès plus facile aux
marchés.
Le sous-secteur de l'élevage est
marqué par les pratiques traditionnelles d'élevage des
espèces bovines, ovines, caprines, porcines et des volailles,
malgré les résultats assez concluants des projets
d'élevage moderne au cours de la dernière décennie.
L'effectif des animaux d'élevage estimé en 2004 à
1.826.300 bovins, 2.300.000 petits ruminants, 293.200 porcins et 13.200.000
volailles, ne garantit pas une couverture complète des besoins en
protéines animales, notamment la viande, le lait et les oeufs. Le niveau
actuel d'importation des viandes de volaille congelées (8.800 tonnes en
2005), traduit la forte dépendance du Bénin en produits
carnés. La persistance de certaines épizooties et les risques
d'émergence de nouvelles, nécessitent une surveillance
épidémiologique permanente. Les élevages d'espèces
non conventionnelles (escargot, aulacode, lapin, etc.) se développent de
plus en plus, mais à un rythme qui ne compense pas encore les
déficits. Par ailleurs, les élevages modernes qui se sont
développés en zone périurbaine pour la production d'oeufs
et de poulet de chair, subissent de plein fouet la concurrence des importations
de volaille congelée et d'oeufs vendus à vil prix sur le
marché local.
Le sous-secteur de la pêche occupe
directement 50.000 pêcheurs et 20.000 mareyeurs (en majorité des
femmes) et procure des emplois à environ 300.000 personnes. Au cours de
la période 1998-2005, la production a stagné autour de 40.000
tonnes par an et les importations de poissons congelés sont
passées de l'ordre de 20.000 tonnes en 2001 à 45000 Tonnes en
2005. Par ailleurs, l'exportation des crevettes jadis porteuse d'espoir a
baissé, passant de plus de 1000 tonnes à moins de 700 tonnes
durant la même période. Les plans d'eau ne sont pas
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exploités à bon escient, tandis que
l'aquaculture et la valorisation de la production halieutique sont encore
très peu développées.
Bien que n'étant pas structurelle au Bénin,
la question de la sécurité alimentaire est
préoccupante du fait de l'existence de poches d'insécurité
alimentaire grave au niveau de certains groupes à risques, notamment les
petits exploitants agricoles du sud, les populations de pêcheurs, et les
familles à faible revenu dans les zones urbaines. Compte tenu de la
croissance démographique et surtout celle des zones urbanisées,
le maintien du taux d'auto-approvisionnement actuel exigera un énorme
effort d'intensification, notamment pour les céréales et les
tubercules.
D'importants travaux sont menés par les composantes du
système national de recherche agricole que sont
l'Institut National des Recherches Agricoles du Bénin (INRAB), les
entités universitaires nationales, les ONG à vocation de
recherche ainsi que les centres internationaux de recherche (IITA, IPGRI,
ADRAO) basés au Bénin. Toutefois, les mécanismes et
mesures d'accompagnement pour assurer l'adoption au niveau paysan des
innovations technologiques développées, constituent une des
faiblesses du système.
Le système de vulgarisation agricole
mis en place vise le renforcement de la liaison entre les institutions
de recherche, les services de vulgarisation et les producteurs agricoles.
L'accent est mis sur l'Approche Participative Niveau Village (APNV) dont le
pilotage est essentiellement du ressort des Centres Régionaux de
Promotion Agricole (CeRPA). Mais ces derniers restent confrontés au
problème d'insuffisance et/ou d'inadéquation des ressources
humaines d'encadrement technique, depuis les départs massifs à la
retraite ou les départs ciblés dans le cadre des Programmes
d'Ajustement Structurel (PAS), situation aggravée par le gel des
recrutements à la fonction publique.
En dépit des investissements consentis par les
pouvoirs publics, les besoins des producteurs en infrastructures et
équipements de base, notamment pour la mécanisation
agricole et la maîtrise de l'eau ne sont pas couverts. Le petit outillage
traditionnel reste prépondérant, avec pour corollaire la grande
pénibilité des travaux. Beaucoup de zones agricoles demeurent
enclavées, ce qui constitue un handicap au développement des
productions. Les
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aménagements hydro agricoles réalisés
à grands frais se sont révélés peu adaptés
et ont été pour la plupart peu valorisés, du fait des
problèmes techniques, de gestion et de commercialisation. Par ailleurs,
les activités de post-production ou de post-capture (stockage,
conservation, transformation et commercialisation), connaissent un certain
regain, mais les équipements modernes de stockage et de transformation
font défaut, ce qui occasionne d'importantes pertes post récolte.
La plupart des anciennes industries agroalimentaires publiques,
handicapées par les problèmes financiers, d'approvisionnement
et/ou de gestion, ont dû être liquidées, privatisées
ou en voie de l'être.
Les besoins de financement du monde rural
sont énormes et l'offre actuelle essentiellement basée
sur la micro-finance avec des crédits à 80% concentrés sur
le court terme, reste insignifiante. Les besoins d'investissements productifs
en agriculture qui nécessitent des crédits à moyen et long
termes sont quasi insatisfaits. La grande masse de petits producteurs
gestionnaires d'exploitation de type familial, sont ainsi exclus du
financement. En dehors de la filière coton où le recouvrement est
assuré, les banques sont réticentes à financer les
filières agricoles, car jugées à risques
élevés. Par ailleurs, non seulement les subventions
octroyées à travers le Budget National sont nettement
inférieures aux normes recommandées dans la sous région,
mais elles sont difficiles à mobiliser à temps requis, du fait de
l'inadaptation des procédures actuelles de décaissement par
rapport aux spécificités du secteur agricole.
Les aspects liés au genre,
c'est-à-dire relatifs aux activités qui absorbent la plus grande
proportion des groupes vulnérables que sont les femmes et les jeunes,
n'ont pas suffisamment bénéficié de l'attention requise
pour permettre à cette catégorie d'acteurs de jouer correctement
sa partition dans les programmes de développement du secteur
agricole.
1-2-Politiques de développement et performance
du secteur agricole
1-2-1- Evolution de la politique du secteur
agricole
L'environnement de l'agriculture, fortement lié
à l'environnement économique, n'a cessé d'évoluer
au Bénin, depuis la période précoloniale jusqu'à
l'indépendance, mais surtout, après l'indépendance. Cette
évolution a influencé les orientations politiques, les options et
stratégies adoptées successivement par les gouvernements, les
différentes missions et rôles
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conférés aux différents acteurs (l'Etat
lui-même et les autres acteurs publics comme privés du secteur
agricole dans une logique de complémentarité et de synergie), les
éléments du cadre institutionnel de gestion du secteur ainsi que
l'organisation mise en place chaque fois. Au fur et à mesure, cette
dynamique a fait apparaitre de nouveaux acteurs et renforcer d'autres, pendant
que des réflexions ont soutenu une série de reformes et de
restructurations (leçons apprises, expériences
capitalisées, etc.). Les éléments-clés de cette
évolution peuvent être cerné à travers la
synthèse suivante qui balaie quatre périodes : de 1960 à
1972, de 1972 à 1990, de 1991 à 2005 et de 2006 à nos
jours.
v Période de 1960 à
1972
Cette période est caractérisée par la
volonté de valoriser les potentialités locales à travers
une meilleure organisation des forces de production (coopératives et
groupements villageois, jeunes ruraux), un renforcement du cadre juridique, une
mise en ordre et en cohérence progressive des interventions et des
structures, et un début de « pilotage » du secteur. Des
éléments de stratégies et de visions claires sont apparus,
et sont opérationnalisés dans des actions d'envergure, des
innovations, dans le but d'impulser des changements qualitatifs.
v Période de 1972 à
1990
Il est marqué (1974) par l'option socialiste de
développement basée sur le socialisme scientifique. L'Etat
reprend plus de force et intervient comme acteur direct (en s'appuyant sur des
sociétés d'Etat) de développement. La volonté est
affichée de construire une économie nationale indépendante
avec comme objectifs :
- d'assurer l'autosuffisance alimentaire et l'équilibre
nutritionnel des populations,
- d'assurer la fourniture de matières premières
nécessaires aux industries de transformation existantes et à
promouvoir,
- de dégager des surplus exportables et,
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Bénin
- d'améliorer rapidement le niveau de vie des populations
rurales.
La plupart des actions fortes initiées à la fin
de la période précédente vont s'accentuer et donner des
résultats, qui trouvent un terreau fertile en la volonté
d'édifier une économie rurale de type socialiste pour induire des
changements en profondeur dans le secteur rural.
v Période de 1991 à
2005
En effet, la politique agricole actuelle du Bénin a
commencé à prendre corps entre les années 1990 et 1991 au
moment de la difficile conjoncture économique que le pays a connue avec
l'ensemble des pays de la zone franche Afrique. Sous l'influence des
institutions de Bretton Woods, le Bénin s'est engagé dans une
nouvelle voie marquée par le désengagement de l'Etat d'un certain
nombre de ses fonctions et l'implication du secteur privé et des
Organisations Paysannes (OP) dans le développement agricole.
La signature de la Lettre de Déclaration de Politique
de Développement Rural (LDPDR) inaugure cette nouvelle période.
La chronologie des documents de politique et les points essentiels se
présentent comme suit :
- En 1991, l'Etat se désengage des activités de
production, de commercialisation, de transformation et transfère les
compétences aux privés et aux OP. La LDPDR a rendu possible la
mise en oeuvre du Programme de Restructuration du Secteur Agricole (PRSA) et la
tenue de la Table Ronde sur le secteur rural en septembre 1995.
- En Mars 1994, la FAO appuie l'Etat béninois dans
l'élaboration d'un document de stratégie et de plan d'actions
pour le Sous Secteur de l'Elevage. En 1999/2000, la Déclaration de
Politique de Développement Rural (DPDR) complète la LDPDR en
précisant le contenu et les conditions de désengagement de l'Etat
des fonctions de production, de transformation et de commercialisation. Ce
document fixe les rôles des différents acteurs à savoir
l'Etat, les collectivités locales, les privés, les OP et les
partenaires techniques financiers. La DPDR tient compte de la
décentralisation en fixant un cadre pour la déconcentration des
activités des Ministères vers les Communes.
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Bénin
- En Avril 2000, le Schéma Directeur du
Développement Rural (SDDR) aborde d'une part la politique et la
stratégie générale du développement du secteur
agricole et d'autre part, les stratégies sous sectorielles. La politique
générale concerne neuf (09) thèmes que sont, entre autres,
la sécurité alimentaire et nutritionnelle, la création
d'un environnement social et économique favorable au
développement agricole, la promotion du secteur privé du domaine
agricole, la recherche formation et vulgarisation agricole, l'adaptation des
fonctions de contrôle et d'appui de l'Etat aux besoins des producteurs et
des opérateurs du secteur. La dimension sous - sectorielle fixe le
cadrage macro économique du secteur rural et précise les sous
programmes vers lesquels les ressources intra sectorielles devront être
orientées à savoir la diversification et la relance des
filières, les infrastructures agricoles, la recherche et la
vulgarisation. En Juillet 2001, le SDDR est rendu opérationnel avec
l'élaboration du Plan Stratégique Opérationnel (PSO). En
Septembre 2001, le Bénin adopte sa Politique de Promotion de la Femme
dans le secteur agricole et Rural (PPFR). Cette politique est une
déclinaison de la Politique Nationale de Promotion de la Femme (PNPF)
adoptée en janvier 2001.
v Période de 2006 à nos
jours
En Juillet 2006, sous l'impulsion du nouveau régime qui
manifeste le désir de faire du Bénin un pays émergent et
de l'agriculture le fer de lance de l'économie, les cadres du secteur
agricole ont élaboré après des rencontres et ateliers de
réflexions le « Plan Stratégique pour la Relance du Secteur
Agricole (PSRSA) ». Ce plan constitue un cadre temporel de cinq (5) ans
pour le développement d'actions spécifiques qui découlent
des politiques précédemment définies. Ce document
définit non seulement les stratégies de développement de
nouvelles filières porteuses, mais aussi aborde clairement les
indicateurs de développement dans le secteur. Le PSRSA constitue aussi
le document de référence du Programme National d' Investissement
Agricole (PNIA) qui a été soumis à l'appréciation
des acteurs et des partenaires des niveaux national, régional et
international au cours de la table ronde tenue à cet effet à
Cotonou en octobre 2009. En effet, la problématique de
développement du secteur agricole met en relief trois défis
majeurs portant sur (i) la couverture des besoins alimentaires, (ii)
l'accroissement des revenus, et (iii) l'amélioration de
l'attractivité de
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Bénin
l'activité agricole et du milieu rural. Ces trois
défis confèrent au secteur agricole le double rôle
d'accélération de la croissance économique et de la
contribution à la réduction de la pauvreté, d'où la
vision de "Faire du Bénin, une puissance agricole dynamique à
l'horizon 2015, compétitive, attractive, respectueuse de
l'environnement, créatrice de richesse répondant aux besoins de
développement économique et social de la population".
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